Bernard - St Malachie 13075

13075 75. En effet, quelle raison pouvait-on avoir de pleurer plus longtemps Malachie, comme si sa mort n'avait point été une mort précieuse, et plutôt un sommeil qu'une mort, le port même de la mort et la porte de la vie? Malachie, notre ami, dort seulement et moi je verserais des larmes? Elles ne se justifieraient que par l'usage, non point par la raison. Si Dieu a donné à son serviteur bien-aimé un sommeil, mais un sommeil pendant lequel il se verra naître des enfants qui seront l'héritage du Seigneur et trouvera sa récompense dans le fruit de ses entrailles (Ps 127,6), qu'y a-t-il là qui sollicite nos pleurs. Pourquoi pleurerai-je sur celui qui est enfin sorti de la vallée de larmes? Il est au comble du bonheur, il triomphe, il entre dans la joie de son Seigneur, et moi je verserais sur lui des larmes? J'envie son bonheur, mais je ne le lui envie pas.

Cependant on prépare les funérailles; on offre le saint sacrifice pour lui; enfin on accomplit tout ce qu'on a la coutume de pratiquer en pareil cas, avec la plus grande dévotion. A l'écart se tenait un enfant ayant un bras paralysé, qui lui nuisait beaucoup plus qu'il ne lui était utile. Quand je m'en aperçus, je lui fis` signe de s'approcher, et lui prenant sa main paralysée, je la plaçai sur celle du saint évêque qui lui rendit la vie. Ainsi le don des miracles survivait dans ce mort, et la main d'un mort fut pour cette main morte elle-même, ce que les ossements d'Elisée avaient été pour le corps d'un mort (2R 13,12). Cet enfant était venu de bien loin avec sa main morte et pendante, mais il la remporta saine et guérie quand il retourna dans son pays. Lorsque toutes les cérémonies d'usage furent terminées, on confia à la terre le corps de Malachie dans la chapelle même de Marie la sainte mère de Dieu, où il aimait à venir prier, l'an de l'incarnation de Notre Seigneur onze cent quarante-huit, le troisième jour de novembre. Mais ce dépôt que vous nous avez confié, ô bon Jésus, vous appartient, ce trésor enfoui chez nous est bien votre trésor. Nous le conservons pour vous le rendre le jour où vous le réclamerez, je vous demande seulement qu'il ne quitte jamais ses hôtes et que nous ne cessions point d'avoir pour chef celui que nous avons eu pour commensal, en attendant que nous régnions tous ensemble lui et nous, avec vous dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

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Saint Bernard a fait deux sermons sur Malachie, on les trouvera plus loin.



Bernard - St Malachie 13075