B. Paul VI Homélies 8055

11 mai 1975

VÉRITÉ ET CHARITÉ DANS LA COMMUNICATION SOCIALE

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Dans le contexte de l’Année Sainte, la IX° Journée mondiale des communications sociales ne pouvait qu’être célébrée d’une manière toute particulière, à cause de l’importance extraordinaire des mass média dans la promotion des deux objectifs majeurs du Jubilé — le renouvellement et la réconciliation — et tout autant sur la plan de l’évangélisation des peuples. C’est pourquoi Paul VI a voulu célébrer lui-même la Messe en la Basilique Saint-Pierre où se pressait la foule compacte des professionnels venus de tous les continents : éditeurs de publications, journalistes, représentants du théâtre, du cinéma, de la radio, de la télévision, techniciens de toutes spécialités. Parmi les principales personnalités nous avons noté : le Président de la Commission Pontificale des communications sociales, S. Exe. Mgr André Deskur avec le Secrétaire de ladite Commission, le R.P. Pancirolli, le Vice-Président du « Concilium de Laids », S. Exe. Mgr Lucas Moreira Neves avec le Secrétaire Mgr Uylenbroeck. La délégation de l’Union Catholique Internationale de la Presse (U.C.I.P.) était conduite pas son Président M. Louis Meerts et le Secrétaire, R.P. Pierre Chevalier ; celle de l’U.N.D.A. par son Vice-Président, le Comte Zorzi ; celle de l’Organisation Catholique du Cinéma (O.C.I.D.) par le délégué de la Présidence, M. l’abbé Segneri. De nombreuses agences catholiques nationales étaient représentées. « L’Osservatore Romano » avait délégué son directeur général M. Raymond Manzini. Après la liturgie de la Parole, le Saint-Père a prononcé une homélie en langue italienne. En voici la traduction :



Frères ! Ministres et Diacres de la Parole transmise !



Et d’abord, vous, spécialistes et générateurs de la Parole écrite, journalistes, informateurs, correspondants, commentateurs ; vous, formateurs de l’opinion publique et de la pensée quotidienne d’autrui, orateurs et interlocuteurs du peuple à l’écoute, fournisseurs du pain quotidien à la pensée communautaire ; et vous, éditeurs puissants, artisans et artistes, typographes et diffuseurs de la prodigieuse multiplication des feuilles parlantes, tous véhicules du mot imprimé et rayonnant dans la société éveillée à l’arrivée de votre message.

Et vous, qui traduisez et devancez le message imprimé avec celui, vif et animé par votre voix, prophètes éloquents et messagers alertes de la Radio, vous qui transformez en échos sonores de vos annonces personnelles, les silencieuses vibrations de l’éther, instruments presque angéliques du monologue-dialogue, rayonnant en cercle immense vers d’innombrables auditeurs inconnus.

Vous, artistes du théâtre et du cinéma ; vous maîtres et acteurs du prodige de ce siècle, la télévision, qui possède l’art magique d’offrir avec la voix et la musique, à présent avec la couleur, l’image parfaite, la scène vivante de l’événement et puis le drame de l’imagination, de la littérature, de l’histoire et encore la documentation scientifique et l’école des choses et des faits, l’expression raffinée de la culture; vous tous, amis bons et courtois, qui, par la prière et la méditation, participez à cette célébration de la Journée mondiale des communications sociales au moment où l’on célèbre également le rite du Jubilée qui caractérise cette Année Sainte, une manifestation qui trouve sa signification la plus profonde ici, en cette Basilique, mausolée triomphal élevé sur la tombe de l’humble pêcheur de Galilée, de nom et de fait devenu Pierre, c’est-à-dire pierre angulaire de cette mystérieuse, continuelle et séculaire construction de la demeure ouverte à l’humanité entière qu’est l’Eglise Universelle, catholique — une Eglise dont le Christ est l’architecte et en même temps le premier artisan — vous tous, donc, amis devenus pour un instant de silencieux disciples, écoutez !

Oui, écoutez ! Comme premier don, nous vous offrons un instant de silence. Il n’est probablement personne autant que vous, habitués au fracas de vos laboratoires de la Parole, qui puisse le goûter.

Oh ! Non pas pour la valeur de notre discours qui habite ce silence ; cela ne vaudrait certainement pas la peine de lui accorder votre attention ; mais pour un autre phénomène évident qui lui confère son titre à l’écoute; ce discours n’est pas, ou même ne veut pas être le nôtre ; il est aussi un écho, une parole transmise; et vous savez bien au nom de Qui ! Nous vous parlons au nom de Jésus Christ, Parole éternelle de Dieu, et non pour que vous fixiez votre pensée sur celui qui vous parle; il est lui aussi un instrument de communication sociale, conformément au mandat constitutif de l’apostolat dans l’Eglise : « Allez, enseignez toutes les nations » (
Mt 28,19) ; ou que vous l’arrêtiez sur le mystère central et infini du Verbe, expression divine, totale du Père, principe premier de l’Etre et parole de Celui qui conçoit et crée toute chose ; oh ! Réalité divine de la Parole ! (cf. Jn 1,3). Ce très rapide, mais très important coup d’oeil, pour ainsi dire un éclair de lumière théologique, permet d’illuminer, ne serait-ce qu’un moment, le plan psychologique, le vôtre, où chacun de vous est, à sa manière, un personnage de premier plan, et, dans sa relation, de découvrir son inspiration transcendante, grâce à cette assimilation divine qu’est la pensée et qu’est la parole qui en jaillit; puis, d’en retracer les finalités supérieures et immédiates qui sont la vérité et la charité. Pourquoi ces références à une si haute et difficile doctrine, sinon pour descendre aussitôt dans le vif de votre conscience professionnelle, et pour qualifier la dignité de votre vocation, de votre mission ?

Vous êtes au service de la pensée qui de la première phase de conception personnelle passe à la seconde, celle de la diffusion, de la transmission, de la communication, et devient sociale, sans limites à son universalité potentielle : ceci est culture, ceci est civilisation. Comment pourrait-on ne pas tenir votre profession en haute estime ? Vous êtes aux premiers rangs dans l’ordre des activités humaines. Ceci indique à chacun, qu’il opère lui-même activement dans les communications sociales ou qu’il en soit le client passif, l’importance — non discutée d’ailleurs — de ce service de dites communications ; mais cela indique aussi, en conséquence, son énorme et multiforme responsabilité. Responsabilité veut dire mérite et veut dire faute, sous deux aspects : celui de la genèse de la communication en question et celui des effets qui peuvent découler de la communication. Il n’est aucune chose de quelque importance dans la sphère humaine qui puisse se faire sans respecter les règles d’une déontologie propre. Vous connaissez parfaitement ces aspects de votre profession que nous n’avons pas hésité à qualifier de mission, considérant qu’une grande honnêteté, une grande probité, une grande objectivité président à l’origine de la communication sociale: la vérité est la première de ses lois. Nous rappelons que l’Exposition de la presse catholique, aménagée au Vatican à l’occasion de l’Année Sainte 1975, se présentait à l’enseigne de la « VERITAS » ; et l’expérience nous montre à quel point aujourd’hui l’atteinte à cet impératif essentiel de la communication est hélas nombreuse et multiforme. Nous remettrons cette enseigne d’or au fronton de l’activité qui la concerne.

Mais ceci n’est pas la seule enseigne qui doive assurer sa valeur morale à une pareille activité : il en est une autre qui doit s’y intégrer : celle de la caritas. Nous pourrions faire nôtre la merveilleuse formule de Saint Paul « Veritatem facientes in caritate », suivre le vrai en visant la charité (Ep 4,15). C’est dire que la communication sociale doit adhérer à la vérité, mais qu’elle ne saurait perdre de vue le bien qu’elle est destinée à procurer, c’est-à-dire le bien de la société.

Sur ce dernier point, il y aurait beaucoup à vous dire, ne serait-ce que pour expliquer comment cet objectif moral, s’il pose des conditions qualitatives, sélectives, limitatives à la communication ne porte cependant pas atteinte à sa juste liberté, n’en freine l’exercice que si elle outrepasse le droit public propre et dégénère en licence. C’est encore le cas d’invoquer l’autorité de Saint Paul : « Omnia mihi licent, sed non omnia expediunt » — tout m’est permis, mais tout n’est pas profitable — alors qu’il n’est pas permis de mettre sur le marché des vivres dangereux pour la santé physique de la population, comment pourrions-nous sans vergogne livrer au public un aliment malsain pour sa santé morale ? Nous savons bien — hélas — à quel point on évite généralement de donner à cette hygiène morale, spirituelle, civile, le poids qu’elle mérite ; mais notre souci pastoral nous incite d’autant plus vivement à dénoncer comme grave atteinte au bien de la société le fait de lui offrir en gourmande pâture des publications et des spectacles qui abusent de la dégradante propension à l’excitation personnelle ; et ceci nous incite à recommander aux citoyens, spécialement aux fidèles, à la jeunesse forte et consciencieuse, de pratiquer l’autodéfense, qui, avec l’abstention et, le cas échéant, la protestation, immunise les consciences contre les bassesses de certaines formes déplorables de communication publique.

A ce point-ci, notre discours déborde le cercle des agents de la communication sociale ; il s’adresse maintenant à vous, consommateurs, pourrait-on dire, des communications elles-mêmes, à vous, lecteurs, à vous, spectateurs. Eh bien, oui ; nous avons, à ce propos, une chaleureuse mais grave parole à adresser à tout notre Peuple afin de l’exhorter à comprendre l’importance énorme que le problème des communications sociales a pour tous ! Tous, Frères et Fils, vous devez tous, et particulièrement en cette Journée mondiale des communications sociales, écouter la voix de l’Eglise au sujet de ce problème. Exactement comme vous avez le droit d’exiger qu’un pays noble et civilisé soit servi par d’excellentes et nobles communications sociales, vous avez le devoir de choisir à votre usage celle qui est bonne et n’offense pas vos sentiments moraux et chrétiens ; vous avez le devoir d’avantager, de soutenir et de diffuser ce qu’on appelle la « bonne presse » ; le devoir d’encourager et de promouvoir cette forme de la diffusion de pensées et de moeurs cohérentes avec une haute conscience civique et religieuse.

Frères et Fils ! Oui, écoutez cette voix, écoutez ce cri de l’Eglise !




18 mai 1975

LE DON D’UNE VIE NOUVELLE

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Une foule immense, venue de tous les continents et au premier rang de laquelle se tenaient le Roi et la Reine des Belges, en pèlerinage à Rome, se pressait le dimanche de la Pentecôte dans le Temple le plus vaste de la chrétienté, insuffisant toutefois pour participer à la célébration. Aussi la foule qui stationnait sur la Place Saint-Pierre n’était-elle pas moins dense. Grâce à de nombreux diffuseurs, elle put, elle aussi, suivre — sinon voir — la cérémonie et entendre l’homélie que le Saint-Père a prononcée après la Liturgie de la Parole. Voici, en traduction ce qu’a dit Paul VI :



Vénérables Frères, Fils bien-aimés,



Parler de la Pentecôte !

Tout d’abord, deux sentiments contraires agitent spontanément l’âme lorsque l’on se propose de parler d’un thème d’une telle nature, d’une telle importance ; le premier est la crainte paralysante, celle que la Bible nous montre en Jérémie, le jeune prédestiné à qui le Seigneur donne l’ordre de prophétiser et dont notre Vulgate traduit ainsi le quasi-bégaiement : « ah ! ah ! ah !, Seigneur Dieu, voilà que je ne sais plus parler » (
Jr 1,6), tellement ce thème se place au niveau du sublime, atteint l’ineffable ; on voudrait plutôt s’abandonner à la silencieuse contemplation du mystère de la Pentecôte.

Par contre, l’autre sentiment est celui de l’enthousiasme exubérant, semblable à celui qui jaillit de la poitrine de Pierre, désormais promu du rôle de disciple à la fonction d’Apôtre, comme les autres onze ; au moment du retentissant événement, Pierre en effet s’écria : Hommes, écoutez : « Ce qui se passe maintenant est bien ce qu’a prédit le prophète Joël : Il arrivera dans les derniers jours, dit le Seigneur, que je répandrai mon Esprit sur toute chair. Alors vos fils et vos filles prophétiseront, les jeunes auront des visions et les vieillards des songes. Et moi, sur mes serviteurs et sur mes servantes je répandrai de mon Esprit et ils prophétiseront... » (Ac 2,14-18).

C’est indubitablement ce second sentiment qui prévaut, entraînant le premier avec lui, lorsqu’il s’agit d’annoncer à l’Eglise et au monde ce grand événement et ce qu’il révèle avant tout : la vie intime de Dieu, unique en son Etre et trois dans les Personnes. Jésus l’avait déjà prédit : « Et moi je prierai le Père et il vous enverra un autre Paraclet qui restera à jamais avec vous : l’Esprit de Vérité que le monde ne peut recevoir parce qu’il ne le voit ni le connaît ; mais vous, vous le connaîtrez, parce qu’il demeurera avec vous et qu’il sera en vous » (Jn 14,16-17). Et ainsi, Frères et Fils, le discours qui convient à la Pentecôte est celui qui exprime la doctrine, la théologie, la science de la Réalité religieuse suprême, le mystère même de la Vie, infiniment transcendante de Dieu. Ceci nous est aujourd’hui enseigné et jamais plus nous ne saurions l’oublier, même si nos facultés d’entendement s’en trouvaient noyées, submergées. Oui, Il est certes difficile de garder les yeux fixés sur le soleil, ils en, sont éblouis, brûlés ; et cependant, ces mêmes yeux ne pourraient rien voir si l’objet sur lequel ils se posent n’était pas éclairé par le soleil. Dieu est notre soleil.

Et c’est sa fulgurante lumière qui nous a révélé directement que les Relations intérieures à son Etre souverain sont des Personnes, les trois Personnes divines ; que le Père, éternel et premier principe, engendre sa propre Pensée, le Verbe, le Fils éternel qu’il a envoyé dans le monde afin que, revêtu de notre humanité, il prît le nom de Jésus et vécût son drame salvifique ; puis que l’Esprit Saint, lui aussi Personne divine, procède comme Amour de l’infinie complaisance et béatitude mutuelle du Père et du Fils. Cet Esprit Saint a, lui aussi, été envoyé dans le monde pour accomplir et dilater l’oeuvre du Fils, c’est-à-dire du Christ : voilà la Pentecôte, un moment de plénitude et lai source de la forme institutionnelle de cette oeuvre divinisante et salvatrice, l’Eglise « signe ou sacrement et instrument de l’intime union avec Dieu ». C’est ce qu’a affirmé le récent Concile (Lumen Gentium LG 1), indiquant ainsi le premier effet transcendant et le premier aspect surnaturel du nouveau rapport direct que Dieu a voulu instaurer avec son humble et sublime créature qu’est l’homme, que nous sommes. Mais le Concile poursuit en indiquant un second aspect de l’Eglise dans ce mystère : « Elle est aussi Signe ou Sacrement, et instrument de ‘l’unité de tout le genre humain’ ».

Aussi, en faisons-nous le pivot de tout le système religieux et théologique ; il définit les véritables, les authentiques, les nécessaires relations de l’humanité avec la divinité, relations qui maintenant se réalisent dans l’Esprit Saint. « En vérité, en vérité, je te le dis, enseignait Jésus à Nicodème, à moins dei naître d’eau et d’Esprit, nul ne peut entrer au Royaume de Dieu» (Jn 3,5).

A la suite d’un semblable discours nous voudrions aujourd’hui non seulement posséder l’Esprit à l’instant même, mais expérimenter les effets sensibles et prodigieux de sa merveilleuse présence au-dedans de nous. Car nous savons que l’Esprit est lumière, qu’il est force, don, infusion d’une vitalité supérieure, capacité de franchir les limites de l’activité naturelle ; il est richesse de vertus surnaturelles, richesse de dons, les célèbres sept dons qui rendent prompte et souple l’opération du Saint-Esprit ordonnée au système complexe de la psychologie humaine ; il est richesse de fruits spirituels qui revêtent de beauté le jardin fécond de l’expérience chrétienne (cf. Ga 5,22-23).

Mais, nous, maintenant, en annonçant le mystère de Pentecôte, nous nous arrêtons sur son seuil : comment, comment pouvons-nous y pénétrer ? Cette phase de l’événement pentécostal mérite également notre réflexion actuelle et y suffit pour l’instant. La préparation n’est pas superflue même si le grand Don de l’Esprit est gratuit et peut se propager en nous avec l’impétuosité de son souffle et le jaillissement inattendu de son feu ainsi qu’il advint en ce jour unique, en ce jour historique de notre première Pentecôte.

Ce jour d’ailleurs, ce jour prodigieux eut, lui aussi sa préparation. Une préparation dans le silence intérieur au sein duquel la conscience a mûri sa conversation, sa purification, sa metanoia. Nous les hommes d’aujourd’hui nous sommes trop extrovertis, nous vivons hors de chez nous et, peut-être, comme le dit un philosophe célèbre, en quittant la maison nous avons perdu la clé pour y rentrer. La rencontre avec l’Esprit Saint est sanctifiante, et même s’il laisse des traces de toutes parts sur la scène des choses extérieures (« rien n’est sans langage » — voir 1Co 14 1Co 10 — pour qui sait écouter— la rencontre se fait dans le secret du coeur, où se garde la parole du Seigneur (Jn 14,23), là où l’homme est lui-même, dans la solitude de sa personne. Voilà pourquoi, dans l’attente du grand jour, les Apôtres étaient réunis « persévérant ensemble dans la prière... avec Marie, la Mère de Jésus » (Ac 1,14) ce fut la première, la plus heureuse des retraites spirituelles. Au silence, donc, s’unit la prière qui, dans l’expression traditionnelle de l’Eglise, s’élève comme une imploration bien connue, une invocation, la manifestation d’un désir : viens ! viens, ô Esprit créateur; viens, ô Esprit Saint ! Et le miracle s’accomplit pour nous, au moment sacramentel de la justification, de la rémission de nos péchés moyennant, nous le savons, la confession qui ressuscite l’âme et l’élève à la coexistence avec la vie divine (cf. 2P 1,4), que nous appelons état de grâce, oui, grâce ineffable, état qui devrait nous être plus cher que la vie naturelle elle-même — comme nous l’enseignent les Saints — car il vaut pour elle et il vaut plus qu’elle ; c’est en effet un état de vie surnaturelle à laquelle est assurée, de par le fait même, la plénitude et la béatitude de la vie éternelle.

Parvenue à ce point, la préparation permet déjà d’entrer dans le mystère de Pentecôte : l’Esprit Saint, c’est-à-dire le Dieu Amour, vit dans l’âme et l’âme se sent envahie d’un besoin subit de s’abandonner à l’Amour, un « super-Amour » ; et elle se sent en même temps comme envahie d’un courage insolite, le courage propre de celui qui est heureux, de celui qui est sûr ; le courage de parler, de chanter, d’annoncer à autrui, à tout le monde « les merveilles de Dieu » (Ac 2,11). Et voilà qu’éclaté le miracle des langues qui pour nous, héritiers lointains mais pas inactifs d’un si grand prodige, se traduit dans la facilité et dans la joie du témoignage, devant tous et pour tous, dans un champ d’apostolat sans limites. Il ne s’agit pas seulement de ministère, mais bien de positive, de volontaire et courageuse activité exercée pour annoncer et diffuser le message du Christ ; il s’agit d’apostolat, nous le répétons.

Ici se termine aujourd’hui notre annonce de la Pentecôte : elle est l’annonce de la donation d’une nouvelle vie intérieure animée par la présence et l’énergie de Dieu qui se communique lui-même dans son Amour ; elle est la sublimation, de la vie naturelle en vie surnaturelle, vie de grâce ; elle est l’embrasement conscient, personnel de la double vocation de notre pauvre être caduc, timide, malhabile, devenu apte ainsi à la contemplation intérieure et à l’action extérieure ; la Pentecôte est le jour où nous fêtons la naissance de l’Eglise apostolique, une, catholique et sainte ; notre Eglise, l’Eglise du Christ ! Clamons notre allégresse !





25 mai 1975

CANONISATION DE JEAN-BAPTISTE DE LA CONCEPTION ET DE VICENTA MARIA LOPEZ Y VICUNA

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Une foule nombreuse de pèlerins, en grande majorité espagnols, se pressait dans la majestueuse et immense Basilique Saint-Pierre pour assister aux cérémonies de canonisation des Bienheureux Jean-Baptiste de la Conception et Vicenta Maria Lapez y Vicuna. Voici, en traduction, le discours que le Saint-Père a prononcé à cette occasion :



L’Eglise est en fête aujourd’hui, heureuse d’enregistrer dans la liste des Saints deux nouveaux noms qu’elle peut désormais déclarer avec certitude « inscrits dans le ciel » selon l’expression de Jésus (
Lc 10,20) ; ce sont ceux des nouveaux « canonisés » : le Bienheureux Juan Bautista de la Concepciôn, Réformateur de l’Ordre de la Sainte Trinité, qui vécut de 1561 à 1613 et la Bienheureuse Vicenta Maria Lopez y Vicuna, Fondatrice des Filles de Marie Immaculée qui vécut, le siècle dernier, de 1847 à 1890. Nous avons tous ressenti une grande joie en écoutant la lecture des deux Décrets relatifs et motivant par de sommaires mais décisives considérations, le jugement de l’Eglise au sujet des preuves et des mérites de la sainteté respective de l’une et de l’autre de ces figures déjà honorées de la béatification qui leur avait été reconnue ; nous avons eu ainsi la très heureuse occasion de proclamer leur canonisation.

La phalange des Saints grandit. Nous devons tous nous en réjouir pour la gloire de Dieu, pour l’honneur de Notre Seigneur Jésus-Christ, pour la joie qui en découle pour la Mère des Saints, l’Eglise Catholique et en particulier pour les Familles religieuses illustrées par l’oeuvre et par les vertus de leurs Saints Patrons; nous devons nous réjouir également pour l’édification de tout le Peuple de Dieu qui sait pouvoir vénérer en eux, deux des ses membres, deux de ses frères exemplaires, dignes d’admiration et de dévotion; et le peuple de Dieu sait aussi qu’il peut compter sur leur solidaire et efficace intervention prés du Christ Notre Seigneur, source unique de notre salut en vertu de la communion des Saints.

La phalange des Saints, officiellement déclarés tels, s’accroît, et, s’il plaît à Dieu, elle s’accroîtra encore durant cette Année Sainte, puis au cours des années successives. Mais il ne faudrait pas qu’on s’imagine que cette progressive augmentation des fils élus de l’Eglise est la conséquence d’une facile inflation. Qui connaît la complexité et la rigueur des procès préparatoires tant pour les Béatifications que pour les Canonisations sait parfaitement avec quelle prudence et quelle sévérité l’Eglise exige des preuves indiscutables de « vertus héroïques » et pouvons-nous dire, superlatives, éminentes, corroborées par des témoignages irréfutables analysés avec rigueur critique, selon des méthodes objectivement historiques, et mieux encore, sanctionnées par deux vérifications, l’une négative, celle dite de « non cultus » qui protège les juges du procès contre l’influence de quelque éventuelle mystification populaire ; et celle, positive, des miracles, considérés comme une sorte de témoignage transcendant d’un « placet » divin accordé à l’exceptionnelle reconnaissance de la sainteté que l’Eglise entend vénérer dans chacun des candidats aux honneurs des autels. La législation canonique est extrêmement sévère et prudente en cette matière et elle se maintient telle, même si quelque forme de procédure d’autre temps, trop ritualisée ou trop compliquée, doit être simplifiée, non sans maintenir toutefois, rigoureusement et sans complaisance, cet élément essentiel qu’est le contrôle des titres exceptionnels exigés pour une conclusion positive de chacun de ces procès.

Mais que la phalange des Saints aille en s’enrichissant de noms nouveaux au cours de la démarche de l’Eglise dans le temps, puis, que nous en soyons les témoins favorisés, doit être un motif de joie et d’espérance : l’Eglise reste bien vivante ; elle ne vieillit pas et fleurit toujours ; et, tandis que les vicissitudes de l’histoire souvent troublent sa pacifique progression et même parfois bouleversent et affligent sa normale démarche terrestre, elle réagit en sainteté, s’offrant à elle-même et offrant au monde le réconfort et l’exemple de quelques-uns de ses fils imprévus et tout à fait caractéristiques qui, avec l’admirable charisme de charité et d’autres vertus évangéliques, de dons et fruits mêmes du Paraclet, soutiennent la foi menacée des peuples et offrent à leur siècle et aux siècles suivants l’impérissable présence de l’Esprit vivifiant au sein de l’Eglise du Christ. Et cette simple réflexion qui pourrait se développer en philosophie de l’histoire et en théologie de l’Eglise pèlerine et militante, doit nous faire exulter aujourd’hui pour les deux Canonisations qui viennent d’être heureusement célébrés; que l’alimentent et la confirment ces quelques brèves notations biographiques ou, mieux, hagiographiques des deux nouveaux élus au titre officiel de sainteté.

La figure de Saint Jean Baptiste de la Conception, loin de s’être affaiblie dans la course des siècles, continue, inaltérable, à nous offrir l’intégrité et la fraîcheur de son témoignage de fils de l’Eglise, Jean-Baptiste naquit en 1561 dans un foyer profondément chrétien d’Almodovan del Campo, une région où vit le jour également Saint Jean d’Avila, un maître insigne de l’esprit que nous avons, lui aussi, canonisé nous-même. Il semble que ces deux existences, formées dans la même ambiance, se sont, par dessein divin, comme prolongées sans interruption, moins dans le temps, que dans une mission commune de réformateurs : le Maître d’Avila mourut précisément au moment ou Jean-Baptiste entrait dans sa neuvième année.

Voici un autre fait significatif et curieux : Jean-Baptiste avait quinze ans quand une grande sainte réformatrice, Thérèse de Jésus, que nous avons proclamée Docteur de l’Eglise, vint à Almodovar prendre possession d’un logement dans la même maison que le futur saint trinitaire. Cette floraison de Saints aux aspirations réformatrices, au début d’une étape postconciliaire, celle qui suivit le Concile de Trente, ne semble-t-elle pas instructive, pour notre époque de renaissance et de développement ecclésial croissant ? Il est évident, en effet, qu’une période déterminée ne peut se considérer comme époque de réforme authentique et féconde si elle ne produit pas une constellation de Saints. N’est-il pas opportun, à l’occasion de ces canonisations de l’Année Jubilaire de rappeler le 5° chapitre de la Constitution dogmatique Lumen Gentium qui traite de la vocation universelle et de la sainteté de l’Eglise ? Oui, nous pensons que le moment est favorable pour lancer à tous nos collaborateurs dans l’évangélisation, évêques, prêtres, diacres, religieux et laïcs, le défi de la sainteté, car nous savons parfaitement qu a son défaut le renouvellement se trouverait compromis et que serait perdu le fruit primordial et fondamental, tant du Jubilé que du Concile (voir aussi Christus Domini, n. 15). Ce n’est pas une simple coïncidence, vide de signification, le fait que Jean-Baptiste de la Conception soit canonisé au cours de cette Année Sainte et pour le X° anniversaire de la conclusion du Concile Vatican II, presque quatre siècles après sa mort. Le dernier Concile a imposé à l’Eglise le rythme de renouvellements mais de quel renouvellement s’agit-il ? Il ne peut évidemment être question d’un renouvellement indiscriminé. Ce sont les Pasteurs de l’Eglise, réunis sous la Présidence du Successeur de Pierre, qui ont indiqué le sens du renouvellement nécessaire à notre époque. Les problèmes ecclésiaux actuels trouvent leur solution dans la fidélité aux enseignements du Concile, et en suivant les sages directives de la Hiérarchie.

Saint Jean-Baptiste de la Conception nous enseigne de manière concrète avec sa vie, quelles doivent être les dispositions et les attitudes des réformateurs authentiques. Et particulièrement en ce qui concerne les familles religieuses, d’autant plus qu’il est entré dans l’histoire comme réformateur de l’Ordre de la Très Sainte-Trinité. Notre Saint, qui porta l’habit de l’Ordre dès sa 19° année, se prépara à sa mission en se confiant généreusement au Seigneur, en cultivant en son âme la piété eucharistique et mariale, avec le plus grand désir d’imiter la vie austère des Saints tel que la raconte le Flos Sanctorum qu’il lisait avec ferveur. Il s’absorba profondément dans les études, avide de se forger une solide formation théologique, basée principalement sur les Ecritures et les Saints Pères et qui lui sera très utile dans son ministère de prédicateur inlassable. Il voulait être un religieux observant, désireux d’embrasser la règle primitive, austère et pauvre, de l’Ordre et, pour elle, il brisa décidément avec la tyrannie des « obligations du monde » (Oeuvres III, 29). N’est-ce pas là, la démarche des Saints ?

Pour réaliser la réforme de son Ordre, il accomplit un pèlerinage à Rome ; et son oeuvre, tant en Espagne qu’en dehors, se voit soumise à de rudes épreuves. Peu lui importe d’ailleurs : « Il est certain, dit-il, que si je t’aime, Seigneur, je n’ai pas à avoir en cette vie honneurs ou gloire, mais seulement à souffrir par amour pour toi » (Oeuvres VIII, 128). Lorsque le Pape Clément VIII approuva la réforme, notre Saint retourna en Espagne pour appliquer fidèlement les normes, que lui avait données le Saint-Siège. Il exigea des moines qui embrassaient la vie réformée une stricte observance de la règle, une vie faite de prière, de pénitence et de pauvreté, vécue toujours dans un climat de joie, ce qui n’est nullement en contradiction avec l’austérité. Et toujours il fit preuve d’humanité et de délicatesse dans ses intervention ; mais en même temps de fermeté, de droiture et de soumission à ses supérieurs. Il en eut les fruits. Son oeuvre eut de grands résultats et les vocations se multiplièrent.

Quand sa vie fut à son déclin, il connut des épreuves, des contradictions: comment réagit-il ? Comme le font les Saints. Oui ; avec la charité ; et ainsi, son âme se purifia dans son renouvellement personnel et s’embrasa d’une plus grande sainteté. Quand il mourut à Cordoue à l’âge de 51 ans, il nous laissait dans son oeuvre et dans ses écrits une leçon éternelle : Il ne peut y avoir d’authentique réforme ecclésiale sans renouvellement intérieur, sans obéissance, sans croix. Seule la sainteté produit des fruits de renouvellement ! Que le Seigneur comble de ses bénédictions l’Ordre de Saint Jean de Mata et de Saint Jean-Baptiste de la Conception, un Ordre qui a précisément pour finalité le culte à la Sainte Trinité et l’apostolat libérateur parmi les chrétiens qui, à cause de contingences sociales particulières, risquent le plus de perdre la foi.

Dans un certain sens, cet apostolat caractérise également l’oeuvre de la nouvelle Sainte.

Vicenta Maria Lopez y Vicuna est plus proche de nous dans le temps. Elle naquit dans la noble et très chrétienne terre de Navarre le 24 mars 1847 pour mourir au seuil de notre siècle. Elle vécut une jeunesse sereine, durant laquelle mûrirent en elle les fruits d’une éducation chrétienne très soignée où son milieu familial laissa des traces éloquentes : la mère, un oncle prêtre, une tante religieuse Oh ! nous n’estimerons jamais assez haut l’importance formative du noyau familial ; c’est là que sont semées et cultivées, de manière irremplaçable, les connaissances et les vertus. Et Dieu bénit avec prédilection les familles authentiquement chrétiennes ; elles constituent le laboratoire le plus productif de vocations pour le service de l’Eglise. Vous avez, en Espagne, une tradition merveilleuse, glorieuse, féconde, en ce domaine.

Ceci, nous le rappelons maintenant, chers Fils, parce que nous avons l’espoir que cette Année Sainte se caractérisera, elle aussi, par une riche floraison de vocations, par « un accroissement numérique de ceux qui servent l’Eglise en lui consacrant entièrement leur vie, c’est-à-dire les prêtres et les religieux » (Bulle Apostolorum Limina, IV).

Notre Sainte était encore très jeune lorsqu’elle entendit l’appel divin retentir dans son coeur. Ce ne fut pas une décision facile à réaliser. Avec simplicité et douceur, sacrifice et charité, elle réussit à se dégager des perspectives que lui offrait une vie dans un monde paisible, confortable, flatteur.

En la fête de la Sainte Trinité de 1876, elle reçut l’habit religieux avec deux de ses compagnes ; c’est ainsi que naquit la Congrégation des Religieuses de Marie Immaculée ; une famille dont la mission est la sanctification personnelle de ses membres et l’assistance aux jeunes filles qui travaillent hors de leur propre foyer.

C’est à ces jeunes, aux prises fréquemment avec de graves difficultés et périls que Vicenta Maria consacra sa vie tout entière. En mettant dans la balance l’avenir de sa vocation, elle pourra dire : « Les jeunes ont gagné ! ». Et c’est à ces jeunes qu’elle se consacrera sans réserve pour leur assurer un foyer accueillant où elles puissent trouver une voix amie, la parole encourageante et désintéressée, la chaleur d’un coeur ; où elles découvriront l’immense richesse humano-divine de leur vie, le secret des valeurs éternelles ; de la paix intérieure et où elles pourront, en même temps, apprendre à se réaliser intégralement pour se rendre de plus en plus dignes devant Dieu et toujours plus parfaites en tant que jeunes.

De quelles merveilleuses intuitions peut être capable celui qui aime vraiment ! Quelle fine pédagogie sait appliquer celui qui parle le sublime langage qui s’apprend dans le coeur du Christ !

Notre Sainte possède déjà une expérience personnelle de son apostolat spécifique. Sa propre famille de Madrid l’a mise en contact avec cette classe laborieuse qui a tant besoin d’être aidée. Le désir de se consacrer à Dieu fait le reste. Elle-même ressent en son âme le besoin insatiable de ce renoncement pur, délibéré, amoureux qui convient au disciple du Christ « pour la gloire de Dieu, plus sensible. Plus pauvre. Plus mortifiée dans ses inclinations les plus naturelles. Risquant toujours plus de souffrir le mépris. Combien vitupèrent contre elle! Continuel effort, continuel sacrifice. Nécessité de l’époque ». Ce sont précisément ces raisons qui la poussent à réaliser la fondation, comme elle l’a écrit elle-même (cf. les Ecrits de la fondatrice, Cahier t. f. 80 r. O. c. 124-130).

Malgré sa mort prématurée, à 43 ans, non sans souffrances physiques et surtout morales — la croix est la compagne inséparable des Saints — la Mère Vicuna vit son oeuvre recevoir l’approbation du Saint-Siège; il y avait déjà des maisons réparties dans toute l’Espagne et Vicenta Maria pensait à fonder une maison à Buenos Aires. La congrégation s’ouvrait ainsi vers tous les horizons de l’Eglise, comme elle l’est aujourd’hui avec de nombreuses communautés disséminées en Europe, en Amérique, en Afrique et en Asie.

Nous nous souvenons bien du moment où elle fut béatifiée par notre vénérable prédécesseur Pie XII, durant la précédente Année Sainte. En cette Année Sainte actuelle qui coïncide avec l’Année Internationale de la Femme nous pourrions nous demander : « Quel message Sainte Vicenta Maria apporte-t-elle à l’Eglise et au monde de notre époque ? ».

En ouvrant le cycle des béatifications de l’Année Sainte avec celle de Marie Eugénie Milleret nous disions que « la sainteté, cherchée à tous les âges de la vie, est la promotion la plus originale et la plus élevée à laquelle puissent accéder les femmes ».

Sainte Vicenta Maria a senti, impérieuse, l’attirance de la charité se faisant service, une impulsion qui la poussait à prodiguer ses attentions à la femme, surtout à la plus jeune, la plus nécessiteuse d’orientation religieuse, d’assistance sociale, d’authentique perfection chrétienne ; en un mot, de promotion dans le sens le plus complet et le plus élevé du terme. Une tâche que, compte tenu des modalités diverses que nécessite notre époque, constitue encore une exigence importante du monde actuel.

Le charisme de la fondatrice a ainsi, pour nos temps encore, une pertinence toute particulière. Ce même charisme vous impose, religieuses de Marie Immaculée, un engagement et un compromis : l’engagement d’un authentique et constant renouvellement (cf. Perfectae caritatis, PC 2), le regard fixé sur votre Sainte Mère pour imiter son exemple de fidélité évangélique (cf. Mt 5,3) centrée sur la charité, et alimentée par l’adoration eucharistique et la dévotion à la Sainte Vierge, caractéristiques dominantes de la spiritualité de Vicenta Maria, autant que sa fidélité et son amour envers l’Eglise : en un mot, suivez sa trace dans la vie spirituelle et dans la vie apostolique.

Un compromis également : celui de la charité sociale qui constitue l’héritage principal de votre fondatrice. En près d’un siècle d’existence combien parfaitement votre congrégation a-t-elle su utiliser cet héritage en faveur de la promotion des jeunes, édifiant des lieux de résidence, des écoles professionnelles, des centres sociaux et missionnaires ! C’est avec joyeuse satisfaction que nous vous disons, à vous, chères religieuses de Marie Immaculée ici présentes et à toutes celles qui, n’ayant pu venir, ont en ce moment les yeux fixés sur cette assemblée ecclésiale : Courage ! En avant, toujours !

Chers Fils : l’Eglise aujourd’hui déborde de joie. Sa vitalité éternelle est fruit de la présence divine. Que s’élève de partout le chant d’action ! de grâces que l’Eglise dédie au Père et au Fils et à l’Esprit Saint qui la guident et l’embellissent sans cesse, ensemençant de Saints les sentiers du monde. Oui, réjouissons-nous, car Dieu a fait des merveilles dans l’âme de Saint Jean-Baptiste de la Conception et dans celle de Sainte Vicenta Maria ; leur passage sur notre terre attire nos regards, nos aspirations à des conquêtes toujours plus belles, nos désirs les plus pressants de transformation terrestre et transcendante. Grâces en soient rendues à la Sainte Trinité, du plus profond de nos âmes.

Nous voudrions que ce chant d’allégresse se traduise maintenant en un fervent message de félicitations pour l’Espagne toute entière. Elle le mérite parce que, dans sa séculaire trajectoire ecclésiale, elle nous offre deux nouveaux témoins de sa fécondité spirituelle et religieuse qui doivent servir de constant stimulant, de compromis éternel pour les générations présentes et futures. A l’exemple de vos Saints, restez toujours fidèles à l’Eglise ! Tous unis, prêtres, religieux et fidèles d’Espagne, poursuivez votre démarche sur la voie de l’adhésion et de la fidélité au message du Christ, faisant surgir par votre attitude des oeuvres généreuses qui servent la cause du bien spirituel et du progrès social de votre patrie. Voilà notre espérance, voilà nos désirs ; et en ce jour lumineux, nous les recommandons de manière particulière à Saint Jean-Baptiste de la Conception et à Sainte Vicenta Maria Lopez y Vicuna, pour la gloire de Dieu, Père, Fils et Esprit Saint.





B. Paul VI Homélies 8055