Homéliaire patristique 24


Semaine sainte A

Dimanche des Rameaux et de la Passion A

25 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 21,1-11)

Quelques jours avant la fête de la Pâque, Jésus et ses disciples, approchant de Jérusalem, arrivèrent à Bethphage, sur les pentes du mont des Oliviers.

Homélie

Le roi d'humilité

Homélie de Grégoire Palamas (+ 1359)

Homélies, 15; PG 151, 184-195.

Le simple peuple, voyant tous les miracles du Christ, crut en lui, non seulement en ayant envers lui une foi silencieuse, mais aussi en proclamant sa divinité en actions et en paroles. Car, après avoir réveillé Lazare d'un sommeil de quatre jours, Jésus prit un âne que ses disciples lui avaient amené, selon la narration de l'évangéliste Matthieu, le monta et entra ainsi à Jérusalem selon la prophétie de Zacharie: Ne crains pas, fille de Sion, voici ton roi qui vient à toi, le juste, le Sauveur; il est humble et monté sur un âne, le petit d'une ânesse (Za 9,9). Par ces paroles le prophète montre que le roi ainsi prédit était ce roi qui seul est appelé à juste titre "roi de Sion". Car il veut dire: Ton roi ne doit pas inspirer la crainte par son aspect, il ne doit être ni sévère ni cruel, il n'a pas de gardes du corps ni d'escorte, il n'entraîne pas derrière lui une foule de fantassins ni de cavaliers. Il n'agit pas avec rapacité, n'exige pas des impôts ni des taxes, ni des services ou des fonctions non moins viles que nuisibles. Mais ses attributs sont l'humilité, la pauvreté, la modestie. Il fait son entrée sur un âne, sans déployer aucune escorte humaine. C'est pourquoi lui seul est le roi juste qui sauve dans l'équité, et qui est doux en même temps, car la douceur est ce qui le caractérise.

Aussi le Seigneur a-t-il dit de lui-même: Apprenez de moi que je suis doux et humble de coeur (Mt 11,29).

Lui donc, qui avait ressuscité Lazare, ce roi trônant sur un âne, fait ainsi son entrée dans Jérusalem. Et toute la foule, presque tous les enfants, les hommes, les vieillards, étendant leurs vêtements et prenant des branches de palmier, qui sont l'insigne de la victoire, sont venus au-devant de lui comme vers l'auteur de la vie et le vainqueur de la mort, devant qui ils se prosternaient, et qu'ils escortaient non seulement au-dehors mais au-dedans des remparts de la ville, chantant d'une seule voix: Hosanna au Fils de David! Hosanna au plus haut des cieux (Mt 21,9)! Cet hosanna est un hymne adressé à Dieu. Il se traduit: "Sauve-nous, Seigneur!" Ce qu'on ajoute: au plus haut des cieux, montre qu'il n'est pas célébré seulement sur terre ni seulement par les hommes, mais dans les cieux et par les choeurs des anges.

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, pour montrer au genre humain quel abaissement il doit imiter, tu as voulu que notre Sauveur, dans un corps semblable au nôtre, subisse la mort de la croix: accorde-nous cette grâce de retenir les enseignements de sa passion et d'avoir part à sa résurrection. Lui qui règne.


Jeudi saint A

26 Le Jeudi saint, aux Vigiles célébrées le matin, il n'y a pas de lecture d'évangile. On a cependant cru rendre service en proposant une homélie pour nourrir la méditation de ce jour-là.

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (
Jn 13,1-15)

Avant la fête de la Pâque, sachant que l'heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu'au bout.

Homélie

Le Dieu qui s'abaisse

Homélie de Sévérien de Gabala (+ vers 400)

Homélie sur le lavement des pieds, publiée par A. wenger, dans Revue des Études byzantines, 1967, pp. 227-229.

Le monde visible proclame la bonté de Dieu, mais rien ne la proclame aussi clairement que la venue de Dieu parmi les hommes. Ainsi, celui qui était dans la condition de Dieu a pris la condition de serviteur. Il n'a pas rabaissé sa dignité, mais magnifié son amour pour les hommes. Et le mystère redoutable qui s'accomplit aujourd'hui nous fait voir les conséquences de cet abaissement. Mais de quel événement faisons-nous mémoire aujourd'hui? Le Sauveur a lavé les pieds de ses disciples. <>

Vraiment, en assumant tous les traits de notre humanité, le Maître de l'univers a revêtu la condition de serviteur, et il l'a fait d'une manière très caractéristique de l'action de Dieu dans l'Incarnation, lorsqu'il se leva de table (cf. Jn 13,4). Celui qui pourvoit à la subsistance de tous les êtres sous le ciel était assis à table parmi ses Apôtres, le Maître parmi les esclaves, la source de la sagesse parmi les ignorants, le Verbe parmi des hommes sans instruction, l'auteur de la sagesse parmi des illettrés. Celui qui donne à tous leur nourriture prenait sa nourriture à la même table que ses disciples, et celui qui procure la subsistance à l'univers recevait lui-même sa subsistance.

Et il ne se contenta pas de faire à ses serviteurs l'immense faveur de se mettre à table avec eux. Pierre, Matthieu et Philippe, hommes de cette terre, étaient à table avec lui: Michel, Gabriel et toute l'armée des anges se tenaient à ses côtés. Combien cela est admirable! Les anges se tenaient près de lui avec crainte, les disciples étaient à table avec lui dans la plus grande familiarité.

Et cette merveille ne lui suffit pas, mais, dit l'évangile, il se leva de table. Celui qui est drapé du manteau de la lumière (Ps 103,2) était revêtu d'un manteau; celui qui ceint le ciel de nuées se noua un linge à la ceinture; celui qui fait couler l'eau des lacs et des fleuves versa de l'eau dans un bassin. Lui, devant qui tout s'agenouille aux cieux, sur terre et dans l'abîme, lava, à genoux, les pieds de ses disciples.

Le Seigneur de l'univers lava les pieds de ses disciples. Il n'offensa pas sa dignité, mais montra son immense amour pour les hommes. Pourtant, quelque immense que fût cet amour, Pierre n'oublia pas la majesté du Seigneur. Aussi bien, l'homme que son ardeur portait toujours à croire, fut également prompt à reconnaître l'exacte vérité. Les autres disciples, non par indifférence mais par crainte, laissèrent le Seigneur leur laver les pieds, et ne trouvèrent rien à redire. Mais le respect empêcha Pierre de le laisser faire, et il dit: Toi, Seigneur, tu veux me laver les pieds! Tu ne me laveras pas les pieds; non, jamais! (Jn 13,8).

Pierre parla avec beaucoup de rudesse. Il jugeait bien, mais, ignorant la façon dont Dieu agit, c'est par esprit de foi qu'il refusa; puis il obéit de bon coeur. Vraiment, le fidèle chrétien doit se comporter ainsi; il ne doit pas s'obstiner dans ses décisions, mais céder à la volonté de Dieu. Car, si Pierre a exprimé son opinion d'une manière tout humaine, il s'est repenti par amour de Dieu.

Quand le Sauveur constata la résistance tenace de son âme, résistance plus forte que n'importe quelle enclume, il lui dit: Amen, je te le dis: Si je ne te lave pas, tu n'auras point de part avec moi (Jn 13,8). Considère attentivement combien l'affaire était grave, et comment le Sauveur brisa la résistance de Pierre. Se montrant plus rude que lui, il le rabroua d'un ton cassant; il exclut Pierre de sa compagnie pour faire triompher la volonté de Dieu sur l'obstination humaine.

Dès lors, Pierre, l'homme bon et admirable, prompt à exprimer son opinion, fut également prompt à se repentir. Ayant senti la dureté des paroles qui lui étaient adressées, il se montra absolu dans son repentir, et dit: Pas seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête (Jn 13,9). Purifie-moi tout entier, lave-moi complètement, afin que je puisse dire aussi avec David: Lave-moi, je serai blanc plus que neige (Ps 50,9). Mais le Sauveur lui répondit: Celui qui vient de se baigner n'a besoin que de se laver les pieds (Jn 13,10).

Et pourquoi leur a-t-il lavé uniquement les pieds? C'est en raison des voyages que devaient faire les Apôtres. En lavant leurs pieds, non seulement il les a nettoyés, mais il a encore affermi les pas des saints. Cette belle ablution des pieds, Isaïe l'avait vue bien des siècles auparavant. Sachant qu'elle n'était pas une ablution humaine mais une divine purification, il avait proclamé d'une voix éclatante: Qu'ils sont beaux, les pieds des messagers de la bonne nouvelle, des messagers de paix (Is 52,7)! Le Sauveur a touché leurs pieds, faits de limon, pour les rendre forts, car ils devaient parcourir toute la terre qui est sous le ciel.

Prière

Dieu qu'il est juste d'aimer par-dessus tout, multiplie en nous les dons de ta grâce; dans la mort de ton Fils, tu nous fais espérer ce que nous croyons; accorde-nous, par sa résurrection, d'atteindre ce que nous espérons. Par Jésus Christ.


Vendredi saint A

27 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 27,1-2 Mt 27,11-56)

Le matin venu, tous les chefs des prêtres et les anciens du peuple tinrent conseil contre Jésus pour le faire condamner à mort.

Homélie

Être crucifié avec le Christ

Homélie de saint Cyrille d'Alexandrie (+ 444)

Commentaire sur l'évangile de Jean, 12, 19; PG 74, 650-654.

Ils se saisirent de Jésus et l'emmenèrent. Portant lui-même sa croix, il sortit en direction du lieu dit en hébreu: Golgotha, nom qui se traduit "Calvaire". Là, ils le crucifièrent (Jn 19,16-18).

Ils conduisent à la mort celui qui est l'auteur de la vie. Et cela se faisait pour nous, par sa passion, d'une façon toute contraire à ce que les Juifs avaient imaginé; par la puissance divine et selon un plan qui dépasse notre esprit, Jésus, d'une certaine manière, prenait au piège la puissance de la mort; et la mort du Seigneur était le début et le principe du retour à une vie nouvelle et incorruptible.

Le Christ s'avance en portant sur ses épaules le bois sur lequel il devait être fixé, comme condamné à la peine capitale, bien que parfaitement innocent, et cela à cause de nous. Comme dit saint Paul: Il est devenu objet de malédiction pour nous sauver, car l'Ecriture déclare: Maudit soit celui qui est pendu au bois (Ga 3,13). Et nous sommes tous maudits, nous qui refusons d'accomplir la loi divine. <>

Celui qui n'a pas connu le péché a été maudit à cause de nous, pour nous délivrer de la vieille malédiction. Il suffisait en effet qu'un seul souffrît pour nous tous, celui qui est Dieu, au-dessus de tous, et qu'il rachetât, par la mort de sa chair, le salut de tous. C'est pourquoi le Christ porte cette croix, qu'il n'a aucunement méritée, mais qui nous était due, si nous considérons la condamnation de la Loi. Car il est allé chez les morts non pour lui-même, mais pour nous, afin de se montrer notre guide vers la vie éternelle, ayant détruit par lui-même la domination de la mort. Et de même il a pris sur lui la croix que nous méritions, condamnant en lui-même la condamnation qui venait de la Loi, afin que désormais toute injustice ferme sa bouche (Ps 106,42), comme chante le Psaume, du fait que celui qui n'a pas de péché a été condamné pour les péchés de tous.

Cette action du Christ sera très précieuse pour nous faire embrasser courageusement une vie d'ardente piété. Il est impossible que nous obtenions la perfection dans le bien et l'union totale avec Dieu, sinon en préférant son amour à la vie terrestre et en étant décidés à combattre hardiment pour la vérité, comme y appelle le temps où nous vivons.

Assurément, notre Seigneur Jésus Christ a dit: Celui qui ne prend pas sa croix pour me suivre n'est pas digne de moi (Mt 10,38). Prendre sa croix, à mon avis, n'est rien d'autre que renoncer au monde à cause de lui, que sacrifier la vie du corps aux biens que nous espérons, si les circonstances le demandent. Mais notre Seigneur Jésus Christ n'a pas rougi de porter la croix qui nous était due et de souffrir par amour pour nous. <>

Ceux qui sont unis au Christ sont encore crucifiés avec lui d'une autre manière: en acceptant de mourir à leur genre de vie, ils se transforment par une vie nouvelle et conforme à l'Évangile. Saint Paul disait, en parlant pour nous tous: Avec le Christ je suis fixé à la croix: je vis, mais ce n'est plus moi, c'est le Christ qui vit en moi (Ga 2,19-20).

Prière

Regarde, Seigneur, nous t'en prions, la famille qui t'appartient: c'est pour elle que Jésus, le Christ, notre Seigneur, ne refusa pas d'être livré aux mains des méchants ni de subir le supplice de la croix. Lui qui règne.


Samedi saint A

28 Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 27,57-66)

Le soir venu, arriva un homme riche, originaire d'Arimathie, qui s'appelait Joseph, et qui était devenu lui aussi disciple de Jésus. Il alla trouver Pilate pour demander le corps de Jésus.

Homélie

La mort qui a changé notre mort

Homélie de saint Cyrille d'Alexandrie (+ 444)

Commentaire sur l'évangile de Jean, 12, 19, PG 74, 679-682.

Ils prirent le corps de Jésus, et ils l'enveloppèrent d'un linceul, en employant les aromates, selon la manière juive d'ensevelir les morts. Près du lieu où Jésus avait été crucifié, il y avait un jardin, et dans ce jardin, un tombeau neuf dans lequel on n'avait encore mis personne (Jn 19,40-41).

On a compté parmi les morts celui qui, à cause de nous, est au nombre des morts selon la chair, mais que l'on connaît comme étant la vie selon sa nature même et grâce à son Père; et il l'est en vérité. Mais, pour accomplir toute justice, celle qui convient à la condition humaine, il ne soumit pas seulement son corps à une mort volontaire, mais aussi à ce qui en est la suite: ensevelissement et mise au tombeau.

L'évangéliste nous dit que ce tombeau était dans un jardin, et qu'il était neuf; cela symbolise en quelque sorte que, par sa mort, le Christ a préparé et réalisé notre retour au paradis. Car il y es t entré lui-même comme notre avant-coureur et chef de file.

Que le sépulcre soit désigné comme neuf, cela signifie un retour de la mort à la vie, nouveau et sans précédent, le renouvellement préparé par le Christ pour nous protéger de la corruption. Car no tre mort, par la mort du Christ, a reçu un sens nouveau qui l'a transformée en une sorte de sommeil. En effet, nous vivons comme devant vivre pour Dieu, selon les Écritures (Rm 6,10-11). C'est pourquoi saint Paul appelle invariablement ceux qui sont morts dans le Christ: ceux qui se sont endormis.

Jadis en effet, le pouvoir de la mort a triomphé de notre nature. Depuis Adam jusqu'à Moïse la mort a régné, même sur ceux qui n'avaient pas péché par désobéissance à la manière d'Adam (Rm 5,14). Nous sommes à l'image de celui qui est pétri de terre (1Co 15,49), Adam, et nous subissons la mort qui pèse sur nous par la malédiction divine (cf. Ga 3,13).

Mais après que le nouvel Adam, l'Adam divin et céleste, eût resplendi pour nous, après qu'il eût combattu pour la vie de tous, il a racheté la vie de tous par sa mort charnelle, et après avoir détruit l'empire de la mort, il est revenu à la vie. Alors nous avons été transformés à son image et soumis à une nouvelle sorte de mort, qui ne nous dissoudra pas dans une corruption sans fin, mais qui nous apportera un sommeil plein d'espérance, à la ressemblance de celui qui a inauguré pour nous cette route, et qui est le Christ.

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, dont le Fils unique est descendu aux profondeurs de la terre, d'où il est remonté glorieux: accorde à tes fidèles, ensevelis avec lui dans le baptême, d'accéder par sa résurrection à la vie éternelle. Lui qui règne.



Temps pascal A

Dimanche de Pâques A

29 Le dimanche de Pâques, la Veillée nocturne tient lieu d'Office des Vigiles ou des Lectures. On a cependant cru rendre service en proposant une homélie pour la méditation de ce jour-là.

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 28,1-10)

Après le sabbat, à l'heure où commençait le premier jour de la semaine, Marie Madeleine et l'autre Marie vinrent faire leur visite au tombeau de Jésus. Et voilà qu'il y eut un grand tremblement de terre; l'Ange du Seigneur descendit du ciel, vint rouler la pierre et s'assit dessus.

Homélie

Le mystère de la résurrection

Homélie de saint Jean Chrysostome (+ 407)

Homélie sur le Grand Samedi, 10-12; PG 88, 1860-1866.

Comment vous expliquerai-je les choses cachées? Comment proclamerai-je ce qui surpasse tout langage et toute intelligence? Comment ferai-je connaître le mystère de la résurrection du Seigneur? Sa croix aussi est un mystère, et sa mort pendant trois jours, et tout ce qui est arrivé à notre Sauveur est mystère. De même, en effet, qu'il est né du sein inviolé de la Vierge, de même il est ressuscité du tombeau fermé. De même que le Fils unique de Dieu est devenu premier-né en naissant d'une mère, de même il est devenu le premier-né d'entre les morts par sa résurrection. De même, assurément, que sa naissance n'a pas fait perdre à la Vierge mère sa virginité, de même sa résurrection n'a pas brisé les sceaux du sépulcre. Je ne puis donc pas définir par des mots sa naissance ni comprendre sa sortie du sépulcre. <>

Venez voir l'endroit où reposait le Seigneur (Mt 28,6). <> Venez voir l'endroit où fut rédigé l'acte garantissant votre résurrection. Venez voir l'endroit où la mort fut ensevelie. Venez voir l'endroit où un corps, grain non semé par l'homme, a produit une multitude d'épis d'immortalité. <> Allez annoncer à mes disciples <>, allez annoncer à mes frères qu'ils doivent se rendre en Galilée: c'est là qu'ils me verront (Mt 28,10). Annoncez à mes disciples les mystères que vous avez contemplés." <>

Voilà ce que le Seigneur a dit aux femmes. Et maintenant encore, au bord de la piscine baptismale, il se tient invisible auprès des croyants, il embrasse les nouveaux baptisés comme des amis et des frères <>, il remplit leurs coeurs et leurs âmes d'allégresse et de joie. Il lave leurs souillures dans les fontaines de sa grâce. Il oint du parfum de l'Esprit ceux qui ont été régénérés. Le Seigneur devient celui qui les nourrit et il devient leur nourriture. Il procure à ses serviteurs leur part de nourriture spirituelle. Il dit à tous les fidèles: "Prenez, mangez le pain du ciel, recevez la source qui jaillit de mon côté, celle où l'on puise toujours sans que jamais elle se tarisse. Vous qui avez faim, rassasiez-vous; vous qui avez soif, enivrez-vous d'un vin sobre et salutaire." <>

O Christ, notre Dieu, toi seul es vraiment le seul Seigneur, plein de bonté et d'amour pour les hommes. Avec ton Père exempt de toute souillure et avec l'Esprit vivifiant, à toi reviennent la gloire et la puissance, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles.

Amen.

Prière

Aujourd'hui, Dieu notre Père, tu nous ouvres la vie éternelle par la victoire de ton Fils sur la mort, et nous fêtons sa résurrection. Que ton Esprit fasse de nous des hommes nouveaux pour que nous ressuscitions avec le Christ dans la lumière de la vie. Lui qui règne.


Lundi de Pâques ABC

30 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (
Mt 28,8-15)

Quand les femmes eurent entendu les paroles de l'Ange, vite, elles quittèrent le tombeau, tremblantes et toutes joyeuses, et elles coururent porter la nouvelle aux disciples. Et voici que Jésus vint à leur rencontre.

Homélie

Les saintes femmes, prémices des croyants

Homélie de saint Pierre Chrysologue (+ 450)

Sermon 76, 2-3, CCL 24 A, 465-467

L'Ange avait dit aux femmes: Vite, allez dire à ses disciples: Il est ressuscité d'entre les morts; il vous précède en Galilée: c'est là que vous le verrez (Mt 28,7). En disant cela, l'Ange ne s'adressait pas à Marie Madeleine et à l'autre Marie, mais, en ces deux femmes, c'est l'Église qu'il envoyait en mission, c'est l'Épouse que l'Ange envoyait vers l'Époux.

Et tandis qu'elles s'en vont, le Seigneur vient à leur rencontre et les salue en disant: Je vous salue, réjouissez-vous. <> Il avait dit à ses disciples: Ne saluez personne en chemin (Lc 10,4); comment se fait-il que sur le chemin il accoure à la rencontre de ces femmes et les salue si joyeusement? Il n'attend pas d'être reconnu, il ne cherche pas à être identifié, il ne se laisse pas questionner, mais il s'empresse, plein d'élan, vers cette rencontre; il y court avec ardeur et, en les saluant, il abolit lui-même sa propre prescription. Voilà ce que fait la puissance de l'amour: elle est plus forte que tout, elle déborde tout. En saluant l'Église, c'est lui-même que le Christ salue, car il l'a faite sienne, elle est devenue sa chair, elle est devenue son corps, comme l'atteste l'Apôtre: Il est la Tête du Corps, c'est-à-dire l'Église (Col 1,18).

Oui, c'est bien l'Église en sa plénitude que personnifient ces deux femmes; les événements le montrent avec évidence; à ses disciples qui doutent de sa résurrection, le Christ doit apporter des preuves, il doit apaiser leurs craintes, il doit les rappeler à la foi en montrant son côté et les trous des clous, puis en prenant avec eux de la nourriture. Et c'est à juste titre qu'il nomme "enfants" ceux qui étaient si petits dans la foi, lorsqu'il leur demande: Les enfants, auriez-vous quelque chose à manger (Jn 21,5)?

Mais ces femmes, il les trouve déjà parvenues à la maturité de la foi; elles ont dominé leurs faiblesses et elles se hâtent vers le mystère, elles cherchent le Seigneur avec toute la ferveur de leur foi. Aussi méritent-elles qu'il se donne à elles, lorsqu'il va à leur rencontre et leur dit: Je vous salue, réjouissez-vous. Il les laisse non seulement le toucher, mais le saisir à la mesure de leur amour. Comme nous venons de l'entendre dans la proclamation de l'Évangile: Elles s'approchèrent et, lui saisissant les pieds, elles se prosternèrent devant lui (Mt 28,9). Oui, elles saisissent ses pieds, ces femmes qui, dans l'Église, sont les modèles des messagers de la Bonne Nouvelle. Elles ont mérité cette grâce par l'élan de leur course; elles touchent avec tant de foi les pieds du Sauveur qu'il leur est donné d'embrasser la gloire divine.

Prière

Dieu qui agrandis toujours ton Église en lui donnant par le baptême de nouveaux enfants, accorde à tes fils d'être fidèles toute leur vie au sacrement qu'ils ont reçu dans la foi. Par Jésus Christ.


2e dimanche de Pâques A

31 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (
Jn 20,19-31)

C'était après la mort de Jésus, le soir du premier jour de la semaine. Les disciples avaient verrouillé les portes du lieu où ils étaient, car ils avaient peur des Juifs. Jésus vint, et il était là au milieu d'eux.

Homélie

Le corps du Ressuscité est le corps du Crucifié

Homélie de saint Cyrille d'Alexandrie (+ 444)

Commentaire sur l'évangile de Jean, 12; PG 74, 704-705.

En entrant dans le Cénacle toutes portes closes, le Christ a montré une fois de plus qu'il est Dieu par nature, et qu'il n'est pas différent de celui qui vivait auparavant avec les disciples. En découvrant son côté et en montrant la marque des clous, il manifestait à l'évidence qu'il a relevé le temple de son corps qui avait été suspendu à la croix, en détruisant la mort corporelle, puisque par nature il est la vie et il est Dieu. <>

Mais alors que le moment était venu de transformer son corps par une gloire inexprimable et prodigieuse, on le voit tellement soucieux de fonder la foi en la résurrection future de la chair qu'il a voulu, conformément à l'économie divine, apparaître tel qu'il était auparavant. Ainsi ne penserait-on pas qu'il avait alors un corps différent de celui avec lequel il était mort sur la croix.

Même si le Christ avait voulu déployer la gloire de son corps devant les disciples, avant de monter vers le Père, nos yeux n'auraient pu en supporter la vue. Vous le comprendrez facilement si vous vous rappelez la transfiguration qui avait jadis été montrée sur la montagne. En effet, saint Matthieu écrit que le Christ fut transfiguré devant eux, que son visage resplendit comme l'éclair et que ses vêtements devinrent blancs comme neige. Quant à eux, ne pouvant supporter la vision, ils tombèrent la face contre terre.

C'est pourquoi, afin d'observer exactement le plan divin, notre Seigneur Jésus apparaissait encore, au Cénacle, sous sa forme antérieure, et non pas selon la gloire qui est due et convient à son Temple transfiguré. Il ne voulait pas que la foi en la résurrection se porte sur un aspect et sur un corps différents de ceux qu'il reçut de la sainte Vierge et dans lesquels il est mort après avoir été crucifié selon les Écritures. En effet, la mort n'avait pouvoir que sur la chair, dont elle allait être chassée. Car, si ce n'est pas son corps mort qui est ressuscité, quelle espèce de mort a donc été vaincue? Ou encor e, comment le pouvoir de la corruption aurait-il cessé, sinon par la mort d'une créature raisonnable? Car ce ne fut pas l'oeuvre de l'âme, ni de l'ange, ni même du Verbe de Dieu. Donc, puisque la mort ne peut exercer son pouvoir que sur ce qui est corruptible par nature, on aura raison d'estimer que la force de résurrection peut s'exercer aussi sur cela, pour que la tyrannie de la mort soit renversée. <>

Le Seigneur salue ses disciples en disant: Paix à vous. n déclare ainsi que lui-même est la paix. Car ceux auprès desquels il est présent bénéficient d'un esprit parfaitement apaisé. C'est évidemment ce que saint Paul souhaitait aux fidèles quand il disait: Que la paix du Christ, qui dépasse tout ce qu'on peut imaginer, garde votre coeur et votre intelligence dans le Christ Jésus (Ph 4,7). Pour saint Paul, la paix du Christ, qui dépasse tout ce qu'on peut imaginer, n'est autre que son Esprit: celui qui participe à son Esprit sera rempli de tout bien.

Prière

Dieu de miséricorde infinie, tu ranimes la foi de ton peuple par les célébrations pascales; augmente en nous ta grâce pour que nous comprenions toujours mieux quel baptême nous a purifiés, quel Esprit nous a fait renaître, et quel sang nous a rachetés. Par Jésus Christ.


3e dimanche de Pâques A

32 Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (
Lc 24,13-35)

Le troisième jour après la mort de Jésus, deux disciples faisaient route vers un village appelé Emmaus, à deux heures de marche de Jérusalem, et ils parlaient de tout ce qui s'était passé.

Homélie

Croire au Christ ressuscité

Homélie de saint Augustin (+ 430)

Sermon 234, 1-2, éd des Mauristes 5, 987-988.

Ces jours-ci on lit la résurrection du Seigneur selon chacun des quatre évangiles. Car il est nécessaire de les lire tous, parce que chacun n'a pas tout dit. Mais ce que l'un a omis, un autre l'a dit, et d'une certaine façon, tous ont laissé de la place aux autres, si bien qu'ils étaient tous nécessaires.

L'évangéliste Marc a dit brièvement ce que Luc a développé avec plus de détails au sujet des deux hommes, qui n'appartenaient pas aux Douze, mais qui étaient pourtant des disciples: tandis qu'ils faisaient route, le Seigneur leur apparut et les accompagna. Marc dit seulement, en effet, qu'il apparut à deux voyageurs, tandis que l'évangéliste Luc nous rapporte ce qu'il leur a demandé, ce qu'il leur a répondu, jusqu'où il les a accompagnés, et comment ils le reconnurent quand il partagea le pain. Luc a dit tout cela, nous l'avons entendu.

Quelle est donc, mes frères, la question qui nous intéresse ici? Nous sommes encouragés à croire que le Seigneur est ressuscité., Nous le croyions déjà quand nous avons entendu lire l'Évangile, et nous sommes entrés aujourd'hui dans cette église en y croyant. Pourtant, je ne sais comment cela se fait, mais on entend avec joie ce qui rafraîchit notre souvenir. Cela vient de ce que notre coeur se réjouit quand nous découvrons que nous valons mieux que ces hommes, eux qui marchaient sur la route et à qui le Seigneur apparut.

Car nous croyons ce qu'ils ne croyaient pas encore. Ils avaient perdu l'espérance, et là où ils doutaient, nous-mêmes n'avons aucun doute. Ils avaient perdu l'espérance au Seigneur crucifié; on le voit à leurs paroles. Quand Jésus leur demande: De quoi causiez-vous donc, tout en marchant, et pourquoi êtes-vous tristes?, ils répondent: Tu es bien le seul de tous ceux qui étaient à Jérusalem, à ignorer les événements de ces jours-ci. - Quels événements! répliqua Jésus. Lui qui sait tout, il les questionne lui-même, parce qu'il désire être dans leur coeur. Ils reprennent: Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth: cet homme était un prophète puissant par ses actes et par ses paroles... Et comment les chefs des prêtres l'ont crucifié... Et voilà le troisième jour que cela est arrivé... Alors que nous espérions... <>

Vous espériez, et maintenant vous n'espérez plus? C'est ainsi que vous êtes ses disciples? Le malfaiteur crucifié avec Jésus vous a surpassés! Vous avez oublié celui qui vous instruisait, tandis que le bandit a reconnu son compagnon de supplice: Seigneur, souviens-toi de moi, quand tu viendras inaugurer ton règne (Lc 23,42). Oui, parce que c'est lui qui devait racheter Israël. Cette croix était une école où le maître instruisait le bandit. Le bois où Jésus était cloué devint la chaire de son enseignement. Celui qui vous a rejoints, puisse-t-il vous rendre l'espérance! Et c'est ce qui est arrivé.

Rappelez-vous cependant, frères très chers, comment le Seigneur Jésus, alors que les yeux de ses disciples étaient empêchés de le reconnaître, voulut être reconnu au partage du pain. Les fidèles comprennent ce que je veux dire: eux aussi reconnaissent le Christ au partage du pain, mais de celui qui, recevant la bénédiction du Christ, devient le corps du Christ.

Prière

Garde à ton peuple sa joie, Seigneur, toi qui refais ses forces et sa jeunesse; tu nous a rendu la dignité de fils de Dieu, affermis-nous dans l'espérance de la résurrection. Par Jésus Christ.


4e dimanche de Pâques A

33 Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (
Jn 10,1-10)

Jésus parlait ainsi aux pharisiens: "Amen, amen, je vous le dis: celui qui entre dans la bergerie sans passer par la porte, mais qui escalade par un autre endroit, celui-là est un voleur et un bandit."

Homélie

Un pédagogue incomparable

Homélie de Clément d'Alexandrie (+ 215)

Le Pédagogue, 9, 83,3 85,a, SC 70, 258-261

Malades, nous avons besoin du Sauveur; égarés, de celui qui nous conduira; assoiffés, de la source d'eau vive; morts, nous avons besoin de la vie; brebis, du berger; enfants, du pédagogue; et toute l'humanité a besoin de Jésus. <>

Si vous le voulez, nous pouvons comprendre la suprême sagesse du très saint Pasteur et Pédagogue, qui est le Tout-Puissant et le Verbe du Père, lorsqu'il emploie une allégorie et se dit le Pasteur des brebis; mais il es t aussi le Pédagogue des tout-petits.

C'est ainsi qu'il s'adresse assez longuement, par l'intermédiaire d'Ézéchiel, aux anciens, et qu'il leur donne l'exemple salutaire d'une sollicitude bien adaptée: Je soignerai celui qui est boiteux, et je guérirai celui qui est accablé; je ramènerai celui qui s'est égaré, et je les ferai paître sur ma montagne sainte (cf. Ez 34,16). Oui, Maître, donne-nous en abondance ta pâture, qui est la justice. Oui, Pédagogue, sois notre Pasteur jusqu'à ta montagne sainte, jusqu'à l'Église qui s'élève au-dessus des nuages, qui touche aux cieux! Et je serai, dit-il, leur Pasteur, et je serai près d'eux (cf. Ez 34,14). Il veut sauver ma chair en la revêtant de la tunique d'incorruptibilité et il a consacré ma peau par l'onction. Ils m'appelleront, dit-il, et je dirai: Me voici (cf. Is 58,9). Tu m'as entendu plus vite que je ne l'aurais cru, Seigneur. S'ils traversent, ils ne glisseront pas (cf. Is 43,2), dit le Seigneur. Nous ne tomberons pas dans la corruption, en effet, nous qui traversons pour aller vers l'incorruptibilité (cf. 1Co 15,42), puisqu'il nous soutiendra. Il l'a dit et il l'a voulu.

Tel est notre Pédagogue: bon avec justice. Je ne suis pas venu pour être servi, dit-il, mais pour servir (Mt 20,28). C'est pourquoi, dans l'Évangile, on nous le montre fatigué, lui qui se fatigue pour nous, et qui promet de donner sa vie en rançon pour la multitude (Mt 20,28). Il affirme que, seul, le bon Pasteur agit ainsi.

Quel magnifique donateur, qui donne pour nous ce qu'il a de plus grand: sa vie! O le bienfaiteur, l'ami des hommes, qui a voulu être leur frère plutôt que leur Seigneur! Et il a poussé la bonté jusqu'à mourir pour nous!

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, guide-nous jusqu'au bonheur du ciel; que le troupeau parvienne, malgré sa faiblesse, là où son Pasteur est entré victorieux. Lui qui règne.



Homéliaire patristique 24