Augustin, du mérite I-II-III - CHAPITRE XXIII. CORRUPTION DE LA NATURE PAR LE PÉCHÉ ET SA RÉNOVATION PAR JÉSUS-CHRIST.

CHAPITRE XXIII. CORRUPTION DE LA NATURE PAR LE PÉCHÉ ET SA RÉNOVATION PAR JÉSUS-CHRIST.


37. De cette loi de péché naît la chair de péché, et il faut à celle-ci l'expiation par le sacrement de Celui qui est venu dans la ressemblance de la chair de péché, pour anéantir en nous le corps du péché (1), le corps de cette mort, comme l'appelle aussi l'Ecriture; et l'homme malheureux n'est délivré que par la grâce de Dieu et par l'intermédiaire de Jésus-Christ Notre-Seigneur (2). De nos pères, en effet, cette loi, ce commencement de mort a passé à leurs descendants, comme le travail qui pèse sur tous les, hommes, comme l'enfantement dans la douleur qui afflige toutes les femmes. Toutes ces misères ensemble, à l'heure où Dieu accusait les premiers pécheurs, ont été prononcées par sa divine sentence et méritées à la fois, non par eux seuls, mais par toute leur postérité; et nous les voyons en effet s'accomplir un peu plus sur les uns, un peu moins sur les autres, mais sur tous néanmoins sans exception. La première justice qu'auraient dû pratiquer ces premiers humains, t'eût été d'obéir à Dieu, et de ne pas admettre dans leurs membres cette guerre de la loi de concupiscence contre la loi de l'esprit. Aujourd'hui, au contraire; après leur péché, il ne dérive de leur source pécheresse qu'une chair de péché; et les fidèles serviteurs de Dieu ont beaucoup obtenu de sa miséricorde, quand, n'obéissant point à ces désirs de concupiscence et crucifiant en eux-mêmes la chair avec ses passions et ses détestables convoitises, ils ont le bonheur d'être à Jésus-Christ, qui a figuré déjà ce triomphe dans sa croix pour le salut de ceux auxquels, par sa grâce, il a. donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu. Il ne l'a point donné à tous les hommes, en effet; mais uniquement à ceux qui l'ont reçu de manière à renaître spirituellement après avoir eu dans le siècle une naissance purement charnelle. Voilà bien ce que l'Ecriture dit à leur sujet: «A tous ceux qui l'ont reçu, il leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu; oui, à ceux qui sont nés de Dieu, et non pas de

1. Rm 8,3 - 2. Rm 7,24-25

la chair ou du sang, de la volonté de l'homme ou de celle de la chair (1)».

CHAPITRE XXIV. QUEL BIENFAIT L'INCARNATION DU VERBE NOUS A-T-ELLE CONFÉRÉ? - EN QUOI LA NAISSANCE DE JÉSUS-CHRIST DANS LA CHAIR FUT-ELLE DIFFÉRENTE DE LA NÔTRE, ET EN QUOI LUI FUT-ELLE SEMBLABLE? - ON


38. L'Evangéliste poursuit et ajoute: «Et le Verbe s'est fait chair, et il a habité en nous (2)».C'est comme s'il disait: Une grande merveille s'est opérée en eux, sans doute, puisqu'ils sont nés de Dieu pour Dieu, après être nés de la chair pour le siècle, bien que Dieu eût été leur créateur. Mais, ô prodige bien autrement admirable! Lorsque par nature ils avaient droit de naître selon la chair; et, par grâce seulement, de naître de Dieu, pour leur départir cette grâce, celui qui par nature est né de Dieu a daigné par miséricorde naître aussi de la chair. - Tel est le sens de ces paroles: «Et le Verbe s'est fait chair, et il a habité en nous». Grâce à ce dévouement, dit l'écrivain sacré, nous qui sommes nés de la chair, nous avons eu le bonheur de devenir bientôt esprits en naissant de l'Esprit; grâce à ce Verbe incarné, nous habitons en Dieu, puisque un Dieu né de Dieu s'est fait chair dans le temps en naissant de la chair, et qu'il a habité en nous. Car le Verbe qui s'est fait chair était au commencement, et en Dieu il était Dieu.

Cependant, quand le Verbe a Voulu participer à notre nature abaissée, pour lui donner part aux sublimités de sa nature, il a tenu un terme moyen, même dans sa naissance selon la chair. Ainsi nous sommes nés dans une chair de péché, et lui seulement dans la ressemblance d'une chair de péché. Nous sommes nés, non-seulement de la chair et du sang, mais encore de la volonté d'un homme et de la volonté de la chair, tandis qu'il est né,seulement de la chair et du sang, mais non de la volonté d'un homme ni de la volonté de la chair: au contraire, il est né de Dieu. Aussi, nous allons à la mort pour notre péché, et lui, sans aucun péché toujours, s'est livré à la mort pour nous. De plus, comme déjà la

1. Jn 1,8 et suiv. - 2. Jn 12-14

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nature abaissée, dans laquelle il a voulu descendre jusqu'à nous, n'est pourtant point absolument au triste niveau d'abaissement dans lequel il a trouvé notre nature sur la terre; ainsi les sublimités de notre vie spirituelle, par lesquelles nous remontons vers lui, ne seront jamais égales aux sublimités dans lesquelles nous le trouverons un jour lui-même au ciel. Sa grâce aura fait de nous autant d'enfants de Dieu, mais lui a toujours été par nature le Fils de Dieu; notre retour à Dieu nous attachera un jour à celui au-dessous duquel nous resterons toujours; et lui, qui ne s'est jamais détourné du Père, demeure toujours égal à Dieu; il est et sera à jamais la vie éternelle, tandis que de cette éternelle vie nous ne jouirons qu'en participation. Il est donc le seul qui, fait homme, reste et demeure Dieu, le seul qui n'ait jamais eu aucun péché, le seul qui n'ait point pris une chair de péché, bien qu'il ait puisé la sienne dans le sein maternel d'une chair de péché (1). Car ce qu'il a pris de notre chair en ce sein de Marie, il l'a certainement purifié pour l'y prendre, ou l'a purifié en l'y prenant. Il lui faut une Vierge-Mère qui, loin de concevoir en vertu de la loi du péché, c'est-à-dire avec le moindre mouvement de concupiscence charnelle, mérite par sa foi pieuse que le germe saint et adorable soit fait en elle; aussi a-t-il créé celle qu'il devait choisir; aussi a-t-il choisi celle qui devait le créer à son tour. A combien plus forte raison faut-il donc baptiser une chair de péché pour lui faire éviter le jugement divin, s'il a fallu qu'une chair sans péché fût baptisée rien que pour nous donner un exemple à imiter?

CHAPITRE XXV. OBJECTION DES PÉLAGIENS.


39. Nous avons répondu déjà précédemment à ceux qui objectent que «si le pécheur a engendré le pécheur, le juste a dû aussi engendrer le juste». Notre réponse est exactement la même à ceux qui prétendent que l'enfant d'un homme baptisé devrait être

1. Nec sumpsit carnem peccati, quamvis de materna carne peccati. Ce texte n'établit pas le péché originel en Marie. Outre le vague de son expression, il se fait lire autrement dans d'autres manuscrits. Les uns portent de natura carvis peccati, les autres de materia carnis peccati. Quelle qu'ait été la manière de voir de saint Augustin sur la Conception de la sainte Vierge, on sait que l'Eglise s'est prononcée sur cette question en 1851.

regardé comme baptisé lui-même. En vain l'on nous demande: «Pourquoi non? Pourquoi cet enfant n'aurait-il pas pu être baptisé dans les flancs de son père, puisque, d'après l'épître écrite aux Hébreux, Lévi a pu payer la dîme dans les lombes d'Abraham (1)?» Une réflexion suffit à renverser votre système. Si Lévi, plus tard, ne paya jamais la dîme, ce ne fut pas pour l'avoir donnée déjà quand il était encore dans les flancs d'Abraham; c'est simplement parce que l'honneur du sacerdoce conféré à sa tribu exigeait qu'il reçût la dîme sans jamais la payer lui-même. Autrement, ses autres frères, qui la lui offrirent cependant, ne devaient pas la payer plutôt que lui, puisque eux-mêmes l'avaient soldée aussi à Melchisédech quand ils étaient encore dans les flancs d'Abraham.


40. Il se pourrait qu'on insistât et qu'on dît: Les fils d'Abraham, bien qu'ayant déjà payé la dîme lorsqu'ils habitaient encore les flancs de leur père, pouvaient cependant être forcés en justice à la payer encore; car le tribut de la dîme, par son essence même, devait être acquitté plusieurs fois par le même individu; les Israélites, par exemple, ont coutume de l'offrir pendant toute leur vie à leurs lévites, et ils prélèvent même pour eux le dixième de tous leurs fruits et récoltes. - Au contraire, il est de l'essence du baptême d'être donné une seule fois; et, supposé qu'un homme l'ait reçu étant en. tore dans son père, on ne pourra regarder cet homme que comme déjà baptisé, puisqu'il est engendré de celui qui aura reçu le baptême.

Pour abréger la discussion, je me contente de dire à qui parle ainsi: Rappelez-vous la circoncision! Elle ne se faisait qu'une fois, et cependant elle se faisait dans chaque individu et personnellement. Il fallait bien, à l'époque de ce sacrement, circoncire l'enfant né d'un circoncis: de même faut-il à présent encore baptiser l'enfant né d'un baptisé.


41. Mais, dira-t-on, l'Apôtre a écrit cet oracle: «Autrement vos enfants seraient impurs, mais maintenant ils sont saints (2); concluons donc que les enfants des fidèles ne devraient aucunement être baptisés».

Cette objection m'étonne de la part de ceux
1. He 7,9-10 - 2. 1Co 7,14

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qui nient la transmission du péché originel par notre premier père à toute sa race. En effet, puisqu'ils entendent les paroles de l'Apôtre en ce sens que les enfants des fidèles naissent en état de sainteté, pourquoi donc eux-mêmes n'hésitent-ils pas à déclarer que ces enfants toutefois doivent nécessairement être baptisés? Pourquoi enfin refusent-ils d'avouer que la race d'un père pécheur contracte originellement aussi quelque péché, puisque, selon eux, d'un père saint on contracte quelque sainteté? Dans leur hypothèse même, de la procréation dans la sainteté à cause de parents fidèles, nous pourrions, sans nous contredire, soutenir encore ce que nous maintenons, à savoir que ces enfants prétendus saints vont à la damnation, à moins qu'ils ne reçoivent le baptême: ces enfants, en effet, nos adversaires eux-mêmes les excluent du royaume des cieux, tout en affirmant qu'ils ne sont souillés d'aucun péché, ni personnel, ni originel. Si c'est une injustice, à leurs yeux, que nous damnions des saints, comment serait-ce une justice que des saints fussent séparés du royaume de Dieu?

Que plutôt ils réfléchissent à cette induction évidente: Comment des parents pécheurs ne communiqueraient-ils pas quelque péché, supposé que des saints communiquent quelque sainteté, et des impurs quelque impureté? Cette double affirmation, en effet, se trouve dans le texte qui dit: «Autrement vos enfants seraient impurs, mais maintenant ils sont saints». - Qu'on nous explique, d'ailleurs, comment c'est justice, dans cette hypothèse qui fait naître un saint d'un fidèle et d'un infidèle un être souillé, que l'un et l'autre fruit cependant, et à titre égal ne soient point admis à entrer dans le royaume de Dieu, à moins de recevoir le baptême? A quoi donc sert au premier cette prétendue sainteté? Si au moins vous prétendiez que les fruits impurs nés de parents infidèles sont damnés, tandis que, nés de parents fidèles, les enfants saints ainsi ne pourront point entrer dans le royaume de Dieu, à moins d'avoir reçu le baptême, mais qu'ils ne seront point damnés toutefois, vous admettriez entre ces deux sorts une différence quelconque; mais les enfants nés saints de pères saints, et les impurs nés de parents impurs, doivent, selon vous, subir d'égales conditions: ils ne sont point damnés, parce qu'ils n'ont point de péché; ils seront séparés du royaume de Dieu, parce qu'ils n'ont point le baptême! - Qui croira que de bons esprits, comme sont nos adversaires, ne voient point ici une grosse absurdité?


42. Mais un peu d'attention nous convaincra que notre sentiment, - ou plutôt celui qu'exprime l'Apôtre en ces paroles: «Par un seul homme tous vont à la damnation», et «par un seul homme tous arrivent à la justification de la vie (1)», - n'est point contraire à celui que le même Apôtre formule, lorsque, traitant d'un autre sujet, il dit: «Autrement vos fils seraient impurs; mais maintenant ils sont saints».

CHAPITRE 26. PLUSIEURS MODES DE SANCTIFICATION. - LE SACREMENT DES CATÉCHUMÈNES.

Il y a plus d'une sorte de sanctification. Ainsi nos catéchumènes, je le crois, sont sanctifiés d'une manière à eux particulière par le signe de Jésus-Christ, et par la prière qui accompagne l'imposition de la main; ce qu'ils reçoivent n'est pas encore, il est vrai, le corps de Jésus-Christ, mais c'est déjà une chose sainte toutefois (2), et plus sainte que les aliments qui servent à notre nourriture, car c'est déjà un sacrement. Il y a plus: les aliments mêmes dont nous usons pour soutenir notre vie corporelle, sont sanctifiés, aux termes de ce même grand Apôtre, par la parole de Dieu et par la prière (3) que nous adressons à Dieu, bien que notre première intention soit de restaurer nos pauvres corps. On le voit, cette sanctification de nos aliments n'empêche pas que ce qui est entré par la bouche ne descende dans les entrailles et ne soit jeté au lieu secret pour subir entièrement cette corruption par où finissent et périssent toutes les choses de la terre; aussi, nonobstant cet aliment matériel, le Seigneur nous exhorte à chercher une autre nourriture qui ne peut se corrompre (4). Par une raison semblable, la sanctification du catéchumène, s'il ne reçoit pas le baptême, ne peut lui ouvrir l'entrée du royaume des cieux ni lui

1. Rm 5,16-18 - 2. Les catéchumènes recevaient le sacrement du sel, et un canon 5e du 3e concile de Carthage parle de ce symbole sacré. Saint Augustin l'appelle ailleurs (de Catechiz. Rudibus, n. 50) un sacrement, un symbole que sanctifie une bénédiction. Parlant de son propre catéchuménat, il dit: «J'étais déjà marqué du signe de la croix de Jésus-Christ, et je goûtais le saint condiment a de son sel». (Confess. lib. 1,cap. 11) - 3. 1Tm 4,5 - 4. Jn 6,27
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produire la rémission des péchés. - Concluons que cette sanctification, de quelque espèce qu'elle soit, dont l'Apôtre atteste l'existence dans les fils des fidèles, n'a aucun rapport à la présente question du baptême, de l'origine ou de la rémission des péchés. En effet, dans ce passage même, il parle d'une sanctification aussi des époux infidèles dans leurs conjointes fidèles. Voici ses expressions: «Car le mari infidèle est sanctifié dans son épouse, et la femme infidèle est sanctifiée par le frère, son époux. Autrement vos enfants seraient impurs, mais aujourd'hui ils sont saints (1)». Quelque sens qu'on attache à ce texte, nul, je pense, n'oserait l'interpréter assez infidèlement pour en conclure qu'un mari, même non chrétien, par la seule raison que son épouse est chrétienne, ne doive pas lui aussi être baptisé; et de ce que l'Apôtre l'aura déclaré sanctifié dans sa femme, nul ne s'imaginera que le voilà parvenu déjà à la rémission des péchés et destiné à entrer dans le royaume des cieux.

CHAPITRE 26I. POURQUOI BAPTISE-T-ON CEUX QUI NAISSENT DE PARENTS BAPTISÉS?


43. Si quelqu'un cependant s'étonnait encore de voir conférer le baptême aux enfants de personnes baptisées, nous l'engagerions à écouter cette simple observation. Comme la génération dans une chair pécheresse par Adam, seul et commun père des hommes, entraîne à la condamnation tous ceux qui reçoivent ainsi la naissance, ainsi la génération dans un esprit de grâce par le seul médiateur Jésus-Christ, conduit à la justification d'une vie éternelle tous ceux qui sont ainsi prédestinés. Or, le sacrement de baptême est certainement le sacrement qui régénère. Et c'est pourquoi, de même que l'homme qui n'a point vécu ne peut mourir, et que celui qui n'est point mort ne peut ressusciter; ainsi celui qui n'est pas encore né ne peut renaître. Mais aussi faut-il que, s'il naît un jour, il renaisse bientôt, puisque «si quelqu'un ne naît pas de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu». Il est donc nécessaire aussi -que tout enfant soit baigné dans les eaux du sacrement de la régénération, pour éviter de sortir de cette vie en état mauvais, à

1. 1Co 7,14 - 2. Jn 3,3

défaut de ce sacrement, lequel, d'ailleurs, n'o. père qu'en remettant les péchés. C'est ce que déclare Jésus-Christ dans ce passage même, puisque quand on lui demande comment ces choses peuvent s'accomplir, il rappelle ce que Moïse a fait en élevant le serpent d'airain. Le sacrement de baptême appliquant aux enfants un traitement conforme à la mort de Jésus-Christ, on doit avouer que son effet les guérit de la morsure du serpent, à moins qu'on ne veuille s'écarter malheureusement des règles de la foi chrétienne. Cette morsure, toutefois, n'a pas atteint ces tendres victimes pendant leur vie personnelle, mais en ce premier père qui fut le premier frappé.


44. Qu'on n'aille pas ici, cependant, tirer une conséquence fausse d'un principe vrai. - «De ce que les parents, une fois convertis, n'ont rien à craindre de leurs propres péchés, à combien plus forte raison», concluent les adversaires, «leur enfant ne peut-il souffrir du péché de ses pères!» - Parler ainsi, c'est oublier la cause qui met les parents à couvert -contre les péchés par eux commis avant le baptême: ils n'en ont rien à craindre, parce qu'ils ont reçu par l'esprit une seconde naissance. Par suite, l'enfant né d'eux doit, tant qu'il n'a pas été régénéré comme eux, souffrir du péché contracté au sein de son père. En effet, les parents mêmes renouvelés par le sacrement, ne donnent point la génération en vertu des saintes prémices de cette rénovation, mais bien sous l'influence des tristes restes de leur vieil état d'origine; aussi leurs enfants sont-ils placés tout entiers sous ce vieil empire, à raison de ce vieux reste de l'état ancien par où leurs parents ont passé; dès lors ils sont engendrés dans une chair de péché, et la damnation leur est due comme au vieil homme, à moins d'y échapper par la régénération spirituelle, par la rénovation que produit le sacrement. Car il est une vérité principale que nous devons observer, sans l'oublier jamais, dans les questions nées ou à naître sur le sujet qui nous occupe: c'est que le baptême produit seulement la pleine et parfaite rémission de tous les péchés, «sans faire subir» à l'homme lui même un changement complet d'état et de qualité; non: mais il dépose en lui les prémices de l'Esprit, et les fidèles qui progressent de jour en jour dans cette rénovation, ont le bonheur que ces prémices transforment (543) en elles-mêmes les vieux restes du premier état charnel, jusqu'à ce que tout l'homme enfin soit renouvelé, au point de faire parvenir l'infirmité du corps même à la vigueur et à l'incorruptibilité de l'état spirituel.

CHAPITRE 28. LA LOI DU PÉCHÉ EST APPELÉE PÉCHÉ. - COMMENT LA CONCUPISCENCE, LORS MÊME QUE CE QU'ELLE A DE CRIMINEL EST EFFACÉ, DEMEURE ENCORE DANS LE BAPTISÉ.


45. Il est une loi de péché, que l'Apôtre même appelle le péché dans cet oracle: «Que le péché ne règne donc pas dans votre corps a mortel, de sorte que vous obéissiez à ses convoitises (1)». Ceux qui ont eu le bonheur de renaître de l'eau et de l'esprit ne conservent point cette loi dans leurs membres, comme si la rémission du péché ne leur avait point été accordée; non, tel n'est point notre servage, dès que nous avons reçu pleine et parfaite la rémission de nos péchés, dès qu'ont péri ces inimitiés qui nous séparaient de Dieu. La triste loi demeure dans la partie vieille encore de notre être charnel, mais elle y est comme vaincue, comme frappée de mort, à moins que notre consentement à ses tentations illicites ne lui rendent une sorte de vie, et ne la rappellent en son empire et dans sa domination trop naturelle. Mais quand la loi du péché; ou, si l'on veut, le péché est déjà pardonné, ce débris du vieil homme ressemble si peu à la vie de l'esprit, dans la nouveauté duquel les baptisés ont reçu par la grâce de Dieu une seconde naissance, que l'Apôtre ne s'est pas contenté de proclamer que les fidèles dès lors ne sont plus en état de péché; il a déclaré qu'ils ne sont plus dans la chair, avant même qu'ils aient fini ce pèlerinage dans une vie mortelle. «Ceux qui sont dans la chair», a-t-il dit, «ne peuvent plaire à Dieu; quant à vous, désormais vous n'êtes plus dans la chair, mais dans l'Esprit, si toutefois l'Esprit de Dieu habite en vous (2)». - Remarquons-le toutefois. C'est faire bon usage, même de sa chair corruptible, que de tourner aux bonnes oeuvres ses membres honteux; et celui qui agit ainsi n'est déjà plus dans cette chair, puisqu'il n'en a ni les goûts ni la vie; de même encore, c'est bien user de la mort,

1. Rm 6,12 - 2. Rm 8,8-9
bien qu'elle soit la peine du péché primordial, que de l'affronter avec courage et patience pour ses frères, pour sa foi, pour toute cause vraie et juste. Par la même raison, bien que la loi de péché demeure à l'état d'effacement et de rémission dans la partie vieille encore de leur chair, les fidèles mariés font de cette loi un bon usage en ce que, renouvelés dans Jésus-Christ, ils ne permettent pas que la passion ait sur eux-mêmes le moindre empire; mais en ce qu'ils ont contracté et ce qu'ils gardent encore du vieil état d'Adam, ils engendrent pour une vie mortelle des enfants que la seule régénération doit immortaliser, et leur communiquent ce germe du péché qui ne tient plus sous sa chaîne l'homme ressuscité par la seconde naissance; tandis que ce lien, pour ceux qui naissent ici-bas, n'est brisé que par une naissance nouvelle. Ainsi la loi du péché reste en nos membres par la concupiscence, lors même que son caractère criminel a disparu et que, sous un autre rapport, cette loi n'a point cessé; mais son caractère criminel ne disparaît que pour l'homme qui a reçu le sacrement de la régénération, et commencé déjà l'oeuvre de sa rénovation. Et ce qui naît de cette antique concupiscence toujours persévérante, a besoin de renaître pour être guéri. Enfin, parce que les parents fidèles présentent eux-mêmes cette double condition d'être nés selon la chair, et de n'avoir retrouvé que par l'esprit une seconde naissance, il suit qu'ils donnent à leurs enfants la seule génération charnelle; et quant à ces enfants eux-mêmes, comment ont-ils pu renaître avant d'être nés d'abord?


46. Et ne vous étonnez pas que j'aie affirmé la permanence en nous de la loi du péché, quant à la concupiscence du moins, encore que le crime du péché soit effacé par la grâce du sacrement. Aussi bien, lorsque déjà les actions, les paroles ou les pensées coupables ont fini et n'existent plus quant aux émotions du corps et de l'âme, leur tache n'en reste pas moins après que l'oeuvre mauvaise est terminée et n'est plus, ce semble, qu'un souvenir; la tache, oui, persévère jusqu'à ce qu'elle soit effacée par la rémission des péchés. Ici, en sens tout inverse, la loi du péché n'a point fini, la loi de concupiscence dure encore, mais la tache qu'elle avait produite s'efface, elle n'existera plus, puisque le baptême (544) opère la pleine rémission des péchés. Enfin, s'il arrive que le nouveau baptisé sorte aussitôt de ce monde, rien ne peut le retenir captif ni coupable, tous les liens qui l'enchaînaient étant brisés. Ainsi, comme il n'est pas étonnant que la tache des actions, paroles ou pensées coupables, persévère en nous avant la rémission des péchés; ainsi ne doit-on pas s'étonner non plus que, la concupiscence demeurant en l'homme, la tache apportée par elle soit néanmoins détruite après la rémission des péchés.

CHAPITRE XXIX. TOUS LES PRÉDESTINÉS DOIVENT LEUR SALUT A L'UNIQUE MÉDIATEUR, JÉSUS-CHRIST, A UNE SEULE ET MÊME FOI. - JÉSUS-CHRIST EST SAUVEUR MÊME DES PETITS ENFANTS. - JÉSUS-CHRIST, DÈS SON ENFANCE,


47. Ces points établis, il nous faut admettre que depuis l'heure où le péché par un seul homme est entré dans ce monde, et par le péché la mort aussi, laquelle a passé dans tous les hommes (1), depuis lors jusqu'à la fin de cette génération charnelle et de ce siècle corruptible dont les enfants engendrent et sont engendrés, il n'existe aucun homme dont on puisse dire avec vérité, tant qu'il est dans cette vie présente, qu'il soit absolument exempt de tout péché. Seul il fait exception, celui qui est notre unique Médiateur, et qui nous réconcilie avec notre Créateur, grâce à la rémission des péchés. Mais aussi,, depuis lors jusqu'au moment de son dernier jugement à venir, à aucune époque de la vie de l'humanité, jamais ce grand remède institué par lui-même, Jésus ne l'a refusé à ceux que sa prescience infaillible et sa libéralité à venir ont prédestinés à régner avec lui dans la vie éternelle. En effet, avant sa naissance dans notre chair, avant l'infirmité volontaire de sa passion et le miracle si puissant de sa résurrection, le Sauveur formait déjà et préparait à l'héritage du salut éternel les hommes qui existaient avant lui, en leur donnant la foi en ces merveilles futures de sa vie; ces mêmes merveilles, devenues présentes, il en inspira la foi et par elle forma et prépara les hommes qui furent contemporains de leur accomplissement, et qui voyaient en elles se réaliser les prophéties; ces merveilles enfin accomplies et passées, il en inspire

1. Rm 5,12

la foi qui forme les élus, à tous les hommes créés depuis, il ne cesse de former par elle et notre génération présente et tous ceux qui viendront après nous. C'est donc une seule et même foi qui sauve tous les hommes qu'une régénération spirituelle arrache au vice de la génération charnelle; et cette foi se termine à celui qui est venu pour nous subir le jugement et la mort, bien qu'il soit le juge des vivants et des morts. Mais les sacrements de cette foi toujours identique à elle-même ont varié suivant la diversité des temps et d'après le sens que Dieu estimait convenable d'y attacher.


48. C'est pourquoi encore il n'y a qu'un seul et même Sauveur des petits enfants et de leurs aïeux; c'est celui de qui les anges ont proclamé: «Un Sauveur vous est né aujourd'hui (1)», et dont il a été dît aussi à la Vierge Marie: «Vous lui donnerez le nom de Jésus; car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés (2)». Ce dernier trait nous démontre jusqu'à l'évidence que ce nom de Jésus qui le désigna lui fut donné à raison du salut qu'il nous a procuré; Jésus, en effet, dans notre langue latine signifie Sauveur: Où donc est le téméraire qui oserait dire que le Christ notre Seigneur n'est vraiment Jésus que pour les adultes, et non pour les petits enfants aussi,? Non, mais il est venu dans la ressemblance de notre chair pécheresse pour détruire ce corps de péché où se rencontrent, hélas 1 dans l'infirmité absolue de la première enfance, des membres impropres à tout usage, des membres alors incapables de servir une âme raisonnable, laquelle est elle-même accablée sous le poids d'une déplorable ignorance.

Cette ignorance, toutefois, je ne veux aucunement croire qu'elle se soit trouvée le moins du monde en cet enfant dans lequel le Verbe s'est fait chair pour habiter parmi nous; je me refuse à supposer, dans le Christ même petit enfant, cette faiblesse native de l'âme que nous voyons dans les petits enfants. Chez ceux-ci, cette faiblesse est le seul frein capable d'arracher les mouvements déréglés qui les troublent: insensibles à la raison, tout commandement ou défense, ils cèdent quelquefois à la douleur ou à la crainte de souffrir; de sorce qu'on reconnaît en eux les enfants de cette désobéissance qui, habitant en leurs membres, se révolte contre la loi

1. Lc 2,11 - 2. Mt 1,21

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d'intelligence et ne s'apaise point quand la raison l'exige, tandis que souvent une douleur physique et des coups semblent la calmer, ou bien que la terreur ou tout autre émotion grossière de l'âme parviennent à la comprimer, sans que la volonté ici exerce son empire. - Toutefois, comme Jésus-Christ portait en lui-même la ressemblance de notre chair pécheresse, il a voulu subir toutes les péripéties successives des âges, en débutant par l'enfance même, à ce point que sa chair sacrée pouvait, ce semble, arriver à la mort par la vieillesse, s'il n'avait pas été tué en pleine force de jeunesse. - La mort, d'ailleurs, pour la chair vraiment pécheresse, n'est qu'une dette et une peine payée en retour d'une désobéissance: tandis que la mort dans une chair qui n'avait que la ressemblance du péché a dû être acceptée et voulue par une libre obéissance. Aussi bien, sur le point de marcher au trépas et de le subir si cruellement, Jésus a dit: «Voici que vient le prince de ce monde, et il ne trouvera rien en moi qui lui appartienne; mais il faut que tous les hommes sachent que je fais la volonté de mon Père: levez-vous donc, et partons d'ici (1)». Après ces paroles, Jésus marcha vers cette mort qui ne lui était point, due mais il s'était fait obéissant jusqu'à la mort.

CHAPITRE XXX. RÉPONSE A UNE OBJECTION DES PÉLAGIENS.


49. Aussi, en vain l'on vient nous dire «Si le péché du premier homme nous a donné la mort, la venue de Jésus-Christ devrait nous empêcher de mourir, puisque nous croyons en lui». En vain veut-on, comme raison de cette objection, ajouter encore: «Car la transgression du premier des prévaricateurs n'a pu nous nuire plus que ne nous ont servi l'Incarnation et la Rédemption du Sauveur». - Pourquoi, répondrons-nous, pourquoi n'observez-vous pas, pourquoi n'écoutez-vous pas, ne croyez-vous pas sans ombre de doute ce que l'Apôtre a déclaré sans ombre d'équivoque? «Par un seul homme la mort, et par un seul aussi la résurrection des morts. Car comme tous meurent en Adam, ainsi tous seront aussi vivifiés en Jésus-Christ (2)». Il parlait, d'ailleurs, uniquement ici de la résurrection

1. Jn 14,30-31 - 2. 1Co 15,21-22

des corps. Et voici qu'il déclare comme déjà faite pour, tous les hommes la mort corporelle par le péché d'un seul, tandis,qu'il promet comme à venir seulement la résurrection de tous pour la vie éternelle et par le seul Jésus-Christ. - Comment avancer, en outre, que l'un nous a nui par son péché, plus que l'autre ne nous a servi par son oeuvre rédemptrice? N'est-il pas vrai, au contraire, que le premier nous a valu par sa prévarication la mort temporelle, tandis que le second, par sa rédemption, nous procure la résurrection, non pas pour une vie temporelle, mais pour l'éternité? Ainsi notre corps est mort à cause du péché; mais le corps de Jésus-Christ seul est mort sans péché, afin que son sang versé par lui sans faute préalable effaçât la cédule de toutes les fautes; car le démon tenait enchaînés par cet écrit de mort cette. masse de débiteurs qui maintenant croient en Jésus-Christ. Et c'est pourquoi Jésus a dit: «Ceci est mon sang qui sera versé pour plusieurs en rémission de leurs péchés (1)».

CHAPITRE XXXI. POURQUOI LE BAPTÊME NE DÉTRUIT-IL PAS DU ÊME COUP LA MORT ELLE-MÊME AVEC LES PÉCHÉS?

50. Le Seigneur aurait pu faire à ses croyants cette grâce aussi de ne point subir l'épreuve même de la mort corporelle; mais s'il l'eût accordée, il aurait augmenté en quelque chose le bonheur de notre chair, au détriment de la vigueur de la foi. Les hommes, en effet, redoutent tellement cette mort corporelle, qu'ils proclameraient les chrétiens bienheureux pour une seule et unique raison c'est que, pour eux, la mort serait absolument impossible. Par suite, la vie de bonheur qui doit suivre cette mort n'aurait plus le don d'attirer les hommes à la grâce de Jésus-Christ; loin de mépriser la mort même par vertu, on viendrait à Jésus uniquement pour s'épargner l'ennui, de la mort physique, et par excès de délicate mollesse on croirait en lui. Le Seigneur a fait plus large la part de la grâce, il a donné mieux, évidemment, à ses chers fidèles. Où serait la grandeur d'âme à croire qu'on ne mourra pas soi-même, si l'on voyait, de fait, ne point mourir ceux qui croiraient à l'Evangile? Combien il est plus grand,

1. Mt 26,28

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plus noble, plus louable de croire avec une telle fermeté, que, certain de mourir, on espère cependant vivre éternellement! Ajoutez qu'à la fin des temps une grâce de ce genre sera donnée à quelques hommes; ce sera de ne point sentir cette mort (1), tant sera prompt et soudain leur changement d'état, et en compagnie des saints qui ressusciteront alors, ils seront enlevés dans les nues au-devant de Jésus-Christ à travers les airs, pour vivre ainsi à jamais avec le Seigneurs. Et pour eux un tel sort se comprend, puisqu'ils ne devront point laisser de postérité qui s'attacherait à la foi en vertu de ce spectacle, point de descendants qui aimeraient ce qu'ils verraient de leurs yeux, au lieu d'espérer ce qu'ils ne verraient pas encore: triste espèce de foi, foi débile et sans vigueur, indigne même absolument de son nom, puisque la foi a été définie en ces termes: «La foi est et le trésor de ceux qui espèrent, la conviction de choses qu'on ne voit pas encore (2)». - Aussi dans cette même Épître aux Hébreux, où nous lisons cette définition, après avoir énuméré de suite un certain nombre de personnages qui ont plu à Dieu par leur foi, le texte sacré ajoute: «Et selon cette foi tous ces personnages sont morts, sans avoir encore reçu l'objet des promesses, mais l'ayant seulement aperçu et le saluant de loin, et avouant qu'eux-mêmes étaient comme des pèlerins et des voyageurs sur la terre». Et, après avoir fait bientôt l'éloge de cette foi, il conclut: «Et tous, quoique ayant reçu par la foi le témoignage de leur justification, n'ont point vu s'accomplir les promesses de Dieu; ils n'ont qu'entrevu pour nous un sort meilleur et n'ont pas dû arriver sans nous à l'entière perfection (3)». Ce mérite de la foi rie serait plus; ou plutôt, comme je l'ai dit, la foi même n'existerait aucunement si les hommes l'embrassaient dans la perspective de récompenses visibles, je veux dire, si le salaire de l'immortalité était accordé aux fidèles dès cette vie même.


51. Et c'est pourquoi le Seigneur lui-même a voulu mourir: «Il fallait», comme l'Écriture l'a dit de lui, «il fallait que par sa mort il
1. Voir le livre II des Rétractations, ch. 33, et l'épit. 193 adressée à Mercator. - 2. 1Th 4,16 - 3. Saint Augustin a traduit: fides est substantia sperantium, au lieu de sperandorum. Le verbe grec epidzomai de l'original, est, en effet, un verbe moyen, de sorte que le participe epidzomenon peut s'entendre activement ou passivement. - 3. He 11,13 He 11,39-40

réduisît à néant celui qui avait l'empire de la mort, c'est-à-dire le diable, et qu'il délivrât ceux que la crainte de la mort tenait pendant toute leur vie assujettis à l'esclavage (1)». Une première vérité ressort évidemment de cet oracle. C'est que la mort de notre corps a eu lieu sous l'empire et par le fait du démon, c'est-à-dire par suite du péché dont il fut le conseiller; autrement on ne pourrait pas dire, en toute vérité, qu'il possède l'empire de la mort. C'est dans ce sens que s'exprimait celui qui daigna mourir bien qu'exempt de tout péché originel et personnel; il disait, et précédemment j'ai rappelé ses paroles «Voici venir le prince de ce monde», c'est-à-dire le démon qui avait l'empire de la mort; «et il ne trouvera en moi rien qui soit à lui», c'est-à-dire rien en fait de péché, car c'est par là qu'il a fait mourir les hommes. Et comme si on lui demandait: Pourquoi donc mourez-vous? «C'est qu'il faut», continue-t-il, «il faut que tous au monde sachent que je fais la volonté de mon Père; levez-vous, partons d'ici»; c'est-à-dire, je dois mourir sans avoir par le péché fourni à l'auteur du péché une cause de mort contre moi; l'obéissance et la justice me feront seules obéissant jusqu'à la mort. Voilà bien ce que démontre ce texte; mais, de plus, il nous apprend que les fidèles triomphent de la crainte même de la mort, et que cette victoire est le salaire d'un des combats réservés à la foi. Or, ce combat n'aurait point lieu, si l'immortalité avait été accordée immédiatement en récompense aux croyants.


Augustin, du mérite I-II-III - CHAPITRE XXIII. CORRUPTION DE LA NATURE PAR LE PÉCHÉ ET SA RÉNOVATION PAR JÉSUS-CHRIST.