Discours 1999 99

AUX PETITES SOEURS MISSIONNAIRES DE LA CHARITÉ

Samedi 15 mai 1999

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Chères Petites Soeurs missionnaires de la Charité,



Au terme du IXe Chapitre général vous avez voulu rencontrer le Successeur de Pierre pour confirmer la fidèle adhésion à l'Eglise de chacune de vous et de toute Votre famille religieuse, selon l'Esprit de votre Fondateur, le bienheureux Luigi Orione.

Merci de votre visite et de la signification qu'elle entend exprimer. Je présente mes vives félicitations à Soeur Maria Ortensia Turati, confirmée pour le prochain sextennat à la tête de votre Institut. Je lui souhaite, ainsi qu'au Conseil général qui a été renouvelé, un service apostolique fructueux dans son oeuvre de direction de la Congrégation, vers des initiatives de charité toujours plus vastes et incisives.

Au cours de l'Assemblée capitulaire, qui se termine précisément aujourd'hui, vous vous êtes arrêtées pour réfléchir sur le thème: «Enracinées dans le Christ vers une nouvelle unité de vie, pour un Institut plus missionnaire». Je sais que ces journées d'intense prière, de réflexion attentive et de dialogue fraternel vous ont permis de tourner votre regard vers l'avenir, au-delà du seuil du troisième millénaire, pour souligner les attentes et les urgences qui demandent des réponses généreuses et prophétiques, dans le sillage de la charité de Don Orione.

Afin que votre oeuvre, qui est désormais présente dans de nombreuses nations du monde, puisse se développer selon le charisme qui lui est propre, il faut tout d'abord que vous restiez solidement «enracinées» dans le Christ. Comment de pas se tourner vers Don Orione et son exemple d'union constante avec Jésus-Christ, adoré dans l'Eucharistie, aimé dans le mystère de sa Croix et servi avec un inlassable dévouement chez les plus pauvres des pauvres? Soyez fidèles au Christ sur les traces de Don Orione! Que le Christ soit le centre de votre coeur et de chacun de vos projets de bien. Vous serez ainsi missionnaires de son Evangile de charité, où que vous oeuvriez, et vous diffuserez autour de vous le baume salutaire de la miséricorde divine.

Votre charisme vous appelle à être des Missionnaires de la Charité, c'est-à-dire des Apôtres de Dieu qui est Amour. Pour accomplir cette mission exigeante, laissez-vous guider par l'Esprit Saint vers une unité toujours plus profonde avec Dieu et entre vous: c'est une condition indispensable pour exercer un apostolat toujours courageux et fidèle. De la prière incessante et de la contemplation vous tirez la lumière et la vigueur pour être d'authentiques «Petites Soeurs missionnaires de la Charité». Pauvres, petites et humbles, comme le voulait Dom Orione, afin de pouvoir effectivement partager la condition de ceux qui se trouvent en marge de la société; mais tout en possédant cependant une bonne formation pour répondre de façon appropriée aux défis spirituels et sociaux de notre époque.

La coopération constante avec les Fils de la Divine Providence, au nom de votre Fondateur commun, l'ouverture aux laïcs, que vous entendez à juste titre développer pour étendre la portée de votre action, une formation attentive aux nouvelles exigences de notre époque, une insertion permanente et organique dans les Eglises locales rendront réellement votre Institut «plus missionnaire», à travers des interventions d'amour préférentiel pour les pauvres, réalisant le désir de les conduire à la rencontre avec le Christ.

Chères soeurs, je vous assure de ma prière pour vous au Seigneur et je confie chaque décision et motion prise lors du Chapitre général, à la Madone, Mère du Bon Conseil. Puisse-t-Elle guider vos pas et vous soutenir dans vos efforts. Que Don Orione veille sur vous du haut du ciel et sur toutes les institutions de votre Congrégation digne d'éloges.

Avec ces sentiments, je vous bénis de tout coeur, ainsi que vos consoeurs, en particulier celles qui sont malades et qui souffrent, les aspirantes et les novices, vos familles et tous ceux qui sont l'objet de vos soins.



À LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE ITALIENNE EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Jeudi 20 mai 1999

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Très chers frères dans l'épiscopat!



1. «Paix à vous tous qui êtes dans le Christ» (
1P 5,14). J'ai plaisir à vous saluer avec ces paroles de l'Apôtre Pierre à l'occasion de notre rencontre, qui a lieu comme de coutume au cours de votre Assemblée plénière, mais qui prend cette année une signification particulière, car elle se déroule au terme des visites «ad limina Apostolorum», que vous avez accomplies par groupes ces derniers mois, selon les diverses Conférences épiscopales régionales.

Je suis heureux de vous rencontrer à présent tous ensemble et de formuler avec vous comme un bilan idéal de ce que j'ai pu entendre au cours de ces rencontres, des espérances et des préoccupations que nous avons échangées de façon familiale. Je salue et je remercie le Cardinal Ruini, votre Président et les autres cardinaux italiens pour les paroles qui m'ont été adressées. Je salue les Vice-Présidents, le Secrétaire général et chacun de vous, bien-aimés et vénérés frères dans l'épiscopat. Que le Seigneur vous récompense pour la générosité et la constance avec lesquelles vous prenez soin des Eglises qui vous sont confiées et pour la sollicitude que vous démontrez à l'égard de tout le corps ecclésial.



2. L'impression qui se dégage de nos colloques effectués au cours des visites «ad limina» a été largement positive, comme du reste les expériences que je fais lorsque je viens à mon tour visiter vos diocèses sont toujours très enrichissantes pour moi. Rendons grâce à Dieu, chers frères, pour la vitalité spirituelle et pastorale de l'Eglise qui est en Italie et pour la fidélité avec laquelle ses composantes, des prêtres aux religieux et aux laïcs, cherchent à vivre leur propre vocation spécifique.

Certes, les difficultés et les dangers ne manquent pas. En Italie également la tendance à refuser Dieu et Jésus-Christ ou à les placer, pour ainsi dire, entre parenthèses dans la culture comme dans la vie sociale et dans les comportements personnels, est présente. De façon analogue, se diffuse sur le plan moral un subjectivisme qui trop souvent équivaut de façon concrète à un manque de tout principe authentique et de tout critère éthique, laissant le champ libre à l'égoïsme, aux modes liées à la consommation et à un climat d'érotisme délétère.

Mais précisément en présence de ces difficultés, l'Eglise qui est en Italie prend actuellement une conscience toujours plus vive de l'oeuvre de mission et de nouvelle évangélisation à laquelle elle est appelée. Des initiatives missionnaires fortes et exigeantes ont déjà été mises en oeuvre, en particulier ces dernières années dans le cadre de la préparation immédiate au grand Jubilé, parmi lesquelles j'ai plaisir à rappeler la «Mission dans la Ville» dans laquelle le diocèse de Rome s'est engagé, portant d'excellents fruits. Le Congrès national missionnaire, qui s'est tenu en septembre dernier à Bellaria, a par ailleurs confirmé, à travers la participation et l'enthousiasme qui l'ont distingué, à quel point la mission ad gentes est profondément inscrite dans le coeur et dans la tradition de la communauté ecclésiale italienne.

Il s'agit à présent de poursuivre ce double engagement évangélique et de le ramifier en le rendant plus incisif: au sein de cette nation bien-aimée, afin qu'elle n'égare pas son âme chrétienne et catholique, mais, au contraire, la renouvelle et la renforce; dans les régions du monde, dans lesquelles l'annonce de l'Evangile est encore à ses débuts, pour que le millénaire qui va commencer soit caractérisé par une proposition renouvelée du salut qui vient du Christ.



3. Le thème central de cette Assemblée ce sont les vocations au ministère ordonné et à la vie consacrée: je me réjouis de ce choix, qui correspond bien aux préoccupations manifestées par beaucoup d'entre vous au cours des visites «ad limina». Il concerne un chapitre fondamental de la vie et de la mission de l'Eglise.

Des familles authentiquement chrétiennes, des communautés paroissiales et des communautés de jeunes ferventes, sont aujourd'hui aussi le milieu naturel dans lequel peuvent le mieux naître et se développer des vocations authentiques. L'exemple de prêtres et de personnes consacrées, heureuses de leur choix de vie et capables d'un sérieux travail de formation, constitue également le stimulant le plus efficace pour faire mûrir et rendre explicite et conscient l'appel intérieur. Dans ce domaine, le rôle de la direction spirituelle demeure très important.

Une pastorale des vocations diocésaines organique se révèle également toujours plus nécessaire, prenant en charge de façon harmonieuse les diverses vocations et mettant à la disposition des personnes, des occasions et des lieux de formation appropriés pour encourager et soutenir les itinéraires des vocations. La préoccupation légitime de faire face à la diminution des prêtres et des personnes consacrées ne doit cependant jamais faire oublier que ce qui important est surtout l'authenticité des vocations, l'élan à suivre le Christ et la capacité d'assumer les tâches du ministère.



102 4. Très chers évêques italiens, nous sommes tous préoccupés, en raison de la très triste situation de guerre et de purification ethnique qui est vécue depuis longtemps dans la République fédérale de Yougoslavie. Alors que je vous remercie pour la prière chorale avec laquelle vos Eglises répondent à l'appel que j'ai lancé au début de ce mois de mai, je désire exprimer ma vive satisfaction pour les très nombreux témoignages et initiatives de solidarité concrète qu'accomplissent des Instituts religieux, la Caritas et les organismes de volontariat; tout d'abord là où arrivent les réfugiés et également dans tant d'autres parties d'Italie.

Je renouvelle avec vous l'appel que j'ai formulé à Bucarest avec le Patriarche orthodoxe Théoctiste: «Au nom de Dieu, Père de tous les hommes, nous demandons instamment aux parties engagées dans le conflit de déposer définitivement les armes et nous exhortons vivement les parties en présence à poser des gestes prophétiques», afin que devienne possible «un nouvel art de vivre dans les Balkans, marqué par le respect de tous, par la fraternité et la convivialité». Que le Seigneur, le seul qui puisse convertir les coeurs, veuille rapidement concrétiser ces paroles.



5. Mon regard se pose à présent sur la bien-aimée nation italienne, pour laquelle je partage comme toujours, chers frères dans l'épiscopat, votre sollicitude. En effet, il appartient à notre ministère particulier d'offrir la contribution de la sagesse de l'Evangile et de l'enseignement social de l'Eglise pour résoudre les problèmes, souvent nouveaux et complexes, que les sociétés d'aujourd'hui sont appelées à affronter. Il s'agit de stimuler les diverses catégories et composantes politiques et sociales à poursuivre le bien commun et à trouver les motivations les plus vraies pour une action unanime, qui revivifie chez les citoyens le sens de l'appartenance et le goût de la participation.

Il est en particulier du devoir des communautés ecclésiales, conscientes de leurs responsabilités spécifiques dans le domaine social, économique et politique, de réserver une attention prioritaire au travail et au chômage, qui constitue la voie obligée pour restituer, dans de nombreuses régions d'Italie, la sécurité aux familles et le courage et la confiance à la jeunesse. A la lumière des principes de solidarité et de subsidiarité, ont peut accomplir beaucoup dans ce domaine en oeuvrant pour un développement renouvelé de l'économie et de la production, dans le cadre d'une collaboration sincère au niveau national et international.



6. L'Eglise italienne est engagée avec un courage prophétique sur les grands thèmes de la famille et de la vie de l'Eglise, tout d'abord en promouvant une pastorale familiale qui étende toujours plus ses propres horizons et qui atteigne autant que possible les foyers en situations difficiles ou qui participent peu à la vie ecclésiale.

Mais vous favorisez également à juste titre la prise de responsabilités sociales par les familles elles-mêmes et leurs associations afin que dans la législation, dans les politiques sociales et dans les normes et décisions administratives les droits de la famille fondée sur le mariage soient sauvegardés, en harmonie avec la constitution (cf. art. 29), sans la confondre avec d'autres formes de coexistence, et que soient prises des mesures appropriées pour soutenir la famille dans ses tâches essentielles, à commencer par la procréation et l'éducation des enfants.

Que dire ensuite de l'engagement méritoire de ceux qui, au sujet des questions très délicates touchant la bioéthique, se battent pour une législation qui protège la famille légitime et l'embryon humain? Chacun se rend compte que sont ici en jeu des choix qui pourraient gravement compromettre le caractère humaniste de notre civilisation.



7. Dans votre sollicitude de pasteurs, une place privilégiée est également occupée par la formation des nouvelles générations, auxquelles vous avez en particulier consacré votre Assemblée du mois de novembre dernier, et par l'école.

Comment ne pas éprouver des regrets et être préoccupé en constatant que, alors que l'on cherche à mettre à jour et à redéfinir l'organisation globale de l'école italienne, on ne réussit pas à trouver la voie pour une parité effective de toutes les écoles? N'est-ce pas là la mesure la plus nécessaire et la plus significative pour adapter le système scolaire italien au niveau européen? Pour cette raison également la grande Assemblée nationale sur l'école catholique, actuellement en préparation, est plus que jamais opportune, elle sera célébrée à Rome à la fin du mois d'octobre: je suis heureux de vous assurer dès à présent de ma participation personnelle.

En relation avec chacune de ces thématiques d'une très grande valeur sociale et culturelle, et plus en général en relation avec la tâche fondamentale de l'évangélisation, je renouvelle mon encouragement le plus chaleureux à cultiver le projet culturel commencé ces dernières années par l'Eglise qui est en Italie. Je vous exhorte également à conserver vivant l'engagement nécessaire à renforcer la présence chrétienne dans le cadre de la communication sociale.



8. Très chers évêques italiens, le grand Jubilé est désormais très proche. Je vous exprime ma satisfaction pour la façon dont vos diocèses se préparent à cet événement providentiel, au cours duquel nous rendrons grâce ensemble au Père céleste pour le don suprême de son Fils, fait chair pour notre salut dans le sein de la Vierge Marie. Nous intensifions notre prière afin que cette Année Sainte spéciale porte avec elle une croissance de la foi, de l'espérance et de l'amour chrétien. Puisse le Jubilé, grâce à l'engagement de tous, faire accomplir aux chrétiens des pas supplémentaires sur la voie de la pleine union et diffuser dans le monde une nouvelle conscience de la nécessité et de la possibilité de la paix.

Les rendez-vous qui nous attendent pour l'An 2000, du Congrès eucharistique à la Journée mondiale de la Jeunesse et aux nombreux événements riches de signification, seront une nouvelle opportunité pour vivre ensemble la joie de notre communion.

Vénérés frères dans l'épiscopat, dans quelques jours nous célébrerons la solennité de la Pentecôte. Que s'élève plus fréquemment au cours de ces heures, des lèvres et du coeur, l'invocation à l'Esprit Saint pour qu'il nous comble, ainsi que toute la communauté chrétienne, de l'abondance de ses dons.

Nous adressons à Marie, Reine de la Paix, notre supplication humble et confiante, pour que finissent les guerres et les violences, dans les Balkans ainsi que sur le continent africain et dans chaque partie du monde.

Que la Bénédiction divine descende en abondance sur vous et sur le peuple que la Providence divine a confié à vos soins pastoraux.

Que Dieu protège l'Italie et la conserve fidèle à son grand héritage chrétien!



AUX HUIT NOUVEAUX AMBASSADEURS PRÈS LE SAINT-SIÈGE

Jeudi 20 mai 1999

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Excellences,



Il m'est agréable de vous accueillir aujourd'hui dans le Palais apostolique et de recevoir les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeurs extraordinaires et plénipotentiaires près le Saint-Siège de vos pays respectifs: Ukraine, Australie, Yémen, Malte, Barbade, Monaco, Islande, Thaïlande. Je tiens à vous remercier vivement des messages cordiaux que vous m'avez transmis de la part de vos chefs d'Etat. Je vous saurais gré de leur exprimer en retour mes salutations déférentes et mes souhaits cordiaux pour leur personne et pour leur haute mission au service de leurs peuples. Notre rencontre est pour moi l'occasion de saluer les Responsables de vos nations ainsi que vos compatriotes, et d'adresser mes salutations ferventes aux catholiques de vos pays, qui s'attachent à participer à tous les secteurs de la vie avec leurs concitoyens.

En cette circonstance solennelle, je voudrais lancer à nouveau par votre intermédiaire un appel à toutes les Nations, pour que, dans tous les Continents, les Autorités civiles et l'ensemble des hommes de bonne volonté poursuivent et intensifient leurs efforts en faveur de la paix, de la coopération, de la solidarité et de l'entente entre les peuples. Vous savez l'engagement du Siège apostolique en ces domaines, pour que les armes se taisent et fassent place aux négociations, afin que chaque pays, dans le respect du droit, soit assisté dans la mise en place de ses institutions et soit aidé dans l'intégration des différentes cultures et ethnies qui le composent. En effet, on ne peut penser un Etat comme une réalité qui refuse une partie de sa population, en fonction de critères qui conduisent à la ségrégation. Les Responsables de la société sont appelés à être attentifs aux conditions d'un «vivre bien ensemble», pour que la fraternité l'emporte sur la haine et sur la violence.

Il nous revient de préparer une terre habitable par les générations à venir, donnant aux jeunes des raisons d'espérer et de s'engager dans la gestion de la cité, en fondant leur action sur les principes fondamentaux de justice, de probité et de respect des personnes. De même, il convient de faire découvrir aux hommes de notre temps, notamment à la jeunesse, les valeurs morales et spirituelles qui permettent de percevoir le sens de leur existence personnelle et le sens de l'histoire, et qui sont des moteurs de la vie intérieure comme de la vie sociale.

Au moment où vous commencez votre mission, je vous offre mes meilleurs voeux et j'invoque sur vous l'abondance des Bénédictions divines, ainsi que sur vos familles, sur vos collaborateurs et sur les nations que vous représentez.





AU NOUVEL AMBASSADEUR D'AUSTRALIE PRÈS LE SAINT-SIÈGE LORS DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Jeudi 20 mai 1999

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Monsieur l'Ambassadeur,

C'est avec un grand plaisir que je vous souhaite la bienvenue tandis que vous entamez votre mission en tant qu'Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Commonwealth d'Australie près le Saint-Siège. En acceptant vos Lettres de Créance, je vous remercie des salutations que vous me transmettez de la part du Gouverneur-général, Sir William Deane, et du Premier Ministre, S.E. M. John Howard. Je vous prie de bien vouloir leur transmettre, ainsi qu'au peuple australien, mes meilleurs voeux de même que l'assurance de mes prières pour la paix et pour la prospérité de la nation.

Dans ses relations diplomatiques, le Saint-Siège s'efforce d'offrir à tous les peuples un service tout à fait particulier, au profit d'une vie pleinement humaine dans la paix et l'harmonie, en prenant en compte le bien commun et le développement intégral des personnes et des nations. Je suis heureux de remarquer, Monsieur l'Ambassadeur, que vous avez parlé de la «recherche pour assurer la dignité humaine fondamentale pour tous», car cela est au coeur de l'activité diplomatique du Saint-Siège. Dans la mesure où l'Australie et le Saint-Siège entreprennent cette recherche ensemble, nous pouvons parler, comme vous l'avez fait, de «valeurs communes et d'une vision commune de protéger la vie et les droits des citoyens».

A cet égard, le Saint-Siège suit avec intérêt les préparatifs en Australie de la célébration du centenaire de la Fédération. Ce centenaire représente pour l'Australie une occasion de se concentrer sur la question de l'identité nationale, qui comporte inévitablement la question des valeurs fondamentales. L'approche du nouveau millénaire pose d'une certaine façon cette question cruciale à tous; mais elle semble particulièrement pertinente en ce moment de l'histoire australienne.

Au coeur de la question des valeurs fondamentales, il y a la question encore plus profonde de la vision de l'être humain sur laquelle la société australienne est fondée et qui est exprimée dans un document comme la Constitution. Est-ce une vision qui à la fin nie la dignité humaine et donc porte atteinte au bien commun? Ou bien est-ce une vision qui respecte le sens de la dignité de la personne et, par conséquent, oeuvre en faveur du bien commun? Ces questions sont plus que théoriques si l'on considère un problème aussi concret que celui de la réconciliation du peuple Aborigène de votre terre avec les peuples qui s'y sont implantés plus récemment. Qui peut oublier l'histoire douloureuse des premiers habitants de l'Australie et le besoin actuel de la réconciliation et de la guérison? Pourtant, même les personnes de bonne volonté ne s'accordent pas sur la façon d'y parvenir. Parmi tant de points complexes, toutefois, une chose est claire: ce problème ne sera résolu que sur la base d'une vision sans ambiguïté de la dignité de chaque être humain (cf. Discours aux Aborigènes et aux habitants de Torres Strait Islanders, Alice Springs, 1986, n. 11) et d'un sens solide des droits humains qu'aucun individu, groupe ou gouvernement ne peut affirmer pouvoir accorder ou nier, car il s'agit de droits transcendants inhérents à chaque homme et à chaque femme.

La question de la dignité humaine et des droits humains est également clairement mise en évidence par les problèmes liés au début et à la fin de la vie humaine. Le Saint-Siège a clairement exprimé sa préoccupation à l'égard de de la tendance de la législation à autoriser le meurtre des enfants à naître et des personnes dont la vie touche à son terme. Car le Saint-Siège considère l'avortement et l'euthanasie comme une offense à la dignité humaine et une atteinte au bien commun. L'un des grands paradoxes actuels est que la rhétorique qui accompagne les droits humains va parfois de pair avec la négation du droit le plus fondamental de tous, le droit à la vie lui-même. Ce siècle a montré que lorsque le droit à la vie d'une certaine catégorie de personnes est nié, ce sont tous les droits humains qui sont menacés. L'Australie jouit d'une liberté durement gagnée, mais la liberté est toujours un bien fragile et ne peut jamais être considérée comme allant de soi. Le respect du droit à la vie est décisif car à la fin, il touche le respect de la liberté.

Une vision solide et intégrale de l'être humain constituera également la meilleure base pour l'exercice des responsabilités régionales de l'Australie. C'est une grande chose que l'Australie ait atteint cette stabilité et cette prospérité en une période relativement courte et au milieu de tant de difficultés. Mais la stabilité et la prospérité confèrent également des obligations particulières dans une région qui connaît également la pauvreté et l'instabilité politique. D'un point de vue pratique, il est de l'intérêt de l'Australie d'avoir des voisins stables et prospères; mais le pragmatisme seul ne peut définir l'objectif véritable de la réponse de l'Australie aux défis qui se présentent à toute la région. Il est vrai que chaque nation doit défendre et promouvoir ses propres intérêts, mais l'intérêt personnel seul ne peut déterminer le rôle de l'Australie dans cette région. Au-delà du pragmatisme et des intérêts personnels, ceux qui sont frappés par l'instabilité et la pauvreté ont le droit d'être aidés par ceux qui sont moins touchés; et ce droit à être aidé implique le devoir d'aider.

Chaque société sera jugée en dernière analyse sur la façon dont elle traite les faibles, et c'est pourquoi les questions de la réconciliation avec les Aborigènes, du début et de la fin de la vie, et de la responsabilité régionale sont importantes maintenant que l'Australie considère son identité et met le cap sur l'avenir. L'Eglise catholique qui est en Australie, dans l'accomplissement de sa mission religieuse, sociale et culturelle, cherche à assurer que le nouveau siècle et le nouveau millénaire verront la croissance encore plus importante d'une nation où les faibles sont protégés car la dignité inaliénable de chaque être humain est le critère de toute vie personnelle, sociale et politique.

Monsieur l'Ambassadeur, tandis que vous entrez dans la communauté des diplomates accrédités près le Saint-Siège, je vous assure de la collaboration des divers bureaux de la Curie Romaine. Puisse votre mission contribuer à renforcer les liens d'amitié entre votre gouvernement et le Saint-Siège, et puisse ce lien contribuer pleinement au bien-être de votre pays. Sur vous, ainsi que sur votre famille et sur vos concitoyens, j'invoque une abondance de Bénédictions de Dieu tout-puissant.





AU NOUVEL AMBASSADEUR DE BARBADE PRÈS LE SAINT-SIÈGE LORS DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Jeudi 20 mai 1999

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Monsieur l'Ambassadeur,

Je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue aujourd'hui et d'accepter les Lettres qui vous accréditent en tant qu'Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de Barbade près le Saint-Siège, et à cette occasion, je vous offre mes meilleurs voeux de succès pour votre mission. Je vous remercie des salutations que vous me présentez de la part du Premier Ministre, M. Owen Arthur, et je vous prie de bien vouloir lui transmettre, ainsi qu'au gouvernement et au peuple de Barbade, mes salutations et l'assurance de mes prières pour le bien-être de la nation.

Monsieur l'Ambassadeur, je vous remercie également de vos aimables paroles d'appréciation concernant les efforts du Saint-Siège «en vue d'attirer l'attention sur la plaie des pauvres, des indigents, des déshérités, des démunis, des opprimés partout dans le monde». En effet, au sein de la Communauté internationale, le Saint-Siège s'efforce de garantir que les besoins des personnes et des peuples les plus faibles ne sont pas négligés et que les dimensions spirituelles et morales des grands problèmes humains de notre époque ne sont pas ignorées. Les questions-clés de la diplomatie ne concernent plus la souveraineté territoriale, les frontières et le territoire, même si dans certaines parties du monde, ceux-ci demeurent un problème. De nos jours, la tâche consiste davantage à identifier les réponses aux défis de la globalisation et de l'interdépendance croissante des nations. Les menaces à la stabilité dans le monde sont désormais totalement différentes, comme les événements récents l'ont montré de façon si dramatique. Les tensions ethniques, l'absence de démocratie et de respect pour les droits humains, la pauvreté extrême, les inégalités sociales, la pollution de l'environnement: telles sont quelques-unes des questions auxquelles la diplomatie est appelée à répondre.

La Barbade jouit d'une certaine stabilité et prospérité, ce qui représente un succès important parmi les pays des Caraïbes et qui permet au pays d'accepter de plus grandes responsabilités régionales. Pourtant, cette stabilité et prospérité sont plus fragiles qu'elles ne paraissent: elles ne peuvent jamais être considérées comme acquises et doivent toujours être défendues avec vigueur. Cela signifie finalement que toutes deux doivent être fondées sur une vision certaine de la vérité sur la personne humaine, de la vérité sur la dignité inaliénable et des droits inviolables de chaque être humain. Là où ce fondement fait défaut, la stabilité politique dégénère tôt ou tard en une culture politique dominée par le pouvoir et non pas par le service, par les intérêts personnels et non pas par le bien commun. De même, lorsque la vérité sur la personne humaine est ignorée, la richesse matérielle arrive à signifier une richesse excessive pour certains et une pauvreté extrême pour d'autres. La société devient alors un champ de bataille et toutes sortes de violence, explicites et implicites, ont libre cours.

C'est pourquoi il est réconfortant d'apprendre la décision du gouvernement d'établir un Ministère de la Transformation sociale. Dans un certain sens, il s'agit d'une tâche qui revient au gouvernement en général, un service pour le bien commun qui transforme la société humaine en une sorte de foyer familial où tous ont leur place. Mais il y a toujours besoin d'organismes qui portent une attention spécifique sur les membres les plus faibles et les plus vulnérables de la société, tels que ceux que vous avez mentionnés: «les enfants handicapés, les personnes âgées, les sans abris». Il existe plusieurs critères pour définir la richesse d'une société, parmi lesquels la stabilité politique et la richesse matérielle. Mais le premier critère est la façon dont la société traite les plus faibles et les plus vulnérables et c'est sur cette base que la société sera jugée en définitive. Maintes fois au cours de ce siècle, nous avons assisté à l'émergence de sociétés dans lesquelles les pauvres sont mis de côté et considérés comme un fardeau, et nous avons vu les horreurs que cela a produit et continue de produire. Chacun doit être déterminé à ne plus permettre de telles choses. Pour transformer la société et l'établir sur des bases solides, nous devons tout d'abord faire tout ce qui est en notre pouvoir pour renforcer la cellule de base de la société humaine: la famille. Si la famille est faible, toutes les autres tentatives pour transformer la société seront inefficaces. Lorsque les familles sont en proie aux difficultés et manquent de soutien, toutes sortes de problèmes apparaissent: le chômage, la violence, la perversion sexuelle, la toxicomanie et l'alcoolisme sont parmi les plus communs.

Je suis content de savoir, Monsieur l'Ambassadeur, que l'Eglise catholique qui est à Barbade est un partenaire disponible dans les efforts visant à soutenir et à renforcer la vie familiale. Il y a peu de services aussi fondamentaux que l'Eglise puisse offrir.

Un autre élément vital dans la transformation de la société est l'éducation, et la Barbade a accompli de remarquables efforts à cet égard. L'éducation doit viser au développement intégral de la personne et aux valeurs fondamentales sans lesquelles l'être humain est réduit à un produit économique ou à une donnée technique. Toutefois, une éducation intégrale est fondée sur la vérité de la personne humaine, et doit donc enseigner aux jeunes le sens de leur identité et de leurs droits, ce qui les conduira à se respecter eux-mêmes ainsi que les autres. Grâce à son expérience longue et variée dans le domaine de l'éducation, l'Eglise catholique est bien placée pour aider la Barbade dans ce domaine vital.

Monsieur l'Ambassadeur, je suis certain que votre service contribuera à renforcer les liens d'amitié et de compréhension entre le Commonwealth de Barbade et le Saint-Siège. Je vous assure que les divers bureaux du Saint-Siège seront prêts à vous aider dans l'accomplissement de vos fonctions. Sur vous, sur votre famille et sur votre pays, j'invoque une abondance de Bénédictions de Dieu tout-puissant.




AU NOUVEL AMBASSADEUR DE MONACO PRÈS LE SAINT-SIÈGE LORS DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Jeudi 20 mai 1999

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Monsieur l'Ambassadeur,



1. Il m'est particulièrement agréable de souhaiter la bienvenue à Votre Excellence, au moment où Elle présente les Lettres qui L'accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la Principauté de Monaco près le Saint-Siège.

Je vous remercie vivement des paroles courtoises que vous venez de m'adresser, manifestant ainsi l'esprit dans lequel vous entreprenez votre nouvelle mission. Sensible au message cordial de Son Altesse Sérénissime le Prince de Monaco, je vous saurais gré en retour de lui transmettre mes voeux les plus fervents pour sa mission et pour sa personne, particulièrement en cette année où votre Souverain célèbre le cinquantième anniversaire de règne. Tout au long de ces années, le Prince Rainier III a guidé avec courage et générosité la Principauté de Monaco, assurant sa pérennité. Je n'oublie pas non plus ma dernière rencontre avec Son Altesse Sérénissime et sa famille le 19 décembre 1997, à l'occasion du septième centenaire de la Dynastie des Grimaldi, qui, au long de l'histoire, a su témoigner de l'idéal chrétien qui imprègne la culture monégasque. Je souhaite à tous les habitants de la Principauté de réaliser leurs aspirations les plus profondes, en s'appuyant sans cesse sur les valeurs humaines, morales et spirituelles fondamentales, sources de bonheur personnel et de vie fraternelle et solidaire.

Au moment où vous prenez vos fonctions, Monsieur l'Ambassadeur, permettez-moi de rappeler avec vous la mémoire de votre regretté prédécesseur, Monsieur César Charles Solamito, qui a marqué durablement les relations entre le Saint-Siège et la Principauté, grâce à sa cordialité et à son souci d'affermir sans cesse des liens d'estime réciproque et d'amitié profonde. Il fut un artisan de la Convention du 25 juillet 1981 qui renouvelait l'attachement sincère et profond des Princes et du Peuple monégasque à l'Eglise.



2. La dimension humaine et spirituelle de la Principauté de Monaco que vous avez évoquée est essentielle à toute communauté humaine, qui ne peut se fonder uniquement sur ses activités. Les habitants de la Principauté, comme ceux de tout pays, ont à prendre conscience chaque jour de ce qui constitue l'âme d'un peuple, ce trésor inestimable qui provient de la tradition et qui est à transmettre aux générations à venir. En effet, c'est avant tout dans le respect dû à toute personne, dans le souci d'autrui, par le sens de l'accueil et par le témoignage rendu aux valeurs humaines fondamentales qu'ils conserveront leur originalité et qu'ils feront resplendir leur vocation, en s'inspirant de l'idéal humaniste et des exigences évangéliques qui ouvrent la voie au bonheur véritable, et en refusant la facilité que propose la société de consommation.

Je suis notamment sensible à votre attention aux conflits qui blessent l'humanité et aux graves situations que traversent un certain nombre de populations. Vous avez souligné que, en raison de son histoire et de sa situation géographique, la Principauté, intégrée au continent européen, est ouverte sur le monde et se laisse interpeller par la misère des peuples; en particulier elle est un phare tourné vers l'Afrique, dont de nombreux pays requièrent actuellement de manière urgente l'aide des pays occidentaux pour leur développement humain et économique, et pour la réalisation d'une réelle transformation démocratique de leurs institutions. Par sa présence à l'ONU, elle est appelée à apporter sa contribution à la Communauté internationale, notamment à la paix et à l'entente entre les peuples, favorisant une solidarité active intense. Alors que le monde connaît des mutations toujours plus rapides, il est important de montrer qu'un témoignage de fraternité tangible est possible. Il convient d'inviter les jeunes générations à se préparer, par une sérieuse formation, à prendre leur place dans la vie sociale, afin d'être demain les protagonistes de la gestion de leur pays et de la vie internationale.



3. Dans la Principauté, la communauté catholique, attachée à la tradition, poursuit son activité spirituelle, mais a aussi le souci de la formation humaine et chrétienne de la jeunesse, notamment au sein des établissements de l'enseignement catholique dans lesquels, outre une formation de qualité, est assurée une transmission des valeurs essentielles à la maturation et à l'édification de la personnalité de chaque jeune. De même, dans les établissements publics, tout en respectant leur spécificité et la volonté des parents, l'Eglise souhaite accompagner les jeunes, leur proposant une réflexion sur les questions humaines primordiales et ouvrant leur coeur à l'Evangile. C'est aussi par leur témoignage que les équipes éducatives et catéchétiques proposent à la jeunesse un idéal et un chemin pour une vie belle. Par votre intermédiaire, Monsieur l'Ambassadeur, je saisis cette occasion pour saluer avec affection l'archevêque, les prêtres, les religieux, les religieuses et les fidèles catholiques de Monaco, dont je connais l'attachement.



4. Au terme de notre rencontre, je vous offre Monsieur l'Ambassadeur, mes voeux les meilleurs pour le succès de votre mission. Soyez assuré que vous trouverez toujours ici, auprès de mes collaborateurs, l'aide attentive et compréhensive dont vous pourrez avoir besoin.

A Votre Excellence, à Son Altesse Sérénissime, à la famille princière et à tous les habitants de la Principauté de Monaco, j'accorde de grand coeur la Bénédiction apostolique.




Discours 1999 99