Homélies St Jean-Paul II 626

HOMÉLIE


Dimanche 24 janvier 1999, autodrome «Hermanos Rodríguez» (Mexico)
Très chers frères et soeurs,


1. «Soyez étroitement unis dans le même esprit et dans la même pensée» (1Co 1,10).

Ce matin, les paroles de l'Apôtre Paul nous encouragent à vivre intensément cette rencontre de foi, qu'est la célébration eucharistique, en ce «saint dimanche, honoré par la résurrection du Seigneur, prémices de tous les autres jours» (Dies domini, n. 19). Etre ici pour présider la Messe me remplit d'une immense joie.

Dans le dessein de Dieu, le dimanche est le jour où la communauté chrétienne se réunit autour de la table de la Parole de Dieu et de la table de l'Eucharistie. Lors de cette importante rencontre, nous sommes appelés par le Seigneur à renouveler et à approfondir le don de la foi. Oui, mes frères, le dimanche est le jour de la foi et de l'espérance; le jour de la joie et de la réponse joyeuse au Christ Sauveur, le jour de la sainteté. Dans cette assemblée fraternelle, nous vivons et nous célébrons la présence du Maître, qui a promis: «Et voici que je suis avec vous pour tou- jours jusqu'à la fin du monde» (Mt 28,20).

627 2. Je désire à présent remercier Monsieur le Cardinal Norberto Rivera, Archevêque-Primat de Mexico, des paroles cordiales qu'il m'a adressées en présentant les réalités de cette bien-aimée communauté ecclésiale. Je salue également avec affection le Cardinal Ernesto Corripio Ahumada, Archevêque émérite de Mexico, ainsi que les autres cardinaux et évêques mexicains, et tous ceux qui sont venus d'autres parties du continent américain et de Rome. Le Pape vous encourage dans l'exercice de votre ministère et il vous exhorte à ne pas épargner vos forces pour prêcher avec courage l'Evangile du Christ.

Je salue également avec une profonde estime les prêtres, les personnes consacrées, hommes et femmes, en les encourageant à se sanctifier par le don d'eux-mêmes à Dieu à travers leur service à l'Eglise et à la nouvelle évangélisation, en suivant toujours les directives de leurs pasteurs. Cela représentera une grande force pour mieux annoncer le Christ aux autres, en particulier à ceux qui sont le plus éloignés. De même, je rappelle les nombreuses religieuses de clôture qui prient pour l'Eglise, pour le Pape, pour les évêques et les prêtres, pour les missionnaires et pour tous les fidèles.

Je salue également très affectueusement les nombreux autochtones provenant de diverses régions du Mexique présents à cette célébration. Le Pape se sent proche de vous tous, admirant les richesses de vos cultures, et vous encourageant à surmonter avec espérance les situations difficiles que vous traversez. Je vous invite à fournir des efforts pour poursuivre votre développement et à oeuvrer à votre promotion. Construisez de façon responsable votre avenir et celui de vos enfants! C'est pourquoi je demande à tous les fidèles de cette nation de s'engager à aider et à soutenir les plus indigents d'entre vous. Il est nécessaire que tous et chacun des fils de cette patrie disposent du nécessaire pour mener une vie digne. Tous les membres de la société mexicaine ont une égale dignité, car ils sont fils de Dieu et tous méritent donc le respect, de même qu'ils ont le droit de se réaliser pleinement dans la justice et dans la paix.

La parole du Pape veut également parvenir aux malades qui n'ont pas pu être présents ici avec nous. Je me sens très proche d'eux, et je leur transmets le réconfort et la paix du Christ. Alors qu'ils cherchent à se rétablir, je leur demande d'offrir leur maladie à l'Eglise, car je connais la valeur salvifique et la force évangélisatrice que possède la souffrance humaine associée à celle du Seigneur Jésus.

Je remercie en particulier les autorités civiles de leur présence à cette célébration. Le Pape vous encourage à travailler avec zèle pour le bien de tous, avec un profond sens de la justice, selon les responsabilités qui vous ont été confiées.

3. Dans la première lecture, faisant référence à l'attente messianique d'Israël, le Prophète dit: «Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière» (
Is 9,1). Cette lumière est le Christ, apporté ici il y a presque cinq cents ans par les douze premiers évangélisateurs franciscains provenant d'Espagne. Aujourd'hui, nous sommes les témoins d'une foi enracinée et des fruits abondants que le sacrifice et l'abnégation de tant de missionnaires ont produits.

Comme nous le rappelle le Concile Vatican II, «le Christ est la lumière des nations» (Lumen gentium LG 1). Que cette lumière illumine la société mexicaine, ses familles, les écoles et les universités, ses champs et ses villes! Que les valeurs de l'Evangile inspirent les dirigeants à servir leurs concitoyens, en tenant compte de façon particulière des plus indigents.

La foi dans le Christ fait partie intégrante de la nation mexicaine, car elle est imprimée de façon indélébile dans son histoire! Ne laissez pas s'éteindre cette lumière de la foi! Le Mexique continue à en avoir besoin pour pouvoir construire une société plus juste et fraternelle, solidaire de ceux qui ne possèdent rien et qui attendent un avenir meilleur.

Le monde actuel oublie parfois les valeurs transcendantes de la personne humaine: sa dignité et sa liberté, son droit inviolable à la vie et le don inestimable de la famille, dans un climat de solidarité dans la vie sociale. Les relations entre les hommes ne se fondent pas toujours sur les principes de la charité et de l'aide mutuelle. Au contraire, les critères dominants sont différents, ce qui met en danger le développement harmonieux et le progrès intégral des personnes et des peuples. C'est pourquoi les chrétiens doivent être «l'âme» de ce monde: qui le comble d'esprit, qui lui communique la vie et qui coopère à l'édification d'une société nouvelle, régie par l'amour et par la vérité.

Chers fils et chères filles, même lors des moments les plus difficiles de votre histoire, vous avez toujours su reconnaître le Maître «qui a des paroles de vie éternelle» (cf. Jn 6,68). Faites en sorte que la Parole du Christ parviennent à ceux qui l'ignorent encore! Ayez le courage de témoigner l'Evangile dans les rues et sur les places, dans les vallées et dans les montagnes de ce pays! Promouvez la nouvelle évangélisation, en suivant les orientations de l'Eglise.

4. Dans le Psaume responsorial nous avons chanté: «Yahvé est ma lumière et mon salut» (Ps 26,1). Qui pourrions-nous craindre s'Il est avec nous? Soyez donc courageux. Cherchez le Seigneur et en Lui vous trouverez la paix. Les chrétiens sont appelés à être «la lumière du monde» (Mt 5,14), en illuminant toute la société par le témoignage de leurs actions.

628 Lorsque l'on entreprend fermement le chemin de la foi, on laisse de côté les tentations qui affligent l'Eglise, Corps mystique du Christ, et l'on ne prête pas attention à ceux qui, tournant le dos à la vérité, prêchent la division et la haine (cf. 2P 2,1-2). Fils et filles du Mexique et de toute l'Amérique, ne cherchez pas dans des idéologies fallacieuses et apparemment innovatrices la vérité de la vie: «Jésus est la véritable nouveauté, qui dépasse toute attente de l'humanité, et il le restera pour toujours» (Incarnationis mysterium, n. 1).

5. Dans cet autodrome, aujourd'hui transformé en un grand temple, retentissent avec forces les paroles avec lesquelles Jésus commença sa prédication: «Convertissez-vous car le Royaume des cieux est proche» (Mt 4,17). Dès son origine, l'Eglise a fidèlement transmis ce message de conversion, afin que tous puissent conduire une vie plus pure, selon l'Esprit de l'Evangile. Que l'appel à la conversion devienne plus pressant en ce moment de préparation au grand jubilé, au cours duquel nous commémorerons le mystère de l'Incarnation du Fils de Dieu, qui a eu lieu il y a deux mille ans.

Au début de cette année liturgique, avec la Bulle Incarnationis mysterium j'ai indiqué comment «le temps du Jubilé nous introduit dans le vigoureux langage qu'emploie la pédagogie divine du salut pour inciter l'homme à la conversion et à la pénitence, principe et voie de sa réhabilitation» (n. 2). Le Pape vous exhorte donc à convertir votre coeur au Christ. Il est nécessaire que toute l'Eglise commence le nouveau millénaire en aidant ses propres enfants à se purifier du péché et du mal, qu'elle amplifie ses horizons de sainteté et de fidélité pour participer à la grâce du Christ, qui nous a appelés à être fils de la lumière et à prendre part à la gloire éternelle (cf. Col Col 1,13).

6. «Venez à ma suite, et je vous ferai pêcheurs d'hommes» (Mt 4,19).

Ces paroles de Jésus, que nous venons d'écouter, se répètent au cour de l'histoire et en chaque lieu de la terre. Comme le Maître, j'adresse à tous, en particulier aux jeunes, la même invitation à suivre le Christ. Chers jeunes, Jésus appela un jour Simon, Pierre et André. Ils étaient pêcheurs, et ils abandonnèrent leurs filets pour le suivre. Le Christ invite sans aucun doute certains d'entre vous à le suivre et à se consacrer totalement à la cause de l'Evangile. N'ayez pas peur de recevoir cette invitation du Seigneur! Ne permettez pas aux filets de vous empêcher de suivre le chemin de Jésus! Soyez généreux, ne cessez pas de répondre au Maître qui vous appelle. Suivez-le pour être, comme les Apôtres, des pêcheurs d'hommes.

J'encourage également les pères et les mères de famille à être les premiers à alimenter la semence de la vocation chez leurs enfants, en leur donnant l'exemple de l'amour du Christ dans leur propre foyer domestique, avec effort et sacrifice, avec dévouement et responsabilité. Chers parents: formez vos enfants selon les principes de l'Evangile afin qu'ils puissent être les évangélisateurs du troisième millénaire. L'Eglise a besoin de plus d'évangélisateurs. Toute l'Amérique, à laquelle vous appartenez, et de façon particulière ce pays bien-aimé, possède une grande responsabilité en ce qui concerne l'avenir.

Pendant longtemps le Mexique a été l'objet de l'action évangélisatrice généreuse et pleine d'abnégation de nombreux témoins du Christ. Pensons seulement à quelques-unes de ces figures éminentes, comme Juan de Zumárraga et Vasco de Quiroga. D'autres ont évangélisé à travers leur témoignage jusqu'à la mort, comme les bienheureux enfants martyrs de Tlaxcala, Cristóbal, Antonio et Juan, où le bienheureux Miguel Pro et tant d'autres prêtres, religieux et laïcs martyrs. Enfin, d'autres encore ont été des confesseurs, comme l'Evêque bienheureux Rafael Guizar.

7. Pour conclure, je désire tourner ma pensée vers le Tepeyac, vers Notre-Dame de Guadalupe, Etoile de la première et de la nouvelle évangélisation d'Amérique. Je lui confie l'Eglise qui est en pèlerinage au Mexique et sur le continent américain, et je lui demande avec ferveur d'aider ses enfants à entrer avec foi et espérance dans le troisième millénaire.

Je place sous sa sollicitude maternelle les jeunes de ce pays, ainsi que la vie et l'innocence des enfants, surtout de ceux qui courent le danger de ne pas naître. Je confie à sa protection pleine d'amour la cause de la vie: qu'aucun Mexicain n'ose blesser le don précieux et sacré de la vie dans le sein maternel!

A l'intercession maternelle de Notre-Dame de Guadalupe je confie les pauvres, avec leurs besoins et leurs aspirations. Devant Elle, au visage métis, je dépose les souhaits et les espérances des peuples autochtones avec leur culture, des peuples qui espèrent satisfaire leurs aspirations légitimes et parvenir au développement auquel ils ont droit. Je lui confie également les afro-américains. Je place aussi entre ses mains les travailleurs, les entrepreneurs et tous ceux qui, grâce à leur activité, collaborent au progrès de la société actuelle.

Très Sainte Vierge! Puissions-nous, comme le bienheureux Juan Diego, porter ton image imprimée en nous, sur le chemin de notre vie, et annoncer la Bonne Nouvelle du Christ à tous les hommes.

629 Cette prédication doit être soulignée. Le Pape a prêché et avec lui toute l'assemblée a prêché, à travers ses prières. Ici, à ma gauche, il y a un groupe d'enfants qui, dans cette assemblée, a prêché avec une force particulière.

Merci à tous.



HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II


AU STADE "TRANS WORLD DOME"


Mercredi 27 janvier 1999



«En ceci s'est manifesté l'amour de Dieu pour nous: Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde afin que nous vivions par lui» (1Jn 4,9).

Chers frères et soeurs,

1. Dans l'Incarnation, Dieu se révèle pleinement dans le Fils qui est venu dans le monde (cf. Tertio millennio adveniente TMA 9). Notre foi n'est pas simplement le résultat de notre recherche de Dieu. En Jésus-Christ, c'est Dieu qui vient en personne nous parler et nous montrer lui-même le chemin.

L'Incarnation révèle également la vérité sur l'homme. En Jésus-Christ, le Père a prononcé les paroles définitives à propos de notre véritable destin et du sens de l'histoire humaine (cf. ibid., n. 5). «En ceci consiste l'amour: ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c'est lui qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils en victime de propitiation pour nos péchés» (1Jn 4,10). L'Apôtre parle de l'amour qui a inspiré le Fils à se faire homme et à demeurer parmi nous. A travers Jésus, nous savons combien le Père nous aime. En Jésus-Christ, à travers le don de l'Esprit Saint, chacun de nous peut participer à l'amour qui est la vie de la Très Sainte Trinité.

Saint Jean poursuit: «Celui qui confesse que Jésus est le Fils de Dieu, Dieu demeure en lui et lui en Dieu» (1Jn 4,15). A travers la foi dans le Fils de Dieu fait homme, nous demeurons dans le coeur même de Dieu: «Dieu est amour, celui qui demeure dans l'amour demeure en Dieu et Dieu demeure en lui» (1Jn 4,16). Ces paroles nous révèlent le mystère du Sacré-Coeur de Jésus: l'amour et la compassion de Jésus sont la porte à travers laquelle l'amour éternel du Père se répand sur le monde. En célébrant cette Messe du Sacré Coeur, ouvrons nos coeurs à la miséricorde salvifique de Dieu!

2. Dans la lecture de l'Evangile que nous venons d'entendre, saint Luc utilise la figure du Bon Pasteur pour parler de cet amour divin. Le Bon Pasteur est une image chère à Jésus dans les Evangiles. En réponse aux Pharisiens qui lui reprochaient d'accueillir les pécheurs en mangeant avec eux, le Seigneur leur pose une question: lequel d'entre vous, s'il a cent brebis et vient à en perdre une, n'abandonne pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour s'en aller après celle qui est perdue, jusqu'à ce qu'il l'ait retrouvée? «Et quand il l'a retrouvée, il la met, tout joyeux, sur ses épaules et, de retour chez lui, il rassemble amis et voisins et leur dit: "Réjouissez-vous avec moi car je l'ai retrouvée, ma brebis qui était perdue"» (Lc 15,5-6).

Cette parabole souligne la joie du Christ et de notre Père céleste pour chaque pécheur qui se repent. L'amour de Dieu est un amour qui nous cherche. C'est un amour qui sauve. C'est l'amour que nous trouvons dans le Coeur de Jésus.

3. Lorsque nous connaissons l'amour qui est dans le Coeur du Christ, nous savons que chaque individu, chaque famille, chaque peuple de la terre peut placer sa confiance dans ce Coeur. Nous avons entendu Moïse dire: «Car tu es un peuple consacré à Yahvé ton Dieu; [...] Yahvé s'est attaché à vous et vous a choisis [...] par amour pour vous» (Dt 7,6-8). Depuis l'époque de l'Ancien Testament, le coeur de l'histoire du salut est représenté par l'amour intarissable et la prédilection de Dieu, et par notre réponse en tant qu'hommes à cet amour. Notre foi est la réponse à l'amour et à la prédilection de Dieu.

630 Trois cents ans se sont écoulés depuis le 8 décembre 1698, lorsque le Saint-Sacrifice de la Messe fut offert pour la première fois dans ce qui est maintenant la ville de Saint-Louis. C'était la fête de l'Immaculée Conception et de la bienheureuse Vierge Marie, et le Père Montigny, le Père Davion et le Père Saint Cosme élevèrent un autel de pierre sur les rives du Mississipi et célébrèrent une Messe. Ces trois siècles ont été l'histoire de l'amour de Dieu déversé sur cette partie des Etats-Unis, et une histoire de réponse généreuse à cet amour.

Dans cet archidiocèse, le commandement de l'amour a suscité une série infinie d'activités pour lesquelles nous rendons grâce - aujourd'hui - à notre Père céleste. Saint-Louis a été la Porte qui ouvre sur l'Ouest, mais la ville a également constitué l'accès au grand témoignage chrétien et au service évangélique. En fidélité au commandement d'évangélisation du Christ, le premier Pasteur de cette Eglise locale, l'Evêque Joseph Rosati, qui venait de la ville de Sora, tout près de Rome, a promu une activité missionnaire exceptionnelle dès le début. En effet, aujourd'hui, l'on dénombre quarante-six diocèses différents dans la région que l'Evêque Rosati servit. Avec une grande affection, je salue votre Pasteur actuel, le cher Monseigneur Rigali, mon précieux collaborateur à Rome. Dans l'amour du Seigneur, je salue toute l'Eglise qui est dans cette région.

Dans cette région, de nombreuses Congrégations religieuses d'hommes et de femmes ont oeuvré pour l'Evangile avec un grand dévouement, génération après génération. C'est ici que l'on retrouve les racines américaines de l'engagement d'évangélisation de la Légion de Marie et d'autres associations d'apostolat laïc. L'oeuvre de la Société pour la Propagation de la Foi, rendue possible par le soutien généreux du peuple de cet archidiocèse, représente une réelle participation à la réponse de l'Eglise au commandement d'évangélisation du Christ. C'est de Saint-Louis que le Cardinal Ritter envoya les premiers prêtres Fidei donum en Amérique latine en 1956, exprimant ainsi de façon concrète l'échange de dons qui devrait toujours faire partie de la communion entre les Eglises. Cette solidarité à l'intérieur de l'Eglise a représenté le thème central de l'Assemblée spéciale pour l'Amérique du Synode des Evêques de l'an dernier et elle représente l'idée centrale de l'Exhortation apostolique Ecclesia in America - l'Eglise en Amérique - que je viens de signer et de rendre publique au Sanctuaire de Notre-Dame de Guadalupe, à Mexico.

4. Ici, par la grâce de Dieu, les activités caritatives de tout genre ont représenté une partie vivante de la vie catholique. Depuis le début, la Société Saint-Vincent-de-Paul a occupé une place privilégiée dans l'archidiocèse. Depuis des années, les organismes caritatifs catholiques accomplissent une oeuvre exceptionnelle au nom de Jésus-Christ. Les services de santé catholiques ont montré le visage humain du Christ bienveillant et plein de compassion.

Les écoles catholiques ont montré leur valeur inestimable à des générations entières d'enfants, leur enseignant à connaître, à aimer et à servir Dieu en les préparant à occuper leur place de manière responsable au sein de la communauté. Des parents, des enseignants, des pasteurs, des administrateurs et des paroisses entières ont fait de grands sacrifices pour préserver le caractère essentiel de l'éducation catholique en tant que ministère authentique de l'Eglise et service évangélique aux jeunes. Les objectifs du Programme pastoral stratégique de l'Archidiocèse - évangélisation, conversion, intendance, éducation catholique, service aux personnes dans le besoin - ont ici une longue tradition.

Aujourd'hui, les catholiques américains doivent faire face au défi impor- tant de connaître et de préserver cet immense héritage de sainteté et de service. Vous devez puisez dans cet héritage l'inspiration et la force pour la nouvelle évangélisation, si nécessaire à l'approche du troisième millénaire chrétien. A travers la sainteté et le service de sainte Philippine Duchesne, originaire de Saint-Louis, et des innombrables prêtres, religieux et laïcs depuis les tout débuts de l'Eglise dans cette région, la vie catholique est apparue dans toute sa splendeur riche et variée. La même chose vous est demandée aujourd'hui.

5. La mise en oeuvre de la nouvelle évangélisation doit mettre un accent particulier sur la famille et le renouveau du mariage chrétien. Dans leur mission primordiale de se communiquer mutuellement l'amour, d'être les co-créateurs de la vie humaine avec Dieu, et de transmettre l'amour de Dieu à leurs enfants, les parents doivent savoir qu'ils peuvent compter sur le soutien total de l'Eglise et de la société. La nouvelle évangélisation doit conduire à une plus grande reconnaissance de la famille en tant que fondement premier et le plus vital de la société, en tant que première école de vertu et de solidarité sociales (cf. Familiaris consortio
FC 42). Si la famille va bien, toute la nation va bien!

La nouvelle évangélisation doit également proclamer la vérité selon laquelle «l'Evangile de l'amour de Dieu pour l'homme, l'Evangile de la dignité de la personne et l'Evangile de la vie sont un Evangile unique et indivisible» (Evangelium vitae EV 2). En tant que croyants, comment pouvons-nous manquer de voir que l'avortement, l'euthanasie et le suicide assisté représentent un terrible rejet du don de la vie et de l'amour de Dieu? Et en tant que croyants, comment pouvons-nous manquer de ressentir le devoir d'entourer les malades et ceux qui sont dans des situations de détresse de notre affection et du soutien qui les aidera à embrasser toujours la vie?

La nouvelle évangélisation a besoin de fidèles du Christ qui choisissent la vie de façon inconditionnelle: qui proclameront, célébreront et serviront l'Evangile de la vie dans toutes les situations. Un signe d'espérance est constitué par la reconnaissance croissante que la dignité de la vie humaine ne doit jamais être niée, pas même à celui qui a fait le mal. La société moderne a les moyens de se protéger sans nier de façon définitive aux criminels la possibilité de se racheter (cf. Evangelium vitae EV 27). Je renouvelle l'appel que j'ai lancé tout récemment à Noël en vue d'un accord visant à mettre un terme à la peine de mort, qui est à la fois cruelle et inutile. Tandis que le nouveau millénaire approche, un autre grand défi demeure pour cette communauté de Saint-Louis, à l'Ouest comme à l'Est du Mississipi, et non seulement à Saint-Louis, mais dans tout le pays: celui de mettre un terme à toute forme de racisme, une plaie que vos Evêques ont définie comme l'un des maux les plus persistants et les plus destructeurs de la nation.

6. Chers frères et soeurs, l'Evangile de l'amour de Dieu, que nous célébrons aujourd'hui, trouve sa plus haute expression dans l'Eucharistie. Dans la Messe et dans l'adoration eucharistique, nous rencontrons l'amour miséricordieux de Dieu qui passe à travers le Coeur de Jésus-Christ. Au nom de Jésus, le Bon Pasteur, je désire lancer un appel, un appel aux catholiques, à travers les Etats-Unis et partout où ma voix et mes paroles sont entendues - en particulier à ceux qui, pour quelque raison que ce soit, ont abandonné la pratique de leur foi. A la veille du grand jubilé du deux-millième anniversaire de l'Incarnation, le Christ vous cherche et vous invite à retourner à la communauté de la foi. N'est-ce pas le moment pour vous de faire l'expérience de la joie de retourner à la maison du Père?

Dans certains cas, il se peut qu'il y ait encore des obstacles à la participation eucharistique; dans d'autres cas, il se peut que certains souvenirs doivent être guéris; mais dans tous les cas, il y a l'assurance de l'amour et de la miséricorde de Dieu.

631 Le grand Jubilé de l'An 2000 commencera par l'ouverture de la Porte Sainte dans la Basilique Saint-Pierre de Rome: il s'agit d'un symbole puissant de l'Eglise - ouverte à quiconque éprouve le besoin de l'amour et de la miséricorde du Coeur du Christ. Dans l'Evangile, Jésus dit: «Je suis la porte. Si quelqu'un entre par moi, il sera sauvé. Il entrera et sortira, et trouvera un pâturage» (cf. Jn 10,9).

Notre vie chrétienne peut être consi- dérée comme un grand pèlerinage vers la maison du Père, qui passe à travers la porte qu'est Jésus-Christ. La clé de cette porte est le repentir et la conversion. La force pour passer à travers cette porte nous vient de notre foi, de notre espérance et de notre amour. Pour de nombreux catholiques, une partie importante du voyage doit consister à redécouvrir la joie d'appartenir à l'Eglise, à chérir l'Eglise car le Seigneur nous l'a donnée comme Mère et Maitresse.

Vivant dans l'Esprit Saint, l'Eglise attend impatiemment le millénaire comme un temps de renouveau spirituel important. L'Esprit suscitera véritablement un nouveau printemps de la foi si les coeurs chrétiens sont emplis de générosité et d'ouverture à sa grâce purificatrice. Dans les paroisses et les communautés, partout dans ce pays, la sainteté et le service chrétien fleuriront si «vous reconnaissez l'amour que Dieu a pour vous et si vous y croyez» (cf. 1 J 4, 16).

Marie, Mère de la Miséricorde, enseigne aux habitants de Saint-Louis et des Etats-Unis à dire oui à ton Fils, notre Seigneur Jésus-Christ!

Mère de l'Eglise, sur la route du grand Jubilé du troisième millénaire, sois l'Etoile qui guide en toute sécurité nos pas vers le Seigneur!

Vierge de Nazareth, il y a deux mille ans, tu as apporté au monde le Verbe Incarné: conduis les hommes et les femmes du nouveau millénaire à Celui qui est la véritable lumière du monde! Amen.

* * *

Avant de donner la Bénédiction apostolique, le Pape Jean-Paul II a adressé les paroles suivantes aux personnes présentes:

Paix, la paix du Christ soit avec vous tous. A mes frères, les cardinaux et les évêques - qui sont ici si nombreux aujourd'hui - Pasteurs de l'Eglise qui est en Amérique. Je désire remercier en particulier les prêtres qui accomplissent pour nous le service pastoral quotidien des fils de Dieu. J'adresse mes remerciements à vous tous pour cette magnifique liturgie. J'apprécie beaucoup votre participation enthousiaste et votre esprit de prière. Je renouvelle une fois de plus ma gratitude à Monseigneur Rigali, votre Pasteur, et à tous ceux qui ont participé à la préparation de ce grand événement.

Le Saint-Père poursuivait en polonais:

Je salue cordialement mes concitoyens, qui vivent en Amérique, en particulier les habitants de Saint-Louis. Je vous remercie de vous souvenir de moi dans vos prières. Dieu vous bénisse tous!

632 Puis, le Pape concluait par ces paroles:

J'adresse une parole particulière d'affection aux personnes malades, aux détenus en prison et à tous ceux qui souffrent dans leur esprit et dans leur corps. Ma gratitude et mon estime s'adressent également à mes frères et soeurs qui, dans un esprit d'amitié oecuménique, se sont unis à nous. Merci.



HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II


LORS DE LA CÉLÉBRATION DES VÊPRES


DANS LA CATHÉDRALE DE SAINT-LOUIS


Mercredi 27 janvier 1999



«Que les peuples te rendent grâce, ô Dieu, que les peuples te rendent grâce tous!» (Ps 67 [66], 4).

Chers frères et soeurs,

1. Nous sommes réunis ici dans cette magnifique Basilique-Cathédrale pour adorer Dieu et pour élever nos prières vers lui, comme l'encens. En chantant les louanges de Dieu, nous rappelons et nous reconnaissons la domination de Dieu sur la création et sur nos vies. Notre prière ce soir nous rappelle que notre véritable langue maternelle est la louange de Dieu, le langage céleste, notre véritable maison.

Nous sommes réunis en ce qui est déjà la veille d'un nouveau millénaire - qui représente de tout point de vue un carrefour décisif pour le monde. Lorsque nous considérons le siècle que nous nous apprêtons à laisser derrière nous, nous voyons que la fierté humaine et le pouvoir du péché ont empêché de nombreuses personnes de parler leur langue maternelle. Afin de pouvoir chanter les louanges de Dieu, nous devons réapprendre le langage de l'humilité et de la confiance, le langage de l'intégrité morale et de l'engagement sincère pour tout ce qui est véritable- ment bon aux yeux du Seigneur.

2. Nous venons d'entendre une lecture émouvante dans laquelle le Prophète Isaïe décrit un peuple de retour d'exil, abattu et découragé. Nous aussi, parfois, faisons l'expérience du désert aride: nos mains faiblissent, nos genoux chancellent, nos coeurs défaillent. Combien de fois la louange de Dieu disparaît-elle de nos lèvres pour faire place à un chant de lamentation! Le message du Prophète est un appel à la confiance, un appel au courage, un appel à l'espérance du salut de la part du Seigneur. Comme son exhortation est urgente pour chacun de nous aujourd'hui: «Soyez forts, ne craignez pas; voici votre Dieu [...] c'est lui qui vient vous sauver» (Is 35,3-4).

3. Notre aimable hôte, Monseigneur Rigali, a invité à la célébration des Vêpres des représentants de nombreux groupes religieux différents et de secteurs de la société civile. Je salue le Vice-Président des Etats-Unis d'Amérique, ainsi que les autres représentants des autorités civiles et les responsables des communautés ici présents. Je salue mes frères et soeurs dans la foi catholique: les fidèles laïcs, qui veulent vivre leur dignité baptismale toujours plus intensément dans leurs efforts pour faire en sorte que l'Evangile influe sur les réalités de la vie quotidienne dans la société.

Avec affection, je salue mes frères prêtres, qui représentent tous les prêtres zélés et généreux de Saint-Louis et des autres diocèses. Je souhaite que vous vous réjouissiez chaque jour en rencontrant - dans la prière et dans l'Eucharistie - Jésus-Christ vivant, dont vous partagez le sacerdoce. Je salue cordialement les diacres de l'Eglise et je vous encourage dans votre ministère liturgique, pastoral, et caritatif. J'adresse une parole particulière de remerciement à vos épouses et à vos familles pour leur soutien dans ce ministère.

Les nombreux religieux qui sont ici ce soir représentent les milliers d'hommes et de femmes qui oeuvrent dans l'archidiocèse depuis le début. Vous représentez ceux qui suivent le Christ en imitant son don total au Père et à la cause de son Royaume. Ma reconnaissance et mes remerciements s'adressent à chacun de vous.

633 Je suis heureux d'adresser une parole particulière d'encouragement aux séminaristes. Vous serez les prêtres du nouveau millénaire, en oeuvrant avec le Christ à la nouvelle évangélisation; en aidant l'Eglise, sous l'action de l'Esprit Saint, à répondre aux exigences du nouveau siècle. Je prie chaque jour pour que le Seigneur fasse de vous «des pasteurs selon mon coeur» (Jr 3,15).

4. Je suis particulièrement heureux que des membres éminents d'autres Eglises et communautés ecclésiales se soient joints à la communauté catholique de Saint-Louis pour les Vêpres. Avec espérance et confiance, conti- nuons d'oeuvrer ensemble pour réaliser le désir du Seigneur: «Afin que tous soient un [...] et que le monde croie» (Jn 17,21). J'exprime mon amitié et mon estime également aux personnes de toutes les autres traditions religieuses. En particulier, je rappelle les liens qui me lient depuis longtemps aux membres de confession juive, et les rencontres que j'ai eues dans de nombreu- ses parties du monde avec mes frères et soeurs musulmans. Aujourd'hui, la Divine Providence nous a réunis tous ensemble et nous a permis de prier: «O Dieu, que toutes les nations chantent tes louanges!». Que cette prière montre notre engagement commun à une plus grande compréhension et coopération.

5. Je désire également prononcer une parole de reconnaissance à la com- munauté civile de toute la région métropolitaine, à tous ceux qui sont associés à la ville de Saint-Louis et qui sont engagés pour son bien-être humain, culturel et social. Votre détermination à répondre aux nombreux défis urbains qui se présentent à la communauté aidera à susciter un nouvel «Esprit de Saint-Louis» pour servir la cause de la ville, qui est la cause de ses habitants et de leurs besoins. Il faut apporter une attention particulière à la formation des jeunes en vue d'une participation positive à la communauté. A cet égard, je partage l'espoir de l'archidiocèse que le Cardinal Ritter College Prep, soutenu par l'appui commun de tous les secteurs, pourra continuer de donner à de nombreux jeunes la possibilité d'accéder à une éducation de qualité et à un véritable progrès humain.

Au nom de l'Eglise, j'exprime ma gratitude à tous, y compris à la communauté économique, pour le soutien continu de nombreux services caritatifs sociaux et éducatifs de grand mérite, promus par l'Eglise.

6. «Que les nations jubilent» (Ps 67).

Au terme de ce siècle - marqué à la fois par un progrès sans précédent et par d'innombrables souffrances humaines - des changements radicaux dans la politique mondiale ont conduit à une responsabilité accrue de l'Amérique qui doit être pour le monde un exemple de société véritablement libre, démocratique, juste et humaine. Le cantique du Livre de l'Apocalypse que nous venons de réciter contient une leçon pour chaque nation puissante. En effet, il se réfère au chant de liberté que Moïse élève après avoir conduit le peuple à travers la Mer Rouge, les sauvant de la colère du Pharaon. Toute l'histoire du salut doit être lue dans la perspective de cet exode: Dieu se révèle lui-même dans ses actions pour défendre les humbles de la terre et libérer les opprimés.

De la même façon, Marie, la Mère du Rédempteur, nous donne dans son chant du Magnificat, la clé pour comprendre l'intervention de Dieu dans l'histoire humaine lorsqu'elle dit: le Seigneur «a dispersé les hommes au coeur superbe [...] et a élevé les humbles» (Lc 1,51-52). Nous apprenons de l'histoire du salut que le pouvoir signifie responsabilité: il signifie service, et non privilège. Son exercice est justifié sur le plan moral lorsqu'il est utilisé pour le bien de tous, lorsqu'il est attentif aux besoins des pauvres et des personnes sans défense.

Il y a une autre leçon: Dieu nous a donné une loi morale pour nous guider et nous empêcher de retomber dans l'eclavage du péché et du mensonge. Nous ne sommes pas seuls dans notre responsabilité pour le grand don de la liberté. Les dix Commandements représentent la charte de la véritable liberté pour les individus comme pour la société tout entière.

L'Amérique a d'abord proclamé son indépendance sur la base de vérités morales évidentes. L'Amérique restera un havre de liberté pour le monde aussi longtemps qu'elle sera fidèle à ces vérités morales qui représentent le coeur même de son expérience historique. C'est pourquoi, Amérique: si tu veux la paix, oeuvre pour la justice. Si tu veux la justice, défends la vie. Si tu veux la vie, embrasse la vérité - la vérité révélée par Dieu.

De cette façon, la louange de Dieu, le langage céleste, sera pour toujours sur les lèvres de ce peuple: «Le Seigneur est Dieu, le tout-puissant [...] Venez donc, agenouillons-nous et adorons-le». Amen.



Homélies St Jean-Paul II 626