Homélies St Jean-Paul II 13885

Douala (Cameroun), Mardi 13 août 1985

13885

1. “C’est l’héritage du Seigneur que des fils, récompense que le fruit des entrailles” (
Ps 127,3).

Chers Frères et Soeurs,

En célébrant cette Eucharistie au coeur de la grande cité portuaire de Douala et de la province ecclésiastique du littoral ouest, nous pensons plus spécialement aux jeunes qui forment 60% de la population de la ville. Nous remercions Dieu pour la chance que représente cette jeunesse. Nous lui confions son avenir. Mais son éducation est aussi un sérieux défi. Comment la réussirons-nous? Ou plutôt, comment permettrons-nous aux enfants et aux jeunes d’acquérir une personnalité digne de l’homme, digne d’un fils de Dieu, d’une fille de Dieu? N’est-ce pas la grande question posée aux parents, aux éducateurs, aux instances sociales et administratives, aux pasteurs et à toute la communauté de l’Eglise? Et les jeunes eux-mêmes n’ont-il pas à réfléchir sur la façon de préparer leur avenir? Après la messe, c’est à eux que je m’adresserai plus directement.

A présent, avec vous tous, devant Dieu, je voudrais envisager les perspectives de l’éducation, convaincu que “si le Seigneur ne bâtit la maison, en vain peinent les bâtisseurs” (Ps 127,1).

2. L’éducation des enfants, des jeunes et des adultes selon la foi catholique est l’un des objectifs fondamentaux de toute oeuvre missionnaire.

Regardons notre Maître: “Jésus parcourait les villages à la ronde en enseignant” (Mc 6,6). Et pour proposer plus largement son Message, il commença à envoyer les douze Apôtres devant lui, deux par deux. Ces disciples annonçaient le Royaume de Dieu tout proche, ils invitaient à se convertir, à entrer en quelque sorte dans le chemin éducatif de Dieu. Et déjà, ils libéraient les gens des obstacles, en chassant les esprits impurs; ils manifestaient aux infirmes la bonté de Dieu qui veut guérir et sauver.

Telle fut la première mission des disciples de Jésus. Et je ne peux m’empêcher de penser à la première évangélisation au Cameroun. Il y a moins de cent ans, les Pères Pallotins, venus de l’Eglise d’Allemagne, ont implanté le premier poste missionnaire à Marienberg, dans ce diocèse. D’ici, je salue ce berceau du catholicisme au Cameroun, qui demeure, pour toutes les paroisses du pays, un haut lieu spirituel dédié dès le début à la Reine des Apôtres. Les pionniers apostoliques étaient venus dans le plus grand dénuement, comme les disciples de Jésus dans l’Evangile. Les Pères Pallotins, puis les missionnaires du Sacré-Coeur de Saint-Quentin durent quitter la région en 1914, pour des raisons tout à fait étrangères à la mission. Mais ils n’avaient pas besoin de secouer la poussière de leurs sandales, car les populations avaient déjà répondu merveilleusement à la Bonne Nouvelle. Plus de 50.000 Camerounais, baptisés ou catéchumènes, avaient adhéré à la foi catholique, et déjà plus de 200 catéchistes étaient formés. Les missionnaires avaient annoncé la Parole de Dieu dans sa simplicité, ils avaient pris soin des malades, et ils avaient fondé plus de 200 écoles, avec près de 20.000 élèves. Ils savaient à quel point l’éducation chrétienne était capitale pour l’avenir de la mission.

Les Pères du Saint-Esprit, puis d’autres missionnaires, prêtres, frères, religieuses et laïcs, ont courageusement pris le relais. Et aujourd’hui, je suis heureux de saluer cette Eglise florissante, authentiquement africaine. Je remercie vivement Monseigneur Simon Tonyé, votre Archevêque, de son accueil; je salue son prédécesseur, Monseigneur Thomas Mongo, les Evêques de Bafoussam et de Nkongsamba, et ceux des autres provinces venus prier avec nous. Je salue toutes les ethnies représentées au sein de cette Eglise, car nous formons un seul Corps, le Corps du Christ. Je salue aussi ceux qui, sans partager pleinement notre foi, la respectent et collaborent avec vous: je les assure de mes sentiments fraternels. Nous avons en commun une tache analogue d’éducation, une tache immense, sur laquelle je voudrais maintenant méditer avec vous.

3. Dans toutes les civilisations l’éducation constitue une condition fondamentale de continuité. Par les parents, les maîtres, la société entière, il s’agit de transmettre aux jeunes générations un héritage, l’héritage d’un savoir, d’un savoir-faire, d’une façon de penser et d’une éthique de la vie. Il s’agit de permettre aux jeunes d’assimiler activement les acquis de la famille, le patrimoine commun de la tribu, du peuple ou de la nation avec lesquels on est lié par l’unité de la culture, de la langue et de l’histoire (Cfr. IOANNIS PAULI PP. II Epistula Apostolica ad iuvenes, Internationali vertente Anno Iuventuti dicato, 11, die 31 martii 1985: Insegnamenti di Giovanni Paolo II, VIII, 1 (1985) 783 ss.). L’Eglise, elle aussi, a un héritage à transmettre, l’Evangile et la manière dont il a été cru et vécu par des générations de chrétiens, sous la conduite du Magistère.

Mais si l’on envisage l’éducation à partir de la personne qui en bénéficie, il s’agit de la conduire à la maturité humaine, pour qu’elle apprenne à “être” et pas seulement à “savoir”, pour qu’elle réponde vraiment à sa vocation. Le Concile Vatican II a nettement exprimé le but que poursuit une éducation bien comprise: former la personne en fonction de sa fin la plus haute et des objectifs les plus élevés de la société où elle sera adulte; développer harmonieusement toutes les aptitudes, le sens de l’effort et de la responsabilité; conquérir une maîtrise de sa liberté, orientée par des valeurs morales reconnues et par une foi non seulement apprise, mais vécue (Cfr. Gravissimum Educationis GE 1-2). Que le jeune intègre progressivement ce qui est vrai, bon et beau! Qu’il corresponde de tout son être au projet de Dieu qu’il porte en lui, comme homme ou comme femme, créé à l’image de Dieu, puis marqué par la garce du baptême!

Certes, il faut être réaliste. Une telle formation se heurte à bien des obstacles, des résistances intérieures, des influences contraires au dehors. L’éducateur doit progressivement aider le jeune à éclairer son jugement et à fortifier sa volonté, pour qu’il fasse des choix fondés sur la vérité, le bien, le don de soi. La tache de l’éducateur qui l’accompagne est difficile, mais exaltante. Vous savez combien l’Eglise y attache d’importance, et quel respect elle a pour cette noble vocation!

4. L’éducation catholique est d’abord l’oeuvre de la famille. Ceux qui ont mis l’enfant au monde ont le droit inaliénable et le devoir de le conduire à sa maturité: le Pape Pie XI le soulignait dans son encyclique “Divini Illius Magistri” (31 décembre 1929). Les parents sont les premiers concernés, et avec eux ceux qui constituent la famille élargie, comme on la conçoit habituellement chez vous. Dieu leur a donné pour cela une autorité naturelle: puisent-ils l’exercer avec fermeté et amour, en donnant eux-mêmes l’exemple! Tout le monde reconnaît le rôle capital du père ou, pour les orphelins, de celui qui en tient lieu; et le rôle primordial de la mère, dont la présence affectueuse est toujours accueillante.

Chers parents chrétiens, mesurez-vous assez le grand don de Dieu qui fait de vous ses coopérateurs, non seulement pour transmettre la vie à vos enfants, mais pour les élever? C’est un talent qu’il vous confie, pour le faire fructifier. J’aimerais que vous relisiez dans la Bible, au chapitre quatre du Livre de Tobie, les recommandations admirables que le père, Tobit, si éprouvé par la vie, donnait à son fils qui partait au loin chercher de l’argent et une épouse: “Honore ta mère . . . Sois tous les jours fidèle au Seigneur. N’aie pas la volonté de pécher . . . Fais de bonnes oeuvres . . . Agis dans la vérité . . . Ne détourne jamais ton visage d’un pauvre . . . Ne fais à personne ce que tu n’aimerais pas subir . . . Prends l’avis de toute personne sage . . . En toute circonstance bénis le Seigneur, demande-lui de diriger tes voies . . . N’aie pas peur, mon enfant, si nous sommes devenus pauvres. Tu as une grande richesse, si tu crains Dieu” (Cfr. Tob Tb 4,3-20). Le Juif qui parlait ainsi, exilé dans un pays païen, n’avait cessé de joindre l’exemple à la parole: il risquait sa vie par fidélité à ses compatriotes décédés qu’il ensevelissait, il gagnait sa vie dans l’honnêteté scrupuleuse, faisait l’aumône et priait chaque jour. Il a vraiment réussi l’éducation de son fils. Et le Livre biblique montre comment Dieu l’a récompensé.

C’est bien ainsi, je n’en doute pas, que les familles africaines, veulent remplir leur rôle. Mais je sais les difficultés que vous rencontrez. Les enfants acquièrent à l’école un savoir que ne connaissent pas leurs parents et sont peut-être moins sensibles à leur sagesse, moins attentifs à leurs conseils. Le dialogue devient difficile pour beaucoup. Alors que l’instruction est en soi un bien fondamental de la civilisation, les jeunes, parfois, retiennent d’abord de leur formation un esprit critique et enclin au doute, ouvert à de multiples courants d’idées dont ils ne discernent pas bien la valeur. A cause de leurs études, ils sont fréquemment obligés de s’éloigner de la maison familiale. Une fois terminée l’école, ils restent trop souvent sans travail, désoeuvrés dans les zones urbaines, en proie à toutes sortes de fréquentations et de séductions.

Oui, chers parents, je comprends que votre responsabilité soit souvent difficile à exercer. Et pourtant, je vous en supplie, n’abdiquez jamais! Vos enfants, même vos grands enfants, ont plus que jamais besoin de vous. Les liens tissés avec vous sont d’un prix inestimable pour leur éducation, parce qu’ils sont marqués par votre autorité naturelle et par l’amour. Cette affection des parents prend appui sur la qualité de leur amour conjugal, comme le veut une authentique conception du mariage. Quand un foyer est désuni, même si les enfants sont toujours pris en charge, l’amour conjoint de leurs père et mère naturels leur manque. Des enfants naissent en dehors du mariage; les jeunes gens devraient être conscients des responsabilités graves qu’ils prennent! Quand, au contraire, un foyer donne l’exemple d’une vie conjugale unie, dans une atmosphère de foi et de prière, les enfants sont heureux et confiants, ouverts au dialogue. Il appartient à la société de vous aider à tenir votre rôle; l’Eglise vous soutient et prie pour vous; “L’Association Chrétienne des Foyers du Cameroun” est à votre disposition; mais personne ne peut vous remplacer.

351 5. Pourtant, il vous faut compter aussi sur d’autres éducateurs. Vous avez observé, dans la lecture biblique, que Tobit tenait à ce que son fils ait un bon accompagnateur pour son voyage (Iob. 5, 9), un guide sur, qui indique le chemin, protège, guérisse, conseille, sous le regard de Dieu, et demeure fidèle jusqu’au terme de sa mission. Voilà ce que devrait être tout éducateur. Il rend des services inestimables, plus importants que tous les biens matériels: quand Tobit lui offre la moitié de l’argent rapporté, cela ne suffit pas à le récompenser (Cfr. ibid.12, 1-5).

Il vous revient donc d’introduire vos jeunes dans des cercles plus larges que la famille. Leurs éducateurs pourront être des prêtres, des religieux, des religieuses, des laïcs, adultes ou jeunes aînés. Sachez à qui vous confiez vos enfants!

6. Au delà de la famille, le premier milieu éducatif est l’école. L’école n’a pas seulement pour mission d’instruire, de faire surmonter le handicap de l’analphabétisme, d’aider à s’exprimer, de donner des connaissances scientifiques et techniques, et, par là, un métier, d’apprendre à déchiffrer dans le grand livre de la nature et des oeuvrais de l’homme. Elle doit éduquer, en coopération avec les parents, suivant la conception que j’ai rappelée tout-à-l’heure à la suite du Concile. L’exigence des enseignants sera différente et complémentaire de celle des familles. On comprend ainsi qu’ils vérifient ce qui a été reçu par des contrôles et des examens: dans la vie scolaire, c’est une méthode qui encourage l’assimilation sérieuse et durable, bien plus qu’un simple moyen de décerner des diplômes et des titres.

Pour les enfants chrétiens, il est capital qu’ils puissent progresser dans leur formation religieuse au rythme de leur formation profane. Il faut absolument en trouver les moyens. Ils l’avaient bien compris, les pionniers missionnaires qui fondaient les premières écoles du Cameroun! Aujourd’hui, vous disposez, en cette province comme dans l’ensemble du pays, d’un grand nombre d’écoles primaires catholiques et de plusieurs institutions secondaires: elles permettent de créer une communauté où la foi vivante en Jésus Christ et la prière sont comme naturellement intégrées aux études, où l’esprit évangélique inspire l’éducation morale et l’atmosphère de la vie scolaire. J’encourage vivement les parents catholiques qui le peuvent à soutenir ces écoles au delà des subventions normalement reçues; et je demande aux pasteurs et aux maîtres de veiller sur leur qualité, humaine et spirituelle.

Je sais qu’il existe aussi, surtout à Douala, beaucoup d’autres écoles ou collèges d’Etat, ainsi que des collèges privés. Dans tous ces cas, il importe que les parents, les curés et les enseignants de bonne volonté, coopèrent pour assurer aux enfants et aux jeunes une formation chrétienne sérieuse, en particulier grâce aux aumôneries. Les catholiques ne peuvent négliger l’éducation à la foi de leurs enfants.

7. Mais beaucoup d’autres communautés, milieux de travail, organisations de loisirs contribuent aujourd’hui à influencer les jeunes. Là aussi doit s’exercer une action éducative. Pour un chrétien, en particulier, la foi n’est pas une simple connaissance, elle est une expérience d’Eglise. Celle-ci commence dans la famille chrétienne qui est comme un sanctuaire de Dieu à la maison. Elle peut continuer à l’école catholique. Mais elle se vit surtout à la paroisse où les jeunes doivent avoir une place de choix. Ils peuvent développer leur maturité chrétienne grâce aux catéchistes, ou aux groupes de prière, aux mouvements d’action catholique, aux confréries, aux multiples associations où l’on apprend entre jeunes et avec des éducateurs à réfléchir et à agir en chrétiens, dans le climat d’amitié qui convient aux adolescents.

8. Si la famille, l’école, les mouvements sont éducateurs, il revient aux jeunes qui mûrissent d’entreprendre par eux-mêmes la tache de leur propre éducation , de construire leur personnalité à partir de l’héritage reçu, des valeurs morales et spirituelles découvertes. Tous les contacts humains, toutes les connaissances doivent servir cet enrichissement; et surtout le travail lui-même, qui forme l’homme. Tout travail, car on devrait respecter le travail manuel autant que le travail intellectuel.

9. Mais, si les jeunes ont la responsabilité de leur auto-éducation, encore faut-il qu’ils trouventdans la société des conditions et un climat qui la favorisent. Et là, les responsables du bien commun, les artisans des médias, à quelque religion qu’ils appartiennent, les communautés religieuses, ont leur rôle à remplir pour l’amélioration de ces conditions.

Donnez-vous une grande importance, vous les adultes, aux valeurs morales et spirituelles, à l’honnêteté, au service désintéressé? Ou au contraire, donnez-vous la priorité à l’argent, au profit, à la jouissance égoïste? Entretenez-vous la critique systématique et le scepticisme qui rendent désabusé?

Vous préoccupez-vous de rendre vos communautés chrétiennes vivantes et transparentes? Si elles ne savent pas accueillir chaleureusement les jeunes, ils s’éloigneront pour chercher ailleurs une telle atmosphère. Et si leur formation chrétienne est insuffisante, ils ne pourront pas discerner les faiblesses des doctrines qu’on leur propose.

Le drame des jeunes réduits au désoeuvrement, tentés par n’importe quel moyen de survivre, même malhonnête, est-il suffisamment pris en compte? La société cherche-t-elle assez à remédier au déracinement familial des jeunes, les encourage-t-elle assez à trouver et à accepter les possibilités de travail?

352 Tobit a eu le fils qu’il méritait, vous aurez la jeunesse que vous méritez.

10. Chers Frères et Soeurs, j’ai voulu rappeler des exigences qui peuvent paraître lourdes, mais je vous invite à la confiance. L’oeuvre d’éducation catholique dépasserait nos forces, si nous demeurions isolés. Oui, unissons-nous. Et confions à Dieu la collaboration qu’il nous demande pour nos fils, pour ses fils: “Si le Seigneur ne bâtit la maison, en vain peinent les bâtisseurs”.

Regardons sans cesse vers le Christ. Il est le Maître qui a éduqué les Apôtres à la foi, à la fidélité, au milieu de bien des épreuves, des réticences, avec une patience inlassable. Il est le Sauveur qui délivre du mal en même temps qu’il indique le chemin à suivre. Bien plus, il donne l’Esprit Saint qui agit comme un maître intérieur dans le coeur de nos enfants tandis que nous les exhortons de l’extérieur. Il offre à chacun d’eux ses sacrements pour affermir son alliance avec eux.

Nous allons le supplier pour eux, pour vous, pour tous les éducateurs, comme il priait pour ses Apôtres “afin qu’aucun ne se perde” (Cfr. Io
Jn 17,12). Il fait sienne notre prière: “Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux” (Mt 18,20).

Nous rassemblons tous les efforts du peuple de Dieu au Cameroun pour une éducation réussie des jeunes: que le Christ les unisse à son Sacrifice qui sauve le monde! Qu’il fasse de nous-mêmes une offrande qui plaise à Dieu, et que ce sacrifice porte des fruits dans la vie de tous! Nous vivons cette Eucharistie en union avec le Congrès eucharistique international de Nairobi, auquel je vais participer, et qui a pour thème: l’Eucharistie et la famille chrétienne.

La Vierge Marie a participé à l’éducation des disciples autour de Jésus: “Faites tout ce qu’il vous dira” (Jn 2,5). Elevée au ciel, elle guide et soutient l’espérance de ce peuple encore en chemin (Cfr. «Praefatio»). Comme une Mère, mieux que toute mère de la terre, elle veille sur nous, afin que nos coeurs s’orientent vers Dieu.

Amen.

C’est pour cela qu’à la fin de cette homélie je m’adresse à elle, à la très Sainte Vierge Marie, à la Mère de tous les Camerounais, et je prononce un acte de consécration.

Très Sainte Vierge Marie, au cours de cette dernière messe solennelle au Cameroun, je veux au nom de tous mes frères et soeurs de ce pays, te confier l’avenir de cette Eglise, les progrès de cette nation.

Je reprends aujourd’hui la démarche combien significative des premiers missionnaires catholiques arrivés ici il y a 90 ans, aussitôt ils ont confié leur mission à la montagne de Marie: Marienberg.

Toi qui as été choisie par Dieu pour accueillir son Fils et qui l’as sans cesse remercié de ses merveilles, donne à ce peuple chrétien du Cameroun d’apprécier toujours davantage le don de la foi reçue et la présence de Dieu qui demeure au milieu de nous.

353 Toi qui as été préservée du péché, qui as conservé ton coeur transparent à Dieu, prie pour nous pauvres pécheurs, donne-nous toujours le désir de nous convertir, de nous purifier, de retrouver la grâce de Dieu, de vivre sous son regard.

Toi qui as cherché la volonté de Dieu comme la servante du Seigneur, rends tes enfants toujours disponibles à servir le Seigneur et leurs frères, spécialement les âmes qui se sont consacrées à Dieu: prêtres, religieux, religieuses. Intercède pour tous, et pour que l’Esprit Saint éclaire et fortifie tous les ouvriers apostoliques.

O Marie, devant cette jeunesse innombrable, avenir du Pays, nous te supplions, veille sur ces enfants et ces jeunes, soutiens le courage des parents et des éducateurs, que jamais ils ne se découragent dans leur tache éducative, et soient pour les jeunes l’étoile qui leur montre le chemin de Dieu déjà inscrit dans leur conscience, qui les guide vers le Christ, vers une foi mure qui les invite au don plénier d’eux-mêmes.

Oui, Marie, nous te confions toute l’Eglise au Cameroun, comme une mère très aimée.

Nous te consacrons toutes les bonnes volontés, toutes les forces vives de ce Pays qui ne demande qu’à progresser dans le bien, dans la paix, dans la charité, dans la foi vécue, vers le bonheur de vivre avec Dieu pour toujours.

Amen.


Avenue des Martyrs - Bangui (République Centrafricaine)
Mercredi, 14 août 1985



1. “Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous donniez beaucoup de fruits: ainsi vous serez pour moi des disciples” (
Jn 15,8).

Chers Frères et Soeurs de Centrafrique, cette parole de Jésus à ses Apôtres, au soir de la première Eucharistie, dans le Cénacle de Jérusalem, elle est aussi pour vous, aujourd’hui. Vous êtes devenus ses disciples. Vous-mêmes, vos parents ou vos grands-parents, vous avez écouté la Parole de Dieu, portée ici au cours de ce dernier siècle, par d’autres disciples auxquels elle avait été transmise de génération en génération depuis Jésus, depuis ses Apôtres Pierre et Paul. Vous avez cru. Vous avez voulu le baptême au prix d’un catéchuménat exigeant. Et aussitôt, comme laïcs baptisés et confirmés, vous avez enseigné à d’autres le chemin de la foi. Et beaucoup avec vous ont fait cette expérience chrétienne: la Parole de Dieu est bonne, elle a changé le coeur des hommes. Un peuple de Dieu s’est constitué sans tarder sur les bords de l’Oubangui; votre Archevêque, Monseigneur N’Dayen, vient d’en présenter les fruits au successeur de Pierre. Je le remercie de ses paroles de bienvenue, et je vous remercie tous de votre accueil. L’essentiel du message chrétien auquel vous adhérez est cette Bonne Nouvelle: Dieu est Père. Il a créé l’homme à son image. Il ne l’a pas abandonné à son péché. Il a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, pour que tout homme qui croit en lui soit sauvé, obtienne la Vie éternelle. Avec Jésus, mort et ressuscité pour vous, vous êtes devenus enfants adoptifs de Dieu. Dieu vous a donné part à son Esprit Saint qui demeure en vous. Vous êtes heureux de suivre le Christ, Lui qui est le Chemin, la Vérité, la Vie. Avec lui vous priez Dieu en toute confiance. Avec lui vous pouvez mener une vie imprégnée de paix et d’amour. Avec lui vous portez vos épreuves, même l’épreuve de la mort. Car Dieu est fidèle, et il vous appelle à partager sa Vie en ce monde et dans l’autre. Voilà l’essentiel de la foi que vous avez en commun avec tous les chrétiens du monde, avec l’Eglise dont le Seigneur m’a établi Pasteur universel, en lien avec vos évêques.

Pour cette foi reçue, ne cessez pas de vous réjouir, de rendre grâce à Dieu. C’est une graine qui peut porter beaucoup de fruits. C’est une Présence qui peut épanouir toute votre vie. Et vous ne sauriez garder pour vous ce trésor. Je souhaite que se poursuive, par vous, l’annonce de l’Evangile à travers ce pays, où beaucoup n’ont pas encore eu l’occasion de le connaître vraiment et d’y donner librement leur foi.

354 2. Mais vous, ne vous contentez jamais de dire: “Je suis baptisé”, “j’ai la foi”. Vous avez entendu l’avertissement de l’Apôtre Jacques aux premiers chrétiens: “Mes Frères, si quelqu’un prétend avoir la foi, alors qu’il n’agit pas, à quoi cela sert-il?” (Jc 2,14). Chacun devrait plutôt dire: “C’est par mes actes que je te montrerai ma foi” (Ibid.2, 18). Et ces actes consistent à accomplir la loi du Christ, qui est charité, amour.

Certes, c’est la foi qui est première. C’est Dieu qui est à la source, car il nous a aimés le premier. S’il nous donne sa Vie, ce n’est pas à cause de nos mérites: c’est un don gratuit, une grâce. Et si nous arrivons à accomplir sa loi par des actes méritoires, c’est que lui-même continue à nous inspirer et à nous aider. Mais il est normal que nous correspondions à sa volonté, quitte à lui offrir en sacrifice ce qui nous est le plus cher, comme Abraham. Il est logique, il est nécessaire, que nous répondions à son amour de toutes nos forces, de tout notre coeur. Ainsi ces actes rendent la foi parfaite, ils la prouvent. Sans eux, notre foi serait comme un corps qui est mort, qui ne respire plus.

Or le commandement du Christ, c’est que nous nous aimions les uns les autres comme il nous a aimés (Cfr. Io Jn 15,12). Comment pourrions-nous prier Dieu comme notre Père si nous ne regardions pas notre prochain comme un frère, si nous ne faisions rien pour lui lorsqu’il souffre de la faim, de la soif, du manque de vêtements ou de toit, lorsqu’il est malade, prisonnier, étranger (Cfr. Matth Mt 25,35-36); et j’ajouterai, lorsqu’il est sans travail ou sans l’espoir d’un avenir vraiment humain en ce monde? L’amour du prochain n’est jamais un mot abstrait; il tend à se traduire dans un geste concret d’attention, de respect, d’estime, de justice, de partage, d’encouragement à vivre, à mieux vivre.

3. Mettre en oeuvre l’Evangile dans toute la vie quotidienne, dans les mentalités, dans les institutions, voilà ce à quoi vous êtes appelés, chrétiens de Centrafrique. C’est la vocation du peuple chrétien tout entier. En effet, le baptême et la confirmation font des laïcs des membres actifs du Corps du Christ, soit dans l’Eglise où ils peuvent assurer les services de leur communauté chrétienne - autour du prêtre qui a un rôle spécifique -, soit dans le monde où ils coopèrent avec d’autres aux différentes taches profanes, sans se conformer à l’esprit du monde mais dans l’esprit des béatitudes: heureux ceux qui ont l’esprit de pauvreté: heureux les artisans de paix: heureux ceux qui ont faim et soif de la justice; heureux les miséricordieux: heureux les coeurs purs! Le Concile Vatican II a clairement exprimé ce rôle des laïcs dans la société: “Il vivent au milieu du siècle, c’est-à-dire engagés dans tous les divers devoirs et travaux du monde, dans les conditions ordinaires de la vie familiale et sociale dont leur existence est comme tissée. A cette place, ils sont appelés par Dieu pour travailler comme du dedans à la sanctification du monde, à la façon d’un ferment, en exerçant leurs propres charges sous la conduite de l’esprit évangélique” (Lumen Gentium LG 31).

Il me semble que l’Eglise en Centrafrique a bien compris cette responsabilité des laïcs, depuis une cinquantaine d’années, comme en ont témoigné les travaux des Assises de l’Eglise catholique, en janvier 1982. La multiplication de vos petites communautés dans les villages ruraux ou dans les quartiers urbains, avec leurs responsables ou conseillers, et les différents mouvements chrétiens aident à traduire l’esprit de l’Evangile dans les réalités de la vie quotidienne.

4. Votre milieu de vie attend l’action et le dévouement des chrétiens pour faire face solidairement à ses besoins humains. Votre pays, chers amis, n’est pas dépourvu de richesses, qu’il s’agisse du sol ou du sous-sol. Dieu vous a donné la terre et l’eau; il vous confie cette terre fertile pour quelle produise suffisamment pour tous, et pour que les enfants de ce pays ne meurent jamais de faim ni ne souffrent de malnutrition. Sans nier la nécessité d’une solidarité nationale et internationale, il vous revient de mettre vous-mêmes en valeur toutes vos richesses, par un travail courageux, honnête, organisé, modernisé avec toutes les ressources de votre imagination et de l’entraide entre voisins.

Je sais que, sous l’impulsion des mouvements chrétiens, vous manifestez beaucoup de dévouement dans l’animation rurale ou urbaine. Vous prenez de nombreuses initiatives concrètes, par exemple pour assurer l’aménagement des puits et des sources, des routes, de meilleurs rendements agricoles, l’organisation de coopératives, l’alphabétisation, les écoles, la formation d’artisans, la formation ménagère et la couture, la promotion féminine dans son ensemble, les dispensaires, l’éducation sanitaire, la lutte contre l’alcoolisme, l’amélioration de l’habitat, la défense solidaire de vos droits . . .

Oui, il est bon que chacun découvre, avec l’aide de ses frères, ses droits et ses devoirs, ses possibilités, et se sente encouragé à apporter sa collaboration, toujours dans le but de grandir en responsabilité comme Dieu le veut, et de servir la communauté dans ses besoins essentiels. C’est une oeuvre de charité fraternelle et de justice qui convient aux chrétiens.

5. Une telle action, absolument nécessaire à la base, doit s’articuler avec celles qui se déploient dans tout le pays et dans les divers domaines pour rechercher le bien commun de tous, c’est-à-dire la promotion de toutes les catégories sociales de la nation et des conditions nécessaires au développement, à la solidarité et à la paix. Les chrétiens doivent être au premier rang de ceux qui éduquent à ce sens du bien commun, par-delà les intérêts particuliers, et qui y coopèrent eux-mêmes. Ils auront à coeur d’acquérir une vraie compétence, d’accomplir consciencieusement le travail de leur profession, et, s’ils ont part à des charges publiques, de s’en acquitter pour servir tous leurs compatriotes, surtout les plus démunis, sans accepter le favoritisme, l’intolérance entre groupes ethniques, la corruption. Il faudrait qu’on puisse les reconnaître dans ces paroles du psaume: “L’homme de bien compatit et partage, / il mène honnêtement ses affaires . . . / sa justice ne cesse d’agir” («Psalmus Responsorialis»: Ps. Ps 112,5 Ps. Ps 112,9).

Le Concile Vatican II a insisté sur la participation des chrétiens à la vie économico-sociale et à la vie politique pour contribuer à les “humaniser” selon le plan de Dieu. Pour cela, “rien n’est plus important que de développer le sens intérieur de la justice, de la bonté, le dévouement au bien commun, et de renforcer les convictions fondamentales sur la nature véritable de la communauté politique, comme sur la fin, le bon exercice et les limites de l’autorité publique” (Gaudium et Spes GS 73 § 5; cfr. etiam n. 143). Il faut tout faire pour régler les différends par le dialogue et selon la justice, afin que règne la véritable paix et que la dignité de chaque personne soit respectée.

J’encourage donc tous ceux qui s’emploient en ce pays à former les consciences dans ce sens-là et à réaliser déjà un monde plus équitable, plus fraternel; je pense à l’action éducative et à la réflexion de plusieurs mouvements chrétiens comme la JAC, la JEC, le scoutisme, le guidisme, les GEN, l’action catholique de l’enfance. Il y va du témoignage de l’Eglise, il y va d’un meilleur avenir pour le pays.

355 6. La jeunesse mérite notre sollicitude spéciale. Les jeunes accèdent à plus d’instruction, et c’est un bien pour épanouir leur esprit et pour servir le pays avec plus de capacités. Mais la déception les gagne de plus en plus, car ils ne voient pas les fruits dont ils ont rêvé faute d’emplois adaptés, faute peut-être aussi d’une formation qui corresponde à la situation. Les solutions sont certainement complexes, et il ne s’agit pas d’accuser seulement les autres, comme si les résultats devaient arriver tout préparés d’en haut ou d’ailleurs. Mais personne ne peut se résigner à cette déception des jeunes: elle risque d’entraîner certains à la colère, à la révolte, à des actes de brigandage ou au repli égoïste sur soi, ou encore à la fuite dans l’alcool et la drogue, au fatalisme désabusé.

Vous, chers adultes, parents, professeurs, responsables du bien commun de la nation, n’acceptez pas un tel risque. Faites un effort d’imagination pour préparer l’avenir des jeunes. Cherchez ce qui est possible, prenez des initiatives courageuses, renouvelez les structures inadéquates, entraînez la nation tout entière à ce partage et faites tout pour soutenir la conscience des jeunes dans la droiture.

Mais vous, chers jeunes, réagissez vous-mêmes avec dignité, avec courage, avec solidarité, surs qu’il y a une espérance pour qui cherche selon l’esprit de l’Evangile. Votre belle devise centrafricaine est: “Unité, dignité, travail”; je la traduis: devenez des hommes libres debout; la liberté n’est pas un cadeau, elle se mérite. Rejetez la division et la haine. Préparez une vie meilleure par votre travail et votre dévouement aux autres.

Pour l’éducation religieuse et intégrale des jeunes, l’Eglise entend apporter le plus possible sa collaboration - soit dans les écoles de l’Etat, soit dans les écoles dont elle peut avoir la responsabilité directe - pour aider les jeunes eux-mêmes et pour soutenir leurs éducateurs dans leur magnifique vocation, entre autres dans le cadre des “Equipes enseignantes”.

7. La cellule de base de la société reste la famille. Les tout premiers missionnaires avaient tenu à préparer des garçons et des filles à fonder des foyers chrétiens, je pense à Pierre Kwesse et à Marie Peke qui ont formé une famille admirable dès leur conversion, moins de cinq ans après la première annonce de l’Evangile dans ce pays. La liberté des futurs époux, la stabilité de leur union, leur influence décisive auprès de leurs enfants sont trop souvent menacés, soit par certains aspects négatifs de coutumes qu’il suffirait de renouveler, soit par certaines séductions modernes.

Je félicite les membres de l’Association des foyers chrétiens qui cherchent à entraîner leurs amis dans une conception chrétienne de la famille, selon les principes que j’ai moi-même exposés dans l’exhortation “Familiaris Consortio” après un synode des évêques du monde entier. Ces exigences, librement acceptées, assumées dans le sacrement du mariage et vécues sans cesse avec le Christ dans la prière, assurent aux époux chrétiens la profondeur de l’amour conjugal, sa fidélité, sa fécondité, l’éducation à la foi, comme dans une Eglise en miniature. Chers amis, que Dieu vous aide à promouvoir de tels foyers! Ne négligez pas le sacrement du mariage que le Christ a institué pour sanctifier l’alliance et toute la vie des époux, et leur permettre de s’approcher sans cesse des autres sources de la grâce!

Oui, que partout la conscience chrétienne bien formée fasse briller la lumière de l’Evangile, répande l’amour, suscite l’espérance!

8. “Je vous ai établis pour que vous alliez et que vous donniez du fruit” (
Jn 15,16), déclarait Jésus. Cela vaut pour tous les disciples du Christ. Jésus le disait d’abord aux Apôtres. A eux il confiait un rôle spécial, pour annoncer l’Evangile dans toute sa force, pour veiller à la fidélité des disciples, pour leur donner en son nom le Pain de Vie qui est son Corps, et le pardon des péchés, pour les faire vivre dans l’unité fraternelle au delà de tous les particularismes, pour relier les nouvelles communautés éparses à l’Eglise entière rassemblée en un seul Corps. C’est aujourd’hui le rôle irremplaçable de vos évêques et de leurs coopérateurs immédiats, les prêtres et les diacres.

Peuple de Dieu sur cette terre de Centrafrique, es-tu assez conscient de la place inestimable du prêtre au milieu de ton Eglise? Longtemps, les vocations arrivées à maturité ont été peu nombreuses. Un progrès se dessine: je m’en réjouis. Il serait impensable que des foyers bien chrétiens, des communautés ferventes, ne mettent pas tout en oeuvre pour éveiller de telles vocations, les encourager, et ensuite pour soutenir ces ministres du Christ qui engagent toute leur vie à son service dans l’Eglise. Les laïcs eux-mêmes ne rempliront tout leur rôle que si des prêtres soutiennent leur vie chrétienne, et il serait normal que des prêtres centrafricains et des évêques centrafricains plus nombreux assument de plus en plus cette responsabilité ecclésiale.

Et je pense ici à toutes les personnes consacrées, religieux, religieuses, membres d’Instituts séculiers: le témoignage du don total de leur personne au Christ et aux autres, dans la chasteté, l’obéissance, la pauvreté, est un signe par excellence de l’Evangile, un signe aussi de maturité de l’Eglise. Combien de laïcs engagés, de catéchistes, n’ont-ils pas trouvé le chemin du Christ et sont devenus des évangélisateurs grâce à leur médiation! Je suis sur que vous attendez le moment où des religieuses centrafricaines prendront le relais des méritantes religieuses expatriées. Il faut préparer activement cette étape et accepter la formation nécessaire à la vie religieuse.

Je n’oublie pas ceux et celles qui, au sein de cette Eglise, mènent une vie religieuse contemplative: ils bâtissent eux aussi la Cité de Dieu par la prière et le sacrifice.

356 9. Chers Frères et Soeurs, Jésus a encore une parole à vous confier, une belle et grave parole: “Je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruits, car en dehors de moi vous ne pouvez rien faire” (Jn 15,5).

Tous les fruits dont nous avons parlé, dans votre vie personnelle, familiale, sociale et nationale, ne seront possibles, et ils ne demeureront les fruits de l’amour, que si vous restez fermement attachés au Christ comme le sarment au cep de vigne, comme la branche au tronc de l’arbre. La sève qui produira en vous le dynamisme de l’amour est l’Amour qui demeure dans le Coeur du Christ, son amour du Père et son amour de l’homme. Sans cet amour, nos efforts ne seront qu’activisme humain “comme une cymbale retentissante” (Cfr. 1Co 13,1).

Chers Frères et Soeurs, persévérez dans le Christ, en prenant tous les moyens de resserrer vos liens avec lui.Demeurez dans le Christ par la foi, une foi vive, une foi qui se nourrit des paroles du Christ - “que mes paroles demeurent en vous” -, méditées personnellement ou en groupe, en en demandant l’interprétation authentique à l’Eglise, bref, une foi qui cherche à mieux comprendre le salut et la volonté de Dieu. L’homélie de la messe, les catéchèses, les réunions de révision de vie, les retraites, les groupes bibliques sont des temps forts de ce ressourcement et de cette entraide spirituelle.

Demeurez dans le Christ par la prière: la prière maintient avec Dieu des liens d’amour, elle exprime la reconnaissance du fils qui remercie, l’audace du fils qui demande, la disponibilité du fils qui dit: “Seigneur, que veux-tu que je fasse?”.

Demeurez dans le Christ en accueillant ses sacrements, qui sont les signes efficaces de sa présence. Préparez-vous à les recevoir. Demandez au Seigneur de vous purifier et de vous nourrir de sa vie par l’Eucharistie, notamment dans l’assemblée dominicale. Demandez-lui de transfigurer votre amour humain par le sacrement du mariage.

Vos paroisses sont des lieux privilégiés, indispensables, pour vous aider à demeurer dans le Christ. Je le disais à vos évêques en visite “ad Limina”: “Que les paroisses offrent à tous une nourriture doctrinale substantielle, une liturgie qui entraîne à la prière, un accueil chaleureux, et que, d’une façon complémentaire, les petites communautés favorisent un témoignage qui imprègne la vie quotidienne!” (Ioannis Pauli PP. II, Allocutio ad Episcopos Africae Centralis occasione oblata eorum visitationis “ad limina Apostolorum”, 4, 19 nov. 1982: Insegnamenti di Giovanni Paolo II, V/3 [1982] 1330).

10. Nous allons maintenant poursuivre notre prière eucharistique, en union avec les chrétiens de tous pays rassemblés au Congrès eucharistique de Nairobi et que je vais rejoindre. Nous rassemblons tous les beaux efforts de votre Eglise pour les unir à l’offrande du Christ. Nous présentons au Seigneur nos intentions, nos besoins. Jésus nous dit comment prier: “Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voudrez et vous l’obtiendrez . . . Tout ce que vous demanderez au Père, en mon nom, il vous l’accordera” (Jn 17,7 Jn 17,16).

Peut-être n’osons-nous pas assez demander? Nous allons prier pour tout le peuple de la République Centrafricaine, pour la paix, pour l’unité, pour le développement, pour le progrès à tous égards. Nous prierons pour l’Eglise en ce pays et aussi pour l’Eglise universelle. Et vous prierez pour mon ministère. La prière universelle va développer ces intentions.

Seigneur, que l’Eglise se rassemble dans l’Esprit Saint pour être le ferment et l’âme du monde (Prière d’ouverture):

- Seigneur, aide l’Eglise à révéler aux pauvres les richesses de l’Evangile (Prière après la communion).

- Qu’elle soit un lieu de vérité et de liberté, de justice et de paix. Donne-nous l’Esprit d’amour, l’Esprit de ton Fils (Prière eucharistique).

357 Oui, que tous, dans l’Eglise et dans la société, nous soyons animés de l’Esprit d’amour qui se traduit dans le service. Le Christ nous dit: “Vous serez mes amis, si vous faites ce que je vous commande . . . Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis afin que . . . vous donniez du fruit et que votre fruit demeure” (Ibid. 15, 14-16). Et souvenez-vous: “Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude” (Mt 20,28).

Moi-même, Jean-Paul II, j’ai été choisi d’entre mes frères pour assurer le service des serviteurs de Dieu, le service de l’unité, de la fidélité, de la marche cohérente de l’Eglise. A la suite de Jésus, je voudrais être au milieu de vous comme celui qui sert (Cfr. Luc Lc 22,27).

Je prie Dieu d’augmenter en chacun des chrétiens ici présents la foi qui vous fait entrer dans les vues de Dieu, l’amour qui vous met au service des autres, et l’espérance. Oui, l’espérance, pour qu’à aucun moment, sous aucun prétexte, vous ne cédiez au découragement, mais que vous soyez comme ces hommes et ces femmes qui ont entendu l’appel de Jésus: “Lève toi et marche” (Mt 9,5).

Que notre marche se fasse toujours avec Marie, la Servante du Seigneur.

O Marie, que nous nous préparons à célébrer demain,

O Marie, élevée au ciel, dans la gloire de ton Fils,

toi notre Mère, tu as cru,

tu as aimé,

tu as espéré mieux que toutes les créatures.

Tu es comblée par Dieu.

Que ton exemple et ton intercession aident le peuple centrafricain à participer au Royaume de Dieu, ici-bas et pour l’éternité!

Amen.




Homélies St Jean-Paul II 13885