Homélies St Jean-Paul II 642


VISITE PASTORALE DANS LA PAROISSE ROMAINE "SAN MATTIA APOSTOLO"

JEAN-PAUL II

HOMÉLIE

Dimanche 14 mars 1999



643 1. «Réjouis-toi Jérusalem, et vous tous qui l'aimez, réunissez-vous. Exultez et réjouissez-vous» (Antienne à l'Ouverture).

La liturgie d'aujourd'hui s'ouvre avec cette invitation à la joie. Elle confère un ton particulièrement heureux à ce quatrième dimanche de Carême, traditionnellement appelé Dimanche «Laetare». Oui, nous devons nous réjouir car l'authentique esprit quadragésimal est la recherche de la joie profonde qui est le fruit de l'amitié avec Dieu. Nous nous réjouissons car la Pâque est désormais proche et, d'ici peu, nous célébrerons notre libération du mal et du péché, grâce à la vie nouvelle que nous a apportée le Christ mort et ressuscité.

Sur ce chemin vers la Pâque, la liturgie nous exhorte à reparcourir, avec ceux qui se préparent à recevoir le Baptême, l'itinéraire catéchuménal. Dimanche dernier, nous avons médité sur le don de l'eau vive de l'Esprit (cf.
Jn 4,5-42); aujourd'hui, nous nous arrêtons tous ensemble avec l'aveugle-né aux alentours de la piscine de Siloé, pour accueillir le Christ lumière du monde (cf. Jn 9,1-41).

«L'aveugle s'en alla donc, il se lava et revint en voyant clair» (Jn 9,7). Comme lui, nous devons nous laisser illuminer par le Christ, renouveler notre foi dans le Messie qui souffre et se révèle comme la lumière de notre existence: «Je suis la lumière du monde. Qui me suit [...] aura la lumière de la vie» (Chant lors de la lecture de l'Evangile; cf. Jn Jn 8,12).

L'eau et la lumière sont des éléments essentiels à la vie. C'est précisément pour cette raison qu'ils sont élevés par Jésus au rang des signes révélant le grand mystère de la participation de l'homme à la vie divine.

2. Très chers frères et soeurs de la paroisse «San Mattia Apostolo», je suis heureux de me trouver parmi vous en ce dimanche «Laetare». Mon salut affectueux s'adresse au Cardinal-Vicaire, à l'Evêque auxiliaire du secteur, à votre curé, Mgr Vincenzo Josia, aux prêtres ses collaborateurs et à vous tous, qui vivez, priez et témoignez l'Evangile dans ce quartier. Je voudrais aujourd'hui rappeler en particulier le souvenir du premier bien-aimé curé de cette communauté, Mgr Desiderio Pirovano, que, après une longue et douloureuse maladie, affrontée avec une foi et une dignité exemplaires, le Seigneur a rappelé à lui il y a presque un an.

Je sais que votre paroisse, âgée désormais de trente-cinq ans, est caractérisée par une participation importante des fidèles à la vie sacramentelle et ecclésiale. Je m'en réjouis, et je rends grâce avec vous au Seigneur pour cette richesse spirituelle et communautaire, qui doit vous inciter à vous engager encore davantage dans une action missionnaire adressée à ceux qui ne partagent pas encore votre même expérience spirituelle. La Mission dans la ville que, si Dieu le veut, nous conclurons ensemble le 22 mai prochain, lors de la solennelle veillée de Pentecôte sur la Place Saint-Pierre, constitue à ce propos une aide appréciable. Il faut que l'engagement missionnaire se poursuive également par la suite, à travers des initiatives appropriées. Il est même nécessaire qu'il concerne toujours plus en profondeur les communautés paroissiales et tous les diocèses, en faisant en sorte que tous les baptisés soient prêts à répondre avec courage aux défis humains et spirituels du moment présent. Dans ce contexte, il est important d'apprendre à valoriser les prédispositions et les ouvertures à l'Evangile qui sont présentes dans la société, sans s'arrêter aux apparences, mais en allant au coeur des situations. C'est ce que rappelle la première Lecture, à travers la figure et la mission du prophète Samuel: «L'homme regarde à l'apparence, mais Yahvé regarde au coeur» (1S 16,7). En chaque personne que l'on rencontre, même chez celui qui professe ouvertement ne pas être intéressé aux réalités de l'esprit, le besoin de Dieu est vivant: c'est la tâche des croyants d'annoncer et de témoigner la vérité libératrice de l'Evangile, en offrant à tous la lumière du Christ.

3. Très chers paroissiens de «San Mattia Apostolo»! Je me réjouis avec vous pour l'organisation efficace de votre communauté. Je me réfère, en particulier, aux nombreuses initiatives destinées aux enfants et aux jeunes, réalisées à travers les itinéraires catéchétiques et les propositions de l'Action catholique diocésaine. Continuez à consacrer généreusement votre temps et votre énergie aux enfants, aux adolescents et aux jeunes qui sont l'espérance de l'Eglise du nouveau millénaire. Orientez tout le travail de formation pour qu'ils connaissent toujours mieux Jésus, unique Sauveur du monde, pour leur faire connaître l'expérience de la miséricorde divine et pour traduire ce qu'ils ont appris, à travers la catéchèse et l'expé- rience communautaire de prière, dans un puissant témoignage de vie. Que la rencontre du jeudi 25 mars prochain dans la Salle Paul VI, en préparation à la XIV e Journée mondiale de la Jeunesse, constitue une étape significative de cet itinéraire d'approfondissement religieux. Chers jeunes garçons et jeunes filles de cette paroisse, venez nombreux et préparez votre esprit pour que cette manifestation, devenue désormais un rendez-vous du Pape avec les jeunes du diocèse, soit pour tous une authentique expérience de foi.

N'est-il pas vrai qu'aujourd'hui, plus que jamais, les jeunes générations possèdent un très vif désir de vérité et qu'ils sont toujours plus las de suivre de vaines illusions? Il est indispensable de leur proposer l'Evangile avec force et avec amour et de les aider à conjuguer la foi avec la vie, pour résister aux multiples tentations du monde moderne. Voilà pourquoi, comme l'aveugle-né, dont parle le passage évangélique d'aujourd'hui, il est indispendable de rencontrer personnellement Jésus.

4. En entrant ce matin dans votre église suggestive, j'ai remarqué que sa structure architectonique a également été prévue de façon à favoriser la concentration de l'attention des fidèles sur le lieu où est célébré le Mystère eucharistique. L'Eucharistie, sommet et source de l'existence chrétienne, est Jésus présent parmi nous, qui se fait nourriture et boisson pour notre salut. Une communauté véritable, une Eglise authentique, ne pourra être telle que si elle apprend à se développer à l'école de l'Eucharistie et si elle se nourrit à la table de la Parole et du Pain de vie éternelle. Il faut que nous apprenions tous à nous laisser modeler par le Mystère eucharistique. A ce propos, la pensée se tourne naturellement vers le Congrès eucharistique international, qui aura lieu à Rome du 18 au 25 juin de l'An 2000.

L'Eucharistie, Mystère suprême d'amour, rappelle également l'engagement à la solidarité et à la proximité effective avec ceux qui sont dans le besoin. Je désire vous encourager à faire toujours plus dans ce secteur important, de façon à être des témoins crédibles de l'amour providentiel de Dieu envers chaque créature humaine. Parmi vous ne manquent pas les personnes et les familles qui ont besoin de soutien; les pauvres qui vivent près de la paroisse ne manquent pas non plus. Accueillir les frères en difficulté, leur ouvrir grand notre coeur aide à développer ce climat de fraternité et d'amitié dont le monde a besoin. Ce n'est qu'ainsi que nous serons d'authentiques apôtres de Jésus, qui nous a laissé comme règle de vie le commandement de l'amour; ce n'est qu'ainsi que nous serons des enfants de la lumière, c'est-à-dire de la Vérité et de l'Amour.

644 5. «Conduisez-vous en enfant de lumière» (Ep 5,8).

Les paroles de l'Apôtre Paul, dans la seconde Lecture, nous incitent à parcourir ce chemin de conversion et de renouveau spirituel. En vertu du Baptême, les chrétiens sont «illuminés»; ils ont déjà reçu la lumière du Christ. Ils sont donc appelés à conformer leur existence au don de Dieu: être des enfants de la lumière! Très chers frères et soeurs, que le Seigneur vous ouvre les yeux de la foi comme il l'a fait avec l'aveugle-né, afin que vous appreniez à reconnaître son visage parmi ceux de vos frères, en particulier des plus indigents.

Que Marie, qui a offert le Christ au monde entier, nous aide nous aussi à l'accueillir dans nos familles, dans nos communautés et dans tous les milieux de vie et de travail de notre Ville.
Amen!

HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II


Dimanche des Rameaux 28 mars 1999,
XIVème Journée mondiale de la Jeunesse
1. «Il [le Christ] s'humilia plus encore, obéissant jusqu'à la mort, et à la mort sur une croix!» (Ph 2,8).

La célébration de la Semaine Sainte commence par l'«hosanna!» de ce Dimanche des Rameaux et atteint son point culminant dans le «crucifige!» du Vendredi Saint. Mais ce n'est pas un contresens; il s'agit plutôt du coeur du mystère que la liturgie désire proclamer: Jésus s'est volontairement livré à sa passion, il n'a pas été écrasé par des forces plus puissantes que Lui (cf. Jn 10,18). C'est Lui-même qui, scrutant la volonté du Père, a compris que son heure était venue et l'a accueillie avec la libre obéissance du Fils et avec un amour infini pour les hommes.

Jésus a porté nos péchés sur la croix et nos péchés ont porté Jésus sur la croix: Il a été écrasé par notre iniquité (cf. Is Is 53,5). Natân répondit à David, qui recherchait le responsable du délit que lui avait rapporté le prophète: «Cet homme, c'est toi!» (2S 12,7). La Parole de Dieu, à qui nous demandons qui est le responsable de la mort de Jésus, nous répond la même chose: «Cet homme, c'est toi!». En effet, le procès et la passion de Jésus se poursuivent dans le monde d'aujourd'hui et sont renouvelés par chaque personne qui, s'abandonnant au péché, ne fait que répéter l'exclamation: «Pas lui, mais Barabbas! Crucifige!»

2. En regardant Jésus au cours de sa passion, nous voyons comme dans un miroir les souffrances de l'humanité ainsi que nos histoires personnelles. Le Christ, bien que sans péché, a pris sur lui ce que l'homme ne pouvait porter: l'injustice, le mal, le péché, la haine, la souffrance et, pour finir, la mort. Dans le Christ, le Fils de l'homme humilié et qui souffre, Dieu aime tous les hommes, pardonne à tous et confère sa signification ultime à l'existence humaine.

Nous sommes ici ce matin pour recueillir ce message du Père qui nous aime. Nous pouvons nous demander: que nous veut-Il? Il veut que, en regardant Jésus, nous acceptions de Le suivre dans sa passion pour partager avec Lui la résurrection. En ce moment, les paroles que Jésus adressa à ses disciples reviennent à l'esprit: «La coupe que je vais boire, vous la boi- rez, et le baptême dont je vais être baptisé, vous en serez baptisés» (Mc 10,39); «Si quelqu'un veut venir à ma suite..., qu'il se charge de sa croix, et qu'il me suive. Qui veut en effet sau- ver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi la trouvera» (Mt 16,24-25).

645 L'«hosanna» et le «crucifige» deviennent ainsi la mesure d'une façon de concevoir la vie, la foi et le témoignage chrétien: on ne doit pas se décourager face aux défaites, ni se vanter des victoires car, comme pour le Christ, l'unique victoire est la fidélité à la mission reçue du Père. «Aussi Dieu l'a-t-il exalté et lui a-t-il donné le Nom qui est au dessus de tout nom» (Ph 2,9).

3. La première partie de la célébration d'aujourd'hui nous a fait revivre l'entrée triomphale de Jésus à Jérusalem. Qui, en ce jour fatidique, eut l'intuition que Jésus de Nazareth, le Maître qui parlait avec autorité (cf. Lc 4,32) était le Messie, le fils de David, le Sauveur attendu et promis? Ce fut le peuple, et les plus enthousiastes et actifs dans le peuple furent les jeunes, qui devinrent ainsi, d'une certaine façon, les «hérauts» du Messie. Ils comprirent que c'était l'heure de Dieu, l'heure espérée et bénie, attendue pendant des siècles par Israël et, en agitant des rameaux d'oliviers et de palmiers, ils décrétèrent le triomphe de Jésus.

En continuité d'esprit avec cet événement, nous célébrons depuis désormais quatorze ans la Journée mondiale de la Jeunesse, au cours de laquelle les jeunes, rassemblés autour de leurs pasteurs, professent et proclament avec joie leur foi dans le Christ, s'interrogent sur leurs aspirations les plus profondes, font l'expérience de la communion ecclésiale, confirment et renouvellent leur propre engagement à la tâche pressante de la nouvelle évangélisation.

Ils cherchent le Seigneur dans le coeur du Mystère pascal. Le mystère de la Croix glorieuse devient pour eux le grand don et, dans le même temps, le signe de la maturité de la foi. Avec sa Croix, symbole universel de l'Amour, le Christ guide les jeunes du monde dans la grande «assemblée» du Royaume de Dieu, qui transforme les coeurs et les sociétés.

Comment ne pas louer Dieu, qui révèle aux jeunes les secrets de son Royaume (cf. Mt Mt 11,25), pour tous les fruits de bien et de témoignage chrétien que cette heureuse initiative a suscités?

La Journée mondiale de la Jeunesse d'aujourd'hui est la dernière avant le grand rendez-vous jubilaire, la dernière de ce siècle et de ce millénaire: elle revêt donc une importance singulière. Puisse-t-elle, grâce à la contribution de tous, constituer une profonde expérience de foi et de communion ecclésiale.

4. Les jeunes de Jérusalem acclamaient: «Hosanna au Fils de David!» (Mt 21,9). Chers jeunes, mes amis, voulez-vous vous aussi, comme les jeunes de votre âge de ce jour lointain, reconnaître Jésus comme le Messie, le Sauveur, le Maître, le Guide, l'Ami de votre vie? Rappelez-vous: Lui seul connaît en profondeur ce qui se trouve dans chaque être humain (cf. Jn 2,25); Lui seul lui enseigne à s'ouvrir au mystère et à appeler Dieu avec le nom du Père, «Abbà»; Lui seul rend capable d'un amour gratuit pour son prochain, accueilli et reconnu comme «frère» et «soeur».

Chers jeunes! Allez avec joie à la rencontre du Christ, qui rend votre jeunesse joyeuse. Cherchez-Le et rencontrez- Le à travers l'adhésion à sa parole et à sa mystérieuse présence ecclésiale et sacramentelle. Vivez avec Lui dans la fidélité à l'Evangile, exigeant, il est vrai, jusqu'au sacrifice, mais dans le même temps unique source d'espérance et de véritable bonheur. Aimez-Le dans le visage du frère qui a besoin de justice, d'aide, d'amitié et d'amour.

A la veille du nouveau millénaire, votre heure est venue. Le monde contemporain vous ouvre de nouveaux sentiers et vous appelle à être des messagers de foi et de joie, comme l'expriment les rameaux d'oliviers et de palmiers que vous tenez aujourd'hui dans les mains, symbole d'un nouveau printemps de grâce, de beauté et de paix. Le Seigneur Jésus est avec vous et vous accompagne!

5. Avec la Semaine Sainte, l'Eglise entre avec impatience chaque année dans le Mystère pascal, en commémorant la mort et la résurrection du Seigneur.

C'est précisément en vertu du Mystère pascal, dont elle naît, qu'elle peut proclamer face au monde, à travers les paroles et les oeuvres de ses enfants: «Jésus-Christ est le Seigneur, à la gloire de Dieu le Père» (Ph 2,11).

646 Oui! Jésus-Christ est le Seigneur! Il est le Seigneur du temps et de l'histoire; le Rédempteur et le Sauveur de l'homme. Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur! Hosanna!

Amen!

MESSE CHRISMALE EN LA BASILIQUE VATICANE


HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II


Jeudi saint 1er avril 1999
1. «Il nous aime et nous a lavés de nos péchés par son sang, il a fait de nous une royauté de prêtres, pour son Dieu et Père: à lui donc la gloire et la puissance pour les siècles des siècles» (Ap 1,5-6).


Le Christ, le Prêtre de l'Alliance nouvelle et éternelle, est entré au moyen de son sang dans le sanctuaire céleste, après avoir accompli une fois pour toute la rémission des péchés de l'humanité tout entière.

Au seuil du Triduum sacrum, les prêtres de toutes les Eglises particulières du monde se rencontrent avec leurs Ordinaires pour la solennelle Messe Chrismale, au cours de laquelle ils renouvellent les promesses sacerdotales. Le pres- byterium de l'Eglise qui est à Rome se rassemble lui aussi autour de son Evêque, avant le grand jour, au cours duquel la liturgie rappelle comment le Christ devint, à travers son sang, le prêtre unique et éternel.

Très chers frères dans le sacerdoce, j'adresse à chacun de vous un salut cordial, en formant une pensée particulière pour le Cardinal-Vicaire et les Cardinaux concélébrants, les Evêques auxiliaires et les autres prélats présents. C'est pour moi une grande joie de me retrouver avec vous en ce jour qui, pour nous, ministres ordonnés, a le parfum de l'onction sainte avec laquelle nous avons été consacrés à l'image de Celui qui est le Consacré du Père.

«Voici, il vient avec les nuées; chacun le verra, même ceux qui l'ont transpercé» (Ap 1,7). Demain, la liturgie du Vendredi saint réalisera pour nous ce dont parle l'Auteur de l'Apocalypse, dans les paroles qui viennent d'être proclamées. En ce jour très saint de la passion et de la mort du Christ, tous les autels seront vierges et enveloppés par un grand silence; aucune messe ne sera célébrée au moment où nous ferons mémoire de l'unique sacrifice, offert de façon sanglante par le Christ prêtre sur l'autel de la Croix.

2. «Il a fait de nous une Royauté de Prêtres» (Ap 1,6). Le Christ n'a pas seulement accompli personnellement le sacrifice rédempteur, qui enlève les péchés du monde et rend une louange parfaite à la gloire du Père. Il a également institué le Sacerdoce comme sacrement de la Nouvelle Alliance, afin que l'unique sacrifice qu'Il a offert au Père de façon sanglante, puisse se renouveler sans cesse dans l'Eglise de façon non sanglante, sous les espèces du pain et du vin. Le Jeudi saint est, précisément, le jour où nous rappelons de façon particulière le sacerdoce que le Christ institua lors de la Dernière Cène, le liant indissolublement au sacrifice eucharistique.

«Il a fait de nous... des Prêtres». Il nous a fait participer à son unique sacerdoce, pour que sur tous les autels du monde et à toutes les époques de l'histoire puisse être représenté le sacrifice unique et sanglant du Calvaire. Le Jeudi saint est la grande fête des prêtres. Ce soir nous renouvelerons le mémorial de l'institution du sacrifice eucharistique, selon le rythme des événements pascals, tels que nous le transmettent les Evangiles. En revanche, la solennelle liturgie de ce matin est une action de grâce particulière rendue à Dieu par nous tous qui, en vertu d'un don qui est également un mystère, participons intimement au sacerdoce du Christ. Chacun de nous fait siennes les paroles du Psaume: «Misericordias Domini in aeternum cantabo», «L'amour de Yahvé à jamais je le chante» (Ps 88,2).

3. Nous voulons renouveler en nous la conscience de ce don. Dans un certain sens, nous voulons le recevoir à nouveau pour l'orienter vers un service supplémentaire. En effet, notre sacerdoce sacramentel est un ministère, un service singulier et spécifique. Nous servons le Christ afin que son sacerdoce unique et sans égal puisse toujours vivre et agir dans l'Eglise pour le bien des fidèles. Nous servons le peuple chrétien, nos frères et nos soeurs, qui, à travers notre ministère sacramentel, participent toujours plus profondément de la rédemption du Christ.

647 Aujourd'hui, avec une intensité particulière, chacun de nous peut répéter avec le Christ les paroles du prophète Isaïe proclamées dans l'Evangile: «L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a consacré par l'onction, pour porter la bonne nouvelle aux pauvres; Il m'a envoyé annoncer aux captifs la délivrance et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer en liberté les opprimés, proclamer une année de grâce du Seigneur» (Lc 4,18-19).

4. «Une année de grâce du Seigneur»! Très chers amis, nous nous trouvons désormais au seuil d'une extraordinaire année de grâce; le grand Jubilé au cours duquel nous célébrerons le bimillénaire de l'Incarnation. Ce Jeudi saint est le dernier avant l'An 2000.

Je suis heureux d'offrir aujourd'hui en esprit aux prêtres du monde entier la Lettre que je leur ai adressée en cette circonstance. En l'année consacrée au Père, la paternité de chaque prêtre, reflet de celle du Père céleste, doit devenir encore plus évidente, afin que le peuple chrétien et tous les hommes de chaque race et culture fassent l'expérience de l'amour que Dieu a pour eux et le suivent fidèlement. Que le prochain événement jubilaire soit pour tous une occasion propice afin de ressentir l'amour miséricordieux de Dieu, puissante énergie spirituelle qui renouvelle le coeur de l'homme.

Au cours de cette solennelle célébration eucharistique, nous demandons au Seigneur que la grâce du grand Jubilé mûrisse pleinement en chacun des membres du Corps du Christ qui est l'Eglise, et de façon particulière chez les prêtres.

L'Année sainte désormais proche nous appelle tous, ministres ordonnés, à devenir entièrement disponibles au don de miséricorde que Dieu le Père a voulu accorder en abondance à chaque être humain. Le Père cherche de tels prêtres (cf. Jn 4,23)! Puisse-t-il les trouver, emplis de sa sainte onction, pour diffuser parmi les pauvres l'heureux message du salut.

Amen!



MESSE DE LA CÈNE DU SEIGNEUR


HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II


Jeudi saint, 1er avril 1999
1. «Adoro te devote, latens Deitas, Quae sub his figuris vere latitas».


«Je t'adore avec dévotion Dieu caché, qui sous ces signes se cache toujours».

Nous revivons ce soir la Dernière Cène, lorsque le divin Sauveur, la nuit où il fut trahi, nous laissa le Sacrifice eucharistique de son Corps et de son Sang, mémorial de sa mort et de sa résurrection, sacrement de piété, signe d'unité et lien de charité (cf. Sacrosanctum Concilium SC 47).

Les lectures de cette célébration parlent toutes de rites et de gestes destinés à imprimer dans l'histoire le dessein salvifique de Dieu. Le Livre de l'Exode transmet le document sacerdotal qui établit les prescriptions pour la célébration de la Pâque juive. L'Apôtre Paul, dans la Première Lettre aux Corinthiens, transmet à l'Eglise le plus ancien témoignage à propos de la nouvelle Cène pascale chrétienne: il s'agit du rite de la nouvelle et éternelle alliance, institué par Jésus au Cénacle avant la passion. Enfin, l'Evangéliste Jean, illuminé par l'Esprit Saint, résume le sens profond du sacrifice du Christ dans le geste du «lavement des pieds».

648 C'est la Pâque du Seigneur, qui plonge ses racines dans l'histoire du peuple d'Israël et trouve son accomplissement en Jésus-Christ, Agneau de Dieu immolé pour notre salut.

2. L'Eglise vit de l'Eucharistie. Grâce au ministère des apôtres et de leurs successeurs, tout au long d'une chaîne ininterrompue qui part du Cénacle, les paroles et les gestes du Christ se renouvellent en suivant le chemin de l'Eglise, pour offrir le Pain de la vie aux hom- mes de chaque génération: «Ceci est mon corps, qui est pour vous; faites ceci en mémoire de moi... Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang; chaque fois que vous en boirez, faites-le en mémoire de moi» (
1Co 11,24-25).

L'Eucharistie, en tant que renouvellement sacramentel du sacrifice de la Croix, constitue le sommet de l'oeuvre rédemptrice: elle proclame et actualise ce Mystère, qui est source de vie pour chaque homme; en effet, chaque fois que nous mangeons de ce pain et que nous buvons à cette coupe, nous annonçons la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne (cf. 1Co 11,26).

Après la consécration, le prêtre proclame: «Mysterium fidei!», et l'assemblée répond: «Nous annonçons ta mort, Seigneur, nous proclamons ta résurrection, nous attendons ta venue». Oui, aujourd'hui il nous est donné de comprendre de façon particulière que le «mystère de la foi» est vraiment grand et la simplicité des symboles eucharistiques - le pain et le vin, la table, le repas fraternel - ne fait qu'en exalter davantage la profondeur.

3. «O memoriale mortis Domini!
Panis vivus, vitam praestans homini!».

«O mémorial de la mort du Seigneur!
Pain vivant, qui donne la vie à l'homme!».

La mort du Fils de Dieu devient pour nous source de vie. Voilà le mystère pascal, voilà la nouvelle création! L'Eglise confesse cette foi avec les paroles de Thomas d'Aquin, en implorant:

«Pie Pellicane, Iesu Domine,
Me immundum munda tuo sanguine,
649 Cuius una stilla salvum facere totum
mundum quit ab omni scelere».

«Jésus, pieux Pélican, mon Seigneur,
avec ton sang lave mon péché:
une seule goutte peut suffire
à purifier le monde entier».

Puissance vivifiante de la mort du Christ! Force purificatrice du Sang du Christ, qui obtient la rémission des péchés pour les hommes de tout les temps et en chaque lieu. Caractère sublime du Sacrifice rédempteur, dans lequel toutes les victimes de la loi antique trouvent l'accomplissement!

4. Ce mystère d'amour, «incompréhensible» pour l'être humain, s'offre tout entier dans le sacrement de l'Eucharistie. Le peuple chrétien est invité à s'arrêter ce soir devant lui, jusqu'à tard dans la nuit, en une adoration silencieuse:

«Iesu, quem velatum nunc aspicio,
Oro, fiat illud quod tam sitio:
Ut, te revelata cernens facie,
650 Visu sim beatus tuae gloriae».

«Jésus, que je contemple
à présent ici voilé,
écoute mon désir ardent:
puisse venir le jour ou je verrai
ton visage dans la gloire
des bienheureux. Amen.»

Telle est la foi de l'Eglise. Telle est la foi de chacun de nous face au sublime mystère eucharistique. Oui, que les paroles cessent et que l'adoration demeure. En silence.

«Ave, verum Corpus,
natum de Maria Virgine...

«Ave, vrai Corps,
651 né de la Vierge Marie,
réellement soumis à la passion,
immolé sur la croix pour l'homme...
O doux Jésus! O pieux Jésus!
O Jésus, fils de Marie!»
Amen!



POUR LA VEILLÉE PASCALE


Samedi saint, 3 avril 1999
1. «La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d'angle» (Ps 117[118], 22).


Cette nuit, la liturgie nous parle avec l'abondance et la richesse de la Parole de Dieu. Cette Veillée constitue non seulement le centre de l'année liturgique, mais en quelque sorte sa matrice: à partir d'elle, en effet, se développe toute la vie sacramentelle. On pourrait dire que la table autour de laquelle l'Eglise rassemble en cette nuit ses enfants est largement fournie; elle rassemble, d'une façon particulière, ceux qui doivent recevoir le baptême.

Ma pensée se tourne d'abord vers vous, très chers catéchumènes, qui allez renaître de l'eau et de l'Esprit Saint (cf. Jn 3,5). Avec une grande joie je vous salue, et je salue en même temps les pays d'où vous provenez: Albanie, Cap-Vert, Chine, France, Maroc et Hongrie.

Par le baptême, vous deviendrez membres du Corps du Christ, participants à plein titre de son mystère de communion. Puisse votre vie demeurer constamment immergée dans ce mystère pascal, afin que vous soyez toujours d'authentiques témoins de l'amour de Dieu.

652 2. Tous les baptisés, et non seulement vous, chers catéchumènes, sont appelés en cette nuit à faire dans la foi une profonde expérience de ce que nous venons d'entendre dans l'Epître: «Nous tous, qui avons été baptisés en Jésus Christ, c'est dans sa mort que nous avons été baptisés. Si... nous avons été mis au tombeau avec lui, c'est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, de même que le Christ, par la toute-puissance du Père, est ressuscité d'entre les morts» (Rm 6,3-4).

Etre chrétien signifie participer personnellement à la mort et à la résurrec- tion du Christ. Cette participation est réalisée de manière sacramentelle par le baptême, à partir duquel, comme sur un fondement solide, se construit l'existence chrétienne de chacun de nous. Et c'est pour cela que le psaume responsorial nous a exhortés à rendre grâce: «Rendez grâce au Seigneur: Il est bon! Eternel est son amour!... Le bras du Seigneur est fort ... Non, je ne mourrai pas, je vivrai pour annoncer les actions du Seigneur» (Ps 117[118], 1-2.16-17). En cette sainte nuit, l'Eglise reprend ces paroles de remerciement, tandis qu'elle confesse la vérité sur le Christ qui «est mort, a été enseveli et est ressuscité le troisième jour» (cf. Credo).

3. «Ce doit être pour eux, de génération en génération, une nuit de veille en l'honneur du Seigneur» (Ex 12,42).

Ces paroles du livre de l'Exode concluent le récit du départ des Hébreux d'Egypte. Elles retentissent avec une singulière éloquence durant la Veillée pascale, et dans ce contexte elles acquièrent la plénitude de leur signification. En cette année consacrée à Dieu le Père, comment ne pas penser que cette nuit, la nuit de Pâques, est la grande «nuit de veille» du Père? Les dimensions de cette «veille» de Dieu comprennent tout le Triduum pascal. D'une façon particulière, cependant, le Père «veille» durant le Samedi saint tandis que son Fils gît mort dans le tombeau. Le mystère de la victoire du Christ sur le péché du monde est gardé justement dans le fait que le Père veille. Il «veille» sur toute la mission terrestre de son Fils. Sa compassion infinie atteint son sommet à l'heure de la passion et de la mort: l'heure pendant laquelle son Fils est abandonné, pour que ses enfants soient sauvés; son Fils est méprisé et rejeté pour que ses enfants soient retrouvés; son Fils meurt, pour que ses enfants puissent revenir à la vie.

La veille du Père explique la résurrection du Fils: même à l'heure de la mort, la relation d'amour en Dieu ne disparaît pas, l'Esprit Saint ne disparaît pas, Lui qui, répandu par Jésus mourant sur la croix, remplit de lumière les ténèbres du mal et ressuscite le Christ, le constituant Fils de Dieu en puissance et en gloire (cf. Rm 1,4).

4. «La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d'angle» (Ps 117[118], 22). Dans la lumière de la résurrection du Christ, combien apparaît en plénitude cette vérité que chante le psalmiste! Condamné à une mort ignominieuse, le Fils de l'homme, crucifié et ressuscité, est devenu la pierre d'angle pour la vie de l'Eglise et de chaque chrétien.

«C'est là l'oeuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux» (Ps 117[118], 23). Cela est advenu en cette nuit sainte. Les femmes ont pu le constater, elles qui «le premier jour de la semaine... alors qu'il faisait encore sombre» (Jn 20,1), se rendirent au tombeau pour oindre le corps du Seigneur et trouvèrent le tombeau vide. Elles entendirent la voix de l'ange: «Soyez sans crainte! Vous cherchez Jésus le crucifié. Il n'est pas ici. Il est ressuscité» (cf. Mt Mt 28,1-5).

Ainsi s'accomplirent les paroles prophétiques du psalmiste: «La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d'angle». Telle est notre foi. Telle est la foi de l'Eglise, et nous nous glorifions de la professer au seuil du troisième millénaire, parce que la Pâque du Christ est l'espérance du monde, hier, aujourd'hui et dans les siècles. Amen!

CANONISATION DES BIENHEUREUX MARCELLIN CHAMPAGNAT,

GIOVANNI CALABRIA ET AGOSTINA LIVIA PIETRANTONI

HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II

Dimanche 18 avril 1999
1. «Il prit le pain, dit la bénédic- tion, puis le rompit et le leur donna. Leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent...» (Lc 24,30-31).

Il y a peu, nous avons à nouveau écouté ces paroles de l'Evangile de Luc: elles racontent la rencontre de Jésus avec deux disciples en chemin vers le village d'Emmaüs, le jour même de la résurrection. Cette rencontre inattendue, fait naître la joie dans le coeur des deux voyageurs inconsolables, et elle rallume l'espérance qui est en eux. L'Evangile rapporte que, lorsqu'ils le reconnurent, ils partirent «à cette heure même, [...] et s'en retournèrent à Jérusalem» (Lc 24,33). Ils ressentaient le besoin d'informer les Apôtres de «ce qui s'était passé en chemin, et comment ils l'avaient reconnu à la fraction du pain» (Lc 24,35).

653 Le désir de rendre témoignage de Jésus naît dans le coeur des croyants de la rencontre personnelle avec Lui. C'est ce qui a eu lieu pour les trois nouveaux saints, que j'ai aujourd'hui la joie d'élever à la gloire des autels: Marcellin Benoît Champagnat, Giovanni Calabria et Agostina Livia Pietrantoni. Ils ont ouvert leurs yeux face aux signes de la présence du Christ: ils l'ont adoré et écouté dans l'Eucharistie, ils l'ont aimé chez leurs frères les plus indigents, ils ont reconnu les traces de son dessein de salut dans les événements de l'existence quotidienne.

Ils ont écouté les paroles de Jésus et ont cultivé sa compagnie, sentant leur coeur qui brûlait dans leur poitrine. Quelle fascination indescriptible exerce la mystérieuse présence du Seigneur chez ceux qui l'accueillent! C'est l'expérience des saints. C'est la même expérience spirituelle que nous pouvons vivre, nous qui nous acheminons sur les routes du monde vers la patrie céleste. Le Ressuscité vient également à notre rencontre avec sa Parole, nous révélant son amour infini dans le Sacrement du Pain eucharistique, rompu pour le salut de l'humanité tout entière. Puissent les yeux de notre esprit s'ouvrir à sa vérité et à son amour, comme cela s'est produit pour Marcellin Benoît Champagnat, pour dom Giovanni Calabria et pour Soeur Agostina Livia Pietrantoni.

[en français]

2. «Notre coeur n'était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, quand il nous expliquait les Ecritures?». Ce désir brûlant de Dieu qui habitait les disciples d'Emmaüs se manifesta vivement chez Marcellin Champagnat, qui fut un prêtre saisi par l'amour de Jésus et de Marie. Grâce à sa foi inébranlable, il est resté fidèle au Christ, même dans les difficultés, au milieu d'un monde parfois dénué du sens de Dieu. Nous sommes appelés, nous aussi, à puiser notre force dans la contemplation du Christ ressuscité, en nous mettant à l'école de la Vierge Marie.

Saint Marcellin annonça l'Evangile avec un coeur tout brûlant. Il fut sensible aux besoins spirituels et éducatifs de son époque, spécialement à l'ignorance religieuse et aux situations d'abandon que connaissait particulièrement la jeunesse. Son sens pastoral est exemplaire pour les prêtres: appelés à proclamer la Bonne Nouvelle, ils doivent être également pour les jeunes, qui cherchent un sens à leur existence, de véritables éducateurs, accompagnant chacun d'entre eux sur la route et leur expliquant les Ecritures. Le Père Champagnat est aussi un modèle pour les parents et les éducateurs, les aidant à porter un regard plein d'espérance sur les jeunes, à les aimer d'un amour total, qui favorise une véritable formation humaine, morale et spirituelle.

Marcellin Champagnat nous invite aussi à être des missionnaires, pour faire connaître et aimer Jésus-Christ, comme le firent les frères maristes jusqu'en Asie et en Océanie. Avec Marie pour guide et pour Mère, le chrétien est missionnaire et serviteur des hommes. Demandons au Seigneur d'avoir un coeur aussi brûlant que Marcellin Champagnat, pour le reconnaître et pour être ses témoins.

[en italien]

3. «Dieu l'a ressuscité, ce Jésus; nous en sommes tous témoins» (
Ac 2,32).

«Nous en sommes tous témoins»: c'est Pierre qui parle, au nom des Apôtres. Dans sa voix nous reconnaissons celle d'innombrables autres disciples, qui au cours des siècles, ont fait de leur vie un témoignage du Seigneur mort et ressuscité. A ce choeur s'unissent les saints canonisés aujourd'hui. Dom Giovanni Calabria, témoin exemplaire de la Résurrection s'y unit. En lui resplendissent la foi ardente, la charité authentique, l'esprit de sacrifice, l'amour de la pauvreté, le zèle pour les âmes, la fidélité à l'Eglise.

En l'année du Père, qui nous introduit dans le grand Jubilé de l'An 2000, nous sommes invités à accorder la plus grande importance à la vertu de la charité. L'existence de Giovanni Calabria a tout entière été un Evangile vivant, débordant de charité: charité envers Dieu et envers les frères, en particulier envers les plus pauvres. La source de son amour pour le prochain était la confiance illimitée et l'abandon filial qu'il nourrissait pour le Père céleste. Il aimait répéter à ses collaborateurs les paroles évangéliques suivantes: «Cherchez d'abord son Royaume [de Dieu] et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît» (Mt 6,33).

4. L'idéal évangélique de la charité envers le prochain, en particulier envers les petits, les malades, les exclus, a également conduit Agostina Livia Pietrantoni aux sommets de la sainteté. Formée à l'école de sainte Jeanne Antida Thouret, soeur Agostina comprit que l'amour pour Jésus requiert le généreux service envers les frères. C'est en effet sur leur visage, en particulier sur celui des plus indigents, que brille le visage du Christ. «Dieu seul» fut la «boussole» qui orienta tous ses choix de vie. «Tu aimeras», le premier commandement fondamental placé au début de la «Règle de vie des Soeurs de la Charité», fut la source inspiratrice des gestes de solidarité de la nouvelle sainte, l'impulsion intérieure qui la soutint dans le don de soi aux autres.

654 Dans la première Lettre de Pierre, que nous venons d'écouter, nous lisons que la rédemption a eu lieu «par rien de corruptible, argent ou or», mais par «un sang précieux, comme d'un agneau sans reproche et sans tache» (1P 1,19). La conscience de la valeur infinie du Sang du Christ, répandu pour nous, incita sainte Agostina Livia Pietrantoni à répondre à l'amour de Dieu par un amour tout aussi généreux et inconditionnel, manifesté dans l'humble et fidèle service aux «chers pauvres», comme elle avait l'habitude de le répéter.

Disposée à n'importe quel sacrifice, témoin héroïque de la charité, elle paya de son sang le prix de la fidélité à l'Amour. Puissent son exemple et son intercession obtenir pour l'Institut des Soeurs de la Charité, qui célèbre cette année le deuxième centenaire de sa fondation, un élan apostolique renouvelé.

5. «Reste avec nous, car le soir tombe et le jour déjà touche à son terme» (Lc 24,29). Les deux voyageurs fatigués supplièrent Jésus de s'arrêter dans leur maison pour partager leur repas.

Reste avec nous, Seigneur ressuscité! Telle est notre aspiration quotidienne. Si tu restes avec nous, notre coeur est en paix.

Accompagne-nous, comme tu l'as fait pour les disciples d'Emmaüs, sur notre chemin personnel et ecclésial.

Ouvres-nous les yeux, afin que nous sachions reconnaître les signes de ta présence ineffable.

Rends-nous dociles à l'écoute de ton Esprit. Nourris-nous chaque jour de ton Corps et de ton Sang, nous saurons te reconnaître et nous te servirons à travers nos frères.

Marie, Reine des saints, aide-nous à conserver fermement notre foi et notre espérance en Dieu (cf. 1P 1,21).

Saint Marcellin Benoît Champagnat, saint Giovanni Calabria et sainte Agostina Livia Pietrantoni, priez pour nous!

Homélies St Jean-Paul II 642