Discours 1999 179


AUX RESPONSABLES DE LA PASTORALE UNIVERSITAIRE DES CONFÉRENCES ÉPISCOPALES

Samedi 25 septembre 1999

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Messieurs les Cardinaux,
Vénérés frères dans l'épiscopat,
Très chers frères et soeurs!



1. Cette audience spéciale, à l'occasion de la rencontre mondiale des responsables de la pastorale universitaires des Conférences épiscopales, est pour moi un motif de joie car elle m'offre, entre autres, l'opportunité de vous exprimer ma vive satisfaction pour le travail que vous accomplissez dans les milieux universitaires de vos nations respectives. Je salue le Cardinal Pio Laghi, que je remercie des nobles paroles avec lesquelles il a interprété les sentiments communs. Je salue également le Cardinal Paul Poupard et les autres prélats présents, ainsi que les autorités académiques qui sont intervenues. Mon salut s'étend ensuite à vous tous qui consacrez vos énergies à un domaine aussi important que celui du monde universitaire.

Cette rencontre mondiale constitue certainement un enrichissement utile pour vous tous, car elle vous permet d'effectuer un échange d'expériences fructueux au niveau des Eglises locales. En outre, elle vous donne la possibilité de préparer ensemble le Jubilé des universitaires, qui réunira à Rome l'année prochaine de nombreux représentants d'Universités et d'Instituts scolaires de toutes les parties du monde.

Je sais que vous vous préparez avec zèle et dévouement à ce rendez-vous. A ce propos, je désire vous exprimer ma vive satisfaction pour le financement décidé par la Congrégation pour l'Education catholique, ainsi que par le Conseil pontifical de la Culture et le diocèse de Rome, pour la sensibilisation et la préparation des universitaires au grand Jubilé. Je vous le confie, ainsi qu'à tous les agents de la pastorale universitaire: ce sont des orientations à approfondir et des propositions d'actions, qui trouveront une réponse dans la créativité de chaque réalité locale, pour se réunir à nouveau, avec joie et enthousiasme, dans la célébration commune de la Journée mondiale de la Jeunesse et, surtout, dans le Jubilé des Professeurs universitaires de l'année prochaine.



2. Le thème que vous avez choisi - l'Université pour un nouvel humanisme - se situe courageusement sur le délicat point d'intersection entre les dynamiques du savoir et la parole de l'Evangile. Je suis certain que, confié à vos soins et à ceux des Universités catholiques et ecclésiastiques, il ne manquera pas de porter des fruits abondants. Votre intention est d'interpeller toute la communauté universitaire dans ses différentes branches (étudiants, enseignants, personnel administratif) et dans sa spécificité de lieu privilégié d'élaboration et de transmission de la culture: dans l'Evangile se trouve le fondement d'une conception du monde et de l'homme qui ne cesse de présenter des valeurs culturelles, humaines et éthiques qui peuvent influencer toute la vision de la vie et de l'histoire. C'est ainsi que se confirme la vocation originelle de l'Université, parfois remise en question par des influences dispersives et pragmatiques: être un lieu riche de formation et d'humanitas, au service de la qualité de la vie, selon la vérité intégrale de l'homme sur son chemin dans l'histoire. Elle est une culture de l'homme et pour l'homme, qui se diffuse et qui se greffe dans les divers domaines du savoir, dans les modalités et les formes des moeurs, dans l'organisation honnête et harmonieuse de la société. A ce propos, nombreux sont les problèmes auxquels la pastorale universitaire doit faire face dans son activité quotidienne. Des problématiques nouvelles sont apparues à la suite des profonds changements qui ont eu lieu en cette dernière période du millénaire. A la base de celles-ci se trouve le défi permanent constitué par les relations entre la foi et la raison, entre la foi et la culture, entre la foi et le progrès scientifique. Dans le contexte de l'Université, l'apparition de nouveaux savoirs et de nouveaux courants culturels est toujours liée, directement ou indirectement, aux grandes questions sur l'homme, sur le sens de son être et de son agir, sur la valeur de la conscience, sur l'interprétation de la liberté. Voilà pourquoi la tâche prioritaire des intellectuels catholiques est de promouvoir une synthèse renouvelée et vitale entre la foi et la culture, sans jamais oublier que dans la multiple activité de formation le point central de référence demeure le Christ, l'unique Sauveur du monde.



3. Très chers frères et soeurs! A travers votre vie et votre travail vous proclamez la grande nouvelle: «Ecce natus est nobis Salvator mundi»! Sur ce mystère se fonde la célébration jubilaire, qui invite chaque croyant à se faire l'annonciateur inlassable de cette joyeuse vérité.

Pour accomplir cette tâche apostolique, il doit cependant se laisser guider docilement par la Parole divine. C'est ce qui apparaît dans le testament apostolique de Paul aux anciens d'Ephèse: «Je vous confie - disait-il - à Dieu et à la Parole de sa grâce» (
Ac 20,32). L'Apôtre confie les anciens à la Parole, convaincu que ceux-ci, avant d'être porteurs de la Parole, sont portés par la Parole de Dieu. Et cela précisément parce que la Parole est puissante et est efficace. En tant que réalité vivante et agissante (He 4,12), elle a le pouvoir de sauver la vie (Jc 1,21), de procurer l'héritage parmi les sanctifiés (Ac 20,32), de communiquer la sagesse qui mène au salut (2Tm 3,15 2Tm 3,17), car elle est puissance de Dieu pour quiconque croit (Rm 1,16).

Dans cette perspective, le Concile Vatican II affirme que l'Evangile possède la force de renouveler sans cesse la vie et la culture, de les purifier et de les élever (cf. Gaudium et spes GS 58). On ne doit pas être découragé en constatant l'insuffisance de ses propres forces face aux difficultés. Cela fut également le drame de Paul, qui, cependant, conscient de la puissance de l'Evangile, affirmait en s'adressant aux Corinthiens: «Mais ce trésor, nous le portons en des vases d'argile, pour que cet excès de puissance soit de Dieu et ne vienne pas de nous» (2Co 4,7).



181 4. Chaque action apostolique dans le domaine universitaire doit viser à faire rencontrer personnellement le Christ aux jeunes, aux enseignants et à ceux qui agissent dans le monde académique.

Dans ce but, un service spécifique de pastorale universitaire se révèle d'une grande utilité, pour s'engager à animer et à coordonner les diverses réalités ecclésiales actives dans ce domaine: de l'Aumônerie des Collèges, des groupes paroissiaux aux groupes de Facultés. L'horizon de l'évangélisation de la culture ne se limite pas, en effet, aux frontières de la cité universitaire. Il traverse l'action ecclésiale tout entière et devient d'autant plus efficace qu'il réussit à s'intégrer dans une pastorale organique.

Dans ce cadre, il est souhaitable que dans chaque Université soit mise sur pied une Aumônerie, coeur de la pastorale universitaire. Elle doit être un centre dynamique de formation et d'initiatives culturelles spécifiques pour l'évangélisation. Sa tâche sera de cultiver un dialogue ouvert et franc avec les diverses composantes de l'Université, en proposant des chemins de recherche adaptés en vue d'une rencontre personnelle avec le Christ.

La promotion d'initiatives significatives au niveau national, comme le Conseil pour la pastorale universitaire au sein de la Conférence épiscopale et la Journée de l'Université, articulée selon un engagement de prière, de réflexion, de programmation sera également utile. Comme cela s'est déjà produit au niveau européen, il est opportun que soit instituée une coordination des aumôniers de chaque continent, en collaboration avec les organismes pastoraux des Conférences épiscopales, pour renforcer harmonieusement la richesse multiforme des initiatives locales.



5. Très chers frères et soeurs, l'Eglise vous invite à être des évangélisateurs de la culture. Le croyant, illuminé et guidé par la Parole de Dieu, ne craint pas de se confronter avec la pensée humaine. Au contraire, il l'embrasse comme étant sienne, certain de la transcendance de la vérité révélée qui illumine et valorise l'effort humain. La sagesse et la vérité proviennent de Dieu: là où se trouve l'effort de la réflexion honnête, là où existe la passion désintéressée pour la vérité, s'ouvre déjà une voie qui mène au Christ, Sauveur des hommes.

Très chers frères et soeurs! Soyez-en persuadés: vous n'êtes pas seuls dans votre tâche missionnaire exigeante. Le Christ marche avec vous! Soyez donc courageux en l'annonçant et en le témoignant: cette annonce possède la force et le pouvoir de secouer et d'émerveiller les auditeurs, en les poussant à une prise de position personnelle à son égard (cf.
Lc 2,34-35).

J'invoque la protection de Marie Sedes Sapientiae, sur vous, sur vos communautés universitaires et sur tous ceux que vous rencontrez dans votre ministère quotidien, et alors que je vous assure d'un souvenir particulier dans la prière, je donne de tout coeur à chacun mon affectueuse Bénédiction.



AUX EVÊQUES DE LA RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE EN VISITE AD LIMINA APOSTOLORUM

Lundi 27 septembre 1999

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Chers Frères dans l'épiscopat,



1. En accomplissant ensemble votre visite ad limina, vous venez demander à Dieu de faire grandir en vous la force intérieure et le dynamisme missionnaire qui animaient Pierre et Paul lorsqu'ils sont venus jusqu'à Rome pour témoigner de l'Evangile du Christ. Successeur de l'Apôtre Pierre, je suis heureux de vous accueillir, vous qui avez reçu la mission de guider l'Eglise catholique en République Centrafricaine, pour vous encourager et vous confirmer dans la foi commune reçue de nos Pères. Près de mes collaborateurs de la Curie romaine, vous recevrez le soutien et l'aide nécessaires pour remplir la charge qui vous a été confiée.

Je remercie Mgr Paulin Pomodimo, Evêque de Bossangoa, Président de votre Conférence épiscopale. En votre nom, il a exposé avec clarté les sentiments qui vous animent en ces moments privilégiés de réflexion sur votre ministère pastoral.

Lorsque vous rentrerez dans vos diocèses, portez aux prêtres, aux religieux, aux religieuses, aux catéchistes et aux laïcs de vos communautés le salut affectueux du Pape, qui prie le Seigneur de les fortifier dans leur vie chrétienne et dans leur engagement apostolique. A tous vos concitoyens transmettez mes souhaits cordiaux de paix et de prospérité, en une période importante pour l'avenir du pays.



2. Alors que s'approche le moment d'entrer solennellement dans la joie du grand Jubilé de l'An 2000, l'Eglise entière, prenant une conscience toujours plus vive de son mystère et de sa mission, est appelée à «élargir son regard de foi vers des horizons nouveaux pour l'annonce du Règne de Dieu» (Bulle d'indiction du grand Jubilé de l'An 2000 Incarnationis mysterium, n. 2). Je me réjouis vivement de constater que les signes de la présence active de l'Esprit de Dieu dans votre peuple sont nombreux. La création récente de deux nouveaux diocèses a mis en lumière la vitalité apostolique de vos communautés et l'ouverture des hommes et des femmes de votre région aux appels du Seigneur. Que les catholiques de Centrafrique y découvrent une invitation pressante à un dynamisme missionnaire renouvelé! Je vous souhaite à tous, et particulièrement aux nouveaux Evêques, de savoir répondre avec courage et audace aux besoins spirituels du peuple que vous avez reçu mission de rassembler pour constituer l'Eglise famille de Dieu.

Dans la situation difficile et complexe que connaît votre pays, l'Eglise a une responsabilité particulière pour maintenir tous les membres de la nation dans l'espoir et les aider dans leur recherche de raisons de vivre authentiques et crédibles, afin de regarder l'avenir avec confiance. Au cours des dernières années, elle a su être la voix des sans-voix en favorisant la réconciliation ainsi que l'émergence d'une conscience commune en vue de l'édification d'une communauté nationale unie et solidaire. Il est du devoir de l'Eglise de rappeler à temps et à contretemps les valeurs fondamentales liées à la dignité de tout être humain, ainsi qu'à la vérité et à la responsabilité de ses actes personnels; car Dieu veut que tous les hommes constituent une seule famille et se traitent mutuellement comme des frères. Dès lors, «annoncer le Christ, c'est donc révéler à l'homme sa dignité inaliénable que Dieu a rachetée par l'Incarnation de son Fils unique [...]. Parce qu'il a cette dignité humaine incomparable, l'homme ne peut vivre dans des conditions de vie sociale, économique, culturelle et politique infrahumaines» (Exhortation apostolique Ecclesia in Africa ). Je vous invite, ainsi que vos communautés, à poursuivre votre courageux combat pour le développement intégral de l'homme, pour la promotion de la justice et de la concorde entre toutes les composantes de la Nation.



3. Par son engagement social, l'Eglise entend jouer son rôle prophétique au service de l'homme et de sa dignité. En effet, il y a un lien étroit entre l'évangélisation et l'action sociale. Il n'est pas possible de proclamer le commandement de l'amour sans promouvoir une véritable croissance de la personne humaine et de la société. Je connais la générosité de vos communautés, qui s'exprime souvent par des moyens pauvres et limités mais riches de signification humaine et spirituelle. J'encourage vivement les personnes qui, avec un grand dévouement, se mettent au service de leurs frères et de leurs soeurs qui sont dans le besoin ou la détresse, des malades, des personnes seules, des vieillards ou des réfugiés venant de pays voisins. Que chaque chrétien, en ayant le sens du partage et en ouvrant avec générosité les trésors de son coeur, se considère comme un envoyé du Seigneur pour soulager la misère, combattre toute forme de marginalisation, annonçant ainsi par ses actes l'Evangile du Christ!

Vous avez voulu que les écoles catholiques prennent une place particulière dans votre service de la société centrafricaine pour préparer les jeunes aux engagements de la vie, à leur rôle civique et à leur devoir moral. En effet, ces écoles «sont à la fois des lieux d'évangélisation, d'éducation intégrale, d'inculturation et d'apprentissage du dialogue de vie entre jeunes de religions et de milieux sociaux différents» (Ecclesia in Africa ). Cette orientation doit être encouragée, avec la prudence qui convient, pour que l'Eglise contribue de manière efficace à ce que tous les jeunes puissent accéder à l'éducation, et qu'elle trouve les moyens de porter une attention privilégiée aux plus pauvres d'entre eux. Cela demande qu'une solidarité réelle de l'Eglise universelle continue à se manifester concrètement afin que soient assurées la présence et la formation humaine, culturelle et religieuse d'éducateurs en nombre suffisant, et que puissent être surmontés les problèmes matériels qu'un tel projet ne manquera pas de provoquer.



4. Dans vos diocèses, la pastorale des vocations connaît un nouvel élan, dont je me réjouis. Il est indispensable que tous les catholiques, en particulier au sein de leur vie familiale, prennent conscience qu'il est de leur responsabilité de promouvoir et d'encourager les vocations au sacerdoce et à la vie consacrée. Aux jeunes qui se sentent appelés par le Seigneur à se mettre à sa suite sur cette voie, je souhaite d'accueillir sans crainte le regard d'amour que le Seigneur pose sur eux et de lui répondre librement et généreusement. Il revient ensuite aux Evêques, avec l'aide des responsables chargés de l'accompagnement des vocations, puis des formateurs du séminaire, de discerner et de confirmer l'authenticité de l'appel reçu.

Pour permettre aux jeunes de progresser dans leur recherche et leur donner des éléments en vue d'approfondir leurs connaissances humaines, culturelles et spirituelles, la mise en place d'une année de propédeutique semble importante. Ainsi ils pourront entrer avec plus de profit dans le premier cycle du grand séminaire.

La formation des candidats au sacerdoce est une responsabilité essentielle de l'Evêque, qui exige de porter une attention particulière à son organisation ainsi qu'à la vie des formateurs et de chacun des séminaristes. Une sérieuse formation spirituelle, intellectuelle et pastorale, indispensable à l'exercice du ministère presbytéral, devra être associée à une solide formation humaine et culturelle. «Sans formation humaine adéquate, la formation sacerdotale tout entière serait privée de son fondement nécessaire» (Exhortation apostolique Pastores dabo vobis
PDV 43). Les futurs prêtres doivent acquérir les qualités humaines indispensables à la construction de personnalités équilibrées, fortes et libres. Il sera particulièrement important d'insister sur la maturation affective des candidats, élément décisif de l'éducation à l'amour vrai et responsable nécessaire à celui qui est appelé au célibat, qui consiste «à offrir, avec la grâce de l'Esprit et par la libre réponse de sa volonté propre, la totalité de son amour et de sa sollicitude à Jésus Christ et à l'Eglise» (ibid PDV 44).

Je salue cordialement chacun de vos prêtres. Ils sont pour vous des collaborateurs précieux et indispensables dans l'annonce de l'Evangile, et vous avez pour eux une sollicitude et une vigilance dont je me réjouis. Je les remercie de leur générosité à servir le Christ et son Eglise, dans des conditions souvent difficiles. Qu'ils se souviennent qu'en communion profonde avec leur Evêque, tout en étant des frères parmi leurs frères baptisés, ils ont pour mission de rassembler le Peuple de Dieu afin que tous ses membres, sanctifiés par l'Esprit Saint, s'offrent eux-mêmes en «victime vivante, sainte, agréable à Dieu» (Rm 12,1). Il s'agit donc pour les prêtres de mener une vie digne et sainte, conforme à leur vocation et au témoignage qu'ils ont à donner d'être des hommes de Dieu mis à part pour le service de l'Evangile, et ne se laissant pas attirer par les convoitises du monde (cf. Ep 4,22). «A la tête de la communauté, les prêtres doivent donc faire en sorte de ne pas rechercher leurs propres intérêts, mais ceux de Jésus Christ» (Décret Presbyterorum ordinis PO 9). Par une vigoureuse vie spirituelle, fondée sur la prière, l'Eucharistie et le sacrement de la Réconciliation, ils deviendront pour les fidèles des guides authentiques sur les chemins de la sainteté, à laquelle tous les baptisés sont appelés.



5. La vie consacrée, dans sa grande diversité, est une richesse de l'Eglise dans votre pays. La qualité spirituelle de ses membres, qui rejaillit sur les fidèles et qui est aussi un précieux soutien pour les prêtres, rend toujours plus présente dans la conscience du Peuple de Dieu «l'exigence de répondre par la sainteté de la vie à l'amour de Dieu répandu dans les coeurs par l'Esprit Saint, en reflétant dans le comportement la consécration sacramentelle que Dieu opère par le Baptême, par la Confirmation et par l'Ordre» (Exhortation apostolique Vita consecrata VC 33). J'encourage les responsables des Instituts présents dans vos diocèses à donner aux jeunes religieux et religieuses une formation humaine, intellectuelle et spirituelle enracinée dans la culture du pays, qui permette une conversion au Christ de tout leur être, pour que leur consécration dans la sequela Christi les configure toujours plus au Seigneur Jésus dans son oblation à son Père. Les personnes consacrées se souviendront aussi que l'appel qu'elles ont reçu comporte un engagement à se donner à la mission. Dans la fidélité à leur charisme propre, en communion et en dialogue avec les autres composantes ecclésiales, en premier lieu avec les Evêques, les Instituts religieux répondront avec générosité aux appels de l'Esprit et auront le souci de chercher des chemins nouveaux pour la mission, afin que le Christ soit annoncé à toutes les cultures, jusque dans les régions les plus lointaines.

Je profite de cette occasion pour rendre grâce à Dieu pour l'oeuvre immense réalisée en Centrafrique par les Instituts religieux depuis l'arrivée des premiers missionnaires il y a plus d'un siècle. Le développement d'une Eglise locale déjà bien constituée est le signe du dynamisme spirituel et apostolique qu'ils ont su insuffler en transmettant le message évangélique. Je remercie aussi les prêtres fidei donum et les laïcs missionnaires, qui manifestent concrètement leur solidarité et celle de leurs Eglises locales d'origine avec la mission en Centrafrique.



183 6. Vous avez souligné dans vos rapports que, dans vos diocèses, les laïcs sont nombreux à s'engager dans des mouvements et des associations catholiques. Je les félicite pour leur disponibilité et leur ferveur. Je les encourage vivement à faire de leurs différents groupes des lieux privilégiés pour développer leur engagement missionnaire au milieu de leurs frères. Qu'ils soient partout des signes de la miséricorde de Dieu en s'ouvrant largement aux besoins matériels et spirituels des autres! Qu'ils n'aient pas peur d'annoncer l'Evangile par une vie chrétienne exemplaire, conforme aux engagements de leur Baptême!

La formation des laïcs revêt une importance déterminante pour l'avenir de l'Eglise. En effet, elle a «comme objectif fondamental la découverte toujours plus claire de leur vocation personnelle et la disposition toujours plus grande à la vivre dans l'accomplissement de leur propre mission» (Exhortation apostolique Christifideles laici
CL 58). Je vous invite à porter une attention particulière à la formation doctrinale et spirituelle des jeunes et des personnes appelées à prendre des responsabilités à tous les niveaux et dans tous les domaines de la vie sociale. Dans un monde qui a besoin de retrouver des repères et des raisons d'espérer, l'enseignement de la doctrine sociale de l'Eglise permettra de préparer aux tâches politiques, économiques et sociales des chrétiens aptes à être des témoins actifs du Christ dans leurs milieux de vie et à participer efficacement à l'édification de la Nation.

Parmi les laïcs engagés de façon particulière au service de la communauté, je salue et je félicite les catéchistes, dont je connais la générosité, ainsi que leurs familles. Ils sont pour vous et pour les prêtres des collaborateurs irremplaçables dans l'apostolat. De nos jours, les changements en cours dans l'Eglise comme dans la société exigent pour chacun d'eux une préparation doctrinale et pédagogique approfondie ainsi qu'un constant renouvellement spirituel et apostolique. Je souhaite que, dans leur tâche si déterminante pour l'implantation et l'expansion de l'Eglise, ils manifestent un sentiment toujours plus grand de leur appartenance à la communauté ecclésiale et de la dignité de leur fonction.



7. Nombreuses et de tous ordres sont les menaces qui aujourd'hui pèsent sur la famille africaine et sur ses fondements, atteignant ainsi la cohésion de la société tout entière, car elle est un pilier irremplaçable de l'édifice social. «Du point de vue pastoral, cela constitue un réel défi, étant donné les difficultés d'ordre politique, économique, social et culturel auxquelles les foyers doivent faire face en Afrique, dans le cadre des mutations importantes de la société contemporaine» (Ecclesia in Africa ). Il est donc essentiel d'encourager les catholiques à travailler de toutes leurs forces à préserver et à promouvoir les valeurs fondamentales de la famille. Les fidèles doivent avoir en haute considération la dignité du mariage chrétien, qui reflète et réalise l'amour du Christ pour son Eglise. C'est pourquoi on doit enseigner clairement la vérité sur le mariage et la famille tels que Dieu les a établis, rappelant notamment que l'amour que se portent l'époux et l'épouse est unique et indissoluble, et que, grâce à sa stabilité, le mariage contribue à la pleine réalisation de leur vocation humaine et chrétienne.

Une sérieuse préparation des couples, tenant compte de leur situation particulière et de leur culture, leur fera prendre conscience que le sacrement du mariage est une grâce que Dieu leur fait pour l'épanouissement de leur amour tout au long de leur vie. Il convient donc de les aider à acquérir la maturité humaine qui leur permettra d'assumer leurs responsabilités d'époux et de parents chrétiens, et de leur offrir une solide spiritualité matrimoniale pour découvrir dans le mariage et la vie familiale des moyens de sanctification. Tout au long de leur existence, qu'ils trouvent auprès de leurs pasteurs ainsi que dans la communauté chrétienne, notamment dans le témoignage de vie évangélique des autres familles, un soutien pour affronter les tâches et les difficultés quotidiennes!



8. Pour exprimer sa mission de communion entre tous les hommes, l'Eglise, appelée à être signe et sacrement de l'unité du genre humain, doit maintenir et promouvoir des relations fraternelles avec tous en vue de l'édification d'une société unie et solidaire. Le développement, dans un esprit de dialogue, de la collaboration entre les disciples du Christ ainsi qu'avec les autres croyants et tous les hommes de bonne volonté, ne pourra que contribuer au bien commun. Toutefois, on veillera à aider les catholiques à opérer un sérieux discernement au niveau de la foi et de son expression ecclésiale, notamment dans la rencontre avec des frères baptisés d'autres confessions chrétiennes, afin de favoriser des relations fondées sur la vérité, prenant en compte ce qui unit mais aussi ce qui empêche encore la communion totale. 

Dans une société où se développe le pluralisme religieux, il devient aussi de plus en plus nécessaire de porter une attention particulière aux relations avec les musulmans. Une connaissance authentique des valeurs spirituelles et morales de l'Islam, fondée sur une volonté de respect mutuel, facilitera une meilleure compréhension ainsi qu'une sincère acceptation de la liberté religieuse. Dans cette perspective, je vous encourage, comme certains d'entre vous le font déjà, à former des experts en sciences des religions et des questions interreligieuses, qui seront à même, avec clairvoyance et sagesse, d'instaurer un dialogue authentique avec les autres croyants et de conseiller les communautés chrétiennes plus directement concernées.

9. Chers Frères dans l'épiscopat, alors que vous allez retourner dans votre pays, je vous invite à fixer les yeux sur l'avenir avec confiance. La proximité de l'année jubilaire, où nous célébrerons le bimillénaire du mystère central de notre foi, est une puissante invitation à l'espérance. Je souhaite vivement que ce temps de grâce soit pour vos communautés une occasion privilégiée pour approfondir leur foi en Dieu Père, Fils et Esprit, qui est à l'origine et au terme de notre chemin. Que tous les fidèles de vos diocèses trouvent dans la contemplation de l'Incarnation du Fils de Dieu la révélation du visage du Père miséricordieux et compatissant! Qu'en demeurant à l'écoute de l'Esprit, ils puissent reconnaître les signes des temps nouveaux et rendre toujours plus vivante l'attente du retour glorieux du Seigneur!

Je confie votre ministère épiscopal à l'intercession maternelle de Marie, cette Vierge très sainte appelée à être la Mère du Seigneur. Qu'elle soit pour vous et pour le peuple qui vous a été confié la Mère qui montre à tous ses enfants la voie qui mène à son Fils, vous assurant de sa protection sur les routes de la vie!

De grand coeur, je vous donne la Bénédiction apostolique, que j'étends volontiers aux prêtres, aux religieux, aux religieuses, aux catéchistes et à tous les fidèles de vos diocèses.



À L'OCCASION DE L'INAUGURATION DE LA FAÇADE DE LA BASILIQUE SAINT PIERRE

Jeudi 30 septembre 1999

184   Messieurs les Cardinaux et vénérés frères dans l'épiscopat,
Monsieur le Président de la République italienne,
Monsieur le Président du Conseil des Ministres,
Messieurs les Ambassadeurs près le Saint-Siège et l'Italie,
Messieurs les directeurs et techniciens de l'E.N.I.,
Mesdames et messieurs!

1. Au centre de notre attention se trouve aujourd'hui la façade de la basilique vaticane, témoin depuis des siècles de grands événements qui ont laissé une trace dans l'histoire. Nous sommes réunis ici pour célébrer l'heureux couronnement des travaux de restauration, qui pendant plus de deux ans, ont occupé des ingénieurs, des architectes, des marbriers, des sculpteurs, des stucateurs, des forgerons, et d'autres corps de métiers. Grâce à leur travail, accompli avec une grande bravoure et compétence, la basilique vaticane, déjà fort belle à l'intérieur, se présente désormais dans toute la solennité majestueuse de la façade dont Maderno sut l'orner.

En adressant mon salut cordial à toutes les personnes réunies, avec une pensée particulière pour le Cardinal-Archiprêtre qui a interprété si noblement les sentiments communs, je désire exprimer ma profonde reconnaissance à tous ceux qui ont consacré leurs énergies à redonner à ce chef-d'oeuvre de l'architecture sa splendeur d'origine. Mes remerciements s'adressent en particulier à l'E.N.I. "Ente Nazionale Idrocarburi", (Office national des hydrocarbures italien), qui avec une grande générosité, a permis l'oeuvre de restauration, en y appliquant les technologies les plus modernes.

2. Tandis que nous nous arrêtons avec admiration devant le résultat prestigieux de ces travaux, s'élève spontanément dans notre coeur le désir de bénir le Seigneur, qui a donné à l'homme la capacité de maîtriser la matière et de l'ennoblir en y imprimant le sceau de l'esprit.

Combien d'efforts a exigé l'oeuvre que nous admirons! Les marbres, taillés par d'innombrables coups de marteau et de ciseau, puis polis avec un soin et une patience extrêmes, ont été unis de façon harmonieuse pour parer le sommet de la façade. Dans une vision transfigurée du temple de Dieu, il est possible d'en interpréter les divers éléments comme le symbole et l'image de la variété des dons et des charismes dont le divin Artisan a voulu orner l'Eglise, son Epouse mystique.

3. Le regard admiratif que nous élevons ce soir vers les structures architecturales de la façade anticipe celui des innombrables pèlerins, qui arriveront de toutes les parties du monde au cours de l'Année Sainte, désormais imminente. Ils pourront revivre les expériences des antiques pèlerins en extase devant la magnificence et la solidité des structures de cette imposante Basilique, que la foi des ancêtres a élevée "in honorem Principis Apostolorum", comme on peut le lire sur la dédicace, apposée par le Pape Paul V en 1612.

185 C'est pour Pierre et son sépulcre glorieux qu'a été édifié le Temple, couronné par la coupole de Michel-Ange, que le Pape Clément VIII, interprétant la pensée de son prédécesseur Sixte V, consacrait "sancti Petri gloriae", à la gloire de saint Pierre. C'est ce que confirment les nombreuses représentations de l'Apôtre, qui apparaissent sur chaque partie de l'édifice. Sur cette façade ne manque pas non plus, sur le haut-relief du Milanais Ambrogio Bonvicino, l'image de Pierre qui reçoit les clés du Christ.

4. Ainsi, d'une certaine façon, l'apôtre Pierre continue sa mission en tant que "vicaire de l'amour du Christ", en professant humblement, mais fermement, sa foi. Et "toute langue qui loue le Seigneur - comme le dit Léon le Grand - est formée par le magistère de cette voix" (Sermons, 3, 3).

On comprend alors aisément que notre joie face à ce chef-d'oeuvre restauré, ne peut être uniquement à caractère esthétique, mais doit s'ouvrir au charme intérieur de la réalité spirituelle qu'il contient. Pierre nous le rappelle à nous et à tous ceux qui, ce soir, sont unis spirituellement autour de son tombeau, comme il l'écrivit un jour des années 63-64 de Rome aux chrétiens d'Asie mineure qu'il avait évangélisés: "Vous-mêmes, comme pierres vivantes, prêtez-vous à l'édification d'un édifice spirituel, pour un sacerdoce saint, en vue d'offrir des sacrifices spirituels, agréables à Dieu" (
1P 2,5).

Très chers frères et soeurs, accueillons cette invitation à être des pierres vivantes, membres actifs de l'édifice spirituel qu'est l'Eglise. Que le Jubilé imminent nous trouve prêts à annoncer et à témoigner de notre foi avec un dévouement plus généreux. Les travaux de restauration nous rappellent que chaque croyant, chacun de nous, est appelé à une conversion constante et à une révision courageuse de vie pour pouvoir rencontrer le Christ de façon profonde et bénéficier pleinement des fruits de l'Année Sainte.

Qu'il en soit ainsi pour tous. Avec ce souhait, tandis que j'invoque l'intercession de la Très Sainte Vierge Marie et des saints apôtres Pierre et Paul sur les personnes présentes et sur tous ceux qui, à titre divers, ont collaboré à cette extraordinaire oeuvre de restauration, je donne volontiers à tous ma Bénédiction apostolique.





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