Chrysostome T4 Lettres 178

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LETTRE LXX. AUX PRÊTRES MOINES APHTHONIUS, THÉODOTE ET CHÉRÉAS.

Arabisse, 406.

Je voudrais vous voir ici : mais puisque tant d'obstacles s'y opposent, j'ose vous demander, vous supplier de me prêter le secours de vos prières, toujours si efficaces. C'est un secours que le temps ne peut affaiblir, que la distance ne. peut empêcher; partout où se trouve un homme qui, comme vous, soit plein de confiance en Dieu, il lui est possible devenir puissamment en aide à ceux qui vivent loin de lui. Ne vous contentez pas de prier pour nous, donnez-nous aussi fréquemment des nouvelles de votre santé. Les flots sont de toute part soulevés contre nous, nous habitons un désert, nous sommes comme perpétuellement assiégé, sans cesse exposé aux coups des Isauriens, sans cesse menacé de mort : oui, chaque jour la mort nous menace, renfermé que nous sommes dans une forteresse semblable à une prison et épuisé de faiblesse : toutefois, malgré tant de circonstances pénibles, nous sommes consolé par votre ardente affection. Nous n'avons, il est vrai, vécu que peu de temps avec vous, mais assez pour apprécier la sincérité, la vivacité, la douceur, la fermeté, la solidité de cette affection que vous nous témoignez de loin comme de près. Aussi, bien qu'éloigné de vous et en proie à une telle affliction, nous nous reposons dans le souvenir de votre charité, comme dans un port à l'abri des orages. Votre affection, nous la regardons comme un précieux trésor. Depuis que l'hiver est passé, et que le printemps a reparu, la violence de la maladie a cessé; mais nous en avons encore les restes, qu'augmentent les troubles excités par les Isauriens. Instruits de tout cela, pensez souvent à nous, et quand vous le pourrez, écrivez-nous pour nous apprendre que vous vous portez bien.

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LETTRE LXXI. A MALCHUS.

De 404 à 407.

Ne vous laissez pas abattre, et n'imputez pas à vos péchés le décès de votre bienheureuse fille. Elle vient d'aborder à un port calme et sûr, elle vient d'entrer dans cette vie qui n'aura pas de fin; arrachée aux flots de la vie présente, la voilà désormais debout sur le roc, et tous les biens qu'elle a recueillis, sont comme renfermés dans un trésor à l'abri de tout danger. Réjouissez-vous donc, tressaillez d'allégresse, soyez heureux, d'avoir offert au souverain Maître du monde l'âme de votre fille, comme un laboureur, un fruit bien mûr. Tel est le remède que vous devez employer, vous et votre vénérable épouse, sa mère, pour accroître la récompense que vous avez déjà mérité. L'excellente éducation que vous lui avez donnée, la résignation avec laquelle vous avez supporté sa mort, si belle et si touchante, vous obtiendront les plus magnifiques récompenses.

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LETTRE LXXII. A ALPHIUS.

Cucuse, 404.

Malgré la distance qui nous sépare, nous nous réjouissons, nous tressaillons d'allégresse, en apprenant vos belles actions et cette grandeur d'âme que vous montrez envers tous ceux qui ont besoin de vos services. Nous voudrions vous voir de nos yeux et vous remercier de vive voix. Mais cela n'est point possible à cause des Isauriens qui ferment tous les chemins. Je sais bien que sans cela vous seriez ici, et que vous n'auriez rien négligé pour vous y rendre. Encore une fois, cela n'est point possible; et c'est pourquoi nous vous écrivons pour vous saluer et vous inviter à nous écrire chaque fois que vous le pourrez. Donnez-nous de bonnes nouvelles de votre santé et de celle de toute votre famille. Car, ici même, c'est pour nous une grande joie de recevoir de vos lettres.

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LETTRE LXXIII. A AGAPET.

Cucuse,404.

Il y a longtemps que nous vous avons quitté, une longue distance nous sépare; mais la charité nous rapproche, nous sommes voisins l'un de l'autre, ou plutôt vous vivez dans notre pensée, et nous suivez partout où nous allons. Cette affection sincère, vive, ardente, que vous éprouvez pour nous, reste gravée profondément dans notre coeur. Nous aussi, nous ne laissons point s'affaiblir dans notre âme la bienveillance que nous vous portons : ni le temps, ni la distance ne peut la diminuer. Je vous invite donc à nous écrire aussi souvent que vous le pourrez pour nous donner des nouvelles de votre santé. Vous savez quel intérêt nous y prenons, et quelle est notre joie, quand nous recevons de vos lettres.

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LETTRE LXXIV. A HÉSYCHIUS.

Cucuse, 404.

Je désirais vous voir; et la crainte des Isauriens ne m'en aurait pas empêché, non plus que la mauvaise santé, s'il m'eût été permis d'aller où j'aurais voulu. Quant à vous, bien que vous soyez maître de vos actes, je ne vous, presse pas de quitter votre demeure pour nous venir voir. Sans doute la saison le permettrait, et d'ailleurs ce voyage n'exigerait pas un temps bien considérable. Mais je n'oserais vous dire de venir, à cause des Isauriens. Je vous prie donc de me donner souvent des nouvelles de votre santé; les incursions des brigands rie peuvent en effet y mettre obstacle. Procurez-nous donc cette joie, je vous prie : cela ne vous est pas difficile, et vous nous ferez le plus grand plaisir. Vous n'ignorez pas en effet combien nous vous serons reconnaissant de cette bonté et de cette bienveillance à notre égard.

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LETTRE LXXV. A ARMATIUS.

Cucuse, 404.

Quoi donc? vous nous permettez d'exiger de vos subordonnés tout ce dont nous pouvons avoir besoin ; et ce que nous désirons pardessus tout, vous nous le refusez; vous ne nous écrivez pas, quand nous souhaitons si vivement d'avoir de vos nouvelles ! Ne savez-vous pas que c'est là le désir de tous ceux qui aiment véritablement, comme c'est aussi le nôtre ? Si donc vous voulez nous faire plaisir, seigneur très-vénéré, cessez, je vous en prie, d'enjoindre à vos hommes de nous obéir en ce qui regarde les besoins du corps; nous pouvons très-bien nous passer de tout ce qu'ils pourraient nous fournir. Car tout nous arrive en abondance et comme de source; mais procurez-nous vous-même ce plaisir que nous réclamons de vous; il vous suffit pour cela d'un peu d'encre et de papier. Donnez-nous, s'il vous plaît, de vos nouvelles et des nouvelles de toute votre maison. S'il eût été possible de (468) nous rencontrer, je vous aurais pressé de venir ici; et je vous aurais demandé comme une grande faveur, à vous qui nous aimez tant, de vous montrer à nos regards. Puisque les Isauriens s'y opposent, consolez-nous du moins en nous écrivant; et c'est tout ce que nous exigerons de votre part.

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LETTRE LXXVI (1). A CHALCIDIE.

Cucuse, 404.

Je souhaite fort, à la vérité, que mon seigneur le très-révérend prêtre demeure avec nous. Si, cependant, vous croyez avantageux qu'il se rende là-bas, j'aime mieux son absence et son éloignement des troubles au milieu desquels nous vivons que sa présence ici. Ne pensez donc pas qu'il y ait obstacle de notre part, si lui-même veut partir. Nous l'avons gardé jusqu'à ce jour, parce que la nature même de l'affaire ne nous paraissait pas exiger qu'il y fût, et que, d'autre part, nous aurions craint de le voir tomber entre les mains des Isauriens. Mais puisqu'il est tellement indispensable qu'il soit là-bas, nous l'exhortons à préparer son départ et nous le disposons à entreprendre ce voyage. Car, bien que séparés de corps, nous n'en serons pas moins étroitement unis par les liens de la charité. Pour ce qui vous concerne, je vous exhorte à ne point vous laisser aller au trouble au milieu des difficultés présentes. Plus les circonstances sont difficiles, plus aussi sera grand votre gain, plus seront grands le prix et la récompense que vous recevrez d'un Dieu plein d'amour pour nous, si vous supportez ce qui arrive avec courage et actions de grâces. Car, c'est ainsi que toutes ces choses deviendront plus faciles à surmonter et que le fruit acquis par votre patience sera abondant dans le ciel, en même temps que bien supérieur à toutes les souffrances endurées.

Les lettres qui précèdent ont été traduites par M. l'abbé E. JOLY.

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LETTRE LXXVII. A ASYNCRITIE.

Déjà, antérieurement, j'ai fait savoir à votre révérence que nous vous comptons parmi ceux qui sont venus de coeur jusqu'ici, et maintenant nous vous répétons que vous êtes venue par l'intention et par la pensée. Car, si la faiblesse de votre corps vous a retenue au loin, aussi bien que les troubles qui ont envahi l'Arménie, nous qui connaissons vos désirs et votre volonté, nous continuons de porter le même jugement qu'auparavant sur vos dispositions. C'est pourquoi, ne négligez point de nous écrire fréquemment, de nous marquer si la maladie vous a quittée, et tout ce qui intéresse votre santé. Nous avons été fort affligé d'apprendre que vous étiez souffrante. Faites-nous donc savoir au plus vite si vous avez passé de la maladie à la santé, afin que nous soyons délivré de nos inquiétudes sur ce point.

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LETTRE LXXVIII. AU PRÊTRE ROMAIN.

Cucuse, 405.

Ce n'est pas jusque dans l'Arménie seulement, ou dans la Cappadoce, mais jusque dans les régions les plus éloignées, qu'est parvenu le bruit de la charité et de la bienveillance que vous ne cessez de témoigner à notre égard, et le retentissement en a été plus éclatant que celui de la trompette. Aussi, nous nous glorifions de cette disposition de votre piété envers nous et nous ne cessons devons louer. Mais nous avons besoin que vous nous teniez au courant de votre santé. Car, bien que nous vivions dans ce désert où nous sommes si éloigné de vous, nous ne vous sommes pas moins uni par les liens de la charité, gardant pour votre révérence ces mêmes dispositions dont nous avons fait preuve dès le commencement, mais devenues plus vives et plus chaleureuses. A cet égard, ni le temps ni la distance n'ont pu nous rendre oublieux; ils ont produit l'effet tout contraire. Sachant cela, très-pieux et très-révérend maître, et songeant aux plaisirs que nous causeront vos lettres (469) fréquentes, écrivez-nous des nouvelles de votre santé. Mais, avant tout, souvenez-vous de nous dans vos saintes prières afin que, même séparé de vous par de si longues distances, nous ressentions ici l'effet puissant de votre participation dans nos combats.

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LETTRE LXXIX. A GEMELLUS.

Cucuse, 404 ou 405.

Comment se fait-il donc, lorsqu'une si grande et si illustre cité voit chacun de ses jours devenus des jours de fêtes, — car c'est ainsi que j'appelle le temps de votre magistrature, — nous seul soyons plongé dans une tristesse plus grande, causée par ce long silence dans lequel vous vous renfermez? Si quelqu'un de ceux qui appartiennent à la foule eût agi de la sorte, j'en eusse peut-être facilement trouvé la raison; mais ici je la cherche. La plupart des hommes ont coutume, lorsqu'ils parviennent à une position plus élevée, de concevoir un nouveau sentiment d'orgueil; mais pour vous, que la grandeur n'empêche point de considérer toutes choses avec philosophie, qui connaissez parfaitement la nature fragile et instable des choses humaines, qui n'êtes point déçu par le dehors et les apparences, qui jugez tout selon la réalité pure, je ne puis trouver la cause de ce silence. Car, je sais que vous nous aimez présentement autant que par le passé, plus même que par le passé. Pourquoi donc, étant ainsi disposé, êtes-vous demeuré muet pendant un temps si long? C'est ce que je ne puis dire, et mes incertitudes s'augmentent précisément en raison de cela. Donnez-moi par une lettre l'explication de cette énigme, si cette explication ne vous est pas trop difficile ou désagréable. Et, avant toute lettre de votre part, dites aux porteurs de celle-ci, je veux dire à mon maître, le prêtre très-vénérable et très-pieux, et à ceux qui l'accompagnent, ce dont nous sommes persuadé, savoir qu'il n'y a rien dans ce silence qu'on doive imputer à votre négligence. Cette parole suffira pour qu'ils soient assurés du bienveillant accueil de votre magnificence.

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LETTRE LXXX. A FIRMIN.

Cucuse, 404.

Votre manque de santé nous a causé grand dommage, puisqu'il nous a privé de votre présence; mais il n'a eu absolument aucun pouvoir sur notre affection. Car, il vous a suffi d'être venu une fois près de nous pour nous inspirer aussitôt le plus vif attachement. C'est ce qu'il ne faut attribuer qu’à vous-même qui, dès le début, vous êtes montré si fort affectionné et l'avez été sans mesure, ne nous laissant pas même le temps de délibérer; vous à qui il a suffi de vous présenter pour nous captiver et pour nous attacher à vous par les liens les plus puissants. Nous vous écrivons donc, et nous voulons vous apprendre ce que vous désirez surtout nous entendre dire. Quelles sont ces choses que vous voulez savoir? Notre santé est bonne. Nous avons accompli notre voyage avec sécurité. Nous vivons ici dans la paix et dans le plus grand calme. Nous jouissons de la bienveillance de tous, et nous goûtons une indicible consolation. Personne ne nous suscite de troubles; nul ne soulève d'embarras. Pouvez-vous être étonné que notre séjour dans cette ville soit si tranquille, après que notre route elle-même s'est achevée si heureusement? Mais à votre tour, instruisez- nous de ce qui vous concerne, afin qu'après vous avoir réjoui par nos récits, nous nous réjouissions aussi en recevant des nouvelles de votre santé. Car, vous n'ignorez pas quel grand bonheur éprouvent ceux qui aiment lorsqu'ils peuvent apprendre quelque chose d'heureux concernant ceux qu'ils chérissent.

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LETTRE LXXXI. AU PREMIER MÉDECIN HYMNÉTIUS.

Cucuse, 404.

Nous ne cesserons jamais de vous louer devant tout le monde comme un homme excellent, comme le médecin le plus habile, et comme sachant aimer sincèrement. Car, toutes les fois que l'on vient à parler ici de ma (470) mauvaise santé, vous vous trouvez mêlé nécessairement à nos discours, et parce que nous avons fait l'épreuve de votre science et de votre bienveillance, nous ne pouvons taire vos oeuvres merveilleuses, nous nous en faisons le héraut, avec un grand plaisir pour nous-même. Vous nous avez, en effet, inspiré un tel sentiment d'amitié que, bien que nous jouissions d'une bonne santé, nous donnerions encore beaucoup pour vous attirer ici, dans le seul but de vous voir. Mais, puisque cela est impossible, tant par suite des difficultés de la route que par la crainte des Isauriens, nous ne voulons pas quant à présent insister plus longtemps sur ce point. Nous vous demandons seulement de nous écrire souvent. Vous pourrez, par vos lettres fréquentes, nous procurer la joie que nous donnerait votre présence, en les imprégnant de cette douceur du miel qui est dans vos moeurs.

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LETTRE LXXXII. A CYTHÉRIUS.

Cucuse, 404.

Votre présence ici, près de nous, a été courte et, cependant, l'affection que nous avons conçue pour vous est grande, forte et profonde. Pour ceux qui savent ce qu'est l'amitié vraie, il n'y a pas besoin de la longueur du temps, et il est possible d'arriver au but dans un bref délai. C'est ce qui s'est rencontré pour nous puisque nous sommes aussi amis que si nous l'étions depuis fort longtemps. C'est pour cela que nous vous écrivons ce qui nous concerne, vous faisant savoir que nous avons santé, paix et tranquillité. Nous sommes persuadé que nous vous serons agréable, en vous écrivant ces choses. En retour, nous attendons de vous des lettres qui nous apportent la même joie. Ne craignez pas de nous écrire souvent et de nous donner de bonnes nouvelles de votre santé. De la sorte, vous nous réjouirez beaucoup, nous adressant sur cette terre étrangère les nouvelles que nous désirons recevoir souvent.

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LETTRE LXXXIII. A LÉONTIUS.

Cucuse, 404

Nous sommes exilé de votre cité, mais non de votre charité. L'une de ces choses était en notre pouvoir;. il était au pouvoir d'autrui que nous pussions demeurer ou qu'il nous fallût partir. Personne ne pourra nous priver du droit d'emporter, en quelque lieu que nous allions, le miel de votre charité. Nous nourrissons notre mémoire du souvenir de votre grande âme, réunissant votre zèle affectueux, votre prudence, votre bienveillance, votre hospitalité et toutes vos diverses qualités pour cri former une image qui soit celle de votre vertu. Mais, puisque vous nous avez, ainsi gagné et subjugué, et que, désirant votre présence, nous ne pouvons l'obtenir en ce moment, accordez-nous la consolation de vos lettres. Car votre esprit ingénieux pourra faire que, par la fréquence de vos lettres, nous croirons éprouver la joie de votre présence.

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LETTRE LXXXIV. A FAUSTIN.

Cucuse, 404.

Nous sommes arrivé à Cucuse en bonne santé, — car nous commencerons cette lettre par où vous souhaitez de nous la voir commencer, — et nous avons trouvé le pays exempt de tout trouble, plein de loisirs et de paix, et personne qui nous soit ennemi ou qui gêne notre repos. Et il n'y a rien d'étonnant si notre situation. est. telle dans cette ville, puisque nous avons traversé la route la plus déserte, la moins sûre, la plus suspecte qui conduit en ce lieu, sans difficulté et sans terreur, jouissant d'une sécurité plus grande qu'au milieu des villes les mieux policées. Pour ces bonnes nouvelles que nous vous envoyons, donnez-nous;, à titre de récompense, des lettres fréquentes concernant votre santé; car, au milieu de notre profonde tranquillité, nous nous rappelons saris cesse la noblesse de votre esprit, votre loyauté, votre haine du mal, la franchise de vos discours, enfin toutes ces vertus qui (471) forment comme une prairie émaillée, et nous gardons ce souvenir, le portant avec nous en quelque endroit que nous allions, animé pour vous d'une affection qui dépasse toute limite. Aussi, désirons-nous que vous veniez ici et que nous puissions vous voir; mais, puisque cela est impossible, nous tournerons d'un autre côté notre voile, en vous demandant la consolation de vos lettres. Ce sera pour notre esprit un grand soulagement, si nous recevons de vous de fréquentes lettres et de bonnes nouvelles de votre santé.

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LETTRE LXXXV. A LUCIUS, ÉVÊQUE.

404.

Bien que nous soyons séparé par de longues distances de votre piété, nous n'avons pas cependant ignoré l'aversion que vous avez montrée pour les aeuvres des méchants, ni combien vous avez gémi sur ceux qui sont les auteurs de si grandes énorrnités et qui ont rempli la terre de tarit de scandales. C'est pourquoi nous vous rendons des actions de grâces et nous ne cessons de vous féliciter et dé vous glorifier, parce que, au milieu de si grandes infamies des méchants, lorsque tant d'autres se laissaient entraîner au précipice ou briser contre les écueils, vous n'avez jamais cessé de marcher dans le droit sentier, blâmant le mal qui se faisait et vous séparant de ceux qui les commettaient, ainsi qu'il était convenable. Nous vous exhortons donc à persévérer dans cette louable ardeur, et même à donner un accroissement à votre zèle; car vous savez combien est grand le salaire, quelles sont les récompenses et quelles sont les couronnes réservées à ceux qui, malgré les agitations, ont gardé la droiture et se sont efforcés de corriger les maux présents. Et, bien qu'en petit nombre, si vous avez résolu de demeurer fermes, vous vaincrez, sans nul doute, le grand nombre de ceux qui se glorifient dans leur malice. Il n'est rien de plus fort que la vertu et la disposition où vous êtes de chercher cela seul qui affermit les Eglises. Ayant donc déjà une disposition d'esprit propre à vous attirer le puissant secours de Dieu, faites encore appel à votre propre énergie, et, pour la fermeté de votre sentiment, vous serez un rempart très-fort pour toutes les Eglises de la terre.

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LETTRE LXXXVI. A MARÈS, ÉVÊQUE.

404.

Lorsque commença cette tempête, qui a jeté le trouble dans l'Eglise, votre intégrité et votre constance ne nous ont point échappé, et maintenant que le mal s'est accru, nous savons que votre piété persévère dans les mêmes voies. A cause de cela, séparé par une si grande distance, nous vous adressons en retour le tribut de salutations qui vous est dû; nous vous louons et nous vous félicitons, parce que, la plupart ayant échoué contre les écueils au temps où toute justice était violée à l'égard des Eglises, vous avez suivi une voie opposée à celle du grand nombre, en vous éloignant des audacieux et gardant une liberté digne. Considérant la grandeur de cette conduite courageuse, qui vous écarte des méchants, et sachant que votre fermeté et votre constance sont le prélude du redressement des pervers autant que le moyen d'y parvenir, nous vous exhortons à vous montrer fort, ainsi qu'il vous convient, et à fortifier les autres autant qu'il est en vous. De la sorte, votre attitude nous viendra en aide dans la lutte; car Dieu lui-même, qui vous a donné une volonté droite lorsque tout était confusion autour de vous, vous accordera également la force qui vient de lui.

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LXXXVII. A EULOGIUS, ÉVÊQUE.

404.

Bien que nous soyons parvenu aux extrémités les plus reculées de la terre habitable, nous ne pouvons oublier votre charité; nous l'emportons avec nous en quelque endroit que nous allions. Vous nous avez tellement gagné et captivé, très-pieux et très-vénéré maître, que, relégué maintenant à Cucuse, dans le lieu le plus désert de toute la terre, nous ne cessons de faire mention de votre excellence, de votre douceur, de vos moeurs aimables, de la (472) franchise de votre esprit, de votre ardeur, de votre véhémence, de votre zèle plus brûlant que le feu, de toutes vos autres vertus, et, repassant tout cela dans notre mémoire, nous publions devant tous la fermeté de vos résolutions, la constance que vous avez montrée contre les ennemis des Eglises, qui ont rempli toute la terre de tant de scandales. Toutefois, il n'est pas besoin ici de nos paroles, puisque vous-même vous avez parlé par vos couvres à tous ceux qui habitent l'Orient et à ceux qui vivent dans les contrées les plus lointaines, d'une voix plus éclatante que le son de la trompette. Aussi, nous vous rendons grâces pour cela, nous vous glorifions, nous vous félicitons, et nous vous exhortons à demeurer dans ces mêmes dispositions de zèle; car la louange n'est pas égale pour celui qui reste dans le droit chemin, en des circonstances où les affaires suivent leur cours ordinaire, et pour celui que rien ne peut faire dévier, qui se montre inébranlable, malgré le nombre de ceux qui entreprennent de bouleverser les Eglises, en s'éloignant d'eux avec une fermeté virile et digne. Et ce n'est pas là un faible moyen, mais un très-puissant moyen de corriger le mal. Que si votre piété persévère dans ces sentiments, tous nos seigneurs très-vénérés et très-pieux les évêques de la Palestine s'attacheront à vos pas, je ne puis en douter. Et je suis convaincu que dans ce retour au bien, de même que le corps suit la tête, ainsi vous les attacherez, vous les enchaînerez par la douceur de votre charité, ce qui sera la preuve la plus grande de votre vertu.

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LETTRE LXXXVIII. A JEAN, ÉVÊQUE DE JÉRUSALEM.

Nous sommes exilé à Cucuse, mais nous ne sommes pas exilé de votre charité. L'une de ces choses était au pouvoir d'autrui, l'autre en .notre pouvoir. C'est pourquoi, vivant ici à une si grande distance de vous, nous vous écrivons pour vous exhorter de garder cette "même piété et ce même courage que vous avez montrés dès le commencement en rejetant ceux qui ont rempli les Eglises de tant de troubles, et afin que la fin soit digne du commencement, ou plutôt afin qu'elle soit encore beaucoup plus glorieuse. Car, ce n'est pas une légère récompense qui vous attend si, comme il convient, vous rejetez ceux qui ont déchaîné une si grande tempête et qui ont rempli de tant de scandales la terre presque entière, si vous n'avez avec eux rien qui vous soit. commun. Là est la sécurité des Eglises, leur rempart assuré; là est votre récompense et le prix du combat. Donc, sachant toutes ces choses, Maître très-vénéré et très-pieux, efforcez-vous de consolider les Eglises en attendant la récompense la plus riche, et souvenez-vous continuellement de nous qui aimons de toutes nos forces votre piété et qui attendons tout de votre bienveillance, parce que nous avons appris par vos couvres elles-mêmes de quelle grande charité vous êtes animé pour nous.

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LETTRE LXXXIX. A THÉODOSIUS, ÉVÊQUE DE SCYTHOPOLIS.

Cucuse, 404.

Si l'on considère la distance qui nous sépare de vous, nous sommes bien éloigné; mais par la charité nous sommes tout proche et voisin, et notre âme elle-même est unie à la vôtre. Car, il en est ainsi pour ceux qui aiment le lieu n'est point un obstacle, la longue distance n'est pas un empêchement, mais la charité parcourt de son. vol toute la terre pour vivre avec ceux qui sont aimés. C'est ce dont nous faisons maintenant l'expérience, emportant partout dans notre esprit la pensée de votre personne. Et aussi, nous vous exhortons à agir comme vous l'avez fait jusqu'à ce jour, et comme vous le faites maintenant encore, consolidant les Eglises et augmentant tarit à la fois votre gloire, repoussant avec une énergie digne de vous ceux qui ont suscité tant de troubles dans toute la terre et qui ont bouleversé les Eglises. Quand vous, et tous ceux que la contagion n'a pas atteints, vous résisterez à ceux qui ont commis de tels forfaits et refuserez d'avoir avec eux rien de commun, alors nous commencerons à voir s'éloigner l'orage, alors la paix sera rendue aux Eglises, alors viendra le remède de tous les maux présents. Considérez donc la récompense et les couronnes qui vous sont réservées, efforcez-vous de déployer la fermeté qui convient en de telles circonstances et souvenez-vous sans (473) cesse que nous vous aimons. De la sorte vous nous réjouirez grandement.

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LETTRE XC. A MOÏSE, ÉVÊQUE.

404.

Je sais qu'il n'est pas besoin de vous écrire pour vous exhorter à faire preuve d'une fermeté digne et à fuir ceux qui ont commis tant d'iniquités contre les Eglises en remplissant de troubles toute la terre ; vous l'avez montré par vos oeuvres. Mais parce que, de tout temps, et en toute circonstance je me suis empressé de vous offrir mes salutations, maintenant aussi je vous exhorterai à vous armer de la fermeté nécessaire pour repousser ceux qui ont commis de tels excès et pour exhorter les autres à vous imiter. Car, la récompense sera grande si vous savez, comme il convient, vous détourner de ceux qui ont soulevé une si grande tempête et rempli le monde de milliers de scandales, et ce sera par là que l'état des affaires recevra la plus grande amélioration. Souvenez-vous toujours que nous vous aimons beaucoup. Vous savez quelles ont toujours été et quelles sont encore nos dispositions à l'égard de votre piété.

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LETTRE XCI. AU PRÊTRE ROMAIN.

Cucuse, 404.

Il était digne de vous, de votre esprit noble, élevé et sage, de ne point oublier notre amitié au milieu d'un tel bouleversement, mais de rester inébranlable et de nous garder une affection constante. Car c'est là ce que nous avons appris clairement de ceux qui sont venus jusqu'ici, ce que nous n'ignorions pas avant de l'apprendre des autres. Nous connaissons la fermeté et la constance de votre esprit, la fixité et la solidité de vos résolutions. C'est pourquoi, nous rendons de grandes actions de grâces à votre religion et nous encourageons votre piété, vous demandant comme une faveur signalée de nous écrire souvent, lorsque vous en aurez la possibilité, puisque vous savez quelle grande consolation nous éprouvons sur cette terre étrangère lorsque nous recevons des lettres qui nous annoncent de bonnes nouvelles de votre santé. Nous désirons vivement que votre religion conserve sa santé et sa vigueur, puisque votre santé est pour plusieurs le bâton de secours, l'appui, le port du salut, et la première cause de mille bonnes actions.

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LETTRE XCII. A MOÏSE, PRÊTRE.

404 à 40.

L'excès des louanges contenues dans les lettres de votre révérence surpasse de beaucoup notre néant. C'est pourquoi, laissant de côté ces choses, je vous demande de ne point cesser de prier pour le bien général des Eglises et pour notre bassesse auprès d'un Dieu plein d'amour pour les hommes, afin qu'il mette un terme aux maux qui ont envahi la terre. Car la situation présente réclame seulement des prières, et surtout les vôtres qui ont un grand crédit devant Dieu; ne négligez pas de les renouveler assidûment, et ne craignez pas de nous écrire souvent, lorsque vous en aurez la liberté, puisque la route n'est pas longue jusqu'ici. Nous désirons vivement des nouvelles de votre santé, parce que cette santé est la force et la consolation de plusieurs. La durée de votre vie serait nécessaire en tout temps, mais elle l'est surtout maintenant dans une telle tempête et de si épaisses ténèbres, afin que, comme un phare brillant, vous éclairiez ceux qui sont ballottés par l'orage et par les flots. Réjouissez aussi notre coeur en nous envoyant de fréquentes lettres et des nouvelles de votre santé ; ce ne sera pas pour nous une médiocre consolation d'être sans cesse informé de tout ce qui concerne votre révérence.


LETTRE XCIII. A APHTHONIUS, THÉODOTE, CHÉRÉAS, PRÊTRES ET MOINES, ET A TOUTE LEUR COMMUNAUTÉ.

La présence de ceux qui sont aimés est pour ceux qui aiment un grand soulagement dans (474) leurs douleurs. Le bienheureux Paul, qui portait souvent ou plutôt toujours dans sa pensée toutes les contrées habitées par les fidèles, qui ne voulait se décharger de ce fardeau ni dans les liens, ni dans les entraves, ni dans le temps même où il paraissait devant ses juges, ce qu'il témoigne lorsqu'il dit: Parce que je vous porte dans mou coeur, et dans mes liens, et dans la défense et dans la confirmation de l'Evangile, (Ph 1,7), cependant désirait avec ardeur la présence de corps, puisqu'il parle ainsi : Eloigné de vous pour ion temps, non de coeur, mais de corps, nous désirons avec plus de force de voir votre face. (1Th 2,17) Nous éprouvons ces mêmes sentiments, et nous souhaitons ardemment la présence de ceux que nous avons déjà vus, et celle de ceux que nous n'avons pas encore vus. Mais, puisque ce désir ne peut être satisfait présentement à cause de la longueur de la route, de la saison, de la crainte des voleurs, et aussi parce qu'il ne nous est pas facile de sortir de notre demeure pour entreprendre de longues pérégrinations, nous nous contentons de vous envoyer les salutations qui vous sont dues, vous sollicitant d'abord et vous demandant, à titre de grâce singulière, de vous souvenir de prier continuellement pour nous, de vous- prosterner devant le Dieu des miséricorde, avec ferveur et avec larmes, pour notre humilité. Vous qui avez fui les flots agités des affaires humaines, qui avez échappé au tourbillon des maux présents et à l'obscurité qu'ils engendrent, qui avez abrité vos âmes dans le port de la vraie philosophie comme dans un lieu sûr et exempt de l'agitation des mers, qui avez fait de la nuit le jour par vos veilles sacrées, et un jour plus éclatant que celui auquel les autres donnent ce nom; accordez-nous dans nos combats le secours de vos prières, ainsi qu'il est juste. Placé à de si grandes distances nous pourrons néanmoins en ressentir l'efficacité; ni le lieu, ni le temps ne nous priveront de cet appui. Combattez donc avec nous et tendez-nous la main à l'aide de vos prières. C'est la manière la plus puissante d'exercer la charité. En même temps que vous prierez pour nous, ne craignez pas de nous transmettre des nouvelles de votre santé; nous y trouverons une grande consolation, nourrissant notre esprit du souvenir de votre charité et vous ayant en quelque sorte devant les yeux, comme si vous étiez présents. Car l'amour véritable peut ainsi retracer les traits des absents. Et de la sorte, même dans ce désert aride où nous vivons, nous éprouverons une grande joie.

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LETTRE XCIV. A PENTADIE, DIACONESSE.

De 404 à 405.

Je connaissais déjà votre charité pour nous, l'ayant apprise par vos oeuvres ; mais elle est devenue aujourd'hui plus manifeste par tout ce que vous m'avez écrit. Nous vous louons grandement,, non pour cela seul que vous nous avez écrit; Tuais parce que vous nous avez mandé tout ce qui était arrivé. Vous avez prouvé que vous avez confiance en nous, et que vous avez souci de nos affaires. C'est pourquoi nous avons tressailli, nous nous réjouissons, et notre esprit est dans l'allégresse; nous éprouvons une très-grande consolation, même au milieu de ce désert, à cause de votre force, de votre constance, de votre fermeté inébranlable, de votre prudence, de la liberté de votre parole, de votre confiance sublime qui a couvert de confusion nos adversaires et causé au démon une plaie mortelle. Vous avez fortifié ceux .-qui combattaient pour la vérité; comme un guerrier généreux, vous avez élevé sur le champ de bataille un glorieux trophée; vous avez moissonné une victoire éclatante, et vous nous avez rempli d'une joie si grande, que nous ne pensions plus habiter un pays étranger, une terre étrangère, un désert; mais qu'il nous semblait être là, être avec vous et nous rassasier auprès de vous de la vertu de votre âme.

Réjouissez-vous donc et soyez dans l'allégresse d'avoir remporté une telle victoire, dompté si facilement la rage de ces bêtes farouches, mis un frein à ces langues impudentes, et fermé ces bouches furieuses. La vérité pour laquelle vous avez combattu, pour laquelle vous avez été immolée, triomphe de la calomnie avec un petit nombre de paroles ; mais le mensonge qui s'enveloppe dans les mille détours du langage, succombe et disparaît, n'ayant pas plus de consistance que la toile de l'araignée. Réjouissez-vous donc et soyez dans l'allégresse, — car je ne cesserai pas de répéter ces mêmes paroles, — prenez courage et ranimez vos (475) forces, et vous vous rirez de toutes les embûches qui vous sont tendues par de tels adversaires. Car, plus leurs coups sont cruels, plus ils se font à eux-mêmes des blessures profondes, tandis que leurs injustices ne vous atteignent pas. Comme les flots se brisent contre le rocher, ainsi se brise contre votre fermeté leur rage impuissante, et cependant ils accumulent sur leurs têtes des châtiments épouvantables. Ne craignez donc pas leurs menaces, ni leurs grincements de dents, ni l'ivresse de leurs colères, ni leurs regards qui respirent le meurtre depuis que la perversité leur a donné la cruauté des bêtes sauvages. Celui qui jusqu'à ce jour vous a délivrée de leurs nombreuses embûches, vous établira encore dans une sécurité plus grande, parce que vous vous serez montrée vaillante, et vous direz aussi : Les flèches des méchants sont devenues la cause de leurs plaies, et la puissance de leur langue s'est tournée contre eux. (Ps 63,8) C'est ce qui est arrivé et ce qui arrivera de nouveau, afin que vous receviez une récompense plus grande, que vous remportiez une couronne plus brillante, et qu'eux-mêmes, éloignés du repentir, se préparent un châtiment plus redoutable. Quel genre d'embûches ont-ils omis ? quelle sorte de machinations n'ont-ils pas employées lorsqu'ils ont entrepris d'ébranler votre fermeté, votre fidélité à Dieu, lorsqu'ils ont attaqué votre âme généreuse et forte ? Ils vous ont conduite sur la place publique, vous qui ne connaissiez que l'église et le secret de votre demeure, de la place publique au tribunal, du tribunal à la prison. Ils ont aiguisé la langue des faux témoins, ils ont forgé des calomnies impudentes, ils ont perpétré des meurtres, ils ont fait couler le sang à flots, ils ont fait périr de jeunes hommes par le fer et par le feu, ils ont couvert de plaies, d'outrages et de tortures diverses des citoyens nombreux et considérables par le rang, ils ont tout osé pour arriver à vous forcer et à vous contraindre par la terreur de, dire le contraire de ce que vous aviez vu. Comme l'aigle qui s'élève dans les airs, vous avez rompu leurs filets, vous élevant vers les hauteurs de la liberté, ne vous laissant point circonvenir, mais dévoilant les sycophantes au sujet de cette accusation d'incendie sur laquelle les misérables et les insensés fondaient leur espoir. Rappelez-vous donc tout ce passé, ces flots, cette tempête soulevée contre vous, cette mer agitée et furieuse au milieu de laquelle vous avez navigué avec calme, et attendez dans un bref délai le port et les couronnes. Et, puisque vous voulez aussi que nous vous parlions de nous, sachez que nous sommes vivant, que nous sommes en bonne santé, que - nous sommes exempt de toute maladie. Si nous étions malade, nous n'aurions pas besoin d'autre remède pour nous rendre la santé que votre piété et votre charité sincère, ardente, ferme, inébranlable ! Mais, parce que nous aimons à apprendre fréquemment des nouvelles de votre santé et de votre sécurité pont tout ce qui vous concerne, nous vous exhortons, ainsi que vous avec coutume de le faire, sans attendre nos exhortations, à nous écrire très-souvent sur votre santé, sur toute votre maison, sur tout ce qui vous touche. Vous savez combien est grand notre souci pour vous et pour votre maison bénie.


LETTRE XCV. A PAEANIUS.

Les événements survenus sont déplorables; il ne faut pas pleurer sur ceux qui en ont été les victimes et qui ont souffert avec courage, mais sur ceux qui en sont les auteurs. De même que les animaux sauvages les plus difficiles à percer du trait mortel, emportés par leur impétuosité et tombant sur la pointe du glaive, en font pénétrer le tranchant jusqu'au plus profond de leurs entrailles, de même ceux dont l'audace accomplit de tels forfaits attirent sur leur tête les rudes tourments de la géhenne. S'ils se glorifient de ce qu'ils ont fait, ils sont d'autant plus misérables et dignes de plus de larmes, parce que de la sorte ils se préparent des châtiments plus grands. Ce sont ceux-là qu'il faut pleurer sans cesse; mais on doit se réjouir avec ceux qu'ils ont immolés et qu'attendent dans le ciel les couronnes et le prix du combat, on donnera ainsi la preuve la plus grande et la plus manifeste du coup mortel porté au démon. Et s'il n'avait pas reçu ce coup mortel, il n'aurait pas poussé de si grands cris par la bouche de ceux qui lui obéissent. Envisageant toutes ces choses, mon maître vénéré. vous en tirerez une grande consolation. Ecrivez-nous souvent touchant votre santé. Nous aurions le désir de voir et d'embrasser (476) votre tête chérie, mais puisque cela ne nous est pas permis, nous attendons de vos bons sentiments que vous nous écrirez souvent concernant votre santé, et que sur ce point, vous vous montrerez bienveillant pour ceux qui nous aiment.


Chrysostome T4 Lettres 178