Discours 1982 - 16 janvier 1982

La semaine de l’unité

Angélus du 17 janvier(1)


(1) Texte italien dans l'Osservatore Romano des 18-19 janvier. Traduction et titre de la DC.


TRÈS CHERS FILS,

1. Je voudrais attirer aujourd'hui votre attention et celle de tous les fils et filles de l'Église catholique sur la Semaine de prière pour l'Unité des chrétiens qui s'ouvre demain.

Ce rendez vous annuel fait converger l'attention de tous sur un drame historique et spirituel qui ne touche pas seulement la vie de la communauté chrétienne, mais qui a des effets négatifs pour la convivence humaine tout entière. La division contredit, en effet, la volonté de Dieu sur son Église et le projet divin d'unification de l'humanité tout entière. C'est pourquoi la prière pour l'unité est aussi plus actuelle et plus nécessaire pour que le Seigneur illumine l'esprit de tous les chrétiens, donne la force pour vaincre les tendances de la division et nous accorde le don de la pleine unité. L'anniversaire annuel offre aussi l'occasion pour remercier le Seigneur pour les progrès que le mouvement oecuménique est en train de réaliser. Les contacts deviennent plus intenses, le dialogue théologique s'approfondit, I'esprit de fraternité et de solidarité entre les chrétiens se fortifie. Grâces soient rendues à Dieu !

2. Le thème que le Secrétariat pour l'Unité des chrétiens et le Conseil oecuménique des Églises ont proposé conjointement pour cette année est dense et suggestif : « Que tous trouvent leur demeure en toi, Seigneur. »

La communauté chrétienne est comme une grande famille. Elle est construite sur l'amour du Père et s'exprime dans la pleine fraternité, elle est appelée à vivre dans le lien de la paix dans la demeure de Dieu. Car « il n'y a qu'un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême. Il n'y a qu'un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, qui travaille en tous et qui est en tous » (Ep 4,5 s.).

De même que dans la famille les éventuelles dissensions doivent être dépassées par la recomposition de l'unité, c'est ainsi que l'on doit faire dans la famille plus vaste de la communauté chrétienne tout entière.

« Que tous trouvent leur demeure en toi, Seigneur. « Ce thème a également une profonde dimension missionnaire. L'unité des chrétiens est ouverte sur une unité toujours plus vaste, celle de l'humanité tout entière. Jésus lui-même a prié pour l'unité de ses disciples « afin que le monde croie » (Jn 17,21).

3. Le 25 janvier prochain, je présiderai pour cette intention, à la basilique de Saint-Paul-hors-les-Murs, la célébration solennelle qui terminera cette Semaine de prière pour l'Unité. Ce temple sacré est bâti sur la « confession.. de l'Apôtre des Gentils qui a proclamé de manière inlassable l'unité de l'Église (cf. Rm 12,4 s. 1Co 12,12 Ep 4,4 s. ; Col 3,15). Que saint Paul, par les mérites de son glorieux martyre, obtienne que nous tous, qui croyons en Jésus, « nous arrivions à l'unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, à l'état d'homme parfait, dans la mesure qui convienne à la pleine maturité du Christ » (Ep 4,1 Ep 4,2 s.).

Au mois de mai prochain, j'accomplirai un pèlerinage apostolique en Grande-Bretagne pour confirmer (cf. Lc Lc 22,32) les frères dans l'épiscopat et les fils et les filles des diocèses catholiques de cette noble terre. En cette circonstance, je rencontrerai aussi l'archevêque de Canterbury et primat de la Communion anglicane, le Dr Robert Runcie.

Puisse ce voyage servir aussi la cause du rapprochement entre l'Église catholique et la Communion anglicane et en accélérer l'union si souhaitée. Pour cette fin, qui a une grande portée oecuménique, je vous demande à tous de prier ardemment la Très Sainte Trinité.

Maintenant, adressons notre prière à la « Theotokos », la Mère de Dieu, afin que, par sa puissante intercession, nous soit accordée cette unité pour laquelle Jésus-Christ s'est fait homme.



À JEAN WAGNER AMBASSADEUR DU LUXEMBOURG

Lundi, 18 janvier 1982




Monsieur l’Ambassadeur,

La teneur des paroles élevées que Votre Excellence vient de m’adresser m’a vivement touché. En vous disant ma gratitude, je forme les meilleurs souhaits pour votre mission d’Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire.

Au-delà de votre personne, ma pensée se tourne vers Son Altesse Royale le Grand-Duc Jean qui préside aux destinées du Luxembourg et vers Son Altesse Royale la Grande Duchesse Joséphine Charlotte: je suis heureux de leur renouveler, ainsi qu’à leur honorable famille, mon respectueux souvenir et mes voeux fervents. Je salue également ceux qui portent la lourde charge du bien commun, au sein du Gouvernement, et tout le peuple luxembourgeois qui est justement réputé pour son unité et son courage à travers les vicissitudes de l’histoire, pour son attachement aux valeurs religieuses et particulièrement à la foi catholique. Cette foi a, pourrait-on dire, cimenté l’âme du pays et elle est toujours partagée par l’immense majorité des citoyens. Avec satisfaction, j’évoque ici leur fidélité chrétienne, que soutient avec zèle leur Evêque, Monseigneur Jean Hengen.

Les voeux que je vous exprime, Monsieur l’Ambassadeur, concernent tout d’abord le bien de votre patrie. Vous avez noté, entre autres, la délicatesse de sa position politique et économique, en raison de sa situation géographique. Certes la paix fut souvent difficile en ce carrefour de peuples et de civilisations où votre pays est placé. Et comment éviterait-il aujourd’hui les aléas d’une crise économique largement répandue? Sur un autre plan, certaines remises en question culturelles, véhiculées de multiples façons, et le glissement de moeurs que connaissent tant de sociétés, pourraient sembler de nature à ébranler l’attachement de vos compatriotes aux valeurs éthiques et religieuses, voire au respect de la vie et de la dignité humaines. Mais le peuple luxembourgeois a montré suffisamment de détermination dans le passé pour faire face à ces difficultés et se préparer un avenir de progrès digne de ce nom.

En élargissant l’horizon, comment oublier par ailleurs la position privilégiée que votre pays occupe au sein de l’Europe? Malgré l’exiguïté de son territoire, il a déjà accueilli un grand nombre de travailleurs d’autres pays européens, avec tous les problèmes d’intégration que cela entraîne.

Surtout, le Luxembourg est membre actif des institutions européennes, dont quelques-unes ont même leur siège dans sa capitale, comme la Cour de Justice de la Communauté, le Centre des organes financiers, le Secrétariat du Parlement européen. Je souhaite que votre pays contribue, pour sa part, à faire que l’Europe soit digne de ses racines chrétiennes et de sa vocation, à promouvoir à tous les niveaux les rapports, les échanges, les coopérations, bénéfiques entre partenaires, d’une façon harmonieuse qui respecte le meilleur d’eux-mêmes et les achemine vers une solidarité profonde qui s’avère de plus en plus nécessaire. Et il est bien évident que cette solidarité de l’Europe ne saurait se limiter à celle de l’Ouest, mais elle doit s’enrichir des valeurs que représentent les diverses communautés nationales qui font ensemble l’originalité de ce continent.

Enfin, l’Europe n’est pas close sur elle-même. On attend son témoignage et son action sur la scène internationale. Votre Excellence a rappelé les principes auxquels est attaché le Luxembourg dans sa résolution des problèmes entre les différents pays du monde: paix, liberté, justice, solidarité dans la coopération, sur un pied d’égalité et dans le plein respect de l’indépendance et de la personnalité des nations. Le Saint-Siège encourage en effet la mise en oeuvre de tels principes. Il pense qu’au niveau des rapports bilatéraux, des Communautés, des Alliances et des Organisations internationales, l’effort primordial doit être d’éviter que ne se creuse encore le fossé entre pays nantis et peuples de la faim, et d’aider ceux-ci à faire face en priorité aux problèmes les plus urgents de leur développement. Mais le Saint-Siège estime qu’il est non moins nécessaire de veiller à ce que soient vraiment garantis à chaque peuple sa souveraineté, ses libertés, sa culture, ses droits fondamentaux, son âme pourrait-on dire. Enfin, vous avez justement fait allusion à ce qui “démoralise” les hommes de ce temps, en bafouant la dignité humaine et les principes les plus sacrés, en particulier le respect des innocents. Là encore, il faut un sursaut moral qui doit trouver une expression au niveau des accords internationaux ou des instruments juridiques patiemment élaborés. L’Eglise, pour sa part, est prête à encourager tous les pas qui sont esquissés dans ce sens; et en même temps, dans le cadre de sa mission religieuse spécifique, elle veut préparer sans trêve ce redressement au niveau de l’éducation et des convictions profondes, en faisant appel aux consciences avec la lumière et la force de l’Evangile.

Vous serez désormais le témoin assidu de ces efforts de l’Eglise. Je vous souhaite de trouver votre joie dans cette mission que j’espère très fructueuse. Je prie Dieu de vous bénir et de bénir votre cher pays.






La prière pour l’Église de Chine - Lettre aux évêques du monde entier, 24 janvier 1982


À l'occasion du Nouvel An chinois (25 janvier), le Pape a adressé aux évêques catholiques du monde entier la lettre ci-après où, après avoir rappelé que la mission du Siège de Pierre est d'unir les frères dans la vérité et l'amour, il évoque la fidélité à la foi des catholiques de Chine et adresse ses meilleurs voeux au peuple chinois (1) :

(1) Texte latin dans l'Osservatore Romano du 24 janvier 1982. Traduction, titre, sous-titres et notes de la DC.

VÉNÉRABLES FRÈRES
SALUT ET BÉNÉDICTION APOSTOLIQUE,

L'amour du Christ qui nous unit fraternellement et la lourde responsabilité qui m'a été confiée en tant que pasteur suprême de l'Église universelle me poussent à ouvrir mon coeur pour vous faire part, chers Frères dans l'épiscopat, de ma vive sollicitude pour l'Église qui est en Chine. Tous connaissent bien la situation dans laquelle elle se trouve actuellement, et je suis sûr que beaucoup d'entre vous ne cessent de faire monter de ferventes prières vers le Père céleste et Notre Seigneur Jésus-Christ, le bon Pasteur des âmes, pour nos frères et soeurs bien-aimés de cette grande nation. Je sais en effet que, dans diverses parties du monde catholique, sont nées des initiatives de prières pour la Chine, animées de cet esprit de profonde communion et de fraternité qui unit, et doit unir, dans la joie et les souffrances, les membres du Corps mystique du Christ (1 Col 12,12-30).

Cette lettre a son origine dans les invocations que je fais sans cesse monter vers le Dieu tout-puissant pour cette part choisie de son peuple, et a pour but d'inviter à la prière, par votre entremise, tous les catholiques du monde entier. Nous savons avec certitude que le Seigneur est fidèle à sa parole : « Demandez et vous recevrez, cherchez et vous trouverez, frappez et l'on vous ouvrira. » (Mt 7,7) En effet, même lorsque font défaut les moyens humains normaux qui servent à maintenir les liens des relations au sein d'une communauté, il reste toujours la force de la prière : celle-ci garde, en effet, toujours vive la flamme de l'espérance qui ne trompe pas, grâce à l'action de l'Esprit Saint qui est en nous : « L'Esprit vient en aide à notre faiblesse — nous enseigne saint Paul —, car nous ne savons pas prier comme il faut ; mais l'Esprit lui-même intercède pour nous en gémissements inexprimables. » (Rm 8,26) Cette lettre commence par les mots « Caritas Christi ».

Je vous demande donc de prier, je vous demande de vous unir dans l'Esprit de Dieu aux fils et aux filles de l'Église catholique qui est en Chine, avec lesquels a cessé d'exister, depuis quelques dizaines d'années, une relation visible. Par le moyen de la prière, même s'ils sont extérieurement privés de toute communication avec nous, ils restent pourtant au coeur même de l'Église du Christ. La prière obtiendra donc de la miséricorde divine les dons, lumières et forces spirituelles qui assureront à l'Église qui est en Chine les conditions indispensables pour qu'elle jouisse de l'union, même visible, avec l'Église de Jésus-Christ, qui est « une, sainte, catholique et apostolique ».

À ce sujet, la mission particulière du Siège romain de saint Pierre est d'unir les frères dans la vérité et l'amour. C'est précisément à l'apôtre Pierre, en effet, que le Seigneur Jésus a confié la responsabilité de confirmer ses frères (Lc 22,32), parce que c'est sur lui qu'il a voulu que soit édifiée son Église (Mt 16,17-18). « Le Pontife romain, comme successeur de Pierre — affirme le Concile oecuménique Vatican II —, est le principe perpétuel et visible et le fondement de l'unité qui lie entre eux soit les évêques, soit la multitude des fidèles. » (Lumen gentium, LG 23 Lumen gentium, ) C'est lui qui rend un et indivis l'épiscopat lui-même (cf. ibid., 18.) Le lien avec le Siège de Pierre et avec son ministère apostolique est donc la condition indispensable pour participer à l'union avec la grande famille catholique.


La sollicitude de l'Église pour la Chine

La sollicitude pour l'Église en Chine, qui a été si vive chez mes récents prédécesseurs Pie XII, Jean XXIII, Paul VI et Jean-Paul Ier, est devenue la particulière et constante préoccupation de mon pontificat, comme je l'ai déclaré plus d'une fois et de bien des manières. Une telle préoccupation naît de la nature même de la catholicité de l'Église, laquelle est une et universelle, multiple dans la diversité des nations qui la composent et en même temps identique dans le fondement de la foi et dans le lien de la communion. Comme l'affirme le Concile Vatican II, « l'unique Peuple de Dieu est présent à tous les peuples de la terre, empruntant à tous les peuples ses propres citoyens. Mais, comme le royaume du Christ n'est pas de ce monde (cf. Jn 18,36), l'Église ou Peuple de Dieu par qui ce royaume prend corps ne retire rien aux richesses temporelles de quelque peuple que ce soit ; au contraire, elle sert et assume toutes les richesses, les ressources et les formes de vie des peuples en ce qu'elles ont de bon ; en les assumant, elle les purifie, elle les renforce, elle les élève. Ce caractère d'universalité qui brille sur le Peuple de Dieu est un don du Seigneur lui-même » (ibid., 13).

« En vertu de cette catholicité — enseigne encore le Concile — chacune des parties apporte aux autres et à l'Église tout entière le bénéfice de ses propres dons, en sorte que toute et chacune des parties s'accroissent par un échange mutuel universel et par un effort commun vers une plénitude dans l'unité. C'est pourquoi il existe légitimement au sein de la communion de l'Église des Églises particulières jouissant de leurs traditions propres — sans préjudice du primat de la Chaire de Pierre qui préside au rassemblement universel de la charité, garantit les légitimes diversités et veille en même temps à ce que, loin de porter préjudice à l'unité, les particularités, au contraire, lui soient profitables. De là, enfin, entre les diverses parties de l'Église, des liens de communion intime quant aux richesses spirituelles, aux ouvriers apostoliques et aux ressources matérielles. Les membres du Peuple de Dieu sont appelés en effet à partager leurs biens, et à chacune des Églises s'appliquent également les paroles de l'apôtre : « Que chacun mette au service des autres le don qu'il a reçu, comme il sied à de bons dispensateurs de la grâce divine qui est si diverse. » (1P 4, 10, ibid. 13.)

L'Église de Rome a toujours voulu promouvoir, comme une mère (avec un amour tendre et fort, même si parfois elle l'a fait avec des défauts humains) la croissance de ses fils dans le monde entier, en veillant à ce que ne leur fassent pas défaut des pasteurs valables et capables, l'assistance du personnel missionnaire et les moyens d'évangélisa- tion. Une fois que les communautés eurent atteint une maturité de développement, elle a été heureuse de laisser entre les mains du clergé local la responsabilité de leur propre Église, en maintenant avec celle-ci la communion de foi et la discipline commune qui en découle. La présence, en nombre toujours croissant, d'évêques autochtones au sein des Conférences épiscopales dans le monde entier, et pareillement de prélats et d'évêques de tous les continents de la Curie romaine, démontre éloquemment le souci pressant de l'Église de mettre en valeur l'oeuvre de ses fils, sans distinction d'origine ni volonté d'hégémonie. En particulier après le Concile Vatican II, les Conférences épiscopales disposent d'un large champ d'initiatives pour le bien des fidèles de leur propre territoire ; elles ont toutefois pleinement conscience que, dans n'importe quelle difficulté, et pour tout éventuel besoin, elle peuvent toujours compter sur l'appui, la compréhension et l'aide de l'Église de Rome.


Le témoignage de foi des chrétiens chinois

Nous savons bien que nos frères et soeurs de Chine ont dû affronter, au cours de ces trente années, des épreuves difficiles et prolongées. Dans ces pénibles souffrances, ils ont donné la preuve de leur fidélité au Christ et à son Église ; ces courageux témoignages, on peut bien les comparer à ceux des chrétiens des premiers siècles de l'Église. Combien il est consolant de recevoir des nouvelles de la constante et intrépide fidélité des catholiques de Chine à la foi de leurs pères, et de leur filial attachement au Siège de Pierre. Tout cela, qui suscite notre profonde admiration, nous pousse encore plus à leur offrir notre affectueux appui et le soutien de nos ferventes prières.

Depuis quelque temps déjà, dans ce grand pays, les exigences de la liberté religieuse ont trouvé une plus grande compréhension. C'est pourquoi il importe de supplier le Dieu tout-puissant, Seigneur des nations, afin que, en application des principes de cette liberté, nos frères et nos soeurs de Chine puissent vivre sans obstacle leur foi, en restant dans l'unité catholique de l'Église.

Le Siège apostolique ne laisse passer aucune occasion de faire connaître aux catholiques de Chine à quel point ils sont au coeur même de l'Église catholique, laquelle regarde avec une particulière sympathie et affection toute l'admirable réalité de traditions et de culture, de profonde humanité et de riche spiritualité qui forme l'héritage historique et actuel de la grande nation chinoise, comme j'ai eu l'occasion de le mettre en évidence dans mon discours à Manille le 18 février dernier (2). Au nom de la sollicitude « pour toute les Églises » (2Co 11,28) qui nous unit, je vous demande avec insistance à vous aussi, chers frères dans l'épiscopat, de faire de même, en invitant les fidèles qui vous sont confiés à prier pour et avec leurs frères et soeurs de Chine.

Unissons donc nos prières pour qu'ils demeurent fermes dans la foi et perséverants dans une active charité. Supplions le Seigneur afin qu'il maintienne toujours plus vivante et joyeuse en eux l'espérance de la renaissance, un jour, de leur Église et d'une nouvelle Pentecôte de l'Esprit, afin qu'il fasse refleurir sur cette terre si aimée le message de Jésus.

Prions aussi pour que le Seigneur touche les coeurs de ceux qui sont en proie aux doutes et aux peurs, et aussi de ceux qui ont plié devant les dures épreuves, mettant ainsi en danger le dépôt de la foi qui leur avait été confié.

Faisons monter enfin vers Dieu notre prière pour la noble nation chinoise tout entière, afin qu'elle puisse toujours marcher sur les sentiers de la justice et du vrai progrès.

Prions surtout avec la conviction de l'Apôtre des nations : Dieu, qui « peut faire bien au-delà de tout ce que nous pouvons demander ou penser » (Ep 3,20), fera « tout concourir au bien de ceux qui aiment Dieu » (Rm 8,28).

Confions nos supplications à la puissante intercession de la Très Sainte Vierge, que les fidèles chinois invoquent avec tant de ferveur et de confiance, afin qu'elle obtienne de son Fils Notre Seigneur Jésus-Christ d'abondantes grâces et faveurs célestes pour ses bien-aimés fils et filles de la Chine.

La célébration toute proche du début du Nouvel An chinois (25 janvier) m'offre l'agréable occasion de manifester encore une fois l'affection et l'estime que je porte et que j'ai toujours portées au peuple chinois. Dans cette heureuse circonstance, je m'unis à tous les membres de la grande famille chinoise, où qu'ils se trouvent, et je souhaite à tous une bonne et sereine nouvelle année.

Avec une grande affection dans le Seigneur, je vous accorde la bénédiction apostolique.

Du Vatican, le 6 janvier 1982, en la fête de l'Épiphanie de Notre Seigneur, quatrième année de mon pontificat.

(2) DC, 1981, n° 1804, p. 268-270.





AUX ÉVÊQUES DU SÉNÉGAL EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Mardi, 26 janvier 1982




Chers Frères dans l’épiscopat,

Venus en visite auprès des tombeaux des apôtres Pierre et Paul, vous avez ainsi tenu une fois de plus à témoigner du caractère universel de l’Eglise, auquel les chrétiens d’Afrique sont si attachés, et je vous sais gré de votre présence commune ici, autour du cher Cardinal Thiandoum que vous accompagnez en cette occasion.

1. Essentiellement, je voudrais vous encourager à poursuivre avec ténacité l’oeuvre d’évangélisation et de présence efficace que vous avez si heureusement entreprise. Elle est indispensable pour l’avenir de l’Eglise en Afrique. Elle l’est tout autant pour favoriser l’épanouissement de l’homme africain dans la conjoncture difficile où se trouvent les pays dans leurs efforts de développement. Et à travers vous, qui êtes les promoteurs avisés de ce labeur, c’est à tous ceux qui, en communion avec vous, prennent une part active à cette mission, que je veux dire ma profonde estime. Je tiens à ce qu’ils sachent que leurs travaux, leurs joies et leurs peines sont connus du Pape et qu’il les porte dans sa prière.

2. Comme pour d’autres régions d’Afrique, ce serait une injustice de ne pas mentionner les catéchistes. Vraiment, leur foi rayonnante, leur zèle pour l’Evangile, me font penser aux premiers chrétiens, nos pères dans la foi. Ils méritent beaucoup de l’Eglise. Ils doivent être soutenus par une formation adaptée à l’évolution rapide des mentalités et des conditions de vie du monde d’aujourd’hui. Une telle formation leur permettra de se montrer vraiment compétents dans la cité comme au village, et surtout, elle doit aller de pair avec un approfondissement spirituel et doctrinal.

3. Dans ce pays, en grande partie musulman, vous veillez à aviver chez les chrétiens le sens de l’amitié, une amitié dont la sincérité se mesure à l’efficacité des gestes qu’elle suscite. Je ne veux pas m’attarder ici sur cette importante question du dialogue entre chrétiens et musulmans que je viens, encore tout récemment, d’aborder dans mes entretiens avec vos confrères d’Afrique du Nord. Mais en revanche, je tiens à relever l’importance que revêt en ce domaine l’initiative que vous avez prise en commun, dans le cadre de la Conférence épiscopale régionale d’Afrique de l’Ouest, en créant une commission spéciale pour promouvoir un tel dialogue. Je sais que vous commencez à percevoir les fruits de cette décision concertée: elle permet, peu à peu, un véritable renouvellement des mentalités, qui favorise le passage bénéfique de l’ignorance à la connaissance de la foi musulmane, de l’indifférence à l’ouverture, du refus au dialogue.

4. C’est pourquoi, après les catéchistes, je voudrais évoquer tous ceux et toutes celles qui, dans les oeuvres d’enseignement et d’assistance sociale et médicale, sont amenés, par leur compétence et leur charité, à être les pionniers d’un tel esprit, appelé de ses voeux par le Concile Vatican II. Il doit en effet imprégner, non seulement les prêtres et les missionnaires, mais tous ceux qui sont conduits à être au service d’autrui, et surtout ceux qui collaborent en vue de soigner, d’éduquer, ou qui apportent une aide précieuse dans tous les domaines de la vie sociale, culturelle ou économique.

5. Bien entendu, c’est la communauté fraternelle existant entre les évêques et les prêtres qui permet à l’Eglise de répondre à sa mission. Aussi bien devons-nous avoir une estime toute particulière pour chaque prêtre, et surtout peut-être envers celui qui est le plus loin, venu de l’étranger ou natif du pays, envoyé dans quelque village lointain. Sa joie, vous l’avez éprouvée, est de recevoir, aussi fréquemment qu’il est possible, la visite et l’aide, matérielle et spirituelle, de son évêque, de pouvoir s’entretenir avec lui comme avec un frère de ce qui sera le meilleur pour ceux qui lui sont confiés.

Cette fraternité entre prêtres, missionnaires, prêtres fidei donum et africains, entre évêques et prêtres, n’est-elle pas exemplaire pour tous, chrétiens, et non-chrétiens? Elle l’est, comme l’est aussi leur total désintéressement. Le prêtre a son honneur placé dans ce don total de lui-même à tous, comme dans la simplicité de sa vie, qui lui permet de vivre chaque minute comme en une maison de verre. N’est-ce pas encore ce style de vie qui constitue un encouragement dans le coeur de jeunes gens et de jeunes filles à suivre les traces des prêtres et des religieuses qu’ils auront rencontrés?

6. Ma pensée se porte encore vers ceux qui se préparent à la vie sacerdotale et religieuse. Je souhaite que vous puissiez, grâce à la collaboration de prêtres et de religieuses vraiment soucieux de leur avancée spirituelle, capables de les aider à se former un jugement droit, à partir d’un enseignement humain et théologique substantiel, préparer pour demain une relève solide dont le Sénégal, comme l’Afrique tout entière, a tant besoin. Je sais qu’en ce domaine, comme en d’autres, vous appréciez l’aide fraternelle de prêtres et soeurs d’autres pays, et je souhaite qu’elle se poursuive généreusement, d’autant plus que les Eglises dont ils proviennent bénéficient elles-mêmes largement de cet échange.

Ces paroles, trop brèves pour évoquer convenablement la richesse de l’Eglise sénégalaise, voudraient traduire aussi mon affection envers tous vos fidèles. Je pense aux familles vraiment chrétiennes, qui font ainsi avancer le règne de Dieu dans les réalités quotidiennes et qui constituent pour tous un encouragement, en étant un symbole vivant de l’amour de Dieu; je pense aussi aux familles qui éprouvent plus de difficultés à vivre cet idéal, mais qui font des efforts pour s’en rapprocher; je pense à toutes les personnes qui connaissent l’épreuve physique ou morale. Que tous sentent l’amour, exigeant et miséricordieux à la fois, de l’Eglise! Je prie l’Esprit Saint de leur donner sa lumière et sa force, et de tout coeur je les bénis, en vous donnant à vous-mêmes, Frères bien-aimés, ma Bénédiction Apostolique.





Reconnaître la valeur du mariage

Discours aux membres du tribunal de la Rote, 28 janvier


Le 28 janvier, dans la salle du Consistoire, le Pape a reçu en audience les membres du tribunal de la Rote pour la traditionnelle audience au début de l'année judiciaire et il leur a adressé le discours suivant (1) :

(1)Texte italien dans l'Osservatore Romano du 29 janvier. Traduction, titre, sous-titres et notes de la DC.


MONSIEUR LE DOYEN
CHERS PRÉLATS ET OFFICIAUX,

1. Je suis heureux que l'ouverture de la nouvelle année judiciaire du tribunal de la Sacrée Rote romaine m'offre l'occasion de vous rencontrer, vous qui accomplissez votre travail avec tant de zèle et avec une compétence si qualifiée.

Cette rencontre traditionnelle revêt cette année une note particulière car aujourd'hui, comme on le sait, entrent en vigueur les « nouvelles normes » que — après l'étude attentive de révision des dispositions précédentes — j'ai tenu à approuver pour votre tribunal et qui, je le souhaite, pourront rendre plus profitable le travail que vous faites avec une préparation juridique et un esprit sacerdotal pour le bien de l'Église.

Je vous salue avec affection et je vous exprime ma vive appréciation pour tout votre travail. J'adresse en particulier ma salutation cordiale à M. le Doyen sortant, Mgr Enrico Ewers, et à son successeur. Je les assure tous les deux de mon souvenir auprès du Seigneur pour qu'il récompense l'un pour le long travail accompli avec un généreux dévouement et qu'il assiste l'autre dans la charge qu'il commence aujourd'hui.

2. Il m'est cher d'attirer votre attention sur l'exhortation apostolique Familiaris consortio (2) où j'ai recueilli le fruit des réflexions faites par les évêques au cours du Synode de 1980.

En effet, si ce récent document s'adresse à toute l'Église et expose les tâches de la famille chrétienne dans le monde d'aujourd'hui, il intéresse également de près votre activité qui se déroule le plus souvent dans le domaine de la famille, du mariage et de l'amour conjugal. Le poids de votre rôle se mesure à l'importance des décisions que vous êtes appelés à prendre avec un sens de la vérité et de la justice en vue du bien spirituel des âmes, en reférence au jugement suprême de Dieu : ayant Dieu seul devant les yeux.

(2)DC, 1982, n° 1821, p. 1-37.


Au service de l'amour

3. En confiant à chacun de vous cette tâche ecclésiale, Dieu vous demande de poursuivre ainsi, à travers votre travail, l'oeuvre du Christ, de prolonger le ministère apostolique par l'exercice de la mission qui vous a été confiée et des pouvoirs qui vous ont été transmis pour que vous travailliez, que vous étudiiez et que vous jugiez au nom du Siège apostolique. Le déroulement de ces activités doit être adéquat à la fonction des juges mais concerne aussi celles de leurs collaborateurs. Je pense en ce moment à la tâche si difficile des avocats qui rendraient de meilleurs services à leurs clients dans la mesure où ils s'efforceraient de rester dans la vérité, l'amour de l'Église et l'amour de Dieu. Votre mission est donc avant tout un service de l'amour.

Le mariage est une réalité et un signe mystérieux de cet amour. « Dieu a crée l'homme à son image et à sa ressemblance : en l'appelant à l'existence par amour, il l'a appelé en même temps à l'amour. Dieu est amour et il vit en lui-même un mystère de communion personnelle d'amour. » (Familiaris consortio, FC 11)

Signe mystérieux, le mariage l'est comme sacrement. Un lien indissoluble unit les époux, comme le Christ et l'Église sont unis dans un seul amour (Ep 5,32-33).

Selon le dessin de Dieu, le mariage trouve sa plénitude dans la famille dont il est l'origine et le fondement. Le don mutuel des époux débouche dans le don de la vie, c'est-à- dire dans la procréation de ceux qui, en aimant leurs parents, leur redisent leur amour et en expriment la profondeur (cf. Familiaris consortio, FC 14).

Le Concile a vu le mariage comme un pacte d'amour (Gaudium et spes, GS 48). Ce pacte « suppose le choix conscient et libre par lequel l'homme et la femme accueillent l'intime communauté de vie et d'amour voulue par Dieu lui- même » (Familiaris consortio, FC 11). En parlant ici d'amour, nous ne pouvons pas le réduire à une affectivité sensible, à une attirance passagère, à une sensation érotique, à une impulsion sexuelle, à un sentiment d'affinité, à une joie de vivre.

L'amour est essentiellement don. En parlant d'acte d'amour, le Concile suppose un acte de donation unique et décisif, irrévocable comme l'est un don total qui veut être et rester mutuel et fécond.

Le consentement dans le mariage

4. Pour comprendre pleinement le sens exact du consentement matrimonial, nous devons nous laisser éclairer par la Révélation divine. Le consentement conjugal est un acte de volonté qui signifie et comporte un don mutuel qui unit les époux entre eux et ensemble les lie à leurs enfants éventuels avec lesquels ils constituent une seule famille, un seul foyer, une « Église domestique » (Lumen gentium, LG 11).

Vu de cette manière, le consentement matrimonial est un engagement à un lien d'amour où, dans le don de lui-même, s'exprime l'accord des volontés et des coeurs pour réaliser tout ce qu'est et signifie le mariage pour le monde et pour l'Église.

Un acte ecclésial

5. Il y a plus. Pour nous, le consentement conjugal est un acte ecclésial. Il fonde « l'Église domestique » et constitue une réalité sacramentelle où s'unissent deux éléments : un élément spirituel comme communion de vie dans la foi, l'espérance et la charité, et un élément social comme société organisée hiérarchisée, cellule vivante de la société humaine, élevée à la dignité de « grand sacrement », l'Église du Christ, où elle s'insère comme Église domestique (Lumen gentium, LG 1). C'est pourquoi, dans la famille fondée sur le mariage, il faut reconnaître dans une certaine mesure l'analogie même de l'Église totale avec le mystère du Verbe incarné où s'unissent dans une même réalité le divin et l'humain, l'Église terrestre et l'Église en possession des biens terrestres, une société ordonnée hiérarchiquement et le corps mystique du Christ (Lumen gentium, LG 8).

La signification du don total

6. Le Concile a souligné l'aspect de ce don. Il convient alors de s'arrêter ici un moment pour recueillir plus en profondeur la signification de l'acte de se donner en oblation totale par un consentement qui, s'il est situé dans le temps, a une valeur d'éternité. S'il veut être total, un don doit être sans retour et sans réserve. C'est pourquoi, dans l'acte par lequel le don s'exprime, nous devons accepter la valeur symbolique des engagements pris. Celui qui se donne le fait avec la conscience d'être obligé à vivre son don à l'autre. S'il accorde un don à l'autre, c'est parce qu'il a la volonté de se donner. Il se donne avec l'intention d'être obligé à réaliser les exigences du don total qu'il a fait librement. Si sous l'angle juridique ces obligations sont plus facilement définies, si elles sont davantage exprimées comme un droit qui s'accorde que comme une obligation qui se prend, il est également vrai que le don n'est pas seulement symbolisé par les engagements d'un contrat qui exprime sur le plan humain les engagements inhérents à tout consentement conjugal vrai et sincère. C'est ainsi que l'on arrive à comprendre la doctrine conciliaire de manière à lui permettre de récupérer la doctrine traditionnelle pour la placer dans une perspective plus profonde et, en même temps, plus chrétienne.

Toutes ces valeurs se trouvent non seulement admises, affinées et définies par le droit ecclésiastique, mais elles sont aussi défendues et protégées par lui. Cela constitue en outre la noblesse de sa jurisprudence et la force des normes qu'elle applique.

Reconnaître la pleine valeurdu mariage

7. Mais il n'est pas purement imaginaire, surtout aujourd'hui, le péril de voir mis en discussion la valeur globale de ce consentement, par le fait que quelques éléments qui le constituent, qui en sont l'objet ou qui en expriment la réalisation, sont toujours plus souvent distingués ou même séparés, selon l'attention qu'y portent des spécialistes dans des domaines différents ou la spécificité propre des différentes sciences humaines. Il serait inconcevable que le consentement en tant que tel soit refusé pour un manque de fidélité survenu. Sans doute, le problème de la fidélité constitue souvent la croix des époux.

Votre première tâche au service de l'amour sera donc de reconnaître la pleine valeur du mariage, de respecter de la meilleure manière possible son existence, de protéger ceux qu'il a unis dans une seule famille. C'est seulement pour des raisons valables, pour des faits prouvés que l'on pourra mettre en doute son existence et le déclarer nul. Le premier devoir qui vous incombe, c'est le respect de l'être humain qui a donné sa parole, qui a exprimé son consentement et fait ainsi le don total de lui-même.

La responsabilité des avocats

8. Suite au péché, la nature humaine a été incontestablement bouleversée, blessée. Elle n'a cependant pas été pervertie. Elle a été guérie par l'intervention de Celui qui est venu pour la sauver et l'élever jusqu'à la participation à la vie divine. Mais, en vérité, ce serait la démolir que de la considérer comme incapable d'un engagement vrai, d'un consentement définitif, d'un pacte d'amour qui exprime ce qu'elle est, d'un sacrement institué par le Seigneur pour la guérir, la fortifier, l'élever par le moyen de sa grâce.

C'est ainsi alors, dans le cadre de la perspective ecclésiale du sacrement de mariage, que se trouve placé le progrès de la science humaine, de ses recherches, de ses méthodes et de ses résultats. La continuité de ses efforts met également en relief la fragilité de quelques unes de ses conclusions antérieures ou des hypothèses de travail dont on ne peut pas conserver les évaluations.

Pour ces raisons, en prononçant la sentence, le juge reste, en définitive, le responsable de ce travail commun dont j'ai parlé au début. La décision devra être prise dans la perspective globale déjà rappelée et que l'Exhortation apostolique a voulu mettre davantage en lumière.

Pendant que l'examen sur la validité d'un lien conjugal est en cours et que l'on recherche l'existence de raisons qui peuvent conduire à l'éventuelle déclaration de nullité, le juge reste au service de l'amour, soumis au droit divin, attentif à tout conseil ou expertise sérieuse. Il serait extrêmement dommageable que la décision revienne en définitive à l'un ou l'autre expert, avec le risque de voir la cause jugée d'après seulement l'un de ses aspects.

De là ressort la nécessité de reconnaître chez le juge le poids de son autonomie responsable dans le jugement, l'exigence de son accord avec l'Église et de sa sollicitude pour le bien des âmes. Ce n'est pas parce que, en matière de mariage, une sentence peut toujours être contestée pour de nouvelles raisons graves pouvant lui parvenir qu'il se sentira poussé à mettre moins de diligence pour la préparer, moins de fermeté pour l'exprimer, moins de courage pour l'émettre.

9. À cette lumière, on a une manière d'apprécier toujours davantage la responsabilité du « défenseur du lien ». Son devoir n'est pas celui de définir à tout prix une réalité inexistante ou de s'opposer de toute manière à une décision fondée mais, comme le dit Pie XII, il devra faire des observations « en faveur du lien, la vérité étant sauve » (Pie XII, Alloc. aux auditeurs de la S. Rote romaine, AAS, n. 36, 1944, p. 285). On note parfois des tendances qui, malheureusement, tendent à réduire son rôle. Ensuite, la même personne ne peut pas exercer deux fonctions en même temps : être juge et défenseur du lien. Seule une personne compétente peut assumer une telle responsabilité. Ce serait une grave erreur que la considérer comme ayant peu d'importance.

10. Le promoteur de justice, soucieux du bien commun, agira lui aussi dans la perspective globale du mystère vécu dans la vie familiale. De la même manière, s'il éprouve le devoir d'avancer une demande de declaration en nullité, il le fera pousser par la vérité et la justice. Non pas pour céder, mais pour sauver.

11. Dans la même perspective de la globalité de la vie familiale, il est enfin nécessaire de souhaiter une collaboration toujours plus active entre les avocats ecclésiastiques.

Leur activité doit être au service de l'Église. C'est pourquoi, il est presque considéré comme un ministère ecclésial. Il doit être un service de l'amour, qui demande le dévouement et la charité, surtout en faveur des plus dépourvus et des plus pauvres.

12. Pour terminer cette rencontre, je désire vous exhorter à collaborer « cordialement et courageusement avec tous les hommes de bonne volonté qui exercent leurs responsabilités au service de la famille » (Familiaris consortio, FC 86), et de manière tout à fait spéciale, vous qui devez en reconnaître la base et le fondement dans le consentement conjugal, sacrement d'amour, signe de l'amour qui lie le Christ à son Église, son Épouse, et qui est, pour l'humanité tout entière, une révélation de la vie de Dieu et l'introduction à la vie trinitaire de l'amour divin.

En invoquant le Seigneur pour qu'il vous assiste dans votre mission au service de l'homme sauvé par le Christ, notre Rédempteur, je vous accorde de tout coeur ma bénédiction propitiatoire de la grâce du Dieu de l'amour.




Discours 1982 - 16 janvier 1982