Discours 1998 - RENCONTRE AVEC LA COMMUNAUTÉ MUSULMANE DU NIGERIA

RENCONTRE AVEC LES MEMBRES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU NIGERIA

23 mars 1998


Mes chers frères dans l'épiscopat,

1. L'écho de l'Assemblée spéciale pour l'Afrique du Synode des Evêques, célébrée il y a environ quatre ans, est encore très présent en vous. Le Synode a représenté un moment de réflexion féconde et emplie de grâce, sur la force et sur la faiblesse de la communauté catholique qui continue à croître et à se développer sur ce continent. Les Pères ont longuement examiné dans toute sa complexité ce que l'Eglise est appelée à accomplir à la lumière de la situation actuelle. Avec une confiance inébranlable dans les promesses de Dieu, et malgré les difficultés présentes dans de nombreux pays, ils ont réaffirmé la détermination de l'Eglise à renforcer chez tous les Africains l'espérance en une véritable libération (cf. Ecclesia in Africa, n. ).

Comme il s'agit du but de votre engagement, je vous adresse aujourd'hui ce message et je place au centre de mon discours les paroles d'encouragement et de grâce écrites il y a presque deux mille ans par l'Apôtre Paul à son «fils préféré» Timothée: «Car ce n'est pas un esprit de crainte que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d'amour et de maîtrise de soi» (2Tm 1,7). Chers frères, votre ministère — que vous accomplissez de façon individuelle pour les fidèles de vos Eglises particulières et de façon collective pour la nation dans son ensemble — manifeste déjà le signe de cet esprit, et je désire soutenir votre courage et votre fermeté afin qu'ils demeurent toujours les signes distinctifs de la proclamation du salut que vous offrez en Jésus-Christ. Cela est d'autant plus nécessaire que s'approche le nouveau millénaire, temps de grâce, «heure de l'Afrique» (Ecclesia in Africa, n. ). Votre direction courageuse et ferme permettra à l'Eglise qui est au Nigeria d'affronter les défis de la nouvelle évangélisation en cette période de votre histoire.

Les mots seuls ne peuvent exprimer ma joie et ma gratitude pour avoir pu revenir au Nigeria et pour avoir célébré dans ce pays béni, la béatification du Père Cyprian Michael Iwene Tansi. Je remercie Mgr Obiefuna pour la gentillesse et la chaleur des paroles avec lesquelles, au nom de tous, il m'a souhaité la bienvenue. A mon tour, je vous salue, évêques du Nigeria ainsi que, par votre intermédiaire, tous les membres des Eglises locales. Assurez vos prêtres, vos religieux et vos laïcs — en particulier les malades, les personnes âgées, les enfants et les jeunes — de mon affection et de mon estime. «Grâce, miséricorde, paix, de par Dieu le Père et le Christ Jésus, notre Seigneur» (2Tm 1,2).

2. Dans l'œuvre d'évangélisation, l'Eglise doit franchir de nombreux obstacles et pourtant, elle ne se décourage pas. Au contraire, elle continue à rendre un témoignage éloquent au Seigneur, non seulement à travers la sollicitude spirituelle envers ses propres enfants, mais également à travers l'engagement à servir la société nigériane dans son ensemble. Sa force est vraiment une force qui dépasse toutes les ressources humaines — «Car ce n'est pas un esprit de crainte que Dieu nous a donné, mais un esprit de force» (2Tm 1,7) — et c'est pourquoi elle est certaine que de la semence qu'elle a plantée, Dieu tirera une récolte abondante. En vérité, la Parole de Dieu ne peut pas être enchaînée (cf. 2Tm 2,9), et il sera toujours certain que ce n'est pas à nous que revient la gloire, mais au «maître de la moisson» (Lc 10,2).

Toutefois, dans le même temps, l'importance et la crédibilité de la proclamation de la Bonne Nouvelle par l'Eglise sont étroitement liées à la crédibilité de ses messagers (cf. Ecclesia in Africa, n. ). C'est pour cette raison que ceux qui ont été appelés au «ministère de la réconciliation» (2Co 5,18) — tant les évêques que les prêtres — doivent manifester de façon claire et sans équivoque qu'ils croient fermement ce qu'ils prêchent. Je reprends les paroles de mon prédécesseur Paul VI: «Le témoignage de la vie est devenu une condition essentielle de l'efficacité profonde de la prédication. Par ce biais-là nous voici, jusqu'à un certain point, responsables de la marche de l'Evangile que nous proclamons» (Evangelii nuntiandi, n. EN 76).

3. Le Nigeria possède l'une des populations catholiques la plus nombreuse d'Afrique, et le nombre des croyants ne cesse de croître. C'est un signe de la vitalité et de la maturité croissante de cette Eglise locale. A ce propos, l'augmentation des vocations au sacerdoce et à la vie religieuse est particulièrement prometteuse. Puisque les prêtres sont vos principaux collaborateurs dans l'accomplissement de la mission apostolique de l'Eglise, il est essentiel que vos relations avec eux soient caractérisées par l'unité, la fraternité et la reconnaissance de leur dons. Ceux qui, à travers l'Ordre sacré, ont été configurés au Christ Bon Pasteur, doivent partager cette attitude de don total de soi pour le salut du troupeau et pour la diffusion de l'Evangile. Vivre la vie sacerdotale requiert une formation spirituelle approfondie et surtout un engagement à une conversion personnelle permanente. Votre vie et celle de vos prêtres devraient refléter l'esprit de la pauvreté évangélique et le détachement des choses et des attitudes du monde. Le célibat, en tant que don total de soi au Seigneur et à son Eglise, doit être préservé avec soin, et toute attitude pouvant être objet de scandale doit être soigneusement évitée et, si nécessaire, corrigée.

Avec plus de trois mille séminaristes actuellement en formation dans les grands séminaires interdiocésains existants, vous projetez d'en ouvrir d'autres; cela vous permettra de garantir de façon plus adéquate une juste formation des candidats au sacerdoce. En outre, les grands séminaires pour les religieux connaissent de bons résultats et une bonne croissance. Toutefois, même si leur nombre augmente, il demeure d'une importance vitale de fournir une direction et une orientation attentives dans la sélection et dans la préparation de ceux qui sont appelés au ministère sacerdotal dans l'Eglise. Soyez certains que, si vos séminaires sont conformes aux caractéristiques fondamentales du programme de formation sacerdotale de l'Eglise — surtout à celui qui est présenté dans le décret conciliaire Optatam totius — ils produiront des fruits excellents pour les générations futures.

4. Il y a quelques mois, la Conférence catholique épiscopale du Nigeria a défini son Plan pastoral national, un instrument qui sera très utile pour donner une impulsion et une orientation à la nouvelle évangélisation. En appliquant ce plan, vous devrez constamment évaluer son efficacité et y apporter ensemble les modifications nécessaires pour affronter les divers besoins pastoraux des Eglises particulières. Aucun plan pastoral véritablement national ne peut faire à moins de prendre en considération la façon dont les différences ethniques et culturelles peuvent s'harmoniser dans un esprit de collaboration et de communion ecclésiale authentiques. Votre soutien commun à des projets pastoraux comme l'Institut catholique de l'Afrique occidentale, représente l'une des façons de surmonter ces différences. Je désire vous encourager à faire de la Conférence épiscopale un instrument efficace pour parvenir à une unité, à une solidarité et à une action commune toujours plus grande entre les quarante-cinq juridictions ecclésiastiques du Nigeria. Etant donné le nombre croissant des vocations au sacerdoce et à la vie religieuse, je vous encourage à promouvoir des vocations missionnaires et à faciliter l'apostolat des prêtres et des religieux appelés à l'engagement missionnaire en dehors de leur diocèse et du Nigeria lui-même. Voici quelques-uns des défis que l'Eglise qui est au Nigeria doit affronter, une Eglise qui est à présent devenue adulte. Oui, le christianisme «est vraiment implanté sur cette terre bénie» (Ecclesia in Africa, n. ); l'Afrique est devenue la «nouvelle patrie du Christ» (ibid., n. ) et les Africains sont à présent les missionnaires les uns des autres.

Vos diocèses peuvent compter de façon particulière sur le témoignage et sur l'œuvre des nombreux religieux et religieuses qui, se donnant librement, contribuent tant à la vie et à la vigueur de votre communauté. Leur consécration spéciale au Seigneur les rend aptes à rendre un témoignage particulièrement efficace de l'amour de Dieu pour son peuple et fait d'eux des signes vivants de la vérité selon laquelle «le Royaume de Dieu est proche» (Mc 1,15). Ils représentent un élément à part entière de la vie et de la mission de l'Eglise qui est au Nigeria: que votre attention et votre sollicitude paternelle ne leur manquent jamais; soyez proches d'eux et préservez leur charisme, don extraordinaire du Seigneur.

A ce point, il est opportun d'exprimer la satisfaction pour l'engagement croissant des fidèles laïcs dans la tâche de promouvoir le Royaume de Dieu dans ce pays. En effet, la force du témoignage évangélique de l'Eglise dépendra toujours plus de la formation d'un laïcat actif, qui le rendra apte à apporter l'esprit du Christ dans les milieux politiques, sociaux et culturels et à offrir une collaboration toujours plus compétente dans la planification et la réalisation de vos initiatives pastorales. Vos Eglises particulières ont également reçu le don de catéchistes et d'«évangélisateurs», qui se dévouent avec abnégation dans la tâche d'annoncer le Christ et de faire connaître ses voies à leurs frères et sœurs. En outre, les dons spécifiques des sociétés d'apostolat des laïcs et des groupes de prière, à condition d'éviter soigneusement tout exclusivisme, représentent une force vitale pour la croissance de vos communautés de foi.

5. L'Assemblée spéciale pour l'Afrique du Synode des Evêques a considéré l'évangélisation des familles comme une priorité essentielle, car c'est à travers elles que la famille africaine est évangélisée (cf. Ecclesia in Africa, n. ). En outre, le mariage et la vie de famille sont les voies de sainteté normales pour la majorité des fidèles confiés à vos soins. C'est pourquoi vos efforts constants pour conduire les couples à la découverte de la vérité, de la beauté et de la richesse de la grâce contenues dans leur nouvelle vie commune dans le Christ, demeurent une partie essentielle de vos responsabilités pastorales et la façon la plus sûre de garantir une inculturation authentique de l'Evangile.

De même, il faut offrir de l'aide et une assistance aux jeunes qui représentent l'avenir de l'Eglise et de la nation, afin qu'ils surmontent les obstacles qui pourraient freiner leur développement: analphabétisme, chômage, oisiveté, drogue. Une excellente façon d'affronter ce défi est d'inviter les jeunes eux-mêmes à devenir les évangélisateurs de leurs camarades — car personne ne peut le faire mieux qu'eux. Il faut aider les jeunes à découvrir très tôt la valeur du don de soi, un facteur essentiel pour atteindre la maturité personnelle. Je désire ajouter que vous devez être particulièrement attentifs à faire tout votre possible afin que les jeunes Nigérians — en particulier les jeunes filles et les jeunes femmes — soient protégés contre le danger de devenir victimes d'une exploitation sans scrupule, qui souvent les soumet à des formes d'esclavage particulièrement dégradantes, ayant des conséquences tragiques et destructrices.

En outre, les Pères synodaux ont fait appel à l'Eglise qui est en Afrique afin qu'elle s'engage activement dans le processus d'inculturation, en respectant les deux critères importants de la compatibilité avec le message chrétien et de la communion avec l'Eglise universelle (cf. Ecclesia in Africa, n. ). Je vous encourage donc à faire tout votre possible — du point de vue liturgique, théologique et administratif — afin que votre peuple se sente toujours davantage chez lui dans l'Eglise et l'Eglise toujours plus chez elle dans votre peuple. Il sera nécessaire de conduire des recherches sur la Religion traditionnelle africaine et sur la culture africaine, et de faire preuve de discernement et de vigilance. Que l'Esprit Saint vous guide dans ces efforts!

6. Les membres des Eglises particulières confiées à votre soin sont les citoyens d'une nation qui doit à présent affronter divers défis importants dans la tentative d'opérer des changements politiques et sociaux. Dans ce contexte, votre rôle de guides de la communauté catholique acquiert une signification encore plus grande; des guides qui reconnaissent l'opportunité et la nécessité d'un dialogue constructif avec tous les secteurs de la société en ce qui concerne les bases justes et solides de la vie en société. Un tel dialogue, tout en s'efforçant de conserver ouvertes toutes les voies de communication dans un esprit de patience et de bonne volonté, ne vous empêche pas d'exposer ouvertement et avec respect les convictions de l'Eglise, surtout en ce qui concerne la justice et l'équité pour tous les citoyens, le respect des droits de l'homme, la liberté religieuse et la vérité morale objective qui doivent se refléter dans la législation civile.

Il est d'une importance vitale que tous les Nigérians collaborent afin de garantir que les changements nécessaires aient lieu de façon pacifique et sans souffrances inutiles pour les secteurs les plus faibles de la population. Il est donc clair que les efforts généreux des pasteurs et des fidèles, en étroite collaboration avec les chrétiens des autres Eglises et communautés ecclésiales, jouent un rôle important pour garantir une bonne issue à cette période de transition. En effet, comme les Pères du Concile Vatican II l'ont observé, une action commune de ce type «exprime vivement l'union déjà existante» entre les chrétiens et, si tous s'unissent au service du bien commun, «elle met en plus lumineuse évidence le visage du Christ Serviteur» (Unitatis redintegratio, n. UR 66).

7. Ce climat de dialogue et de coopération doit également s'étendre aux croyants musulmans de bonne volonté, car eux aussi «entendent imiter la foi d'Abraham et vivre les exigences du Décalogue» (Ecclesia in Africa, n. ). Aujourd'hui, en vous rencontrant, vous les évêques catholiques du Nigeria, je répète l'appel que j'ai prononcé hier lors de ma rencontre avec les représentants musulmans: l'appel à la paix, à la compréhension et à la collaboration réciproque entre chrétiens et musulmans. Le Créateur de l'unique grande famille humaine à laquelle nous appartenons tous, désire que nous rendions témoignage à l'image divine contenue dans chaque être humain, en respectant chaque personne avec ses propres valeurs et traditions religieuses, et en œuvrant ensemble pour le progrès humain et le développement humain à tous les niveaux.

Chrétiens, musulmans et fidèles de la Religion traditionnelle africaine devraient continuer à chercher sincèrement à se comprendre mutuellement. Cela garantira à tous les citoyens la véritable liberté d'agir pour le bien de la société nigériane, unis pour «promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté» (Nostra aetate, n. NAE 3).

8. «Car ce n'est pas un esprit de crainte que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d'amour et de maîtrise de soi» (2Tm 1,7). C'est précisément cet esprit, l'esprit du profond engagement pour l'Evangile et de la confiance totale dans l'amour de Dieu, qui vous permettra d'accomplir la mission à laquelle Dieu vous a appelés en tant qu'évêques. Confirmés par la foi et par l'espérance dans le pouvoir salvifique de Jésus-Christ, vous serez toujours prêts à affronter «l'engagement d'être des instruments de ce salut dans les différents aspects de la vie des peuples d'Afrique» (Ecclesia in Africa, n. ).

Soyez certains que mes prières vous accompagnent toujours et je vous assure une nouvelle fois de mon affection et de mon estime. En vous confiant, ainsi que tous les fidèles du Nigeria, à la protection de la Bienheureuse Vierge Marie, Mère de Dieu et Mère de l'Eglise, j'invoque sur vous «grâce, miséricorde, paix, de par Dieu le Père et le Christ Jésus notre Seigneur» (2Tm 1,2).

Amen.


CÉRÉMONIE DE DÉPART À L'AÉROPORT "NNAMDI AZIKIWE" D'ABUJA

23 mars 1998


Excellence, Monsieur le Général Sani Abacha,
Vénérés frères dans l'épiscopat,
Messieurs les représentants des Autorités de l'Eglise et de l'Etat,
bien-aimé peuple du Nigeria,

1. Il y a plus de seize ans, je me trouvais sur le tarmac de l'aéroport Murtala Mohammed de Lagos, faisant mes adieux au Président Shehu Shagari et aux représentants de l'Eglise et de l'Etat, après une visite pastorale inoubliable dans votre pays. Je demandais: «Me sera-t-il possible de revenir un jour au Nigeria? La Divine Providence du Dieu tout-puissant me permettra-t-elle de revenir un jour baiser votre sol, embrasser vos enfants, encourager vos jeunes et marcher encore une fois entouré de l'amour et de l'affection de la noble population de votre pays?» (Discours de départ, 17 février 1982).

J'ai répété cette prière et ce vœu de nombreuses fois au cours des dernières années. Je peux maintenant remercier Dieu d'avoir exaucé mes prières et de m'avoir accordé cette brève, mais si fructueuse visite de retour dans votre pays bien-aimé. Je vous assure que, tout comme je chéris le souvenir de ma première visite, ces jours-ci occuperont également une place particulière dans ma mémoire et dans mon cœur.

2. Et maintenant, le temps est venu pour moi de vous dire adieu. Je remercie Son Excellence le chef de l'Etat, ainsi que son équipe gouvernementale pour sa disponibilité, son accueil cordial et sincère. Je vous remercie, vous, les évêques catholiques du Nigeria, ainsi que tous les prêtres, religieux et fidèles laïcs qui ont participé dans la joie à la béatification du Père Cyprian Michael Iwene Tansi ainsi qu'aux autres moments de mon bref séjour parmi vous. Je remercie les pilotes et les chauffeurs, le personnel de la sécurité et les gardiens de la paix, les hommes et les femmes travaillant dans le domaine des médias, qui ont consacré leurs talents et leur savoir pour faire de cette visite un succès.

Je renouvelle mon estime et ma gratitude aux représentants des autres Eglises chrétiennes et aux communautés ecclésiales qui ont participé aux événements de ces derniers jours. A l'approche du troisième millénaire, notre amitié et notre coopération œcuméniques doivent devenir toujours plus intenses: une attitude de confiance et de respect doivent distinguer tous les fidèles du Christ tandis que nous marchons le long du chemin vers une compréhension et un soutien réciproques toujours plus grands!

J'exprime également mes remerciements aux membres de la communauté musulmane pour leur présence et leur participation. Je prie pour que l'engagement des chrétiens et des musulmans en vue d'établir des liens de connaissance et de respect réciproques, croîsse et porte des fruits, afin que tous ceux qui croient dans le Dieu unique puissent œuvrer ensemble pour le bien de la société, ici au Nigeria et partout dans le monde.

De même, j'adresse des paroles particulières de remerciement et de gratitude aux fidèles de la Religion traditionnelle Africaine, et je leur assure que l'Eglise catholique, à travers ses efforts visant à inculturer l'Evangile, cherche à mettre en valeur les éléments positifs de l'héritage religieux et culturel de l'Afrique comme base pour l'édification.

3. Chers frères et sœurs catholiques, je connais et j'ai constaté à nouveau votre désir d'œuvrer avec tous vos concitoyens en vue d'une plus grande justice et d'une vie meilleure, pour vous et pour vos enfants. Le temps est venu pour votre nation de rassembler ses richesses matérielles et ses forces spirituelles afin que tout ce qui engendre la division puisse être abandonné et remplacé par l'unité, la solidarité et la paix. De nombreuses difficultés restent encore à surmonter, et le dur travail qui vous attend ne peut être sous-estimé. Vous n'êtes pas seuls dans cette importante entreprise: le Pape est avec vous, l'Eglise catholique est à vos côtés, et Dieu lui-même vous donnera la force et le courage d'édifier un avenir lumineux et solide fondé sur le respect de la dignité et des droits de chacun.

En prenant congé de vous, il y a seize ans, j'ai adressé mes dernières paroles aux enfants du Nigeria, en leur rappelant que Dieu les aime et qu'ils sont le reflet de l'amour de Dieu. Ces enfants ont aujourd'hui grandi, et un grand nombre d'entre eux ont eu des enfants à leur tour; mais le message que je leur laisse aujourd'hui est le même que celui que je laissais alors. Les enfants et les jeunes d'Afrique doivent être préservés des terribles malheurs qu'ont subis des milliers de victimes innocentes, qui ont dû affronter la condition de réfugiés, qui ont été abandonnées à la faim, ou enlevées, maltraitées, soumises à l'esclavage ou encore tuées sans merci. Nous devons tous œuvrer en vue d'un monde dans lequel aucun enfant ne sera privé de la paix et de la sécurité, d'une famille stable, du droit de grandir sans peur et sans souci.

4. Je veux que vous sachiez que le Nigeria et les Nigérians restent dans mes prières. Dieu tout-puissant, le Seigneur de l'histoire, vous donnera la sagesse et la persévérance de continuer courageusement dans l'œuvre de développement et de paix. Votre pays possède les ressources pour surmonter les obstacles qui se dressent sur le chemin du progrès et pour édifier une société de justice et d'harmonie. Je désire également renouveler les appels que j'ai lancés de nombreuses fois à la Communauté internationale, afin de ne plus ignorer les besoins de l'Afrique, mais d'œuvrer avec vous et, dans un esprit de collaboration toujours renforcée, de soutenir tous les efforts visant à assurer le développement et la croissance pacifiques du continent. Tous les Nigérians doivent être fiers de leur nation; tous doivent jouer un rôle dans l'édification de leur avenir. C'est la prière que j'adresse à Dieu tout-puissant pour vous!

Dieu bénisse le Nigeria et tous les Nigérians! Dieu soutienne tous les peuples d'Afrique!



Avril 1998

Paroles du SAINT-PÈRE à la fin de la Via Crucis au Colisée

(Vendredi 10 avril 1998)


1. Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit.

"Dieu a tant aimé le monde qu'il lui a donné son Fils unique" (cf. Jn 3,16). Le Fils éternel de Dieu, qui a pris notre nature humaine par le Saint-Esprit dans le sein de la Vierge Marie, s'est fait "obéissant au Père jusqu'à mourir et à mourir sur une croix" (cf. Ph Ph 2,8) pour le salut du monde. L'Église médite chaque jour le mystère suprême de l'incarnation salvifique et de la mort rédemptrice du Fils de Dieu, qui s'est immolé pour nous sur la croix.

Aujourd'hui, Vendredi saint, nous nous arrêtons pour le contempler plus intensément. Dans l'obscurité d'une soirée déjà avancée, nous sommes venus ici, au Colisée, pour parcourir de nouveau, par l'exercice du chemin de Croix, les étapes de la marche douloureuse du Christ jusqu'à l'épilogue dramatique de sa mort.

La montée spirituelle sur le Golgotha, où Jésus a été crucifié et a rendu l'esprit, prend une valeur particulièrement significative dans ces ruines de la Rome impériale, surtout en ce lieu lié au sacrifice de tant de martyrs chrétiens.

2. Notre esprit, en ce moment, se reporte par la mémoire à ce qui est raconté dans l'antique Histoire sainte, pour y trouver des préfigurations et des annonces de la mort du Seigneur. Comment ne pas évoquer, par exemple, l'itinéraire d'Abraham vers le mont Moriah ? Il est juste de rappeler ce grand patriarche, que saint Paul appelle "père de tous les croyants" (cf. Rm 4,11-12). Il est le dépositaire des promesses divines de l'ancienne Alliance, et son histoire humaine préfigure aussi des moments de la Passion de Jésus.

Sur le mont Moriah (cf. Gn 22,2), symbole de la montagne sur laquelle le Fils de l'Homme allait mourir en croix, Abraham monta avec son fils Isaac, le fils de la promesse, pour l'offrir en holocauste. Dieu lui avait demandé le sacrifice de ce fils unique, qu'il avait longuement attendu dans une espérance constante. Abraham, au moment de l'immoler, se fait lui-même, en un sens, "obéissant jusqu'à mourir": mort du fils et mort spirituelle du père.

Ce geste, qui n'a été finalement qu'une preuve d'obéissance et de fidélité, puisque l'ange du Seigneur arrêta la main du patriarche et ne permit pas qu'Isaac fût tué (cf. Gn 22,12-13), constitue une annonce éloquente du sacrifice décisif de Jésus.

3. Comme le dit l'évangéliste Jean, le Père éternel a tant aimé le monde qu'il lui a donné son Fils unique (cf. Jn 3,16). L'apôtre Paul lui fait écho et dit: le Fils s'est fait "obéissant pour nous jusqu'à mourir et à mourir sur une croix" (cf. Ph Ph 2,8). La main des bourreaux ne fut pas arrêtée par l'ange au moment du sacrifice du Fils de Dieu.

Pourtant, à Gethsémani, le Fils avait prié pour que, si cela était possible, le calice de la Passion s'éloignât de lui, mais il exprimait immédiatement sa disponibilité totale à accomplir la volonté du Père (cf. Mt 26,39). Obéissant par amour pour nous, le Fils s'est offert en sacrifice, et il accomplit ainsi l'oeuvre de la Rédemption. De ce mystère bouleversant, nous sommes tous témoins aujourd'hui.

4. Restons en silence sur le Golgotha. Au pied de la Croix se trouve Marie, Mater dolorosa: cette femme au coeur déchiré par la douleur, mais prête à accepter la mort de son Fils. La Mère des douleurs reconnaît et accueille dans l'holocauste de Jésus la volonté du Père pour la rédemption du monde. Le Concile Vatican II rappelle à son sujet: "Elle avança dans son pèlerinage de foi et elle a gardé fidèlement son union avec son Fils jusqu'à la croix au pied de laquelle, non sans un dessein divin, elle se tint debout (cf. Jn 19,25) compatissant vivement avec son Fils unique, s'associant d'un coeur maternel à son sacrifice et donnant le consentement de son amour à l'immolation de la victime née d'elle; et finalement elle a été donnée par le même Christ Jésus, mourant sur la croix, comme mère au disciple, par ces paroles: 'Femme, voici ton fils' (cf. Jn 19,26-27)" (Lumen gentium LG 58).

Marie nous fut donnée à tous comme Mère, et nous sommes appelés à suivre fidèlement les pas du Fils, qui s'est fait pour nous obéissant jusqu'à la mort et à la mort sur la Croix: "Christus factus est pro nobis oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis" (Antienne de la Semaine sainte; cf. Ph Ph 2,8).

5. Il fait maintenant nuit noire. Contemplant le Christ mort sur la croix, nous pensons aux injustices et aux souffrances si nombreuses qui prolongent sa Passion en tout lieu de la terre. Je pense aux endroits où l'homme est offensé et humilié, frappé et exploité. En toute personne touchée par la haine et par la violence, ou marginalisée par l'égoïsme et par l'indifférence, le Christ souffre encore et meurt. Sur le visage des "blessés de la vie" se dessinent les traits du visage du Christ mourant sur la croix. Ave, Crux, spes unica! De la Croix jaillit aujourd'hui encore l'espérance pour tous.

Hommes et femmes de notre temps, tournez le regard vers Celui qui a été transpercé! Il a donné sa vie par amour pour nous. Fidèle et docile à la volonté du Père, il est pour nous un exemple et un encouragement. C'est précisément pour cette obéissance filiale que le Père "l'a élevé au-dessus de tout; il lui a conféré le Nom qui surpasse tous les noms" (Ph 2,9).

Puisse toute langue proclamer "que Jésus Christ est le Seigneur, pour la gloire de Dieu le Père" (cf. ibid. Ph 2,11).

Septembre 1998

COMMÉMORATION 1ER ANNIVERSAIRE DE LA MORT DE MÈRE TERESA DE CALCUTTA

Samedi 5 septembre 1998



Il y a exactement un an, dans la soirée du 5 septembre, Mère Teresa mourait à Calcutta. Son souvenir est vivant dans le coeur de chacun d'entre nous, dans toute l'Eglise et dans le monde entier. Avec la force de la foi en Dieu et de l'amour envers le prochain, quelle oeuvre merveilleuse a su accomplir cette petite femme, venue d'une humble famille!

En vérité, Mère Teresa a été un don de Dieu aux plus pauvres d'entre les pauvres; et, dans le même temps, elle a été et elle demeure un don singulier pour l'Eglise et pour le monde. Son don total à Dieu, reconfirmé chaque jour dans la prière, s'est traduit par un don total au prochain.

A travers le sourire, les gestes et les paroles de Mère Teresa, Jésus a marché à nouveau sur les routes du monde comme un Bon Samaritain, et il continue de le faire à travers les Missionnaires de la Charité, hommes et femmes, qui forment la grande famille qu'elle a fondée. Remercions les filles et les fils de Mère Teresa pour leur choix évangélique radical et prions pour chacun d'eux, afin qu'ils soient toujours fidèles au charisme que l'Esprit Saint a suscité chez leur Fondatrice.

N'oublions pas le grand exemple laissé par Mère Teresa, et ne nous limitons pas à la commémorer avec des mots! Ayons le courage de mettre toujours au premier plan l'homme et ses droits fondamentaux. Aux chefs des nations, qu'elles soient riches ou pauvres, je dis: ne vous fiez pas à la puissance des armes. Avancez de façon décidée et loyale sur la voie du désarmement, pour destiner les ressources nécessaires aux objectifs véritables et nobles de la civilisation, pour combattre unis contre la faim et les maladies, pour que chaque homme puisse vivre et mourir en homme. Tel est le désir de Dieu, qui nous l'a également rappelé à travers le témoignage de Mère Teresa.

Du ciel, puisse-t-elle nous assister et nous accompagner!



Octobre 1998

AUX PARTICIPANTS À LA XIIIème CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LA GRANDEUR ET LE PRIX DE LA VIE HUMAINE, À TOUT ÂGE ET DANS TOUTE CONDITION

31 octobre 1998


Messieurs les Cardinaux,
Vénérés frères dans l'épiscopat et le sacerdoce,
Mesdames et messieurs,

1. C'est avec plaisir que je vous souhaite la bienvenue, à vous tous qui participez à la Conférence internationale que le Conseil pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé a organisée sur un sujet qui représente traditionnellement l'une des préoccupations pastorales de l'Eglise. J'exprime ma vive reconnaissance à tous ceux d'entre vous qui consacrent leur activité aux problèmes complexes qui concernent la population âgée de la société, population toujours plus nombreuse dans toutes les sociétés du monde.

Je remercie Mgr Javier Lozano Barragán pour les nobles paroles à travers lesquelles il s'est fait l'interprète des sentiments de chacun. Votre Conférence a voulu traiter le problème avec ce respect des personnes âgées qui resplendit dans la Sainte Ecriture quand elle nous montre les figures d'Abraham et de Sara (Gn 17,15-22), décrit l'accueil que Syméon et Anne firent à Jésus (Lc 2,23-28), appelle les prêtres du nom d'«Anciens» (Ac 14,23 1Tm 4,14 1Tm 5,17-19 Tt 1,5 1P 5,1), résume l'hommage de toute la création dans l'adoration des vingt-quatre Anciens (Ap 4,4) et, enfin, désigne Dieu lui-même comme «le Vieillard» (Da 7,9-22).

2. L'ensemble de votre réflexion souligne la grandeur et le prix très élevé de la vie humaine, dont la valeur subsiste à tout âge et dans toute condition. Ainsi est réaffirmé avec autorité l'Evangile de la vie que l'Eglise, sondant avec attention le mystère de la Rédemption, reçoit avec un étonnement toujours nouveau; elle se sent alors appelée à l'annoncer aux hommes de tous les temps (cf. Evangelium vitae EV 2).

Votre Conférence ne s'est pas seulement contentée de réfléchir sur les aspects démographiques, médicaux et psychologiques de la vieillesse, mais elle a aussi cherché à approfondir son discours en regardant attentivement ce que la Révélation présente à cet égard, le confrontant à la réalité que nous vivons. L'action que l'Eglise exerça tout au long des siècles a, elle aussi, été mise en lumière d'une manière historique et dynamique, avec des propositions de mise à jour, utiles et nécessaires, de toutes les initiatives d'assistance, dans une collaboration responsable avec les autorités civiles.

3. La vieillesse est le troisième âge de l'existence: la vie qui naît, la vie qui croît, la vie qui baisse, ce sont-là les trois moments du mystère de l'existence, de cette vie humaine qui «vient de Dieu; c'est son don, son image et son empreinte, la participation à son souffle vital» (Evangelium vitae EV 39).

L'Ancien Testament promet aux hommes une longue vie en réponse de l'accomplissement de la Loi de Dieu: «La crainte du Seigneur prolonge les jours» (Pr 10,27). La conviction commune était que l'on devait considérer le prolongement de la vie physique jusqu'à la «vieillesse heureuse» (Gn 25,8), quand l'homme pouvait mourir «rassasié de jours» (Gn 25,8), comme la preuve d'une bienveillance particulière de la part de Dieu. Il faut aussi redécouvrir cette valeur dans une société qui, très souvent, ne semble parler de la vieillesse qu'en termes de problème.

Prêter attention à la complexité des problèmes qui concernent le monde des personnes âgées, cela signifie pour l'Eglise scruter un «signe des temps» et l'interpréter à la lumière de l'Evangile. Ainsi, d'une manière adaptée à chaque génération, elle répond aux éternelles interrogations des hommes sur le sens de la vie présente et future, et sur leur rapport réciproque (cf. Gaudium et spes GS 4).

4. Notre époque se caractérise par une augmentation de la durée de la vie qui, allant de pair avec un déclin de la fertilité, a conduit à un vieillissement notable de la population mondiale.

Pour la première fois dans l'histoire de l'homme, la société se trouve face à un profond bouleversement de la structure de la population, de sorte qu'elle est obligée de modifier ses stratégies d'assistance, avec des répercussions à tous les niveaux. Il s'agit de redessiner le projet de société et de rediscuter sa structure économique, comme aussi la vision du cycle de la vie et des interactions entre générations. C'est un vrai défi qui est posé à la société, et celle-ci se montre juste dans la mesure où elle répond aux besoins d'aide de tous ses membres: son degré de civilisation est proportionnel à la protection des composantes les plus faibles du tissu social.

5. Les personnes âgées doivent être appelées à participer elles aussi à cette oeuvre, alors que, très souvent, elles ne sont considérées que comme les destinataires d'interventions d'assistance. Avec les années, la population âgée peut parvenir à une très grande maturité dans les domaines de l'intelligence et de la sagesse. Aussi le Siracide nous avertit-il: «Tiens-toi dans l'assemblée des vieillards et, si tu vois un sage, attache toi à lui» (Si 6,34). Et encore: «Ne fais pas fi du discours des vieillards, car eux-mêmes ont été à l'école de leurs parents; c'est d'eux que tu apprendras la prudence et l'art de répondre à point nommé» (Si 8,9). Il en découle que la personne âgée ne doit pas être vue seulement comme objet d'attention, de sollicitude et de service. Elle aussi a une précieuse contribution à apporter à la vie. Grâce au riche patrimoine d'expérience qu'elle a acquis tout au long des années, elle peut et elle doit être dispensatrice de sagesse, témoin de l'espérance et de la charité (cf. Evangelium vitae EV 94).

Le rapport famille-personnes âgées doit être vu comme un rapport où l'on donne et où l'on reçoit. La personne âgée donne elle aussi: on ne peut ignorer son expérience qui a mûri au fil des années. Si cette expérience - comme cela peut arriver - n'est pas en harmonie avec les temps qui changent, il reste tout un vécu qui peut devenir source de nombreuses indications pour les proches, constituant la continuation de l'esprit de groupe, des traditions, des choix professionnels, des fidélités religieuses, etc. Nous connaissons tous les rapports privilégiés qui existent entre les personnes âgées et les enfants. Mais les adultes, eux aussi, s'ils savent créer autour des anciens un climat de considération et d'affection, peuvent puiser chez eux sagesse et discernement pour faire des choix prudents.

6. C'est dans cette perspective que la société doit redécouvrir la solidarité entre les générations: elle doit redécouvrir le sens et la signification de la vieillesse dans une culture trop dominée par le mythe de la productivité et de l'efficacité physique. Nous devons permettre à la personne âgée de vivre dans la sécurité et la dignité, et sa famille doit aussi être aidée dans le domaine économique, afin qu'elle constitue le lieu naturel des rapports entre les générations.

D'autres observations doivent encore être faites en ce qui concerne l'aide socio-sanitaire et de rééducation, qui s'avère bien souvent nécessaire. Les progrès des technologies au service de la santé allongent la durée de la vie, mais n'améliorent pas nécessairement sa qualité. Il faut élaborer des stratégies d'assistance qui tiennent compte, en premier lieu, de la dignité de la personne humaine et qui l'aident, autant que possible, à garder un sentiment d'estime de soi-même, afin qu'on n'en arrive pas, se sentant un poids inutile, à désirer et à demander la mort (cf. Evangelium vitae EV 94).

7. Appelée à des gestes prophétiques dans la société, l'Eglise défend la vie depuis son commencement jusqu'à sa conclusion avec la mort. Surtout en ce qui concerne cette dernière phase qui, souvent, se prolonge pendant des mois et des années - ce qui crée de très graves problèmes -, je lance un appel solennel à la sensibilité des familles pour qu'elles sachent accompagner ceux qui leur sont chers jusqu'au terme de leur pèlerinage terrestre. Comment ne pas rappeler les paroles chaleureuses de l'Ecriture: «Mon fils, viens en aide à ton père dans sa vieillesse, ne lui fais pas de peine pendant sa vie. Même si son esprit faiblit, sois indulgent, ne le méprise pas, toi qui es en pleine force. Car une charité faite à un père ne sera pas oubliée et, pour tes péchés, elle te vaudra réparation. Au jour de ton épreuve, Dieu se souviendra de toi» (Si 3,12-15).

8. Le respect que nous devons aux personnes âgées m'oblige à élever encore une fois la voix contre toutes ces pratiques qui abrègent la vie, et que l'on connaît sous le nom d'euthanasie.

Devant une mentalité sécularisée qui ne respecte pas la vie, spécialement quand elle est faible, nous devons souligner qu'elle est un don de Dieu, cette vie que nous nous efforçons tous de protéger. Ce devoir concerne, en particulier, ceux qui travaillent dans le monde de la santé, dont la mission spécifique est de devenir «les ministres de la vie» en toutes ses phases, spécialement en celles qui sont marquées par la faiblesse et la maladie.

«La tentation de l'euthanasie se révèle comme l'un des symptômes les plus alarmants de la "culture de mort", laquelle progresse surtout dans les sociétés de bien-être» (cf. Evangelium vitae EV 64).

L'euthanasie est un attentat contre la vie qu'aucune autorité humaine ne peut légitimer, car la vie de l'innocent est un bien dont on ne peut disposer.

9. M'adressant maintenant à toutes les personnes âgées du monde, je voudrais leur dire: très chers frères et soeurs, ne vous découragez pas: la vie ne se termine pas ici, sur cette terre; elle n'a ici-bas que son commencement. Nous devons être des témoins de la Résurrection! La joie doit être ce qui caractérise la personne âgée; une joie sereine, parce que les temps sont mûrs et qu'approche la récompense que le Seigneur Jésus a préparée pour son fidèle serviteur. Comment ne pas penser aux paroles touchantes de l'Apôtre Paul: «Je me suis bien battu, j'ai tenu jusqu'au bout de la course, je suis resté fidèle. Je n'ai plus qu'à recevoir la récompense du vainqueur: dans sa justice, le Seigneur, le juge impartial, me la remettra en ce jour-là, comme à tous ceux qui auront désiré avec amour sa manifestation dans la gloire» (2Tm 4,7-8)?

Avec ces sentiments, j'accorde à tous ceux qui sont ici présents, à tous ceux qui vous sont chers et surtout aux personnes âgées, une affectueuse Bénédiction.

Novembre 1998



Discours 1998 - RENCONTRE AVEC LA COMMUNAUTÉ MUSULMANE DU NIGERIA