Pie XII 1957 - DISCOURS POUR LA CANONISATION DE SAINTE MARGUERITE DE HONGRIE


DISCOURS A DES PÈLERINS DE BARCELONE

(18 août 1957) 1






Recevant en audience spéciale un groupe de 450 pèlerins de la paroisse de San Medin (Barcelone), le Saint-Père prononça un discours en espagnol, dont voici la traduction :

Vous aurez donc pu voir de vos propres yeux — très chers fils, fidèles de la paroisse de San Medin de Barcelone — les multitudes, de plus en plus nombreuses, et qui comportent, comme c'est naturel, les catégories sociales les plus variées ; un groupe comme le vôtre, cependant, Nous croyons pouvoir l'affirmer, Nous n'avons pas eu souvent l'occasion d'en recevoir car il s'agit d'une nombreuse représentation d'une humble et simple paroisse et de Nos fils qui pour pouvoir traduire en réalité leur vif désir ont dû accomplir un sérieux sacrifice et, parfois, un effort extraordinaire.

Aussi avons-Nous désiré vous accueillir à part ; Nous voulions vous souhaiter une bienvenue spéciale, vous exprimer en même temps Notre paternelle gratitude et vous manifester la satisfaction avec laquelle Nous voyons réalisé dans votre cas ce que Nous avons rappelé d'autres fois sur tout ce que doit être une vie paroissiale bien dirigée et bien organisée, où cette « cellule-base » de la vie ecclésiastique puisse démontrer toute sa fécondité et toute son efficacité pour le bien des âmes 2.

1 D'après le texte espagnol de Discorsi e radiomessaggi, 19, traduction de l'Osservatore Romano, du 6 septembre Z057.

2 Lettre aux Semaines sociales du Canada, 18 juillet 1953 ; cf. Documents Pontificaux 1953, p. 301.




Car une paroisse n'est pas seulement un temple, un prêtre, un territoire et une portion déterminée du troupeau du Seigneur, tout cela exprimé en chiffres plus ou moins éloquents ; une paroisse est une cellule d'un corps, qui, en ce cas, est le Corps Mystique du Christ ; c'est un être vivant avec son propre souffle, avec ses organes et ses activités, avec son développement naturel et même avec ses problèmes, ses nécessités, ses joies et ses douleurs particulières.

Il n'est donc pas nécessaire de vous demander de l'aimer, parce que ce serait comme vous dire de vous aimer vous-mêmes ! Ne vous considérez jamais comme satisfaits tant que vous ne serez pas arrivés à faire d'elle un vrai modèle, sans aucun élément malade ou mort ; un modèle où soit vécue cette authentique vie chrétienne, qui doit se manifester continuellement dans l'amour de la prière et dans l'estime du sacrifice, dans la pureté de la jeunesse et dans l'honnêteté des moeurs, dans l'assistance régulière aux offices divins et dans la fréquentation des sacrements, dans la généreuse charité envers les nécessiteux et dans l'accomplissement exact de tous les devoirs civiques, et dans toute une manière d'être que l'on pourrait très bien appeler un christianisme vécu, au foyer comme à l'église, dans les divertissements comme dans le travail, dans la vie familiale comme dans la vie sociale, et au fond des consciences comme dans toutes vos manifestations extérieures — tout cela visant à la gloire de Dieu et à l'honneur de notre sainte Mère l'Eglise.

Vous avez fait beaucoup en si peu d'années. Et Nous voulons interpréter votre présence ici comme une promesse formelle que vous ne reculerez pas devant ce qui est requis pour réaliser cet idéal que Nous vous proposons.

Mille fois merci pour le don que vous Nous avez offert ; mais, malgré toute sa valeur, ce que Nous estimons le plus, c'est l'intention avec laquelle vous l'avez fait. Nous voulons y répondre par une bénédiction toute spéciale pour toute votre paroisse, de son zélé curé avec ses vicaires, jusqu'au dernier des fidèles, avec toutes les intentions, choses et personnes que vous désirez voir bénies. Que la grâce du ciel descende sur vous et vous accompagne toujours, surtout dans vos travaux et dans vos peines — que Nous désirons sentir comme si elles étaient les Nôtres — afin que, ayant été sur la terre des membres vivants de ce Corps qu'est l'Eglise, vous puissiez l'être ensuite également dans cette Jérusalem céleste, que Nous vous souhaitons de tout coeur.


MESSAGE POUR LA PREMIÈRE SEMAINE INTERNATIONALE DU TOURISME DE LA JEUNESSE

(22 août 1957) 1






Les participants à la première Semaine internationale du tourisme e la jeunesse, tenue à Acerno dans la province de Salerne, ont reçu, ré-igé en français, ce message d'encouragement du Souverain Pontife :

La Province de Salerne, qui unit aux beautés des sites naturels les trésors antiques de l'art et de la culture, vous offre, chers fils, un cadre de choix pour étudier, sous les auspices de la Fédération internationale de la jeunesse catholique, diverses questions que pose aujourd'hui la rapide extension du tourisme chez les jeunes. Vos échanges de vues portent plus spécialement sur « le tourisme comme moyen d'éducation » et vous en examinerez tour à tour les aspects culturels, sociaux, spirituels. Bien volontiers, Nous encourageons ces travaux de la première Semaine internationale d'Aoerno !

1 D'après le texte français de l'Osservatore Romano, du 4 octobre 1957.

2 Allocution à la Fédération internationale des associations touristiques des cheminots, juin 1952 ; Documents Pontificaux 1952, p. 243.




A plusieurs reprises, Nous avons déjà dit l'estime que Nous portions à une saine pratique du tourisme ; Nous avons loué « ses avantages pour le développement de l'esprit, l'ouverture du sens social, la diminution des préjugés, l'estime réciproque des peuples, l'élévation de l'âme » 2. Sans reprendre ici ces considérations, Nous vous invitons par ce message, chers fils, à réfléchir à l'importance que revêt, dans un monde en quête d'unité et de paix, l'instauration de relations touristiques et culturelles plus nombreuses entre jeunes de différents pays.

Que ne peut-on attendre, en effet, d'une génération dont les jeunes, franchissant plus volontiers les frontières de leur patrie, multiplient entre peuples les contacts qui permettent de se mieux comprendre et de s'estimer ? Rien ne vaut l'accueil fraternel et l'amitié offerte au cours d'un voyage hors du pays natal pour découvrir le coeur de son frère l'étranger. Et si ce voyage fut préparé et guidé avec soin, s'il fut accompli avec ouverture de coeur et largeur d'esprit, si les bienfaits, au retour., en furent répercutés dans tout l'entourage, quel assainissement n'est-on pas en droit d'en espérer dans le climat des échangea internationaux ?

La vie chrétienne des jeunes, au surplus, peut, si l'on y veille, retirer grand bénéfice de ces voyages plus fréquents et plus lointains. Le sens catholique s'affermit au spectacle de foules étrangères professant le même Credo ; ailleurs, devant la tâche qui incombe à l'Eglise, l'esprit missionnaire devient plus ardent, en même temps que plus respectueux des valeurs propres à d'autres civilisations ; et, à la vue des besoins immenses de tant de populations, la charité s'ouvre aux dimensions modernes de la solidarité et de l'entraide. De telles expériences peuvent orienter toute la vie et l'apostolat d'un jeune.

Enfin, aux heures de crise internationale, quand une propagande tendancieuse cherche à dresser îles uns contre les autres peuples et races, il n'est pas de plus sûre résistance aux dangereuses passions d'un chauvinisme exacerbé que cette somme d'expériences humaines accumulées de part et d'autre des frontières, que ce solide réseau de relations personnelles et collectives patiemment tissé entre les nations et dont la tragique rupture ferait de l'étranger, cet ami d'hier, l'ennemi qu'il faut demain combattre !

De grand coeur, Nous souhaitons donc que le tourisme des jeunes, qui comporte sa part légitime de joie et de détente, ne se détourne pas pour autant de ces grandes causes d'union et de paix, auxquelles la jeunesse est si justement attachée. C'est l'un des mérites de votre Semaine internationale d'envisager le tourisme dans cette haute perspective et d'y introduire le ferment du christianisme, qui déjà, au cours des siècles, vivifia tant d'institutions culturelles et sociales. Aussi appelons-Nous sur vos travaux, chers fils, une large effusion de grâces, en gage desquelles Nous vous accordons Notre très paternelle Bénédiction apostolique.


LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT AU CONGRÈS MONDIAL DE LA PRESSE CATHOLIQUE



(22 août 1957) 1





Le Ve Congrès mondial de la presse catholique a eu lieu à Vienne, du 30 septembre au 3 octobre. En cette circonstance, le Souverain Pontife a donné quelques directives qui ont été transmises par Son Excellence Mgr Dell'Aequa, Substitut de la Secrétairerie d'Etat, en une lettre adressée au Comte Dalla Torre, président du Congrès. Voici le texte original français :

Le Souverain Pontife saisit toujours volontiers les occasions qui s'offrent à Lui de redire aux représentants de la presse l'estime qu'il nourrit pour leur importante et difficile profession. Mais peu de circonstances sont, à cet égard, aussi favorables que les Congrès organisés périodiquement par l'Union internationale de la presse catholique. Après Rome et Paris, c'est dans l'antique et célèbre capitale de l'Autriche que se tiendront les prochaines assises, et la proximité de leur date avec celles du Congrès mondial de l'Apostolat des laïques leur vaudra sans doute, cette année, une plus large participation internationale. Le Saint-Père S'en réjouit et, en S'adressant par votre entremise aux membres de l'assemblée de Vienne, Sa pensée s'étend à tous ceux de Ses fils qui, comme éditeurs, journalistes, directeurs ou rédacteurs d'agences de presse, s'efforcent de servir la vérité dans le domaine complexe et sensible de l'opinion publique. A tous, Il exprime Sa paternelle confiance et l'espoir légitime qu'il fonde sur la force qu'ils représentent.

1 D'après le texte français de l'Osservatore Romano, du il octobre 1957.




Le thème du Congrès est ample : « La presse catholique dans l'Eglise et dans le monde ». Conférences et commissions y aborderont l'ensemble des questions professionnelles — morales et techniques — qui se posent de nos jours, et sur la plupart desquelles Sa Sainteté a déjà prodigué Ses enseignements. Ceux-ci sans doute suffiraient déjà à guider vos travaux. Mais, s'il est vrai que « le flot d'erreurs et de faux principes de morale répandus aujourd'hui par les techniques de diffusion font frémir2 », ne convient-il pas d'insister à nouveau sur l'oeuvre de vérité que doit accomplir la presse catholique ; celle-ci doit, par les moyens qui lui sont propres, servir la vérité dans l'Eglise et dans le monde. C'est sa fin et sa noblesse.



Faire oeuvre de vérité dans l'information :

a) Réagir devant les abus d'une presse sans scrupule.

Il faut tout d'abord être vrai dans l'information. Et il n'est, hélas, que d'ouvrir certains journaux pour constater qu'il y a bien des manières de fausser une information. Légèreté de ceux qui lancent une nouvelle sans contrôle suffisant, c'est-à-dire sans un contrôle proportionné à l'importance du fait et à ses répercussions possibles. Manque d'objectivité dans la façon de gonfler un événement ou de le réduire à un simple fait divers, sans respect pour sa valeur réelle et dans le seul but d'attirer ou de flatter le lecteur. Manque de probité de ceux qui amputent un communiqué, une dépêche d'agence, au point de les dénaturer, ou qui n'acceptent que les nouvelles allant dans le sens de leurs propres positions et entourent les autres d'une véritable conspiration du silence, ou encore qui accompagnent l'information de commentaires tendancieux et de suppositions malveillantes... L'opinion publique souffre d'être ainsi traitée par ceux qui devraient la servir. Elle veut être éclairée, mais non pas contrainte, ni séduite, ni trompée. Et n'est-ce pas malheureusement ce qui se produit trop souvent quand une presse sans scrupule se joue des réactions du public, suscitant à son gré la passion ou l'indifférence, étalant le crime et taisant la vertu, au mépris de l'honnêteté d'un peuple ?

2 Discours du 15 avril 1957 ; cf. p. 153.




Contre de tels désordres, la presse catholique a l'obligation de réagir avec énergie, et, dans son effort de redessement, elle cherchera même, sans pharisaïsme, s'il ne lui est pas arrivé par-



fois de céder aux défauts d'une époque où il est si tentant d'abuser d'une opinion trop malléable.

Certes, le choix de l'information, son contrôle et son appréciation sont aujourd'hui chose difficile. Sur ce point, étant donné les conditions et les délais de travail, l'exigence du métier est « presque exorbitante », reconnaissait le Saint-Père 3. Mais si l'on aime la vérité, si l'on estime son lecteur, c'est un devoir grave non seulement de « respecter les limites que la véracité interdit absolument de franchir » 4, mais encore de s'entourer constamment de garanties proportionnées et de ne pas craindre de rectifier loyalement les erreurs qui auraient pu se glisser.



b) Se soucier de mettre les lecteurs en face de la diversité des problèmes posés et par là leur donner le sens de la catholicité.

Faire oeuvre de vérité dans l'information, c'est encore, d'une façon positive, rechercher et répandre les nouvelles capables de donner une vision exacte de la vie du pays et de celle des nations voisines ou lointaines. Certains événements, religieux ou culturels, sociaux, économiques ou politiques, sont révélateurs d'une mentalité ou d'une condition d'existence ; de grandes questions agitent d'autres continents que le nôtre : pourquoi attendre pour en parler, que quelque fait spectaculaire fixe le regard sur elles ? pourquoi surtout exposer une opinion fragile à d'inutiles ébranlements, faute de lui avoir fourni à temps des informations opportunes qu'elle était en droit de recevoir ? Pour la presse catholique, ces remarques prennent encore plus de portée quand il s'agit de la vie même de ce vaste corps qu'est l'Eglise. D'un membre à l'autre, les journalistes y feront circuler, comme un sang vivifiant, les nouvelles précises et circonstanciées, qui donneront aux fidèles le sens de la catholicité, qui les éveilleront à la diversité des problèmes posés et à l'immensité des besoins à satisfaire, qui stimuleront enfin leur charité, d'autant plus généreuse qu'elle sera mieux informée.

L'information rejoint d'ailleurs ici la tâche de formation proprement dite de l'opinion, et là encore une oeuvre de vérité s'impose.



' Discours à des journalistes, 12 mai 1953 ; A. A. S., XXXXV, 1953, p. 401, cf. Documents Pontificaux 1955, p. 203. i Ibid.

Grave devoir des prêtres et des fidèles de soutenir la presse catholique.

Le lecteur catholique, et en général tout lecteur soucieux d'une presse saine et compétente, doit être formé en ce premier sens qu'il faut lui donner le désir de l'information juste et large dont il vient d'être question. Trop souvent, en effet, les responsables de la presse déplorent les impératifs budgétaires qui les forcent, disent-ils, à satisfaire aux goûts de leur public ou à se plier aux intérêts des puissances économiques et des partis politiques. Certes les difficultés financières d'une presse catholique qui se veut vraiment éducative sont grandes. Mais si, à l'appel de leurs évêques, prêtres et fidèles comprennent le grave devoir qu'ils ont de la soutenir, elle vivra, se développera et s'imposera par ses qualités, l'ampleur de ses vues, la fermeté et la modération de ses jugements. « Qu'elle renonce de bon coeur aux vains avantages d'un intérêt vulgaire ou d'une popularité de mauvais aloi ; qu'elle sache se maintenir avec une énergique et fière dignité, inaccessible à toutes les tentatives directes ou indirectes de corruption... Ce faisant, elle gagnera en valeur intrinsèque, elle finira par conquérir l'estime, puis la confiance 5. »

Sous cet aspect, d'ailleurs, le problème du journal catholique ne peut être résolu que par la collaboration de toutes les bonnes volontés et la convergence des efforts. Il appartient à l'Union internationale que vous présidez et à ses trois fédérations consécutives d'éclairer à cet égard l'opinion et de favoriser les services mutuels qui aideront les journaux dans leur tâche. Il lui appartient notamment de promouvoir un soutien efficace des journaux catholiques de pays de mission qui bien souvent ne peuvent encore se suffire à eux-mêmes.
Importance et grandeur de la tâche du journalisme catholique.


5 Discours à des Journalistes catholiques, 18 février 1950; A. A. S., XXXXII, 195°' p. 254, cf. Documents Pontificaux 1950, p. 50.




Ce travail de formation du lecteur à l'occasion de la multiplicité et de la diversité des nouvelles quotidiennes est irremplaçable et décisif, car le propre du journal n'est-il pas d'être lie a l'actualité et de prendre appui sur l'événement qui intéresse l'opinion ? L'action du journaliste catholique au service de la vérité, de la justice et de la paix peut cependant et doit même aller au-delà. Guide et conseiller de son lecteur, accomplissant auprès de millions d'adultes, une véritable oeuvre d'éducateur, il exprime au nom de tous les réactions de la conscience d'une opinion libre et mûrie. Il suggère la réflexion sans contraindre le jugement, il entraîne à l'action sans violenter la décision ; il suscite l'enthousiasme pour les grandes causes sans déchaîner la passion populaire. Tâche magnifique où brillèrent les grands noms du journalisme catholique !

Devant l'ampleur de leur responsabilité, le Saint-Père exhorte une fois de plus tous Ses fils de la presse à se préparer avec conscience à tenir ce rôle important dans la société. Leur devoir est de se former eux-mêmes, avant de prétendre guider leurs frères, et c'est pourquoi Sa Sainteté leur recommandait, dans un récent message, « une sérieuse étude et une sûre maîtrise des principes fondamentaux de philosophie et de théologie chrétiennes 6 ». Leur devoir est de puiser la règle de leur jugement, en matière religieuse et morale, dans l'enseignement de l'Eglise, maîtresse de vérité, et de se conformer, avec une loyale docilité, aux directives des pasteurs divinement constitués. Dans l'exercice de leur profession — que les meilleurs considèrent à juste titre comme un apostolat de la plume —, ils accepteront entre eux de légitimes divergences d'opinion ; mais, au sein d'un monde agité et porté aux extrêmes, ils feront preuve de modération dans le jugement, préférant ce qui les rassemble à ce qui les divise, unissant toujours la charité et la vérité. « Le fondement de tout, disait naguère le Saint-Père, est la vérité ; le terme et le couronnement de tout est la charité. Le fondement doit demeurer intact, autrement tout s'écroule... Mais le fondement de la vérité ne suffit pas »

6 Radiomessage du vj mai 1957 ; cf. p. 264.

7 Discours aux prêtres et religieux chargés de la critique des livres, 13 février 1956 ; A. A. S., XXXXVII, 1956, p. 134, cf. Documents Pontificaux 1956, p. 75.

8 Discours à des' journalistes, 12 mai 1953 ; A. A. S., XXXXV, 1953, p. 401, cf. Docm-ments Pontificaux 1953, p. 203.




Tel est l'idéal de service de la vérité que le Souverain Pontife propose à nouveau aux professionnels de la presse, en leur rappelant que « la qualité principale du journaliste reste toujours un amour incorruptible de la vérité »8. De grand coeur, il invoque sur les membres de l'Union internationale de la Presse Catholique l'effusion des grâces divines répandues par Celui qui est venu en ce monde rendre témoignage à la vérité et est lui-même la Vérité. Et, en gage de Sa bienveillance, Il vous accorde, ainsi qu'à tous vos confrères du Congrès de Vienne, une très paternelle Bénédiction apostolique.




LETTRE DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT A L'UNION INTERNATIONALE DES ASSOCIATIONS PATRONALES CATHOLIQUES



(23 août 1957) 1





A l'occasion du XIVe Congrès de l'Union internationale des Associations patronales catholiques (UNIAPAC), à Montréal, Son Exc. Mgr Dell'Aequa, Substitut de la Secrétairerie d'Etat, a fait parvenir les directives du Saint-Père à M. Joseph Mosca, président, dans la lettre suivante, en français :

L'Union internationale des associations patronales catholiques tiendra à Montréal, du 15 au 2a septembre, son quatorzième congrès, qui sera honoré de la présence des hautes autorités religieuses et civiles du Canada, et vous avez tenu en cette circonstance à solliciter du Souverain Pontife une nouvelle marque de Sa bienveillance envers l'Organisation que vous présidez. De grand coeur Sa Sainteté agrée votre hommage et me charge de vous exprimer Ses voeux très paternels.

On ne peut, en effet, que souhaiter à votre Conférence internationale le succès et l'audience qu'elle mérite. Elle s'impose à l'attention par la qualité de ses membres et la responsabilité dont ils sont investis dans la vie sociale de leurs pays respectifs. De nombreuses associations du continent américain y seront représentées, et la nation qui vous accueille se présente à vous riche de ses possibilités économiques et de la vitalité de ses institutions catholiques. Le thème surtout des travaux retient l'intérêt : « le chrétien chef d'entreprise ; son action dans l'entreprise, dans le milieu professionnel, dans l'Etat ». Véritable triptyque, dont les tableaux, présentés avec compétence par les rapporteurs du congrès, permettront aux membres de l'UNIAPAC de contempler l'ensemble des tâches qu'ils doivent assumer chrétiennement.

Sur ces divers points, d'ailleurs, les enseignements du Saint-Père sont nombreux, et vous aurez à coeur, lors de vos assises canadiennes, d'en répercuter fidèlement l'écho, en faisant connaître de la pensée pontificale les affirmations maîtresses ainsi que les précisions et les nuances nécessaires. Mais, s'il est indispensable, dans le désarroi actuel des idées, que les chefs d'entreprise sachent puiser à la source de vérité les lumières qui guideront leur action professionnelle, il est pour eux un devoir tout aussi capital — suggéré par le titre même du congrès — qui est de faire honneur, dans leur propre vie, à toutes les exigences de leur qualité de chrétien.

Combien il est important, en effet aujourd'hui, que l'existence personnelle et le comportement collectif des chefs d'entreprise catholiques soient une vivante illustration des principes religieux et moraux dont ils se réclament ! Or, même chez les meilleurs, ne se glisse-t-il pas parfois comme une faille entre la sincérité des convictions chrétiennes exprimées et la réalité de la conduite dans l'exercice de la profession ? Seul l'effort d'un regard lucide sur soi-même et d'une confrontation en commun peut permettre, avec l'aide de Dieu, d'en prendre une vive conscience et d'y porter remède. C'est pourquoi le Saint-Père est heureux de saisir l'occasion de cette assemblée pour exhorter Ses fils à ne pas détourner leurs regards de cet effort primordial, mais à en considérer au contraire le caractère apostolique : ainsi qu'un levain, il agit lentement mais efficacement sur les mentalités d'un milieu de vie et de travail ; il opère la transformation profonde des esprits et des moeurs ; et par là même il rend féconde la tâche professionnelle à poursuivre dans les trois secteurs d'action mentionnés par le thème du congrès.

Dieu veuille que les chrétiens chefs d'entreprise, convaincus des hautes responsabilités qu'ils portent à tous égards mais sûrs également de la confiance du Père commun, soient, pour leur part, les bons artisans du renouveau chrétien de la société ! En formant ce voeu paternel, Sa Sainteté vous accorde très volontiers, ainsi qu'à tous les participants du Congrès de Montréal, une large Bénédiction apostolique.


DISCOURS AU RASSEMBLEMENT MONDIAL DE LA JEUNESSE OUVRIÈRE CHRÉTIENNE

(25 août 1957) 1






Du 23 au 25 août 1.957, P'MS de 32.000 délégués du Mouvement international de la Jeunesse ouvrière chrétienne (J.O.C.), venant de 87 pays et de cinq continents, étaient réunis à Rome pour affirmer la vitalité de leur Mouvement, prendre conscience de leurs problèmes et apporter au monde le témoignage de leur foi.

Ce rassemblement qui consacrait l'oeuvre entreprise en 1925 par Mgr Cardijn, actuel aumônier général de la J.O.C., trouva son sommet dans l'audience pontificale du dimanche soir 25 août, sur la place Saint-Pierre, au cours de laquelle le Souverain Pontife prononça en français l'important discours suivant :




MERVEILLEUX SPECTACLE

Comment pourrions-Nous assez exprimer Notre joie, chers fils et chères filles de la JOC, en vous voyant assemblés aujourd'hui sous Nos yeux et faisant résonner de vos acclamations et de vos chants ces lieux consacrés par le martyre et le tombeau du chef des apôtres et visités par les foules chrétiennes du monde entier, qui viennent sans cesse y chercher force et consolation ? Depuis longtemps, Nous désirions cette rencontre avec les représentants de la Jeunesse ouvrière chrétienne ; déjà en 1939, au début de Notre Pontificat, elle Nous était promise, mais les tristes événements de la guerre la firent remettre à des jours meilleurs. Sachant qu'à ce désir du Père correspondent, depuis des mois, l'attente et la préparation de tous ses fils, les plus lointains surtout,





qui ont vécu dans l'espérance de cette heure, Notre satisfaction n'en est que plus grande, lorsque Nous contemplons votre rassemblement vibrant d'enthousiasme et vous entendons formuler avec tant de conviction l'engagement de lutter chaque jour pour mieux vivre votre idéal jociste et de gagner à cet idéal vos frères et soeurs de travail.

Comme la foule qui contemplait l'apôtre saint Jean, dans la prophétique révélation de Pathmos, « foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, de toutes nations, tribus, peuples et langues » (Apoc. vii, g), vous êtes revêtus, comme d'une grâce sanctifiante qui est votre fierté et votre force ; vous portez les palmes d'un apostolat déjà merveilleusement fécond, de combats toujours généreux et de sacrifices — Nous ne l'ignorons pas — dignes parfois des temps héroïques. Et tous, debout, dressés en face d'un monde qui oublie ou méprise les réalités saintes, vous lui criez hautement par vos paroles, par vos actes, par votre vie entière : « Le salut est le fait de notre Dieu, qui siège sur le trône, et de l'Agneau » (Apoc. vu, 10).

Mais par delà vos rangs de jeunes et authentiques ouvriers, Nous croyons voir aussi les centaines de milliers de jeunes travailleurs et travailleuses de tous les continents, qui vous ont délégués à Rome et vous ont chargés de Nous apporter le témoignage de leur attachement et de l'action apostolique, qu'ils mènent dans leur milieu. Nous apercevons aussi la multitude de ceux qu'ils veulent conquérir, en les ramenant à Dieu — comme la poignée de levain, mêlée à la masse inerte de la pâte, doit par sa fermentation la travailler, la soulever, la transformer en un pain savoureux et bienfaisant. Oui, votre présence console et émeut le coeur du Père commun, qui sait avec quel enthousiasme et au prix de quelles privations vous avez accompli votre pèlerinage. Jeunes ouvriers et jeunes ouvrières de plus de quatre-vingts nations, unis dans la grande fraternité chrétienne, vous proclamez bien haut que vous êtes venus ici affirmer votre foi catholique, votre amour sans limites pour le Christ, votre confiance filiale en son Vicaire et en son Eglise, votre volonté de justice et de paix. Vous êtes venus renouveler en Notre présence votre promesse magnanime de ramener à l'Eglise tous les ouvriers ; grande ambition, certes ! mais combien naturelle en des coeurs aimants qui se savent unis au Christ, parce qu'ils ont déjà expérimenté dans leurs saintes entreprises la puissance de sa grâce.

Vous êtes venus donc vers cette Rome éternelle, comme au foyer de lumière et de chaleur, qui doit éclairer vos esprits et embraser vos coeurs dans l'accomplissement de votre double tâche ; conserver et affermir en vous la vie de foi et en donner le bienfait à ceux qui l'ignorent.

Vous voulez vivre une vie chrétienne profonde, authentique, non seulement dans le secret de vos consciences, mais aussi ouvertement, dans vos familles, dans le quartier, à l'usine, à l'atelier, au bureau, et manifester par là votre appartenance sincère et totale au Christ et à l'Eglise. Votre solide organisation, votre méthode résumée par la formule bien connue : « Voir, juger, agir », vos interventions sur le plan local, régional, national et international, vous mettent en état de contribuer à l'extension du Règne de Dieu dans la société moderne et d'y faire pénétrer les enseignements du christianisme avec toute leur vigueur et leur originalité. Cette action, Nous voudrions en souligner ici quelques aspects, en les rattachant au nom même de votre mouvement : vous êtes des jeunes, des travailleurs, des catholiques.

I

VOUS ÊTES DES JEUNES



Les jeunes sentent croître en eux les forces physiques et morales ; poussés par le désir de les déployer, ils songent tout naturellement à l'avenir, à ce que la vie leur promet de grand et de beau. Ils sont animés d'un optimisme fervent, qui va courageusement de l'avant, surtout lorsqu'il s'appuie sur la grâce divine et l'aide de Dieu même. Mais le monde actuel oppose à cet optimisme de terribles obstacles. Vous voyez autour de vous des masses d'hommes se débattre dans des difficultés matérielles insurmontables, la faim, la misère, l'ignorance ; certains oublier même leur dignité, perdre leur idéal, se contenter de satisfactions vulgaires. Puis de faux prophètes s'insinuent dans ces groupes déprimés, y sèment des germes de haine et de révolte, les trompent par des promesses illusoires. Sous prétexte que les ressources naturelles ne pourraient suffire à nourrir l'humanité en croissance, on attente même à la dignité du mariage et de la famille.

Les problèmes économiques et sociaux peuvent trouver une solution chrétienne.

Comment la JOC essaie-t-elle de remédier à ces maux ? Elle affirme, avec toute l'ardeur de la jeunesse, sa foi dans les richesses spirituelles de l'humanité, dans sa vocation terrestre et surnaturelle, et elle s'applique dès maintenant à réaliser celle-ci. Soucieuse d'assurer à ses membres une éducation intellectuelle et morale, elle leur montre le vrai sens de la vie ; elle les entraîne à résister aux tentations avilissantes, à repousser toute lâcheté ; elle leur révèle le prix de la générosité et de l'entraide fraternelle. Elle entreprend de façonner leur esprit et leur coeur pour en faire des hommes conscients de leurs responsabilités et prêts à affronter sans crainte les plus lourdes tâches. C'est que le jocis-me a formé, là où il travaille depuis longtemps, des chefs chrétiens, et qui, comme tels, sont une espérance pour l'avenir social et la régénération chrétienne du monde ouvrier. Les problèmes économiques et sociaux, qui naissent de l'accroissement de la population du globe, des inégalités de la répartition des ressources naturelles, du développement insuffisant de certaines régions, inspirent à d'aucuns la défiance et le pessimisme ; les jeunes par contre sont persuadés que ces problèmes peuvent et doivent recevoir une solution par la collaboration de toutes les bonnes volontés. Si on est décidé à regarder ces problèmes avec franchise, à en étudier sérieusement les données, à suivre les impératifs de la conscience chrétienne, aucune situation, si grave puisse-t-elle paraître, ne prolongera longtemps ses effets néfastes.



Cherchez dans votre Mouvement une force surnaturelle.

Efforcez-vous de mettre à profit tous les moyens de formation personnelle et sociale, que votre mouvement vous procure. On imagine parfois, bien à tort, que les jeunes chrétiens regardent l'avenir du monde avec suspicion, qu'ils sont tristes et découragés devant des progrès scientifiques et techniques qui pourraient devenir une entrave et un obstacle à leur foi ; qu'ils sont en un mot faibles et impuissants en face de la pauvreté, de l'injustice sociale, de toutes les formes d'oppression qui subsistent dans la société contemporaine, et qu'ils se résignent passivement à accepter un sort qui les accable. La JOC vous a prouvé clairement et victorieusement, chers fils et chères filles, combien tout cela est faux. Parce que vous êtes catholiques, vous êtes beaucoup plus forts que d'autres, vous avez l'assurance indéfectible du triomphe final. Sans doute vous vous refusez à employer les moyens de violence, le mensonge, et toutes les méthodes qui, au lieu de respecter les droits de la personne, les diminuent et même les suppriment. Mais votre force est surnaturelle ; elle vous vient de Dieu, elle vous est donnée à chaque instant par l'Esprit-Saint qui vous inspire et qui confère à vos actes les plus humbles une valeur spirituelle inestimable.

Et comme vous éprouvez en vous-mêmes les bienfaits de la formation jociste et cette ardeur nouvelle qui pénètre votre vie, vous voulez les porter aux autres, à ceux-là surtout qui, privés de moyens de formation et de culture, n'ont pas appris comme vous la discipline personnelle de vie et les méthodes d'action sociale et religieuse. Vous irez vers eux simplement et cordialement ; vous les attirerez à votre mouvement ou du moins vous leur communiquerez ce que vous avez vous-mêmes reçu, afin qu'au lieu de gaspiller leur jeunesse dans l'inaction et les plaisirs malsains, au lieu de subir passivement la pression des circonstances hostiles, ils sachent se fixer un idéal élevé, exalter leurs forces et leur confiance par les liens étroits de la fraternité jociste. Unis dans un même élan, vous préparerez ensemble, guidés par la lumière de l'Evangile et soutenus par la ferveur de votre amitié chrétienne, un avenir heureux et fécond pour vous-mêmes et vos compagnons.




Pie XII 1957 - DISCOURS POUR LA CANONISATION DE SAINTE MARGUERITE DE HONGRIE