Discours 1999 46


AUX MEMBRES DU COMITÉ D'INFORMATIONS ET D'INITIATIVES POUR LA PAIX (COMIN)

Vendredi 5 mars 1999

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Mesdames et Messieurs!



1. Je vous souhaite la bienvenue à cette rencontre que vous avez tant souhaitée! Merci de votre visite, à travers laquelle vous voulez manifester votre estime et votre dévotion pour le Successeur de Pierre et pour son Magistère.

Je désire exprimer ma gratitude particulière au Président, le Professeur Giovanni Conso, pour les paroles aimables qu'il a voulu m'adresser au nom des membres de votre Comité et de toutes les personnes présentes. De ses paroles ressort l'engagement louable de votre Association et la passion avec laquelle chacun de vous met ses compétences au service de la cause de la paix et de la recherche des voies les plus adaptées pour parvenir à une juste coopération entre les hommes et entre les peuples.

Pour promouvoir de façon concrète le bien précieux de la paix et le sauvegarder lorsqu'il est mis en danger, vous avez choisi d'être présents à travers les voies classiques de la diplomatie, dans les situations à haut risque, offrant aux responsables des nations en conflit des informations et des contributions scientifiques et morales utiles pour une solution équitable des problèmes.



2. A notre époque, le progrès scientifique, les conquêtes de l'espace, la facilité et la rapidité des communications, la plus grande connaissance entre les peuples, la disparition des idéologies qui ont dominé le vingtième siècle et les informations toujours plus complètes en ce qui concerne les tragédies qui en sont issues, a fait croître dans de vastes couches de la population mondiale l'horreur de la guerre et un profond désir de paix. Dans ce contexte, les conflits qui, malheureusement, ensanglantent encore diverses régions de la planète, sont vécus comme une offense à la dignité de la personne humaine et comme une profonde blessure aux aspirations légitimes des hommes et des femmes de notre temps.

Il s'agit d'un sentiment qui doit être constamment cultivé et encouragé, car ce n'est que du rejet de toute forme de violence et de la recherche sincère d'une coexistence dans laquelle les rapports de force sont remplacés par l'effort de la collaboration, que peuvent naître les conditions indispensables à l'édification d'un monde civil et solidaire.

Cette aspiration convaincue à la paix et intimement liée à la réalisation de certaines conditions essentielles à sa croissance et à sa consolidation, qui s'identifient principalement avec la défense des droits humains, sans lesquels se multiplient inévitablement les germes de l'instabilité, de la révolte et de la violence. Ces droits, qui sont civils et politiques, mais également économiques, sociaux et culturels, concernent toutes les phases de la vie humaine et doivent être respectés dans tous les types de situation. Ils forment un ensemble unitaire, orienté de façon décisive vers la promotion de tous les aspects du bien de la personne et de la société, et doivent être promus de façon organique et intégrale. Seule la défense de l'universalité et de l'indivisibilité, en effet, est en mesure de favoriser l'édification d'une société pacifique et le développement intégral des nations.



3. Le respect des droits humains est intimement lié à celui des droits de Dieu. Il n'existe pas d'avenir de paix pour une société qui ne respecte pas Dieu. Les terribles expériences vécues par l'humanité au cours du siècle qui touche à son terme le démontrent avec une évidence dramatique. Là où l'athéisme s'est répandu et imposé par la force, trop souvent, les prétentions d'éliminer Dieu ont été accompagnées par le mépris de la dignité humaine.

Voilà pourquoi chaque communauté humaine qui aspire à la paix ne peut manquer de placer à la base de sa coexistence la reconnaissance de la primauté de Dieu et le respect de la liberté religieuse. La religion répond aux aspirations les plus profondes de la personne, en détermine la vision du monde, en oriente la relation avec les autres et offre une réponse à la question sur la véritable signification de l'existence dans le domaine personnel et social. Par conséquent, la liberté religieuse constitue le coeur des droits humains et exige la plus grande considération de la part des personnes et des Etats.



4. Mesdames et messieurs, la paix est un idéal à cultiver dans le coeur de l'humanité! L'effort pour surmonter les causes des conflits doit s'accompagner d'une action constante de la part des croyants et des hommes de bonne volonté, afin que se développe la culture de la paix, en particulier chez les nouvelles générations. Je connais bien, à cet égard, les multiples et courageuses initiatives à travers lesquelles, sans intérêt personnel, vous oeuvrez pour susciter au sein des gouvernements et chez les simples citoyens une adhésion convaincue à des projets de réconciliation et de solidarité fraternelle.

Je vous exhorte à poursuivre sur cette voie, en multipliant les occasions de dialogue et d'éducation à la paix dans les domaines les plus variés et en ne vous laissant pas décourager par les obstacles inévitables. Que vous soutienne la parole de Jésus, qui, en proclamant bienheureux les artisans de paix, leur a promis une relation nouvelle avec Dieu et la joie de sentir qu'ils font partie d'une humanité réconciliée et unie dans l'amour du Père (cf. M 5, 9).

Avec ces souhaits, en confiant chacun de vous, ainsi que vos familles et votre engagement, à Celle que le peuple chrétien invoque comme Reine de la paix, je donne de tout coeur la Bénédiction apostolique.





À LA PLÉNIÈRE DE L'ACADÉMIE PONTIFICALE DES SCIENCES SOCIALES

6 Mars 1999

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Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Académiciens
Mesdames, Messieurs,

1. À l’occasion de la cinquième Assemblée générale de l’Académie pontificale des Sciences sociales, je suis heureux de vous accueillir. J’adresse mes vifs remerciements à Monsieur Edmond Malinvaux, votre Président, pour le message qu’il vient de m’adresser en votre nom à tous. Ma gratitude va aussi à Monseigneur Marcelo Sánchez Sorondo et à toutes les personnes qui, au long de l'année, s'attachent à coordonner vos travaux.

Pour la troisième année consécutive, vous poursuivez vos réflexions sur le thème du travail, montrant ainsi l’importance qu’il convient d’accorder à cette question, non seulement sur le plan économique mais aussi dans le domaine social et pour le développement et l’épanouissement des personnes et des peuples. L'homme doit être au centre de la question de l'emploi.



2. La société est soumise à de multiples transformations, en fonction des avancées scientifiques et technologiques, ainsi que de la mondialisation des marchés; autant d’éléments qui peuvent être positifs pour les travailleurs, car ils sont source de développement et de progrès; mais ils peuvent aussi faire peser sur les personnes de nombreux risques, les mettant au service des rouages de l’économie et de la recherche effrénée de productivité.

Le chômage est une source de détresse et "peut devenir une véritable calamité sociale" (encyclique Laborem exercens
LE 18); il rend fragiles des hommes et des familles entières, leur donnant aussi le sentiment qu’ils sont marginalisés, car ils ont de la peine à subvenir à leurs besoins essentiels et ils ne se sentent ni reconnus ni utiles à la société; de là, naît la spirale de l’endettement, dont il est difficile de sortir et qui suppose cependant compréhension de la part des institutions publiques et sociales, soutien et solidarité de la part de la communauté nationale. Je vous sais gré de rechercher des voies nouvelles concernant la réduction du chômage; les solutions concrètes sont certes difficiles, car les ressorts de l'économie sont très complexes et sont d'ailleurs le plus souvent d'ordre politique et financier. Beaucoup de choses dépendent aussi des normes en vigueur dans le domaine fiscal et syndical.



3. L'emploi est certainement un défi majeur de la vie internationale. Il suppose une saine répartition du travail et la solidarité entre toutes les personnes en âge de travailler et aptes à le faire. Dans cet esprit, il n'est pas normal que des catégories professionnelles aient avant tout le souci de préserver des avantages acquis, ce qui ne peut qu'avoir des répercussions néfastes sur l'emploi au sein d'une nation. En outre, l'organisation parallèle du travail au noir lèse gravement l'économie d'un pays, car elle constitue un refus de participer à la vie nationale par les contributions sociales et par l'impôt; de même, elle place des travailleurs, en particulier des femmes et des enfants, dans une situation incontrôlable et inacceptable de soumission et de servilité, non seulement dans les pays pauvres mais aussi dans les pays industrialisés. Il est du devoir des Autorités de faire en sorte que, au regard de l'emploi et du code du travail, tous aient les mêmes possibilités.



4. Pour toute personne, le travail est un élément essentiel. Il contribue à l’édification de son être, car il fait partie intégrante de sa vie quotidienne. L'oisiveté ne donne aucun ressort intérieur et ne permet pas d'envisager l'avenir; non seulement elle "amène la pauvreté et la pénurie" (Tb 4,13), mais elle est aussi ennemie de la vie morale bonne (cf. Si Si 33,29). Le travail donne aussi à tout individu une place dans la société, par le juste sentiment de se savoir utile à la communauté humaine et par le développement de relations fraternelles; il permet encore de participer de manière responsable à la vie de la nation et de contribuer à l'oeuvre de la création.



5. Parmi les personnes douloureusement touchées par le chômage, se trouve un nombre important de jeunes. Au moment où ils se présentent sur le marché du travail, ils ont parfois l'impression qu'il leur sera difficile de trouver une place dans la société et d'être reconnus à leur juste valeur. Dans ce domaine, tous les protagonistes de la vie politique, économique et sociale sont appelés à redoubler d'efforts en faveur de la jeunesse, qui doit être considérée comme un des biens les plus précieux d'une nation, et à se concerter pour offrir des formations professionnelles toujours plus adaptées à la situation économique du moment et une politique plus vigoureusement encore orientée vers l'emploi pour tous. Ainsi, une confiance et une espérance renouvelées seront données aux jeunes, qui peuvent parfois avoir l'impression que la société n'a pas véritablement besoin d'eux; cela réduira sensiblement les disparités entre les classes sociales, ainsi que les phénomènes de violence, de prostitution, de drogue et de délinquance, qui ne cessent de se multiplier actuellement. J'encourage tous ceux qui ont un rôle dans la formation intellectuelle et professionnelle des jeunes à les accompagner, à les soutenir et à les encourager pour qu'ils puissent s'insérer dans le monde du travail. Un emploi sera pour eux la reconnaissance de leurs capacités et de leurs efforts, et leur ouvrira un avenir personnel, familial et social. De même, par une éducation appropriée et par les aides sociales nécessaires, il convient d'aider les familles en difficulté pour des raisons professionnelles et d’apprendre aux personnes et aux familles à faibles revenus à savoir gérer leurs budgets et à ne pas se laisser attirer par des biens illusoires que propose la société de consommation. Le surendettement est une situation dont il est souvent difficile de sortir.



6. L'emploi ne pouvant pas augmenter indéfiniment, il importe d'envisager, en vertu de la solidarité humaine, une réorganisation et une meilleure répartition du travail, sans oublier le partage nécessaire des ressources avec ceux qui sont au chômage. La solidarité effective entre tous est plus que jamais requise, en particulier pour les chômeurs de longue durée et pour leur famille, qui ne peuvent rester dans la pauvreté et le dénuement sans que la communauté nationale ne se mobilise activement; personne ne doit se résigner à ce que certains restent sans emploi.



7. Au sein d'une entreprise, la richesse n’est pas constituée uniquement par les moyens de production, le capital et les bénéfices, mais elle provient avant tout des hommes qui, par leur travail, produisent ce qui devient ensuite des biens de consommation ou des services. De ce fait, tous les salariés, chacun à son échelon, doivent avoir leur part de responsabilité, concourant au bien commun de l'entreprise et, en définitive, de la société entière (cf. Sollicitudo rei socialis, n. 38). Il est essentiel de faire confiance aux personnes, de développer un système qui privilégie le sens de l'innovation de la part des individus et des groupes, la participation et la solidarité (cf. ibid, SRS SRS 45), et qui favorise de manière primordiale l’emploi et la croissance. La mise en valeur des compétences des personnes est un élément moteur de l'économie. Percevoir une entreprise uniquement en termes économiques ou de compétitivité comporte des risques; cela met en danger l’équilibre humain.



8. Les chefs d'entreprise et les décideurs doivent avoir conscience qu'il est essentiel de fonder leur démarche sur le capital humain et sur les valeurs morales (cf. Veritatis splendor VS 99-101), en particulier sur le respect des personnes et leur besoin inaliénable d'avoir un travail et de vivre des fruits de leur activité professionnelle. Il ne faut pas oublier non plus la qualité de l'organisation des entreprises, la participation de tous à leur bonne marche, ainsi qu’une attention renouvelée à des relations sereines entre tous les travailleurs. J'appelle de mes voeux une mobilisation toujours plus profonde des différents acteurs de la vie sociale et de tous les partenaires sociaux, pour qu'ils s'engagent, à la place qui est la leur, à être des serviteurs de l'homme et de l'humanité, par des décisions dans lesquelles la personne humaine, en particulier la plus faible et la plus démunie, occupe la place centrale et soit véritablement reconnue dans sa responsabilité spécifique. La mondialisation de l'économie et du travail demande de la même manière une mondialisation des responsabilités.

9. Les déséquilibres entre les pays pauvres et les pays riches ne cessent de s’accroître. Les pays industrialisés ont un devoir de justice et une grave responsabilité envers les pays en voie de développement. Les disparités sont de plus en plus criantes. Paradoxalement, un certain nombre de pays ayant des richesses naturelles sur leur sol ou dans leur sous-sol sont l'objet d'une exploitation inacceptable par d'autres pays. De ce fait, des populations entières ne peuvent bénéficier des richesses de la terre qui leur appartient, ni de leur travail. Il convient d'offrir à ces nations la possibilité de se développer grâce à leurs propres ressources naturelles, en les associant plus étroitement aux mouvements de l'économie mondiale.



10. Au point de départ d'un renouveau de l'emploi, il y a un devoir éthique et la nécessité de changements fondamentaux des consciences. Tout développement économique qui ne prend pas en compte l'aspect humain et moral aura tendance à écraser l'homme. L'économie, le travail, l'entreprise sont avant tout au service des personnes. Les choix stratégiques ne peuvent se faire au détriment de ceux qui travaillent au sein de l'entreprise. Il importe d'offrir à tous nos contemporains un emploi, grâce à une répartition juste et responsable du travail. Sans doute est-il aussi envisageable de revoir le lien entre salaire et travail, pour revaloriser des emplois manuels qui sont souvent pénibles et considérés comme subalternes. En effet, la politique salariale suppose de prendre en compte non seulement le rendement de l'entreprise, mais aussi les personnes. Un écart trop important entre les salaires est injuste, car il déprécie un certain nombre d'emplois indispensables, et il creuse des disparités sociales dommageables pour tous.



11. Pour faire face aux défis que la société doit relever au seuil du troisième millénaire, j’appelle la communauté chrétienne à s'engager toujours davantage aux côtés des personnes qui luttent en faveur de l'emploi et à cheminer avec les hommes sur la voie d'une économie toujours plus humaine (cf. encyclique Centesimus annus CA 62).

Dans cet esprit, je vous remercie pour le service appréciable que vous rendez à l’Église en étant particulièrement attentifs aux phénomènes de société, qui sont importants pour l’homme et pour l’ensemble de l’humanité. En vous confiant à l’intercession de saint Joseph, patron des travailleurs, et de la Vierge Marie, je vous accorde volontiers la Bénédiction apostolique, ainsi qu’à vos familles et à toutes les personnes qui vous sont chères.





AU TERME DE LA RÉCITATION DE LA PRIÈRE DU ROSAIRE

Samedi 6 mars 1999

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Je vous remercie cordialement, vous tous qui avez pris part à la récitation du saint Rosaire, en ce premier samedi de mars, mois consacré à saint Joseph, époux de la Très Sainte Vierge Marie, et patron de l'Eglise universelle. Je salue les groupes de fidèles provenant de Tivoli, Castelfranco di Sopra, Foggia et Naples; le Mouvement pour la Vie de Cervia, le Lions Club d'Andria, les volontaires, collaborateurs et jeunes de l'Institut «Casal del Marmo» de Rome et les enfants de l'école «Santa Dorotea» de Montecchio Emilia avec leurs parents et enseignants.

J'adresse une pensée particulière aux universitaires: à ceux qui sont présents, ainsi qu'à ceux qui sont reliés à nous à travers Radio Vatican. Très chers jeunes, je vous salue avec affection! Nous avons médité sur le mystère de l'amour de Dieu le Père, dont Marie est le premier témoin, et nous avons invoqué pour tous les universitaires du monde, le don de la réconciliation et de la miséricorde. Ce soir, j'ai la joie de prendre part avec vous au début du pèlerinage de la Croix dans vos universités. Sachez reconnaître dans la Croix le signe le plus éloquent de la miséricorde du Seigneur, capable de susciter dans chaque communauté académique un élan renouvelé vers Celui qui est le fondement et la certitude de tout itinéraire de recherche intellectuelle.

Vos collègues des Universités de Buenos Aires, New York, Czêstochowa et Saint-Jacques-de-Compostelle se sont unis à nous dans la prière. Cette initiative nous projette déjà vers la Journée mondiale de la Jeunesse, et la rencontre mondiale des professeurs d'universités de l'An 2000. Chers jeunes du monde universitaire de Rome, préparez-vous à accueillir les jeunes de votre âge qui viendront de tous les lieux du monde. Avec l'aide de Marie, soyez les apôtres du monde universitaire.

Je salue avec affection les jeunes des Universités de Buenos Aires! Je remercie Mgr Raúl Rossi et les autorités académiques. Chers jeunes: vous avez la mission d'animer vos communautés universitaires en vue du grand Jubilé, qui veut être une occasion de profond renouveau spirituel et culturel. Je compte sur votre collaboration pour le bon déroulement de la Journée mondiale de la Jeunesse de l'An 2000. Je souhaite qu'un grand nombre d'entre vous puisse la vivre à Rome.

Je salue avec affection les étudiants de l'Université de Columbia à New York, réunis dans l'église Notre-Dame autour de Mgr Anthony Mestice. Vous me rappelez ma récente visite aux Etats-Unis, qui m'a apporté beaucoup de joie. Je vous renouvelle ma confiance, et je vous encourage dans vos efforts à être de bons chrétiens, chacun dans sa culture propre. Puisse l'approche du grand Jubilé vous encourager à être toujours plus fidèles au Christ, et toujours plus actifs dans votre témoignage de l'Evangile dans le monde d'aujourd'hui.

Je salue avec émotion le monde universitaire de Czestochowa et des autres centres, réunis en prière dans le sanctuaire de Jasna Góra, autour de Mgr Stanislaw Nowak. La voix de votre prière a éveillé tant de souvenirs dans mon coeur. J'apprécie l'engagement avec lequel vous collaborez à la pastorale universitaire. Cela renforce la confiance que la croissance culturelle de notre patrie sera toujours enracinée dans la tradition pluriséculaire chrétienne. Je vous demande de confier à la Reine de Jasna Góra le chemin vers le Jubilé de tous les universitaires dans le monde de manière particulière la Journée mondiale de la Jeunesse, qui se tiendra à Rome l'an prochain. Dieu vous bénisse!

Mon salut s'adresse enfin aux universitaires de Saint-Jacques-de-Compostelle, réuni dans la cathédrale, guidés par Mgr Julián Barrio. J'apprécie l'enthousiasme avec lequel vous avez voulu participer à cette rencontre, en offrant en direct votre témoignage sur la marche vers l'Année jubilaire de Saint-Jacques de Compostelle. Je vous assure de ma prière pour que celle-ci constitue une action de grâce pour tant de personnes du monde universitaire qui participeront au mois d'août prochain à la rencontre européenne des jeunes. Je compte beaucoup sur vos efforts pour animer les milieux universitaires, de façon à ce qu'ils puissent se préparer de façon adéquate au grand Jubilé.

Le Saint-Père concluait en italien:

Au terme de notre rencontre, je suis heureux de donner à tous la Bénédiction apostolique.




AUX PÈLERINS PRÉSENTS À LA BÉATIFICATION DE VICENTE SOLER ET SIX COMPAGNONS, MANUEL MARTÍN SIERRA, NICOLAS BARRÉ ET ANNA SCHÄFFER

Lundi 8 mars 1999

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Très chers frères et soeurs!



1. L'écho de la célébration d'hier, au cours de laquelle j'ai eu la joie de proclamer bienheureux Vicente Soler et six compagnons, Manuel Martín Sierra, Nicolas Barré et Anna Schäffer, est encore vif. Ce matin, j'accueille avec une joie renouvelée et je salue avec affection chacun de vous, chers pèlerins, venus pour une circonstance aussi solennelle. Votre présence nombreuse et significative dénote la façon dont les enseignements et les exemples de ces disciples authentiques du Christ, témoins et maîtres de sainteté, ont marqué profondément l'âme de nombreuses populations, laissant en elles un souvenir indélébile et fécond. Rendons grâce au Seigneur!


[en espagnol]

2. C'est avec joie que j'accueille les membres de l'Ordre des Augustins récollets, ainsi que les autres pèlerins qui, accompagnés de leurs évêques, sont venus à Rome d'Andalousie, lieu du martyre des huit nouveaux bienheureux, et d'autres régions d'Espagne.

En parlant de «martyre», nous rappelons un drame à la fois horrible et merveilleux: horrible à cause de l'injustice et de la cruauté qui le provoquent; horrible également à cause du sang qui a été versé et de la douleur qui a été éprouvée; mais merveilleux, en vertu de l'innocence qui, docile et sans défense, s'abandonne au supplice, heureuse de pouvoir témoigner de la vérité qui vainc la foi. La vie meurt, mais la foi triomphe et vit. Il en est de même pour le martyre. Un acte suprême d'amour et de fidélité au Christ, qui se transforme en témoignage et en exemple, en message éternel pour l'humanité présente et future.

C'est ce que furent les martyres des sept Religieux augustins récollets et du prêtre de Motril. Ils moururent comme ils avaient toujours vécu: en offrant chaque jour leur vie pour le Christ et pour les hommes, leurs frères. Les récits de leur martyre sont émouvants, en particulier celui du Père Vicente Soler, âgé, qui avait été Prieur général de l'Ordre. En prison, il réconfortait les autres détenus en leur disant que dans les missions, il avait vécu des situations encore pires et que le Seigneur l'avait toujours aidé. Héros de la charité, il voulut s'offrir à la place d'un père de famille condamné à mort, et, la dernière heure arrivée, confia à la Virgen de la Cabeza, Patrone de Motril, le sort de tous les condamnés.

Que les nouveaux bienheureux martyrs accompagnent l'Eglise sur son chemin, l'Eglise qui oeuvre et souffre pour l'Evangile, et qu'ils encouragent la floraison d'un nouveau printemps de la vie chrétienne en Espagne!


[en français]

51 3. Je suis heureux de vous accueillir, vous qui êtes venus participer à la béatification du Père Nicolas Barré. Votre présence manifeste votre attachement à sa personne, qui est un don de Dieu pour l'Eglise.

A vous la famille des Soeurs de l'Enfant-Jésus, j'adresse un salut tout particulier. En oeuvrant pour l'instruction des enfants et des jeunes défavorisés, le charisme de votre fondateur est pour vous un appel à participer à la croissance humaine et spirituelle de ceux qui vous sont confiés. Le Père Barré savait qu'il n'y a pas de richesses humaines possibles sans éducation, pas d'amour de Dieu sans un apprentissage de la générosité. Son entreprise, que vous poursuivez avec désintéressement, humilité et abandon à Dieu, est une réponse à la grande misère humaine. Vous rejoignez l'effort de tous ceux qui s'attachent à faire connaître Dieu, en mettant l'homme debout. Chères Soeurs, je vous encourage à rester fidèles à votre mission éducative, qui prend sa source dans l'amour et la contemplation du Christ.

A la suite de Nicolas Barré, puissiez- vous vous attacher au Seigneur, vous abandonner sans réserve à Lui et conduire les jeunes à Dieu!


[en allemand]

4. Chers frères dans l'épiscopat, chères soeurs et chers frères!

Je vous salue tous, vous qui provenez du diocèse de Regensburg et qui êtes venus à Rome à l'occasion de la béatification d'Anna Schäffer. Je souhaite la bienvenue au représentant de mes frères dans l'épiscopat, le Cardinal Friedrich Wetter, qui, en qualité d'Archevêque de Munich et de Freising, est votre Métropolitain. Je salue en outre votre Evêque diocésain Monseigneur Manfred Müller et les nombreux prêtres et religieux présents parmi les pèlerins.

La célébration de béatification comporte toujours quelque chose d'édifiant. C'est une anticipation de ce qui nous attend à la fin des temps. Vous devez vous nourrir de cela chaque jour. C'est pourquoi, je vous en prie: emportez dans votre patrie quelque chose de ce jour particulier! Le fruit de cette célébration doit être quelque chose de plus qu'un agréable souvenir de Rome ou qu'une date rappelant un bienheureux dans le calendrier liturgique. Anna Schäffer est présente parmi nous avec son message de vie, qui est comme un soutien solide sur lequel s'appuyer lorsque nous vivons des heures tristes et que nous traversons des vallées obscures.

Combien de personnes aujourd'hui doivent vivre avec un diagnostic, qui du point de vue humain, laisse sans espérance! Combien de personnes sont contraintes à rester dans un lit de malade, que, jour après jour, elles ne quitteront plus! Combien de personnes souffrent d'histoires difficiles que la vie a écrites et de situations dans lesquelles elles se trouvent par erreur ou par faute! Il y a certainement des personnes proches de vous que vous avez amenées avec vous spirituellement dans ce pèlerinage. Qu'Anna Schäffer, femme de votre terre, vous encourage, ainsi que vos parents, vos amis et vos connaissances, à élever des prières à Dieu.

La nouvelle bienheureuse continue à présent de faire, de façon encore plus efficace du Ciel, ce qu'elle a fait sur la terre, de son lit de malade: elle intercède de manière incessante pour nous auprès de Dieu. Rendons grâce à Dieu car il nous a donné une médiatrice si puissante.


[en italien]

5. Très chers frères et soeurs! La béatification de ces patrons célestes s'inscrit dans l'itinéraire quadragésimal qui nous conduit à la Pâque. Que leur témoignage soit un encouragement et une incitation à parcourir avec une volonté ferme ce chemin de conversion et de réconciliation, en suivant fidèlement les traces des bienheureux que nous honorons aujourd'hui de façon particulière. Que Marie, Reine des saints et des martyrs, intercède pour nous.

Je bénis de tout coeur chacun de vous, vos familles et les communautés ecclésiales auxquelles vous appartenez.



AUX MEMBRES DE L'ACADÉMIE PONTIFICALE DES SCIENCES

Vendredi 12 mars 1999

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Monsieur le Président,
Excellences,
Mesdames, Messieurs,



1. A l'occasion de la semaine d'études sur la contribution des sciences au développement mondial, promue par l'Académie pontificale des Sciences, je suis heureux de vous accueillir. En remerciant vivement votre Président pour ses paroles courtoises, je vous adresse mes cordiales salutations, appréciant le service que vous rendez à la communauté humaine. Vous avez souhaité réfléchir sur les grands risques qui pèsent sur l'ensemble de la planète, et en même temps envisager les mesures possibles, afin de préserver la création, à l'aube du troisième millénaire.



2. Dans le monde actuel, de plus en plus de voix s'élèvent pour dénoncer les dommages croissants causés par la civilisation moderne aux personnes, à l'habitat, aux conditions climatiques et à l'agriculture. Certes, il existe des éléments liés à la nature et à son autonomie propre, contre lesquels il est difficile, voire impossible, de lutter. On peut cependant affirmer que des comportements humains sont parfois à l'origine de déséquilibres écologiques graves, avec des conséquences particulièrement néfastes et désastreuses dans les différents pays et sur l'ensemble du globe. Il suffit de citer les conflits armés, la course effrénée à la croissance économique, l'utilisation immodérée des ressources, la pollution de l'air et de l'eau.



3. Il est de la responsabilité de l'homme de limiter les risques sur la création, par une attention particulière au milieu naturel, par des interventions appropriées et par des systèmes de protection avant tout envisagés dans la perspective du bien commun et non seulement de la rentabilité ou de profits particuliers. Le développement durable des peuples impose que tous se mettent «au service des hommes pour les aider à saisir toutes les dimensions de ce grave problème, et pour les convaincre de l'urgence d'une action solidaire» (Encyclique Populorum progressio
PP 1). Malheureusement, des considérations et des arguments économiques et politiques prennent bien souvent le pas sur le respect du milieu, rendant la vie de populations impossible ou risquée dans certaines zones du globe. Pour que la planète soit habitable demain et que tous y aient leur place, j'encourage les Autorités publiques et tous les hommes de bonne volonté à s'interroger sur leurs attitudes quotidiennes et sur les décisions à prendre, qui ne peuvent pas être une recherche infinie et effrénée de biens matériels ne tenant pas compte du cadre dans lequel nous vivons, et qui doit être apte à subvenir aux besoins fondamentaux des générations présentes et futures. Cette attention constitue un aspect essentiel de la solidarité entre les générations.



4. La Communauté internationale est appelée à collaborer avec les différents groupes concernés, afin que le comportement des personnes, bien souvent inspiré par le consumisme exacerbé, ne perturbe pas les réseaux économiques, ni les ressources naturelles, ni le maintien de l'équilibre de la nature. «La pure accumulation de biens et de services, même en faveur du plus grand nombre, ne suffit pas pour réaliser le bonheur humain» (Encyclique Sollicitudo rei socialis, n. 28).

De même, la concentration de puissances économiques et politiques qui répondent à des intérêts très particuliers crée des centres de pouvoir qui agissent souvent au détriment des intérêts de la Communauté internationale. Cette situation ouvre la voie à des décisions arbitraires contre lesquelles il est souvent difficile de réagir, exposant ainsi des groupes humains entiers à de graves préjudices. Les équilibres exigent que les recherches et les décisions soient effectuées dans la transparence, avec le désir de servir le bien commun et la communauté humaine.

Il est plus que jamais important que se mette en place un ordre politique, économique et juridique mondial, fondé sur des règles morales claires, afin que les relations internationales aient comme objectif la recherche du bien commun, en évitant les phénomènes de corruption qui lèsent gravement les individus et les peuples, et en ne tolérant pas la création de privilèges et d'avantages injustes en faveur des pays ou des groupes sociaux les plus riches, des activités économiques développées sans respect des droits humains, de paradis fiscaux et de zones de non droit. Un tel ordre devrait avoir suffisamment d'autorité auprès des instances nationales, pour intervenir en faveur des régions les plus défavorisées et pour engager des programmes sociaux, ayant comme unique perspective d'aider ces régions à avancer sur la voie du développement. A cette condition, l'homme sera vraiment un frère de tout homme et un collaborateur de Dieu dans la gestion de la création.


5. Tous ceux qui ont une responsabilité dans la vie publique sont aussi appelés à développer la formation professionnelle et technologique, ainsi que la mise en place de périodes d'apprentissage, spécialement pour les jeunes, leur donnant les moyens de prendre une part active à la croissance nationale. De même, il est essentiel de former des cadres pour les pays en voie de développement et d'opérer à l'intention de ces pays des transferts de technologies. Cette promotion des équilibres sociaux, fondée sur le sens de la justice et réalisée dans un esprit de sagesse, assurera le respect de la dignité des personnes, leur permettra de vivre en paix et de jouir des biens que leur terre produira. En outre, une société bien organisée pourra faire face de manière plus rapide aux catastrophes qui se produiraient, afin de venir en aide aux populations, particulièrement celles qui sont les plus pauvres et donc les plus démunies en moyens.



6. Vos efforts pour élaborer des prédictions valables constituent une contribution précieuse pour que les hommes, spécialement ceux qui ont la charge de conduire les destinées des peuples, assument pleinement leurs responsabilités vis-à-vis des générations futures, en écartant les menaces qui seraient la conséquence de négligences, de décisions économiques ou politiques gravement erronées ou de manque de perspectives à long terme.

Les stratégies à adopter, ainsi que les mesures nationales et internationales nécessaires, devront avoir pour objectif primordial le bien-être des personnes et des peuples, afin que l'ensemble des pays aient «une participation plus large aux fruits de la civilisation» (Paul VI, Encyclique Populorum progressio PP 1). Grâce à un partage équitable des fonds alloués par la Communauté internationale et à des prêts à faibles taux, il importe de promouvoir des initiatives fondées sur une solidarité désintéressée, capables de soutenir des actions correctement ciblées, une application concrète des technologies les mieux adaptées et des recherches répondant aux besoins des populations locales, évitant ainsi que les bénéfices des progrès technologiques et scientifiques profitent exclusivement aux grandes sociétés et aux pays les plus avancés. J'invite donc la communauté scientifique à poursuivre ses recherches pour mieux faire apparaître les causes de déséquilibres liées à la nature et à l'homme, afin de les prévenir et de proposer des solutions de substitution aux situations qui deviennent insoutenables.

Ces initiatives doivent se fonder sur une conception du monde qui a l'homme pour centre et qui sache respecter la variété des conditions historiques et environnementales, permettant d'obtenir un développement durable, capable de subvenir aux besoins de toute la population du globe. Il s'agit surtout d'avoir toujours une perspective à long terme dans l'utilisation des ressources naturelles, évitant d'épuiser, par des interventions irrationnelles et immodérées, les ressources actuelles.



7. Les individus ont parfois l'impression que leurs décisions singulières sont sans effet à l'échelle d'un pays, de la planète ou du cosmos, ce qui risque d'engendrer chez eux une certaine indifférence en raison du comportement irresponsable d'individus. Cependant, nous devons nous rappeler que le Créateur a placé l'homme dans la création, lui ordonnant de la gérer en vue du bien de tous, grâce à son intelligence et à sa raison. De là, nous pouvons être assurés que la moindre bonne action d'une personne a une incidence mystérieuse sur la transformation sociale et participe à la croissance de tous. C'est à partir de l'alliance avec le Créateur, vers lequel l'homme est appelé à se tourner sans cesse, que chacun est invité à une profonde conversion personnelle dans le rapport aux autres et à la nature. Cela permettra une conversion collective et une vie harmonieuse avec la création. Des gestes prophétiques même modestes sont pour un grand nombre une occasion de s'interroger et de s'engager sur des voies nouvelles. De ce fait, il est nécessaire de donner à tous, en particulier aux jeunes qui aspirent à une vie sociale meilleure au sein de la création, une éducation aux valeurs humaines et morales; il est nécessaire également de développer leur sens civique et leur attention aux autres, afin que tous prennent conscience des enjeux de leurs attitudes quotidiennes pour l'avenir de leur pays et de la planète.

8. Au terme de notre rencontre, je demande au Seigneur de vous combler des forces spirituelles dont vous avez besoin pour poursuivre votre tâche dans un esprit de service de l'humanité et en vue d'un avenir meilleur sur notre planète. A tous, j'accorde de grand coeur la Bénédiction apostolique, étendue aux personnes qui vous sont chères.






Discours 1999 46