Discours 2004 - Lundi 26 avril 2004

  

Monsieur le Cardinal!
Eminents représentants
de l'Association nationale des Municipalités italiennes!

1. Je suis heureux de vous souhaiter une cordiale bienvenue à cette rencontre, qui s'inscrit dans le cadre des célébrations commémorant le centenaire de la naissance du Professeur Giorgio La Pira. Je salue chacun de vous, ainsi que les villes que vous représentez ici. Je salue en particulier le Cardinal Ennio Antonelli, Archevêque de Florence, ainsi que le Maire de cette ville, et Président de l'ANCI, Monsieur Leonardo Domenici, que je remercie des paroles qu'il m'a adressées, en évoquant le service rendu par Giorgio La Pira à la cause de la coexistence fraternelle entre les nations. A cet égard, j'ai apprécié que, précisément pour rappeler de manière tangible son effort visant à favoriser l'amitié entre les peuples qui se réclament d'Abraham - juifs, chrétiens et musulmans -, votre Association ait décidé d'offrir une aide concrète au Caritas Baby Hospital de Bethléem.

2. Je vous exprime ma chaleureuse reconnaissance pour ce geste généreux, qui honore comme il se doit la mémoire de Giorgio La Pira, figure éminente de la politique, de la culture et de la spiritualité du siècle qui vient de s'achever.

Face aux puissants de la terre, il exposa avec fermeté ses idées de croyant et d'homme aimant la paix, en invitant ses interlocuteurs à un effort commun pour promouvoir ce don fondamental dans les différents milieux: dans la société, dans la politique, dans l'économie, dans les cultures et entre les religions.

Dans la théorie et dans la pratique politique, Giorgio La Pira ressentait l'exigence d'appliquer la méthodologie de l'Evangile, en s'inspirant du commandement de l'amour et du pardon. Les "Congrès pour la paix et la civilisation chrétienne" qu'il organisa à Florence de 1952 à 1956, dans le but de favoriser l'amitié entre chrétiens, juifs et musulmans, sont demeurés emblématiques.

3. Dans une lettre à son ami Amintore Fanfani, il écrivait des paroles d'une surprenante actualité: "Les hommes politiques sont des guides pour la société, auxquels le Seigneur confie, à travers des techniques différentes selon les époques, le mandat de conduire les peuples vers la paix, l'unité, la promotion spirituelle et civile de chaque peuple et de tous les peuples ensemble" (22 octobre 1964).

L'extraordinaire expérience de Giorgio La Pira fut celle d'un homme politique et d'un croyant, capable d'unir la contemplation et la prière à l'activité sociale et administrative, avec une prédilection envers les pauvres et les personnes qui souffrent.

Très chers Maires, puisse ce témoignage lumineux inspirer vos choix et vos actions quotidiennes! En suivant l'exemple de Giorgio La Pira, mettez-vous généreusement au service de vos communautés, en prêtant une attention particulière aux jeunes générations, et en favorisant également leur progrès spirituel. Ne manquez pas de cultiver ces valeurs humaines et chrétiennes qui forment le riche patrimoine idéal de l'Europe. Celui-ci a donné vie à une civilisation qui, au cours des siècles, a favorisé l'apparition de sociétés authentiquement démocratiques. Privée de fondements éthiques, la démocratie risque de se détériorer avec le temps, voire de disparaître.

Grâce à la contribution de tous, le rêve d'un monde meilleur peut devenir réalité. Que Dieu accorde à l'humanité de voir réalisée cette prophétie de paix!

J'accompagne ce souhait par la prière, tandis que je vous bénis tous de tout coeur.



À LA CONGRÉGATION POUR L'EDUCATION CATHOLIQUE POUR LE XXV ANNIVERSAIRE DE LA CONSTITUTION SAPIENTIA CHRISTIANA

Mardi 27 avril 2004



Monsieur le Cardinal,
vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
très chers frères et soeurs!

1. Je suis très heureux que vous ayez voulu célébrer le vingt-cinquième anniversaire de l'importante Constitution apostolique Sapientia christiana, sur laquelle j'ai apposé ma signature pratiquement au début de mon Pontificat. Il s'agit d'une Constitution que j'ai profondément à coeur, car elle concerne de près l'exercice du "munus docendi" de l'Eglise. La "tâche d'enseigner" revêt une importance particulière dans la réalité actuelle, marquée, d'une part, par un progrès technique impressionnant et, de l'autre, par les contradictions, les scissions et les tensions les plus variées.

En réalité, l'Evangile n'exerce son effet bénéfique et durable que dans la mesure où, à travers son annonce constante - "à temps et à contretemps" (cf. 2Tm 4,2) -, il influence les façons de penser et pénètre la culture en profondeur (cf. Const. ap. Sapientia christiana, Préambule I). La vocation élevée qui caractérise les Universités et les Facultés ecclésiastiques est précisément de se consacrer de toutes leurs forces à rassembler et à réunir le monde de la science et de la culture autour de la vérité de la foi, pour faire redécouvrir l'ordre salvifique du dessein divin dans la réalité de ce monde.

2. Je me réjouis du nombre croissant de Centres ecclésiastiques d'enseignement académique. Leur première mission demeure l'approfondissement et la transmission du Mystère divin, que le Christ nous a révélé. C'est l'Esprit Saint, répandu dans l'Eglise, qui nous introduit dans ce Mystère et qui nous guide pour le pénétrer toujours plus profondément à travers l'étude (cf. He He 6,4).

Parmi les Facultés ecclésiastiques, celles de théologie, de droit canonique et de philosophie, "en considération de leur nature propre ainsi que de leur importance pour l'Eglise" (Const. ap. Sapientia christiana, art. 65), revêtent un prestige et une responsabilité particulières. Mais, outre ces disciplines fondamentales, les Facultés ecclésiastiques couvrent de nombreux autres domaines, comme celui de l'histoire ecclésiastique, de la liturgie, des sciences de l'éducation, de la musique sacrée.

Un effort important a été fourni ces dernières années pour répondre aux besoins actuels: on a consacré, par exemple, une attention particulière à la bioéthique, aux études islamiques, à la mobilité humaine, etc. C'est pourquoi je ne peux qu'encourager les initiatives qui visent à approfondir les liens qui existent entre la Révélation divine et les domaines toujours nouveaux du savoir dans la réalité actuelle.

3. Aujourd'hui, plus que jamais, les Universités et les Facultés ecclésiastiques doivent jouer un rôle dans le "grand printemps" que Dieu prépare pour le christianisme (cf. Enc. Redemptoris missio RMi 86). L'homme contemporain est plus attentif à certaines valeurs: la protection de la dignité de la personne, la défense des plus faibles et des laissés-pour-compte, le respect de la nature, le refus de la violence, la solidarité mondiale, etc. A la lumière de la Constitution apostolique Sapientia christiana, les Institutions académiques de l'Eglise sont engagées à cultiver cette sensibilité en accord avec l'Evangile, la Tradition et le Magistère. On sait à quel point le monde contemporain est menacé par des fractures toujours plus profondes, notamment entre les pays riches et les pays pauvres. Il s'agit de fossés qui ont pour origine l'éloignement de Dieu de la part de l'homme.

Dans diverses Encycliques, j'ai cherché à indiquer la route pour réaliser la réconciliation en profondeur entre la foi et la raison (cf. Fides et ratio ), entre le bien et la vérité (cf. Veritatis splendor), entre la foi et la culture (cf. Redemptoris missio ), entre les lois civiles et la loi morale (cf. Evangelium vitae ), entre l'Occident e l'Orient (cf. Slavorum apostoli), entre le Nord et le Sud (cf. Centesimus annus ), etc. Il est nécessaire que les institutions culturelles ecclésiastiques accueillent ces enseignements, les étudient, les appliquent et en développent les conséquences. En harmonie avec leur vocation, elles peuvent ainsi contribuer à guérir l'homme de ses peurs et de ses déchirements internes.

4. On connaît bien les menaces actuelles de l'individualisme, du pragmatisme, du rationalisme, qui s'étendent même dans les milieux qui ont pour tâche la formation. Les institutions culturelles ecclésiastiques s'efforceront d'unir toujours l'obéissance de la foi à l'"audace de la raison" (Fides et ratio FR 48), en se laissant guider par le zèle de la charité. Les enseignants ne doivent pas oublier que l'activité de l'enseignement est inséparable de l'engagement d'approfondissement de la vérité, en particulier de la vérité révélée. Ils ne doivent donc pas dissocier la rigueur de leur activité universitaire de l'ouverture humble et disponible à la Parole de Dieu, écrite ou transmise, en se rappelant toujours que l'interprétation authentique de la Révélation a été confiée "au seul Magistère vivant de l'Eglise", qui exerce cette tâche au nom de Jésus Christ (Const. Dei Verbum DV 10).

5. En ce vingt-cinquième anniversaire de la Constitution apostolique Sapientia christiana, je désire remercier chaleureusement tous ceux qui contribuent à l'accomplissement de la mission ecclésiastique de l'enseignement et de la recherche scientifique dans l'Eglise: les recteurs, les doyens et les directeurs d'Universités et Facultés ecclésiastiques, le corps enseignant et le personnel auxiliaire, ainsi que la Congrégation pour l'Education catholique et, en son sein, le Bureau pour les Universités. J'adresse à chacun l'expression de ma reconnaissance pour tout le travail accompli avec un généreux dévouement.

J'encourage également tous à poursuivre leur importante mission d'évangélisation par la compréhension de la Révélation, en continuant à rechercher cette "synthèse vitale" des vérités révélées et des valeurs humaines qui est constitutive de la "sagesse chrétienne" (Const. apost. Sapientia christiana, Préambule I). Le monde d'aujourd'hui en a profondément besoin.

6. Alors que je vous assure de mon souvenir dans la prière pour votre travail, je donne volontiers à tous et à chacun une Bénédiction apostolique particulière.



AUX ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DES ETATS-UNIS (RÉGION IV) EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Jeudi 29 avril 2004


Chers frères Evêques,

1. Je vous adresse un cordial salut dans le Seigneur, Evêques des provinces ecclésiastiques de Baltimore et de Washington, "bien-aimés de Dieu et saints par vocation" (cf. Rm 1,7). Puissent votre pèlerinage aux tombes des saints Pierre et Paul et cette visite au Successeur de Pierre vous fortifier dans la foi catholique, qui nous vient des Apôtres (cf. Prière eucharistique I), et dans le témoignage joyeux de la grâce du Christ Ressuscité!

Cette année, au cours de mes rencontres avec les divers groupes d'Evêques des Etats-Unis qui accomplissent leur visite "ad limina Apostolorum", je désire réfléchir sur le mystère de l'Eglise et, en particulier, sur l'exercice du ministère épiscopal. Je souhaite que ces réflexions puissent servir de point de départ à votre méditation et votre prière personnelles et contribuer ainsi à un discernement pastoral bénéfique au renouveau et à l'édification de l'Eglise qui est aux Etats-Unis.

Commençons donc par une réflexion sur le munus sanctificandi de l'Evêque, c'est-à-dire le service à la sainteté de l'Eglise du Christ, qu'il est appelé à offrir en tant qu'annonciateur de l'Evangile, administrateur des mystères de Dieu (cf. 1Co 4,1) et père spirituel du troupeau confié à ses soins.

2. La mission de sanctification de l'Evêque trouve son origine dans la sainteté indéfectible de l'Eglise. Etant donné que "le Christ a aimé l'Eglise [et] s'est livré pour elle, afin de la sanctifier" (Ep 5,25-26), celle-ci est dotée d'une sainteté infaillible, devenant à son tour "dans le Christ et par le Christ [...] la source et l'origine de toute sainteté" (Lumen gentium LG 47). Cette vérité fondamentale de la foi, réaffirmée chaque fois que l'on récite le Credo, doit être comprise et appréciée plus profondément par tous les membres du Corps du Christ, car elle constitue une partie fondamentale de la conscience que l'Eglise a d'elle-même, ainsi que la base de sa mission universelle.

Croire en sa propre sainteté est en premier lieu, de la part de l'Eglise, une humble confession de la fidélité miséricordieuse de Dieu à son plan de salut dans le Christ. Considérée dans cette optique, la sainteté de l'Eglise devient une source de gratitude et de joie pour le don entièrement gratuit de la rédemption et de la vie nouvelle que nous avons reçue dans le Christ, à travers la prédication apostolique et les sacrements de la nouvelle et éternelle Alliance. Renés dans l'Esprit Saint et devenus des fils adoptifs du Père dans son Fils bien-aimé, nous sommes devenus une royauté de prêtres, une nation sainte (cf. Ex Ex 19,6 Ap 5,10), appelés à nous offrir nous-mêmes "en hostie vivante, sainte, agréable à Dieu" (Rm 12,1), en intercession pour la famille humaine tout entière.

Dans le même temps, la sainteté de l'Eglise sur terre demeure réelle bien qu'imparfaite (cf. Lumen gentium LG 8). Sa sainteté est à la fois un don et un appel, une grâce constitutive et une invitation à la fidélité constante à cette grâce. Le Concile Vatican II, comme fondement de son programme pour le renouveau du témoignage du Christ apporté par l'Eglise au monde, a proposé à tous les baptisés l'idéal élevé de l'appel universel à la sainteté de Dieu. Le Concile a réaffirmé que "l'appel à la plénitude de la vie chrétienne et à la perfection de la charité s'adresse à tous ceux qui croient au Christ" (Lumen gentium LG 40) et il a invité tous les membres de l'Eglise à reconnaître avec honnêteté le péché et le besoin d'une conversion constante sur le chemin de la pénitence et du renouveau.

La grandeur de la vision de foi de la sainteté infaillible de l'Eglise et la reconnaissance réaliste de la condition de pécheurs de ses membres doit inspirer chacun à s'engager plus profondément à la fidélité dans la vie chrétienne. En tant qu'Evêques, nous sommes invités en particulier à un discernement constant à propos de l'orientation et de l'objectif de notre activité de ministres de la grâce du Christ. Le défi qui nous est lancé, ainsi qu'à l'Eglise tout entière, par le Concile et par le grand Jubilé, demeure plus que jamais actuel: la vie de chaque chrétien et toutes les structures de l'Eglise doivent clairement viser à la recherche de la sainteté.

3. La recherche de la sainteté personnelle doit se trouver au centre de la vie et de l'identité de chaque Evêque. Il doit reconnaître son propre besoin d'être sanctifié, alors qu'il se consacre à la sanctification des autres. L'Evêque lui-même est tout d'abord, et avant tout, un chrétien - vobiscum sum Christianus (cf. Saint Augustin, Sermo 340.1) - appelé à l'obéissance de la foi (cf. Rm 1,5), consacré par le baptême et doté d'une vie nouvelle dans l'Esprit Saint. Dans le même temps, par la grâce de son ordination et le caractère sacré qu'elle confère, chaque Evêque occupe la place du Christ lui-même et agit en sa personne (cf. Lumen gentium LG 21). Il est donc appelé à suivre un chemin de sainteté spécifique (cf. Pastores gregis ): l'âme de son apostolat doit être la charité pastorale, qui conforme son coeur au coeur du Christ dans un amour sacrificiel pour l'Eglise et pour tous ses membres.

Le dernier Synode des Evêques a insisté sur le fait que la sanctification objective, qui dérive de l'ordination et de l'exercice du ministère épiscopal, doit coïncider avec la sanctification subjective, dans laquelle l'Evêque, avec l'aide de la grâce de Dieu, doit progresser constamment (cf. Pastores gregis ). Le principe unificateur du ministère de l'Evêque doit donc être sa contemplation du visage du Christ et sa proclamation de l'Evangile du salut: une interaction dynamique de prière et de travail qui enrichira spirituellement son activité extérieure, tout autant que sa vie intérieure.

4. En effet, le Synode a invité les Evêques à devenir des auditeurs de la Parole de Dieu toujours plus attentifs, à travers la prière quotidienne et la lecture contemplative des Saintes Ecritures. En vue du renouveau de l'Eglise dans la sainteté, il est fondamental que l'Evêque ne soit pas seulement une personne qui contemple; il doit également enseigner la voie de la contemplation (cf. Pastores gregis ). Sa prière devrait être alimentée, par-dessus tout, par l'Eucharistie: "Non seulement lorsqu’il se trouve devant le Peuple de Dieu comme sacerdos et pontifex, mais également quand il consacre une part assez importante de son temps à l'adoration du Saint-Sacrement" (cf. ibid., ). Afin que cette prière atteigne son sommet et son accomplissement dans l'Eucharistie, elle doit également être alimentée en ayant régulièrement recours au Sacrement de la Pénitence et, de manière particulière, en célébrant la Liturgie des Heures. Toute sa vie de prière, qu'elle soit personnelle ou liturgique, deviendra ainsi une source de fécondité apostolique, car elle est présentée au Père dans l'Esprit Saint comme intercession pour tout le Corps du Christ.

C'est pour cette raison que l'Evêque doit cultiver une spiritualité ecclésiale, "car tout dans sa vie tend à édifier avec amour la Sainte Eglise" (Pastores gregis ). Au début du récent Synode des Evêques, j'ai voulu relier cette attitude de service à la communauté ecclésiale, à l'adoption d'un style de vie qui imite la pauvreté du Christ, et j'ai invité les Evêques à "vérifier à quel point se trouve, dans l'Eglise, la conversion personnelle et communautaire à une pauvreté évangélique effective" (Homélie d'ouverture, 30 septembre 2001, n. 3). Je vous encourage à présent, vous et vos frères Evêques, à accomplir un tel discernement à propos de l'exercice pratique du ministère épiscopal dans votre pays, dans le but d'assurer qu'il soit toujours plus clairement considéré comme une forme de service sacrificiel au sein du troupeau du Christ. Cela portera certainement des fruits abondants, en donnant une plus grande liberté intérieure dans l'exercice du ministère, un témoignage plus évangélique de Jésus Christ, qui "dans la pauvreté et la persécution a opéré la rédemption" (Lumen gentium LG 8), et une plus grande solidarité avec les luttes et les souffrances des pauvres.

5. Je suis profondément convaincu que, dans une Eglise constamment appelée au renouveau intérieur et au témoignage prophétique, l'exercice de l'autorité épiscopale doit être édifié sur le témoignage de la sainteté personnelle. Le grand défi de la nouvelle évangélisation, à laquelle l'Eglise est appelée de nos jours, exige une crédibilité qui dérive de la fidélité personnelle à l'Evangile et aux exigences du disciple chrétien. Dans les mémorables paroles de Paul VI, "c'est donc par sa conduite, par sa vie, que l'Eglise évangélisera tout d'abord le monde, c'est-à-dire par son témoignage vécu en fidélité au Seigneur Jésus, de pauvreté et détachement, de liberté face aux pouvoirs de ce monde, en un mot, de sainteté" (Evangelii nuntiandi EN 41).

Alors que nous méditons dans la foi sur le dessein de Dieu pour parvenir à une famille humaine réconciliée et devenue une seule chose dans le Christ, dont l'Eglise est le sacrement et le présage prophétique, nous pouvons percevoir toujours plus clairement le rapport inséparable entre la sainteté et la mission de l'Eglise (cf. Redemptoris missio RMi 90). Une partie fondamentale de la nouvelle évangélisation doit donc consister en un nouveau zèle dans la recherche de la sainteté, qui inspire toutes nos initiatives et qui trouve son expression concrète dans un renouveau de la foi et de la vie chrétienne. Ne négligeons pas l'invitation prophétique adressée à toute l'Eglise à travers l'expérience du grand Jubilé: l'Eglise est appelée à offrir une véritable "éducation à la sainteté", adaptée aux exigences de tous, et à assurer que chaque communauté chrétienne devienne une authentique école de prière et de sanctification personnelle (cf. Novo Millennio ineunte NM 33).

6. Tel est donc le grand défi qui est lancé à l'Eglise à l'aube du nouveau millénaire et le chemin sûr pour son renouveau intérieur authentique. Alors que la communauté catholique des Etats-Unis cherche, sous votre direction, à relever ce défi, je vous assure de mes prières afin que vous tous, ainsi que tout le clergé, les religieux et les fidèles laïcs confiés à vos soins pastoraux, puissiez croître chaque jour en sainteté et devenir un véritable levain de l'Evangile dans la société américaine.

Chers frères, dans vos efforts pour exercer votre difficile ministère de sanctification au sein de l'Eglise qui est en Amérique, vous avez reçu la bénédiction d'un extraordinaire modèle de sainteté épiscopale, saint John Neumann, qui a consacré sa vie à servir son troupeau de façon généreuse et humble. Inspirés par son exemple et guidés par ses prières, puissiez-vous croître chaque jour dans la grâce de votre ministère, afin d'accomplir toujours la tâche parfaite de la charité pastorale (cf. Lumen gentium LG 41). En vous confiant à son intercession, je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique, en signe de joie et de paix dans le Seigneur.



À UNE DÉLÉGATION DE LA VILLE DE DUBROVNIK (CROATIE)

Jeudi 29 avril 2004  


Cher frère dans l'épiscopat,
Madame le Maire,
Chers frères et soeurs!

1. Je vous accueille avec une grande joie. Soyez les bienvenus!

La raison de votre visite est la remise du document relatif à la citoyenneté honoraire, que la Ville de Dubrovnik a voulu me conférer pour confirmer les liens profonds et pluriséculaires qui l'unissent au Pape, ainsi que pour commémorer la Visite pastorale que j'ai eu la joie d'accomplir le 6 juin de l'année dernière. Je me souviens encore avec émotion des divers moments de mon pèlerinage apostolique au cours duquel, à Dubrovnik précisément, j'ai proclamé bienheureuse une illustre fille de la Croatie: Marija de Jésus Crucifié Petkovic, originaire de Blato à Korcula.

2. Il me revient à l'esprit qu'au terme de la Messe célébrée en cette circonstance, j'avais adressé un remerciement particulier à cette ville bien-aimée. Je renouvelle également ces vifs remerciements pour votre très chaleureuse hospitalité.

Je suis également reconnaissant et heureux que vous ayez voulu me compter au nombre des citoyens de l'antique et belle ville de Dubrovnik, authentique perle de l'Adriatique croate, centre d'une culture millénaire imprégnée par la foi catholique et marquée par une fidélité constante au Successeur de Pierre, même dans des périodes très difficiles. Puisse ce patrimoine culturel et religieux se développer et croître encore à l'avenir, en portant d'abondants fruits pour la ville de Dubrovnik elle-même et pour la nation croate tout entière.

3. Que sur les habitants de Dubrovnik et sur ceux de la région de Dubrovnik-Neretva, ainsi que sur tous les Croates, veillent la Très Sainte Mère de Dieu, invoquée sous le nom de Madone du Grand Voeu baptismal croate, ainsi que saint Joseph et saint Blaise.

Dieu bénisse Dubrovnik qui, à partir d'aujourd'hui, est également ma ville, ainsi que toute la terre croate.

Loués soient Jésus et Marie!



AUX PARTICIPANTS À L’ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DE L'ACADÉMIE PONTIFICALE DES SCIENCES SOCIALES

Vendredi 30 avril 2004



Eminences,
Excellences,
Chers membres de l'Académie,

1. Je vous salue tous avec affection et estime, tandis que nous célébrons le dixième anniversaire de l'Académie pontificale des Sciences sociales. Je remercie votre nouveau Président, le Professeur Mary Ann Glendon, et je lui présente mes meilleurs voeux au début de ses fonctions. Dans le même temps, j'exprime ma profonde gratitude au Professeur Edmond Malinvaud pour son travail dévoué au service de l'Académie dans l'étude des questions si difficiles que sont le travail et le chômage, les formes d'inégalité sociale, la démocratie et la mondialisation. Je suis également reconnaissant à Mgr Marcelo Sánchez Sorondo pour ses efforts en vue de rendre le travail de l'Académie accessible à un plus large public à travers les ressources des communications modernes.

2. Le thème que vous étudiez actuellement - celui des relations entre générations - est étroitement lié à votre recherche sur la mondialisation. Par le passé, il allait de soi que les enfants, devenus adultes, devaient prendre soin de leurs parents. La famille était le premier lieu de la solidarité entre générations. Il y avait la solidarité du mariage lui-même, dans le cadre duquel les époux se donnaient l'un à l'autre pour le meilleur et pour le pire, et s'engageaient à s'offrir une assistance mutuelle pour toute la vie. Cette solidarité du couple marié s'est bientôt étendue aux enfants, dont l'éducation exigeait un lien solide et durable. Cela a ensuite conduit à la solidarité entre les enfants adultes et leurs parents âgés.

Actuellement, les relations entre les générations connaissent des changements significatifs dus à divers facteurs. Dans de nombreux domaines, on assiste à un affaiblissement des liens du mariage, qui est souvent perçu comme un simple contrat entre deux personnes. Les pressions exercées par la société de consommation peuvent entraîner les familles à détourner leur attention du foyer vers le lieu de travail ou vers d'autres activités sociales. Les enfants sont parfois perçus, même avant leur naissance, comme un obstacle à l'épanouissement personnel de leurs parents, ou sont considérés comme l'objet d'un choix parmi d'autres. Les relations entre générations s'en trouvent alors affectées, car de nombreux enfants, devenus adultes, laissent aujourd'hui à l'Etat ou à la société en général le soin de s'occuper de leurs parents âgés. L'instabilité des liens du mariage dans certains milieux sociaux a également conduit à une tendance croissante qui entraîne les enfants adultes à prendre leurs distances vis-à-vis de leurs parents et à déléguer à des tiers l'obligation naturelle et le commandement divin d'honorer son père et sa mère.

3. Etant donné l'importance fondamentale de la solidarité dans l'édification de sociétés humaines saines (cf. Sollicitudo rei socialis, nn. 38-40), j'encourage votre étude de ces phénomènes importants et j'exprime l'espoir qu'elle conduira à une plus grande reconnaissance de la nécessité d'une solidarité qui traverse les générations et unit les personnes et les groupes, à travers une assistance et un enrichissement mutuels. Je suis certain que vos recherches dans ce domaine apporteront une contribution précieuse au développement de la doctrine sociale de l'Eglise.

Une attention particulière doit être portée à la situation précaire dans laquelle se trouvent de nombreuses personnes âgées, et qui varie selon les nations et les régions (cf. Evangelium vitae EV 44 Centesimus annus, n. 33). Un grand nombre d'entre elles possèdent des ressources ou des retraites insuffisantes, certaines souffrent de maladies physiques, tandis que d'autres ne se sentent plus utiles ou ont honte d'avoir besoin de soins particuliers, et trop de personnes âgées se sentent tout simplement abandonnées. Ces problèmes seront certainement plus évidents avec l'augmentation du nombre de personnes âgées et le vieillissement de la population elle-même, dû à la baisse de la natalité.

4. Pour affronter ces défis, chaque génération et groupe social a un rôle particulier à jouer. Une attention particulière doit être apportée aux compétences respectives de l'Etat et de la famille dans l'édification d'une solidarité réelle entre les générations. Dans le plein respect du principe de subsidiarité (cf. Centesimus annus CA 48), les Autorités publiques doivent prendre soin de reconnaître les effets d'un individualisme qui - comme l'ont déjà démontré vos études - peut gravement affecter les relations entre les différentes générations. Pour sa part, la famille, en tant qu'origine et fondement de la société humaine (cf. Apostolicam actuositatem,  n. 11; Familiaris consortio FC 42), possède également un rôle irremplaçable dans l'édification d'une solidarité entre générations. Il n'y a pas d'âge où l'on cesse d'être père ou mère, fils ou fille. Nous avons une responsabilité particulière non seulement envers ceux auxquels nous avons offert le don de la vie, mais également à l'égard de ceux dont nous avons reçu ce don.

Chers membres de l'Académie, tandis que vous accomplissez votre important travail, je vous offre mes meilleurs voeux dans la prière et j'invoque cordialement sur vous et sur les personnes qui vous sont chères, une abondance de Bénédictions de Dieu tout-puissant.


MESSAGE DU PAPE JEAN-PAUL II AUX PARTICIPANTS À LA CONFÉRENCE PROMUE PAR LA FONDATION CENTESIMUS ANNUS - PRO PONTIFICE


Très chers frères et soeurs!

1. Je suis heureux d'adresser mes salutations à tous les éminents participants au Congrès, réunis à Rome pour la Conférence internationale sur le thème: "Confronting Globalization: Global Governance and the Politics of Development", organisée par la Fondation vaticane Centesimus Annus - Pro Pontifice.

J'adresse une pensée reconnaissante à Monsieur le Cardinal Attilio Nicora, Président de l'Administration du Patrimoine du Siège apostolique. Je salue le Comte Lorenzo Rossi di Montelera, Président de la Fondation Centesimus Annus - Pro Pontifice, ainsi que les intervenants et tous ceux qui ont contribué à l'organisation de cette rencontre.

Comme on le sait, la mondialisation constitue un vaste phénomène social qui présente un grand nombre de défis à la Communauté internationale et attend des réponses concrètes et responsables d'un point de vue éthique. C'est précisément pour cette raison que se révèle plus que jamais utile la réflexion que, ces jours-ci, votre Congrès entend développer, en se mettant à l'écoute des instances qui apparaissent dans le contexte social, culturel et économique mondial.

2. Votre Conférence part de la considération que dans le processus de mondialisation à l'échelle de la planète, l'écart entre les pays riches et les pays pauvres est malheureusement en train de s'accroître toujours plus. Face aux populations qui vivent dans des conditions de pauvreté inacceptables, face à tous ceux qui connaissent des situations marquées par la faim, la pauvreté et les inégalités sociales croissantes, il est urgent d'intervenir pour sauvegarder la dignité de la personne et pour promouvoir le bien commun.

Ainsi, vous vous demandez à juste titre comment la mondialisation et la solidarité peuvent se compléter réciproquement afin de donner naissance à des dynamiques mondiales qui conduisent à une croissance économique harmonieuse et, dans le même temps, à un développement équitable.

Le défi demeure toujours celui de donner vie à une mondialisation de la solidarité, en identifiant les causes des déséquilibres économiques et sociaux, et en imaginant des moyens d'action visant à assurer à tous un avenir placé sous le signe de la solidarité et de l'espérance.

3. Il est nécessaire que le processus de mondialisation qui est à l'oeuvre soit animé par des valeurs éthiques fondamentales et qu'il vise au développement intégral de tout homme et de tout l'homme; il faut que les consciences soient éduquées à un sens élevé de la responsabilité et de l'attention au bien de l'humanité tout entière et de chacune de ses composantes particulières.

Ce n'est qu'à ces conditions que la famille humaine, constituée de peuples qui diffèrent entre eux par l'origine, la culture et la religion, pourra donner vie à des formes de coopération économique, sociale et culturelle inspirées par l'humanité fraternelle.

Très chers frères et soeurs! Je suis certain que de votre rencontre naîtront également des orientations utiles pour affronter avec compétence et ouverture d'âme ces vastes problématiques économiques et sociales émergentes.

Dans le respect des différentes cultures et des styles de vie, votre Fondation pourra apporter sa contribution à la défense de la dignité de la personne, en harmonie avec le Magistère de l'Eglise. Il s'agit d'une forme noble de témoignage chrétien visant à imprégner notre société actuelle des valeurs évangéliques éternelles. Que Dieu bénisse chacun de vos efforts et rende votre activité fructueuse!

Enfin, je saisis volontiers cette occasion pour renouveler à votre institution de grand mérite mon appréciation pour le travail qu'elle accomplit depuis des années au service de l'Eglise et, notamment, du Successeur de Pierre.

Tout en assurant à chacun de vous, ainsi qu'à vos familles, mon souvenir quotidien dans la prière, je vous adresse à tous une Bénédiction apostolique particulière.

Du Vatican, le 29 avril 2004


IOANNES PAULUS II



Discours 2004 - Lundi 26 avril 2004