Catéchèses Paul VI 14569

14 mai 1969: L'UNITE FECONDE DE LA FOI

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Chers Fils et Filles,



Nous avons déjà parlé, dans des audiences générales comme celle-ci, de certaines expressions qui ont eu beaucoup de succès après le Concile : une d'entre elles est celle de « pluralisme ». Ce n'est pas le Concile qui l'a inventée, même si elle fait son apparition dans certains documents conciliaires (cf. Gravissimum educationis,
GE 7 Gaudium et ). On peut dire qu'il en a facilité l'usage, en mettant en évidence le concept et la réalité, et donc en autorisant son application dans des domaines très étendus du savoir et de la vie. Nous rencontrons ce pluralisme dans les variétés sans fin du cosmos ; dans la multiplicité protéiforme des aspects du monde contemporain ; dans l'égalité en dignité et en droits fondamentaux de chaque peuple, de chaque être humain, de chaque conscience ; dans le principe de la liberté reconnue à tous, de professer sa propre religion sans intervention illégale du pouvoir civil et en dehors de la violence raciste ou du milieu; dans la possibilité d'autoriser chaque langue à s'exprimer à sa manière dans la liturgie, et encore, dans l'évaluation positive de la multiplicité de fait des différentes confessions chrétiennes sur la voie de l'oecuménisme ; dans l'honneur attribué à chaque évêque, à chaque église locale, à chaque activité valable du laïcat catholique ; dans la légitimité de formulations diverses des doctrines théologiques relatives à l'unique vérité révélée et définie par le magistère de l'Eglise, et ainsi de suite. Le monde est complexe, chacune de ses visions contient une richesse de réalité et présente une multiplicité d'aspects qui exigent un pluralisme de concepts d'évaluations, de comportement : pluralisme scientifique, politique, linguistique, administratif, etc. Dans le domaine ecclésial également la complexité de ses composantes doctrinales, hiérarchiques, rituelles, morales, ne peut s'exprimer qu'en formes et en langages pluralistes. Le grand respect, ensuite, que notre religion marque pour chaque moment, pour chaque parcelle, pour chaque acte de ses composantes, soit divines, soit humaines, oblige d'éviter toute simplification nivellatrice ou appauvrissante. Notre vie spirituelle se déroule dans un enchaînement très compliqué et très délicat de réalités, de vérités, de devoirs, de vibrations psychologiques et sentimentales, dont il faut tenir compte. La civilisation se mesure à la capacité pluraliste de l'homme. On peut dire que la sainteté se déroule dans une complexité toujours plus grande de rapports spirituels et moraux. Tout est complexe, tout est profond, tout porte la trace de l'indéfini, qui est comme un reflet de l'Infini en qui tout a son origine. Celui qui voit, qui observe, qui réfléchit, qui prie, se sent dominé par la multitude, par la grandeur, par la découverte, par le mystère des choses. Le pluralisme est dans les choses; ensuite dans les mots et les paroles.


Vision totale de la vie


Dans le même temps (et cela est aussi une merveilleuse réalité) tout est marqué par un principe d'unité non moins évident. L'être lui-même, dans chacune de ses expressions, est tourné vers une unité mystérieuse et en même temps dévoilée. C'est extraordinaire ! Mais laissons aux maîtres de la pensée de s'avancer davantage sur ce chemin fascinant et tourmenté. Il nous suffit d'un regard qui peut retenir notre esprit dans ce lieu et à ce moment, lieu et moment de foi, de rencontre de nos âmes avec ce monde religieux que nous appelons le christianisme, et sous son aspect concret, l'Eglise catholique.

Sommes-nous pluralistes, nous ? La réponse à cette demande ne peut être que multiple. C'est-à-dire, oui, nous le sommes, comme nous le disions plus haut : nous le sommes parce que catholiques, c'est-à-dire universels ; aucun écran ne met des limites à la considération de la réalité, de la vérité. Notre vocation est pour l'Universel, nous sommes totalitaires dans notre vision du cosmos, de l'humanité, de l'histoire, du monde. Pour ce qui est de l'expérience humaine, nous répétons la célèbre phrase de Térence : « homo sum, et nihil humani a me alienum puto », je suis homme, et rien de ce qui est humain ne m'est étranger. Celui qui craint de perdre la vision complète de la vie et la possession de ce qui vaut la peine d'être possédé, en professant sincèrement la religion catholique, cède à un préjugé irréfléchi. Nous pourrions même dire que seule la religion catholique a la vision du tout, la sagesse supérieure du monde, de l'être humain, des destins du temps et de la vie.

Mais il est nécessaire maintenant de rappeler ici la légitimité et les limites de notre pluralisme religieux. Un mot seulement, plus comme exemple que comme explication. On a fait des objections au pluralisme introduit dans l'Eglise après le Concile dans la liturgie, que nous pourrions comparer, avec S. Augustin dans son commentaire au psaume 44, à l'habit somptueux de la reine biblique : « L'habit de cette reine (l'Eglise), qu'est-il ? — demande S. Augustin —. Il est précieux et varié : ce sont les mystères de la doctrine dans les diverses langues. Il y a une langue africaine, une autre syriaque, une autre grecque, une autre hébraïque, et d'autres encore : ces langues font le tissu bigarré de l'habit de cette reine. Mais comme toutes les variations de l'habit s'accordent dans l'unité, ainsi toutes les langues en une seule foi. Qu'il y ait variété dans le vêtement, mais non déchirure » (Enarr. in PS 44, PL 36, 509).


Variété des écoles théologiques


Ainsi pourrait-on parler du pluralisme théologique. Mais ici nos propos doivent être beaucoup plus prudents, à cause des lois mêmes de la vérité révélée, de l'interprétation de la Parole de Dieu. On peut soutenir le caractère inadéquat de toute parole humaine pour exprimer la profondeur insondable du contenu théologique d'une formule dogmatique (cf. Rm 11,33 ss. ; denz.-sch. DS 806), et soutenir l'interprétation exacte d'une même vérité dogmatique dans l'annonce kérygmatique, dans l'apologétique, la catéchèse, la prédication, et encore dans la diversité légitime des différentes écoles théologiques et spirituelles. Mais nous ne serions pas fidèles au caractère univoque de la Parole de Dieu, au magistère de l'Eglise, qui en dérive, si nous prenions notre parti d'un « libre examen », d'une interprétation subjective, d'une subordination de la doctrine définie aux critères des sciences profanes, et encore moins aux modes de l'opinion publique, aux goûts et aux déviations (aujourd'hui tellement prononcées) de la mentalité spéculative et pratique dans la littérature courante. Nous savons combien l'Eglise est exigeante sur ce point décisif de nos rapports avec le Christ, avec la tradition, avec notre salut. La foi n'est pas pluraliste. La foi, même en ce qui regarde l'énoncé des formules qui l'expriment, est très délicate et sévère ; et l'Eglise veille et exige que la parole exprimant la foi n'en trahisse pas la vérité substantielle. Doit-on nous faire le reproche d'être vigilant dans l'exigence linéaire de l'Evangile « que votre parole soit oui, oui, non, non » comme disait Jésus (Mt 5,37 Jc 5,12) ; c'est-à-dire claire, directe, honnête, univoque, sans sous-entendus, sans réticences, sans incohérences, sans erreurs ?

Chers Fils, soyez ouverts à toute la vérité, immense, très riche, toujours capable d'approfondissements et d'applications nouvelles ; à celle que le Saint Esprit lui-même nous enseigne (Jn 15,13), et dont l'Eglise éducatrice est gardienne et interprète autorisée (cf. Ga 1,8) ; mais soyez vous-mêmes fiers jaloux et heureux dans l'unité continue et féconde de la foi en laquelle seule se trouvent vérité et salut. Que vous y réconforte Notre Bénédiction Apostolique.





21 mai 1969: L'HOMME DANS LE COSMOS

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Chers Fils et Filles,



Nous sommes tous tellement dominés par les images, les nouvelles, l'événement du voyage spatial qui se déroule ces jours-ci, que nous ne pouvons pas ne pas en faire l'objet de notre brève méditation d'aujourd'hui.


Le langage du cosmos


Les yeux, ou mieux les pensées du monde suivent, encore une fois, mais peut-être cette fois-ci avec un intérêt encore plus intense, l'itinéraire stupéfiant des astronautes, qui vont à une vitesse impensable explorer de près le satellite de notre terre, la lune, amie silencieuse de nos nuits, aux aspects changeants, froide et argentée. On regarde, on admire, on réfléchit, on espère, on prie. L'horizon devient astronomique, non seulement par notre observation sensible, mais par l'ouverture de notre mentalité. L'astronomie a toujours été une grande maîtresse de la pensée, que les notions communes, pauvres et empiriques, et, de plus, empruntées aux doctrines des autres, remplissaient d'images fantastiques, de rêves invraisemblables, de systèmes scientifiques hypothétiques et discutables, de superstitions innombrables, si bien qu'on peut affirmer que dans la culture courante la science du ciel est pour ainsi dire oubliée et se limite à des notions élémentaires. Les anciens en savaient plus que nous, sinon sur l'astronomie, du moins sur l'astrologie. Une des difficultés pour comprendre, par exemple, la « Divina Commedia », est cette référence constante, que Dante mêle à son poème sublime, aux phénomènes de l'horizon céleste. Nos hommes de science modernes connaissent certainement des choses merveilleuses sur le ciel, le cosmos, ses structures chronologiques et mathématiques, et aujourd'hui, plus que jamais, sur sa composition physique et sur son évolution dynamique ; mais par rapport à la société ils ne sont que des initiés qui étudient, parlent, vivent de leur côté. Les intérêts de l'homme tournent plus que jamais autour de la terre, dans le cadre minuscule de nos jours et dans le bouleversement immédiat de nos expériences.

Et voilà que nous sommes invités, comme si une fenêtre dans la chambre de notre vie habituelle s'ouvrait, à regarder dehors, dans l'espace, dans le ciel, dans le cosmos. Et comme ceci était un phénomène humain, qui a justement pour théâtre le ciel, nos pensées habituelles s'arrêtent presque et se fixent dans le vide qui est devant nous. Nous ne sommes pas étonnés ou intéressés, mais troublés. Un cadre de réalité, immense, mystérieux, que nous croyions pouvoir oublier — parce que n'étant pas astronomes il nous est lointain, insaisissable et inexpérimentable — se présente au contraire devant nous. La vision va très loin, jusque dans les profondeurs de l'espace ; l'univers nous dit au moins qu'il existe. Certaines nuits limpides d'été, peut-être nous aussi avons-nous pensé — en contemplant les innombrables étoiles qui parsèment d'étincelles la voûte immense du ciel — ou essayé de penser au mystère de l'univers ; peut-être la vision merveilleuse et mystérieuse du dehors a-t-elle pris une expression intérieure avec les notes du chant nocturne du berger errant dans les solitudes infinies de l'Asie, dont parle Leopardi ; peut-être le sens écrasant de l'infini, qui domine l'espace et le temps, nous a-t-il donné, à nous aussi, un frémissement métaphysique de l'océan de l'être où se trouve notre vie si limitée, mais qui s'appelle vie, conscience, esprit.


Le reflet divin dans l'homme


Il ne sera pas inutile de nous laisser envahir un moment par ces impressions du langage muet de la réalité suprême que nous pouvons percevoir, le cosmos, même si la perfection technique qui nous les transmet atténue le sens qui doit en tout cas les dominer : l'émerveillement, la surprise de la découverte, de la conquête et du mystère, toujours plus présent, au sujet des choses, du monde, de l'univers.

Admirer, admirer, nous devons admirer. Et pour que cet effort heureux ne soit pas vain, Nous vous exhortons à l'orienter dans deux directions, Fils très chers. Vers l'homme, premier objet de notre admiration. Qui est l'homme capable de telles oeuvres, de les concevoir, de les organiser, de les accomplir, de les mesurer aux difficultés disproportionnées qu'elles présentent, et à la petitesse de son être, limité et vulnérable ? Comment possède-t-il une telle capacité d'étude, de connaissance, de domination scientifique et technique sur les choses, sur le monde ? Et comment, faible et conditionné comme il est, trouve-t-il le courage d'oser de telles entreprises ? Encore plus que la lune, c'est l'homme qui s'illumine devant nous ; aucun autre être que nous connaissions, aucun dans ses instincts vitaux, ne peut être comparé à l'être prodigieux qu'est l'homme. Il y a quelque chose dans l'homme qui dépasse l'homme, il y a un reflet qui a quelque chose de mystérieux, de divin. Les mots bien connus de notre conversation avec Dieu, viennent aux lèvres spontanément : « Quand je contemple les cieux, oeuvre de tes mains (ô Seigneur), la lune et les étoiles que Tu y a mises, qu'est donc l'homme pour que tu te souviennes de lui ? Quoique de peu, tu l'as fait inférieur aux Anges, tu l'as couronné de gloire et d'honneur, et tu l'as mis à la tête des oeuvres de tes mains; tu as tout mis à ses pieds » (
Ps 8,4-7). Mais comment ? Mais pourquoi ? C'est le psaume qui répond encore: « Tu as répandu au-dessus de nous la lumière de ton visage, ô Seigneur » (Ps 4,7). Voilà : l'homme porte en lui le reflet de Dieu ! il a été créé à son image : « Dieu créa l'homme à son image... ; il les créa homme et femme. Et Dieu les bénit en disant : croissez et multipliez-vous et peuplez la terre et dominez-la... » (Gn 1,27-28). Cette origine divine, ce pouvoir dominateur de l'homme s'expliquent pour notre esprit à la lumière des faits ; ces faits que nous sommes aujourd'hui en train de contempler, qui font moins l'orgueil de l'homme que sa dignité! ils ne le glorifient pas en tant que principe, cause en soi, mais ils le glorifient comme chef-d'oeuvre et comme collaborateur de Dieu (cf. 1Co 3,9). Nous devrions toujours nous en souvenir.


Le Principe créateur


L'autre chemin de notre admiration est Dieu lui-même. Si nous sommes vraiment intelligents, c'est-à-dire si nous ne bornons pas notre attention à l'apparence physique des choses, à leur cadre scientifique, mais que nous y lisions dedans, dans leur secret ultraphysique (c'est-à-dire métaphysique), et que nous cherchions à comprendre quelque chose de ce qu'elles sont, nous comprendrions une vérité évidente : elles ne sont pas à elles-mêmes, leur cause ! Et alors comment se fait-il qu'elles existent ? Comment se fait-il qu'elles sont si grandes, si ordonnées, si belles, si unies ? Une rationalité coercitive nous oblige à arriver au seuil de cette sagesse suprême que nous appelons religion. Une révélation naturelle, et aujourd'hui, à un moment de triomphe scientifique, nous ramène à la source de toute chose, à l'Un nécessaire, au Principe créateur, au Dieu vivant. Ne laissons pas échapper. Fils très chers, une occasion comme celle-ci pour nous retrouver humbles, pieux, religieux, et heureux, devant des signes si évidents, pour qui veut les voir, de Sa présence suprême dans notre monde et dans notre vie. Adorons en silence.

Et tous ensemble, nous croyants, nous chrétiens. Avec Notre Bénédiction Apostolique.





28 mai 1969: LA RELIGION DEVANT UN MONDE QUI CHANGE

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Chers Fils et Filles,



C'est la mentalité de l'homme moderne, la nôtre à tous, pouvons nous dire, d'être persuadés que « tout change ». L'observation de la vie contemporaine nous donne l'impression que toute chose est en voie de transformation, est en mouvement. Rien de ce qui touche notre expérience n'est stable ni sûr ; tout change, tout évolue, tout passe et tout se rénove. Nous sommes marqués par cette instabilité des choses : et si ce sentiment nous cause-tout d'abord une certaine crainte et quelque regret, il devient rapidement un sentiment de satisfaction, parce que nous voyons que ce grand phénomène général de mutation prend des noms suggestifs : évolution, progrès, dynamisme, découverte, conquête, dépassement, développement, renaissance, renouveau, etc.


Un monde en transformation


L'expérience de ce phénomène général devient chaque jour plus impressionnante devant l'accroissement rapide et merveilleux des sciences, spécialement des sciences physiques et mathématiques. On dirait que l'homme apprend maintenant à connaître le monde ; et de l'exploration scientifique, de la recherche, comme on dit aujourd'hui, on tire tant de résultats nouveaux, que l'homme de science en est comme enivré ; et tandis que, d'une part, il continue à perfectionner ses recherches, d'autre part il passe immédiatement à l'application pratique, utilitaire, des nouvelles connaissances ; à la science succède la technique ; et celle-ci se développe, au moyen de machines et d'instruments très nouveaux ainsi que d'organisations puissantes, et devient industrie, avec tout ce qui en découle dans le domaine économique et social, dans la vie de l'homme moderne.


Actualité du problème religieux


Nous pouvons faire des considérations semblables au sujet des sciences relatives à l'homme, la médecine, la psychologie, la sociologie, la politique. Et c'est également le tour de la religion : qu'adviendra-t-il de la religion du fait de cette transformation générale ? Beaucoup disent : elle est finie ; vous le savez. Mais d'autres disent : non seulement elle n'est pas finie, mais elle s'impose à plus forte raison, car le besoin de dire sur toute chose le premier et le dernier mot — l'alpha et l'oméga — se fait plus prenant ; et le fait d'adorer est aujourd'hui non seulement légitime mais un devoir. La religion se trouve, sinon professée, du moins discutée et, parfois, à la lumière trouble d'événements violents ou d'états d'âme angoissés, avec des termes implorants et désespérés, qui la font regretter et, sous certaines formes, encore désirer. La parole du prophète Jérémie revient à l'esprit : « Ils m'ont abandonné (dit le Seigneur), moi la source d'eau vive, pour se creuser des citernes, citernes lézardées qui ne tiennent pas l'eau » (
Jr 2,13).

La question religieuse se présente donc à nouveau. C'est sur ce point que Nous attirons aujourd'hui votre attention, pour un instant et avec des paroles sans doute trop simples. Le problème est le suivant: la religion ne serait-elle pas elle aussi sujette à quelques changements importants ? Pour maintenir ce discours dans le domaine qui nous concerne, notre religion n'est-elle pas elle aussi en voie de mutation ?

A cet égard Nous vous adressons une première prière : faites attention ! attention à la complexité du problème. On peut considérer la question religieuse sous l'aspect subjectif ; c'est-à-dire celui qui est propre à l'homme, mental, psychologique, philosophique. Et nous savons tous à quelles mutations, à quelles fantaisies, à quelles manipulations, à quels doutes, à quelles négations, en somme à quelle métamorphose l'idée religieuse a été et demeure exposée ces derniers temps. La discussion reste toujours ouverte : mais nous soutenons que notre raison (cf. de lubac, Sur les chemins de Dieu, Aubier 1955), notre expérience (cf. frossard, Dieu existe, Fayard 1969), notre foi (cf. guardini, Von Leben des Glaubens, Grunewald 1934 ; trad. Vie de la Foi, Cerf 1958) sont aujourd'hui plus que jamais, comme dans le passé (cf. S. thomas, Summa contra Gentes), en mesure de s'exprimer avec clarté et de persévérer à travers de nouveaux témoignages de pensée et de vie soutenant le choc, ou la discussion des objections propres aux mentalités philosophiques, littéraires et pratiques d'aujourd'hui (cf. zundel, Recherche du Dieu inconnu, Ed. Ouv. 1949 ; mouroux, le crois en Toi, Cerf. 1965 ; ch. moeller, L'homme moderne devant le salut, Ed. Ouvr. 1964 ; renee casin, Naufrageurs de la foi, Ed. Lat. 1968).

Ainsi l'homme, cet être aux cent visages, peut se présenter sous des aspects et des attitudes très diverses, protéiformes, par rapport à la religion, mais il reste un homme, c'est-à-dire un être fondamentalement tel qu'il est, non seulement capable de Dieu mais ayant besoin de Lui ; disons que plus il est et devient homme, plus se manifeste en lui l'exigence de Dieu ; et donc la religion, comprise comme le rapport avec la divinité, ne change pas, alors que les expressions de la vie humaine se modifient. A cet égard nous n'avons qu'à souhaiter une nouvelle efflorescence d'études et de recherches religieuses, c'est-à-dire de littérature religieuse, philosophique, apologétique, catéchétique, artistique ; c'est une question de langage. Renouvelons le langage religieux.


Permanence de la doctrine


Mais il faut considérer l'aspect objectif de la religion, c'est-à-dire sa vérité, son contenu, sa réalité. Pour nous croyants, pour nous catholiques à la foi univoque, conservée, exposée, défendue par cette institution providentielle qu'est le magistère ecclésiastique, toujours prêt à répéter la parole de Jésus « Ma doctrine n'est pas la mienne, mais celle de Celui qui m'a envoyé » (Jn 7,16), cette religion est ce qu'elle est, et ne change pas avec les modifications d'époque et de moeurs ; et elle doit être acceptée dans sa formulation authentique, originelle, et autorisée, même si elle est difficile, même si elle est différente de la mentalité de l'auditeur, même si elle est mystérieuse (cf. S. thomas, Summa contra Gentes, SCG 4,76). Vous, rappelez-vous comment se conclut, dans l'Evangile, la discussion sur l'eucharistie à Capharnaüm ? Les auditeurs trouvaient la parole du Seigneur absurde : « Ce langage-là est trop fort ; qui peut l'écouter ? » (Jn 6,60) et Jésus, abandonné de la foule de ses auditeurs s'adresse aux disciples, eux aussi déconcertés et indécis : « Voulez-vous partir vous aussi ? » (Jn 6,67).

Cela est grave. Aujourd'hui spécialement, quand l'homme ne veut accepter que ce qu'il comprend (et ce n'est même pas exact, car l'homme moderne est plus que jamais dépendant des autorités dans le domaine scientifique). Mais nous devons vivre de foi, c'est-à-dire en faisant confiance à la Parole de Dieu, même si elle dépasse notre intelligence. Avec deux remarques : la foi est obscure mais non aveugle ; c'est-à-dire elle a des raisons qui la justifient, extérieurement et intérieurement. Nous l'avons déjà dit plusieurs fois avec saint Augustin : « habet namque fides oculos suos » la foi a des yeux (Ep 120, PL 33, 456). De plus : elle demande d'être étudiée, approfondie, confrontée avec le savoir naturel, appliquée ; et, Nous voudrions ajouter : vérifiée dans l'expérience vitale. Vécue, la foi devient une lumière ; aimée, elle devient une force ; méditée, elle devient esprit. Et donc, on peut très bien, en la gardant dans son intégralité et sa pureté, la mettre en contact avec toutes les grandes transformations, honnêtes et nouvelles, de la vie moderne, elle s'y révélera pour ce qu'elle est : principe de vie éternelle.

Nous vous souhaitons, Fils très chers, d'en faire l'expérience béatifiante, avec Notre Bénédiction Apostolique.


Salutations:


Chers Fils et chères Filles de langue française,

Nous sommes heureux de saluer parmi vous les membres de la Fédération internationale de l’Industrie du Médicament, réunis pour la première fois à Rome, afin d’associer leurs efforts pour harmoniser la législation et la technique de l’industrie pharmaceutique. De grand coeur, Nous vous encourageons, chers Fils, à contribuer, selon vos propres moyens, au progrès de la santé dans le monde, en relation avec les organismes internationaux qui prodiguent leur aide aux hommes moins favorisés.

Nous accueillons aussi très volontiers les élèves officiers congolais et burundais, venus, avec leurs officiers belges et leur aumônier, en pèlerinage au coeur de l’Eglise.

Nous formons les meilleurs voeux pour les Religieux de Saint Vincent de Paul, qui viennent d’avoir leur chapitre spécial, en vue de poursuivre, dans les milieux ouvriers notamment et parmi les jeunes, un apostolat fécond, imprégné d’une charité profonde, d’un souci d’éducation humaine et spirituelle, en conformité avec les conditions de notre temps.

Enfin Nous n’oublions pas deux méritantes Congrégations de religieuses qui sont représentées parmi Nous ce matin: les Filles de la Sagesse, fondées par Saint Louis Marie Grignion de Montfort, et les Ursulines de l’Union romaine, qui s’attachent à marcher dans le sillage de Sainte Angèle Mérici. Vous venez vous aussi, chères Filles, de rechercher, dans vos chapitres, la vie évangélique qu’il vous faut mener aujourd’hui, selon votre vocation propre. Repartez joyeusement vers votre apostolat, sûres de l’amour du Seigneur et de la confiance de son Eglise.

A tous et à toutes, Nous donnons de grand coeur Notre paternelle Bénédiction Apostolique.

...


Chers Fils,

Vous êtes venus accomplir ensemble un «pèlerinage de réconciliation au Mont Cassin», sous le patronage de la Fédération européenne des Anciens Combattants, et vous avez tenu à recevoir Notre Bénédiction. Nous imaginons facilement les chers souvenirs, à la fois douloureux et glorieux, qui sont les vôtres, sur ce front où vous avez tant peiné. Vous savez le prix de la paix, et vous voulez la promouvoir solidement, dans une fraternité toujours plus large. Nos voeux paternels vous accompagnent, avec Notre Bénédiction Apostolique, que Nous étendons de grand coeur à tous ceux qui vous sont chers.

(suite en allemand)



2 juin 1969: LE SENS DE LA FETE-DIEU ET DE LA FETE DU SACRE-COEUR

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Chers Fils et Filles,



Nous profitons de l'occasion fournie par les deux prochaines fêtes liturgiques, la Fête-Dieu et celle du Sacré Coeur, pour vous faire réfléchir à un aspect fondamental de la révélation chrétienne, c'est-à-dire de la compréhension que nous pouvons avoir de ce que le Christ a manifesté sur le plan divin. Nous parlons avec la simplicité et la brièveté habituelles, mais c'est un sujet de très grande importance.


En face de la Révélation


La révélation des vérités religieuses surnaturelles (et d'autres vérités naturelles liées à elles) est survenue d'une façon bien différente de la présentation d'un texte de doctrines théologiques déjà claires et formulées. Elle a été progressive, résultat de Paroles et de faits, de manière à inviter les hommes à connaître Dieu, quelque chose de Dieu, pour les unir à Lui et ainsi pourvoir à leur salut (cf. Dei Verbum,
DV 2). La révélation est une ouverture sur des Réalités mystérieuses. Citons, parmi tant d'autres, la parole de saint Paul : « Il m'a été accordé... de mettre en pleine lumière la dispensation (en grec : economia ; en latin : dispensatio) du "mystère", du "sacrement" caché depuis des siècles en Dieu » (Ep 3,9). Cette exposition, cette présentation alors qu'elle est ouverte, sûre, très claire, n'est pas contraignante, n'est pas comparable à une démonstration scientifique, mais est offerte de manière à respecter la liberté de l'homme auquel la révélation est présentée. Elle n'est pas impénétrable, elle n'est pas équivoque, mais elle est encore voilée. Voilée par la nature ineffable et transcendante, propre à la pensée divine, elle est voilée également à cause de la manière dont elle a été présentée. Jésus lui-même le fera remarquer à propos de ses propres enseignements, donnés en paraboles (cf. Mc 4,11 cf. pascal, Pensées, 194). La vérité, la réalité divine nous est manifestée par la voie des signes. Il y aurait beaucoup à dire à ce sujet.

Mais maintenant une chose nous suffit : pour bénéficier de la Révélation, il faut aussi un acte de la part de l'homme. Pour voir, il faut ouvrir les yeux. Pour recevoir la révélation, il faut croire. Croire, sous cet aspect, signifie non seulement accepter passivement et paresseusement, mais découvrir; c'est-à-dire chercher à pénétrer le sens de la Parole de Dieu, le monde, le voile, qui la présente et la contient, et en même temps la soustrait à la curiosité de notre connaissance spontanée et naturelle.


Dieu est Amour


Un autre chapitre immense de la vie chrétienne ! Arrêtons-nous sur une page de ce chapitre, que nous pouvons considérer comme le résumé des questions religieuses fondamentales. Cette page est celle-ci : quelle découverte le fidèle arrive-t-il à faire en cherchant le sens total et profond de la révélation divine ? La découverte est celle de l'Amour. Dieu s'est surtout révélé Amour. Toute l'histoire du salut est Amour. Tout l'Evangile. Nous pourrions citer bien des paroles de la Sainte Ecriture à cet égard. Une de ces paroles qui Nous vient aux lèvres fait partie de l'Ancien Testament : « De loin Yahvé lui est apparu. D'un amour éternel je t'ai aimé, aussi, t'ai-je conservé ma faveur » (Jr 31,3). Toute l'épopée de la rédemption est Amour, miséricorde, effusion de la charité de Dieu envers nous. Et l'histoire du Christ est résumée dans la célèbre synthèse de saint Paul : « Je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m'a aimé et s'est livré pour moi » (Ga 2,20). Il faut comprendre ! Nous recommandons aux esprits attentifs une autre phrase merveilleuse de l'Apôtre : « Vous recevrez la force de comprendre avec tous les saints ce qu'est la largeur, la longueur, la hauteur et la profondeur (aujourd'hui nous dirions les dimensions, et ici il y en a quatre !), vous connaîtrez l'Amour du Christ qui surpasse toute connaissance et vous entrerez par votre plénitude dans toute la plénitude de Dieu » (Ep 3,17-19).


Comment Dieu nous aime


Arrêtons-nous là. Cela suffit pour que nous puissions célébrer les deux fêtes que Nous avons rappelées, l'Eucharistie et le Sacré Coeur, et qui nous conduisent à ce point de convergence qui nous les offre et nous fait goûter, sinon comprendre, quelque chose de leur vrai sens religieux, de leur réalité profonde : « Ainsi Dieu a aimé... » (cf. Jn 3,16).

Cela nous touche, nous émeut, nous bouleverse. Si quelqu'un comprend qu'il a été aimé, aimé jusqu'à un point suprême et impensable, jusqu'à la mort, silencieuse, gratuite, cruelle et subie jusqu'à la consommation totale (Jn 19,30), par quelqu'un que nous ne connaissons même pas, et après l'avoir connu, que nous avons nié et offensé ; si quelqu'un — disions-Nous — a compris qu'il est l'objet d'un tel amour, de tant d'amour, il ne peut plus rester indifférent. Dante le disait également : « amor che a nullo amato amar perdona » (Inf. 5, 103) ; l'hymne liturgique le dit : « Quis non amantem redamet ? ». Voilà l'origine du culte au Sacré Coeur de Jésus, quand nous savons que le mot « coeur » est symbole, signe, synthèse de notre Rédemption, vue dans l'intériorité divine et humaine du Christ (cf. l'Encyclique de pie XII, Haurietis aquas, de 1956 ; cf. à propos de l'aumônier puritain de Cromwell, Thomas Goodwin : bremond, Hist sent, rel., III, 641).

Jésus nous a aimés, dit le Concile, aussi « avec un coeur d'homme » (Gaudium et spes, GS 22). Et comment ! Voici le thème de Notre dialogue aujourd'hui. Fils très chers, savez-vous cela ? Y pensez-vous ? Comment comptez-vous y répondre ?

Que Notre Bénédiction Apostolique vous aide à y répondre avec amour.





18 juin 1969: REALITES ACTUELLES DE LA CONDITION OUVRIERE

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Chers Fils et Filles,



Il Nous semble lire dans vos esprits une question: dites-nous quelque chose de votre voyage à Genève, de votre rencontre avec cette grande institution internationale qui s'occupe depuis cinquante ans, au plus haut niveau, des problèmes du travail. Ce voyage du Pape à l'Organisation Internationale du Travail fut une chose extraordinaire : comment a-t-il été accueilli ? Quelle signification doit-on lui reconnaître ? Quels résultats cette rencontre peut-elle avoir ? Quels engagements en dérivent pour l'Eglise et le monde catholique ? etc. Fils très chers, Nous comprenons votre curiosité et Nous Nous réjouissons de l'intérêt que vous montrez pour ce voyage, Nous apprécions par-dessus tout l'importance que vous attachez à cette institution qui se caractérise par la promotion du monde du travail et le contact que l'Eglise sent le devoir d'avoir avec celui-ci. Mais Nous ne répondrons pas à vos demandes. Nous ne sommes pas habitué à donner des interviews. Et puis il y a déjà eu tant de publicité autour de cet événement que Nous ne voulons pas en faire plus encore. Laissons parler les faits qui méritent d'être rappelés et sur lesquels il faut réfléchir.


Lumières et ombres dans le inonde du travail


Nous vous dirons seulement deux choses. La première : Nous avons été accueilli avec une courtoisie extrême ; et de la manière qui Nous plaît : avec simplicité et avec respect, non seulement envers notre modeste personne mais encore plus envers notre parole et notre mission, si proches et si convergentes, l'une et l'autre, par tant d'aspects de la haute fonction de cette organisation. Nous Nous sentons obligé de renouveler publiquement notre reconnaissance pour l'accueil qui Nous a été fait, à Nous et aux personnalités qui Nous accompagnaient, comme Nous voulons répéter également les voeux exprimés en cette circonstance pour l'oeuvre de cette institution si méritante.

La seconde chose : l'impression générale que de cet observatoire, certainement un des plus élevés, Nous avons eue du monde du travail. Vous savez tous combien ce monde est complexe, combien il est marqué par les transformations sociales, économiques, spirituelles qui en dérivent, agité hier comme aujourd'hui, de contrastes idéologiques, d'intérêts divergents, de conceptions opposées, sociales et politiques. Vu de haut, dans une vision panoramique, quelle a été notre impression ? Elle fut optimiste !

Non pas que soient résolues toutes les questions, qui font encore du monde du travail un domaine de phénomènes tumultueux et de besoins immenses : le ferment que le travail moderne produit dans notre société que l'on appelle technocratique ; on découvre encore des situations criantes d'angoissantes nécessités humaines. Le réveil inquiet de la conscience des classes laborieuses est toujours une source d'appréhension ; la crainte augmente d'une orientation fausse de la mentalité moderne vers la possibilité pour le progrès économique de satisfaire tous les besoins, même spirituels de l'homme, et ainsi de suite.

Mais, en même temps, Nous devons prendre note avec satisfaction qu'un ordre meilleur se fait jour dans l'histoire de l'humanité, justement en fonction du travail. Il serait très long et difficile d'en donner une notion adéquate, surtout au cours d'un entretien, court et familier, comme celui-ci. Qu'il Nous suffise d'observer un des aspects les plus évidents de cette orientation prometteuse. C'est celui que Nous pourrions appeler « dépassement » idéologique, qui semblait impossible et qui se manifeste maintenant, non seulement comme possible, mais aussi profitable et déjà en voie de réalisation.


Un sens plus vif du bien commun


La conception qui fait du monde du travail celui des égoïsmes fatals et irréductibles est dépassée, du moins théoriquement, et c'est déjà beaucoup. Que l'égoïsme soit la tentation continuelle et le péché caractéristique du domaine économique, dérivant du travail productif, là où sont des biens temporels, c'est-à-dire des richesses à distribuer, est compréhensible ; le besoin est naturel, la cupidité est innée à l'homme (cf.
1Tm 6,10 Lc 12,15 etc.), le sens de la justice distributive est également enraciné et aujourd'hui il est devenu puissant dans le coeur du peuple, alors que le contraste des intérêts est toujours présent et parfois explosif. Les égoïsmes des structures économiques et les égoïsmes de classe sont inhérents à la vie sociale, mais non pas insurmontables, voilà la nouveauté. Ils peuvent être dominés par un sens plus vif du bien commun et de la justice sociale, c'est-à-dire par une raison supérieure qui prend le dessus et engendre une civilisation plus ordonnée et pacifique. Ce premier dépassement en apporte un autre, celui qui place l'homme en tant que tel au premier rang dans la hiérarchie des valeurs du monde du travail. Le travailleur vaut plus que son oeuvre, même si celle-ci constitue la fin spécifique du travail. Nouveau dépassement : le travail produit non seulement une richesse extérieure à l'homme mais encore une richesse intérieure : solidarité, amitié, fraternité. Et ainsi se dégage un double aspect de la personnalité, celui d'être quelqu'un au sein de l'activité commune, et celui de reconnaissance pour celui qui a procuré par son travail les agréments de la vie. C'est aussi une idée qui fait son chemin dans le monde technique, privé par lui-même de valeurs sentimentales et psychologiques. Ainsi se vérifie le dépassement du concept pragmatique de progrès, comme bénéfice suprême et immédiat de celui qui le crée et en jouit, alors que le progrès est considéré comme un service pour le bien commun, toujours tourné vers l'accroissement de la dignité humaine.


Dépassement de la vision matérialiste


Et finalement le dépassement de la vision matérialiste du travail : qu'on le veuille ou non, il devient révélateur des lois du cosmos, c'est-à-dire des intentions mystérieuses et précises que la pensée créatrice de Dieu y a infusées, et immédiatement révélateur de l'intarissable capacité de penser et d'agir de. l'homme, qui sait lire dans les choses qu'il n'a pas faites mais qu'il domine. La pensée de Dieu rencontre la pensée de l'homme, engagé dans le travail moderne, plein d'intelligence et de puissance. Une lumière nouvelle, une étreinte nouvelle. La rencontre peut être merveilleuse, d'abord comme un dialogue normal, puis comme une interrogation naissante, finalement comme un chant extatique. Le dépassement de l'irréligiosité, propre au matérialisme moderne, ouvre de nouveaux horizons à l'esprit ankylosé du travailleur. Il n'est plus vrai que la religion est morte à cause du triomphe de la science et de la technique ; elle passe à un plan supérieur : celui du besoin intérieur incoercible, du langage, toujours balbutiant et insuffisant, mais vivant, libre, reconstituant. C'est celui d'une liberté intérieure retrouvée, d'un amour suprême possible. Le travailleur et le droit. Et si le Christ, le compagnon par excellence de l'humanité qui peine et qui cherche ; le prend par la main, son esprit s'ouvre, sa langue se meut, sa prière se délie : voici l'Homme naissant du siècle nouveau.

Ce discours se fait long ; Nous le terminons ici. Mais non sans nous exhorter tous à aimer ce monde du travail, à comprendre les richesses humaines spirituelles, chrétiennes qu'il cache encore et peut révéler (cf. La Civiltà Cattolica : alfaro, Tecnopolis e cristianesimo, juin 1969). Nous en étions déjà persuadé, mais Notre visite à l'Organisation Internationale du Travail Nous en a donné une impression nouvelle et heureuse. Nous vous en faisons part avec Notre Bénédiction Apostolique.






Catéchèses Paul VI 14569