Pie XII 1952 - ALLOCUTION À L'UNIVERSITÉ POPULAIRE CONTARDO FERRINI

\BALLOCUTION À L'OCCASION DU IVe CENTENAIRE DU COLLÈGE PONTIFICAL GERMANO-HONGROIS

(g octobre 1952)1




Le Souverain Pontife a reçu ce g octobre 1952, en audience spéciale, les supérieurs et anciens élèves du Collège Pontifical Germano-Hongrois à l'occasion du IVe centenaire de sa fondation. Sa Sainteté leur a adressé le discours suivant :

Nous vous souhaitons une cordiale bienvenue, Vénérables Frères et chers Fils, qui êtes venus ici à l'occasion du IVe centenaire du Collège Germano-Hongrois.

Des circonstances extérieures, mais non moins significatives, ont fait déplacer et fixer au début des célébrations votre rencontre avec le Successeur de Pierre. Car si c'est un fait que le Collège Germano-Hongrois doit son origine avant tout à l'idée de saint Ignace, à sa sollicitude pour le sort de l'Eglise catholique dans les pays allemands et à l'élan irrésistible de sa volonté, il est toutefois une institution et une oeuvre des Papes que leur assistance affectueuse et efficace a soutenue et entourée. Aussi maintenant que nous avons tous rendu d'abord une humble et sincère action de grâces à la Majesté divine pour les abondantes, voire immenses, bénédictions qu'Elle a fait descendre sur cette fondation d'où elles se répandirent dans vos patries au cours de ces quatre cents années écoulées, est-il juste que votre pensée aille aux Papes de cette époque. La plupart d'entre eux méritent que leurs noms soient cités. Nous pourrions même Nous demander qui d'entre eux ne fut pas un bienfaiteur et un ami de votre Collège. Il y a trois noms que Nous ne pouvons passer

sous silence : Jules III, qui séduit par l'idée de saint Ignace, constitua le Collège le 31 août 1352 par la Bulle Dum sollicita ; Pie VII qui, après sa fermeture survenue en 1798, en ordonna la réouverture en 1818, en manifestant son vif intérêt à la reprise de son activité ; et, au premier rang, Grégoire XIII, le Pape pour ainsi dire de votre Collège, et qui en prit soin comme de la pupille de ses yeux. Jusqu'à quel point n'a-t-il pas répondu aux desseins de la Providence Divine par son entier attachement à votre Maison !

Avec un souvenir affectueux, nous citerons ensuite la Compagnie de Jésus à laquelle les Papes confièrent le Collège Germano-Hongrois, et qui est si dignement représentée en cette heureuse circonstance par un groupe choisi de ses membres, ayant à sa tête le Préposé Général de l'Ordre, pour qui Nous avons tant d'estime, et l'infatigable Recteur actuel du Collège.

La Compagnie de Jésus a laissé entre autres au Collège Germano-Hongrois un double et précieux héritage : la solide formation philosophique et théologique de ses élèves, si bien que la Foi catholique et toute la conception catholique du monde furent et continuent à être leur patrimoine intellectuel qu'ils savent défendre et avec lequel ils savent conquérir. Et puis une authentique piété sacerdotale. C'est la piété du livre des Exercices Spirituels, où 1'« agere », 1'« agere contra » et le renoncement à soi-même ont une part nullement négligeable et résultent d'un immense amour pour Jésus-Christ et pour 1'« insignes se exhibere » dans son imitation personnelle, et dans l'accomplissement de l'apostolat du Seigneur qui nous a aimés et qui s'est sacrifié pour nous 2.

Nous vivons en une époque de transition, dans une succession continue de perturbations. L'Eglise suit le cours des événements d'un oeil attentif, mais aussi avec un sentiment de sécurité intérieure. Elle est bien disposée à s'adapter là où sa mission le réclame ; mais elle est aussi consciente d'être la gardienne de trésors qui ne changent pas et qui conservent toujours intacte leur valeur. Parmi ceux-ci, il y a ce double héritage dont Nous venons de parler : il demeure et il garde sa validité même dans les temps nouveaux. En ce qui concerne les études, Nous serions pour ainsi dire enclin, pour des raisons qui vous sont compréhensibles, à mettre aujourd'hui en relief le mot « philosophie ». Certainement toute la portée de la philosophie chrétienne ne résulte que de l'approfondissement de la Révélation et de l'étude de la Théologie. Et en ce qui a trait à l'ascèse du Livre des Exercices, on pourrait être porté à croire que saint Ignace l'a écrit expressément pour notre époque. Cette école spirituelle a produit des héros que vous vénérez comme vos Martyrs. Les autres anciens élèves seraient eux aussi prêts à suivre leur exemple, si Dieu leur demandait de sacrifier leur vie. De toute façon, si vous avez suivi sérieusement l'école des Exercices, votre activité sacerdotale sera ce que doit être tout sacerdoce : l'épine dorsale de la vie catholique dans l'apostolat, qu'il soit ou non baigné de sang.

Avec une pensée affectueuse enfin, Nous évoquerons aujourd'hui les anciens élèves de votre Collège. L'histoire de l'Eglise catholique dans les pays de langue allemande et hongroise, depuis les jours de l'apostasie, leur a réservé une place d'honneur. Nous ne voudrions en ce moment souligner que trois de leurs mérites : la sécularisation des Chapitres des cathédrales allemandes représentait au XVIe siècle un péril mortel pour l'antique Foi. C'est en premier lieu aux anciens élèves du Collège Germanique que l'on doit le salut des Chapitres et leur stable renouvellement. Sans doute cela sera-t-il surtout le plus grand mérite de votre Collège. Combien fut bienfaisante l'activité des élèves du Collège Germanique dans l'éducation sacerdotale et dans l'enseignement philosophique et théologique ! Enfin combien d'évêques selon le coeur de Dieu sont-ils sortis de vos rangs !

Le nombre des évêques actuels, anciens élèves du Collège Germanique n'est pas négligeable dans les territoires de langue allemande. Il est cependant fort loin de celui des temps passés, comme, par exemple en 1680, quand 16 évêques allemands étaient d'anciens élèves du Collège Germanique s. Il est cependant vrai qu'au XXe siècle les évêques germaniques sont plus nombreux qu'ils ne le furent au XIXe siècle, bien que ce dernier doive être retenu comme le siècle par excellence du développement et de la splendeur du Collège. Il serait instructif de faire une enquête sur les motifs qui ont déterminé cette différence. D'ailleurs ceux-ci sont pour ainsi dire superficiels. Ils concernent les der-



s Cf. Gai. II, 20.



rd. A. Steinhuber, Histoire du Collège Germano-Hongrois à Rome, II ; 2e édition, 1906, p. 39.



nières décades et, de nos jours, nous pouvons dire seulement ceci : partout où d'anciens élèves du Collège Germanique furent

nommés évêques, la solution fut réalisée, en général, comme allant de soi par la nature même des circonstances et également grâce au désir des évêques de la région.

Amis et ennemis ne s'attendaient jamais qu'à une seule chose des anciens élèves : la fidélité au Pape et le sentire cum Ecclesia, et ces derniers n'ont pas déçu cette attente. Quelque chose aurait manqué à cette solennelle circonstance si Nous ne l'avions pas mentionné. Nous voudrions cependant que soient compris dans Nos paroles de reconnaissance également tous les prêtres, parmi vous, qui sont profondément dévoués à l'Eglise et au Pape. L'amour envers l'Eglise et la fidélité envers le Pape sont un signe intime de l'amour envers le Christ, et s'ils sont authentiques, inséparables de celui-ci. Ce qui vous distingue des autres est précisément votre longue expérience de la Rome éternelle, la Rome, centre de l'Eglise catholique : une expérience précieuse, basée sur le fait que le gouvernement de l'Eglise est effectivement empreint de l'amour du Rédempteur pour les hommes, et se reflète dans la conscience de l'universalité de l'Eglise même, et de son pouvoir d'universaliser les coeurs humains ainsi que dans le souvenir indélébile d'heureux événements, dont Rome et tout particulièrement Saint-Pierre connaissent une si grande abondance.

Nous voyons en effet devant nous le nombre imposant des élèves actuels de votre Collège. Ce que Nous attendons de vous, chers fils, Nous l'avons déjà annoncé dans les paroles que Nous vous avons adressées à l'occasion de l'ouverture de votre nouvelle Maison. Il y a une seule chose à laquelle Nous voudrions encore une fois faire allusion : la discipline en vigueur dans le Collège, qui vous impose de nombreux devoirs, est allégée par la vieille et louable tradition de votre Maison qui vous donne la faculté de participer à son application. L'éducation de soi-même est cependant elle-même une lourde tâche, et la confiance que l'on met en vous comporte des obligations. Considérez l'observance de la discipline comme un don offert en sacrifice à l'autel, le jour de votre ordination sacerdotale. Que Dieu vous en récompense par sa bénédiction pour votre sacerdoce. Faites en sorte que le don soit complet.

Certains d'entre vous sont précisément à la veille de leur ordination. Que vous souhaiterons-Nous, chers fils ? Soyez des prêtres qui prient beaucoup et avec ferveur, et nourrissez un attachement intime et plein d'amour envers le Christ. Le reste viendra de soi.

Nous sollicitons la grâce surabondante du Coeur Divin sur votre Collège Germano-Hongrois, sur ses dirigeants, ses élèves et anciens élèves, sur son présent et son avenir, de sorte que le Ve centenaire soit comme les précédents placé sous les bienveillants auspices de la Providence divine. Nous confions le Collège et sa famille à l'action de la Vierge Marie, sa Dame et Reine, et Nous vous donnons, ainsi qu'à tous vos frères, avec une paternelle bienveillance la Bénédiction apostolique.




DISCOURS AUX HOMMES D'ACTION CATHOLIQUE D'ITALIE

(12 octobre 1952) 1

Ce dimanche 12 octobre, l'Union des Hommes d'Action Catholique italienne célébrait le XXXe anniversaire de sa fondation. Devant plus de 100.000 membres réunis sur la Place Saint-Pierre le Pape prononça le discours suivant :

En contemplant cette magnifique assemblée d'Hommes d'Action Catholique, la première parole qui vient à Nos lèvres, est une parole de gratitude envers Dieu qui Nous a fait don d'un si grandiose et pieux spectacle ; puis une parole de reconnaissance à votre égard, chers fils, pour avoir voulu le réaliser devant Notre regard ravi de joie.

Nous connaissons bien les nuages menaçants qui se condensent sur le monde, et seul Notre-Seigneur Jésus sait Notre inquiétude permanente pour le sort d'une humanité dont II a voulu, Lui le Pasteur Suprême invisible, que Nous fussions le Père et le Maître visible. Entre temps cette humanité poursuit un chemin qui se révèle chaque jour plus ardu, alors qu'il semblerait que les prodigieux moyens de la science dussent, Nous ne dirons pas « le couvrir de fleurs », mais au moins diminuer, sinon éliminer tout à fait les monceaux de ronces et d'épines qui l'encombrent.

Cependant, de temps à autre, - pour Notre réconfort dans cette terrible anxiété, — Jésus veut, dans sa bonté, que les nuages se déchirent et qu'apparaisse triomphant un rayon de soleil, signe que même les nuées les plus sombres ne suppriment pas la lumière, mais en cachent seulement l'éclat.

Et voici maintenant une pacifique armée d'hommes militant dans l'Action Catholique italienne : chrétiens vivants et vivifica-teurs ; bon pain et en même temps levain des plus précieux au milieu de la masse des autres hommes ; cent cinquante mille, la plupart pères de famille, qui vivent leur baptême et s'emploient à le faire vivre par les autres. Et vous n'êtes pas tous là. Des centaines de milliers d'Hommes catholiques, retenus par de graves motifs, n'en sont pas moins présents ici avec la ferveur de leur esprit, de leur foi et de leur amour. Des hommes mûrs et de toute condition : dirigeants, intellectuels, employés, enseignants, ouvriers, travailleurs des champs, militaires ; tous frères dans le Christ ; tous unis comme dans le seul battement d'un unique coeur.

Nous voudrions que vous puissiez admirer vous aussi la magnifique vision qui s'offre en ce moment à Nos yeux ; Nous désirerions que vous sentiez au fond de votre esprit tout l'amour avec lequel Nous voudrions, — si c'était possible, — descendre au milieu de vous et vous embrasser tous comme si vous ne faisiez qu'un.

Chers fils ! Vous êtes venus à Rome pour fêter le trentième anniversaire de votre Union, — la première des associations nationales d'Action Catholique —. Il y a cinq ans, les Hommes qui se réunirent dans la Ville Eternelle étaient soixante-dix mille ; aujourd'hui ce nombre est doublé et il représente quelque chose de plus qu'un symbole de la ferveur multipliée de votre vie chrétienne.

Lors de ce désormais lointain septembre 1947, Nous avons béni votre Etendard et y avons accroché une médaille d'or. Nous tenons à vous dire devant Rome et l'Italie, que vous avez bien répondu à ce que Nous attendions de vous, au cours de ces années de luttes aiguës pour la civilisation chrétienne et italienne. Cette médaille est bien à sa place sur votre drapeau, parce que vous êtes parmi les principaux artisans de la résistance que l'Italie a opposée, pour elle-même et pour le monde, aux forces du matérialisme et de la tyrannie 2.

Aujourd'hui, à midi, un nouveau choeur de cloches s'est ajouté au retentissement sonore de tous les bronzes sacrés de la Ville Eternelle qui saluent Marie et invitent les fidèles à l'honorer. Vous avez entendu, en cette heure-là, Nous faire, à Nous Evêque de Rome, un don particulièrement agréable. Au sein d'un quartier des plus populeux de Notre chère Ville, sur l'impulsion de votre infatigable Aumônier général, sur les plans d'un jeune architecte membre de l'Action Catholique, au milieu de l'émerveillement de tous ceux qui ont pu observer l'ensemble complexe du projet et la rapidité de l'exécution, grâce à l'habileté et à la ténacité du personnel, votre Union a fait surgir, avec tous les édifices et les oeuvres annexes, une belle et vaste église, siège paroissial sous le patronage de saint Léon le Grand.

Nous pensons ne faire tort à personne en déclarant que bien peu connaissent l'activité intrépide de ce Pape, si grand parmi les plus grands, pour le bien civil et social de Rome et de l'Italie, pour conserver la pureté de la foi et pour réformer et renforcer l'organisation ecclésiastique ; sans doute bien peu se rappellent qu'une grande partie de son activité s'employa dans la lutte contre l'hérésie monophysite, qui niait dans le Christ deux natures, l'humaine et la divine, réellement distinctes, sans fusion ni mélange.

Mais tous savent que lorsque Attila, roi des Huns, descendait victorieux en Italie, dévastant la Vénétie et la Ligurie et s'apprêtait à marcher sur Rome, le Pape Léon rendit courage à l'Empereur, au Sénat et au peuple, tous en proie à la terreur, qu'il partit sans défense et se rendit au devant de l'envahisseur sur le Mincio. Et Attila le reçut dignement et fut si satisfait de la présence du summus sacerdos qu'il renonça à toute action de guerre et se retira au-delà du Danube.

Ce fait mémorable se passa précisément lors de l'automne 452, aussi sommes-Nous heureux d'en commémorer ici, solennellement, avec vous, le quinzième centenaire.

Pie XII signale les adversaires auxquels il faut aujourd'hui faire face.

Chers fils, Hommes de l'Action Catholique ! quand Nous avons appris que la nouvelle église devait être consacrée à S. Léon Ier, qui sauva Rome et l'Italie de l'assaut des barbares, la pensée Nous est venue que vous entendiez peut-être faire allusion aux conditions présentes. Aujourd'hui ce ne sont pas seulement la Ville Eternelle et l'Italie qui sont menacées, mais le monde entier.

Oh ! ne Nous demandez pas qui est « l'ennemi » ni sous quel aspect il se présente. Il se trouve partout et au milieu de tous : il sait être violent et rusé. Ces derniers siècles, il a tenté de réaliser la désagrégation intellectuelle, morale, sociale de l'unité dans l'organisme mystérieux du Christ. Il a voulu la nature sans la grâce ; la raison sans la foi ; la liberté sans l'autorité ; parfois l'autorité sans la liberté. C'est un « ennemi » devenu de plus en plus concret, avec une absence de scrupules qui surprend encore : le Christ oui, l'Eglise non ! Puis : Dieu oui, le Christ non ! Finalement le cri impie : Dieu est mort ; et même : Dieu n'a jamais existé. Et voici, maintenant, la tentative d'édifier la structure du monde sur des bases que Nous n'hésitons pas à indiquer comme principales responsables de la menace qui pèse sur l'humanité : une économie sans Dieu, un droit sans Dieu, une politique sans Dieu. L'« ennemi » s'est employé et s'emploie à ce que le Christ soit un étranger dans les universités, dans l'école, dans la famille, dans l'administration de la justice, dans l'activité législative, dans les assises des nations, là où se décide la paix ou la guerre.

Il est en train de corrompre le monde avec une presse et avec des spectacles qui tuent la pudeur chez les jeunes gens et les jeunes filles et détruisent l'amour entre les époux ; il inculque un nationalisme qui conduit à la guerre.

Vous voyez, chers fils, que ce n'est pas Attila qui est aux portes de Rome ; vous comprenez qu'il serait vain, aujourd'hui, de demander au Pape d'intervenir et d'aller au-devant de lui pour l'arrêter et l'empêcher de semer la ruine et la mort. Le Pape doit, à sa place, veiller et prier sans cesse et se prodiguer afin que le loup ne finisse pas par pénétrer dans le bercail, par ravir et disperser le troupeau [3] ; ceux qui, avec le Pape, partagent la responsabilité du gouvernement de l'Eglise, font également tout leur possible pour répondre à l'attente de millions d'hommes, qui, comme Nous l'avons exposé en février dernier [4] sollicitent un changement de route et regardent l'Eglise comme l'unique pilote valable. Mais aujourd'hui, cela ne suffit pas ; tous les fidèles de bonne volonté doivent se secouer et être conscients de leur part de responsabilité pour le succès de cette entreprise de salut.

Pour combattre les ennemis, l'Eglise doit pouvoir compter sur les organisations d'Action Catholique.

Chers fils, Hommes de l'Action Catholique ! L'humanité d'aujourd'hui, désorientée, égarée, méfiante, a besoin de lumière, d'orientation, de confiance. Voulez-vous, avec votre collaboration, — sous la direction de la Hiérarchie, — être les hérauts de cette espérance et les messagers de cette lumière ? Voulez-vous apporter la sécurité et la paix ? Voulez-vous être le grand et triomphal rayon de soleil qui invite à s'éveiller de la torpeur et à travailler énergiquement ? Voulez-vous devenir, — s'il plaît à Dieu, — les animateurs de cette multitude humaine qui attend des avant-gardes pour la précéder ?

Les membres des groupes d'Action Catholique doivent connaître la pensée de l'Eglise.

Alors il est nécessaire que votre action soit avant tout consciente.

L'homme d'Action Catholique ne peut ignorer ce que l'Eglise fait et entend faire. Il sait que l'Eglise veut la paix ; qu'elle veut une distribution plus juste de la richesse ; qu'elle veut soulager le sort des humbles et des indigents ; il sait que le Christ, Dieu fait homme, est le centre de l'histoire humaine ; que toutes les choses ont été faites en Lui et par Lui. Il sait que l'Eglise, lorsqu'elle souhaite un monde différent et meilleur, pense à une société ayant pour base et fondement Jésus-Christ, avec sa doctrine, ses exemples, sa rédemption.

L'Action Catholique doit apporter la vérité aux autres.

En second lieu, il faut que votre action soit illuminatrice.

Dans vos usines, dans vos bureaux, dans les rues, dans les lieux où vous prenez vos saines distractions et le repos nécessaire, il vous arrivera de rencontrer des hommes « qui ont des yeux pour voir et qui ne voient pas » [5]. Aujourd'hui, par exemple, on rencontre de pauvres gens persuadés que l'Eglise, que le Pape veulent l'exploitation du peuple, veulent la misère, veulent, — cela semblerait inconcevable, — la guerre ! Les auteurs et les propagateurs de ces horribles calomnies réussiront à échapper à la justice des hommes, mais ils ne pourront se soustraire au jugement de Dieu. « Un jour viendra... » Seigneur, pardonnez-leur ! En attendant, il est cependant nécessaire de saisir toute occasion pour ouvrir les yeux à ces aveugles, qui souvent sont plutôt victimes de tromperies que coupables.

L'Action Catholique doit donner la vie.

Il faut encore que votre action soit vivificatrice.

L'Action Catholique ne sera point vraiment telle, si elle n'agit pas sur les âmes. Les grands rassemblements, les magnifiques cortèges, les manifestations publiques sont certainement utiles. Mais attention, il ne faut pas confondre les instruments avec la fin pour laquelle ils doivent être utilisés ! Si votre action n'apportait pas la vie de l'esprit là où est la mort, si elle ne cherchait pas à guérir cette même vie là où elle est malade ; si elle ne la fortifiait pas là où elle est faible, elle serait vaine. Nous savons que votre Présidence générale a approuvé un programme de travail « le réseau capillaire » pour rendre efficiente la présence des militants catholiques en tous lieux et avec toutes les personnes au milieu desquelles ils vivent. Soyez donc les principaux membres et propulseurs de « cette base missionnaire », comme on a voulu l'appeler.

L'Action Catholique doit constituer un tout coordonné.

Il faut en outre que votre action soit unificatrice.

Soyez unis entre membres d'une même association ; unis entre les diverses associations ; unis avec les autres « branches » de l'Action Catholique. Mais soyez unis et faites-vous les promoteurs d'union avec les autres forces catholiques, qui combattent les mêmes batailles pacifiques que vous et sont prêts à vaincre dans la même lutte que la vôtre.

Chers fils, voulez-vous être forts ? Voulez-vous, avec l'aide de Dieu, être invincibles ? Soyez prêts à sacrifier au bien suprême de l'union, — Nous ne disons pas les caprices, — c'est évident, — mais même quelque idée ou programme qui pourraient vous sembler excellents. L'union toutefois n'est pas l'uniformité ; celle-ci détruirait la variété des forces, variété qui a non seulement une valeur esthétique, mais comporte d'autre part des avantages stratégiques et tactiques de tout premier ordre.

L'Action Catholique doit être soumise.

Enfin que votre action soit obéissante.

Nul ne désire plus que Nous que le laïcat sorte d'un certain état de minorité, mérité aujourd'hui moins que jamais dans le domaine de l'apostolat. Mais, d'autre part, la nécessité d'une obéissance empressée et filiale est évidente, chaque fois que l'Eglise parle pour instruire l'esprit des fidèles et diriger leur activité. Elle se garde bien d'empiéter sur la compétence de l'Autorité civile. Mais quand il s'agit de questions qui touchent la religion ou la morale, c'est un devoir pour tous les chrétiens, et spécialement pour les militants d'Action Catholique, d'observer ses prescriptions, de comprendre et de suivre ses enseignements. Nous voudrions même ajouter qu'il est également nécessaire au sein de l'Action Catholique d'observer une stricte discipline entre les divers grades des associations. En effet, quand on a en face de soi une armée avec une organisation de fer, à quel danger n'exposerait-on pas une milice débandée, dans laquelle chacun se croirait autorisé à guider et à agir selon son propre arbitre.

Le Pape appelle tous les Hommes d'Action Catholique a une nouvelle offensive.

Et maintenant, avant de conclure Nos paroles, Nous voudrions vous confier une « consigne ». Vous vous rappellerez certainement qu'au mois de février dernier[6], Nous avons adressé aux fidèles de Rome une chaude exhortation afin que l'aspect, même extérieur, de la Ville Eternelle apparaisse resplendissant de sainteté et de beauté. Nous devons dire que le clergé et le peuple sont à l'oeuvre, avec ferveur, pour que ne demeurent pas vaines nos espérances et que ne soit pas frustrée Notre confiance. Mais Nous avons en même temps exprimé le souhait que ce puissant réveil auquel Nous avons exhorté Rome « soit rapidement imité par les diocèses proches et éloignés, afin qu'il soit permis à Nos yeux de voir revenir au Christ non seulement les villes, mais les nations, les continents, l'humanité entière ». Pour cela, que Nous pourrons appeler « une seconde phase », Nous comptons sur les Hommes Catholiques, sur toute l'Action Catholique.

Alors, tandis que les impies continuent à répandre les germes de la haine, tandis qu'ils crient encore : « Nous ne voulons pas que Jésus règne sur nous » : nolumus hune regnare super nos ', un autre chant s'élèvera, chant d'amour et de libération, exprimant la fermeté et le courage. Il s'élèvera dans les champs et dans les usines, dans les maisons et dans les rues, dans les parlements et dans les tribunaux, dans les familles et dans l'école.

Chers fils, Hommes de l'Action Catholique, dans un instant, Nous vous donnerons avec toute l'effusion de Notre coeur paternel la Bénédiction apostolique, à vous, à ceux qui vous sont chers, à vos oeuvres, à vos associations. Puis vous repartirez, vous regagnerez vos demeures, vous retrouverez votre travail.

Portez partout votre action illuminatrice et vivificatrice.

Et que votre chant soit un chant de certitude et de victoire !

Christus vincit ! Christus régnât ! Christus imperat l



? Luc XIX, 14.


ALLOCUTION À UN GROUPE DE BOURGMESTRES AUTRICHIENS

(21 octobre 1952)[7]


Recevant un groupe de bourgmestres de la Basse Autriche, accompagnés de leurs familles, le Saint-Père dit :

Soyez les bienvenus, chers Messieurs ! Vous qui êtes venus à la Ville Eternelle, vous provenez d'une Nation à laquelle, au cours de cette année, Nous avons adressé, à deux reprises*, Notre salut, en soulignant toujours combien son destin Nous tenait à coeur et combien était intense Notre désir de voir finir la dure épreuve que votre pays a traversée et qu'il traverse encore. Puisse le résultat final compenser dignement les angoisses du passé, en rendant toute sa signification à l'antique devise « Félix Austria » !

Il n'y a pas si longtemps, Nous avons eu la joie de voir autour de Nous plus de quatre mille maires d'Italie [8]. Cependant, que des hommes chargés d'une haute fonction telle que la vôtre viennent en si grand nombre et d'un pays plus lointain rendre visite au Chef de l'Eglise, c'est là un fait unique, jusqu'à présent, dans les annales de notre Pontificat. Aussi Notre satisfaction n'en est-elle que plus vive à vous saluer dans Notre Maison.

Peu de charges administratives comprennent comme la vôtre des tâches aussi nombreuses dans leur ensemble et leur variété. Aussi connaissons-Nous la lourde responsabilité qui pèse sur vous, et vous pouvez être sûrs que Notre affection paternelle et Nos prières accompagnent vos actions et vos entreprises.

Nous savons également combien de prudence et de maturité de jugement sont nécessaires à un homme dans votre position, afin que, parmi les oppositions et les opinions en contraste, il puisse toujours trouver et faire triompher ce qui répond le mieux au bien de toute la communauté. Nous vous souhaitons donc deux choses : que vous puissiez défendre vos décisions non seulement devant le gouvernement, mais, et surtout, également devant Dieu qui voit tout ; que les pauvres, les veuves, les orphelins et tous les autres qui sont dans le besoin trouvent toujours en vous un bon père ; et que d'autre part les institutions et les initiatives qui se proposent de les aider aient toujours en vous un appui efficace.

En gage de cela Nous vous donnons, ainsi qu'à vos Communes, avec une paternelle bienveillance, la Bénédiction apostolique.



DISCOURS AUX PARTICIPANTS AU XXVIIe CONGRÈS DE STOMATOLOGIE

(23 octobre 1952)[9]


Le XXVIIe Congrès italien de stomatologie et la première triennale internationale de prothèse dentaire ont eu lieu à Rome : un nombre notable de savants en cette branche a été reçu en audience particulière à Castel Gandolfo ; le Souverain Pontife leur parla en ces termes :

Les manifestations du XXVIIe Congrès italien de stomatologie et de la première Triennale internationale de prothèse dentaire vous ont rassemblés, cette année, en grand nombre dans la Ville Eternelle, où ont tenu aussi à vous accompagner beaucoup de vos familles attirées par les beautés incomparables de cette Rome qui, « mère des peuples » — ainsi qu'on l'a appelée, — en conserve toujours la main caressante et la magnanime volonté. Nous vous accueillons avec une vive satisfaction, heureux de pouvoir dire encore une fois l'intérêt que Nous portons à vos travaux, dans lesquels Nous admirons et l'action de l'esprit, toujours tendu vers de nouvelles conquêtes, et celle du coeur, humainement et chrétiennement soucieux de prévenir et de soulager les infirmités de nos frères.

Le Pape loue la collaboration entre savants, en souligne la fécondité :

Vous voici ainsi devant Nous, illustres savants, qui comptez parmi les plus représentatifs de votre branche spéciale en Italie et au dehors, directeurs de cliniques, chirurgiens et chercheurs très renommés, amis des arts et serviteurs passionnés de la science. L'un des caractères de la civilisation moderne et la gloire de notre époque c'est l'organisation de Congrès scientifiques nationaux et internationaux comme le vôtre. Une grande partie de la rapidité et de la sûreté du progrès scientifique actuel est due, en effet, à la collaboration organisée entre savants de toutes les nations qui, mettant en commun les connaissances et les capacités de chacun, obtiennent les heureux résultats qui, sans cela, ne resteraient qu'un rêve ; des études hardies et des expériences couronnées de succès demeureraient comme des fragments épars d'une oeuvre qui attendrait l'écoulement de nombreuses années avant de prendre corps et vie. Mieux, peut-être, que les publications, même les plus soignées, les conversations et les discussions personnelles dans les Congrès de spécialistes se sont avérées désormais d'une utilité sans pareille, à laquelle la qualité et le nombre des personnalités présentes ici aujourd'hui rendent un éloquent témoignage. De telles assemblées fournissent par ailleurs aux techniciens un abondant matériel et des renseignements de première main. Quelle aide, par exemple, apporte dans une conférence la projection de photographies, de micrographies, de radiographies, de « films », obtenus et commentés par le rapporteur lui-même.

Pie XII signale la valeur humaine de la bouche et de la parole : celles-ci ont même une fonction quasi sacrée, notamment dans les sacrements, la prédication :

Il n'est pas nécessaire que Nous rappelions combien important et délicat est l'ensemble physiologique qui forme l'objet de vos études et de votre assemblée : la bouche. Sa structure et ses caractéristiques ne le cèdent pas aux autres admirables organes vitaux dans la manifestation de la prévoyante disposition et de la sagesse du Créateur, qui dans un espace exigu, a groupé les fonctions les plus variées, depuis celles qui servent à la nutrition jusqu'à celles qui constituent le moyen ordinaire pour exprimer des pensées et des sentiments. Il ne serait pas hors de propos de parler d'une fonction quasi sacrée de la bouche, car elle est, en quelque façon, un instrument de la communication du divin, ainsi qu'il arrive lorsque par la parole est diffusée l'éternelle vérité, ou encore dans les sacrements, quand elle est élevée à la dignité de moyen de transmission de la grâce et de l'union physique avec le corps du Christ. Bien plus, le langage humain est attribué à Dieu lui-même par les Livres saints, où à d'innombrables reprises revient l'expression, en vérité anthropomorphiste, de os Domini, ex ore Altissimi, c'est-à-dire : sublime, divine bouche, de laquelle jaillissent les vérités, les avertissements, les promesses de Dieu aux hommes, et de laquelle aussi l'âme extatique du Cantique des cantiques attend, avec un tendre et émouvant désir, le baiser mystique : Osculetur me osculo oris sui[10]. Et dans le Nouveau Testament, lorsque le premier évangé-liste notait soigneusement que Jésus, ouvrant sa bouche, enseignait : aperiens os suum, docebat *, peut-être voulait-il indiquer la grandeur de l'heure où s'ouvrit enfin la sublime et divine bouche du Fils incarné, communicatrice de la sagesse éternelle elle-même et de l'amour miséricordieux. Combien donc, cette partie vitale du corps humain est un digne objet de vos fatigues scientifiques et des mesures que vous entendez réaliser dans une proportion toujours plus grande pour prévenir et guérir ses maux.

Le Pape félicite de leurs soucis sociaux les spécialistes des deux Congrès : en faveur notamment de l'enfance, spécialement la plus pauvre :

Aussi, en parcourant avec une particulière attention le programme de votre double Congrès, avons-Nous noté avec une vive satisfaction, dans le premier sujet, votre délicat souci d'apporter les soins les plus assidus à l'enfance, surtout à la plus pauvre et à la plus abandonnée. Dans de semblables réunions nationales et internationales, l'autorité des participants permet de promouvoir avec plus de chance de succès, auprès des pouvoirs publics et de l'opinion publique, les mesures et les institutions appropriées d'intérêt général, qui dépassent les possibilités et les ressources des entreprises privées.

Vous désirez voir établir des dispensaires et des moyens d'assistance odontologiques pour l'enfance, et Nous savons que vous serez prêts à apporter plus largement votre concours à mesure que les installations nécessaires pourront être équipées. Les chers petits enfants, à combien de maux et de misères peuvent-ils être sujets ! Maux qui, entre autres, éteignent et déforment sur leurs lèvres ce sourire, l'une des plus belles choses que Dieu ait données à la terre. Troubles locaux et généraux de la première dentition, anomalies de forme, calcification défectueuse des dents, processus d'infection, et tant d'autres altérations des dents et de la bouche exigent votre assistance et en manifestent l'aspect hautement social, qui constitue la matière privilégiée de vos assemblées.

Le Souverain Pontife exalte l'apport à la médecine générale et la collaboration avec elle de la spécialité stomatologique, la nécessité d'interventions chirurgicales dans la bouche et le rôle des anesthésiques ; il apprécie l'exposition rétrospective d'odontologie et de prothèse dentaire :

Comme vos collègues de médecine générale, vous aussi vous rencontrez des tumeurs et des ulcérations des tissus mous dans la bouche, qui, spécialement dans les formes cancéreuses, sont l'un des objets d'étude particulière dans vos Congrès. Le cancer, ce terrible mal sur lequel se penchent tant de savants et de professionnels désireux d'en dévoiler la cruelle énigme, porte ses dévastations même dans la bouche ; il concerne donc la stomatologie elle-même. Là comme ailleurs, il occasionne ordinairement une cachexie ou état d'altération et de dégénérescence progressive dans les conditions de tout l'organisme, et, de cette façon, votre branche spéciale est en étroite collaboration avec la médecine générale, à laquelle elle apporte de précieux éléments d'expériences et de solutions, fussent-elles encore partielles. Ainsi, tous les membres de la grande famille médicale s'aident et se soutiennent mutuellement dans leurs efforts pour rechercher et découvrir les causes profondes des maladies et pouvoir, de cette manière, donner de salutaires normes thérapeutiques et hygiéniques.

Cependant, quels que puissent être les progrès souhaités dans l'art de prévenir les maux que vous soignez, l'intervention chirurgicale peut devenir souvent nécessaire et opportune, soit dans le palais, soit dans le bas de la bouche, soit dans le tissu gingival ; parfois même, elle doit être très prompte. Parmi les services que les merveilleux progrès de la chimie ont rendus et rendent encore à la science et à l'art médical, les analgésiques et les anesthésiques ont une part très importante ; c'est pourquoi ils constituent l'argument d'un autre des sujets de votre Congrès, soit en général, soit en particulier, dans le domaine de la stomatologie. La proverbiale terreur que l'on éprouvait, assis dans le fauteuil du dentiste, à la seule vue de la fraise ou du syndesmotone, du davier ou de la pince pour l'extraction des dents, diminuera de jour en jour. Mais comme les appréhensions d'un grand nombre de patients sont encore bien vives, vous devez assez souvent recourir à des anesthésies générales ou locales qui, en apportant aux patients craintifs le soulagement désiré, vous permettent d'opérer d'une main sûre et avec plus de succès.

La première Triennale internationale de prothèse dentaire comprend une partie de démonstrations pratiques et une « Exposition rétrospective » de l'odontologie et de la prothèse. Cette Exposition montrera même aux profanes quels efforts ingénieux ont été accomplis depuis les époques les plus reculées pour délivrer les hommes des douleurs lancinantes du mal de dents. Mages et médecins multipliaient les pratiques et les recettes, dont les anciens livres de médecine ont conservé de bien curieux exemples. Mais quelques praticiens plus habiles avaient déjà, avant l'ère chrétienne, exécuté de véritables prothèses selon des méthodes ne différant pas de celles d'aujourd'hui. N'a-t-on pas trouvé, par exemple, dans un tombeau étrusque, un crâne avec des ligatures de dents en or ? C'est ainsi qu'on a pu écrire d'importants ouvrages historiques sur les prothèses dentaires dans l'antiquité. Mais c'est en des temps plus récents que s'accomplit la profonde transformation de l'odontologie, après le progrès général de l'industrie et des sciences physiques et chimiques. Alors que les chirurgiens des siècles passés n'avaient à leur disposition que des instruments manuels, aujourd'hui, une technique et un matériel mécanique perfectionnés permettent l'exécution, dans le cabinet dentaire ou au laboratoire, de travaux auparavant impossibles à effectuer.

Le Pape montre la dignité de l'art odontologique par ses rapports avec la pathologie générale et par l'individualité de chaque cas, par l'importance du bon état de la bouche, qui a amené à créer l'orthopédie dento-maxillo-faciale :

Cependant, l'action de l'odontologie moderne n'est pas circonscrite à la seule région dentaire, elle s'étend encore, en de nombreux cas, aux autres parties de la cavité buccale, et même souvent à l'état pathologique d'organes même éloignés et aux conditions de l'organisme tout entier. Son action n'est pas non plus purement technique, car rien ne remplacera jamais l'habileté et la perspicacité qui font de la prothèse dentaire et de la chirurgie buccale un art très délicat, attendu que chaque patient représente un cas particulier. Vous ne faites jamais exactement un travail identique, ou, comme on a coutume de dire, de travail en série ; c'est pourquoi il y a toujours quelque chose d'artistique, qui fait appel aux facultés inventives, dans votre profession. Celle-ci doit nécessairement fondre ensemble la science du médecin qui étudie les causes biologiques et les moyens thérapeutiques des maladies des dents avec l'art du chirurgien. Le temps où quelques médecins affectaient un certain mépris pour le dentiste est désormais bien loin, et c'est à bon droit qu'a été substitué le terme de stomatologie aux mots qui désignaient auparavant votre branche. Vous veillez sur ce que l'on peut appeler la porte principale de l'organisme, si sensible aux facteurs extérieurs, sachant bien que la régulière conformation et le bon état de la bouche sont de la plus grande importance, non seulement pour la mastication, pour les fonctions di-gestives et pour la respiration, mais encore au-delà de l'ordre physiologique, pour la prononciation, pour l'art oratoire, et, en général,' pour le décorum extérieur de la personne. Aussi, les stomatologues qui observent un nombre toujours plus grand de déformations de la bouche en sont venus à créer une nouvelle science, l'orthopédie dento-maxillo-faciale, qui bien souvent peut efficacement intervenir durant la croissance de l'enfant, au moment où il est encore temps d'aider la nature à se développer normalement.

Désireux comme Nous le sommes autant que vous, que le perfectionnement de l'homme soit favorisé non seulement dans les régions de l'esprit, mais encore dans son physique et dans ses organes afin que resplendisse davantage en lui, roi de la création, la sagesse du Créateur, Nous souhaitons que votre Congrès comme les autres, nationaux et internationaux, semblables au vôtre, contribue efficacement à atteindre ce but. En particulier, Nous souhaitons au présent Congrès que, mettant toujours plus en lumière la beauté et l'importance de votre activité, il stimule encore plus les recherches, facilite les échanges et la mutuelle compréhension, et, comme résultat d'une plus vaste portée, qu'il renforce les liens entre les nations et favorise le travail dans la paix, pour le bien de l'humanité tout entière. Telles sont les grâces que Nous implorons de Dieu pour vous, tandis que, de grand coeur, Nous vous donnons à vous, à vos familles, à vos travaux, à vos oeuvres, Notre Bénédiction apostolique.


Pie XII 1952 - ALLOCUTION À L'UNIVERSITÉ POPULAIRE CONTARDO FERRINI