Homélies St Jean-Paul II 17699

CÉLÉBRATION EUCHARISTIQUE DANS LA CATHÉDRALE DE WAWEL Jeudi 17 juin 1999, Cracovie

17699
«En vérité je vous le dis, dans la mesure où vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait» (
Mt 25,40). Ces paroles du Christ avec lesquelles la liturgie nous introduit aujourd'hui dans le mystère de la mémoire de saint Adalbert, acquièrent une éloquence particulière dans la cathédrale de Wawel. En effet, avec les tombeaux des saints souverains et des héros nationaux, celle-ci recèle l'histoire de l'amour, de cet amour qui fait de la vie pour ses frères un don pour le Christ.

Je rends grâce à la Divine Providence car il m'est donné de me trouver à nouveau auprès de l'autel de la confession de saint Stanislas, pour offrir ici le sacrifice d'action de grâce pour cette communauté ecclésiale, que l'Evêque de Szczepanów a consolidée pendant des millénaires entiers à travers son ministère pastoral et sa mort par le martyre. Dans un certain sens, il donna naissance à cette histoire d'amour pour l'homme et pour le Christ, qui s'accomplit incessament parmi ce peuple. C'est elle qui définit également le calendarium de notre vie, de nos recherches, de notre chemin - individuel et communautaire - vers la rencontre avec le Christ. Je loue Dieu car j'ai pu participer à ce grand patrimoine spirituel, en particulier en tant qu'Evêque de Cracovie, et parce que je peux puiser à cette richesse la force et l'inspiration en tant qu'Evêque de Rome.

Je veux saluer cordialement tous les participants à cette Eucharistie. Il serait difficile de les nommer tous. Ce sont des personnes qui me sont chères, membres du gouvernement, représentants de divers milieux auxquels j'étais lié et qui accomplissent d'importantes fonctions culturelles, scientifiques et sociales dans la vie de la nation.

Je voudrais saluer de façon particulière les séminaristes du grand séminaire de l'archidiocèse de Cracovie, séminaire dont moi aussi je suis issu, même si de façon inhabituelle. Je me réfère à la période de l'occupation et à la période successive. La période du séminaire clandestin. Après, une période de normalisation progressive a suivi et mon activité scientifique liée la Faculté théologique de l'Université jagellone a commencé. Je me réjouis des vocations.

Je suis heureux de votre présence et je remercie Dieu pour le don de la vocation, qu'il vous a donné. Au cours de cette Messe, je veux recommander à Dieu chacun de vous et demander tous les dons de l'Esprit Saint dont vous avez besoin pour veiller à votre vocation, pour l'accomplir avec sagesse et amour dans le sacerdoce, et pour en faire la lumière du monde dans le troisième millénaire. Je vous prie de transmettre mon salut cordial et ma bénédiction à vos frères dans tous les grands séminaires polonais diocésains et religieux.

Je salue cordialement toutes les personnes ici réunies, - toutes celles auxquelles m'unissent depuis des années des liens d'amitié et celles que, peut- être, je ne connais pas personnellement, mais qui m'offrent leur bienveillance. Je les remercie de tout coeur de leur présence, de la communauté que nous formons tous ici réunis autour de ce tombeau, la confession de saint Stanislas, le premier Patron de la Pologne. Loué soit Jésus-Christ!

HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II


Vendredi 29 juin 1999, Solennité des saints Pierre et Paul



1. «Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant! (Mt 16,16).

Pierre, se faisant le porte-parole du groupe des Apôtres, proclame sa foi en Jésus de Nazareth, le Messie attendu, Sauveur du monde. En réponse à sa profession de foi, le Christ lui confie la mission d'être le fondement visible sur lequel s'appuie l'édifice tout entier de la communauté des croyants: «Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise» (Mt 16,18).

Telle est la foi qui, au cours des siècles, s'est diffusée dans le monde entier à travers le ministère et le témoignage des Apôtres et de leurs successeurs. Telle est la foi que nous proclamons aujourd'hui, en faisant mémoire solennelle des Princes des Apôtres, Pierre et Paul. Suivant une antique et vénérable tradition, la Communauté chrétienne de Rome, qui a l'honneur de veiller sur les tombes de ces deux Apôtres, «piliers» de l'Eglise, leur rend un culte au cours d'une unique fête liturgique, et les vénère ensemble comme ses patrons célestes.

715 2. Pierre, le pêcheur de Galilée, fut appelé par Jésus avec son frère André au début de l'activité publique, pour devenir «pêcheur d'hommes» (cf. Mt Mt 4,18-20). Témoin des principaux moments de l'activité publique de Jésus, comme la Transfiguration (cf. Mt Mt 17,1) et la prière dans le jardin des oliviers à l'approche de la Passion (cf. Mt Mt 26,36-37), après les événements de la Pâques, il reçut du Christ le devoir de paître le troupeau de Dieu (cf. Jn 21,15-17) en son nom.

Depuis le jour de la Pentecôte, Pierre gouverne l'Eglise, veillant sur sa fidélité à l'Evangile et guidant ses premiers contacts avec le monde des païens. Son ministère se manifeste, de façon particulière, au cours des moments décisifs qui ponctuent la croissance de l'Eglise apostolique. C'est lui, en effet, qui accueille dans la communauté des croyants le premier converti du paganisme (cf. Ac 10,1-48) et c'est encore lui qui intervient avec autorité dans l'Assemblée de Jérusalem sur le problème de la liberté des obligations dérivant de la loi juive (cf. Ac Ac 15,7-11).

Les mystérieux desseins de la Providence Divine conduiront l'Apôtre Pierre jusqu'à Rome, où il versera son sang comme témoignage suprême de foi et d'amour envers le divin Maître (cf. Jn Jn 21,18-19). Il accomplira ainsi la mission d'être le signe de la fidélité au Christ et de l'unité de tout le Peuple de Dieu.

3. Paul, l'ancien persécuteur de l'Eglise naissante, touché par la grâce de Dieu sur la route de Damas, devient l'inlassable Apôtre des nations. Au cours de ses voyages missionnaires, il ne cessera de prêcher le Christ crucifié et d'attirer à la cause de l'Evangile des groupes de fidèles dans diverses villes de l'Asie et de l'Europe.

Son intense activité n'empêcha pas l'«Apôtre des nations» de mener une vaste réflexion sur le message évangélique, en le confrontant aux diverses situations avec lesquelles il était en contact dans sa prédication.

Le Livre des Actes des Apôtres décrit le long itinéraire qui, de Jérusalem, le conduit d'abord en Syrie et en Asie mineure, puis en Grèce, et enfin à Rome. C'est précisément ici, au coeur du monde alors connu, qu'il couronne par le martyre son témoignage pour le Christ. Comme lui-même l'affirme dans la seconde Lecture qui vient d'être proclamée, la mission qui lui a été confiée par le Seigneur est celle d'apporter le message évangélique aux païens: «Le Seigneur, lui, m'a assisté et m'a rempli de force afin que, par moi, le message fût proclamé et qu'il parvînt aux oreil- les de tous les païens» (2Tm 4,17).

4. Selon une coutume désormais bien établie, en ce jour consacré à la mémoire des Apôtres Pierre et Paul, le Pape impose aux Archevêques métropolitains, nommés au cours de la dernière année, le «Pallium», signe de communion avec le Siège de Pierre.

C'est donc pour moi une grande joie de vous accueillir, bien-aimés Frères dans l'épiscopat, venus à Rome de diverses parties du monde pour cette heureuse circonstance. Avec vous, je désire saluer les communautés chré- tiennes confiées à vos soins pastoraux: elles sont appelées à offrir, sous votre direction éclairée, un témoignage courageux de fidélité au Christ et à son Evangile. Les dons et les charismes de chaque communauté sont une richesse pour tous et confluent en un unique chant de louange à Dieu, source de tout bien. Parmi ces dons, l'un des principaux est certainement celui de l'unité, symbolisé à juste titre aujourd'hui par l'imposition du «Pallium».

5. Le désir d'unité entre les chrétiens est, en outre, souligné par la présence de délégués du Patriarche oecuménique de Constantinople, venus partager la joie de la liturgie d'aujourd'hui et vénérer les Apôtres, patrons de l'Eglise qui est à Rome. Je leur adresse mon salut respectueux et, à travers eux, je salue le Patriarche oecuménique Bartholomaios Ier. Que les Apôtres Pierre, Paul et André, qui ont été des instruments de communion entre les premières communautés chrétiennes, soutiennent à travers leur exemple et leur intercession le chemin de tous les disciples du Christ vers la pleine unité.

L'approche du Jubilé de l'An 2000 nous invite à faire nôtre la prière pour l'unité (Jn 17,20-23) adressée par Jésus à la veille de sa Passion. Nous sommes appelés à accompagner notre prière de signes concrets qui favorisent le chemin des chrétiens vers la pleine communion. Pour cette raison, j'ai demandé que dans le calendrier de l'An 2000 soit introduite à la veille de la fête de la Transfiguration, selon la proposition de Sa Sainteté Bartholomaios Ier, une journée de prière et de jeûne jubilaire. Cette initiative constituera une expression concrète de notre volonté de nous unir aux initiatives de nos frères des Eglises orthodoxes et, dans le même temps, du désir qu'ils prennent part aux nôtres.

Que le Seigneur, à travers l'intercession des Apôtres Pierre et Paul, veuille faire en sorte que s'intensifie dans le coeur des croyants l'engagement oecuménique afin que, oubliant les erreurs commises par le passé, tous atteignent la pleine unité voulue par Jésus.

716 6. «Béni le Seigneur qui libère ses amis» (Refrain du psaume responsorial). Au cours de leur mission apostolique, les saints Pierre et Paul ont dû affronter des difficultés de tout genre. Celles-ci, toutefois, loin d'affaiblir leur action missionnaire, ont renforcé leur zèle au bénéfice de l'Eglise et pour le salut des hommes. Ils ont pu surmonter toutes les épreuves, car leur confiance reposait non pas dans les ressources humaines, mais dans la grâce du Seigneur, qui, comme le rappellent les Lectures de la solennité d'aujourd'hui, libèrent ses amis de tout mal et les sauve pour son Royaume (cf. Ac Ac 12,11 1Tm 4,18).

C'est la même confiance en Dieu qui doit également nous soutenir. Oui, le «Seigneur libère ses amis». Cette conscience doit nous rendre courageux face aux difficultés que l'on rencontre quotidiennement dans l'annonce de l'Evangile. Que nous soutiennent les saints Patrons Pierre et Paul, et qu'ils nous obtiennent cette ardeur missionnaire qui fit d'eux les témoins du Christ jusqu'aux extrémités du monde alors connu.

Priez pour nous, saints Apôtres Pierre et Paul, «piliers» de l'Eglise de Dieu!

Et toi, Reine des Apôtres que Rome vénère sous le beau titre de «Salus populi romani», accueilles sous ta protection le peuple chrétien en chemin vers le troisième millénaire. Soutiens chaque effort sincère visant à promou- voir l'unité des chrétiens et veille sur le chemin des disciples de ton Fils Jésus. Amen!

DÉDICACE DU NOUVEAU SANCTUAIRE DE LA MADONE DU DIVIN AMOUR

HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II

Dimanche 4 juillet 1999



1. «Ce jour est saint pour notre Seigneur» (Ne 8,10).

Les paroles que nous avons enten- dues au cours de la première Lecture s'adaptent bien au moment que nous sommes en train de vivre dans ce Sanctuaire du Divin Amour, si cher aux habitants de Rome et du Latium. Oui, ce jour est saint pour Dieu, et c'est pour- quoi il s'agit d'un jour particulièrement empli de fête et de joie. Le Seigneur nous a rassemblés dans sa maison pour nous faire ressentir de façon plus intense le don de sa présence. Comme le peuple juif, nous aussi, suivant le récit de Néhémie, nous accueillons sa parole par l'acclamation «Amen!, amen!» et nous nous prosternons de tout notre coeur devant lui, en manifestant une profonde adhésion à sa volonté.

Nous aussi, nous répétons avec le Psaume responsorial: «Tes paroles, Seigneur, sont esprit et vie»!

La parole de Dieu illumine le rite de dédicace de ce nouveau temple marial, où les fidèles, qui se rassembleront ici en prière, en particulier au cours du grand Jubilé, seront aidés à s'ouvrir à l'action rénovatrice de l'Esprit.

Tout, dans ce lieu, doit donc prédisposer à rencontrer le Seigneur; tout doit encourager les croyants à proclamer leur foi dans le Christ, hier, aujourd'hui et à jamais.

2. «Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant» (Mt 16,16).

717 Telle est la profession de foi de l'Apôtre Pierre, que nous avons écoutée dans la page de l'Evangile d'aujourd'hui. Jésus répond à Pierre, en lui confiant la tâche de soutenir tout l'édifice spirituel de son Eglise: «Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise» (Mt 16,18).

Le temple dans lequel nous nous trouvons et qui est à présent consacré au culte, est le signe de cette autre Eglise, faite de pierres vivantes, qui sont les croyants dans le Christ, admirablement unis par le «ciment» spirituel de la charité. A travers l'action de l'Esprit Saint, les dons et les charismes de chaque membre de la communauté ec- clésiale n'entravent pas mais, au contraire, enrichissent l'harmonie de l'unique construction spirituelle du Corps du Christ. Ainsi, le temple maté- riel exprime la communion intérieure de ceux qui se rassemblent ici pour qu'on leur enseigne la Parole de Dieu, comme nous l'a rappelé la première Lecture: «Tout le peuple tendait l'oreille au livre de la Loi» (Ne 8,3). Ici, les fidèles recevront les Sacrements - en particulier le Sacrement de la Réconciliation et celui de l'Eucharistie - et ils pourront exprimer avec davantage d'intensité leur dévotion à la Madone du Divin Amour.

3. «La joie de Yahvé est votre forteresse» (Ne 8,10).

C'est ainsi que Néhémie saluait l'assemblée des Israélites réunis en un seul lieu pour renouveler l'Alliance avec Dieu. Avec ces mêmes paroles, je désire aujourd'hui vous saluer, vous tous qui êtes ici rassemblés dans ce sanctuaire marial.

Très chers frères et soeurs, je vous remercie de votre présence si nombreuse. Je salue avec affection le Cardinal-Vicaire, auquel va ma reconnaissance pour les sentiments qu'il m'a exprimés au début de la célébration. Je salue également les évêques, les prêtres et les recteurs des autres sanctuaires marials ici présents. Je salue le Recteur-curé du Sanctuaire, Dom Pasquale Silla, qui a tant fait pour que ce jour arrive, et tous les fils et filles de la Madone du Divin Amour, qui gardent ces lieux avec un grand soin. Ils poursuivent l'oeuvre méritoire de leur fondateur, Dom Umberto Terenzi, qui avec tenacité voulut construire ici une nouvelle maison pour la Sainte Vierge, celle que nous consacrons précisément aujourd'hui. Une pensée spéciale s'adresse aux paroissiens de ce Sanctuaire-Paroisse, témoins directs de la façon dont le peuple romain aime la Madone du Divin Amour et vient souvent lui rendre visite en pèlerinage, comptant sur son intercession.

Enfin, je salue les concepteurs et les réalisateurs de cette oeuvre: le Père Costantino Ruggeri et l'architecte Luigi Leoni, ainsi que tous les bienfaiteurs, les entreprises et les ouvriers.

4. Avec la dédicace de ce nouveau Sanctuaire est aujourd'hui partiellement accompli un voeu que les Romains, invités par le Pape Pie XII, firent à la Madone du Divin Amour en 1944, lorsque les troupes alliées allaient lancer une attaque décisive sur Rome occupée par les Allemands. Devant l'image de la Madone du Divin Amour, le 4 juin de cette même année, les Romains invoquèrent le salut de Rome, en promettant à Marie de redresser leur conduite morale, de construire le nouveau Sanctuaire du Divin Amour et de réaliser une oeuvre de charité à Castel di Leva. Ce même jour, un peu plus d'une heure après la lecture du voeu, l'armée allemande abandonna Rome sans opposer de résistance, alors que les forces alliées entraient par la Porta San Giovanni et la Porta Maggiore, accueillies par le peuple romain avec de grandes manifestations de joie.

Aujourd'hui, le Sanctuaire est devenu une réalité et l'oeuvre de charité va bientôt être terminée: il s'agit d'une maison pour personnes âgées, non loin d'ici. Mais le voeu des Romains comprenait une promesse à la Très Sainte Vierge qui ne connaît pas de fin et qui est beaucoup plus difficile à réaliser: le redressement de la conduite morale, c'est-à-dire l'engagement constant à renouveler la vie et à la rendre toujours plus conforme à celle du Christ. Très chers frères et soeurs, telle est la tâche que nous rappelle l'édifice sacré qui est aujourd'hui consacré à Dieu.

Ces murs qui ceignent l'espace sacré dans lequel nous sommes rassemblés et, encore davantage, l'autel, les grands vitraux polychromes et les autres symboles religieux se présentent comme des signes de la présence de Dieu parmi son peuple. Une présence qui se manifeste de manière réelle dans l'Eucharistie, célébrée chaque jour et conservée dans le Tabernacle; une présence qui se révèle vivante et vivifiante dans l'administration des Sacrements; une présence dont on pourra sans cesse faire l'expérience dans la prière et le recueillement. Que cette présence soit pour tous un rappel constant à la conversion et à la réconciliation fraternelle!

5. Viens, que je te montre la fiancée, l'Epouse de l'Agneau [...] avec en elle la gloire de Dieu» (Ap 21,9-10).

La grande vision de la Jérusalem céleste, qui clôt le Livre de l'Apocalypse, nous invite à élever le regard de la beauté et de l'harmonie architecturale de ce nouveau temple et à le porter vers la splendeur de l'Eglise céleste, plénitude de l'amour et de la communion avec la Très Sainte Trinité, à laquelle tend toute l'histoire du salut depuis son début.

718 Comme l'affirme le Concile Vatican II, Marie représente l'image et les prémices de la Jérusalem céleste, vers laquelle nous nous acheminons. «Tout comme dans le ciel où elle est déjà glorifiée corps et âme, la Mère de Jésus représente et inaugure l'Eglise en son achèvement dans le siècle futur, de même sur cette terre elle brille déjà comme un signe d'espérance assurée et de consolation devant le peuple de Dieu en pèlerinage» (Lumen gentium LG 68).

Nous tournons nos coeurs pleins de confiance vers Marie et nous invoquons sa protection maternelle sur tous.

A Toi, Mère du Divin Amour, nous confions la communauté diocésaine, la poursuite de la Mission dans la Ville qui s'est terminée il y a quelques semaines, ainsi que cette bien-aimée ville de Rome avec ses problèmes et ses ressources, ses inquiétudes et ses espérances.

A Toi, nous confions les familles, les malades, les personnes âgées et les personnes seules. Nous déposons entre tes mains les fruits de l'Année Sainte et, de façon particulière, les attentes et les espérances des jeunes qui, au cours du Jubilé, viendront à Rome pour la XV e Journée mondiale de la Jeunesse.

Enfin, à Toi, nous confions la requête que je T'ai déjà adressée à l'occasion de ma première visite à ce Sanctuaire: que, par ton intercession, se multiplie le nombre des ouvriers à la moisson du Seigneur et que la jeunesse sache apprécier, dans toute sa beauté, le don de l'appel au sacerdoce et à la vie religieuse, dont le monde a aujourd'hui grand besoin.

Amen!

JEAN-PAUL II

HOMÉLIE

15 Août 1999



1. "Magnificat anima mea Dominum" (Lc 1,46)!

L'Eglise en pèlerinage dans l'histoire s'unit aujourd'hui au cantique d'exultation de la Bienheureuse Vierge Marie; il exprime sa joie et loue Dieu car la Mère du Seigneur entre triomphante dans la gloire du ciel. Dans le mystère de son Assomption, apparaît la signification accomplie et définitive des paroles qu'elle-même prononça à Ain-Karin, en répondant au salut d'Elisabeth: "le Tout-Puissant a fait pour moi de grandes choses" (Lc 1,49).

Grâce à la victoire pascale de la mort sur le Christ, la Vierge de Nazareth, profondément unie au mystère du Fils de Dieu, en a partagé de façon particulière les effets salvifiques. Elle a répondu pleinement à travers son "oui" à la volonté divine, elle a participé de façon intime à la mission du Christ, et est entrée la première après Lui dans la gloire, corps et âme, dans l'intégralité de son être humain.

Le "oui" de Marie est une joie pour ceux qui étaient dans les ténèbres et dans l'ombre de la mort. En effet, à travers Elle, le Seigneur de la vie est venu au monde. Les croyants exultent et la vénèrent comme Mère des Fils rachetés par le Christ. Aujourd'hui en particulier, nous La contemplons comme "signe de réconfort et d'espérance certaine" (Préface) pour chaque homme et pour chaque peuple en chemin vers la Patrie éternelle.

719 Très chers frères et soeurs, tournons notre regard vers la Vierge, que la Liturgie nous fait invoquer comme Celle qui brise les liens des opprimés, rend la lumière aux aveugles, éloigne tout mal de nous et demande pour nous tout bien (cf. Hymne des Secondes Vêpres).

2. "Magnificat anima mea Dominum"! La communauté ecclésiale renouvelle en la solennité d'aujourd'hui le cantique d'action de grâce de Marie: il le fait comme Peuple de Dieu et demande à chaque croyant de s'unir au choeur de louange envers le Seigneur. C'est ce à quoi saint Ambroise exhortait déjà dès les premiers siècles: "Qu'en chacun l'âme de Marie magnifie le Seigneur, qu'en chacun, l'esprit de Marie exulte en Dieu" (S. Ambroise, Exp. Ev. Luc., II, 26). Les paroles du Magnificat sont comme le testament spirituel de la Vierge Marie. C'est donc à juste titre qu'elles constituent l'héritage de ceux qui, se reconnaissant leur fils, décident de l'accueillir dans leur maison, comme le fit l'Apôtre Jean, qui la reçut comme Mère directement de Jésus, au pied de la croix (cf. Jn
Jn 19,27).

3. "Signum magnum paruit in caelo" (Ap 12,1). La page de l'Apocalypse, qui vient d'être proclamée, en présentant le "signe grandiose" de la femme "que le soleil enveloppe" (Ap 12,1), affirme qu'elle "est enceinte et crie dans les douleurs et le travail de l'enfantement" (Ap 12,2). Marie également, comme nous l'avons écouté dans l'Evangile, lorsqu'elle part aider sa cousine Elisabeth, porte dans son sein le Sauveur, conçu par l'opération du Saint-Esprit.

Les deux figures de Marie, celle historique décrite dans l'Evangile et celle cachée dans le Livre de l'Apocalypse, symbolisent l'Eglise. Le fait que la grossesse, comme ensuite l'accouchement, les pièges du dragon et l'enlèvement du nouveau-né "jusqu'auprès de Dieu et de son trône" (Ap 12,4-5), appartiennent également à l'Eglise "céleste" contemplée dans la vision de l'Apôtre Jean, est assez éloquent, et, en la solennité d'aujourd'hui, représente un motif de profonde réflexion. Comme le Christ ressuscité et monté au ciel porte toujours en lui, dans son corps glorieux et dans son coeur miséricordieux, les plaies de la mort rédemp-trice, de même, sa Mère porte dans l'éternité "les douleurs et le travail de l'enfantement" (Ap 12,2).

Et de même que le Fils, à travers sa mort, ne cesse de racheter ceux qui sont engendrés par Dieu comme fils adoptifs, ainsi, la nouvelle Eve continue, de génération en génération, à mettre au monde l'homme nouveau, "créé selon Dieu, dans la justice et la sainteté de la vérité" (Ep 4,24). Il s'agit de la maternité eschatologique de l'Eglise, présente et agissante dans la Vierge.

4. Dans le moment historique présent, au terme d'un millénaire et à l'horizon d'une nouvelle ère, cette dimension du mystère de Marie apparaît plus que jamais significative. La Madone, élevée parmi les saints dans la gloire de Dieu, est un signe certain d'espérance pour l'Eglise et pour l'humanité tout entière.

La gloire de la Mère est un motif de joie immense pour tous ses fils, une joie qui connaît les vastes retentissements du sentiment, typiques de la piété populaire, même si elle ne se réduit pas à elles. Il s'agit d'une joie, pour ainsi dire théologale, solidement fondée sur le mystère pascal. En ce sens, la Vierge est "causa nostrae laetitiae - cause de notre joie".

Elevée au ciel, Marie indique la voie de Dieu, la voie du Ciel, la voie de la Vie. Elle l'indique à ses fils baptisés dans le Christ et à tous les hommes de bonne volonté. Elle l'ouvre en particulier aux petits et aux pauvres, les préférés de la miséricorde divine. Aux individus et aux nations, la Reine du monde dévoile la puissance d'amour de Dieu, dont les desseins dispersent ceux des hommes au coeur superbe, renversent les potentats et élèvent les humbles, comblent de bien les affamés et renvoient les riches les mains vides (cf. Lc Lc 1,51-53).

5. "Magnificat anima mea Dominum"! Dans cette perspective, la Vierge du Magnificat nous aide à mieux comprendre la valeur et le sens du grand Jubilé désormais imminent, temps propice au cours duquel l'Eglise universelle s'unira à son cantique pour louer l'admirable oeuvre de l'Incarnation. L'esprit du Magnificat est l'esprit du Jubilé: dans le cantique prophétique, en effet, Marie donne voix à la joie qui emplit son coeur, car Dieu, son Sauveur, a jeté les yeux sur l'abaissement de sa servante (cf. Lc Lc 1,47-48).

Que l'esprit de l'Eglise et de chaque chrétien soit également semblable. Prions afin que le grand Jubilé soit tout un Magnificat, qui unit la terre et le ciel en un cantique de louange et d'action de grâce. Amen!



VOYAGE DU PAPE EN SLOVÉNIE - CÉRÉMONIE DE BÉATIFICATION

DU SERVITEUR DE DIEU ANTON MARTIN SLOMSEK

HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II

Dimanche 19 septembre 1999



720 1. «Faisons l'éloge des hommes illustres... Les peuples proclameront leur sagesse, l'assemblée célébrera leurs louanges» (Si 44,1 Si 44,14-15).

Ces paroles de l'Ecclésiastique ont retenti aujourd'hui au cours de notre assemblée. En les écoutant, nous avons spontanément pensé aux personnes qui, au sein de ce peuple slovène, se sont distinguées par leur vertus: nous avons pensé, par exemple, aux évêques Friederik Baraga, Janez Gnidovec et Anton Vovk, au Père Vendelin Voýnjak et au jeune Lojze Grozde.

Nous avons pensé, en particulier, à celui que l'Eglise proclame aujourd'hui bienheureux: l'Evêque de Maribor, Anton Martin Slomýek, premier fils de cette nation slovène a être élevé à la gloire des autels. Trois ans après ma première visite, je reviens aujourd'hui parmi vous pour vous proposer à travers Lui un modèle de cette sainteté que je vous ai indiqué à l'époque comme l'unique force qui vainc le monde. C'est pourquoi, je suis heureux de vous rencontrer et de présider cette Messe solennelle.

Je salue Mgr Franc Kramberger, pas- teur de cette Eglise et je le remercie des paroles qu'il m'a adressées. Je salue en outre les cardinaux, les évêques slovènes et les autres évêques, qui concélèbrent cette solennelle Eucharistie. Mon salut s'étend ensuite au clergé, aux religieux et aux religieuses, ainsi qu'à vous tous, très chers fidèles de cette illustre Eglise et des Eglises proches, réunis ici pour rendre hommage au nouveau bienheureux.

J'adresse un salut respectueux au Président de la République et aux Autorités civiles qui ont voulu nous honorer de leur présence, rendant ainsi cette célébration plus solennelle.

2. L'Evangile d'aujourd'hui, qui parle de la vigne et des sarments, nous rappelle que ce n'est qu'en restant unis au Christ que l'on peut porter du fruit. Jésus nous indique ainsi le secret de la sainteté de Mgr Anton Martin Slomýek, que j'ai aujourd'hui la joie de proclamer bienheureux. Il a été un sarment qui a porté des fruits abondants de sainteté chrétienne, de singulière richesse culturelle et de profond amour pour la patrie. C'est pourquoi, il se présente aujourd'hui devant nous comme un exemple splendide de réalisation concrète de l'Evangile.

Chez le nouveau bienheureux resplendissent tout d'abord les valeurs de la sainteté chrétienne. Sur les traces du Christ il devint le bon Samaritain du peuple slovène. Attentif aux exigences de la formation du clergé et des fidèles, avec un zèle apostolique qui constitue encore aujourd'hui un exemple pour nous, il ne se lassa pas d'évangéliser en animant les missions populaires, suscitant de nombreuses confréries, prêchant des exercices spirituels et diffusant des chants populaires et des écrits religieux. Il fut, au sens le plus authentique de l'expression, un pasteur catholique, auquel ses supérieurs ecclésiastiques confièrent d'importantes tâches pastorales, également dans d'autres régions de l'Etat de l'époque.

Fidèle et docile à l'Eglise, Anton Martin Slomýek se révéla profondément ouvert à l'oecuménisme et fut l'un des premiers en Europe centrale à s'engager pour l'unité des chrétiens. Puisse son aspiration à l'unité stimuler l'engagement oecuménique, afin que les chrétiens de cette Europe qui lui fut chère arrivent à franchir le seuil du troisième millénaire «sinon totalement unis, du moins beaucoup plus près de surmonter les divisions du deuxième millénaire» (Tertio millennio adveniente TMA 34).

3. Le nouveau bienheureux porta également une grande attention à la culture. Ayant vécu vers le milieu du siècle dernier, il était parfaitement conscient de l'importance que possédait la formation intellectuelle des personnes, en particulier des jeunes, pour l'avenir de la nation. C'est pourquoi, il unit à l'action pastorale l'engagement pour la promotion de la culture, qui est la richesse d'une nation et le patrimoine de tous. La culture constitue l'humus dont un peuple peut tirer les éléments nécessaires à sa propre croissance et à son propre développement.

Convaincu de cela, Slomýek se prodigua pour ouvrir diverses écoles en faveur de la jeunesse et il rendit possible la publication de livres utiles pour la formation humaine et spirituelle. Il affirmait que si les jeunes sont corrompus, la faute est souvent due à l'absence d'une formation adéquate. La famille, l'école et l'Eglise - enseignait-il - doivent unir leurs efforts en vue d'établir un sérieux programme d'éducation, chacune conservant sa propre sphère d'autonomie, mais toutes tenant compte des valeurs communes.

Ce n'est qu'avec une solide formation que l'on prépare des femmes et des hommes capables de construire un monde ouvert aux valeurs éternelles de la vérité et de l'amour.

721 4. Le nouveau bienheureux fut également animé par de profonds sentiments d'amour pour la patrie. Il eut soin de la langue slovène, il sollicita des réformes sociales opportunes, il promut l'élévation culturelle de la nation, il se prodigua de toutes les façons possibles afin que son peuple puisse occuper une place honorable dans le concert des autres nations européennes. Et il le fit sans jamais céder à des sentiments de nationalisme aveugle ou d'opposition égoïste à l'égard des aspirations des peuples voisins.

Le nouveau bienheureux se présente à vous comme un modèle de patriotisme authentique. Ses initiatives ont marqué de façon déterminante l'avenir de votre peuple et on apporté une contribution importante à l'obtention de votre indépendance. En tournant le regard vers la bien-aimée région des Balkans, malheureusement marquée ces dernières années par des luttes et des violences, par des nationalismes exacerbés, par de monstrueuses purifications ethniques et par des guerres entre peuples et cultures, je voudrais indiquer à tous le témoignage du nouveau bienheureux. Il montre qu'il est possible d'être des patriotes sincères et avec une égale sincérité de vivre ensemble et de collaborer avec des personnes d'autres nationalités, d'autres cultures, d'autres religions. Puisse son exemple et surtout son intercession obtenir la solidarité et la paix authentique pour tous les peuples de cette vaste zone de l'Europe.

5. Très chers frères et soeurs de la bien-aimée Slovénie! Suivez les traces de votre compatriote honnête et généreux, qui aspirait à connaître la volonté de Dieu et à l'accomplir à tout prix. Sa fermeté intérieure et son optimisme évangélique étaient enracinés dans une solide foi dans la victoire du Christ sur le péché et sur le mal.

Imitez-le, en particulier vous, chers jeunes slovènes, et comme lui n'hésitez pas à consacrer vos jeunes énergies au service du Royaume de Dieu et de vos frères. Pour vous les prêtres, qu'il soit le modèle d'une activité zélée et de l'esprit de sacrifice. Pour vous, laïcs responsables, en particulier ceux qui travaillent dans les institutions publiques, qu'il soit un exemple d'honnêteté, de service désintéressé, de recherche courageuse de la justice et du bien commun.

Soyez des constructeurs de paix également au sein de l'Europe! Le processus d'unification dans lequel le continent est engagé ne peut pas seulement se fonder sur des intérêts économiques, mais doit tirer son inspiration des valeurs chrétiennes dans lesquelles naissent ses racines les plus anciennes et authentiques. Une Europe attentive à l'homme et au plein respect de ses droits, voilà le but vers lequel diriger les efforts! Puisse la vieille Europe transmettre aux nouvelles générations le flambeau de la civilisation humaine et chrétienne qui a illuminé les pas de nos ancêtres au cours du millénaire qui se termine.

6. Dans cette perspective, j'invite chacun à prier pour la prochaine Assemblée du Synode des Evêques, qui se rassemblera dans quelques jours pour réfléchir sur le Christ, vivant dans l'Eglise, source d'espérance pour l'Europe. Il s'agit d'une occasion importante pour approfondir la mission particulière des peuples européens dans le contexte des relations mondiales. Une Europe, maîtresse de civilisation, qui sait valoriser les ressources qui proviennent de l'Occident et de l'Orient.

J'ai plaisir à répéter ici les paroles prophétiques que Slomýek prononça au cours d'une mission populaire: «On dit: "le monde a vieilli, le genre humain va à la dérive, l'Europe s'approche de sa fin". Et bien: oui, si nous abandonnons l'humanité à son chemin naturel, à son orientation fatale; non, si la force qui provient d'en haut, qui est conservée dans la religion de Jésus, dans son Eglise, se répand à nouveau dans tous les milieux du genre humain et leur redonne la vie».

Nous héritons cette importante leçon du bienheureux Slomýek. Que lui, qui fut un courageux serviteur du Christ, nous aide à être des sarments de vie immortelle, qui diffusent partout l'Evangile de l'espérance et de l'amour. Amen!
CÉLÉBRATION EUCHARISTIQUE POUR L'OUVERTURE DE LA IIème ASSEMBLÉE SPÉCIALE POUR L'EUROPE DU SYNODE DES ÉVÊQUES



Homélies St Jean-Paul II 17699