B Raymond: V. Catherine - CHAPITRE VI


ELOGE DE CATHERINE

ÉLOGE DE CATHERINE COMPOSE PAR LE BIENHEUREUX RAYMOND


POUR SERVIR DE PREMIER PROLOGUE A L'HISTOIRE DE LA SAINTE.




Voix inspirée est la voix de l'Aigle (St Jean l'Evangéliste), qui, porté par de L'Ange son vol, au sommet du plus sublime des cieux, manifeste à l'Église militante les secrets du divin Conseil et nous dit au livre de ses révélations (Ap 20): " J'ai vu un Ange, descendant du ciel, avec la clef de l'abîme et une grande chaîne dans sa main."

Ces paroles, quelle que soit l'explication qu'en aient donnée jusqu'ici les saints Docteurs, me semblent pouvoir, avec assez de convenance, servir de thème à notre Notre-Seigneur. sujet; car l'angélique vierge, dont nous avons l'intention de raconter la vie plus céleste qu'humaine, a incontestablement révélé les mystères de l'infinie Sagesse, à beaucoup d'âmes ignorantes des voies du salut; et elle a présenté, par ses paroles et ses exemples, la chaîne qui lie Satan à tous ceux qui ont voulu entendre; on devrait même dire qu'elle la leur a donnée.

Que si, par cet Ange descendant du ciel, nous entendons l'Ange du Grand Conseil, le Seigneur Jésus-Christ,descendu du ciel, nous dit l'Apôtre, aussi réellement qu'il y est remonté (Ep 4,10), rien encore dans ce sens, qui soit étranger à notre sujet. Les oeuvres dont nous allons parler, ne sont-elles pas en effet de Celui-là même que nous savons bien avoir trouvé dès le commencement ses délices parmi les fils et les filles des hommes (Pr 8,31), objets de son éternelle prédilection. C'est Lui qui, au témoignage de l'Aigle (Is 22,22), a de toutes manières la clef de David, cette clef qui ouvre ce que personne ne fermera et ferme ce que personne n ouvrira plus. C'est Lui aussi, qui nous atteste avoir la clef de la mort et de l'enfer (Apoc 1, 18). Il n'est donc pas étonnant qu'il porte la chaîne qui lie Satan.

Mais ce même Seigneur des anges, ici désigné sous le nom d'Ange, a tellement aimé d'amour éternel le genre humain, que, dans un sentiment d'ineffable miséricorde, il a voulu attirer noire nature dans l'unité de su propre personne. Voilà pourquoi, comme on l'a dit, n'ayant cependant nul besoin de ces joies, il s'est si excellemment délecté parmi les enfants des hommes, qu'il s'est efforcé de n'employer que des instruments humains, pour l'exécution de ses éternels décrets. De là vient que toujours, dès le commencement des siècles, il a sanctifié et choisi certains hommes, pour manifester ses plus secrets mystères. De là vient que toujours il a accompli ses merveilles et ses oeuvres surnaturelles par le ministère d'hommes en qui il se complaisait. De là vient que, voulant donner aux habitants de la terre une loi d'origine céleste, il n'a élu comme Médiateur qu'un homme, pour le mettre à la tête de son peuple choisi De là vient enfin que, saisi d'amoureuse passion pour cette nature humaine, il l'a prise dansson intégrité, du sein d'une Vierge humaine, gracieuse entre toutes. Revêtu de cette nature, comme de l'ornement de sa charité, il s'est, par elle et avec elle, indivisiblement uni aux hommes. Puis, après avoir réaliSé cette oeuvre toute merveilleuse et toute aimable, il a embrassé si étroitement le genre humain que, non content de lui offrir une fraternité si admirable, il s'est livré comme rançon pour le salut des hommes. Il a donné en nourriture aux âmes humaines son propre Corps et son propre Sang, jusqu'à la fin des siècles, et il a promis aux fidèles d'être lui-même leur récompense.

Par tout ceci, chaque chrétien peut apprendre à quel degré souverain de dignité le genre humain a été élevé et quelle est la hauteur du sommet sur lequel tout adorateur du Christ se trouve établi. Plus haut que les sommets angéliques, brille aujourd'hui la dignité de l'homme, et Dieu, s'il m'est permis de parler ainsi, s'étant abaissé un peu au-dessous de l'ange, l'homme s'est trouvé exalté au-dessus des hiérarchies célestes. "Vous l'avez abaissé, dit le Prophète, un peu au-dessous des anges, mais vous l'avez couronné de gloire et d'honneur et vous l'avez établi sur les oeuvres de vos mains. Vous avez tout mis à ses pieds. (Ps 8,7 Ps 8)". Saint Paul expose ces paroles dans son Épître aux Hébreux et, les appliquant au Christ; il nous dit: "Dès lors que Dieu lui a tout soumis, il n'a rien laissé qui échappe à son empire (Hb 2,8).

Essayez de comprendre maintenant, ô sage qui m'entendez, la confiance avec laquelle, l'âme fidèle, éprise de son Sauveur, peut aller à lui, l'abandon qu'elle peut mettre à le suivre, le nombre et la douceur des dons qu'elle peut espérer recevoir de Celui qui s'étant livré tout entier pour elle, retient cependant l'univers sous sa puissance. O aveugle apathie! O trop obstinée dureté de nos temps modernes! O froideur des esprits d'aujourd'hui, plus froide que neige et glace! Comme elles avaient jusqu'ici couru ferventes, sur les pas de l'Agneau, les fiancées du Christ dans la foi! Quelle promptitude à le suivre, partout où il allait, fût-ce jusqu'à la croix! Combien de fidèles, non seulement de tout sexe, mais de tout âge, de toute condition, méprisant le monde et ses biens comme la plus vile des boues mettaient toute la joie de leur esprit à offrir leur propre corps à toutes les épreuves de la souffrance. C'était à travers les épines des tribulations et les ronces des douleurs corporelles, qu'en ces temps heureux, ces âmes volaient plus qu'elles ne couraient, à la suite de l'Éternel époux, passant, l'esprit tranquille, à travers les horreurs de la mort, jusqu'à la vie sans limites. Combien aussi foulaient aux pieds tout bien passager, domptaient leur propre chair par un long martyre, fixaient sur les joies célestes le regard de leur intelligence, édifiaient la sainte Église, par leur doctrine comme par leurs exemples, et, après de longs combats, couronnaient l'intégrité de leur vie d'ici-bas, par une heureuse entrée dans celle du ciel. Et pourquoi tout cela? Si ce n'est, parce que Celui qu'on a si souvent appelé l'Ange du Grand Conseil, était devenu la proie de leurs coeurs. Avec sa clef de David, ils avaient fermé et la terre et ouvert au ciel l'abîme de leurs pensées; et avec la grande chaîne qu'ils avaient reçue de lui, ils avaient vaincu et lié Satan, l'adversaire.

En ces temps-là, c'était chose commune et fréquente, mais dans nos temps difficiles, où, selon la prophétie de l'Apôtre (2Tm 3,2), il n'y a plus guère que des égoïstes, ce même Ange ne nous a pas retiré tout à fait l'aide de son " Grand Conseil " et de son secours. Il sème çà et là à travers la chrétienté quelques âmes, peu nombreuses il est vrai, pour lesquelles il multiplie si copieusement et avec tant de munificence ses dons merveilleux que les témoins de ces grâces en sont dans la stupeur, et que l'esprit des autres se refuse à y croire. Chose plus étonnante et qu'on doit noter, ce me semble, cette abondance de grâces parait de nos jours faire plus particulièrement son oeuvre dans le sexe faible, chez des femmes. Peut-être est-ce pour confondre l'orgueil des hommes, de ceux-là surtout, qui, pleins de l'estime d'eux-mêmes, ne rougissent pas de se dire savants, alors qu'ils ne savent rien, sages alors qu'ils n'ont en rien goûté aux douceurs de la Sagesse divine. O honte! ils sont devenus aujourd'hui tellement insensés, nous dit l'Apôtre (Rm 1,22), qu'ils font de vains efforts pour savoir sans science, pour être sages sans sagesse. Ce sont ces hommes, si je ne me trompe, que l'éternelle Sagesse semble avoir résolu de confondre, par l'humble doctrine et les oeuvres merveilleuses de saintes jeunes filles, afin qu'en sa présence nulle chair ne se glorifie et que l'insensé apprenne où est l'intelligence, où est la vertu, où est la vraie lumière, où est la paix!

Voilà pourquoi une admirable jeune fille, une vierge toute sainte, oeuvre de la Sagesse incarnée, est venue au monde en Toscane, à Sienne, vieille cité de la vierge, ainsi nommée à cause de l'antiquité de son titre basilical. Quand je considère attentivement la doctrine de cette sainte, quand j'admire les actes de sa vie et son bienheureux trépas, j'en suis tout saisi, et laisserais libre cours à mes larmes, plus volontiers qu'à mes paroles. Quel coeur, en effet, ne se sentirait défaillir au spectacle de dons si merveilleux du Très-Haut? A voir cette vierge, si frêle dans son sexe, d'âge si tendre, fille du peuple, s'élever sans le secours d'aucun Docteur ou guide humain à de si hauts sommets, dans la pratique des vertus parfaites, acquérir de telles lumières et une telle perfection de doctrine, et cela, sans sortir de la maison paternelle, qui donc ne serait pas stupéfait? Qui donc pourrait contenir son admiration et ses larmes, larmes de joie et de louange tout à la fois.

Dans ma souveraine indignité, sans aucun mérite précédent, bien plus, malgré mes démérites, j'ai reçu de la Miséricorde d'en-haut, qui ne veut la mort de personne, la grâce de connaître, pendant plusieurs années, cette sainte vierge alors sur la fin de sa carrière. J'ai été admis dans sa familiarité et elle m'a même choisi pour confesseur, ce qui m'a permis de participer et d'être initié à tous les secrets que le Seigneur lui a confiés et révélés. Dès lors je ne puis pas, à la façon du mauvais serviteur, Dieu m'en garde, tenir enveloppé dans un suaire le précieux talent que la générosité du Très-Haut m'a confié. Je veux l'apporter au trésor public, en multiplier ainsi le profit pour les âmes, et, riche de ces usures si agréables à Dieu, le rendre en temps fixé au Seigneur Sauveur.

Et puisque la parole de Jean convient, si je ne me trompe, à mon sujet, je la reprends et je crie de toute mon âme aux siècles présents et futurs: " Oui, j'ai vu, moi qu'on appelle habituellement Raymond, et que Catherine appelait parfois Jean, à raison, je pense, des secrets qu'elle m'a révélés, j'ai vu, dis-je, l'ange descendant du ciel avec la clef de l'abîme et une chaîne dans sa main; je l'ai vu, j'étais là. Le Seigneur avait déjà fait sans doute beaucoup de merveilles, avant que je ne connusse personnellement cette vierge, mais j'ai tout appris d'elle-même, dans l'intimité de la confession, ou d'hommes et de femmes absolument dignes de foi et témoins oculaires. J'ai donc vu et entendu, de telle sorte que moi et mes autres témoins nous pouvons nous écrier avec l'Évangéliste Jean: " Ce que nous avons vu et entendu du Verbe de vie " habitant en cette admirable vierge "cela, et pas autre chose; voilà ce que nous vous annonçons (1Jn 1,1) " Comme le disaient Pierre et Jean, nous ne pouvons point ne pas dire les choses que nous avons vues et entendues et ne pas les annoncer à tous (Act 4,20). Considérons donc avec soin, chrétiens fidèles, ce verbe créé, que le Seigneur a fait et qu'il nous a montré, à nous pécheurs, et je suis le premier de ces pécheurs, moi qui vous ai dit plus haut que j'avais vu.

Qu'ai-je donc vu? J'ai vu certainement un ange descendant du ciel, car la femme dont je parle n'était pas une femme, mais un ange sur terre, ou, si vous aimez mieux, on devrait plutôt l'appeler homme céleste que femme. N'a-t-elle pas fait oeuvre angélique et céleste, celle qui, renonçant complètement à tous les plaisirs du corps, illicites ou licites, avait toujours sa pensée dans les cieux et les paroles d'éternelle vie sur les lèvres, celle qui sans nourriture, sans boisson, sans sommeil, accablée de plusieurs graves maladies, non seulement vivait, mais demeurait joyeuse, mais travaillait sans défaillance et sans relâche aux oeuvres de Dieu et au salut des âmes. Qui dira que pareille vie est de la terre et de l'homme? Et je ne parle pas des autres prodiges et miracles que Dieu accomplissait par elle devant nous, ce n'est pas ici le lieu d'en donner les détails. Avec la grâce de Dieu, je les raconterai plus loin en grande partie. Qu'y a-t-il donc d'étonnant à ce que nous l'appelions un ange, celle qui, par la pureté de sa chair et de son esprit, a imité la nature angélique, et qui remplissait sans cesse l'office des anges, sous le commandement du Roi des anges.

C'est à bon droit aussi que nous la présentons comme "descendant du ciel ", car tout en ayant habituellement sa très sainte conversation dans les cieux (Phil 3,20), elle descendait souvent sur la terre, par une humble connaissance d'elle-même et par sa compassion pour le prochain. Mais il est écrit de l'Époux que Celui qui descend est aussi le même qui remonte (Eph 4,10) et la véritable épouse emploie toutes ses énergies à mettre ses pas dans les pas de l'Époux. Après être descendue, cette admirable vierge remontait donc comme les anges de l'échelle de Jacob pour contempler la face du Seigneur trônant au sommet de l'échelle, et pour recevoir dans cette ascension les abondantes bénédictions qu'en descendant elle répandait sur les habitants de la terre. C'est, pour ainsi dire, grâce à cette échelle de Jacob qu'elle a accompli toutes ces oeuvres, car, nous le verrons plus loin avec l'aide de Dieu, en tout ce qu'elle a demandé au Seigneur et en tout ce qu'elle a fait, elle a eu recours à la médiation de la glorieuse Marie Mère de Dieu, et du Fruit de son sein, l'Humanité du Sauveur. Or l'échelle de Jacob est le symbole de cette double médiation.

De plus, l'ange qui descend, comme nous l'avons dit, nous apparaît "avec la clef de l'abîme ", car cette vierge angélique, dépassant toute pensée humaine, a sondé les profondeurs de la divine Sagesse et nous les a ouvertes et révélées, autant que le peut faire une âme encore en route pour le ciel. Qui donc, en lisant ses lettres, adressées à travers toute la chrétienté à des personnes de condition et de dignité si diverses, n'admirerait pas, tout étonné, l'élévation de leur style, la profondeur de leurs pensées et leur utilité extraordinaire pour le salut des âmes? Elle y parle dans son langage vulgaire, puisqu'elle ne connaît pas la littérature, mais elle est entrée dans les puissances du Seigneur avec une clef qui en pénètre les mystères et son style, attentivement examiné, parait plutôt être de Paul que de Catherine, d'un Apôtre que d'une jeune fille. Elle dictait ses lettres couramment, sans la moindre hésitation de pensée, si bien qu'elle semblait lire, dans un livre placé devant elle, tout ce qu'elle disait. Je l'ai vue souvent dicter à deux Secrétaires à la fois des lettres différentes, adressées à diverses personnes, et traitant de matières qui n'avaient rien de commun. Aucun des secrétaires n'avait à attendre le moindre instant sa dictée et aucun ne recevait de la sainte quelque parole qui fût étrangère à son sujet. Comme j'en manifestais mon étonnement, plusieurs qui l'avaient connue avant moi et l'avaient très souvent vue dicter, me répondirent qu'elle occupait quelquefois trois ou quatre secrétaires en même temps, de la façon que j'ai dit, avec la même célérité et la même sûreté de mémoire. Pareil fait chez une femme dont le corps était si brisé par les veilles et l'abstinence, est pour moi le signe d'un miracle et d'une grâce infuse surnaturelle, bien plus que l'effet de n'importe quelle faculté naturelle.

D'ailleurs, si l'on examine le livre qu'elle a composé, dans le dialecte de son pays, sous la dictée évidente de l'Esprit-Saint, qui donc pourrait imaginer ou croire que ce soit là l'oeuvre d'une femme? La sublimité du style est telle qu'on peut à peine la rendre en latin, je m'en aperçois bien aujourd'hui aux efforts que me demande cette traduction. Les pensées en sont si élevées et si profondes qu'à les entendre exprimées en latin vous les attribueriez tout d'abord à Aurelius Augustin, Quant à leur utilité pour l'âme qui cherche son salut, il n'est pas possible de la dire en quelques paroles claires et courtes. Le lecteur attentif apprendra dans ce livre toutes les ruses les plus subtiles qu'emploie l'antique ennemi, de tous les moyens. que nous avons de vaincre Satan et de plaire au Très-Haut, tous les bienfaits qu'accorde le Sauveur aux créatures raisonnables, toutes les fautes qui dans notre siècle pervers se commettent habituellement, ô douleur, contre ce même Sauveur, et les remèdes à ces fautes. Les secrétaires de la sainte m'ont affirmé qu'elle n'avait rien dicté de tout cela pendant qu'elle jouissait de l'usage de ses sens, mais seulement aux heures d'extase, alors qu'elle parlait avec son Époux. Voilà pourquoi ce livre est composé sous la forme de Dialogue entre le Créateur et l'âme raisonnable qu'il a créée et qui marcha vers Lui.

Mais, pour cette même raison, bien que ces écrits soient à recommander de toute façon, bien que je ne puisse les louer comme ils le méritent, ils sont cependant peu de chose à côté de la parole vivante qu'elle nous faisait entendre étant encore parmi les hommes. Le Seigneur lui avait donné une langue si bien instruite qu'elle savait toujours que répondre. Ses paroles brûlaient comme des torches, et nul de ceux qui les entendait ne pouvait se dérober complètement à l'ardeur de leurs traits enflammés. A en croire tous ceux qui ont connu la sainte, qu'ils aient suivi ou non ses conseils. Personne n'est jamais venu l'entendre avec quelque mauvaise intention que ce soit, fût-ce celle de s'en moquer, sans en revenir un peu ou tout à fait contrit, totalement on en partie corrigé. Qui donc, à ces signes, ne reconnaîtrait pas le feu de l'Esprit-Saint qui habitait en elle? Qui donc pourrait désirer une autre preuve de l'action du Christ qui parlait par Catherine. L'arbre se reconnaît à ses fruits (Mt 12,33), nous dît la Vérité incarnée, qui nous assure aussi que l'homme bon tire du trésor de sa bonté de bonnes paroles (Mt 12,35). Vous auriez pu voir souvent ceux qui entraient chez notre sainte, pour rire et se moquer, en sortir tout en larmes, et ceux qui venaient l'âme pleine d'orgueil et la tête haute, s'en aller gémissant et la tête basse. D'autres, sages à leurs propres yeux, et fort instruits des sciences humaines, après l'avoir entendue, mettaient un doigt sur leurs lèvres et, tout stupéfaits, murmuraient en eux-mêmes: " Comment celle-ci sait-elle les lettres, sans avoir étudié (Jn 7,15) " " D'où vient à cette pauvre femme une telle sagesse? Qui a pu l'instruire si parfaitement et lui enseigner de si hautes vérités? "Tout cela montrait bien à tout esprit sensé qu'elle avait la clef de l'abîme, c'est-à-dire des profondeurs de la Sagesse éternelle et qu'illuminant les esprits enténébrés, elle ouvrait aux aveugles les trésors de la lumière éternelle.

Le texte de Jean, thème de ce prologue, se terminait par ces mots: " Avec une grande chaîne dans sa main ". Nous pourrions signaler tout d'abord le rapprochement facile à faire, entre le nom de chaîne et celui de Catherine (en latin catena et catarina), mais nous arrêterons-nous à jouer sur les mots? Allons plutôt au fond du mystère qu'ils signifient. Une chaîne est une totalité composée d'anneaux divers, tellement liés l'un à l'autre qu'ils ne peuvent être séparés sans être brisés. Cette chaîne est pour nous le symbole d'un double don fait à la terre, à savoir: des fidèles dont l'ensemble forme l'Église et des saintes vertus, dont la réunion assure le salut et la vie de chaque âme; et le sens mystique de ce symbole a bien son importance. Les vertus, en effet, sont tellement liées l'une à l'autre qu'on ne peut en avoir une complètement sans avoir les autres, et cependant chacune d'elles a sa condition spéciale, qu'aucune autre ne peut avoir (St Thomas, Somme théologique, 2ème partie, 1 ère section, question LXV). De même, les fidèles sont tellement unis dans une même foi et une même charité qu'on cesse d'être fidèle en se séparant de cette unité. Cependant chaque fidèle reçoit nécessairement des grâces tout à fait spéciales de cet Esprit qui " distribue à chacun ses dons comme il l'entend (1Co 12,11) " et chaque fidèle aussi a sa propre nature et sa propre personnalité. Ne voyez-vous pas maintenant comment la chaîne symbolise bien l'une et l'autre de ces deux totalités, comment cette chaîne était bien aux mains de Catherine, qui avait reçu du Seigneur la totalité des vertus et qui portait avec tant d'amour en son coeur 1'universalité des fidèles. Mais cette idée me paraît trop brièvement exposée, et je veux, je dois l'expliquer plus au. long.

J'ai vu moi-même, bien que je sois rempli de vices, j'ai vu souvent des personnes vertueuses, mais je ne me souviens pas avoir vu et je ne pense pas voir jamais un ensemble de vertus, qui, par son excellence, égalât celui qui éclatait en cette vierge. Parlons d'abord de l'humilité, qui est la base et le sel de toute autre vertu. Catherine était si humble que non seulement elle se mettait au-dessous de la plus vile des âmes, et désirait sans cesse être considérée comme la dernière de toutes, mais qu'elle croyait fermement être la cause de tous les maux d'autrui. Toutes les fois qu'elle pensait aux iniquités et aux malheurs du monde en général, ou de chaque individu en particuliers elle s'en prenait à elle-même en se disant: C'est toi qui es la cause de tous ces maux; ils viennent de tes péchés, rentre donc en toi-même, et pleure tes fautes aux pieds du Seigneur jusqu'à ce que tu mérites d'entendre comme Madeleine, la parole du pardon: " Tes péchés te sont remis (Lc 7,48). " Considérez attentivement, cher lecteur, non seulement cette humilité, mais encore ses profondes racines. C'était peu pour notre sainte de se mettre au-dessous de tout le monde, d'obéir à tous, de supporter patiemment toutes les injures. Fidèle à l'enseignement du Sauveur elle se considérait encore, après cela, comme une servante inutile (Lc 17,10)elle allait plus loin, elle s'accusait coupable devant le Seigneur plus que les autres, et même pour ses propres persécuteurs. C'est ainsi que non seulement elle se croyait au-dessous de tous, plus méprisable que tous, mais encore nécessairement redevable à tous. De là vient que, s'interdisant tout jugement défendu ou permis sur le prochains repoussant tout souci de sa propre réputation et se méprisant souverainement elle-même, elle se prosternait aux Pieds de tous. Voyez-vous, cher lecteur, comment cette conduite, ne laissant aucune prise à l'orgueil, assurait avec une souveraine sagesse la défaite de l'amour-propre et mettait fortement à l'abri de toute atteinte, l'amour du prochain, perfection de la Loi? Remarquez-vous comment la charité et l'humilité s'enchaînaient avec art dans une action commune? et cette chaîne ne vous paraît-elle pas suffisante pour captiver et lier Satan le superbe, ainsi que l'ajoute Jean, dans le texte cité.

Mais ce que je viens de dire va peut-être soulever quelques doutes en votre esprit. Je veux les prévenir, car vous pourriez soupçonner que cette obscurité couvre quelqu'inexactitude. J'ai dit plus haut, que Catherine désirait se mettre au-dessous de la plus vile des âmes et être considérée comme la dernière de toutes. Cette assertion, donnée sans explication, vous paraîtra peut-être incroyable ou peu sérieuse. Vous devez d'abord comprendre, que sans dépasser complètement la mesure d'un prologue, je ne puis expliquer en détail tout ce que j'y affirme. Il suffit que ces affirmations trouvent au cours de cette histoire leur justification. Sachez cependant dès maintenant que notre vierge s'est volontairement soumise, et a obéi très longtemps à toutes et à chacune des personnes de sa maison, même aux servantes, ainsi qu'à plusieurs miséreux et malades de l'hospice. Jusqu'à sa mort, elle n'a jamais voulu vivre en dehors du joug de l'obéissance, comme cette histoire vous le montrera plus loin. Une pareille soumission vis-à-vis du prochain vous fait assez comprendre, je pense, qu'elle se croyait au-dessous des autres; mais, pour effacer de votre esprit toute hésitation, je veux vous rapporter la réponse qu'elle m'a faite, un jour où je lui demandais comment, sous le regard de la vérité, elle pouvait s'estimer et se dire la cause de tous les maux du monde. Elle affirma davantage encore cette proposition, me dit qu'il en était tout à fait ainsi et ajouta: " Est-ce que si j'étais tout embrasée du feu de l'amour divin, je ne prierais pas mon Créateur, avec un coeur de flammes, et Lui qui est souverainement miséricordieux ferait miséricorde à tous mes frères et leur accorderait à tous d'être embrasés du feu qui serait en moi? Quel est l'obstacle à un si grand bien? mes seuls péchés assurément. Car nulle imperfection, ne peut venir du Créateur, qui ne peut rien avoir en lui d'imparfait, il faut donc que ce mal vienne de moi et par moi. Oui, quand je considère le nombre et la qualité des grâces dont il m'a si miséricordieusement comblée pour me conduire à cet état que j'ai dit; et quand les maux dont je suis témoin me montrent clairement que mes iniquités m'ont empêchée d'y arriver, je m'emporte contre moi-même etje pleure mes péchés, mais sans désespérer, car j'espère toujours davantage, qu'il nous pardonnera à moi et aux autres.

Voilà ce qu'elle m'a répondu, avec une incomparable ferveur, et moi, j'admirais cette nouvelle manière de conserver en même temps l'humilité et la charité, en se rendant responsable des péchés notoires du prochain. Il me venait bien à l'esprit quelques objections, je préférai me taire que de répondre encore quelque chose, à celle qui enseignait si magistralement la vertu. J'ai vu de suite, et plus je réfléchis plus je vois, comment dans ce seul acte, l'humilité, la foi, l'espérance et leur reine à toutes, la charité sont admirablement et excellemment enchaînées. C'était l'humilité, qui avait suggéré à Catherine cet admirable moyen de s'attribuer les fautes du prochain et de ne point le mépriser. Puis la foi lui montrait combien la bonté et la miséricorde du Seigneur l'emportent sur la malice des pécheurs, et combien est actif le feu qui habite dans les âmes des serviteurs de Dieu. L'espérance la réconfortait et lui permettait de venir en toute confiance, malgré tant et de si grands péchés, implorer miséricorde pour elle et pour les autres. Enfin, le tout était l'oeuvre de cette Charité qui ne connaît pas de déclin (1Co 13,8). A cela venait s'ajouter une contrition parfaite du péché, la satisfaction des larmes du coeur et du corps, un zèle souverain des âmes, un souci du salut de tous, qu'on ne saurait assez louer. Que vous en semble-t-il maintenant, ô bon lecteur? Ne voyez-vous pas, dans la première oeuvre, que je vous ai présentée, de cette sainte vierge une merveilleuse chaîne de vertus? Comprenez-vous, comme il s'applique bien à Catherine, notre texte disant, qu'elle avait une grande chaîne dans sa main? Et nous avons eu raison d'affirmer qu'elle avait une double chaîne, chaîne des vertus, mais aussi chaîne des âmes fidèles dont se compose l'Église, car elle les portait parfaitement toutes les deux dans son coeur. Peut-être vous semble-t-il cependant que nous ne vous en avons montré qu'une, bien qu avec un peu d'attention vous ayez pu voir qu'il était question de l'une et de l'autre.

Pour dissiper toute obscurité, nous allons vous dire quelle était l'ardeur de l'amour de Catherine pour chaque fidèle en particulier et plus encore pour la chrétienté tout entière. Toutes ses pensées, ses paroles, ses actions, toute sa vie, et le mouvement de cette vie, ne rendent plus aucun son et n'ont plus aucun sens, si vous en enlevez la compassion et l'amour pour le prochain. Qui donc pourrait dire, comme il convient, les aumônes qu'elle distribuait aux pauvres, les soins qu'elle donnait aux malades, les sentiments de dévotion et de confiance qu'elle inspirait aux mourants, pour les consoler et les réconforter. Qui donc aussi pourrait compter les affligés qu'elle a consolés, les pécheurs qu'elle a convertis, les justes qu'elle a encouragés, les méchants qu'elle a patiemment supportés, les attractions toutes de charité qu'elle exerçait sur tous ceux qui venaient à elle, charmes célestes qui lui servaient à procurer très efficacement le saint de tous et de chacun; qui donc encore pourra jamais savoir les fleuves de larmes, les soupirs intimes, les prières instantes, les gémissements et les sanglots avec lesquels, jour et nuit, sans relâche, au prix de sueurs incroyables, elle travaillait auprès de son Époux, au salut de tous. Ecoutez sur ce point le témoignage de plusieurs personnes, qui l'ont entendue pendant ses extases, alors que l'ivresse débordante de son esprit agit ait la langue de son corps. Elle parlait à voix basse à son Époux et lui disait: " Comment donc, Seigneur, pourrais-je consentir à ce qu'un seul de ceux que vous avez créés, comme moi, à votre image et à votre ressemblance, vienne à périr et à être enlevé de vos mains? Non, je ne veux absolument pas voir périr un seul de mes frères, un seul de ceux qui me sont unis par une même naissance à la nature et à la grâce. Je veux qu'ils soient tous enlevés à l'antique ennemi, et que vous, Seigneur, vous les gagniez tous pour l'honneur et la plus grande gloire de votre Nom " Le Seigneur lui répondit, ainsiqu'elle me l'a secrètement confessé: " La charité ne peut se tenir en enfer, elle le détruirait complètement; il serait plus facile de supprimer l'enfer que d'y faire habiter la charité. " Pourvu que votre vérité et votre justice fussent manifestées, répartit alors la sainte, je voudrais bien qu'il n'y eût plus d'enfer, ou qu'au moins, désormais, nulle âme n'y descendit. Si tout en vous restant unie par la charité, je pouvais me placer à l'ouverture de l'enfer, et la fermer de telle sorte que personne n'y entrât plus, ce serait pour moi la plus grande des joies, car ainsi tous ceux que j'aime seraient sauvés.

Voilà qui vous permettra, lecteur, de conclure avec évidence, si je ne me trompe, que l'âme de notre vierge était heureusement et parfaitement enlacée e ornée de ces deux chaînes d'or, dont nous avons parlé et qui sont si agréables à Dieu. Je ne puis pas ici tout raconter en détail, à moins de convertir mon prologue en traité, et il me suffit de vous avoir esquissé à grands traits, mais en toute vérité, les excellences de notre sainte. Je désire cependant vous apprendre encore que si vous aviez vu et entendu ce que j'ai vu et entendu, votre esprit aurait admiré comment Catherine imitait l'humilité et la pureté de la glorieuse Vierge Marie, l'austérité et la pauvreté de Jean-Baptiste, la pénitence et le détachement de Marie-Madeleine, les intuitions et la sainteté de Jean l'Évangéliste. Vous auriez vu vraiment en elle la foi de Pierre, l'espérance d'Étienne, la sagesse et la charité de Paul, la patience de Job, la longanimité de Noé, l'obéissance d'Abraham, la mansuétude de Moïse, le zèle d'Élie, les miracles d'Élisée. Comme Jacob elle contemplait, comme Joseph elle annonçait l'avenir, comme Daniel elle révélait les mystères, comme David elle louait jour et nuit le Très-Haut. Et je n'exagère pas en parlant ainsi, bien cher lecteur, je n'exagère rien. Vous verrez plus loin, en lisant chaque chapitre, que, dans ce court sommaire je n'ai mis nulle exagération. L'imitation du Sauveur lui-même et de sa glorieuse Mère se reconnaît en effet facilement, dans chacun de ses saints et la signaler n est pas une exagération, car imiter selon la mesure qui nous est donnée, ce n'est point égaler, et l'imitateur n'a pas nécessairement la perfection et la plénitude de celui qu'il imite.Voilà pourquoi le Docteur des Gentils (1Co 2,1), excitant ses propres disciples à l'acquisition des vertus chrétiennes, leur disait: " Soyez mes imitateurs, comme je le suis du Christ. " Dans ces paroles, si vous y faites bien attention, ce n'est pas à son imitation mais à celle du Christ Jésus, que l'Apôtre invite les fidèles. Quand donc j'ai dit plus haut " vous auriez vu, en elle, la foi de Pierre, etc... " avouez qu'on ne peut tirer de là aucune conclusion déplacée; car on peut appeler en toute vérité foi de Pierre, celle d'une âme qui croit parfaitement au Christ; et ainsi en est-il des autres dénominations. Ici cependant, je dois le dire, et vous le verrez vous-même avec l'aide de Dieu, les vertus précitées et liées aux noms des saints énumérés plus haut, se sont retrouvées dans l'âme de notre vierge, à un degré si nouveau et si parfait que votre esprit reviendra bientôt du premier étonnement que lui auront peut-être causé mes paroles.

Je vous ai donc montré comment notre ange virginal avait en sa main les deux chaînes, dont chacune est un lien pour Satan. Avec l'une, c'est-à-dire avec celle des vertus, l'ange montait au ciel, puis il descendait du ciel pour opérer le salut des fidèles, qui forment la seconde chaîne. Rien d'étonnant à ce que ces deux chaînes aient tenu Satan captif, commue l'ajoute saint Jean. Aucun théologien instruit ne doute que le royaume de Satan n'ait pour limites la volonté des hommes mauvais, qui se livrent à lui. Jamais en effet Satan, condamné par sa faute, captif de sa propre damnation, ne pourrait régner par ses propres forces, si les fautes des méchants ne soumettaient pas leurs esprits à sa volonté perverse. Voilà pourquoi il est écrit, qu'il est " roi sur tous les fils d'orgueil (Job 41, 25) ". C'est l'orgueil qui engendre ceux sur lesquels il règne, car jamais il n'eût pu régner, si l'orgueil n'eût perverti quelque volonté. Mais de même que l'établissement de son règne ne dépend pas de sa volonté, mais de la volonté des autres, de même la ruine de son pouvoir est bien plus liée à la volonté des autres qu'à la sienne. Quiconque le veut vraiment peut donc facilement détruire, pour sa part, le royaume de Satan; et quand je dis quiconque le veut, j'entends celui qui fait vouloir la grâce donnée par Jésus-Christ. Aussi notre Maître et Seigneur, à la veille de souffrir et de mourir pour effacer nos fautes et nous infuser sa grâce, disait-il lui-même à ses disciples, comme aux Juifs: " Voici maintenant le jugement; voici que le Prince de ce monde va en être banni (Jn 16,11)1. " Et, en effet, la grâce allait nous arriver méritée par cette Passion, pour rendre les volontés des hommes vertueuses, et leur permettre de détruire complètement le royaume de Satan et de chasser celui-ci de ses demeures.

Ces mêmes vertus, qui, moyennant la grâce, chassent Satan, arrivent aussi à l'enchaîner; car l'âme fidèle, en qui la grâce réside, devient chaque jour plus forte et plus sainte, par l'augmentation de ses mérites et de sa grâce, et avec la main du Fort, non seulement elle chasse Satan l'adversaire (Lc 2,21), mais elle l'enchaîne et le tue. Les âmes des fidèles reçoivent parfois des grâces si puissantes qu'elles bannissent Satan, non seulement de leurs propres esprits, mais encore de ceux des autres; elles font plus encore, elles obtiennent du Seigneur, par leurs prières et leurs mérites, que Satan soit lié, c'est-à-dire qu'il ne puisse pas causer à ceux, dont il a été chassé, plus d'ennuis que leur salut ne le demande. Enfin, le Seigneur donne quelquefois à de telles âmes une puissance si grande qu'elles chassent même les démons des corps des possédés. Chasser le démon d'un corps n'est pas, il est vrai, chose plus difficile que de le chasser d'une âme, mais cette guérison corporelle fait plus d'effet au regard des hommes qu'une guérison spirituelle; Dieu s'en sert pour faire éclater à tous les yeux une sainteté dont il connaît les vertus et la perfection surabondantes; et cette manifestation est aussi glorieuse pour lui que salutaire aux hommes.

Revenons maintenant à notre première pensée. La vierge dont nous avons l'intention de raconter la vie a donc reçu de Dieu et pleinement possédé la chaîne des vertus, puis, grâce aux liens d'une parfaite charité, elle s'est très étroitement attachée à cette autre chaîne, qui est l'ensemble des fidèles, et, avec ces deux chaînes, elle a lié Satan. Avec la première elle annihilait le pouvoir du démon contre elle-même; avec la seconde, elle empêchait ce même démon de nuire, autant qu'il l'eût désiré, à tous les fidèles, et spécialement à ceux auxquels elle avait donné la vie dans le Christ (1Co 4,15). C'est là une vérité qui, avec la grâce de Dieu, vous apparaîtra plus claire que le jour au cours de cette histoire. Je ne faisais donc qu'exprimer simplement une réalité quand je disais en commençant avec l'Évangéliste Jean: " J'ai vu un Ange, descendant du ciel, avec la clef de l'abîme et une grande chaîne dans sa main. "; puis l'Apôtre ajoute: " Il saisit le dragon qui est appelé Diable et Satan, et il le lia pour mille ans. " Je n'insiste pas sur cette dernière partie du texte, de peur d'être trop long; mais je vous en prie, lecteur, rappelez-vous bien ces paroles et vous verrez plus loin, avec la grâce de Dieu, comment elles se sont pleinement vérifiées dans la vie de cette vierge, qu'on ne pourra jamais assez louer. Vous le verrez surtout, si vous étudiez attentivement le principe, le progrès et le terme de sa course vers Dieu. Voilà donc, autant que le Seigneur m'a permis de l'exposer, ce que j'avais à vous dire des paroles inspirées de l'Aigle, prises pour thème de notre sujet; passons maintenant au récit des actes de cette sainte vierge.





B Raymond: V. Catherine - CHAPITRE VI