Bernard aux prêtres 32

CHAPITRE XIX. Blâme sévère adressé aux ambitieux qui ont l'audace de s'immiscer sans en être dignes dans l'exercice des fonctions saintes.

32 Mes petits enfants, « qui vous montrera à fuir la colère à venir (Lc 3,7) ? » Or personne n'est plus digne de l'éprouver que celui qui couvre ses sentiments hostiles des dehors de l'amitié. Judas, c'est par un baiser que tu trahis le Fils de l'homme, toi que je traitais en ami, qui prenais tes repas avec moi et qui portais en même temps que moi la main au plat! Non, tu n'as point de part dans la prière que le Sauveur adresse à son l'ère en lui disant: « Pardonnez-leur, mon Père, car ils ne savent ce qu'ils font (Lc 23,34). » Malheur à vous qui vous attribuez non-seulement la clef de la science; mais encore celle s de l'autorité; qui, non contents de ne pas entrer, empêchez encore de mille manières que les autres entrent, quand vous devriez plutôt les contraindre à le faire! Vous vous emparez des clefs sans attendre qu'on vous les donne: c'est de vos pareils que le Seigneur se plaint par la bouche de son Prophète en disant: « Ils ont régné, mais ce n'est pas par moi; ils ont pris le titre de princes, je ne le leur ai point donné (Os 8,4). » D'où vient donc ce besoin de prélatures? d'où vient une ambition si effrénée? Quel peut être le principe d'une si folle présomption ? Est-il quelqu'un parmi vous qui osât, sans attendre l'ordre du dernier des princes temporels, ou même en dépit de sa défense, s'arroger les fonctions de ministre, s'emparer de ses revenus et diriger ses affaires? Ne pensez pas non plus que Dieu approuve ce que font, dans sa vaste demeure, ces vases de colère destinés à périr. On vient en foule à son Église, mais voyez quels sont ceux qu'il y appelle, comprenez-le à l'ordre même des pensées du discours du divin Maître : « Bienheureux, dit-il, ceux qui ont le coeur pur, parce qu'ils verront Dieu ; » et il termine en disant: « Bienheureux les hommes pacifiques, parce qu'ils seront appelés enfants de Dieu (Mt 5,8-9). » Or ceux que le Père céleste appelle des hommes au coeur pur, ce sont ceux qui, au lieu de rechercher leurs propres intérêts, n'ont en vue que ceux de Jésus-Christ, et qui ne demandent point ce qui leur est utile à eux, mais ce qui l'est à tout le monde. « Pierre, m'aimes-tu ? dit le Sauveur du monde? — Seigneur, vous savez que je vous aime. Pais mes brebis, reprend le divin Maître (Jn 21,15-17). » Comment aurait-il confié ses bien-aimées brebis à un pasteur qui ne l'eût point aimé lui-même? Vous savez bien que ce qu'on recherche avant tout dans un administrateur, c'est qu'il soit d'une fidélité éprouvée. Malheur aux ministres infidèles qui se chargent de réconcilier les autres quand ils ne sont pas encore réconciliés eux-mêmes, comme pourraient le faire des hommes justes en tout point! Malheur à ces enfants de colère qui s'érigent en ministres de miséricordes! Malheur à ces enfants de colère qui portent l'audace jusqu'à s'arroger le titre et le rang qui ne conviennent qu'aux hommes pacifiques! Malheur à ces enfants de colère qui se déguisent en fidèles médiateurs de paix pour s'engraisser des péchés du peuple ! Malheur à ces hommes qui vident selon la chair ! Incapables de plaire à Dieu, ils ont la prétention de le rendre favorable à leurs frères. Pour nous, mes frères, pour nous qui gémissons sur l'état présent de l'Eglise, il n'est pas étonnant que de la race du serpent naisse un basilic (Is 14,29).


33 Nous ne sommes pas étonné de voir la vigne du Seigneur vendangée par des ouvriers qui s'éloignent des voies qu'il a tracées. Car c'est avec cette impudence qu'on voit des hommes qui n'ont jamais entendu la parole du Seigneur les invitant à rentrer en eux-mêmes ou qui, l'ayant entendue, se sont enfuis comme Adam pour aller se cacher sous d'épais feuillages, usurper le rang et les fonctions des hommes pacifiques et des vrais enfants de Dieu. Aussi n'ont-ils pas cessé, jusqu'à présent, de faire le mal, ils traînent encore les débris du filet où ils ont été pris, ils n'ont pas jusqu'ici ouvert les yeux sur leur indigence (Jr 3,1); » chacun d'eux dit au contraire : Je suis riche, je n'ai besoin de rien, tandis qu'il est pauvre, malheureux, misérable et nu (Ap 3,17). Ils ne possèdent point cet esprit de douceur si nécessaire pour reprendre les pécheurs, en veillant sur eux-mêmes, pour ne point tomber, à leur tour, dans la tentation. Bien loin de connaître les larmes de la componction, ils ne savent que se féliciter du mal qu'ils font et se réjouir des pires choses. Aussi est-ce à leurs pareils que le Seigneur a dit: « Malheur à vous qui riez maintenant, vous pleurerez un jour (Lc 6,25) ! » L'objet de leurs voeux n'est point 1a justice, mais l'argent ; toujours le regards fixés sur de plus hauts honneurs, ils n'aspirent qu'aux dignités, ils n'ont soif que de la gloire humaine. Ce ne sont point eux qui ont des entrailles de miséricorde, leur plaisir est de se montrer exigeants et d'agir en tyrans, la piété pour eux n'est qu'un instrument de lucre et de profits. Faut-il parler de la pureté de leur coeur? Plût à Dieu qu'ils n'eussent pas même oublié qu'ils ont un coeur, comme s'il avait cessé de battre en eux! Plût à Dieu qu'ils ne fussent pas, selon l'expression du Prophète, « semblables à la colombe séduite qui ne possède plus son coeur (Os 7,11) ! » Oui, plût à Dieu qu'au moins les dehors fussent purs, chez eux, et qu'on ne remarquât point de taches sur leurs vêtements et jusque sur leur personne, ils obéiraient du moins en cela au précepte divin: « Soyez purs, vous qui portez les vases du Seigneur (Is 52,11)! »



CHAPITRE XX. Paroles pleines de véhémence de saint Bernard contre la vie dissolue et l'incontinence des clercs.


34 Je ne veux point accuser tout le monde, mais je ne puis pas non plus excuser tout le monde. Le Seigneur s'est réservé encore des milliers de ministres fidèles (Rm 11,4), autrement, si leur justice n'était notre excuse, si le Dieu des armées n'avait laissé parmi nous cette semence sainte, il y a longtemps que nous aurions été détruits comme Sodome et que nous aurions péri ainsi que Gomorrhe. L'Eglise, il est vrai, semble avoir élargi ses tentes, l'ordre très-saint du clergé a vit de même ses rangs grossir, et le nombre des frères s'est beaucoup accru (a); mais, Seigneur, en multipliant votre peuple, vous n'avez point ajouté à sa gloire, puisqu'il semble avoir perdu en mérites ce qu'il a gagné en nombre. On se précipite partout vers les ordres sacrés, et on voit des hommes se charger sans trembler, sans même y penser, de ces ministères dont les anges appréhenderaient de se voir chargés eux-mêmes. On ne craint pas en effet de recevoir en mains les insignes d'une autorité divine, ou de porter sur sa tête la couronne qui en est l'emblème, quoiqu'on soit esclave de l'avarice, dominé par l'ambition, subjugué par l'orgueil et sous la loi de la luxure et de l'iniquité, et qu'on recèle peut-être au fond de son coeur de ces mystères d'abomination que nous ne pourrions voir sans frémir, s'il nous était donné, selon le mot d'Ezéchiel (Ez 3,8), de percer la muraille pour être témoins des horreurs qui souillent la maison de Dieu. En effet, sans parler des fornications, des adultères et des incestes, les passions de plusieurs descendent jusqu'à la turpitude et à l'ignominie (Rm 1,26). Plût au ciel encore qu'ils n'en vinssent point jusqu'à commettre de ces fautes dont la décence défend à l'Apôtre de tracer le nom et à moi de le prononcer. Plût à Dieu qu'on ne pût me croire sur parole quand je dis que des hommes sont capables de ces abominables désordres.

a On remarque une légère différence pour ce passage entre les manuscrits et quelques-unes des éditions des couvres de saint Bernard. Ainsi dans l'édition de Spire de 1501, on lit ; « L'ordre très-saint s'est multiplié au delà de toute mesure. » L'édition de 1520 donne la même leçon que la nôtre. Il se pourrait aussi que le mot frères désignât les cardinaux comme dans la lettre quatre-vingt-dix-septième.



35 Qui ne sait qu'autrefois les cités qui furent le berceau de ces infamies, frappées avant le temps par le jugement de Dieu, sont devenues la proie des flammes. Personne n'ignore que les feux de l'enfer, sans attendre la fin des temps, ont eu hâte de dévorer cette nation abominable dont les crimes aussi clairs que le jour avaient hâté l'arrêt du juge suprême. Le feu, le soufre et le vent furieux des tempêtes, ont ravagé, qui ne le sait, la terre même complice de ces attentats et l'ont changée en un lac affreux. L'hydre du mal perdit cinq têtes du coup, mais, hélas ! il en repoussa bientôt d'innombrables. Quelle main a relevé ces cités coupables, a élargi l'enceinte de leurs murs infâmes, a propagé au loin les germes de leur contagion? Malheur! malheur! l'ennemi du genre humain a semé partout les funestes débris de cet incendie allumé par le soufre, et a recouvert l'Eglise même de ses cendres abominables, et plusieurs de ses ministres des flots impurs sortis de ce cloaque infect. Hélas! race de choix, sacerdoce royal, tribu sainte, peuple d'adoption (1P 9,9) ! qui donc à ta naissance divine, alors que des flots de grâces inondaient le berceau de la religion du Christ, eût pu croire que tu serais un jour couvert de tant d'ordures?


36 Cependant on les voit avec ces souillures entrer dans le tabernacle du Dieu vivant, et habiter dans le temple saint du Seigneur qu'ils profanent par leur présence, provoquant ainsi contre eux mille sentences de condamnation par les forfaits dont leur conscience est chargée, et par l'audace qu'ils ont de se présenter néanmoins ainsi dans le sanctuaire de Dieu. Assurément de tels ministres, bien loin d'apaiser la colère de Dieu, ne sont capables que de l'irriter davantage, car ils semblent dire dans leur coeur : Il n'ouvrira pas même les yeux sur nos crimes (Ps 9,33). Oui, ils l'irritent en effet, et attirent sur eux son courroux, peut-être, je le crains, par les choses même qui avaient pour objet de le rendre propice. Plût à Dieu plutôt, qu'avant , d'élever l'édifice, ils eussent commencé par s'asseoir, pour examiner si leurs ressources leur permettaient de le terminer! Plaise au ciel que ceux qui n'ont pas la force de pratiquer la continence n'aient pas l'imprudence d'embrasser le célibat! Car vraiment il s'agit ici d'un édifice coûteux à élever, c'est une tache qui dépasse les forces de bien des hommes. Mieux vaudrait pour eux, cela ne fait point de doute, prendre femme que de brûler, et faire leur salut dans les rangs des simples fidèles que de s'élever aux dignités ecclésiastiques pour y mener une vie criminelle et s'y préparer un jugement d'autant plus rigoureux. En effet, il y en a beaucoup, ce ne sont pas tous assurément, mais pourtant il y en a beaucoup, la chose est certaine, d'autant plus qu'ils sont trop nombreux pour qu'on ne les voie pas et d'ailleurs ils ne cherchent point à se cacher, tant ils ont perdu tout sentiment de honte, il en est, dis-je, beaucoup pour qui il semble que la liberté que leur laisse le sacerdoce est une occasion de vivre selon la chair, et qui, après avoir renoncé au remède que leur offrait le mariage, se livrent ensuite aux plus affreux désordres.



CHAPITRE XXI. Douce exhortation à la pénitence.

37 Mes frères, je vous en conjure, épargnez, épargnez vos âmes, épargnez le sang qui a été répandu pour vous. Evitez un affreux danger, prenez garde de tomber dans le feu qui est préparé aux pécheurs. Que la profession de la perfection chrétienne cesse d'être une illusion et montre enfin une vraie vertu sous les dehors de la piété; que le célibat religieux ne soit plus une vaine apparence, privée de toute vérité. Comment la chasteté ne serait-elle pas en péril au sein des délices, l'humilité au comble des richesses, la piété dans le torrent des affaires, la vérité dans ces conversations sans fin et la charité au milieu de ce siècle pervers ? Fuyez du milieu de Babylone, fuyez et sauvez vos âmes; accourez dans les villes de refuge où vous puissiez faire pénitence du passé, obtenir la grâce de Dieu dans le présent et attendre avec confiance la gloire de la vie future. Que le souvenir de vos fautes ne retarde point votre marche, car ordinairement la grâce surabonde là où le péché a abondé; que l'austérité de la pénitence ne vous effraye point, car toutes les souffrances de cette vie ne sont rien en comparaison du pardon de nos fautes passées, de la grâce qui dès maintenant nous comble de consolation et de la gloire qui nous est promise. Enfin il n'est pas d'amertume si grande que la farine du Prophète ne soit capable d'adoucir (2R 4,41), et que le bois de vie, la sagesse, ne rende agréable au goût (Pr 3,18).


38 Si vous ne pouvez croire à mes paroles, croyez du moins aux faits, rapportez-vous-en aux nombreux exemples qui le prouvent. On la voit de toutes parts les pécheurs accourir à la pénitence, et quoique d'un tempérament délicat ou amollis par l'éducation, ils ne comptent pour rien les austérités corporelles, pourvu qu'ils réussissent à calmer les remords de leur conscience alarmée. Rien n'est impossible à la foi, rien n'est difficile à l'amour, rien n'est dur aux âmes douces et rien n'est ardu aux humbles, car la grâce vient à leur aide et leur parfaite obéissance allège le poids de l’autorité. Jusques à quand serez-vous en proie à des pensées d'élévation et de grandeur (Ps 130,1) ? Certes, c'est une chose assez grande et un emploi assez admirable que d'être ministre de Jésus-Christ et dispensateur des divins mystères; mais l'ordre des pacifiques l'emporte encore de beaucoup sur tout cela, à moins qu'au lieu de passer par tous les degrés qui y conduisent, vous ne vouliez les franchir tous à la fois d'un seul bond. Plût au ciel encore que ceux qui s'avancent par de semblables moyens fussent aussi fidèles à remplir leur charge qu'ils ont été présomptueux en la briguant ! Mais il est bien difficile, peut-être même est-ce absolument impossible, que la racine amère de l'ambition produise jamais un doux fruit de charité. Quant à moi, je vous dis, ou plutôt ce n'est pas moi qui vous le dis, mais le Seigneur lui-même : « Quand vous serez invité à un festin de noces, asseyez-vous à la dernière place... car quiconque s'élève sera abaissé, et quiconque s'abaisse sera élevé (Lc 14,10-11). »



CHAPITRE XXII. Le devoir d'un bon pasteur est d'instruire son troupeau et de ne pas craindre d'être persécuté pour la justice.


39 « Bienheureux les pacifiques, dit le Seigneur, parce qu'ils seront appelés enfants de Dieu (Mt 5,9). » Remarquez bien qu'il loue ici non pas ceux qui parlent de paix, mais ceux qui procurent la paix; car il y a des hommes qui sont forts pour en parler, mais qui ne sauraient la procurer. Or de même que ce ne sont pas ceux qui connaissent la loi, mais ceux qui la pratiquent (Rm 2,13), qui sont réputés justes, ainsi ce ne sont pas ceux qui annoncent, mais ceux qui donnent la paix que Jésus-Christ déclare bienheureux. Pourtant je voudrais bien que tous ceux qui, parmi nous, aujourd'hui semblent être des Pharisiens, et le sont peut-être bien en effet, comme ils le paraissent, m tout en ne faisant pas ce qu'il faut, prêchassent du moins ce qu'il faut prêcher. Je voudrais que ceux qui ne peuvent annoncer l'Evangile s'ils ne sont payés pour cela, l'annonçassent du moins quand on les paye. Je voudrais qu'ils évangélisassent, ne fût-ce même que dans le but de gagner de quoi manger. « Le mercenaire, a dit le Sauveur, voit le loup et s'enfuit (Jn 10,12). » Plût à Dieu qu'aujourd'hui, tous ceux qui ne sont pas de vrais pasteurs voulussent du moins être de vrais mercenaires et non point de véritables loups pour leurs troupeaux. Plût à Dieu qu'ils ne fussent pas les premiers à déchirer leurs brebis et les premiers à s'enfuir, lors même que personne ne les poursuit! Plût au Ciel enfin qu'ils n'abandonnassent leur troupeau qu'en voyant le loup paraître! Après tout, on pourrait peut-être les souffrir tels qu'ils sont si on les voyait, surtout quand rien ne les menace, toucher leur salaire et, à ce prix, s'occuper de la garde de leur troupeau, au lieu de le troubler eux-mêmes et de l'écarter à plaisir des pâturages de la vérité , et de la justice. Il est certain que la persécution montre à tous les yeux quelle différence il y a entre ces mercenaires et les vrais pasteurs. Comment, en effet, ne serait-on pas sensible à des pertes temporelles, quand on ne songe qu'à des avantages temporels? Et comment serait-on prêt à souffrir, sur la terre, persécution pour la justice, quand on tient plus aux avantages de la terre qu'à la justice même? « Bienheureux, dit le Seigneur, ceux qui souffrent persécution pour la justice parce que le es royaume des cieux leur appartient (Mt 5,10). » C'est aux pasteurs qu'est annoncée cette béatitude, non point aux mercenaires et encore moins aux loups et aux voleurs. Tant s'en faut qu'ils souffrent persécution pour la justice, qu'au contraire ils ressentiraient moins de peine à subir la persécution qu'à voir triompher la justice, attendu que la justice condamne leurs oeuvres et qu'il leur est même pénible d'en entendre prononcer le nom.


40 Mais pour satisfaire leur avarice ou leur ambition, on les trouverait toujours prêts à s'exposer à toutes sortes de périls, à susciter toute esespèce de scandales, à supporter toutes les haines, à dévorer tous les affronts, à dédaigner toutes les critiques, en sorte que leur courage ur pour supporter toutes ces choses n'est pas moins funeste à leur troupeau que la lâcheté des mercenaires. Voici donc ce que le vrai Pasteur, le bon Pasteur, celui qui donne sa vie pour ses brebis, dit aux véritables pasteurs . « Vous serez bienheureux quand les hommes vous haïront, ne voudront plus vous souffrir auprès d'eux, vous proscriront et vous maudiront à cause du Fils de l'homme. Réjouissez-vous le jour où il en sera ainsi; soyez dans l'allégresse, car une magnifique récompense vous est réservée dans les cieux (Lc 6,22-23). » En effet, que peuvent avoir à craindre des voleurs ceux qui placent leur trésor dans les cieux? et pourquoi se plaindraient-ils du nombre de leurs tribulations, quand ils voient que la récompense augmente avec l'épreuve? Au contraire ils se réjouiront, ils en ont bien sujet, ils se réjouiront, dis-je, de voir que ce qui s'accroît c'est moins encore la persécution qu'ils endurent, que la récompense qu'ils en recevront un jour, et ils s'estimeront d'autant plus heureux qu'ils auront plus à souffrir pour Jésus-Christ, auprès de qui les attend un plus riche salaire. Que craignez-vous, hommes de peu de foi? C'est une vérité indubitable appuyée sur l'infaillible Vérité elle-même « que nulle adversité ne peut nuire à celui que nulle iniquité ne domine (Ex oral. et collect. Eccles.). » Mais c'est trop peu de ne pas nuire, il n'est pas d'adversité qui ne soit un avantage si on la souffre pour la justice et en vue de Jésus-Christ, « près de qui les souffrances des pauvres porteront un jour leur fruit (Ps 9,19). » Qu'à lui soit la gloire, aujourd'hui, toujours et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.




Bernard aux prêtres 32