Pie XII 1957 - SUR L'INVITATION À UNE PLUS HAUTE PERFECTION


MOTIFS QUI PERMETTENT D'ÉVITER LA DOULEUR PHYSIQUE

Quels sont les motifs qui permettent dans les cas d'espèce d'éviter la douleur physique sans entrer en conflit avec une obligation grave ou avec l'idéal de la vie chrétienne ? On pourrait en énumérer un grand nombre ; mais, malgré leur diversité, ils se ramènent finalement au fait qu'à la longue, la douleur empêche l'obtention de biens et d'intérêts supérieurs. Il peut se faire qu'elle soit préférable pour telle personne déterminée et dans telle situation concrète ; mais en général, les dommages qu'elle provoque forcent les hommes à se défendre contre elle ; sans doute ne la fera-t-on jamais disparaître complètement de l'humanité ; mais on peut contenir en de plus étroites limites ses effets nocifs. Ainsi, comme on maîtrise une force naturelle pour en tirer parti, le chrétien utilise la souffrance comme un stimulant dans son effort d'ascension spirituelle et de purification, afin de mieux s'acquitter de ses devoirs et de mieux répondre à l'appel d'une plus haute perfection ; c'est à chacun d'adopter les solutions convenant à son cas personnel, selon les aptitudes ou dispositions susdites, dans la mesure où — sans empêcher d'autres intérêts et d'autres biens supérieurs — elles sont un moyen de progrès dans la vie intérieure de plus parfaite purification, d'accomplissement plus fidèle du devoir, de plus grande promptitude à suivre les impulsions divines. Pour s'assurer que tel est bien le cas, on consultera les règles de la prudence chrétienne et les avis d'un directeur de conscience expérimenté.



CONCLUSIONS ET RÉPONSES A LA PREMIÈRE QUESTION

Vous tirerez aisément de ces réponses des orientations utiles pour votre action pratique.

1. — Les principes fondamentaux de l'anesthésiologie, comme science et comme art, et la fin qu'elle poursuit, ne soulèvent pas d'objection. Elle combat des forces qui, à bien des égards, produisent des effets nuisibles et entravent un plus grand bien.

2. — Le médecin, qui en accepte les méthodes, n'entre en contradiction ni avec l'ordre moral naturel, ni avec l'idéal spécifiquement chrétien. Il cherche, selon l'ordre du Créateur (Gn 1,28), à soumettre la douleur au pouvoir de l'homme, et utilise pour cela les acquisitions de la science et de la technique, selon les principes que Nous avons énoncés et qui guideront ses décisions dans les cas particuliers.

3. — Le patient désireux d'éviter ou de calmer la douleur peut, sans inquiétude de conscience, utiliser les moyens trouvés par la science et qui, en eux-mêmes, ne sont pas immoraux. Des circonstances particulières peuvent imposer une autre ligne de conduite ; mais le devoir de renoncement et de purification intérieure, qui incombe aux chrétiens, n'est pas un obstacle à l'emploi de l'anesthésie, parce qu'on peut le remplir d'une autre manière. La même règle s'applique aussi aux exigences suréro-gatoires de l'idéal chrétien.


II

SUR LA NARCOSE ET LA PRIVATION TOTALE OU PARTIELLE DE LA CONSCIENCE DE SOI

Votre deuxième question concernait la narcose et la privation totale ou partielle de la conscience de soi au regard de la morale chrétienne. Vous l'énonciez ainsi : « L'abolition complète de la sensibilité sous toutes ses formes (anesthésie générale), ou la diminution plus ou moins grande de la sensibilité douloureuse (hypo et analgésie), s'accompagnent toujours respectivement de la disparition ou de la diminution de la conscience et des facultés intellectuelles les plus élevées (mémoire, processus d'association, facultés critiques, etc.) : ces phénomènes qui rentrent dans le cadre habituel de la narcose chirurgicale et de l'analgésie pré et postopératoire sont-ils compatibles avec l'esprit de l'Evangile ? »

L'Evangile rapporte qu'immédiatement avant la crucifixion, on offrit au Seigneur du vin mêlé de fiel, sans doute pour atténuer ses souffrances. Après l'avoir goûté, il ne voulut pas le boire (Mt 27,34), parce qu'il voulait souffrir en pleine conscience, accomplissant ainsi ce qu'il avait dit à Pierre lors de l'arrestation : « Ne boirai-je pas le calice que mon Père m'a préparé ? » (Jn 18,11). Calice si amer, que Jésus avait supplié dans l'angoisse de son âme : « Père, écarte ce calice de moi ! Mais que ta volonté se fasse et non la mienne ! » (Mt 26,38-39 Lc 22,42-44). L'attitude du Christ envers sa passion, telle que la révèlent ce récit et d'autres passages de l'Evangile (Lc 12,50), permet-elle au chrétien d'accepter la narcose totale ou partielle ?

Puisque vous considérez la question sous deux aspects, Nous examinerons successivement la suppression de la douleur et la diminution ou la suppression totale de la conscience et de l'usage des facultés supérieures.




DISPARITION DE LA DOULEUR

La disparition de la douleur dépend, comme vous le dites, soit de la suppression de la sensibilité générale (anesthésie générale), soit d'un abaissement plus ou moins marqué de la capacité de souffrir (hypo et analgésie). Nous avons déjà dit l'essentiel sur l'aspect moral de la suppression de la douleur ; il importe peu, au regard du jugement religieux et moral, qu'elle soit causée par une narcose ou par d'autres moyens : dans les limites indiquées elle ne soulève pas d'objection et reste compatible avec l'esprit de l'Evangile. D'autre part, il ne faut pas nier ni sous-estimer le fait que l'acceptation volontaire (obligatoire ou non) de la douleur physique, même à l'occasion d'interventions chirurgicales, puisse manifester un héroïsme élevé et témoigne souvent en réalité d'une imitation héroïque de la passion du Christ. Toutefois cela ne signifie pas qu'elle en soit un élément indispensable ; dans les interventions importantes surtout, il n'est pas rare que l'anesthésie s'impose pour d'autres motifs et le chirurgien ou le patient ne pourraient s'en passer sans manquer à la prudence chrétienne. Il en va de même de l'analgésie pré et postopératoire.



SUPPRESSION OU DIMINUTION DE LA CONSCIENCE ET DE L'USAGE DES FACULTÉS SUPÉRIEURES

Vous parlez ensuite de la diminution ou de la suppression de la conscience, de l'usage des facultés supérieures, comme de phénomènes accompagnant la perte de la sensibilité. D'habitude, ce que vous voulez obtenir c'est précisément cette perte de sensibilité ; mais souvent il est impossible de la provoquer sans produire en même temps l'inconscience totale ou partielle. Hors du domaine chirurgical, cette relation est souvent inversée, non seulement en médecine, mais aussi en psychologie et dans les enquêtes criminelles. On prétend ici déterminer une baisse de la conscience et, par là, des facultés supérieures, de manière à paralyser les mécanismes psychiques de contrôle, que l'homme utilise constamment pour se maîtriser et se conduire ; il s'abandonne alors sans résistance au jeu des associations d'idées, des sentiments et impulsions volitives. Les dangers d'une telle situation sont évidents ; il peut même arriver qu'on libère ainsi des poussées instinctives immorales. Ces manifestations du second stade de la narcose sont bien connues, et actuellement on s'efforce de les empêcher par l'administration préalable de narcotiques. L'arrêt des dispositifs de contrôle s'avère particulièrement dangereux, quand il provoque la révélation des secrets de la vie privée, personnelle ou familiale, et de la vie sociale. Il ne suffit pas que le chirurgien et tous ses aides soient tenus non seulement au secret naturel (secretum naturale), mais aussi au secret professionnel (secretum officiale, secretum commissum) à l'égard de tout ce qui se passe dans la salle d'opération. Il y a certains secrets, qui ne doivent être révélés à personne, même pas, comme le dit une formule technique : uni viro prudenti et silentii tenaci. Nous l'avons déjà souligné dans notre allocution du 13 avril 1953 sur la psychologie clinique et la psychanalyse 5.

5 Cf. Documents Pontificaux 1QS3, P- 145.


Aussi ne peut-on qu'approuver l'utilisation de narcotiques dans la médication préopératoire, afin d'éviter ces inconvénients.

Notons d'abord que dans le sommeil, la nature elle-même interrompt plus ou moins complètement l'activité intellectuelle. Si, dans un sommeil pas trop profond, l'usage de la raison (usus rationis) n'est pas entièrement aboli et que l'individu puisse encore jouir de ses facultés supérieures — ce que saint Thomas d'Aquin avait déjà noté 6, le sommeil exclut cependant le dominium rationis, le pouvoir en vertu duquel la raison commande librement l'activité humaine. Il ne s'ensuit pas, si l'homme s'abandonne au sommeil, qu'il agisse contre l'ordre moral en se privant de la conscience et de la maîtrise de soi par l'usage des facultés supérieures. Mais il est certain aussi qu'il peut y avoir des cas (et il s'en présente souvent), dans lequels l'homme ne peut s'abandonner au sommeil, mais doit rester en possession de ses facultés supérieures, pour s'acquitter d'un devoir moral qui lui incombe. Parfois, sans y être tenu par un devoir strict, l'homme renonce au sommeil pour rendre des services non obligatoires ou pour s'imposer un renoncement en vue d'intérêts moraux supérieurs. La suppression de la conscience par le sommeil naturel n'offre donc en soi nulle difficulté ; cependant il est illicite de l'accepter, quand elle entrave l'accomplissement d'un devoir moral. Le renoncement au sommeil naturel peut être en outre dans l'ordre naturel expression et mise en acte d'une tendance non obligatoire vers la perfection morale.

S. Thomas, I 84,8.



DE L'HYPNOSE

Mais la conscience de soi peut aussi être altérée par des moyens artificiels. Qu'on obtienne ce résultat par l'administration de narcotiques ou par l'hypnose (qu'on peut appeler un analgésique psychique), cela ne comporte aucune différence essentielle au point de vue moral. L'hypnose cependant, même considérée uniquement en elle-même, est soumise à certaines règles. Qu'il Nous soit permis à ce propos de rappeler la brève allusion à l'usage médical de l'hypnose que nous avons faite au début de l'allocution du 8 janvier 1956 sur l'accouchement naturel indolore 7.

Cf. Documents Pontificaux 1956, p. 21.

Dans la question qui nous occupe à présent, il s'agit d'une hypnose pratiquée par le médecin, au service d'une fin clinique, en observant les précautions que la science et l'éthique médicales requièrent tant du médecin qui l'emploie que du patient qui s'y soumet. A cette utilisation déterminée de l'hypnose s'applique le jugement moral que nous allons formuler sur la suppression de la conscience.

Mais nous ne voulons pas que l'on étende purement et simplement à l'hypnose en général ce que nous disons de l'hypnose au service du médecin. Celle-ci, en effet, en tant qu'objet de recherche scientifique, ne peut être étudiée par n'importe qui, mais seulement par un savant sérieux, dans les limites morales valables pour toute activité scientifique. Ce n'est pas le cas d'un cercle quelconque de laïcs ou d'ecclésiastiques, qui s'en occuperaient comme d'un sujet intéressant, à titre de pure expérience, ou même par simple passe-temps.




SUR LA LICÉITÉ DE LA SUPPRESSION ET DE LA DIMINUTION DE LA CONSCIENCE

Pour apprécier la licéité de la suppression et de la diminution de la conscience, il faut considérer que l'action raisonnable et librement ordonnée à une fin constitue la caractéristique de l'être humain. L'individu ne pourra, par exemple, accomplir son travail quotidien, s'il reste plongé constamment dans un état crépusculaire. De plus, il est tenu de conformer toutes ses actions aux exigences de l'ordre moral. Etant donné que les dyna-mismes naturels et les instincts aveugles sont impuissants à assurer par eux-même une activité ordonnée, l'usage de la raison et des facultés supérieures s'avère indispensable, tant pour percevoir les normes précises de l'obligation, que pour les appliquer aux cas particuliers. De là découle l'obligation morale de ne pas se priver de cette conscience de soi sans vraie nécessité.

Il s'ensuit qu'on ne peut troubler la conscience ou la supprimer dans le seul but de se procurer des sensations agréables, en s'adonnant à l'ivresse et en absorbant des poisons destinés à procurer cet état, même si l'on recherche uniquement une certaine euphorie. Au delà d'une dose déterminée, ces poisons causent un trouble plus ou moins marqué de la conscience et même son obscurcissement complet. Les faits démontrent que l'abus des stupéfiants conduit à l'oubli total des exigences les plus fondamentales de la vie personnelle et familiale. Ce n'est donc pas sans raison que les pouvoirs publics interviennent pour régler la vente et l'usage de ces drogues, afin d'éviter à la société de graves dommages physiques et moraux. La chirurgie se trouve-t-elle dans la nécessité pratique de provoquer une diminution et même une suppression totale de la conscience par la narcose ? Au point de vue technique, la réponse à cette question relève de votre compétence. Au point de vue moral, les principes formulés précédemment en réponse à votre première question s'appliquent pour l'essentiel aussi bien à la narcose qu'à la suppression de la douleur. Ce qui compte, en effet, pour le chirurgien en tout premier lieu, c'est la suppression de la sensation douloureuse, non celle de la conscience. Quand celle-ci reste éveillée, les sensations douloureuses violentes provoquent aisément des réactions souvent involontaires et réflexes, capables d'entraîner des complications indésirables et d'aboutir même au collapsus cardiaque mortel. Préserver l'équilibre psychique et organique, éviter qu'il ne soit violemment ébranlé, constitue pour le chirurgien comme pour le patient un objectif important, que seule la narcose permet d'obtenir. Il est à peine nécessaire de faire remarquer que, s'il fallait s'attendre à ce que d'autres interviennent d'une manière immorale pendant que le malade est inconscient, la narcose susciterait des difficultés graves, qui imposeraient des mesures adéquates.



LES ENSEIGNEMENTS DE L'ÉVANGILE

A ces règles de morale naturelle, l'Evangile ajoute-t-il des précisions et des exigences supplémentaires ? Si Jésus-Christ au Calvaire a refusé le vin mêlé de fiel, parce qu'il voulait en pleine conscience boire jusqu'à la lie le calice que le Père lui présentait, il s'ensuit que l'homme doit accepter et boire le calice de douleur toutes les fois que Dieu le désire. Mais il ne faudrait pas croire que Dieu le désire toutes les fois que se présente une souffrance à supporter, quelles qu'en soient les causes et les circonstances. Les paroles de l'Evangile et le comportement de Jésus n'indiquent pas que Dieu veuille cela de tous les hommes et à tout moment, et l'Eglise ne leur a nullement donné cette interprétation. Mais les faits et gestes du Seigneur gardent une signification profonde pour tous les hommes. Innombrables sont en ce monde ceux qu'oppriment des souffrances (maladies, accidents, guerres, fléaux naturels), dont ils ne peuvent adoucir l'amertume. L'exemple du Christ sur le Golgotha, son refus d'adoucir ses douleurs, leur sont une source de consolation et de force. Dailleurs, le Seigneur a averti les siens que ce calice les attend tous. Les Apôtres, et après eux les martyrs par milliers, en ont témoigné et continuent à en témoigner glorieusement jusqu'à ce jour. Souvent toutefois l'acceptation de la souffrance sans adoucissement ne représente aucune obligation et ne répond pas à une norme de perfection. Le cas se présente régulièrement, quand existent pour cela des motifs sérieux et que les circonstances n'imposent pas le contraire. On peut alors éviter la douleur, sans se mettre aucunement en contradiction avec la doctrine de l'Evangile.




CONCLUSION ET RÉPONSE A LA DEUXIÈME QUESTION



La conclusion des développements précédents peut donc se formuler ainsi : dans les limites indiquées et si l'on observe les conditions requises, la narcose entraînant une diminution ou une suppression de la conscience est permise par la morale naturelle et compatible avec l'esprit de l'Evangile.
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SUR L'EMPLOI D'ANALGÉSIQUES CHEZ LES MOURANTS



Il Nous reste à examiner votre troisième question : « L'emploi d'analgésiques, dont l'usage émousse toujours la conscience, est-il permis en général, et pendant la période postopératoire en particulier, même chez les moribonds et les patients en péril de mort, quand on a pour cela une indication clinique ? Est-il permis même en certains cas (porteurs de cancers inopérables, de maladies inguérissables), où l'atténuation de la douleur intolérable s'effectue probablement aux dépens de la durée de la vie, qui en est abrégée ? ».

Cette troisième question n'est au fond qu'une application des deux premières au cas spécial des mourants et à l'effet particulier d'un abrègement de la vie.

Que des mourants aient plus que d'autres l'obligation morale naturelle ou chrétienne d'accepter la douleur ou de refuser son adoucissement, cela ne ressort ni de la nature des choses ni des sources de la révélation. Mais comme, selon l'esprit de l'Evangile, la souffrance contribue à l'expiation des péchés personnels et à l'acquisition de plus amples mérites, ceux dont la vie est en péril ont certes un motif spécial de l'accepter, car, avec la mort toute proche, cette possibilité de gagner de nouveaux mérites risque de disparaître bientôt. Mais ce motif intéresse directement le malade, non le médecin qui pratique l'analgésie, à supposer que le malade y donne son accord ou même l'ait demandé expressément. Il serait évidemment illicite de pratiquer l'anesthésie contre la volonté expresse du mourant (quand il est sui iuris).

Quelques précisions s'avèrent ici opportunes, car il n'est pas rare qu'on présente ce motif d'une manière incorrecte. On tente parfois de prouver que les malades et les moribonds sont obligés de supporter des douleurs physiques pour acquérir plus de mérites, en se basant sur l'invitation à la perfection, que le Seigneur adresse à tous : Estote ergo vos perfecti, sicut et Pater vester coelestis perfectus est (Mt 5,48) ou sur les paroles de l'Apôtre : Haec est voluntas Dei, sanctificatio vestra (1Th 4,3). Parfois on avance un principe de raison, selon lequel aucune indifférence ne serait permise à l'égard de l'obtention (même graduelle et progressive) de la fin dernière, vers laquelle l'homme tend ; ou le précepte de l'amour de soi bien ordonné, qui imposerait de chercher les biens éternels dans la mesure où les circonstances de la vie quotidienne permettent de les atteindre ; ou même le premier et plus grand commandement, celui de l'amour de Dieu par-dessus tout, qui ne laisserait aucun choix dans la mise à profit des occasions concrètes offertes par la Providence. Or, la croissance de l'amour de Dieu et de l'abandon à sa volonté ne procède pas des souffrances mêmes, que l'on accepte, mais de l'intention volontaire soutenue par la grâce ; cette intention, chez beaucoup de moribonds, peut s'affermir et devenir plus vive, si l'on atténue leurs souffrances, parce que celles-ci aggravent l'état de faiblesse et d'épuisement physique, entravent l'élan de l'âme et minent les forces morales, au lieu de les soutenir. Par contre, la suppression de la douleur procure une détente organique et psychique, facilite la prière et rend possible un don de soi plus généreux. Si des mourants consentent à la souffrance, comme moyen d'expiation et source de mérites pour progresser dans l'amour de Dieu et l'abandon à sa volonté, qu'on ne leur impose pas d'anesthésie ; on les aidera plutôt à suivre leur voie propre. Dans le cas contraire, il ne serait pas opportun de suggérer aux mourants les considérations ascétiques énoncées plus haut, et l'on se souviendra qu'au lieu de contribuer à l'expiation et au mérite, la douleur peut aussi fournir l'occasion de nouvelles fautes.

Ajoutons quelques mots sur la suppression de la conscience de soi chez les mourants, dans la mesure où elle n'est pas motivée par la douleur. Puique le Seigneur a voulu subir la mort en pleine conscience, le chrétien désire l'imiter en cela aussi. L'Eglise d'ailleurs donne aux prêtres et aux fidèles un Ordo commendationis animae, une série de prières, qui doivent aider les mourants à quitter cette terre et à entrer dans l'éternité. Mais si ces prières conservent leur valeur et leur sens, même quand on les prononce près d'un malade inconscient, elles apportent normalement à qui peut y participer lumière, consolation et force. Ainsi l'Eglise laisse-t-elle entendre qu'il ne faut pas, sans raisons graves, priver le mourant de la conscience de soi. Quand la nature le fait, les hommes doivent l'accepter ; mais ils ne le feront pas de leur propre initiative, à moins d'avoir pour cela de sérieux motifs. C'est d'ailleurs le voeu des intéressés eux-mêmes, lorsqu'ils ont la foi ; ils souhaitent la présence des leurs, d'un ami, d'un prêtre, pour les aider à bien mourir. Ils veulent garder la possibilité de prendre leurs dispositions ultimes, de dire une dernière prière, un dernier mot aux assistants. Les en frustrer, répugne au sentiment chrétien, et même simplement humain. L'anesthésie employée à l'approche de la mort, dans le seul but d'éviter au malade une fin consciente, serait non plus une acquisition remarquable de la thérapeutique moderne, mais une pratique vraiment regrettable.

Votre question se posait plutôt dans l'hypothèse d'une indication clinique sérieuse (par exemple, douleurs violentes, états maladifs de dépression et d'angoisse). Le mourant ne peut permettre et encore moins demander au médecin qu'il lui procure l'inconscience, si par là il se met hort d'état de satisfaire à des devoirs moraux graves, par exemple, de régler des affaires importantes, de faire son testament, de se confesser. Nous avons déjà dit que le motif de l'acquisition de plus grands mérites ne suffit pas en soi à rendre illicite l'usage de narcotiques. Pour juger de cette licéité, il faut aussi se demander si la narcose sera relativement brève (pour la nuit ou pour quelques heures) ou prolongée (avec ou sans interruption) et considérer si l'usage des facultés supérieures reviendra à certains moments, pour quelques minutes au moins ou pour quelques heures, et rendra au mourant la possibilité de faire ce que son devoir lui impose (par exemple de se réconcilier avec Dieu). Par ailleurs, un médecin consciencieux, même s'il n'est pas chrétien, ne cédera jamais aux pressions de qui voudrait, contre le gré du mourant, lui faire perdre sa lucidité, afin de l'empêcher de prendre certaines décisions.

Lorsqu'en dépit des obligations qui lui incombent, le mourant demande la narcose pour laquelle il existe des motifs sérieux, un médecin consciencieux ne s'y prêtera pas, surtout s'il est chrétien, sans l'avoir invité par lui-même ou mieux encore par l'intermédiaire d'autrui, à remplir auparavant ses devoirs. Si le malade s'y refuse obstinément et persiste à demander la narcose, le médecin peut y consentir sans se rendre coupable de collaboration formelle à la faute commise. Celle-ci, en effet, ne dépend pas de la narcose, mais de la volonté immorale du patient ; qu'on lui procure ou non l'analgésie, son comportement sera identique : il n'accomplira pas son devoir. Si la possibilité d'un repentir n'est pas exclue, on n'en possède toutefois aucune probabilité sérieuse ; et même qui sait s'il ne s'endurcira pas dans le mal ?

Mais si le mourant a rempli tous ses devoirs et reçu les derniers sacrements, si des indications médicales nettes suggèrent l'anesthésie, si l'on ne dépasse pas dans la fixation des doses la quantité permise, si l'on a mesuré soigneusement l'intensité et la durée de celle-ci et que le patient y consente, rien alors ne s'y oppose : l'anesthésie est moralement permise.




... ET CHEZ LES MALADES INOPÉRABLES OU INGUÉRISSABLES

Faudrait-il y renoncer, si l'action même du narcotique abrégeait la durée de la vie ? D'abord toute forme d'euthanasie directe, c'est-à-dire l'administration de narcotique afin de provoquer ou de hâter la mort, est illicite, parce qu'on prétend alors disposer directement de la vie. C'est un des principes fondamentaux de la morale naturelle et chrétienne, que l'homme n'est pas maître et possesseur, mais seulement usufruitier de son corps et de son existence. On prétend à un droit de disposition directe, toutes les fois que l'on veut l'abrègement de la vie comme fin ou comme moyen. Dans l'hypothèse que vous envisagez, il s'agit uniquement d'éviter au patient des douleurs insupportables, par exemple, en cas de cancers inopérables ou de maladies inguérissables.

Si entre la narcose et l'abrègement de la vie n'existe aucun lien causal direct, posé par la volonté des intéressés ou par la nature des choses (ce qui serait le cas, si la suppression de la douleur ne pouvait être obtenue que par l'abrègement de la vie), et si au contraire l'administration de narcotiques entraîne par elle-même deux effets distincts, d'une part le soulagement des douleurs, et d'autre part l'abrègement de la vie, elle est licite ; encore faut-il voir s'il y a entre ces deux effets une proportion raisonnable, et si les avantages de l'un compensent les inconvénients de l'autre. Il importe aussi d'abord de se demander si l'état actuel de la science ne permet pas d'obtenir le même résultat, en employant d'autres moyens, puis de ne pas dépasser, dans l'utilisation du narcotique, les limites de ce qui est pratiquement nécessaire.



CONCLUSION ET RÉPONSE À LA TROISIÈME QUESTION

En résumé, vous Nous demandez : « La suppression de la douleur et de la conscience par le moyen des narcotiques (lorsqu'elle est réclamée par une indication médicale), est-elle permise par la religion et la morale au médecin et au patient (même à l'approche de la mort et si l'on prévoit que l'emploi des narcotiques abrégera la vie) ? » Il faudra répondre : « S'il n'existe pas d'autres moyens et, si, dans les circonstances données, cela n'empêche pas l'accomplissement d'autres devoirs religieux et moraux : Oui. »

Comme Nous l'avons déjà expliqué, l'idéal de l'héroïsme chrétien n'impose pas, au moins d'une manière générale, le refus d'une narcose justifiée par ailleurs, pas même à l'approche de la mort ; tout dépend des circonstances concrètes. La résolution plus parfaite et plus héroïque peut se trouver aussi bien dans l'acceptation que dans le refus.






EXHORTATION FINALE

Nous osons espérer que ces considérations sur l'analgésie, envisagée du point de vue moral et religieux, vous aideront à vous acquitter de vos devoirs professionnels avec un sens encore plus aigu de vos responsabilités. Vous désirez rester entièrement fidèles aux exigences de votre foi chrétienne et y conformer en tout votre activité. Mais bien loin de concevoir ces exigences comme des restrictions, ou des entraves à votre liberté et à votre initiative, voyez-y plutôt l'appel à une vie infiniment plus haute et plus belle, qui ne se peut conquérir sans efforts ni renoncements, mais dont la plénitude et la joie sont déjà sensibles ici-bas pour qui sait entrer en communion avec la personne du Christ vivant dans son Eglise, l'animant de son Esprit, répandant en tous ses membres son amour rédempteur qui seul triomphera définitivement de la souffrance et de la mort.

Afin que le Seigneur vous comble de ses dons, Nous l'implorons pour vous-mêmes, pour vos familles et vos collaborateurs et, de tout coeur, Nous vous accordons Notre paternelle Bénédiction apostolique.

LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT AU CONGRÈS NATIONAL DE LA FÉDÉRATION FRANÇAISE DES ÉTUDIANTS CATHOLIQUES

(27 février 1957) 1






Au nom du Souverain Pontife, Son Exc. Mgr Dell'Aequa, Substitut de la Secrétairerie d'Etat, a adressé la lettre suivante aux participants au Congrès national de la Fédération française des étudiants catholiques qui s'est tenu à Paris, du 2 au 5 mars, sous la présidence de Son Em. le cardinal Feltin. Le thème d'étude de ces journées était : « Christianisme et mentalité collective ».

Vous n'avez pas voulu que la Fédération française des étudiants catholiques tienne ses assises nationales à Paris, du 2 au 5 mars prochain, sans appeler sur ses travaux la Bénédiction du Saint-Père. C'est très volontiers que Sa Sainteté agrée cette filiale demande et vous assure de Sa paternelle sollicitude.

Le thème de vos rencontres de cette année portera sur l'étude des mentalités collectives erronées qui étouffent toute véritable vie chrétienne.

1 D'après le texte français de la Documentation Catholique, t. LIV, col. 425.




C'est assurément une tâche importante pour l'étudiant chrétien que de porter un regard lucide, à la lumière de la foi, sur les conceptions étrangères à l'Evangile qui informent trop souvent la mentalité contemporaine et empêchent la foi de s'épanouir en tous ses prolongements. Par une réflexion personnelle sérieuse, par des mises en commun fraternelles, le jeune homme verra progressivement combien le monde professionnel et civique dans lequel il aspire à entrer, et parfois mê-

me la famille à laquelle il appartient, tendent à infléchir le christianisme dans des directions peu compatibles avec la pure doctrine du Christ.

Il importe donc de découvrir ces mentalités cachées pour s'en affranchir soi-même et, parvenu à une foi maîtresse d'elle-même, travailler ensuite à la libération de ses frères.

Mais comment atteindre ce but sans commencer à le réaliser parmi le monde étudiant en vivant selon la liberté du Christ dans des communautés chrétiennes fraternelles qui sont l'épanouissement de toute vie spirituelle ? Les groupes d'étudiants chrétiens aideront certes à mener cette vie selon le Christ et doivent être pour ceux qui les entourent un témoignage éloquent, qui fut celui-là même de la primitive Eglise. Cette communauté n'exclut pas, évidemment, les légitimes diversités, agréées par l'Episcopat, dans les modes d'évangélisation du monde étudiant, mais il est indispensable qu'au-delà de ces différences régnent une unité profonde capable de collaboration et une amitié fraternelle très réelle dans la charité du même Seigneur qui est mort pour tous. A ces conditions les étudiants catholiques de France pourront apporter à leur milieu le témoignage qu'il attend d'un christianisme libérateur.

En formant le voeu que vous saurez répondre généreusement à cette attente, le Saint-Père invoque sur ces journées la grâce du Saint-Esprit et renouvelle à la Fédération que vous présidez, à ses aumôniers et à ses membres, une très large Bénédiction apostolique.


DISCOURS AUX ÉLÈVES DU LYCÉE « VISCONTI »

(28 février 1957) 1






Le lycée « Ennio Quirino Visconti » de Rome a l'honneur d'avoir compté parmi ses élèves vers la fin du siècle dernier, le jeune Eugenio Pacelli. Le Souverain Pontife qui avait déjà reçu plus d'une fois élèves et professeurs de cette célèbre institution, a bien voulu leur accorder une nouvelle audience, le 28 février 1957. A cette occasion, il leur adressa un discours en italien, dont voici la traduction :

1 D'après le texte italien de Discorsi et radiomessaggi, 18, traduction française de l'Osservatore Romano, du 8 mars 1957.




Nous vous sommes reconnaissant, chers fils, professeurs et élèves du lycée Ennio Quirino Visconti, pour le réconfort que Nous procure votre visite, en réveillant chez Nous, pour ainsi dire vivants et directs, les chers souvenirs des années de jeunesse passées dans les salles qui vous accueillent actuellement, au milieu de la ferveur des études et des douces aspirations de l'avenir. Si tout esprit bien né ne peut jamais laisser s'obscurcir l'affectueux souvenir de l'école, où la pensée et le coeur s'ouvrirent, comme en une aube de pure lumière, aux enchantements du vrai et du beau ; que dire lorsqu'elle porte le nom de « Visconti », héritière en partie des gloires du Collège romain ? Déjà en d'autres occasions, en vous accueillant en Notre présence, Nous vous avons exhortés à être de dignes continuateurs des illustres traditions de ce Collège, précurseur à bien des titres du développement moderne de l'instruction et de la formation de la jeunesse. Comme à Nous-même voici de nombreuses années, à vous aussi aujourd'hui, chers jeunes gens, l'austère et vénérable édifice attribué à Ammannati, si chargé de noble histoire, continue à indiquer, en un langage muet, quels sont les idéaux dignes d'un jeune chrétien et romain, de quelle manière ils peuvent être atteints et quels immenses avantages en résultent pour la patrie et pour l'Eglise elle-même.

Il a été justement noté qu'une des caractéristiques des Romains, comme un secret de la grandeur permanente de la Ville Eternelle, est le respect des traditions. Non que ce respect signifie la fossilisation en des formes dépassées par le temps ; mais bien le maintien en vie de ce que les siècles ont démontré être bon et fécond. De la sorte, la tradition n'empêche pas le moins du monde le juste et heureux progrès, mais elle est en même temps un puissant stimulant à persévérer dans le sûr chemin ; un frein à l'esprit aventureux, enclin à embrasser sans discernement n'importe quelle nouveauté ; et aussi, comme on a l'habitude de dire, le signal d'alarme contre les déclins. En quoi donc la tradition du Collège romain peut-elle guider votre chemin actuel et fortifier les méthodes modernes, qui visent, voire suivant de nouveaux critères, à la parfaite formation intellectuelle et morale de la jeunesse ? Comme pour Nous acquitter un peu de Notre dette de gratitude envers Notre cher « Visconti », Nous désirons indiquer trois caractéristiques de l'ancien Collège romain, qui serviront, si elles sont maintenues en honneur, à assurer à la nouvelle plante les avantages de l'antique tronc.



L'amour de l'étude.

1. — Une tradition constante du Collège romain fut avant tout un ardent amour des études, commun aux professeurs et aux élèves. L'estime envers la culture, comme valeur humaine incomparable, s'éleva à un si haut degré dans le Collège romain que son nom était célèbre dans toute l'Europe. A peine une dizaine d'années après sa fondation, notre prédécesseur Pie IV pouvait le désigner à l'admiration et à la protection du Roi d'Espagne, comme « pépinière des autres (collèges) qui se diffusent en Italie et en France ». Durant trois siècles, il n'y avait pas de souverain, de prince, d'illustre personnage, qui, venant à Rome, ne désirât pas visiter le collège et ses élèves d'élite. On y apprenait à estimer le savoir au-dessus des autres valeurs humaines et comme facteur primordial de perfectionnement de l'esprit. Quel sage avertissement pour une jeunesse, qui, tout en s'adonnant aux études, douterait de leur utilité et s'y appliquerait superficiellement, incapable de tout renoncement et sacrifice, que la conquête du savoir exige pour ainsi dire en



échange. On ne pourrait certainement faire de reproche au jeune homme qui se proposerait comme but de l'instruction l'acquisition même d'une profession ou d'un titre suffisant pour pourvoir aux besoins de la vie ; mais il ne serait pas digne d'y tendre sans une préparation sérieuse et appropriée, qui ne s'obtient que par une application à l'étude, pour ainsi dire pour elle-même, en dehors de tout intérêt immédiat. Entretenez donc en vous et autour de vous un amour sens cesse plus ardent pour les études, en vous souvenant qu'une société où l'estime pour la culture est en décadence, est destinée à perdre également ses autres biens.



L'harmonie entre la culture et la vie.

2. — Une seconde caractéristique du Collège romain et de son système d'éducation consistait dans la parfaite harmonie entre la culture et la vie. En premier lieu, la religion, qui n'était pas séparée de l'instruction, était vraiment et à bon droit, reine ; elle guidait et soutenait ce qui nourrit les esprits. L'honnêteté des moeurs et les vertus civiques étaient cultivées avec le plus grand zèle, parce qu'on était persuadé de leur valeur absolue, complémentaire du savoir. Aujourd'hui, comme alors, il n'est pas douteux que religion, honnêteté et savoir sont les bases d'une éducation parfaite, voire de l'harmonie même de la vie. Pour obtenir l'une et l'autre, les éducateurs du Collège romain se servaient également des matières classiques et, particulièrement, de la philosophie. Outre la fin immédiate d'édu-quer les esprits au goût du beau et à la recherche du vrai, le Collège romain au moyen de ces études, se proposait de former les pensées à l'ordre et à la fermeté. Le jeune homme qui sortait de ses classes était reconnaissable à l'équilibre qui régnait dans sa pensée, à sa fermeté dans la possession des vérités.

Combien serait-il désirable que les méthodes modernes d'enseignement ne s'éloignassent pas de cette tendance ! Quelle joie inspirerait une jeunesse fervente en belles énergies, douée de talents, riche également de nombreuses connaissances, mais en même temps capable de les coordonner, de s'en faire une claire synthèse ; une jeunesse qui n'hésite pas, ni ne se débatte pas, sceptique, sur les sables mouvants de l'incertitude, mais qui ait des idées sûres, une vision limpide, sans confusion ni doute, et qui ne laisse pas se tarir la soif de la recherche ni s'ébranler les bases les plus profondes de la certitude, les vérités les plus élémentaires.



La confiante collaboration des maîtres et des élèves.

3. — Une troisième caractéristique du Collège romain devrait être indiquée dans l'entente réciproque ou, comme on a l'habitude de dire, dans la « familiarité » entre éducateurs et élèves. Dans les classes du Collège, la chaire n'était pas considérée comme le bastion inaccessible de l'autorité, la froide dispensatrice de leçons ; mais bien comme le juste point de rencontre entre le maître bienveillant et le jeune homme désireux de recevoir une partie de son savoir. Nous fûmes témoin, Nous-même, au temps de notre jeunesse, de cette union entre maîtres et élèves et, aujourd'hui encore, Nous sentons vivante et intacte l'affection qui Nous liait aux excellents professeurs envers lesquels Nous nourrissions des sentiments particuliers de vénération. Il n'est pas douteux que l'estime et la confiance mutuelle secondent l'oeuvre d'éducation plus efficacement que toute autre méthode, en transformant l'école en une seconde famille, où l'affection respectueuse se substitue avec le plus grand avantage à la sévérité, prévient la nécessité de la correction et facilite l'effort du professeur comme de l'élève.

Ce sont là, chers fils, les filons d'or qui Nous semblent relier le « Visconti » aux gloires quatre fois séculaires du Collège romain, et qu'il faut garder comme un précieux patrimoine. Appliquez-vous à y puiser avec une fidèle assiduité, afin que ne soit pas déçue l'espérance de ses insignes fondateurs, ni celle actuelle de nos familles et de la Ville Eternelle elle-même. Que la splendeur du passé se renouvelle dans la formation continue d'une jeunesse d'élite, qui prépare des hommes de premier plan dans le domaine du savoir et dans l'action. Tel est le voeu que Nous formulons pour vous tous, professeurs, élèves et familles, mais particulièrement pour l'insigne proviseur, que Nous estimons et aimons tant, et auquel seule la parfaite réussite des élèves peut donner la récompense méritée de ses fatigues quotidiennes.

En gage de tous les biens que Nous vous souhaitons, Nous vous donnons de grand coeur Notre Bénédiction apostolique.






Pie XII 1957 - SUR L'INVITATION À UNE PLUS HAUTE PERFECTION