Homélies St Jean-Paul II 617

HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II


Vendredi 1er janvier 1999,
Solennité de la Très Sainte Vierge Marie, Mère de Dieu,
Journée mondiale de la Paix



1. Christus heri et hodie,
Principium et Finis,
Alpha et Omega...

«Le Christ est vivant hier et aujourd'hui:
Il est le Principe et la Fin,
Il est l'Alpha et l'Oméga.
618 Le temps et les siècles Lui appartiennent.
A Lui gloire et pouvoir
pour les siècles des siècles»
(Missel Romain, Préparation du cierge pascal).

Chaque année, durant la veillée pascale, l'Eglise renouvelle cette acclamation solennelle au Christ, Seigneur du temps. Le premier de l'An également, nous proclamons cette vérité, lors du passage entre «hier» et «aujourd'hui»: «hier», lorsque nous avons rendu grâce à Dieu à la fin de l'année; «aujourd'hui», alors que nous saluons l'année nouvelle qui commence. Heri et hodie. Nous célébrons le Christ qui, comme le dit l'Ecriture, est «le même hier, aujourd'hui et à jamais» (
He 13,8). Il est le Seigneur de l'histoire, c'est à Lui qu'appartiennent les siècles et les millénaires.

Alors que nous commençons l'année 1999, la dernière année avant le grand Jubilé, le mystère de l'histoire semble être révélé à nos yeux avec une intensité plus profonde. C'est précisément pour cela que l'Eglise a voulu imprimer le signe trinitaire de la présence du Dieu vivant au cours du triennat de préparation immédiate à l'événement jubilaire.

2. Le premier jour de la nouvelle année, qui conclut l'Octave du Noël du Seigneur, est consacré à la Très Sainte Vierge, vénérée comme la Mère de Dieu. L'Evangile nous rappelle qu'Elle «conservait avec soin toutes ces choses, les méditant en son coeur» (Lc 2,19). Ainsi fut-il à Bethléem, au Golgotha au pied de la Croix, et le jour de la Pentecôte, lorsque l'Esprit Saint descendit au Cénacle.

Et il en est ainsi, aujourd'hui également. La Mère de Dieu et des hommes conserve et médite dans son coeur tous les problèmes de l'humanité, grands et difficiles. L'Alma Redemptoris Mater marche avec nous et nous guide, avec une tendresse maternelle, vers l'avenir. Elle aide ainsi l'humanité à franchir tous les «seuils» des années, des siècles, des millénaires, en soutenant son espérance en Celui qui est le Seigneur de l'histoire.

3. Heri et hodie. Hier et aujourd'hui. «Hier» nous invite à la retrospection. Lorsque nous tournons notre regard vers les événements de ce siècle qui touche à son terme, deux guerres mondiales se présentent à nos yeux: cimetières, tombes des victimes, familles détruites, pleurs et désespoir, misère et souffrance. Comment oublier les camps de la mort, comment oublier les fils d'Israël cruellement exterminés, les saints martyrs: Père Maximilien Kolbe, soeur Edith Stein et tant d'autres?

Notre siècle est cependant également le siècle de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, dont on a récemment célébré le cinquantième anniversaire. Précisément en considération de cet anniversaire, j'ai voulu rappeler dans le Message traditionnel pour la Journée mondiale de la Paix célébrée aujourd'hui, que le secret de la Paix véritable réside dans le respect des droits humains. «La reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine... constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde» (Ibid., n. 3).

Le Concile Vatican II, le Concile qui a préparé l'Eglise à entrer dans le troisième millénaire, a affirmé que le monde, théâtre de l'histoire du genre humain, est libéré de l'esclavage du péché grâce au Christ crucifié et ressuscité, et il est «destiné selon le dessein de Dieu à se transformer et à parvenir à son accomplissement» (cf. Gaudium et spes GS 2). Voilà comment les croyants considèrent le monde à notre époque, alors qu'ils avancent progressivement vers le seuil de l'An 2000.

619 4. Le Verbe éternel, se faisant homme, est entré dans le monde et l'a accueilli pour le racheter. Le monde n'est donc pas seulement marqué par le terrible héritage du péché, mais il est avant tout un monde sauvé par le Christ, le Fils de Dieu, crucifié et ressuscité. Jésus est le Rédempteur du monde, le Seigneur de l'histoire. Eius sunt tempora et saecula: les années et les siècles lui appartiennent. C'est pourquoi, nous croyons que, en entrant dans le troisième millénaire avec le Christ, nous collaborerons à la transformation du monde qu'Il a racheté. Mundus creatus, mundus redentus.

Malheureusement, l'humanité cède à l'influence du mal de différentes façons. Toutefois, touchée par la grâce, elle se relève sans cesse et, guidée par la force de la rédemption, elle marche vers le bien. Elle marche vers le Christ, selon le projet de Dieu le Père.

«Jésus-Christ est le Principe et la Fin,
l'Alpha et l'Oméga,
le temps et les siècles Lui appartiennent».

Nous commençons cette nouvelle année en son nom. Que Marie obtienne pour nous d'être ses fidèles disciples, car à travers les paroles et les oeuvres nous Lui rendons gloire et honneur pour les siècles des siècles.

Ipsi gloria et imperium
per universa aeternitatis saecula.
Amen!

ORDINATIONS ÉPISCOPALES

HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II

Mercredi 6 janvier 1999, solennité de l'Epiphanie du Seigneur
1. «La lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l'ont pas saisie» (Jn 1,5).

620 Toute la liturgie parle aujourd'hui de la lumière du Christ, de cette lumière qui s'est allumée pendant la Nuit Sainte. La même lumière qui conduisit les pasteurs à l'étable de Bethléem indique la route, le jour de l'Epiphanie, aux Rois mages venus de l'Orient pour adorer le Roi des Juifs et elle resplendit pour tous les hommes et pour tous les peuples qui aspirent à rencontrer Dieu.

Dans sa recherche spirituelle, l'être humain dispose déjà naturellement d'une lumière qui le guide: c'est la raison, grâce à laquelle il peut s'orienter, même si c'est à tâtons (cf. Ac
Ac 17,27), vers son Créateur. Mais, étant donné qu'il est facile de perdre sa route, Dieu lui-même est venu nous secourir grâce à la lumière de la révélation, qui a atteint sa plénitude dans l'incarnation du Verbe, Parole éternelle de vérité.

L'Epiphanie célèbre l'apparition dans le monde de cette Lumière divine avec laquelle le Fils de Dieu est allé à la rencontre de la faible lumière de la raison humaine. La solennité d'aujourd'hui présente ainsi la relation intime qui existe entre la raison et la foi, les deux ailes dont dispose l'esprit humain pour s'élever vers la contemplation de la vérité, comme je l'ai rappelé dans la récente Encyclique Fides et ratio.

2. Le Christ n'est pas seulement la lumière qui illumine le chemin de l'homme. Il est également devenu chemin pour ses pas incertains vers Dieu, source de la vie. Un jour, il dira aux Apôtres: «Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. Nul ne vient au Père que par moi. Si vous me connaissez vous connaîtrez aussi mon Père; dès à présent vous le connaissez et vous l'avez vu» (Jn 14,6-7). Et, face à l'objection de Philippe, il ajoutera: «Qui m'a vu a vu le Père [...] Je suis dans le Père et le Père est en moi» (Jn 14,9 Jn 14,11). L'épiphanie du Fils est l'épiphanie du Père.

N'est-ce pas là, en définitive, le but de la venue du Christ dans le monde? Il a lui-même déclaré qu'il était venu pour «faire connaître le Père», pour «expliquer» aux hommes qui est Dieu, pour révéler son visage, son «nom» (Jn 17,6). La vie éternelle se trouve dans la rencontre avec le Père (cf. Jn 17,3). Comme cette réflexion est donc opportune, en particulier en l'année consacrée au Père!

L'Eglise poursuit dans les siècles la mission de son Seigneur: son engagement premier est de faire connaître à tous les hommes le visage du Père, en reflétant la lumière du Christ, lumen gentium, lumière d'amour, de vérité, de paix. C'est pourquoi le divin Maître a envoyé les Apôtres dans le monde, et continue d'envoyer, dans le même Esprit, les évêques qui sont leurs successeurs.

3. En la solennité de l'Epiphanie, selon une tradition significative, l'Evêque de Rome confère l'Ordination épiscopale à plusieurs prélats, et j'ai aujourd'hui la joie de vous consacrer, très chers frères, afin que, dans la plénitude du sacerdoce, vous deveniez des ministres de l'épiphanie de Dieu parmi les hommes. A chacun d'entre vous sont confiées des tâches spécifiques diverses, mais visant toutes à diffuser l'unique Evangile du salut parmi les hommes.

Toi, Mgr Alessandro D'Errico, comme Nonce apostolique au Pakistan; toi, Mgr Salvatore Pennacchio, comme que mon Représentant au Rwanda; et toi, Mgr Alain Lebeaupin, comme Nonce apostolique en Equateur, vous serez les témoins de l'unité et de la communion entre les Eglises locales et le Siège apostolique.

A toi, Mgr Cesare Mazzolari, est confié le diocèse de Rumbek, au Soudan, une terre dont la population, victime depuis des années de souffrances indicibles, attend une paix juste, dans le respect des droits humains de tous, à commencer par les plus faibles; et toi, Mgr Pierre Tran Dinh Tu, tu es quant à toi appelé à devenir un messager d'espérance dans le diocèse de Phú Cuong, au Viêt-nam, parmi tes frères et soeurs dans la foi, éprouvés par de nombreuses difficultés.

Toi, Mgr Diarmuid Martin, Secrétaire du Conseil pontifical «Justice et Paix»; et toi, Mgr José Luis Redrado Marchite, Secrétaire du Conseil pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé, vous poursuivrez votre précieux service au sein de la Curie romaine, en ayant devant vous le vaste horizon de l'Eglise toute entière.

Ta mission est riche d'attentes, Mgr Rafael Cob García, Vicaire apostolique de Puyo, en Equateur; ainsi que la tienne, Mgr Mattew Moolakkattu, Auxiliaire de l'Evêque de Kottayam des Syro-malabars, en Inde: vos personnes me rappellent l'Asie et l'Amérique, des continents pour lesquels nous avons récemment célébré deux Assemblées spéciales du Synode des Evêques.

621 Que le Seigneur veuille que chacun de vous, nouvaux Evêques à qui j'ai aujourd'hui imposé les mains, apporte partout, à travers les paroles et les oeuvres, la joyeuse annonce de l'Epiphanie, dans laquelle le Fils de Dieu a révélé au monde le visage du Père riche de miséricorde.

4. Le monde, désormais au seuil du troisième millénaire, a plus que jamais besoin de faire l'expérience de la bonté divine; de ressentir l'amour de Dieu pour chaque personne.

L'oracle du prophète Isaïe est également approprié pour notre époque: «Tandis que les ténèbres s'étendent sur la terre et l'obscurité sur les peuples, sur toi se lève Yahvé, et sa gloire sur toi paraît» (
Is 60,2-3). Sur la ligne de faît, pour ainsi dire, entre le second et le troisième millénaire, l'Eglise est appelée à se revêtir de lumière (cf. Is Is 60,1), pour briller comme la ville construite sur le mont: l'Eglise ne peut pas rester cachée (cf. Mt Mt 5,14), car les hommes ont besoin d'en recueillir le message de lumière et d'espérance et de rendre gloire au Père qui est dans les cieux (cf. Mt Mt 5,16).

Conscients de cette tâche apostolique et missionnaire, qui appartient à tout le peuple chrétien, mais en particulier à ceux que l'Esprit Saint a placés comme évêques pour diriger l'Eglise de Dieu (cf. Ac Ac 20,28), nous nous rendons en pèlerinage à Bethléem pour nous unir aux Rois mages d'Orient, tandis qu'ils offrent des dons au Roi nouveau-né.

Cependant, c'est lui le don véritable: Jésus, le don de Dieu au monde. C'est lui que nous devons accueillir, pour l'apporter, à notre tour, à ceux que nous rencontrerons sur notre chemin. Il est l'épiphanie pour tous, la manifestation de Dieu espérance de l'homme, de Dieu libération de l'homme, de Dieu salut de l'homme.

A Bethléem, le Christ est né pour nous.
Venez, adorons-le!
Amen.

FÊTE DU BAPTÊME DU SEIGNEUR

HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II

Dimanche 10 janvier 1999
1. «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, qui a toute ma faveur» (Mt 3,17).


Ces paroles retentissent en ce jour de la fête du Baptême de Jésus. Elles nous invitent à revivre le moment où Jésus, baptisé par Jean, sort des eaux du fleuve Jourdain et est présenté par Dieu comme son Fils unique, l'Agneau qui prend sur lui le péché du monde. Une voix se fait entendre du ciel, alors que l'Esprit Saint, sous la forme d'une colombe, se pose sur Jésus, qui commence publiquement sa mission de salut; une mission caractérisée par le style du serviteur humble et doux, prêt au partage et au don total de soi: «Il ne crie pas il n'élève pas le ton [...] il ne brise pas le roseau froissé, il n'éteint pas la mèche qui faiblit, fidèlement, il présente le droit» (Is 42,2-3).

622 La liturgie nous fait revivre la scène évangélique suggestive: parmi la foule qui s'avance en pénitence vers Jean le Baptiste, pour recevoir le baptême, se trouve également Jésus. Voilà, la promesse va se réaliser et une ère nouvelle s'ouvre à l'humanité tout entière. Cet homme, dont l'apparence ne diffère pas de celle de tous les autres, est en réalité Dieu qui est venu parmi nous pour donner à ceux qui l'accueilleront le pouvoir de «devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom, lui qui ne fut engendré ni du sang, ni d'un vouloir de chair, ni d'un vouloir d'homme, mais de Dieu» (Jn 1,12-13).

2. «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le!» (Chant lors de la lecture de l'Evangile).

Aujourd'hui, cette annonce et cette invitation, riches d'espérance pour l'humanité, retentissent en particulier pour les enfants qui, d'ici peu, à travers le sacrement du Baptême, deviendront de nouvelles créatures. Participant désormais au mystère de la mort et de la ré- surrection du Christ, ils seront enrichis du don de la foi et seront incorporés au sein du Peuple de l'Alliance Nouvelle et définitive, qui est l'Eglise. Le Père fera d'eux dans le Christ ses enfants adoptifs, en révélant pour eux un projet de vie particulier: écouter son Fils comme des disciples, afin d'être appelés et d'être réellement ses enfants.

L'Esprit Saint descendra sur chacun d'eux et, comme cela s'est produit pour nous le jour de notre Baptême, ils jouiront eux aussi de cette vie que le Père donne aux croyants à travers Jésus, le Rédempteur de l'homme. De cette immense richesse de dons naîtra pour eux, comme pour chaque baptisé, une tâche unique, que l'Apôtre Paul ne se lasse pas d'indiquer aux premiers chrétiens à travers les paroles suivantes: «Laissez-vous mener par l'Esprit» (Ga 5,16), c'est-à-dire vivez et agissez constamment dans l'amour de Dieu.

Je forme le voeu que le Baptême, reçu aujourd'hui par ces petits enfants, puisse les rendre, tout au long de leur existence, des témoins courageux de l'Evangile. Cela sera possible grâce à leur engagement constant. Cependant, votre oeuvre éducative sera également nécessaire, chers parents qui rendez aujourd'hui grâce au Seigneur pour les dons extraordinaires qu'il accorde à vos enfants, de même que sera également nécessaire le soutien des parrains et des marraines.

3. Très chers frères et soeurs, accueillez l'invitation que l'Eglise vous adresse: soyez leurs «éducateurs dans la foi», afin que se développe en eux le germe de la vie nouvelle et qu'il parvienne à sa pleine maturité. Aidez-les par vos paroles et surtout à travers votre exemple.

Puissiez-vous leur apprendre bientôt à aimer le Christ, à le prier sans cesse, à l'imiter dans une adhésion constante à son appel. Vous avez reçu en leur nom, dans le symbole du cierge, la flamme de la foi: veillez à ce qu'elle soit constamment alimentée, afin que chacun d'eux, dans la connaissance et dans l'amour de Jésus, agisse toujours selon la sagesse évangélique. Ils deviendront ainsi de véritables disciples du Seigneur et de joyeux apôtres de son Evangile.

Je confie à la Vierge Marie chacun de ces enfants et leurs familles respectives. Que la Madone aide chacun à parcourir avec fidélité le chemin inauguré par le sacrement du Baptême.



VISITE À LA PAROISSE ROMAINE DE "SAN LIBORIO"

HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II

Dimanche 17 janvier 1999
1. «Voici l'agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde»! (Jn 1,29).

Le témoignage de Jean-Baptiste continue à retentir aujourd'hui encore, deux-mille ans après les événements rapportés par l'Evangile: le précurseur indique en Jésus de Nazareth le Messie attendu et il nous invite tous à renouveler et à approfondir notre foi en lui.

623 Jésus est notre Rédempteur! Sa mission salvifique, solennellement proclamée au moment du Baptême dans le Jourdain, atteint son sommet dans le mystère pascal, lorsque sur la croix, Lui, le véritable Agneau immolé pour nous, libère et rachète l'homme, chaque homme, du mal et de la mort.

Dans la liturgie eucharistique, la grande annonce du Baptiste est reproposée. Avant la Communion, le célébrant présente l'Hostie consacrée à l'adoration des fidèles, en disant: «Bienheureux ceux qui sont invités à la Cène du Seigneur. Voici l'Agneau de Dieu, qui enlève les péchés du monde». Dans un instant, nous aussi, qui participons au Banquet eucharistique, nous recevrons le véritable Agneau pascal sacrifié pour le salut de l'humanité tout entière.

2. «Voici l'agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde»! (
Jn 1,29).

Très chers paroissiens de «San Liborio», je m'adresse à vous avec les paroles de Jean-Baptiste qui viennent de re- tentir dans notre Assemblée. Ce sont des paroles qui expriment bien la signification de mes visites pastorales et des Voyages apostoliques, qui me conduisent à la rencontre de frères et de soeurs dans la foi, à Rome et dans toutes les parties du monde. Comme Jean-Baptiste, je ressens le devoir de faire connaître à tous l'Agneau de Dieu, Jésus, l'unique Sauveur du monde hier, aujourd'hui et à jamais. Dans le mystère de son Incarnation, il s'est fait «Dieu avec nous», devenant proche de nous et donnant une signification au temps et aux événements quotidiens. C'est Lui notre point de référence constant, la lumière qui illumine nos pas, la source de notre espérance.

Très chers frères et soeurs! Je vous salue tous avec affection, ainsi que le Cardinal-Vicaire et l'Evêque auxiliaire du secteur. Je salue votre pasteur plein de zèle, Dom Paolo Cardona, de l'Institut séculier des «Apostolici sodales», les prêtres qui sont ses coopérateurs, les Soeurs franciscaines du Seigneur et tous ceux qui, à différents titres, prêtent leur collaboration généreuse au sein de la Communauté paroissiale.

J'adresse une pensée particulière à Mgr Bruno Theodor Kresing, Vicaire général de l'archidiocèse de Paderborn, en Allemagne, qui est aujourd'hui ici présent pour souligner les liens de communion spirituelle qui unissent votre paroisse à l'archidiocèse allemand, que j'ai visité en 1996. Depuis cette date, la communauté ecclésiale de Paderborn a participé avec générosité à la réalisation de ce nouvel ensemble paroissial. Je désire ici exprimer ma plus vive gratitude et j'invoque sur les deux communautés la protection constante de leur Patron commun, saint Liboire.

Les liens de communion et de solidarité qui relient entre elles diverses communautés chrétiennes, constituent des expériences spirituelles et pastorales de grande valeur et ils invitent à développer toujours davantage l'ouverture, la compréhension réciproque et l'accueil. La pensée se tourne naturellement vers le prochain Jubilé, lorsque Rome accueillera de nombreux pèlerins provenant de chaque continent. Je suis certain que les paroisses, les Instituts religieux et les familles romaines leur ouvriront généreusement la porte de leur maison avec chaleur et simplicité évangélique. Ce sera l'occasion d'un échange fructueux de dons spirituels, ainsi qu'une magnifique expérience ecclésiale, qui permettra à tous de se sentir membres de l'unique Eglise présente dans tous les lieux de la terre.

3. Paroissiens de «San Liborio», votre communauté a beaucoup reçu et c'est pourquoi vous êtes à présent appelés à être, à votre tour, généreux avec les autres. Vous vivez dans un quartier où l'église paroissiale constitue l'unique centre significatif de rassemblement. Ayant à votre disposition des structures nouvelles et adaptées, vous êtes stimulés à vous ouvrir avec un plus grand élan aux nécessités du quartier.

Dans cet esprit, je suis heureux d'inaugurer le «Comptoir de la fraternité» qui, avec l'aide de la Caritas diocésaine, débute précisément aujourd'hui, en rassemblant et en plaçant au service des plus indigents des forces professionnelles précieuses, présentes dans la communauté. Continuez à projeter et à réaliser d'autres programmes caritatifs, en annonçant l'Evangile avec courage. Tous, y compris ceux qui ne sont pas en proie à des difficultés matérielles, ont besoin de quelqu'un qui, comme le Baptiste, leur indique le Christ, Chemin, Vérité et Vie.

Consacrez-vous de toutes vos forces à la Mission dans la ville qui, cette année, en poursuivant et en consolidant son engagement en faveur des familles, s'adresse aux milieux du travail et de la vie active. Après avoir élevé un temple de briques, vous devez à présent faire en sorte que, grâce à votre oeuvre effective, l'Eglise constituée de pierres vivantes, c'est-à-dire par vous les baptisés, soit toujours plus attrayante. Ouverts au dialogue, soyez prêts à valoriser chaque occasion pour croître dans la fraternité avec les chrétiens et les non chrétiens, avec les chrétiens d'autres confessions et les non croyants.

4. Pour accomplir l'action missionnaire exigeante que le Seigneur vous demande, il faut être conscient de la vocation personnelle à la sainteté de chaque baptisé. Au début de la Lettre aux Corinthiens, l'Apôtre rappelle que, sanctifiés en Jésus-Christ, nous sommes «appelés à être saints avec ceux qui en tous lieux invoquent le nom de Jésus-Christ» (1Co 1,2). Nous sommes appelés à vivre l'Evangile avec une totale fidélité. Ce n'est qu'ainsi que nous partageons vraiment avec les autres communautés présentes dans le monde la même foi dans le Christ, les mêmes sacrements et la vocation universelle à l'amour.

624 Saint Paul salue les chrétiens de Corinthe par les paroles suivantes: «A vous grâce et paix de par Dieu, notre Père, et le Seigneur Jésus-Christ» (1Co 1,3). «Grâce et paix de par Dieu, notre père», c'est ce que je vous répète aujourd'hui, frères et soeurs de cette paroisse, et à vous, fidèles de la communauté ecclésiale de Paderborn, unis par la dévotion commune à l'égard de saint Liboire. Que le Père céleste vous protège, vous assiste de sa grâce et vous accorde des jours de paix.

J'invoque sur chacun de vous la protection de Marie, la Vierge de l'écoute et du chemin. Marchez unis sur l'itinéraire spirituel et ecclésial vers le troisième millénaire chrétien. Marchez emplis de confiance et d'ardeur missionnaire, en suivant saint Liboire et vos saints protecteurs. Accueillant l'invitation de Jean, marchez avec courage et fidélité à la suite du Christ. Il est «l'agneau de Dieu qui enlève le péché du monde»! Il est «la lumière des nations qui porte le salut jusqu'aux extrémités de la terre».
Amen!

Voyage apostolique au Mexique et à St. Louis


(22-27 janvier 1999)




MESSE POUR LA CONCLUSION DE L'ASSEMBLÉE SPÉCIALE POUR L'AMÉRIQUE

HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II

Samedi 23 janvier 1999,
Basilique Notre-Dame de Guadalupe
Bien-aimés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,

Chers frères et soeurs dans le Seigneur,

1. «Mais quand vint la plénitude du temps, Dieu envoya son Fils né d'une femme...» (Ga 4,4). Qu'est-ce que la plénitude du temps? Dans la perspective de l'histoire humaine, la plénitude du temps est une date concrète. Il s'agit de la nuit où le Fils de Dieu vint au monde à Bethléem, selon ce qu'avaient annoncé les prophètes, comme nous l'avons entendu dans la première lecture: «C'est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe: Voici, la jeune femme est enceinte, elle va enfanter un fils et elle lui donnera le nom d'Emmanuel» (Is 7,14). Ces paroles, prononcées de nombreux siècles auparavant, se sont accomplies au cours de la nuit où vint au monde le Fils conçu par l'oeuvre de l'Esprit Saint dans le sein de la Vierge Marie.

La naissance du Christ fut précédée par l'annonce de l'archange Gabriel. Ensuite, Marie se rendit chez sa cousine Elisabeth pour se mettre à son service. L'Evangile de Luc nous l'a rappelé, en nous rapportant le salut insolite et prophétique d'Elisabeth, ainsi que la très belle réponse de Marie: «Mon âme exalte le Seigneur, et mon esprit tressaille de joie en Dieu mon Sauveur» (1, 46-47). Voici les événements auxquels la liturgie d'aujourd'hui fait référence.

2. La lecture de la Lettre aux Galates nous révèle, quant à elle, la dimension divine de cette plénitude du temps. Les paroles de l'Apôtre Paul résument toute la théologie de la naissance de Jésus, qui éclaire dans le même temps la signification de cette plénitude. Il s'agit de quelque chose d'extraordinaire: Dieu est entré dans l'histoire de l'homme. Dieu, qui est en lui-même le mystère insondable de la vie, Dieu, qui est Père et qui se reflète depuis l'éternité dans le Fils, consubstantiel à Lui et à travers lequel toutes les choses furent faites (cf. Jn 1,1-3), Dieu, qui est unité du Père et du Fils dans ce flux d'amour éternel qui est l'Esprit Saint.

Malgré la pauvreté de nos paroles pour exprimer le mystère ineffable de la Trinité, la vérité est que l'homme, à partir de sa condition terrestre, a été appelé à participer à cette vie divine. Le Fils de Dieu naquit de la Vierge Marie pour nous accorder la filiation divine. Le Père a communiqué à nos coeurs l'Esprit du Fils, grâce auquel nous pouvons dire: «Abba, Père» (cf. Ga 4,4). Telle est donc la plénitude du temps, qui satisfait chaque aspiration de l'histoire et de l'humanité: la révélation du mystère de Dieu, offert à l'être humain à travers le don de l'adoption divine.

625 3. La plénitude du temps, à laquelle l'Apôtre fait référence, se situe en relation avec l'histoire humaine. D'une certaine façon, en se faisant homme, Dieu est entré dans notre temps et il a transformé notre histoire en histoire du salut. Une histoire qui comprend tous les événements du monde et de l'humanité, de la création jusqu'à son terme, mais qui se déroule à travers des moments et des dates importantes. L'une d'elle est l'An 2000 de la naissance de Jésus, désormais proche, l'année du grand Jubilé, auquel l'Eglise s'est préparée également à travers la célébration des Synodes extraordinaires consacrés à chaque continent, comme ce fut le cas de celui qui s'est déroulé à la fin de 1997 au Vatican.

4. Aujourd'hui, dans cette Basilique de Guadalupe, coeur marial de l'Amérique, nous rendons grâce à Dieu pour l'Assemblée spéciale pour l'Amérique du Synode des Evêques - un authentique cénacle de communion ecclésiale et d'affection collégiale entre les pasteurs du Nord, du Centre et du Sud du continent - vécue avec l'Evêque de Rome comme une expérience fraternelle de rencontre avec le Seigneur ressuscité, un chemin pour la conversion, la communion et la solidarité en Amérique.

A présent, un an après cette Assemblée synodale, et en concomitance avec le centenaire du Concile plénier de l'Amérique latine, qui eut lieu à Rome, je suis venu ici pour déposer aux pieds de la Vierge métisse du Tepeyac, Etoile du Nouveau Monde, l'Exhortation apostolique Ecclesia in America, qui rassemble les contributions et les suggestions pastorales de ce Synode, confiant à la Mère et Reine de ce conti- nent, l'avenir de son évangélisation.

5. Je désire exprimer ma gratitude à ceux qui, grâce à leur travail et leur prière, ont fait en sorte que cette Assemblée synodale reflète la vitalité de la foi catholique en Amérique. Je remercie également cet archidiocèse primatial de Mexico et son Archevêque, le Cardinal Norberto Rivera Carrera, pour son accueil cordial et sa généreuse disponibilité. Je salue avec affection le groupe important de cardinaux et d'évêques qui sont venus de tous les lieux du con- tinent et les très nombreux prêtres et séminaristes ici présents, qui comblent de joie et d'espérance le coeur du Pape. Mon salut s'étend au-delà des murs de cette basilique pour embrasser ceux qui, de l'extérieur, suivent la célébration, ainsi que tous les hommes et toutes les femmes de diverses cultures, ethnies et nations qui constituent la riche et multiforme réalité américaine.

[en portugais]

6. «Bienheureuse celle qui a cru en l'accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur» (
Lc 1,45). Ces paroles qu'Elisabeth adresse à Marie, qui porte le Christ en son sein, peuvent s'appliquer également à l'Eglise qui est sur ce continent. Bienheureuse es-tu, Eglise qui est en Amérique, toi qui en accueillant la Bonne Nouvelle de l'Evangile, a fait naître de nombreux peuples à la foi! Bienheureuse car tu crois, bienheureuse car tu espères, bienheureuse car tu aimes, car la promesse du Seigneur s'accomplira! Les efforts missionnaires héroïques et l'admirable oeuvre d'évangélisation de ces cinq derniers siècles n'ont pas été vains. Aujourd'hui, nous pouvons dire que, grâce à eux, l'Eglise en Amérique est l'Eglise de l'espérance. Il suffit de constater la force de ses nombreux jeunes, la valeur exceptionnelle que l'on accorde à la famille, la floraison de vocations au sacerdoce et à la vie consacrée et, surtout, la profonde religiosité de ses peuples. N'oublions pas qu'au cours du prochain millénaire, désormais imminent, l'Amérique sera le continent possédant le plus grand nombre de catholiques.

[en français]

7. Toutefois, comme les Pères synodaux l'ont souligné, si l'Eglise en Amérique connaît bien des motifs de se réjouir, elle est aussi confrontée à de graves difficultés et à d'importants défis. Devons-nous pour autant nous décourager? En aucune manière: «Jésus-Christ est le Seigneur!» (Ph 2,11). Il a vaincu le monde et il a envoyé son esprit Saint pour faire toutes choses nouvelles. Serait-il trop ambitieux d'espérer que, après cette Assemblée synodale - le premier Synode américain de l'histoire - se développe sur ce continent majoritairement chrétien une manière plus évangélique de vivre et de partager? Il existe bien des domaines dans lequels les communautés chrétiennes, du Nord, du Centre et du Sud de l'Amérique peuvent manifester leurs liens fraternels, exercer une solidarité réelle et collaborer à des projets pastoraux communs, chacun apportant les richesses spirituelles et matérielles dont elle dispose.

[en anglais]

8. L'Apôtre Paul nous enseigne que dans la plénitude du temps, Dieu envoya son Fils, né d'une femme, pour nous racheter du péché et faire de nous ses fils et ses filles. En conséquence, nous ne sommes plus des serviteurs, mais des fils et des héritiers de Dieu (cf. Ga 4,4-7). L'Eglise doit donc proclamer l'Evangile de la vie et dénoncer avec une force prophétique la culture de la mort. Puisse le continent de l'Es- pérance être également le continent de la Vie! Tel est notre appel: une vie digne pour tous! Pour ceux qui ont été conçus dans le sein de leur mère, pour les enfants des rues, pour les peuples autochtones et pour les afro-américains, pour les immigrés et les réfugiés, pour les jeunes privés de toute opportunité, pour les personnes âgées, pour ceux qui sont victimes de toute sorte de pauvreté ou d'exclusion.

Chers frères et soeurs, l'heure est venue de bannir pour toujours du continent toute atteinte à la vie. Jamais plus de violence, de terrorisme et de trafic de drogue! Jamais plus de torture ou d'autres formes d'abus! Il faut mettre fin au recours inutile à la peine de mort! Jamais plus d'exploitation des faibles, de discrimination raciale ou de ghettos de pauvreté! Jamais plus! ce sont des maux intolérables qui élèvent leur cri vers le ciel et qui invitent les chrétiens à un style de vie différent, à un engagement social plus en harmonie avec leur foi. Nous devons réveiller la conscience des hommes et des femmes grâce à l'Evangile, dans le but de souligner leur vocation sublime de fils de Dieu. Cela les encouragera à édifier une Amérique meilleure. Il est urgent de susciter un nouveau printemps de sainteté sur le continent afin que l'action et la contemplation aillent de pair.

[en espagnol]

626 9.’Je désire confier et offrir l'avenir du continent à la Très Sainte Vierge Marie, Mère du Christ et de l'Eglise. Je suis donc heureux d'annoncer que j'ai établi que, le 12 décembre, la Vierge de Guadalupe serait célébrée dans toute l'Amérique comme une fête liturgique. Ô Mère! Tu connais les voies que suivirent les premiers évangélisateurs du Nouveau Monde, des îles Guanahani et La Española aux forêts d'Amazonie et aux cimes des Andes, parvenant jusqu'à la Terre de Feu dans le sud et aux grands lacs et aux montagnes du nord. Accompagne l'Eglise qui accomplit son oeuvre dans les nations américaines, afin qu'elle évangélise toujours et qu'elle renouvelle son esprit missionnaire. Encourage tous ceux qui consacrent leur vie à la cause de Jésus et à la diffusion de son Royaume.

Ô douce Dame du Tepeyac, Mère de Guadalupe! Nous te présentons cette foule innombrable de fidèles qui prient Dieu en Amérique. Toi, qui es entrée dans leur coeur, visite et réconforte les foyers domestiques, les paroisses et les diocèses de tout le continent. Fais en sorte que les familles chrétiennes éduquent de façon exemplaire leurs enfants dans la foi de l'Eglise et dans l'amour de l'Evangile, afin qu'ils deviennent une source de vocations apostoliques. Tourne aujourd'hui ton regard vers les jeunes et encourage-les à marcher avec Jésus-Christ.

Ô Dame et Mère de l'Amérique! Confirme la foi de nos frères et soeurs laïcs, afin que dans tous les domaines de la vie sociale, professionnelle, culturelle et politique, ils agissent en conformité avec la vérité et la loi nouvelle que Jésus a apportée à l'humanité. Fais preuve de bienveillance face à l'angoisse de ceux qui souffrent de la faim, de la solitude, de l'exclusion ou de l'ignorance. Fais-nous reconnaître en eux tes fils bien-aimés et donne-nous l'élan de la charité pour les soutenir dans leurs besoins. Sainte Vierge de Guadalupe, Reine de la Paix! Protège les nations et les peuples du continent. Fais en sorte que tous, dirigeants et citoyens, apprennent à vivre dans la liberté authentique en agissant selon les exigences de la justice et le respect des droits humains, afin que la paix soit définitivement établie. A toi, Vierge de Guadalupe, Mère de Jésus et notre Mère, nous offrons toute l'affection, l'honneur, la gloire et la louange constantes de tes fils et de tes filles d'Amérique!

A l'issue de la Messe, le Saint-Père ajoutait les paroles suivantes:

Merci pour ce cadeau splendide qui m'accompagnera. J'ai eu la joie de célébrer encore une fois la messe dans cette basilique tant aimée par tous les Mexicains, par tous les Américains fils de la paix. Je vous remercie pour les prières que vous élevez chaque jour pour moi et pour mon ministère pétrinien. Et je sais que vous continuerez toujours à le faire. Merci.



Concélébration eucharistique à l'autodrome «Hermanos Rodríguez»(Mexico)


Homélies St Jean-Paul II 617