Homélies St Jean-Paul II 25


VOYAGE APOSTOLIQUE EN RÉPUBLIQUE DOMINICAINE, AU MEXIQUE ET AUX BAHAMAS (25 JANVIER - 1er FÉVRIER 1979)


MESSE AVEC LES ÉVÊQUES À SAINT-DOMINGUE, jeudi 25 janvier 1979

25179 Place de l’Indépendance
Jeudi 25 janvier 1979

Frères dans l'Épiscopat, très chers Fils,

1. Dans cette Eucharistie où nous partageons la même foi dans le Christ, l’évêque de Rome et de l’Église universelle, présent au milieu de vous, vous apporte le salut de paix : « À vous grâce et paix de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus-Christ. » (
Ga 1,3)

Je viens dans ces terres d’Amérique en pèlerin de paix et d’espérance, pour participer à un événement ecclésial d’évangélisation, stimulé moi-même par ces paroles de saint Paul : « Annoncer l’Évangile n’est pas un motif d’orgueil pour moi, c’est une nécessité qui s’impose à moi : malheur à moi si je n’annonce pas l’Évangile ! » (1Co 9,16)

La période actuelle de l’histoire de l’humanité requiert une transmission revivifiée de la foi pour communiquer à l’homme d’aujourd’hui le message permanent du Christ, adapté à ses conditions concrètes de vie. Cette évangélisation est une constante et une exigence essentielle de la dynamique de l’Église. Dans son encyclique Evangelii nuntiandi, Paul VI disait: « Évangéliser est la grâce et la vocation propre de l’Église, son identité la plus profonde. Elle existe pour évangéliser… » (No EN 14) Et il précisait : « Évangélisateur, le Christ annonce tout d’abord un règne, le règne de Dieu » ; « Comme noyau et centre de sa Bonne Nouvelle, le Christ annonce le salut, ce grand don de Dieu qui est libération de tout ce qui opprime l’homme, mais qui est surtout libération du péché et du Malin… » (N EN 8-9)

2. L’Église, fidèle à sa mission, continue de présenter aux hommes de tous les temps, avec l’aide de l’Esprit-Saint et sous la conduite du Pape, le message de salut de son divin Fondateur.

Cette terre dominicaine fut autrefois la première destinataire d’une grande entreprise d’évangélisation qui s’est développée à partir d’elle et qui mérite beaucoup d’admiration et de gratitude.

Depuis la fin du XVe siècle, cette chère nation s’est ouverte à la foi en Jésus-Christ, à laquelle elle est demeurée fidèle jusqu’à maintenant. Le Saint-Siège, pour sa part, a créé les premiers sièges épiscopaux d’Amérique précisément dans cette île, et plus tard le siège archiépiscopal et primatial de Saint-Domingue.

En un temps relativement court, les sentiers de la foi ont sillonné le sol dominicain et celui du continent, posant les fondements de l’héritage devenu vie que nous contemplons aujourd’hui dans ce qui fut appelé le Nouveau Monde.

Dès les premiers instants de la découverte, l’Église manifeste sa préoccupation de rendre présent le Royaume de Dieu au coeur des nouveaux peuples, races et cultures, et en premier lieu parmi vos ancêtres.

Si nous voulons rendre un hommage mérité à ceux qui ont transplanté les semences de la foi, il faut commencer par les ordres religieux qui se sont signalés, jusqu’au martyre, dans l’oeuvre d’évangélisation, en particulier les Dominicains, les Franciscains, les Augustins, les Mercédaires et ensuite les Jésuites, qui firent pousser un grand arbre à partir de petites racines. Et c’est un fait que le sol d’Amérique était préparé, par les courants de sa propre spiritualité, à recevoir la nouvelle semence chrétienne.

Par ailleurs, il ne s’agissait pas de répandre une foi désincarnée de la vie de ses destinataires, bien qu’elle doive toujours maintenir sa référence essentielle à Dieu. C’est pourquoi l’Église, dans cette île, fut la première à revendiquer la justice et à promouvoir la défense des droits de l’homme sur les terres qui s’ouvraient à l’évangélisation. Ce sont des leçons d’humanisme, de spiritualité, de souci de la dignité de l’homme que nous donnent Antonio Montesinos, Cordoba, Bartolomé de Las Casas, auxquels feront écho ailleurs Juan de Zumarraga, Motolinia, Vasco de Quiroga, José de Anchieta, Toribio de Mogrovejo, Nobrega et tant d’autres. Ce sont des hommes qui avaient à coeur le souci des hommes faibles, sans défense, des indigènes, jugés dignes de tout respect en tant que personnes portant l’image de Dieu et destinées à une vocation transcendante. C’est de là que naîtra le premier droit international avec Francisco de Vitoria.

3. Et l’on ne peut dissocier — c’est la grande leçon qui garde toute sa valeur, aujourd’hui encore — annonce de l’Évangile et promotion humaine ; mais pour l’Église, la première ne peut se confondre avec cette dernière ni se limiter à elle, comme certains le prétendent. Ce serait fermer à l’homme les espaces infinis que Dieu lui a ouverts. Et ce serait fausser la signification complète et profonde de l’évangélisation, qui est avant tout annonce de la Bonne Nouvelle du Christ sauveur.

L’Église, experte en humanité, fidèle aux signes des temps, en obéissant à l’invitation pressante du dernier Concile, veut aujourd’hui continuer sa mission de foi et de défense des droits de l’homme, en invitant les chrétiens à s’engager dans la construction d’un monde plus juste plus humain et plus habitable, qui ne se ferme pas sur lui-même, mais s’ouvre à Dieu.

Rendre ce monde plus juste signifie, entre autres choses, s’efforcer qu’il n’y ait pas d’enfants insuffisamment nourris, sans éducation, sans instruction, qu’il n’y ait pas de jeunes ne recevant pas la formation nécessaire; qu’il n’y ait pas de paysans sans terres pour vivre et se développer dignement ; qu’il n’y ait pas de travailleurs maltraités ni lésés dans leurs droits ; qu’il n’y ait pas de systèmes qui permettent l’exploitation de l’homme par l’homme ou par l’État ; qu’il n’y ait pas de corruption ; qu’il n’y ait pas de gens ayant beaucoup de superflu, tandis que d’autres manquent de tout, sans faute de leur part ; qu’il n’y ait pas tant de familles mal constituées, brisées, désunies, insuffisamment aidées ; qu’il n’y ait pas d’injustice et d’inégalités dans l’administration de la justice ; qu’à personne ne manque la protection de la loi et que cette protection soit égale pour tous ; que la force ne prévale pas sur la vérité et le droit, mais au contraire la vérité et le droit sur la force ; et que l’économie et le politique ne prévalent jamais sur l’humain.

4. Mais ne vous contentez pas de ce monde plus humain. Faites un monde explicitement plus divin, plus conforme à la volonté de Dieu, conduit par la foi et par ce qu’elle inspire : le progrès moral religieux et social de l’homme. Ne perdez pas de vue la dimension verticale de l’évangélisation. Elle a la force de libérer l’homme, parce qu’elle est la révélation de l’amour : l’amour du Père pour les hommes, pour tous et chacun des hommes, l’amour révélé en Jésus-Christ. « Car Dieu a tant aimé le monde qu’il lui a donné son Fils unique pour que tous ceux qui croient en lui ne périssent pas, mais aient la vie éternelle. » (Jn 3,16)

Jésus-Christ a manifesté cet amour avant tout par sa vie cachée — « Il a bien fait toutes choses » (Mc 7,37) — et en annonçant l’Évangile ; puis, par sa mort et sa résurrection, ce mystère pascal dans lequel l’homme trouve sa vocation définitive à la vie éternelle, à l’union avec Dieu. C’est la dimension eschatologique de l’amour.

Chers fils, je termine en vous exhortant à être toujours dignes de la foi que vous avez reçue. Aimez le Christ, aimez l’homme à cause de lui et vivez la dévotion à notre chère Mère du ciel, que nous invoquons sous le beau nom de Notre-Dame de Altagracia et à laquelle le Pape veut laisser un diadème en hommage. Qu’elle vous aide à marcher vers le Christ en conservant et en développant pleinement la semence jetée par vos premiers évangélisateurs.

C’est ce que le Pape espère de vous tous. De vous, fils de Cuba, de Jamaïque de Curaçao, des Antilles, de Haïti, du Venezuela et des États-Unis qui êtes ici présents, et surtout de vous, fils de la terre dominicaine. Ainsi soit-il.




26 janvier 1979, Saint-Domingue, Cathédrale

26179 Vendredi 26 janvier 1979

Très aimés Frères et Soeurs,

Que soit béni le Seigneur qui m'a conduit ici, sur cette terre de la République Dominicaine; où heureusement, pour la gloire et la louange de Dieu en ce Nouveau Continent se leva aussi le jour du salut. Et j'ai voulu venir en cette cathédrale de Saint Domingue pour être parmi vous, très aimés prêtres, diacres, religieux, religieuses et séminaristes pour vous manifester mon affection spéciale à vous en qui le Pape et l'Eglise déposent leurs plus grandes espérances, afin que vous soyez plus joyeux dans la foi, et que votre fierté d'être ce que vous êtes déborde sur moi (cf.
Ph 1,25).

Avant tout, cependant je veux m'unir à vous dans l'action de grâce à Dieu. Merci pour la croissance et le zèle de cette Eglise qui possède tant de belles initiatives et qui démontre tant d'engagement dans son service de Dieu et des hommes. Je rends grâce à Dieu avec une immense joie — pour reprendre les paroles de l'Apôtre — "pour la part que vous avez prise dans l'annonce de la Bonne Nouvelle depuis le premier jour jusqu'aujourd'hui; bien persuadé de ceci: Celui qui a commencé en vous une oeuvre bonne en poursuivra l'achèvement jusqu'au jour du Christ Jésus" (Ib Ph 1,3-6).

J'aimerai vraiment disposer de beaucoup de temps pour rester avec vous, apprendre votre nom et écouter de vos lèvres "ce qui déborde de votre coeur" (Mt 12,34) ce que vous avez expérimenté de merveilleux dans votre intérieur — "fecit mihi magna qui potens est"... (Lc 1,49) — ayant été fidèles à la rencontre avec le Seigneur. Une rencontre de choix de sa part.

C'est précisément cela: la rencontre pascale avec le Seigneur, que je désire proposer à votre réflexion pour raviver davantage votre foi et votre enthousiasme en cette Eucharistie; une rencontre personnelle, vivante, les yeux ouverts et le coeur palpitant, avec le Christ ressuscité (cf. Lc 24,34) l'objectif de votre amour et de toute votre vie.

Il arrive parfois que notre syntonie de foi avec Jésus s'affaiblisse ou s'atténue — ce que le peuple fidèle remarque par la suite et ce dont il s'attriste — car nous le portons à l'intérieur, oui, mais parfois mélangé avec nos penchants et nos raisonnements humains (cf. ibid., 15) sans faire briller toute la lumière grandiose qu'il renferme pour nous. En certaines occasions nous parlons peut-être de Lui, un peu influencés par certaines préventions et variantes, ou des données à saveur sociologique, politique, psychologique, linguistique au lieu de faire dériver les critères de base de notre vie et de notre activité d'un Evangile vécu également, avec joie, avec confiance et avec cette immense espérance que renferme la croix du Christ.

Une chose est bien claire, très chers frères: la Foi au Christ ressuscité n'est pas le résultat d'une connaissance technique ou fruit d'un bagage scientifique (cf. 1Co 1,26).

Ce qu'il nous demande est que nous annoncions la mort de Jésus-Christ et proclamions sa résurrection (cf. Liturgie). Jésus est vivant. "Dieu l'a ressuscité rompant les liens de la mort" (He 2,24). Ce qui au début fut un murmure tremblant parmi les premiers témoins se transforma rapidement en une joyeuse expérience de la réalité de celui "avec lequel nous avons mangé et bu... après qu'il fut ressuscité des morts" (He 10,41-42). Oui, le Christ vit dans l'Eglise, il est en nous, porteur d'espérance et d'immortalité.

Si ensuite vous avez rencontré le Christ, vivez le Christ, vivez avec le Christ! Et annoncez-Le à la première personne, comme d'authentiques témoins: "pour moi la vie c'est le Christ" (Ph 1,21). C'est là précisément que se trouve la vraie libération: proclamer Jésus, libre de toute attache, présent dans des hommes transformés, devenus nouvelles créatures. Pourquoi notre témoignage résulte-t-il vain parfois? Parce que nous présentons un Jésus sans toute la force séductrice qu'offre sa Personne; sans révéler les richesses de l'idéal sublime que comporte sa suite; parce que nous n'arrivons pas toujours à montrer une conviction traduite en termes de vie, au sujet des valeurs merveilleuses de notre engagement à la grande cause ecclésiale que nous servons.

Frères et Soeurs: Il est important que les hommes voient en nous les dispensateurs des mystères de Dieu (cf. 1Co 4,1) les témoins crédibles de sa présence dans le monde. Pensons fréquemment que lorsque Dieu nous appelle, il ne nous demande pas une partie de notre personne, mais tout notre être avec ses énergies vitales, pour annoncer aux hommes la joie et la paix de la nouvelle vie dans le Christ et pour les guider à leur rencontre avec Lui. Pour cela, que notre première préoccupation soit la recherche du Seigneur, et une fois rencontré, constater où et comment il vit, demeurant avec Lui tout le jour (cf. Jn 1,39).

29 Restons avec Lui d'une façon spéciale dans l'Eucharistie où le Christ se donne à nous, et dans la prière, par laquelle nous nous donnons à Lui. L'Eucharistie doit se compléter et se prolonger par l'offrande de notre devoir quotidien comme "un sacrifice de louange" (Missel Romain, Prière Eucharistique I). Dans la prière, dans nos relations confiantes avec Dieu notre Père, nous discernons mieux où se trouve notre force et où réside notre faiblesse, car l'Esrit vient à notre aide (cf. Rm 8,26). L'Esprit lui-même nous parle et nous plonge peu à peu dans les mystères divins, dans les desseins d'amour pour les hommes que Dieu réalise à travers notre disponibilité à son service.

Comme Saint Paul, au cours de la réunion eucharistique à Troade, moi aussi je prolongerais mon discours avec vous jusqu'à minuit (cf. He He 20,6 ss). J'aurais beaucoup de choses à vous dire que je ne puis dire maintenant. En attendant je vous récommande la lecture attentive de ce que j'ai dit récemment au Clergé, aux Religieux, aux Religieuses et Séminaristes de Rome. Elle élargira notre rencontre qui se prolongera spirituellement avec d'autres semblables dans les prochains jours. Que le Seigneur et notre douce Mère la Vierge Marie vous accompagnent toujours et remplissent votre vie d'un grand enthousiasme dans le service de votre très haute vocation ecclésiale.

Nous allons poursuivre la Messe et déposer sur la table des offrandes nos désirs de vivre une nouvelle vie, nos nécessités et nos supplications, les nécessités et les supplications de l'Eglise, et de la Nation Dominicaine. Mettons-y également les travaux et les fruits de la IIIe Conférence Générale de l'Episcopat Latino-américain de Puebla.




MESSE EN LA CATHÉDRALE DE MEXICO, vendredi 26 janvier 1979

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Mexico (Mexique)
Vendredi 26 janvier 1979



Chers frères dans l'épiscopat et très chers fils,

Il y a à peine quelques heures, je baisais pour la première fois, et avec une profonde émotion, cette terre bénie. Et maintenant m’est donnée la joie de cette rencontre avec vous, avec l’Église et le peuple mexicain en cette « Journée de Mexico ».

Cette rencontre a commencé dès mon arrivée en cette belle ville ; elle s’est poursuivie au fur et à mesure que je traversais les rues et les places et elle s’est intensifiée lorsque je suis rentré dans cette cathédrale. Mais c’est maintenant, dans la célébration du sacrifice eucharistique, qu’elle atteint son point culminant.

Nous mettons cette rencontre sous la protection de la Mère de Dieu, Notre-Dame de Guadalupe, que le peuple mexicain entoure de la plus profonde dévotion.

À vous, évêques de cette Église; à vous, prêtres, religieux, religieuses, séminaristes, membres des instituts séculiers, laïcs des mouvements catholiques et d’apostolat ; à vous les enfants, les jeunes, les adultes, les anciens ; à vous tous, Mexicains, qui avez un splendide passé d’amour du Christ, même au milieu des épreuves ; à vous qui portez au plus profond de votre coeur la dévotion à Notre-Dame de Guadalupe, le Pape veut aujourd’hui parler de quelque chose qui est — et doit être encore davantage — essentiel dans votre vie chrétienne et mariale : la fidélité de l’Église.

Parmi tous les titres attribués à la Sainte Vierge tout au long des siècles par l’amour filial des chrétiens, il en est un qui a un sens très profond : « Virgo fidelis », la Vierge fidèle. Que signifie cette fidélité de Marie ? Quelles sont ses dimensions ?

30 La première dimension, c’est la recherche. Marie a été fidèle avant tout lorsque, avec amour, elle s’est mise à chercher le sens profond du plan de Dieu sur elle et sur le monde : « Comment cela peut-il se faire ? », demande-t-elle à l’ange de l’Annonciation. Déjà dans l’Ancien Testament, le sens de cette recherche se traduit en une expression d’une rare beauté et d’une extraordinaire densité spirituelle : « Chercher le visage du Seigneur. » Il n’y a pas de fidélité s’il n’y a pas, à la racine, cette recherche ardente, patiente et généreuse ; s’il n’y a pas dans le coeur de l’homme une question à laquelle seul Dieu peut apporter une réponse, ou plutôt dont Dieu seul est la réponse.

La seconde dimension de la fidélité, c’est l’accueil, l’acceptation. Sur les lèvres de Marie, le « quomodo fiet ? » (comment cela peut-il se faire ?) se transforme en « fiat » : qu’il en soit ainsi, je suis prête, j’accepte. C’est le moment crucial de la fidélité, le moment où l’homme prend conscience que jamais il ne comprendra totalement le « comment » ; que dans le plan de Dieu, il y a davantage de zones de mystère que de zones d’évidence ; que malgré tous ses efforts, jamais il n’arrivera à tout saisir. C’est alors que l’homme accepte le mystère, qu’il lui fait une place dans son coeur comme Marie, qui « retenait tous ces événements et les méditait dans son coeur » (
Lc 2,19 cf. Lc 3,15). C’est le moment où l’homme s’abandonne au mystère, non avec la résignation de quelqu’un qui capitule devant une énigme ou une absurdité, mais avec la disponibilité de quelqu’un qui s’ouvre pour être habité par quelque chose — ou plutôt par quelqu’un — qui est plus grand que son coeur. Cette acceptation se fait en définitive par la foi, qui est adhésion de tout l’être au mystère qui se révèle.

La troisième dimension de la fidélité, c’est la cohérence. Vivre en accord avec ce que l’on croit ; ajuster sa vie à l’objet de son adhésion ; accepter les incompréhensions, les persécutions, plutôt que de permettre qu’il y ait rupture entre ce que l’on vit et ce que l’on croit. C’est cela la cohérence. Peut-être sommes-nous là au coeur de la fidélité.

Mais toute fidélité doit passer par une épreuve très exigeante : la durée. Et c’est pourquoi la quatrième dimension de la fidélité, c’est la constance. Il est facile d’être cohérent un jour, ou quelques jours. Il est difficile et important de l’être toute la vie. Il est facile d’être cohérent à l’heure de l’exaltation ; il est difficile de l’être à l’heure de l’épreuve. Seule peut être dite fidèle une cohérence qui dure toute la vie. Le « Fiat » de Marie à l’Annonciation trouve sa plénitude dans le « Fiat » silencieux qu’elle redit au pied de la croix. Être fidèle, c’est ne pas trahir dans les ténèbres ce que l’on a accepté en public.

De toutes les leçons que la Sainte Vierge donne à ses fils de Mexico, peut-être la plus belle et la plus importante est-elle celle de la fidélité, cette fidélité que le Pape aime à découvrir et qu’il espère trouver dans le peuple mexicain.

On a l’habitude de dire de ma patrie : « Polonia semper fidelis ». Je voudrais pouvoir dire aussi : « Mexico semper fidelis », le Mexique toujours fidèle.

De fait, l’histoire religieuse de ce pays est une histoire de fidélité : fidélité aux semences de la foi jetées par les premiers missionnaires ; fidélité à une religion simple, mais profondément enracinée, sincère jusqu’au sacrifice ; fidélité à la dévotion mariale ; fidélité exemplaire au Pape. Je n’avais pas besoin de venir à Mexico pour connaître cette fidélité au vicaire de Jésus-Christ puisque je la connaissais depuis longtemps. Mais je remercie le Seigneur de pouvoir la sentir dans la chaleur de votre accueil.

En cette heure solennelle, je voudrais vous inviter à affermir cette fidélité, à la traduire en fidélité intelligente et forte à l’Église d’aujourd’hui. Et quelles seront les dimensions de cette fidélité, sinon celles-là même de la fidélité à Marie ?

Le Pape qui vient vous voir attend de vous un effort généreux et noble pour connaître toujours mieux l’Église. Le IIe Concile du Vatican a voulu être avant tout un Concile sur l’Église. Prenez les documents conciliaires, spécialement la Constitution Lumen gentium ; étudiez-la avec attention, avec amour, en esprit de prière, pour voir ce que l’Esprit a voulu dire sur l’Église. Vous pourrez ainsi voir qu’il n’y a pas une « nouvelle Église », comme certains le prétendent, qui serait différente de l’ « ancienne Église » ou qui lui serait opposée, mais que le Concile a voulu manifester avec plus de clarté l’unique Église de Jésus-Christ, avec des aspects nouveaux, mais demeurant toujours la même dans son essence.

Le Pape attend aussi de vous une loyale acceptation de l’Église. Aussi ne seraient-ils pas fidèles ceux qui demeureraient attachés à des aspects accidentels de l’Église, qui avaient leur valeur dans le passé, mais sont maintenant révolus. Ne seraient pas non plus fidèles ceux qui, au nom d’un prophétisme mal éclairé, se lanceraient dans la construction aventureuse et utopique d’une Église dite du futur, désincarnée du présent. Nous devons être fidèles à l’Église qui est née une fois pour toutes du plan de Dieu, de la croix, du tombeau ouvert du Ressuscité et de la grâce de la Pentecôte ; qui naît de nouveau chaque jour, non du peuple ou d’autres catégories rationnelles, mais des sources mêmes dont elle est née à l’origine. Elle naît aujourd’hui pour construire avec toutes les nations un peuple désireux de grandir dans la foi, dans l’espérance, dans l’amour fraternel.

Le Pape attend aussi de vous une pleine cohérence de votre vie avec votre appartenance à l’Église. Cette cohérence signifie avoir conscience de sa propre identité de catholique et la manifester avec un total respect, mais sans crainte ni hésitations. L’Église a aujourd’hui besoin de chrétiens prêts à donner un clair témoignage de leur condition ; des chrétiens assumant leur part de la mission de l’Église dans le monde, en étant des ferments d’esprit religieux, de justice, de promotion de la dignité de l’homme dans tous les milieux sociaux et en s’efforçant de donner au monde un supplément d’âme pour que ce soit un monde plus humain et plus fraternel, un monde qui regarde vers Dieu.

31 Le Pape attend encore de vous une cohérence qui ne soit pas éphémère, mais constante et persévérante. Appartenir à l’Église, vivre dans l’Église, être Église est aujourd’hui quelque chose de très exigeant. Parfois, ce n’est pas la persécution claire et directe qui coûte, mais ce pourrait être le mépris, l’indifférence, la marginalisation. Le danger de la peur, de la lassitude, de l’incertitude est alors facile et fréquent. Ne vous laissez pas vaincre par ces tentations. Ne laissez pas de tels sentiments miner votre vigueur et votre énergie spirituelle, vous qui « êtes Église », vous qui avez cette grâce qu’il faut demander et être prêt à recevoir avec une grande pauvreté intérieure et qu’il faut recommencer à vivre chaque matin, qu’il faut vivre chaque jour avec plus de ferveur et d’intensité.

Chers frères et chers fils, dans cette Eucharistie qui scelle la rencontre du serviteur des serviteurs de Dieu avec l’âme et la conscience du peuple mexicain, le nouveau Pape voudrait recueillir de vos lèvres, de vos mains et de vos vies un engagement solennel pour l’offrir au Seigneur. Cet engagement des âmes consacrées, des enfants, des jeunes, des adultes, des anciens, des personnes cultivées, des gens simples, des hommes et des femmes, de tous, c’est la fidélité au Christ, à l’Église d’aujourd’hui. Déposons sur l’autel cette intention et cet engagement.

Que la Vierge fidèle, notre Mère de Guadalupe, qui nous apprend à connaître le plan de Dieu, sa promesse et son alliance, nous aide par son intercession à prendre cet engagement et à le tenir jusqu’au terme de notre vie, jusqu’au jour où nous entendrons le Seigneur nous dire : « Viens, bon et fidèle serviteur ; entre dans la joie de ton maître. » (
Mt 25,21-23) Ainsi soit-il.





MESSE POUR L'INAUGURATION DE LA IIIe CONFÉRENCE DE L’ÉPISCOPAT LATINO-AMÉRICAIN - Samedi 27 janvier 1979

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Basilique Notre-Dame de Guadalupe, Mexique
Samedi 27 janvier 1979



1. Je te salue, Marie !

Quelle joie profonde me fait éprouver, chers frères dans l’épiscopat et fils très aimés, le fait que les premiers pas de mon pèlerinage en tant que successeur de Paul VI et de Jean-Paul Ier me conduisent justement ici ! Ils me conduisent à toi, Marie, dans ce sanctuaire du peuple du Mexique et de toute l’Amérique latine, dans lequel depuis tant de siècles s’est manifestée ta maternité.

Je te salue, Marie ! C’est avec un immense amour et un profond respect que je prononce ces mots à la fois si simples et si merveilleux. Nul ne pourra jamais te saluer d’une manière plus admirable que ne le fit l’Archange le jour de l’Annonciation. Ave Maria, gratia plena, Dominus tecum. Je redis ces mots que tant de coeurs conservent et tant de lèvres prononcent dans le monde entier. Nous tous ici présents les répétons ensemble, sachant que c’est par ces mots que Dieu lui-même, à travers son messager, t’a saluée, toi la Femme promise au Paradis terrestre, toi qui as été choisie de toute éternité comme Mère du Verbe, Mère de la Sagesse divine, Mère du Fils de Dieu.

Je te salue, Mère de Dieu !

2. Ton Fils Jésus-Christ est notre Rédempteur et notre Seigneur. Il est notre Maître. Nous tous, réunis ici, sommes ses disciples. Nous sommes les successeurs des apôtres, de ceux auxquels le Seigneur a dit : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant, au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, je suis avec vous pour toujours, jusqu’à la fin du monde. » (
Mt 28,19-20)

32 Successeur de Pierre et successeurs des apôtres assemblés ici, notre présence démontre que ces paroles se sont accomplies d’une manière admirable sur cette terre.

Il y avait, en effet, à peine vingt ans qu’avait commencé, en 1492, l’oeuvre évangélisatrice dans le Nouveau Monde, lorsque la foi arriva au Mexique. Peu après était créé le premier siège archiépiscopal, régi par Juan de Zumarraga, que viendront seconder d’autres grandes figures d’évangélisateurs : grâce à eux, le christianisme s’étendit à de plus vastes horizons.

D’autres épopées religieuses non moins glorieuses seront écrites dans l’hémisphère Sud par des hommes comme saint Toribio de Mogrovejo et bien d’autres qui mériteraient d’être longuement cités. Les chemins de la foi s’étendent sans cesse, si bien qu’à la fin du premier siècle d’évangélisation, les sièges épiscopaux sont plus de 70, avec quelque quatre millions de chrétiens. C’est une entreprise singulière, qui continuera longtemps à se développer, jusqu’à embrasser aujourd’hui, après cinq siècles d’évangélisation, presque la moitié de l’ensemble de l’Église catholique ; celle-ci, enracinée dans la culture du peuple latino-américain, en est venue à faire partie de son identité propre.

Au fur et à mesure que se réalisait sur ces terres le commandement du Christ, au fur et à mesure que, par la grâce du baptême, se multipliaient partout les fils de l’adoption divine, on voit apparaître aussi la Mère. Car c’est à toi, Marie, que le Fils de Dieu, qui est en même temps ton Fils, montra un homme du haut de la croix et dit : « Voici ton fils. » (
Jn 19,26) Et en cet homme il te confiait chaque homme, il te confiait tous les hommes. Et toi qui au moment de l’Annonciation, par ces simples mots : « Je suis la servante du Seigneur, qu’il m’advienne selon ta parole » (Lc 1,38), as résumé tout le programme de ta vie, tu les embrasses tous, tu veux tous les approcher, tu les cherches tous maternellement. Ainsi s’accomplit ce que le dernier Concile a déclaré au sujet de ta présence dans le mystère du Christ et de l’Église. Tu demeures d’une manière admirable dans le mystère du Christ, ton Fils unique, parce que tu es toujours là où sont les hommes ses frères, là où est l’Église.

2a. De fait, les premiers missionnaires arrivés en Amérique, en provenance de terres d’éminente tradition mariale, enseignent, en même temps que les rudiments de la foi chrétienne, l’amour envers toi, la Mère de Jésus et de tous les hommes. Et à partir du moment où l’Indien Juan Diego a commencé à parler de la douce Dame du Tepeyac, toi, la Mère de Guadalupe, tu es entrée d’une manière déterminante dans la vie chrétienne du peuple mexicain. Et ta présence n’a pas été moindre en d’autres lieux où tes fils t’invoquent sous de tendres noms comme Notre-Dame de l’Altagracia, de l’Aparecida, de Lujan et tant d’autres non moins chers, dont je ne puis citer la liste interminable, par lesquels en chaque pays et même en chaque région les populations latino-américaines t’expriment la dévotion la plus profonde, tandis que tu les protèges dans leur cheminement de foi.

Le Pape — qui vient d’un pays où tes images, spécialement celle de Jasna Gora, sont également un signe de ta présence dans la vie de la nation, dans son histoire tourmentée — est particulièrement sensible à ce signe de ta présence ici, dans la vie du peuple de Dieu au Mexique, dans son histoire qui n’a pas été facile elle non plus et qui a même parfois été dramatique. Mais tu es présente aussi dans la vie de tant d’autres peuples et nations d’Amérique latine, présidant et guidant non seulement leur passé lointain ou proche, mais également le moment présent, avec ses incertitudes et ses ombres. Le Pape perçoit au fond de son coeur les liens particuliers qui t’unissent à ce peuple et qui l’unissent à toi. Ce peuple qui t’appelle affectueusement « La Morenita ». Ce peuple — et indirectement tout cet immense continent — vit son unité spirituelle par le fait que tu es la Mère. Une Mère qui, par amour, crée, conserve, renforce les liens rapprochant ses fils.

Je te salue, Mère du Mexique !

Mère de l’Amérique latine !

3. Nous sommes ici rassemblés, en cette heure exceptionnelle et admirable de l’histoire du monde. Nous sommes conscients d’y arriver à un moment crucial. Par cette réunion d’évêques nous désirons nous relier à la précédente Conférence de l’épiscopat latino-américain, qui a eu lieu il y a dix ans à Medellin, en même temps que le Congrès eucharistique de Bogota, et à laquelle participa le Pape Paul VI d’inoubliable mémoire. Nous sommes venus ici non pas tant pour recommencer à examiner, au bout de dix ans, le même problème, que pour le réenvisager d’une manière nouvelle, en un lieu nouveau et en un nouveau moment historique. Nous voulons prendre comme point de départ tout ce qui est contenu dans les documents et résolutions de cette Conférence. Et nous voulons en même temps, en nous fondant sur l’expérience de ces dix années, sur le développement de la pensée et à la lumière des expériences de toute l’Église, faire un juste et nécessaire pas en avant.

La Conférence de Medellin a eu lieu peu de temps après la clôture de Vatican II, le Concile de notre siècle, et elle a eu pour objectif de reprendre les grandes lignes et le contenu essentiel du Concile pour les appliquer et en faire une force d’orientation dans la situation concrète de l’Église latino-américaine.

Sans le Concile, il n’aurait pas été possible de tenir la réunion de Medellin, qui a voulu être un élan de renouveau pastoral, un nouvel « esprit » face à l’avenir, en pleine fidélité ecclésiale dans l’interprétation des signes des temps en Amérique latine. L’intention évangélisatrice était bien claire et reste évidente dans les seize thèmes abordés, regroupés autour de trois grandes idées complémentaires les unes des autres : promotion humaine, évangélisation et croissance dans la foi, Église visible et ses structures.

33 Par son option en faveur de l’homme latino-américain envisagé dans son intégralité, par son amour préférentiel, bien que non exclusif, pour les pauvres, par son aspiration à une libé ration intégrale des hommes et des peuples, Medellin, l’Église qui y était présente, fut un appel d’espérance vers des buts plus chrétiens et plus humains.

Plus de dix ans ont passé. Et on a fait des interprétations, parfois contradictoires, pas toujours correctes, pas toujours bienveillantes envers l’Église. C’est pourquoi l’Église cherche les chemins qui lui permettent de comprendre plus profondément et d’accomplir avec plus d’ardeur la mission reçue du Christ Jésus.

Les sessions du Synode des évêques, qui se sont tenues ces dernière années, ont eu à cet égard une grande importance, surtout celle de 1974 qui était centrée sur l’évangélisation et dont les conclusions ont été reprises ensuite, d’une manière vivante et stimulante, par l’exhortation apostolique Evangelii nuntiandi de Paul VI.

C’est justement le thème que nous mettons aujourd’hui sur le tapis, puisque nous nous proposons d’étudier : « L’évangélisation dans le présent et dans l’avenir de l’Amérique latine. »

Nous trouvant ici dans ce lieu saint pour commencer nos travaux, nous voyons se présenter à nos yeux le Cénacle de Jérusalem, lieu de l’institution de l’Eucharistie. C’est à ce même Cénacle que les apôtres retournèrent après l’Ascension du Seigneur afin que, assidus à la prière avec Marie, Mère du Christ, ils puissent préparer leurs coeurs à recevoir l’Esprit-Saint au moment de la naissance de l’Église.

Nous aussi, nous venons ici pour cela, nous aussi, nous attendons la venue de l’Esprit-Saini qui nous indiquera les chemins de l’évangélisation, par lesquels l’Église doit continuer à renaître dans notre grand continent. Nous aussi, aujourd’hui et ces prochains jours, nous voulons persévérer dans la prière avec Marie, Mère de notre Seigneur et Maître : avec toi, Mère de l’espérance, Mère de Guadalupe.

4. Permets donc qu’en cet instant solennel moi, Jean-Paul II, évêque de Rome et Pape, avec mes frères dans l’épiscopat qui représentent l’Église du Mexique, et de toute l’Amérique latine, nous te confiions et t’offrions, ô servante du Seigneur, tout le patrimoine de l’Évangile, de la Croix, de la Résurrection, dont nous sommes tous témoins, apôtres, maîtres et évêques.

Ô Mère, aide-nous à être de fidèles dispensateurs des grands mystères de Dieu ! Aide-nous à enseigner la vérité que ton Fils a annoncée et à étendre l’amour qui est le principal commandement et le premier fruit de l’Esprit-Saint ! Aide-nous à confirmer nos frères dans la foi, aide-nous à éveiller l’espérance en la vie éternelle ! Aide-nous à conserver les grands trésors enfermés dans les âmes du peuple de Dieu qui nous a été confié !

Nous t’offrons tout ce peuple de Dieu. Nous t’offrons l’Église qui est au Mexique et dans tout le continent. Nous te l’offrons comme étant à toi. Toi qui as touché si profondément le coeur des fidèles par le signe de ta présence qu’est ton image dans le sanctuaire de Guadalupe, fais de ces coeurs ta demeure, maintenant et toujours ! Sois chez toi dans nos familles, dans nos paroisses, nos missions, nos diocèses, dans tous les peuples !

Sois-le au moyen de la sainte Église qui, en t’imitant, désire elle aussi être une bonne mère, assister les âmes dans tous leurs besoins, en annonçant l’Évangile, administrant les sacrements, sauvegardant la vie des familles par le sacrement de mariage, réunissant tous ses fils dans la communauté eucharistique par le Saint-Sacrement de l’autel, les accompagnant avec amour depuis le berceau jusqu’à leur entrée dans l’éternité.

Ô Mère, suscite chez les jeunes générations la disponibilité au service exclusif de Dieu ! Obtiens-nous sur place d’abondantes vocations au sacerdoce et à la vie consacrée !

34 Ô Mère, affermis la foi de tous nos frères et soeurs du laïcat, afin que dans tous les domaines de la vie sociale, professionnelle, culturelle et politique, ils agissent en accord avec la vérité et la loi que ton Fils a apportées à l’humanité, pour conduire tous les hommes au salut éternel et, en même temps, pour rendre la vie sur terre plus humaine, plus digne de l’homme.

L’Église qui exerce son activité parmi les nations américaines, l’Église au Mexique, veut servir cette cause sublime de toutes ses forces, avec un esprit missionnaire renouvelé. Ô Mère, fais que nous sachions la servir dans la vérité et la justice ! Fais que nous suivions nous-mêmes ce chemin et que nous y conduisions les autres, sans jamais dévier ni entraîner les autres vers des chemins tortueux.

Nous t’offrons et nous te confions tous ceux qui sont et tout ce qui est objet de notre responsabilité pastorale, certains que tu seras avec nous et que tu nous aideras à réaliser ce que ton Fils nous a commandé (cf. Jn
Jn 2,5). Avec une confiance illimitée, moi, Jean-Paul II, avec tous mes frères dans l’Épiscopat du Mexique et de l’Amérique latine, nous voulons t’associer d’une manière plus étroite encore à notre ministère, à l’Église et à la vie de nos pays. Nous désirons mettre en tes mains tout notre avenir, l’avenir de l’évangélisation en Amérique latine.

Reine des apôtres, accepte notre empressement à servir sans réserve la cause de ton Fils, la cause de l’Évangile et la cause de la paix fondée sur la justice et l’amour entre les hommes et entre les peuples !

Reine de la paix, préserve les nations et les peuples de tout le continent — qui ont tant confiance en toi —, des guerres, de la haine et de la subversion !

Fais que tous, gouvernants et citoyens, apprennent à vivre en paix, s’éduquent à la paix, agissent selon les exigences de la justice et le respect des droits de tout homme, afin que se consolide la paix !

Accepte cet abandon confiant de notre part, ô Servante du Seigneur ! Que ta présence maternelle dans le mystère du Christ et de l’Église devienne source de joie et de liberté pour tous et chacun, source de cette liberté par laquelle « le Christ nous a libérés » (Ga 5,1), source enfin, de cette paix que le monde ne peut donner, mais qui nous vient de Lui seul, le Christ (cf. Jn 14,27).

Enfin, ô Mère, reprenant et confirmant le geste de mes prédécesseurs Benoît XIV et Pie X, qui te proclamèrent Patronne du Mexique et de toute l’Amérique latine, je te présente une couronne au nom de tous tes fils mexicains et latino-américains, afin que tu les tiennes sous ta protection, que tu les gardes unis dans la foi et fidèles au Christ ton Fils, Amen.







Homélies St Jean-Paul II 25