Catéchèses Paul VI 25472

25 avril 1972: LE RENOUVEAU CONTINU EST UN DES PILIERS DE NOTRE FOI

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Chers Fils et Filles,



Nous ne pouvons détacher notre esprit des fêtes de Pâques qui viennent d’être célébrées. Nous ne pouvons nous empêcher de réfléchir au mystère pascal parce que la liturgie, par ses rites et par ses chants, continue de célébrer cet événement primordial de la théologie et de la vie chrétienne.

Pourquoi, vous demanderez-vous ? Pour la nouveauté, le caractère extraordinaire;de la Résurrection du Christ “ premier-né d’entre les morts revenus à la vie ” (
Ap 1,5 Col 1,18) et par cela même, chef et fondateur d’un ordre nouveau dont le dessein merveilleux se reflète sur le destin des hommes et sur notre destin personnel. Pâques ne signifie pas seulement passage du Christ de la mort à la vie mais aussi instauration d’une vie nouvelle.

Il faut que nous comprenions la valeur de cette nouveauté. Le concept de “ nouveauté ”, appliqué à la vie même de l’homme est un des piliers de notre foi, un des principes de la vie spirituelle et morale. Il n’est pas facile, même avec l’imagination, de pénétrer en ce Royaume de merveilles que Dieu, dans sa bonté et sa toute-puissance, a préparé pour ceux qui l’aiment. L’Ecriture nous indique ça et là le sens de cette voie mystérieuse sur laquelle nous cheminons. “ Ecce nova facio omnia ”, s’exclame dans l’Apocalypse, Celui qui est assis sur le Trône de la Gloire : voici que je vais faire du nouveau ! C’est l’écho de la prophétie d’Isaïe (Is 43,19) qui laisse entrevoir une transformation non seulement dans le domaine de l’humain, mais aussi du cosmos. Saint Paul parvient à percevoir “ toute la création qui gémit en travail d’enfantement. Et non pas elle seule, nous-mêmes qui possédons les prémices de l’Esprit, nous gémissons nous aussi intérieurement dans l’attente de la Rédemption de notre corps. Car notre Salut est objet d’espérance ”. Ce sujet est traité dans plusieurs chapitres. Commençons par le premier. La vie nouvelle du Christ. Il est ressuscité ; c’est bien Lui en chair et en os, mais il obéit à d’autres lois physiques bien différentes de celles qui gouvernent l’être humain dans la vie temporelle. Sa vie est une vie nouvelle, ressuscitée et animée par l’Esprit-Saint (Rm 8,11). C’est une vie caractérisée par une puissance surnaturelle, un état de victoire (1Co 15,54).

Ce passage à une nouvelle plénitude de vie procède par étapes. Il commence par le passage de l’état de péché, c’est-à-dire de la rupture avec Dieu, l’état de mort, à l’état de délivrance qui nous est conféré par le baptême. Si nous marchons déjà “ in novitate vitae ” (Rm 6,4), nous bénéficions, en partie, dès le début et réellement, de cette nouveauté d’une vie qui ne meurt pas, candidate à la Résurrection finale.

Ce passage continue par une prise de conscience de notre part : nous sommes les fils de Dieu, nés à une vie nouvelle et élevés à un niveau d’existence surnaturel. Comprenons-nous cette chance ? Si oui, nous devons renouveler constamment notre style de vie, c’est-à-dire, nous devons nous dépouiller du “ vieil homme ” et revêtir l’“ homme nouveau ”. Un “ habit nouveau ” qui ne s’use jamais mais qui se renouvelle sans cesse, comme dit Saint Paul (Col 3,10 Ep 4,23-24 Rm 12,2 2Co 4,16). Un style nouveau, un style chrétien, orienté vers la Sainteté : “ Soyez parfaits comme Votre Père Céleste est parfait ”, nous dit Jésus.

Pour un chrétien, ce renouveau continu est un programme. Le principe d’Aristote : “ l’immobilité du centre est la condition de la mobilité du cercle ” s’applique parfaitement à la vie chrétienne. Immobilité et mobilité. C’est la réponse doctrinale et pratique à la grande question moderne : Comment être chrétien fidèle, authentique, libre et ancré sur la vérité et des modes de vie stables et en même temps tendre avec ferveur vers de nouveaux styles de vie, riches d’innovations et de progrès ? Le souci de renouveau, lié à la fermeté dans la foi, l’espérance et la charité, doit être l’aspiration du chrétien authentique qui doit vivre dans la recherche inépuisable de la vérité révélée, dans l’imitation du Christ, dans le service toujours neuf et inventif pour le Salut des frères.

Tout en résistant fermement à l’esprit révolutionnaire de notre époque, donnons à notre vie chrétienne une certaine liberté de mouvement, une fraîcheur d’expressions spirituelle, apostolique et artistique. Le christianisme est l’épanouissement constant de la vie présente, de cette vie encore précaire pour nous, à l’heure actuelle, mais qui deviendra certitude dans l’éternité. Démontrons aux autres notre cohérence et notre fidélité au Christ ressuscité qui “ ne meurt plus ” (Rm 6,9).

Avec notre Bénédiction Apostolique.





1° mai 1972: INTÉRÊT DE L’EGLISE POUR LE MONDE DU TRAVAIL

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Premier mai : fête du Travail ! Combien de choses ont été dites et écrites à ce sujet !

C’est un thème actuel, fondamental, constitutionnel qui embrasse toute l’activité humaine ! (
GS 33 et ss.).

Thème inépuisable qui touche de près l’histoire, la science, la technique, l’économie, la sociologie, la morale, la politique, la culture, la civilisation !

Thème humain, théologique, spirituel et, de par la fête de St Joseph qui tombe ce même jour, thème liturgique !

Son importance est considérable dans le processus de développement actuel ; c’est donc un thème très complexe, disons même “ explosif ” !

Tout le monde s’en est occupé et s’en occupe ! L’Eglise, par ses documents, ses expériences, ses oeuvres, a démontré son intérêt dans ce domaine.

Le temps dont nous disposons est trop bref : il nous est donc impossible de nous étendre sur ce sujet ; nous vous en dirons seulement quelques mots afin que vous y réfléchissiez et que vous compreniez que le “ travail ” suppose et engendre à la fois une conception générale de la vie.

Aucune autre époque de l’histoire n’a jamais célébré le travail de l’homme avec tant d’intérêt ! C’est un thème que l’Eglise, par sa doctrine et son exemple, ne cesse d’enrichir !

Savez-vous ? Si nous devions parler longuement du Travail, nous aimerions parler plutôt des Travailleurs, c’est-à-dire des êtres humains, des Personnes engagées dans le travail ; et parmi elles, nous choisirions non pas celles qui préparent le travail ou le dirigent (elles sont tout aussi dignes d’attention), mais celles qui l’exécutent de leurs mains, se soumettant aux efforts physiques.

Ici, en cet instant, ce n’est pas par les mots que nous voulons atteindre les travailleurs du monde; c’est par un autre moyen de communication sociale, un moyen silencieux que tous ne pourront peut-être pas percevoir : la sympathie.

Oui, c’est ce sentiment amical que nous voulons leur faire parvenir, cette vague de sympathie, invisible et impondérable mais réelle et efficace. L’Eglise, tous les disciples de l’Evangile, souhaitent que les travailleurs puissent entendre cette voix silencieuse mais vraie. Trop souvent, dans les milieux de travail, c’est l’opinion contraire qui domine : L’Eglise, dit-on, hélas ! ne considère pas les personnes qui travaillent, qui appartiennent aux classes les plus humbles : Elle ignore les pauvres gens, préfère les riches, les puissants ! L’Eglise est conservatrice ; elle prêche les devoirs des faibles et les droits des plus forts. Elle s’occupe des valeurs morales et religieuses et se désintéresse des valeurs économiques et temporelles ! Elle ne cherche que ses intérêts, ses privilèges. Elle est avare, égoïste. Elle ne pense pas à nous, pauvres travailleurs exploités et livrés à nous-mêmes !

Et lorsque les faits démontrent le contraire, alors d’autres objections s’élèvent. L’attitude amicale et solidaire de l’Eglise à l’égard du monde ouvrier est mal interprétée. Souvent, les travailleurs doutent et se méfient des gestes bénévoles de l’Eglise : Elle agit ainsi, disent-ils, car Elle a peur du monde ouvrier ; par ses courtoisies et ses belles manières, elle veut paralyser nos revendications et nous empêcher de parler. L’Eglise, disent-ils encore, veut profiter de notre simplicité, de notre ignorance pour nous faire croire ce qu’elle veut, pour freiner notre élan vers les conquêtes sociales ; ou mieux encore pour sauvegarder une religion à laquelle nous ne croyons plus... Cette méfiance finit, hélas ! par entraîner la haine, la malédiction, les luttes... Les pays où domine l’athéisme et où celui-ci est devenu un “ programme ” le savent bien. Nous pourrions ajouter bien d’autres exemples.

Mais l’Eglise ne peut pas et ne veut pas considérer le travailleur sans cet élan de sympathie. Qu’il veuille ou non, qu’il le sache ou pas, le travailleur a toute la sympathie de l’Eglise du Christ. Que veut dire sympathie ? Beaucoup de choses que nous connaissons bien : avant toute participation aux souffrances d’autrui, affinité morale, compréhension, prédisposition à l’estime, à l’amitié, au service, à l’amour.

L’Eglise éprouve-t-elle un tel sentiment ? Oui, sachez-le tous, vous, travailleurs qui recevrez l’écho de cette simple profession de sympathie, de ce discours silencieux ! Si nous devions énoncer toutes les raisons de ce sentiment profond, notre discours ne serait plus silencieux, il n’en finirait plus ! L’Eglise éprouve de la sympathie à l’égard du travailleur, car elle voit et proclame en lui la dignité de l’homme, d’un frère semblable aux autres hommes, d’une personne inviolable qui reflète sur son visage l’image de Dieu. Et cela d’autant plus (notez bien: nous ne disons pas d’autant moins) que ce visage reflète le besoin, la souffrance, la soif de liberté, la faiblesse. La fatigue, la pauvreté, l’incertitude, l’exploitation et toute infériorité sont autant de raisons qui dictent à l’Eglise ce sentiment de sympathie.

Et, à ces motifs qui font jaillir du coeur de l’Eglise ce sentiment de solidarité, vis-à-vis des hommes qui souffrent et attendent, ajoutons ces deux derniers :

— Le Christ lui aussi était ouvrier ; il travaillait avec Joseph, il était le fils du charpentier. Travailleurs, il a été votre collègue, le premier et le dernier, puisqu’il a donné sa vie et son sang pour sauver les hommes !

Les paroles de Jésus sont toujours actuelles, elles n’ont pas vieilli à travers les siècles : “ Venez à moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau et moi je vous soulagerai ” (Mt 11,28).

C’est, là, la sympathie du Christ et de l’Eglise, aujourd’hui encore, pour tous ceux qui travaillent !

Avec notre Bénédiction Apostolique.





3 mai 1972: LE MYSTÈRE DE LA RESURRECTION DU SEIGNEUR : ECOLE ET SOURCE D’UN STYLE CHRETIEN

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Chers Fils et Filles,



En cette période post-pascale, il nous plaît à vous entretenir une fois encore de cet événement unique qu’est la Résurrection du Christ, mystère central de toute l’économie du Salut. La fête de Pâques est encore proche de nous et nous contraint à demander à nous-mêmes si nous avons évalué comme il se doit le rapport entre la Résurrection du Seigneur et notre destin personnel, c’est-à-dire notre Résurrection personnelle “ au dernier jour ” (
Jn 6,39-40).

Le Seigneur a triomphé de la mort pour Lui-même, mais il a surtout triomphé d’elle pour nous ; et, ce triomphe ne concerne pas seulement notre âme qui, de par sa nature même, est immortelle (c’est une vérité très importante à laquelle; hélas! nous ne pensons pas assez et dont il nous est difficile d’avoir une idée adéquate), mais aussi notre corps, ce corps animal et mortel qui ne fait qu’un avec notre âme, qui en est l’instrument vital et marque avec la précision d’une horloge, notre présence dans le temps, ce corps voué à une dissolution totale. Souvenez-vous du réalisme impitoyable de la cérémonie des “ Cendres ” : Homme, rappelle-toi que tu es poussière et que tu redeviendras poussière (Gn 3,19).

Pâques dit “ non ” à cette dissolution. Elle réserve pour nous un nouveau destin. Nos cendres se recomposeront et revivront. La Résurrection du Christ sera notre résurrection. Ecoutons Saint-Paul : “ Nous ne voulons pas frères, que vous soyez ignorants au sujet des morts ; il ne faut pas que vous vous désoliez comme les autres qui n’ont pas d’espérance. Puisque nous croyons que Jésus est mort et ressuscité, de même, ceux qui se sont endormis en Jésus, Dieu les amènera avec Lui ” (1Th 4,13-14).

Le côté extrêmement réconfortant et l’aspect extraordinaire de cette annonce nous surprennent à un tel point que nous l’estimons presque inconcevable, impossible ! Mais notre foi — et ici nous sommes tout à fait dans le domaine de la foi — nous certifie la vérité de cette annonce car, dans ce cas, la Résurrection du Christ certifie, authentifie la Parole de Dieu.

Mais comment la Résurrection du Christ engendre-t-elle notre résurrection ?

Nous pénétrons ici au plus profond d’une autre réalité, d’un autre mystère : celui de l’union entre la tête du Corps Mystique, le Christ, et Ses membres, c’est-à-dire, nous ;si la Tête est ressuscitée, les membres ressusciteront. Saint Paul affirme : “ Celui qui pense que les membres ne ressuscitent pas, doit en conclure que la tête non plus ne ressuscite pas ”. Or, cela est inconcevable dans le Plan du Salut Chrétien. Cette affirmation de Saint Paul ne pourrait être plus explicite et catégorique (voir 1Co 15,12-19).

Cette annonce est si forte et si étrangère aux affres de la mort de notre être corporel que, tout à fait désorientés, nous nous demandons : “ Mais comment les morts ressuscitent-ils ? Avec quel corps reviennent-ils ? ”. Et Saint Paul de nous expliquer que notre résurrection est l’oeuvre de la Toute-Puissance Divine, triomphatrice de la mort au-delà de toute prévision, de toute hypothèse. Oui, il en va de notre résurrection comme de la semence qui, dans le processus végétal, subit une transformation radicale tout en gardant son identité essentielle : “ On sème de la corruption, il ressuscite de l’incorruption ; on sème de l’ignominie, il ressuscite de la gloire ; on sème de la faiblesse, il ressuscite de la force ; on sème un corps psychique, il ressuscite un corps spirituel ” (1Co 15,42-44). Et, si avec la révélation d’une palingénésie, triomphatrice de toute difficulté d’ordre physique, physiologique, biologique ou expérimental, ces analogies apaisent en quelque sorte notre curiosité chancelante, elles ne l’assouvissent, en dernier lieu, qu’avec la foi : ce n’est pas une fantaisie, un songe, un mythe, c’est une vérité, une réalité qui échappe à nos possibilités de connaissance actuelles, sauf lorsqu’il s’agit du Christ, cause exemplaire parce que, homme, nouvel Adam, premier chef d’une nouvelle humanité (Ib. 1Co 15,20-23) et cause efficiente parce que, Verbe de Dieu, source de la vie (Mt 22,31-32 Jn 5,21 St. TH., III 56,0).

Et c’est ainsi que tout croyant fidèle au Christ ose dire (tous ensemble nous osons dire) au terme de sa profession de foi : Je crois à la résurrection des morts et à la vie éternelle. C’est le Christ qui, par sa victoire sur la mort, nous affirme la certitude d’une vie d’outre-tombe, ultime, éternelle, eschatologique, personnelle, pleine, parfaite et heureuse. Toute notre vie doit refléter cette affirmation du Christ, affirmation qui donne à notre existence actuelle un sens, une valeur et une espérance de vie nouvelle que seul le Christ, mort et ressuscité pour nous, peut lui conférer. Notre foi et notre union au Christ ne seront jamais assez grandes. Une affirmation, disions-nous, qui donne un nouveau destin, une dignité à notre corps que nous pouvons appeler “ chair ”, sans crainte d’être troublés par sa nature animale et sa tache originelle, source des péchés actuels, car, notre chair aussi a été habitée par le Verbe et en Lui, unie à la nature divine : “ Le Verbe s’est fait Chair ” (Jn 1,14) ; notre chair est vouée, aujourd’hui, à la pureté, à la vraie beauté ; demain, elle sera régénérée dans la vie éternelle (Mt 22,30).

Tout cela est très important, aujourd’hui en particulier, pour la tradition humaine et chrétienne. Et, pour nous, Fils de l’Eglise Catholique, la Résurrection du Seigneur est le modèle et la source d’un style de vie vraiment chrétien, surtout en ce mois de mai, qui nous invite à vénérer humblement la Très Sainte Vierge Marie, au sein de laquelle, par avance, le mystère pascal a pleinement triomphé.

Avec notre Bénédiction Apostolique.





10 mai 1972: COHERENCE ET COURAGE DANS LA VIE CHRETIENNE

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Chers Fils et Filles,



Le temps pascal touche à sa fin ; et aujourd’hui, nous vous parlerons encore du mystère de la Résurrection, de la place prépondérante qu’il occupe dans la doctrine chrétienne, dans la liturgie ecclésiale, dans notre vie spirituelle. “ Nous devons reconnaître dans le mystère pascal, écrit l’un des plus célèbres liturgistes contemporains, le centre de notre existence chrétienne ” (J. S. jungmann, Tradit. lit. 346).

S’il en est ainsi, nous devons essayer de comprendre quel est effectivement notre rapport essentiel avec ce mystère. Comment y participons-nous ? Comment se reflète-t-il en nous — aussi bien dans les signes que dans une réalité mystique —, sous le double aspect de la mort et de la vie ? Le premier rapport, nous le savons, est établi par le baptême qui, de manière symbolique et efficace, reproduit chez tout chrétien le mystère de la mort, et de la Résurrection du Christ, le mystère de notre Salut.

Nous connaissons tous la doctrine de Saint Paul : “ Baptisés dans le Christ Jésus, c’est dans sa mort que tous, nous avons été baptisés. Nous avons donc été ensevelis avec Lui par le baptême dans la mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous vivions nous aussi dans une vie nouvelle ” (
Rm 6,3-4).

Pâques, c’est cela : mort et résurrection du Christ, naissance des chrétiens, rachetés du péché originel. Naissance du Corps Mystique du Christ, naissance de l’Eglise. Le Baptême n’a donc pas un but eschatologique mais ecclésial ; c’est ce qui explique le baptême des enfants (A. hamman, Baptême, p. 137).

C’est en fixant notre pensée sur la foi au mystère pascal que nous pourrons mieux concevoir notre vie chrétienne ; par le baptême, la Résurrection du Christ est devenue pour nous l’instauration d’une vie nouvelle, surnaturelle, que nous vivons en liaison étroite, vitale et ineffable avec Dieu le Père, le Christ Sauveur et l’Esprit Saint qui nous anime ; vie vécue dans un domaine purement théologique. Cette vie surnaturelle, nous la vivons en même temps, dans le domaine sociologique, dans une communion ecclésiale, fraternelle et hiérarchique, l’Eglise. Saint Paul nous dit encore : “ En un seul esprit nous avons été baptisés pour ne former qu’un seul corps ” (1Co 12,13).

Cette appartenance à l’Eglise devrait être, en théorie et en pratique, le résultat de notre célébration pascale.

Nous appartenons à l’Eglise ; il ne s’agit pas d’une appartenance extérieure, formelle, passagère, n’ayant sur nous aucun effet, mais d’un conseil que nous trouvons dans les exhortations aux néophytes de l’Eglise primitive, le jour de la remise des aubes blanches que les nouveaux baptisés revêtaient depuis la première semaine après Pâques jusqu’au Dimanche In Albis (in vestibus albis depositis).

Avec Pâques et le Baptême, ainsi qu’avec les autres sacrements tels que la pénitence et l’Eucharistie, qui font revivre la grâce dans la vie de l’homme et alimentent la foi par la plénitude de la charité, une existence nouvelle s’ouvre devant nous, une existence qui se doit d’être stable et permanente.

Saint Augustin nous le rappelle lorsqu’il s’adresse aux enfants qui viennent de recevoir les sacrements : “ Ce qui est visible à tes yeux, passe ; mais ce qui a été signifié et que tu ne vois pas, demeure ” (Sermo 227, PL 38, 1001).

La persévérance est l’exigence primordiale de tout homme devenu chrétien ; c’est une exigence que les obligations religieuses du dimanche et de Pâques nous demandent sans cesse de satisfaire ; elle nous est rappelée, chaque semaine, le jour du Seigneur.

Stabilité! Comme elle engage le chrétien ! L’éducation y est étroitement liée ; cela veut dire qu’un chrétien doit apprendre à être fidèle (fidèle n’est-il pas d’ailleurs synonyme de chrétien ?), logique, fort, loyal, humblement fier de se dire chrétien et toujours prêt, si cela est nécessaire, à rendre témoignage de ce titre privilégié. Dans sa première lettre, pour encourager les premiers fidèles persécutés, Saint Pierre écrit : “ Que nul de vous n’ait à souffrir comme meurtrier... mais si c’est comme chrétien, qu’il n’ait pas honte, qu’il glorifie Dieu de porter ce nom ” (1P 4,15-16).

La nouveauté de la vie chrétienne devrait approfondir et fortifier notre conscience, conférer à notre “ forma mentis ”, à notre esprit, à nos coutumes et à nos relations sociales, un style de vie original.

Nous avons souvent tendance, aujourd’hui, à considérer comme dépassée, et même, à combattre cette conception caractéristique de l’appartenance au Christ et à la société visible et spirituelle qu’il a Lui-même fondée et qui actualise sa présence et sa mission dans l’histoire, chez les hommes et dans l’Eglise. L’Eglise vit dans le monde et pour le monde, d’où cette opinion courante, cette idée, même, selon laquelle l’Eglise devrait se “ diluer ” pour ainsi dire dans le monde, adopter les coutumes du milieu, accueillir les idéologies de la société profane ; en un mot, elle doit se séculariser.,

Aujourd’hui, cette sécularisation de l’Eglise va même jusqu’à être professée comme une rénovation, une délivrance, une pénétration du message chrétien dans le monde. Nous aurions, nous aussi, beaucoup de choses à dire à ce propos, pour conformer la vie ecclésiale aux signes des temps, pour permettre à la foi et à la charité d’être témoignées par les moyens nouveaux d’une Eglise toujours forte. Et cela, non sans rappeler aux fidèles les exigences inaliénables que le Christ nous a imposées pour marcher à sa suite. Vivez donc le mystère pascal, selon le sens que le Christ et l’Eglise ont voulu lui donner.

Avec notre Bénédiction Apostolique.





17 mai 1972: NECESSITE FONDAMENTALE D’UNE VIE CHRETIENNE ANIMEE PAR L’ESPRIT-SAINT

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Chers Fils et Filles,



Nous nous préparons à célébrer la Pentecôte, c’est-à-dire à revivre en quelque sorte, s’il plaît à Dieu, la descente de l’Esprit-Saint sur les Apôtres, réunis au Cénacle de Jérusalem avec la première communauté des fidèles du Christ ; cent vingt personnes, quelques femmes, dont Marie, Mère de Jésus, le Maître, le Messie, mort sur la Croix, ressuscité et monté au Ciel. Cet événement-mystère de la Pentecôte est bien difficile à raconter malgré les signes extérieurs qui le caractérisèrent : le tonnerre retentit, le vent se leva, remplit toute la maison, des langues de feu vinrent, une à une, se poser sur chacun des assistants ; tous furent alors envahis et enivrés d’une force et d’une joie sans pareilles, saisis d’un ardent désir de proclamer les louanges de Dieu, louanges jaillies de leur coeur, telles des poésies prophétiques. C’était l’Esprit-Saint, l’Amour vivant qui procède de Dieu, le Père, du Fils, le Verbe et de Dieu Lui-même, Troisième Personne de la Sainte Trinité, le Dieu Unique révélé dans le mystère de Sa Vie Infinie, abîme de richesse, ouvert à tous les hommes ; une Vie infime si nous la comparons à la réalité Infinie du Dieu “ Un ” et “ Trine ”, mais débordante de lumière, de joie et de sagesse par rapport à l’intelligence humaine (cf.
Rm 11,33-36). C’est à cet instant que naquit l’Eglise ; son corps, composé d’hommes, fut tout entier pénétré de l’Esprit-Saint, d’une force surnaturelle qui donna la vie à cette communauté que nous avons appelée Eglise. Et aussitôt, un même Esprit conféra à chaque membre de la communauté ecclésiale sa fonction propre, son ministère, toujours en vue du bien commun. Dès cette première heure, l’Eglise naquit, Une, Unique, Hiérarchique et Communautaire (1Co 12,4 ss.).

Si cet événement est vrai, réel, comme il le fut jadis et comme il l’est aujourd’hui, son importance ne peut nous échapper. L’OEuvre de l’Esprit-Saint est fondamentale pour la religion chrétienne ; elle élève et transfigure les hommes qui pénètrent dans sa zone d’influence ; elle est décisive pour notre Salut. Cependant, l’OEuvre de l’Esprit-Saint est mystérieuse et dépasse nos capacités intellectuelles. Les interprétations douteuses dont elle a fait l’objet (utopie, imagination, folie, inspirations diaboliques) ont fait écrire à l’Apôtre Jean : “ Bien-aimés, ne vous fiez pas à tout esprit, mais éprouvez les esprits pour voir s’ils viennent de Dieu, car beaucoup de faux prophètes sont venus dans le monde ” (Jn 4,1). Saint Paul dit : “ N’éteignez pas l’Esprit : ne dépréciez pas les dons de prophétie, mais vérifiez tout; ce qui est bon, retenez-le ” (1Th 5,19-21).

Idéalisme, psychanalyse, psychiatrie, magie etc. sont à l’ordre du jour, mais il est un domaine que nous n’avons peut-être pas encore assez approfondi : la théologie de l’Esprit-Saint et les réalités qui dérivent de son action sur notre âme. L’Esprit-Saint nous remplit de Sa grâce, de Ses dons, de Ses fruits. Pour parvenir jusqu’à Lui, Il nous indique la voie de la prière et des sacrements, porteurs de la grâce, c’est-à-dire de son action en nous (Rm 5,5 1Co 3,16 etc.).

Le catéchisme nous l’enseigne et il est fondamental pour une conception exacte de la vie chrétienne, surtout en ce qui concerne certains points que nous voulons rappeler aujourd’hui.

“ L’Esprit souffle où il veut ”, dit Jésus à Nicodème (Jn 3,8). Nous ne pourrons jamais tracer des lignes doctrinales et pratiques quant aux interventions de l’Esprit-Saint dans la vie des hommes. Il peut se manifester sous les formes les plus libres et les plus imprévisibles. “ Il s’ébat sur la surface de la terre ” ; l’Hagiographie nous narre les magnifiques aventures des Saints ; tout directeur spirituel en sait quelque chose. Mais il existe une règle à suivre pour celui qui veut rencontrer l’Esprit-Saint : c’est l’intériorité. C’est dans notre âme qu’est fixé le rendez-vous avec l’Hôte ineffable. Dulcis hospes animae, dit le chant liturgique de la Pentecôte. L’homme est “ le temple ” de l’Esprit, nous répète Saint Paul (1Co 3,16-17 1Co 6,19 2Co 6,16 Ep 2,22). Quoique l’homme moderne, le chrétien et même le prêtre tendent à se séculariser, ils ne pourront pas et ne devront pas oublier cette nécessité fondamentale d’une vie chrétienne animée par l’Esprit-Saint : l’intériorité.

Les Apôtres ont fait leur neuvaine de Pentecôte. Le silence intérieur est indispensable pour écouter la Parole de Dieu, pour sentir Sa Présence et entendre Son Appel. Aujourd’hui notre psychologie est tout orientée vers l’extérieur. Ce monde extérieur qui attire toute notre attention et nous chasse de notre “ chez nous ”. Nous ne savons pas méditer, nous ne savons plus prier; envahi par les intérêts du monde, le tumulte des passions, notre coeur ne laisse aucun espace à la flamme de la Pentecôte. Nous prétendons être dotés de “ charismes ” particuliers qui nous permettent de revendiquer une soi-disant autonomie aux caprices spirituels de nos instincts. Nous n’essayons pas de ramener nos sentiments et nos pensées à leur authentique inspiration divine. Conclusion ? Donner à la vie intérieure sa juste place dans notre existence tourmentée ; une place de premier ordre, silencieuse et pure. Nous devons retrouver nous-mêmes si nous voulons être prêts à recevoir l’Esprit vivifiant et sanctifiant. Sinon, comment écouter son “ témoignage ” ? (Rm 8,7).

Nous aurions d’autres considérations à ajouter à propos de l’accueil de l’Esprit-Saint en nous. Par exemple, quel rapport peut-il y avoir entre la voix de l’Esprit, la voix du coeur habité par le Paraclet, notre défenseur, notre Maître intérieur et la voix naturelle — elle aussi délicate et noble — de notre conscience ? Socrate possédait un “ démon ” qui inspirait sa conscience comme une voix divine (cf. platon, Apol., 29-30) ; Gandhi obéissait à sa “ still small voice ” (cf. fusero, Gandhi, 511). Mais, laissons de côté les exemples les plus frappants ; tout homme possède en lui une source de pensée et de sentiment. Nous nous demanderons alors : cette voix est-elle contraire, différente ou semblable à celle qui inspire le divin Paraclet ? C’est un problème dont l’étude appartient aux savants. Limitons-nous, pour l’instant, à considérer les effets d’un rapprochement entre la théologie de l’Esprit-Saint et la psychologie de l’homme. Nous voudrions aussi dire quelques mots au sujet d’un vieux problème, celui de l’opposition entre la religion de l’autorité et la religion de, l’esprit. Cette dernière est choisie par les adversaires de l’Eglise, institutionnelle et hiérarchique, pour revendiquer la liberté d’une Eglise démocratique, vivant selon l’esprit, religieux de la communauté. Nous connaissons tous un peu les manifestations de cette prise de position critique. Nous estimons qu’une telle attitude au sein de l’Eglise Catholique porte atteinte non seulement à l’existence même de l’Eglise, mais éteint la vraie flamme de la Pentecôte, fausse la pensée du Christ et la Tradition (cf. congar, Mystère de l’Eglise, p. 146 ss.).

Célébrons comme il faut la Pentecôte, fusion de l’Esprit-Saint avec Son Eglise.

Avec notre Bénédiction Apostolique.





24 mai 1972: LA VOCATION CHRETIENNE A L’APOSTOLAT

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Chers Fils et Filles,



La Pentecôte que nous venons de célébrer parle encore à notre coeur et éveille notre curiosité : quel effet produit l’Esprit-Saint dans l’âme de celui qui a le privilège de l’accueillir ? Si, vraiment, les disciples ont été envahis et enivrés par la présence, la force et la grâce du Dieu-Amour, sanctifiant et vivifiant, le Paraclet, l’Esprit-Saint, descendu sous forme de langues de feu, envoyé par le Père, au nom du Fils, nous nous demandons : Que produit l’Hôte Ineffable dans l’âme, l’esprit et le coeur de celui qui le reçoit ?

Nous imaginons aisément les effets engendrés par ce don surnaturel ; ils suffiraient à remplir tout un traité de théologie, une théologie nouvelle, celle d’un nouveau rapport entre Dieu et l’homme et donc, d’une nouvelle expérience de Dieu, une expérience qui se réalise, non seulement dans l’âme de celui qui reçoit l’Esprit Saint, mais aussi dans toutes les vicissitudes historiques et sociales du monde où, nous le savons, vivent des individus doués à la fois d’une vie naturelle et surnaturelle. La vie surnaturelle émane d’un principe unique et unificateur, l’Esprit-Saint, qui rassemble ses “ Saints ” en un seul corps, l’Eglise, Corps Mystique du Christ.

Pour annoncer la venue de l’Esprit-Saint, le Christ Seigneur a résumé en un seul mot les effets vivifiants du Paraclet : “ Témoignage ”. C’est un mot qui revient souvent dans l’Evangile de Saint Jean et dans la terminologie religieuse contemporaine.

Examinons ensemble sa double application : la pensée du Seigneur renferme un témoignage, un témoignage passif, pourrions-nous dire, c’est-à-dire reçu, constitué de dons et de charismes que l’Esprit-Saint répand en abondance chez ceux qui l’accueillent. Jésus annonce lors de la dernière Cène : “ Quand viendra le Paraclet que je vous enverrai d’auprès du Père, l’Esprit de vérité qui provient du Père, il me rendra témoignage ” (
Jn 15,26 Jn 14,26 Jn 16,17). C’est le témoignage intérieur de la vérité, révélée à Dieu, au Christ, à l’Evangile.

Il existe aussi un témoignage extérieur: l’Esprit parle à l’homme (Mt 10,20) et l’homme se fait témoin, messager de vérité. “ Quand viendra le Paraclet, dit Jésus à ses disciples, vous aussi vous témoignerez ” (Jn 15,27). C’est ici que nous voulons fixer notre attention. La Pentecôte transforme les disciples en témoins, c’est-à-dire en Apôtres. Ecoutons encore Jésus, avant l’Ascension : “ Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit-Saint qui descendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux confins de la terre ” (Ac 1,8). Souvenez-vous de la scène de la Pentecôte : les disciples ont été complètement transformés ; une force nouvelle les envahit, leur coeur débordait de joie. Lisons les Actes des Apôtres : Lorsque la foule, attirée par le bruit et émerveillée d’entendre proclamer dans sa propre langue les “ merveilles de Dieu ”, interprète d’une manière ironique l’attitude de cette assemblée remplie de l’Esprit-Saint, Pierre se lève et lui parle (Ac 1,4). C’est la première prédication chrétienne ! L’Apôtre s’adresse à cette foule en tumulte et commence, avec une certitude prophétique, à annoncer la venue du Christ Sauveur.

Le témoignage extérieur, éveillé par l’Esprit-Saint, est un apostolat. Vous savez à ce sujet, et surtout après Vatican II, que c’est sous le mot d’apostolat que nous désignons l’activité extérieure de l’Eglise ; orientée vers un but unique : Le Salut par le Christ. Cette responsabilité se révèle d’autant plus urgente et nécessaire que l’humanité voit aujourd’hui les voies du kérygme, du message évangélique, s’ouvrir et se fermer de différentes manières. “ L’Eglise est faite pour étendre le règne de Dieu à toute la terre, dit le Concile, pour la gloire de Dieu le Père ; elle fait ainsi participer tous les hommes à la rédemption et au salut ; par eux, elle ordonne en vérité le monde entier au Christ ” (Apost. Actuo. AA 2). Vous savez, aussi, que la vocation chrétienne est, de par sa nature même, une vocation à l’apostolat ; l’apostolat est une activité qui concerne tous les chrétiens ; les laïcs peuvent, de diverses manières, être appelés à coopérer avec l’apostolat hiérarchique (Lum. Gent. LG 33 ss.). Mais cette conscience apostolique et missionnaire du chrétien, appelé à la foi et favorisé par la grâce, n’est pas encore acquise comme il se doit par tous ceux qui se disent chrétiens. Cela veut dire que le message de Pentecôte n’a pas encore été compris et vécu comme il l’a été à l’origine du christianisme, c’est-à-dire comme le devoir de témoigner sa propre foi, de la protéger, de la répandre ; un droit et un devoir propres à celui qui a reçu le don de l’Esprit-Saint ; le désir de collaborer avec le Christ et d’édifier sur les bases que Lui-Même, architecte et constructeur, a jetées, Son Eglise.

Les catholiques contemporains ont fait de l’apostolat un sujet riche de pensée et d’action. Et, à ce propos, une réflexion sérieuse s’impose : quelle est, à l’heure actuelle, la situation de l’apostolat catholique ? Nous devons remercier le Seigneur pour les actions innombrables que le Peuple de Dieu accomplit afin de répandre le message chrétien. Remercions tous ceux qui, dans ce but, offrent leur intelligence, leurs noms, leurs moyens, leurs prières, leurs souffrances, leur solidarité ; hommes, femmes, laïcs, prêtres, religieux, à tous nous disons “ merci ”. Qu’ils sachent que l’Eglise et surtout le Souverain Pontife, les encouragent, les apprécient et les bénissent. Nous prions l’Esprit-Saint pour qu’il donne à tous ceux qui exercent l’apostolat à l’intérieur et à l’extérieur du domaine ecclésial cette force intérieure qui les aidera à accomplir, dans la joie, leur profession chrétienne. Mais nous ne devons pas oublier que la faiblesse humaine affleure sans cesse, menaçant cette attitude logique, constante et courageuse, propre à l’apostolat. Le chrétien, l’apôtre surtout, doit faire preuve de force, de courage, de loyauté et de liberté, comme il se doit à tout disciple du Christ (Ac 4,20 Lc 12,8-12 etc.).

Il existe toujours, hélas ! même chez les plus engagés (pensons à Pierre qui renia le Maître à l’heure de la Passion), une faiblesse inguérissable qui, sans un effort d’humilité de leur part et sans l’aide de l’Esprit-Saint, risque de les faire sombrer, à leur insu, dans cette sorte de “ champ magnétique ” que nous appelons respect humain, conformisme, crainte de la dérision et de l’opinion d’autrui. Nous rappelions ces jours-ci la pensée de Pascal sur l’usure de la force par l’opinion publique (Pensées, 333). Et aujourd’hui que la pression publique l’emporte sur l’autonomie de la personne, nous devons nous rappeler que nous sommes portés à laisser sans réponse l’appel extérieur de l’Eglise et l’appel intérieur de notre conscience. Nous nous proclamons libres, mais la crainte du jugement d’autrui, dont nous sommes les victimes, nous ôte la liberté. La contestation, qui, aujourd’hui, envahit même les milieux de confession chrétienne, a dépouillé le berceau de l’amour et de la vérité de ces forces qui auraient pu être utilisées en faveur d’un apostolat constructif. Cette attitude contestataire est une contrefaçon de l’apostolat (1Tm 6,20 2Tm 2,14). Nous voudrions que l’Esprit, dont ces contestataires se disent guidés (pour se soustraire probablement à l’harmonie de la communion ecclésiale et au respect de l’autorité), les ramène à leur véritable fonction et à l’amour de toute la communauté chrétienne.

Invoquons l’Esprit-Saint afin qu’il nous donne le courage et la force d’être les témoins de la Pentecôte dans l’Eglise et dans le monde.

Avec notre Bénédiction Apostolique.






Catéchèses Paul VI 25472