Discours 2004 - Vendredi 9 novembre 2004


1650ème ANNIVERSAIRE DE LA NAISSANCE DE SAINT AUGUSTIN, ÉVÊQUE D'HIPPONE - PRIÈRE DU PAPE JEAN-PAUL II À SAINT AUGUSTIN


O grand Augustin,
notre père et maître,
toi qui connais
les sentiers lumineux de Dieu
et également les chemins
tortueux des hommes,
nous admirons les merveilles
que la Grâce divine
a opérées en toi, faisant de toi
un témoin passionné
de la vérité et du bien,
au service de tes frères.

Au début
d'un nouveau millénaire
marqué par la croix du Christ,
enseigne-nous à lire l'histoire
à la lumière
de la Providence divine,
qui guide les événements
vers la rencontre définitive
avec le Père.
Conduis-nous
vers des objectifs de paix,
en suscitant dans notre coeur
ton même désir pour ces valeurs
sur lesquelles il est possible
de construire avec la force
qui vient de Dieu, une "cité"
à la mesure de l'homme.

Que la profonde doctrine,
qu'à travers une étude
passionnée et patiente,
tu as puisée aux sources
toujours vivantes de l'Ecriture,
illumine ceux qui sont tentés
aujourd'hui
par des mirages aliénants.
Obtiens leur le courage
d'entreprendre le chemin
vers cet "homme intérieur"
où les attend
Celui qui, seul, peut donner
la paix à notre coeur tourmenté.

Tant de nos contemporains
semblent avoir perdu l'espérance
de pouvoir parvenir,
parmi les nombreuses idéologies
opposées, à la vérité,
dont ils conservent toutefois
au plus profond de leur coeur
la douloureuse nostalgie.
Enseigne-leur à ne jamais
abandonner la recherche,
dans la certitude qu'à la fin,
leurs efforts seront récompensés
par la rencontre réconfortante
avec la Vérité suprême qui est
source de toute vérité créée.

Enfin, ô saint Augustin,
transmets-nous également
l'étincelle de l'amour ardent
pour l'Eglise,
la Catholica mère des saints,
qui a soutenu et animé
les efforts de ton long ministère.
Fais que, marchant ensemble
sous la direction
des Pasteurs légitimes,
nous arrivions à la gloire
de la Patrie céleste où,
avec tous les Bienheureux,
nous pourrons nous unir
au Cantique nouveau
de l'alleluia éternel. Amen.



AUX PARTICIPANTS AU XIX CONGRÈS INTERNATIONAL DU CONSEIL PONTIFICAL POUR LA PASTORAL DES SERVICES DE LA SANTÉ

Vendredi 12 novembre 2004

  Monsieur le Cardinal,
vénérés frères dans l'épiscopat,
très chers frères et soeurs!

1. Je suis heureux de vous accueillir à l'occasion de la Conférence internationale du Conseil pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé, dont les travaux sont en cours. A travers votre visite, vous avez voulu réaffirmer votre engagement scientifique et humain en faveur de ceux qui souffrent.

Je remercie Monsieur le Cardinal Javier Lozano Barragán, pour les salutations courtoises qu'il m'a exprimées au nom de tous. J'adresse ma pensée reconnaissante et ma gratitude à ceux qui ont apporté leur compétence à ces assises, ainsi qu'aux nombreux médecins et agents de la santé qui dans le monde, consacrent leurs compétences scientifiques, humaines et spirituelles à soulager la douleur et ses conséquences.

2. La médecine se place toujours au service de la vie. Même lorsqu'elle sait qu'elle ne peut pas venir à bout d'une maladie, elle consacre ses compétences à soulager les souffrances. Oeuvrer avec passion pour aider le patient dans chaque situation signifie avoir conscience de la dignité inaliénable de chaque être humain, même dans les conditions extrêmes du stade terminal. Dans ce dévouement au service de celui qui souffre, le chrétien reconnaît une dimension fondamentale de sa vocation: en effet, dans l'accomplissement de ce devoir, il sait qu'il prend soin du Christ lui-même (cf. Mt 25,35-40).

"C'est par le Christ et dans le Christ que s'éclaire l'énigme de la douleur et de la mort qui, hors de son Evangile, nous écrase", rappelle le Concile (Gaudium et spes GS 22). Celui qui, dans la foi, s'ouvre à cette lumière, trouve un réconfort dans sa souffrance et acquiert la capacité de soulager la souffrance d'autrui. Il existe en effet un rapport directement proportionnel entre la capacité de souffrir et la capacité d'aider celui qui souffre. L'expérience quotidienne enseigne que les personnes les plus sensibles à la douleur d'autrui et qui se consacrent le plus à soulager les douleurs des autres sont également plus disposées à accepter, avec l'aide de Dieu, leurs souffrances.

3. L'amour envers le prochain, que Jésus a présenté avec efficacité dans la parabole du Bon Samaritain (cf. Lc 10,29 sq.), permet de reconnaître la dignité de chaque personne, même lorsque la maladie pèse sur son existence. La souffrance, la vieillesse, l'état d'inconscience, l'imminence de la mort, ne diminuent en rien la dignité intrinsèque de la personne, créée à l'image de Dieu.

Parmi les drames provoqués par une éthique qui prétend établir qui peut vivre et qui doit mourir, figure celui de l'euthanasie. Même si elle est motivée par des sentiments inspirés par une conception erronée de la compassion ou de la dignité à préserver, l'euthanasie, au lieu de délivrer la personne de la souffrance, en provoque la suppression.

La compassion, lorsqu'elle est privée de la volonté d'affronter la souffrance, et d'accompagner celui qui souffre, conduit à l'élimination de la vie pour anéantir la douleur, bouleversant ainsi le statut éthique de la médecine.

4. Au contraire, la véritable compassion promeut tout effort raisonnable pour favoriser la guérison du patient. Dans le même temps, elle aide à s'arrêter lorsqu'aucune action n'apparaît désormais utile à cette fin.

Le refus de l'acharnement thérapeutique n'est pas un refus du patient et de sa vie. En effet, l'objet de la délibération sur l'opportunité de commencer ou de poursuivre une pratique thérapeutique, n'est pas la valeur de la vie du patient, mais la valeur de l'intervention médicale sur le patient.

L'éventuelle décision d'entreprendre ou d'interrompre une thérapie sera considérée comme éthiquement correcte si elle apparaît inefficace ou clairement disproportionnée par rapport à l'objectif de défendre la vie ou de recouvrer la santé. Le refus de l'acharnement thérapeutique est donc une expression du respect que l'on doit à tout moment au patient.

Ce sera précisément ce sens de respect bienveillant qui aidera à accompagner le patient jusqu'à la fin, en mettant en acte toutes les actions et les attentions possibles pour diminuer ses souffrances et favoriser, dans la dernière partie de son existence terrestre, une vie qui soit aussi sereine que possible, et qui dispose son âme à la rencontre avec le Père céleste.

5. C'est en particulier dans la phase de la maladie où il n'est plus possible de pratiquer des thérapies proportionnées et efficaces, alors que s'impose l'obligation d'éviter toute forme d'obstination ou d'acharnement thérapeutique, que se situe la nécessité des "soins palliatifs", qui, comme l'affirme l'Encyclique Evangelium vitae, sont "destinés à rendre la souffrance plus supportable dans la phase finale de la maladie et à rendre possible en même temps pour le patient un accompagnement humain approprié" (EV 65).

En effet, les soins palliatifs visent à soulager de façon spécifique, en particulier chez le patient en phase terminale, une vaste gamme de symptômes de souffrances d'ordre physique, psychologique et mental, et exigent donc l'intervention d'une équipe de spécialistes ayant une compétence médicale, psychologique et religieuse, et qui forment une bonne équipe pour soutenir le patient dans la phase critique.

Dans l'Encyclique Evangelium vitae a été synthétisée en particulier la doctrine traditionnelle sur l'utilisation licite et parfois nécessaire des analgésiques dans le respect de la liberté des patients, qui doivent pouvoir, dans la mesure du possible, "satisfaire à leurs obligations morales et familiales et ils doivent surtout pouvoir se préparer en pleine conscience à leur rencontre définitive avec Dieu" (EV 65).

D'autre part, tandis que ne doit pas manquer aux patients qui en ont besoin le soulagement que procurent les analgésiques, leur administration devra être effectivement proportionnée à l'intensité et au traitement de la douleur, en refusant toute forme d'euthanasie qui serait de fait pratiquée si l'on administrait de très fortes doses d'analgésiques précisément dans le but de provoquer la mort.

Afin de réaliser cette aide de façon efficace, il faut encourager la formation de spécialistes des soins palliatifs, et en particulier des structures pédagogiques qui peuvent concerner également les psychologues et les agents de la pastorale.

6. Toutefois, la science et la technique ne pourront jamais apporter de réponses satisfaisantes aux interrogations essentielles du coeur humain. Seule la foi peut répondre à ces questions. L'Eglise entend continuer à offrir sa contribution spécifique à travers l'accompagnement humain et spirituel des malades qui désirent s'ouvrir au message d'amour de Dieu, toujours attentif aux larmes de ceux qui s'adressent à lui (cf. Ps 39,13). On se rend compte ici de l'importance de la pastorale de la santé, dans laquelle les aumôneries des hôpitaux occupent une place particulière, en contribuant dans une large mesure au bien spirituel de ceux qui sont hospitalisés dans des structures médicales.

Comment oublier ensuite la contribution précieuse apportée par les bénévoles qui, à travers leur service, donnent vie à l'imagination de la charité qui diffuse l'espérance également dans l'expérience amère de la souffrance? C'est également par leur intermédiaire que Jésus peut continuer aujourd'hui à passer entre les hommes, en faisant le bien et en guérissant (cf. Ac 10,38).

7. L'Eglise offre ainsi sa contribution à cette passionnante mission en faveur des personnes qui souffrent. Puisse le Seigneur illuminer tous ceux qui sont proches des malades, en les encourageant à persévérer dans leurs divers rôles et dans leurs responsabilités.

Que Marie accompagne chacun, dans les moments difficiles de la douleur et de la maladie, afin que la souffrance humaine puisse être incorporée au mystère salvifique de la Croix du Christ.

J'accompagne ces voeux de ma Bénédiction.



À S.E. M. JORGE SAMPAIO PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE DU PORTUGAL

Vendredi 12 novembre 2004

Monsieur le Président,

C'est avec un grand plaisir que je vous reçois et que je salue Votre Excellence, ainsi que son éminente suite, en rappelant le salut que nous avons échangé lors de la visite que j'ai accomplie dans votre pays bien-aimé pour béatifier deux petits grands portugais: Francisco et Jacinta Marto.

La Lumière charitable qui resplendit dans leur vie, aspire à s'étendre dans le monde entier. C'est cette Lumière que le Portugal continue à regarder avec espérance, en particulier depuis qu'il prend conscience de la grave crise des valeurs vécue par la société actuelle, toujours plus incertaine face aux décisions éthiques indispensables pour le chemin futur de l'humanité.

La formation d'une conscience critique à propos du discernement du sens de la vie et de l'histoire constitue le défi culturel le plus grand du moment actuel, que l'Eglise et le Portugal désirent affronter dans une saine collaboration, comme le démontre le nouveau Concordat qui va entrer en vigueur. J'invoque de tout coeur sur vous, sur vos familles et sur votre peuple, la Bénédiction de Dieu tout-puissant.



AUX MEMBRES DE L'OFFICE CHRÉTIEN DES HANDICAPÉS

Samedi 13 novembre 2004


Chers Amis de l’Office chrétien des Handicapés,

1. Je suis heureux de vous accueillir, vous qui êtes venus avec votre fondatrice, Marie-Hélène Mathieu, à l’occasion du pèlerinage que vous effectuez pour le quarantième anniversaire de votre association. Avec vous je veux rendre grâce pour l’action que vous menez auprès des personnes handicapées et de leurs familles, montrant la valeur incomparable de toute vie.

Par l’attention aux personnes qui souffrent d’un handicap, vous rappelez à nos contemporains que la personne ne se réduit pas à ses aptitudes et à sa place dans la vie économique, mais qu'elle est une créature de Dieu, aimée par Lui pour elle-même et non pour ce qu’elle fait.

Ma prière affectueuse rejoint aussi les parents et tous ceux qui acceptent d'accueillir une personne handicapée. Je sais les sacrifices que cela suppose, mais aussi les joies qu'il y a à voir le ravissement sur le visage d'une personne handicapée et l'affection qu'elle porte à ceux qui prennent soin d'elle.

2. Votre action est à la fois un service et une véritable mission pour la promotion de la personne humaine et pour la défense de sa dignité, comme le montre le thème de votre pèlerinage, Tu nous as choisis pour servir en ta présence. Vous accomplissez au coeur de l'Église le service insigne de la charité, de la tendresse et de la compassion auprès des handicapés et de leurs familles, qui «ont revêtu le visage du Christ», comme le dit saint Grégoire de Nysse de tous les pauvres (cf. De l'amour des pauvres).

Vous êtes un des signes de la solidarité de toute la communauté chrétienne à l'égard de ceux qui sont blessés dans leur corps et dans leur esprit, rappelant que le Christ est venu pour donner la vie en abondance à tout homme et pour nous révéler que le salut s’adresse à tous, comme il l'a annoncé à la synagogue de Nazareth (cf. Lc 4,14-21). Le Concile Vatican II l'a opportunément souligné, «l'esprit de pauvreté et de charité est, en effet, la gloire et le signe de l'Église du Christ» (Gaudium et spes GS 88).

3. Votre présence m’invite à appeler une nouvelle fois de manière pressante tous les hommes de bonne volonté, en particulier ceux qui ont une fonction gouvernementale et législative, à un sursaut de conscience et d’humanité, pour que soit protégée toute vie humaine, notamment celle des plus faibles, des plus petits et des plus pauvres, et pour que cessent toutes les actions visant à éliminer les enfants conçus et non encore nés, qui sont sans défense, l'homme se faisant ainsi le maître de la vie. Bafouer les petits c'est en quelque sorte bafouer notre propre humanité, car il y a entre nous tous une même fraternité et une même solidarité.

En demandant à Notre-Dame de Lourdes de vous soutenir dans votre mission, je vous accorde ainsi qu'à tous les membres de l'Office chrétien des Handicapés, aux familles et à tous ceux qui s'associent à votre action, une affectueuse Bénédiction apostolique.



AUX PARTICIPANTS AU SYMPOSIUM DES ÉVÊQUES D’AFRIQUE ET D'EUROPE PROMU PAR LE CONSEIL DES CONFÉRENCES ÉPISCOPALES D’EUROPE

Samedi 13 novembre 2004



Vénérés frères dans l'épiscopat,
Très chers frères et soeurs!

1. C'est avec une grande joie que je vous accueille et que je vous salue tous avec affection, en conclusion du Symposium des Evêques d'Afrique et d'Europe. Je salue en particulier les Présidents du Conseil des Conférences épiscopales d'Europe (CCEE) et du Symposium des Conférences épiscopales d'Afrique et de Madagascar (SECAM), et je leur exprime ma gratitude pour les paroles courtoises qu'ils m'ont adressées en votre nom. J'exprime ma reconnaissance à ceux qui ont organisé et qui ont collaboré à la réalisation de cette rencontre, ayant pour objectif la communion entre les Eglises d'Europe et d'Afrique, en affrontant ensemble des problématiques d'intérêt commun. Tel est le thème même de votre Symposium: "Communion et solidarité entre l'Afrique et l'Europe".

2. Vénérés frères dans l'épiscopat! Je me réjouis que vous ayez ressenti le désir d'approfondir les liens de la fraternité sacramentelle, qui animent votre engagement pastoral au service de Dieu et de vos frères. Un engagement qui ne peut se traduire qu'à travers une collaboration constante dans le style de l'"échange des dons". A ce propos, j'ai plaisir à évoquer la relation de profonde entente qui, au début du III siècle, liait les saints Cornelius et Cyprien, respectivement Evêques de Rome et de Carthage. De leurs lettres, il ressort clairement que l'unité de l'Eglise est édifiée par l'Eucharistie et elle se manifeste par une recherche constante de la coopération fraternelle et solidaire.

Ce style d'amour fraternel constitue un témoignage significatif que les Pasteurs des Eglises qui sont en Europe et en Afrique sont appelés à offrir pour affronter les grands défis qui interpellent la foi chrétienne dans notre société mondialisée.

3. Votre Symposium a favorisé la rencontre et le dialogue entre la culture et la mentalité européenne et africaine. Il s'agit de valoriser les diverses traditions culturelles de manière complémentaire pour permettre aux diverses Communautés ecclésiales d'affronter de façon conjointe des thématiques existentielles, telles que la conception de l'homme et de la société, et des domaines d'action de la pastorale, tels que l'évangélisation et les relations oecuméniques et interreligieuses.

En outre, la conscience d'accomplir la même mission au service de l'Evangile en Europe et en Afrique vous rendra toujours plus attentifs aux attentes de la famille universelle des peuples.

4. Mais pour mener à bien cette action missionnaire urgente, il est indispensable de cultiver tout d'abord la prière et le contact personnel avec le Christ. C'est donc à juste titre qu'au cours de ces journées vous avez sollicité le soutien orant de vos communautés ecclésiales respectives, en particulier de nombreux Monastères, présents sur les deux continents. Je m'unis moi aussi à cette demande chorale d'aide céleste, en évoquant sur vous la protection de la Très Sainte Vierge Marie, Etoile de l'Evangélisation, ainsi que l'intercession spéciale de saint Augustin d'Hippone, dont la figure est comme un pont entre l'Afrique et l'Europe. C'est précisément aujourd'hui le 1650 anniversaire de sa naissance et, au cours de ces journées, ses reliques sont présentes à Rome.

5. Enfin, accueillant les voeux du Conseil post-synodal, interprète des désirs des pasteurs africains, je saisis l'occasion pour annoncer mon intention de convoquer une deuxième Assemblée spéciale pour l'Afrique du Synode des Evêques.

Je confie ce projet à votre prière, alors que je vous invite tous avec ferveur à implorer du Seigneur le don précieux de la communion et de la paix pour la bien-aimée terre africaine.

En renouvelant mes remerciements pour votre visite, je vous donne de tout coeur une Bénédiction particulière, ainsi qu'aux Conférences épiscopales d'Afrique et d'Europe et à tous les habitants de chacun des deux continents.



À S.E. M. ALBERT EDWARD ISMAIL YELDA, AMBASSADEUR DE LA RÉPUBLIQUE D'IRAK

Lundi 15 novembre 2004  



Votre Excellence,

Je suis heureux de vous souhaiter une cordiale bienvenue, tandis que j'accepte les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République d'Irak près le Saint-Siège. Je vous remercie pour les salutations cordiales que vous me transmettez de la part du Président, le Cheikh Ghazi Ajeel Al-Yawar, et je suis heureux d'exprimer en retour mes meilleurs voeux aux Autorités et au peuple de votre pays. A travers la présence du Nonce apostolique, je suis resté toujours proche du bien-aimé peuple irakien dès le début de cette période de conflit. Je vous prie de l'assurer de ma préoccupation constante pour les nombreuses victimes du terrorisme et de la violence. Je prie pour qu'on lui épargne des souffrances supplémentaires et pour que ces populations reçoivent l'assistance dont elles ont besoin de la part des Organisations humanitaires internationales.

Votre antique culture a été décrite comme le "berceau de la civilisation" et se glorifie d'avoir vu la présence de chrétiens dès les origines du christianisme lui-même. Elle a été, en effet, un exemple précieux des nombreuses façons dont les membres de diverses religions peuvent vivre dans la paix et l'harmonie. Je souhaite ardemment que, tandis que l'Irak s'achemine vers l'établissement de la démocratie, ces caractéristiques de son histoire deviennent à nouveau un élément essentiel de la société.

Votre Excellence a souligné l'importance de protéger la dignité de toute personne humaine. L'autorité de la loi, en tant qu'élément intégral du gouvernement, est essentielle pour cela. Préserver ce principe fondamental est essentiel pour toute société moderne qui recherche véritablement la protection et la promotion du bien commun. Dans l'accomplissement de cette tâche, la claire distinction entre le domaine religieux et le domaine civil permet à chacun d'entre eux d'exercer ses responsabilités de façon efficace, dans le respect mutuel et la pleine liberté de conscience. Je souhaite que le peuple irakien continue de promouvoir sa longue tradition de tolérance, en reconnaissant toujours le droit à la liberté de culte et à l'enseignement religieux. Lorsque ces droits fondamentaux seront protégés par la législation ordinaire et deviendront un élément stable du tissu vivant de la société, ils permettront à tous les citoyens, quelles que soient leurs croyances ou appartenances religieuses, d'apporter leur contribution à la construction de l'Irak. C'est de cette façon que le pays pourra exprimer les convictions religieuses profondes de tous ses habitants à travers la création d'une société véritablement morale et juste. Je peux assurer Votre Excellence que l'Eglise catholique tout entière, et de façon particulière les chrétiens chaldéens présents dans votre pays depuis l'époque des Apôtres, est engagée à assister votre peuple dans l'édification d'une nation plus pacifique et stable.

L'Irak est actuellement au coeur d'un difficile processus de transition, entre un régime totalitaire et un Etat démocratique en formation, dans lequel la dignité de toute personne doit être respectée et tous les citoyens bénéficier de droits égaux. La démocratie authentique n'est possible "que dans un Etat de droit" et exige "la réalisation des conditions nécessaires pour la promotion des personnes, par l'éducation et la formation à un vrai idéal, et [...] par la création de structures de participation et de coresponsabilité" (Centesimus Annus CA 46). Tandis que vous préparez votre peuple à la tâche d'élire de façon libre les hommes et les femmes qui dirigeront l'Irak de demain, j'encourage le gouvernement actuel dans ses efforts en vue de garantir que ces élections se déroulent de façon juste et transparente, en conférant à tous les citoyens éligibles une égale opportunité d'exercer ce droit démocratique et en les encourageant à le faire.

L'Irak doit actuellement relever aussi le défi des conflits provoqués par la pauvreté, le chômage et la violence. Puisse votre gouvernement oeuvrer inlassablement en vue de résoudre les oppositions et les conflits à travers le dialogue et la négociation, en utilisant la force militaire uniquement en dernier recours. Par conséquent, il est essentiel que l'Etat, avec l'assistance de la Communauté internationale, promeuve la compréhension et la tolérance mutuelles parmi ses divers groupes ethniques et religieux. Cela permettra aux peuples de la région de créer un environnement qui soit non seulement engagé en faveur de la justice et de la paix, mais soit également capable de soutenir la croissance et le développement économiques nécessaires, qui font partie intégrante du bien-être de vos citoyens et du pays lui-même. Les hommes et les femmes peuvent éliminer ensemble les causes sociales et culturelles de la division et des conflits "en enseignant la grandeur et la dignité de la personne, et en favorisant une conscience plus grande de l'unité du genre humain" (Message pour la Journée mondiale de la Paix 2002).

Monsieur l'Ambassadeur, je suis certain que votre mission renforcera les liens de compréhension et de coopération entre la République d'Irak et le Saint-Siège. Soyez assuré que les divers bureaux de la Curie romaine seront toujours prêts à vous assister dans l'accomplissement de votre haute fonction. Sur vous et sur le bien-aimé peuple irakien, j'invoque une abondance de Bénédictions de Dieu tout-puissant.




AUX PARTICIPANTES AU CHAPITRE GÉNÉRAL DES SOEURS DE SAINTE-ELISABETH

Lundi 15 novembre 2004


Très chères soeurs,

1. Je vous suis cordialement reconnaissant de la visite d'aujourd'hui, qui a lieu au cours du Chapitre général de votre Famille religieuse. Je salue avec affection chacune de vous ici présente. Je salue en particulier la nouvelle Supérieure générale, Mère Samuela Werbinska, ainsi que son Conseil, et je la remercie des paroles courtoises qu'elle a bien voulu m'adresser. J'étends ma pensée à toutes vos consoeurs activement engagées dans le témoignage de l'Evangile de la charité dans divers pays.

2. Au cours de ces journées, vous avez réfléchi sur le charisme qui vous distingue. Lorsque, vers la moitié du XIX siècle, vos Fondatrices, Clara Wolff, Mathilde et Marie Merkert et Françoise Werner, commencèrent à servir les "membres souffrants du Corps du Christ" dans la ville de Nysa en Pologne, elles avaient pour objectif et comme programme de leur apostolat les paroles de Jésus: "En vérité je vous le dis, dans la mesure où vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait" (Mt 25,40). S'inspirant de l'exemple de sainte Elisabeth de Hongrie, choisie comme Patronne de la Congrégation naissante, elles se consacrèrent totalement aux pauvres et aux indigents, en contemplant sur leur visage celui du Rédempteur.

Depuis, votre Institut s'est considérablement développé et il se tourne aujourd'hui avec confiance vers l'avenir, en plantant ses tentes dans diverses régions du monde.

3. "Duc in altum!" Tel est le thème que vous avez choisi pour le Chapitre général. Très chères soeurs, votre apostolat sera d'autant plus efficace que vous resterez ancrées à vos racines charismatiques. Suivez l'exemple de vos Fondatrices, qui cultivèrent un dialogue intime avec le Seigneur. Que chacun de vos projets apostoliques naisse d'une communion incessante avec Lui. En cultivant une intense vie de prière et d'écoute de Dieu, il vous sera plus facile d'assurer à vos frères et soeurs en difficulté non seulement un soutien matériel, mais également un réconfort spirituel.

4. Au cours de ces journées, vous étudiez la façon de répondre avec une "fidélité créative" aux défis de la société actuelle. Il faut repartir du Christ et témoigner, de manière simple et concrète, de son amour miséricordieux pour tous, en particulier pour ceux qui, en marge de nos sociétés, sont considérés comme les "blessés" de la vie.

Que la Vierge Marie, Mère du Seigneur, vous accompagne et vous protège toujours; que sainte Elisabeth de Hongrie et vos saints protecteurs intercèdent pour vous. Je vous assure, quant à moi, de mon souvenir spécial dans la prière et je vous bénis de tout coeur, chères soeurs, ainsi que toute votre Congrégation, les laïcs de la communauté apostolique de Sainte-Elisabeth, et les personnes que vous rencontrez dans votre apostolat quotidien.



AUX PARTICIPANTS À LA RÉUNION DU X CONSEIL ORDINAIRE DU SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DU SYNODE DES ÉVÊQUES

Mardi 16 novembre 2004


Vénérés frères dans l'épiscopat!

1. Dans la joie partagée de cette rencontre, je présente à tous et à chacun de vous mon salut, qui vient du plus profond de mon coeur à la suite de l'expérience renouvelée de communion dans l'ordre épiscopal et dans la sollicitude pour toutes les Eglises (cf. 2Co 11,28). Que mon baiser de paix et de fraternité vous parvienne, dans l'esprit de communion grâce auquel nous nous sentons un seul coeur et une seule âme (cf. Ac 4,32). Je salue en particulier le Secrétaire général, Mgr Eterovic, et je le remercie des paroles courtoises qu'il m'a adressées.

En tant que membres du X Conseil ordinaire du Synode des Evêques, vous continuez à vivre et à oeuvrer dans l'esprit originel du Synode des Evêques, qui est la communion. Lorsqu'en 1965, le Pape Paul VI, de vénérée mémoire, fut amené à instituer cet organisme opportun, l'Eglise était encore plongée dans le climat du Concile Vatican II, à travers lequel la doctrine et la spiritualité de la communion renaissait avec une profonde intensité et force de persuasion.

2. La prochaine XI Assemblée générale ordinaire du Synode des Evêques, que Vous préparez avec soin depuis longtemps, traitera d'un thème crucial pour l'Eglise: l'Eucharistie. En effet, la devise du thème synodal est précisément celle-ci: L'Eucharistie, source et sommet de la vie et de la mission de l'Eglise. L'Eglise puise à l'Eucharistie les énergies vitales pour sa présence et son action dans l'histoire des hommes.

Dans l'Eucharistie se trouve la préfiguration exemplaire de la communion entre les fidèles et leurs pasteurs et de la collégialité entre les pasteurs des Eglises particulières et le Pasteur de l'Eglise universelle. Ce sera bien sûr l'Eucharistie qui donnera son esprit et sa forme à cette caractéristique primordiale, incontournable et rayonnante de l'Eglise, corps organiquement compact, qui grandit jusqu'à l'âge adulte du Christ (cf. Ep 4,13 Ep 4,16).

Le prochain Synode fournira une fois de plus l'occasion propice pour que, dans l'Eglise, l'on confirme la foi dans le mystère digne d'adoration de l'Eucharistie, l'on renouvelle la communion collégiale et hiérarchique et l'on promeuve la charité fraternelle.

3. Bien-aimés frères, la phase de préparation de la prochaine XI Assemblée générale ordinaire du Synode des Evêques ne coïncide pas seulement chronologiquement avec l'Année consacrée à l'Eucharistie. Il s'agit d'un cas particulier de réciprocité entre l'Eglise universelle et le Synode lui-même. En cette année, l'Eglise et le Synode convergent vers un unique but: le Seigneur Jésus, présent, vivant et vivifiant dans le sacrement de l'Eucharistie.

L'Encyclique Ecclesia de Eucharistia et la Lettre apostolique Mane nobiscum Domine ont été confiées à l'Eglise afin que la doctrine et la pratique eucharistique trouvent universellement les âmes prêtes à la communion avec le Seigneur et avec leurs frères dans le mandat de la charité. La tâche principale des pasteurs de l'Eglise est d'être des maîtres authentiques de la communion (cf. Pastores gregis ), afin que tout le troupeau du Seigneur grandisse dans l'unité d'un seul corps (cf. Ep 4,3 sq.), afin que les espaces de la charité pastorale se développent (cf. S. Augustin, PL 5, 440) et que la collégialité et la communion hiérarchique fleurissent pour porter les fruits saints de l'Esprit (cf. Ga 5,22).

Que l'Eglise, renouvelée dans la redécouverte du don et du mystère de l'Eucharistie, puisse étendre cette inépuisable richesse de vie à ceux qui sont proches comme à ceux qui sont loin, à travers une oeuvre urgente de nouvelle évangélisation.

J'invoque avec vous la protection de la Très Sainte Vierge, Mère de Dieu et de l'Eglise, du saint Apôtre Pierre et de tous les saints Pasteurs sur ces intentions, et en particulier sur la préparation au Synode, alors que je vous donne de tout coeur, ainsi qu'à vos Eglises particulières bien-aimées, ma Bénédiction apostolique.



AUX CHEFS RELIGIEUX D'AZERBAÏDJAN

Jeudi 18 novembre 2004

  

Bien-aimés et vénérés frères!

1. Je vous accueille avec affection et j'adresse à tous mon salut de paix.

Je vous souhaite la bienvenue, Cheik-ul-Islam, chef de la Présidence des Musulmans du Caucase, qui avec une constante abnégation, vous prodiguez pour édifier la paix dans une région où, malheureusement, de violents conflits se poursuivent.

Je vous souhaite la bienvenue, Evêque Aleksandr de Bakou et de la région de la Mer Caspienne, appartenant à l'Eglise orthodoxe russe, à laquelle me lient des liens d'estime et d'affection.

Je vous souhaite la bienvenue, chef de la Communauté des juifs de la Montagne, une communauté ancienne qui offre, dans un contexte à très grande majorité islamique, un exemple de coexistence et de collaboration fraternelle.

2. Votre visite m'a rappelé celle que Dieu m'a donné d'accomplir en Azerbaïdjan en 2002. Je me souviens de l'accueil chaleureux que j'ai reçu, de la cordialité du Président Heydar Aliev, de la fierté avec laquelle il m'a parlé de la tolérance religieuse qui constitue le pivot de la vie de votre pays. Lorsque la nouvelle de sa mort m'est parvenue, j'ai confié son âme à Dieu dans la prière. De même que je prie pour le nouveau Président, M. Ilham Aliev, et pour tout le peuple azéri, auquel je souhaite des jours de paix et de prospérité.

Je souhaite de tout coeur qu'en Azerbaïdjan revienne pleinement la paix, avec la résolution de la question du Nagorny-Karabakh. Celle-ci, ainsi que d'autres controverses, doivent être affrontées avec bonne volonté, dans la recherche mutuelle d'ouvertures réciproques et de compréhension, et dans un esprit de véritable réconciliation.

3. Chers amis, je vous remercie de votre visite. De retour chez vous, apportez à tous le baiser du Pape et de l'Eglise catholique. Que Dieu vous aide à construire une coexistence toujours plus profitable entre vous et la communauté catholique d'Azerbaïdjan. A celle-ci et à son Ordinaire, le cher Père Jan Capla, j'envoie ma pensée affectueuse, en priant le Seigneur pour qu'il l'aide à poursuivre la mission évangélique dans le Caucase.

4. Que votre visite au Pape de Rome soit comme un symbole pour le monde: c'est-à-dire qu'elle montre que la tolérance est possible et constitue une valeur de la civilisation, qui établit les bases pour un développement humain, civil et social plus vaste et solidaire.

Personne n'a le droit de présenter ou d'utiliser les religions comme instrument d'intolérance, comme moyen d'agression, de violence et de mort. Au contraire, leur amitié et leur estime réciproque, si elles sont également soutenues par l'engagement de tolérance des gouvernants, constituent une riche ressource pour un progrès et une paix authentiques.

5. Ensemble - musulmans, juifs et chrétiens -, nous voulons lancer au nom de Dieu et de la civilisation, un appel à l'humanité afin que cesse la violence homicide et que l'on parcoure la voie de l'amour et de la justice pour tous. Telle est la voie des religions. Que Dieu nous aide à parcourir cette voie avec persévérance et patience!



Discours 2004 - Vendredi 9 novembre 2004