Discours 1995 - Vendredi 17 novembre 1995

Décembre 1995


ANNONCE DU VOYAGE APOSTOLIQUE EN FRANCE


Aux Catholiques de France,
Frères et Soeurs,

Au mois de septembre 1996, j’aurai la joie de venir à nouveau rencontrer l’Eglise qui est en France. Pour la première fois, je me rendrai dans l’Ouest, à Sainte-Anne d’Auray, où les fidèles de Bretagne aiment à se rassembler pour vénérer la mère de la Vierge Sainte. Je poursuivrai mon pèlerinage à Tours, pour prendre part au seizième centenaire de saint Martin, moine et évêque dont la prédication a contribué à enraciner l’Evangile dans les bourgs et les campagnes de la Gaule.
J’achèverai à Reims ma visite pastorale par la célébration du quinzième centenaire du baptême de Clovis, le roi franc venu à la foi chrétienne après une conversion longuement mûrie. Ce baptême a resserré fortement les liens de votre nation avec l’Eglise de Jésus-Christ.

La célébration de tels événements vous invite à prendre la mesure des dons que vous avez reçus de Dieu au long de votre histoire. Cette histoire a été marquée par des épreuves. Elle est riche de la sainteté de nombreux témoins. En elle, vous trouverez l’inspiration et le courage de votre avenir. Vos aînés ont su porter le flambeau de l’Evangile avec audace jusqu’aux extrémités de la terre. Ils ont fait preuve de créativité pour une pleine intelligence de la foi. Loin de vous complaire dans ce passé, ressaisissez le meilleur de votre héritage. Souvenez-vous de ce que les chrétiens de votre pays ont apporté à l’Eglise universelle, depuis ceux des premiers temps jusqu’aux générations récentes qui ont vécu la grande expérience du deuxième Concile du Vatican.

Lors de ma première rencontre avec vous, en tant que Successeur de Pierre, je vous avais appelés à renouveler votre fidélité aux promesses de votre baptême. Je vous adresse à nouveau cet appel, à vous qui devez transmettre aux générations à venir le trésor spirituel que vous avez reçu. Il est vrai que vous devez affronter, comme beaucoup de vos frères et de vos soeurs d’autres nations, les difficultés et les incertitudes de ce temps. Autour de vous, tous ne partagent pas vos convictions et certains s’y opposent parfois. Vous pourriez être inquiets et craindre que l’avenir de l’Eglise dans votre pays soit compromis en raison de la diminution des ressources pastorales dans vos communautés. Gardez l’espérance, car Jésus nous l’a promis: «Je suis avec vous pour toujours» [1].

Soyez les familiers du Christ. Méditez sa Parole qui est source de vie. Laissez son Esprit vous pénétrer de l’amour miséricordieux du Père. Cherchez dans la prière commune et dans le coeur à coeur personnel avec le Seigneur le soutien premier de votre foi. Soyez fidèles à la célébration de l’Eucharistie, où le Christ Sauveur, livrant sa vie, unit en Lui les membres de son Corps.

A la suite de l’Apôtre Pierre, je vous dis: soyez prêts à «rendre compte de l’espérance qui est en vous; faites-le avec douceur et respect» [2].

Dans un dialogue ouvert avec ceux qui ne partagent pas notre foi ou qui s’en éloignent, montrez votre joie d’avoir reçu la vérité sur l’homme que le Christ dévoile en plénitude; manifestez l’épanouissement et la liberté intérieure que vous apporte votre participation à la communion des baptisés; par votre amour mutuel et par votre généreux engagement de chrétiens, témoignez du bonheur de vivre selon l’Evangile.

En septembre 1996, je viendrai à votre rencontre, chers Frères et Soeurs de France, confiant dans tout ce que vous saurez entreprendre pour le bien de l’Eglise entière. Aujourd’hui, répondez avec assurance aux interrogations de notre société souvent troublée par les tensions résultant d’une multiplicité de courants et de propositions.

En raison de votre histoire, vous êtes, au regard du monde entier, une nation attachée à la dignité de l’homme et à la solidarité entre les peuples. Ne vous lassez pas de vous montrer fraternels à l’égard de tous ceux qui souffrent dans leur corps et dans leur coeur, des pauvres et des malades, de ceux dont la vie est précaire ou menacée, chez vous comme au-delà de vos frontières.

Aux jeunes catholiques de France, je demande de progresser ensemble dans la découverte du Christ et de prendre toute la place qui leur revient dans l’Eglise. Ils auront une responsabilité particulière lorsqu’ils accueilleront des jeunes venus de tous les continents à l’occasion des journées mondiales de 1997. Qu’ils s’y préparent dès maintenant! Qu’ils sachent partager le meilleur de leur expérience humaine, spirituelle et ecclésiale!

Chargé de servir l’unité et d’affermir mes frères dans la foi, j’appelle vos communautés à préparer le grand rendez-vous du Jubilé de la Rédemption en l’An 2000.

Il marquera une nouvelle étape pour le rassemblement de l’humanité dans le Christ, et pour ce règne d’amour, d’unité, de justice et de paix que le monde attend. C’est pourquoi j’encourage les diocèses de France, les paroisses, les mouvements, à répondre toujours mieux à leur mission. Par sa présence et par sa grâce, le Christ rend possible notre fidélité aux promesses du baptême.
J’adresse mon salut cordial à chacun de vous, à mes frères dans l’épiscopat, aux prêtres, aux diacres, aux religieux et aux religieuses, aux laïcs ayant une responsabilité ecclésiale, à tous les fidèles de France.

J’exprime ma sympathie à tous les habitants du territoire français. Je pense tout spécialement aux malades et aux plus démunis. En ce temps de Noël, alors que nous allons célébrer la venue de Jésus parmi nous, je vous offre à tous mes voeux affectueux et, en priant à vos intentions Notre-Dame, patronne principale de la France, sainte Jeanne d’Arc et sainte Thérèse de Lisieux, je vous donne de grand coeur la Bénédiction Apostolique.

Du Vatican, le 15 décembre 1995.


IOANNES PAULUS PP. II

[1] (Mt 28,30).
[2] (1P 3,15-16).



À S.Exc. M. REYNIER FLAES, NOUVEL AMBASSADEUR DU ROYAUME DES PAYS-BAS

Vendredi 15 décembre 1995


Monsieur l’Ambassadeur,

Je suis heureux d’accueillir Votre Excellence à l’occasion de la présentation des Lettres qui l’accréditent auprès du Siège Apostolique en qualité d’Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Royaume des Pays-Bas.

Je suis sensible aux paroles cordiales que vous m’avez adressées et aux différentes questions que vous venez de présenter; elles sont aussi, comme vous le savez, des préoccupations majeures du Saint-Siège, selon la mission spécifique qui est la sienne dans la vie internationale. Je me réjouis de ces attentions communes et de la qualité des relations qui unissent le Siège Apostolique et votre pays, relations auxquelles votre prédécesseur, le Comte van Limburg Stirum, a apporté une contribution notable. Je vous remercie de m’avoir transmis le message courtois et déférent de Sa Majesté la Reine Beatrix. Je vous saurais gré de lui exprimer en retour mes vives salutations et mes voeux cordiaux pour sa haute charge.

Vous avez évoqué l’un des défis majeurs de la société de votre pays, qui comme beaucoup d’autres est confrontée aux problèmes de cohabitation entre des personnes appartenant à des races, à des cultures et à des religions différentes. Tout en conservant son organisation spécifique, ses traditions particulières et ses valeurs culturelles, morales et spirituelles essentielles pour la cohérence nationale, un Etat a le devoir de demeurer ouvert et accueillant aux hommes qui cherchent une terre où s’installer. La véritable intégration suppose la reconnaissance par les nouveaux arrivants des règles qui régissent la vie de la communauté nationale, que tous se doivent de respecter, et le dialogue entre toutes les composantes de la société. Mais il faut aussi guider avec patience ceux qui veulent s’intégrer dans la collectivité qui les reçoit, pour qu’ils acceptent avec bienveillance les contraintes inhérentes à la vie sociale, tout en conservant leur propre culture. Le sens de l’accueil et de la solidarité, en particulier à l’égard des plus défavorisés – qualités que votre peuple s’attache à développer – ne peut que contribuer à faire croître chez tous une participation active à l’édification d’une société toujours plus conviviale et respectueuse des différentes sensibilités qui la composent.

Dans le cadre social, il convient de faire une place toute particulière à la cellule qui en constitue la base, l’institution familiale. Par elle, se construisent les liens humains fondamentaux de la société. C’est l’engagement stable entre un homme et une femme qui fonde la famille, édifiée sur les valeurs de la durée et de la fidélité, nécessaires pour le développement spirituel, moral, psychologique et physique de tous ses membres. Nous devons être assurés que les relations fraternelles qui s’apprennent dans la famille, par l’éducation et l’attention affectueuse de chacun, ne peuvent qu’aider à la croissance harmonieuse et pacifiée des personnalités.

En faisant mention de ma récente visite au siège de l’Assemblée générale des Nations unies, montrant ainsi l’attention et l’estime des Autorités néerlandaises envers les interventions du Siège Apostolique dans la vie internationale, vous avez rappelé quelques-uns des principes fondamentaux de la vie sociale, au sein d’une nation et dans les rapports entre les Etats et les peuples. Avec l’éclatement des régimes totalitaires, la promotion des droits de l’homme a connu des avancées significatives dans de nombreux pays. Mais on observe toutefois chez certains peuples la tentation de se replier sur eux-mêmes, de faire parler les armes plus souvent que d’accepter le dialogue et la négociation pour régler les conflits et pour faire advenir la paix dont tous ont besoin; dans ce domaine, je salue les efforts des Etats qui se sont employés à soutenir les négociations de paix et à apporter une aide matérielle, un réconfort moral et spirituel aux populations, dans les différents points du globe où se poursuivent des luttes fratricides. Je tiens à redire toute l’estime que je porte aux Autorités de votre pays, qui a l’expérience d’une tradition de dialogue, de vie démocratique et d’accueil, et qui a participé au processus de pacification dans différents continents, promouvant ainsi les valeurs de liberté, de justice et de solidarité.

Vous savez l’attachement du Saint-Siège au plus fondamental des droits de l’homme, sur lequel reposent tous les autres droits, celui de tout être humain à voir reconnaître sa dignité. En effet, le regard que nos contemporains portent sur leurs frères passe par l’éducation des consciences au respect de toute personne, depuis sa conception jusqu’au terme naturel de sa vie. L’existence de l’homme ne peut pas être fondée seulement sur la reconnaissance sociale que lui accorderaient ou que refuseraient de lui accorder ses frères en humanité. L’avenir de l’être humain et de la société est lié au regard que nous portons sur les personnes, en particulier les plus faibles et les plus démunies, car en promouvant leur dignité et en leur témoignant de la compassion, c’est toute l’humanité que nous faisons grandir. Devant elles, la raison nous pousse à reconnaître l’être profond, l’être spirituel, au-delà de ce qui apparaît au simple regard. Dans cet esprit, je souhaite que la pensée de l’Eglise catholique soit accueillie, et que les médias aient le souci de contribuer à la faire connaître avec objectivité.

Vous venez de rappeler ma récente visite à la célèbre église romaine Saint-Michel et Saint-Magnus, « l’église des Frisons », lors de la consécration de l’autel, en soulignant le désir de la communauté catholique néerlandaise de Rome de poursuivre la tradition d’accueil de ses compatriotes et de prière dans ce temple du Seigneur. Je me réjouis que les pèlerins de votre pays puissent trouver dans cette ville un point de référence culturel et un lieu de soutien spirituel.

Ma pensée se tourne aussi vers l’ensemble de vos concitoyens. Je souhaite qu’au sein de l’Europe ils puissent développer avec leurs frères le sens du dialogue et le désir de la pacification dont ils ont souvent su faire preuve. Je veux encore mentionner les catholiques des Pays-Bas, qui ont le souci de participer activement à la vie sociale de leur pays, grâce aux relations constructives qu’ils entretiennent avec les communautés d’autres confessions religieuses, dans un esprit oecuménique et de charité fraternelle.

Au moment où commence votre mission de Représentant du Royaume des Pays-Bas, je vous offre mes voeux les meilleurs. Je puis vous assurer que mes collaborateurs seront toujours prêts à vous donner, à vous-même et aux membres de votre Ambassade, le soutien attentif et cordial dont vous pourrez avoir besoin pour exercer votre charge, dans la confiance mutuelle dont sont imprégnées les relations diplomatiques qui unissent votre pays au Saint-Siège.

Sur Votre Excellence, sur ses collaborateurs et sur sa famille, ainsi que sur le peuple néerlandais et ses dirigeants, j’invoque de grand coeur l’abondance des Bénédictions divines.



Discours 1995 - Vendredi 17 novembre 1995