2002 Magistère Mariage 1709

II. Contenu essentiel de la doctrine ecclésiale.

Pour faciliter la compréhension, le contenu essentiel des déclarations magistérielles sur ce sujet (1) sera résumé en huit thèses, et brièvement commenté.
(1) Les textes de référence essentiels sont le numéro 84 de l'exhortation apostolique Familiaris consortio FC 84, ainsi que l'allocution du pape que nous venons de mentionner (Discours) et les affirmations sur ce sujet du Catéchisme de l'Eglise catholique (CEC). Dans un panorama des déclarations magistérielles, on doit également prendre en compte le document publié par la Congrégation pour la doctrine de la foi, la Lettre aux évêques de l'Eglise catholique sur la réception de la communion eucharistique de la part de fidèles divorcés remariés (Lettre).

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1 - Les fidèles divorcés remariés se trouvent dans une situation qui contredit objectivement l'indissolubilité du mariage.
Par fidélité à l'enseignement de Jésus, l'Eglise reste fermement convaincue que le mariage est indissoluble. Le concile Vatican II enseigne: "Cette union intime, don réciproque de deux personnes, non moins que le bien des enfants, exigent l'entière fidélité des époux et requièrent leur indissoluble unité" GS 48. L'Eglise croit que personne - pas même le pape - n'a le pouvoir de dissoudre un mariage sacramentel conclu et consommé CIC 1141. Aussi ne peut-elle pas "reconnaître comme valide une nouvelle union, si le précédent mariage était valide" Lettre, 4 . Une nouvelle union civile ne peut pas dissoudre le précédent lien matrimonial sacramentel. Elle se situe donc objectivement en contradiction directe avec la vérité du lien matrimonial indissoluble qui demeure.
Pour cette raison, il est interdit "pour quelque motif ou sous quelque prétexte que ce soit, même d'ordre pastoral, de célébrer, en faveur de divorcés qui se remarient, des cérémonies d'aucune sorte" FC 84. Ces cérémonies donneraient en effet l'impression qu'il s'agit de la célébration d'un nouveau mariage sacramentel et videraient de sa force la doctrine sur l'indissolubilité du mariage.

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2 - Les fidèles divorcés remariés demeurent membres du peuple de Dieu et doivent faire l'expérience de l'amour du Christ et de la proximité maternelle de l'Eglise.
Bien que ces, fidèles vivent dans une situation qui contredit le message de l'Evangile, ils ne sont pas exclus de la communion ecclésiale. Ils " sont et demeurent ses membres, car ils ont reçu le baptême et conservent la foi chrétienne" Discours, 2 . Pour ce motif, les documents magistériels parlent habituellement de fidèles divorcés remariés et non pas simplement de divorcés remaries.
Ceux qui souffrent en raison de relations familiales difficiles ont tout particulièrement besoin de l'amour pastoral. L'Eglise est appelée à être proche d'eux, à l'exemple de Jésus qui n'excluait personne de son amour. " Elle doit donc s'efforcer, sans se lasser, de mettre à leur disposition les moyens de salut qui sont les siens" FC 84.
Les pasteurs sont appelés à s'intéresser, en restant discrets, aux fidèles qui se trouvent dans ce cas. Pour cela, ils doivent bien discerner les situations différentes. Certains ont détruit leur union matrimoniale par une faute grave de leur part; d'autres ont tout simplement été abandonnés par leur conjoint; certains sont convaincus en conscience de la nullité de leur précédent mariage; d'autres se sont remariés principalement à cause de l'éducation des enfants; enfin, il y a aussi ceux qui, au cours de leur seconde union, ont redécouvert la foi et ont déjà parcouru un long chemin de pénitence FC 84 Lettre, 3 .
A partir de cette distinction, qui tient compte du caractère particulier des différentes situations, les pasteurs indiqueront aux fidèles intéressés des chemins concrets de conversion et de participation à la vie ecclésiale. Avec le Synode des évêques de 1980, Jean Paul II a invité toute l'Eglise à s'intéresser aux fidèles qui se trouvent dans des conditions matrimoniales difficiles et à ne pas les traiter avec indifférence ou reproches. "Que l'Eglise prie pour eux, qu'elle les encourage et se montre à leur égard une mère miséricordieuse, et qu'ainsi elle les maintienne dans la foi et l'espérance" FC 84. "Les pasteurs et la communauté des fidèles devront nécessairement souffrir et aimer avec les intéressés, pour que ceux-ci reconnaissent, même au sein de leurs difficultés, le joug facile et le fardeau léger de Jésus Mt 11,30. Leur fardeau n'est pas doux et léger parce que petit ou insignifiant, mais il devient léger parce que le Seigneur - et avec lui toute l'Eglise - y prend sa part. L'action pastorale qui doit être menée avec un dévouement total se doit de fournir cette aide fondée dans la vérité et aussi dans l'amour " Lettre, 10 .

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3 - Comme baptisés, les fidèles divorcés remariés sont appelés à participer activement à la vie de l'Eglise, dans la mesure où cela est compatible avec leur situation objective.
Les fidèles divorcés remariés peuvent assurément participer à de nombreuses réalisations de l'Eglise: "On les invitera à écouter la Parole de Dieu, à assister au sacrifice de la messe, à persévérer dans la prière, à apporter leur contribution aux oeuvres de charité et aux initiatives de la communauté en faveur de la justice, à élever leurs enfants dans la foi chrétienne, à cultiver l'esprit de pénitence et à en accomplir les actes, afin d'implorer, jour après jour, la grâce de Dieu" FC 84.
Dans son allocution de 1997, le Saint-Père souligne en particulier le sens de l'éducation des enfants: " Un chapitre très important concerne la formation humaine et chrétienne des enfants de la nouvelle union. Leur faire connaître tout le contenu de la sagesse de l'Evangile, selon l'enseignement de l'Eglise, est une oeuvre qui prépare merveilleusement les coeurs des parents à recevoir la force et la clarté nécessaires pour surmonter les difficultés réelles qui se trouvent sur leur route et pour retrouver la pleine transparence du mystère du Christ que le mariage chrétien signifie et réalise" Discours, 4 .
A côté des aspects que l'on vient de mentionner, la lettre de la Congrégation pour la doctrine de la foi souligne également la signification de la communion spirituelle: "Il faut aider les fidèles à approfondir leur compréhension de la valeur de leur participation au sacrifice du Christ dans la messe, de la communion spirituelle, de la prière, de la méditation de la Parole de Dieu, des oeuvres de charité et en faveur de la justice" Lettre, 6 .
Il est important de réaffirmer que les fidèles intéressés peuvent et doivent participer, sous de multiples formes, à la vie de l'Eglise. La participation à la vie ecclésiale ne peut être réduite à la question de la réception de la communion, comme cela se produit malheureusement trop souvent.

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4 - A cause de leur situation objective, les fidèles divorcés remariés ne peuvent pas être admis à la sainte communion; ils ne peuvent pas non plus accéder de leur propre initiative à la Table du Seigneur.
Après avoir, dans Familiaris consortio, invité les fidèles intéressés à participer à la vie ecclésiale, sous de multiples aspects, le pape affirme clairement: " L'Eglise, cependant, réaffirme sa discipline fondée sur l'Ecriture sainte, selon laquelle elle ne peut admettre à la communion eucharistique les divorcés remariés" FC 84. Cette norme n'est pas un règlement purement disciplinaire, qui pourrait être changé par l'Eglise. Elle découle d'une situation objective qui, de soi, rend impossible l'accès à la sainte communion. Jean Paul II exprime ce fondement doctrinal par les paroles suivantes: "Ils se sont rendus eux-mêmes incapables d'y être admis car leur état et leur condition de vie sont en contradiction objective avec la communion d'amour entre le Christ et l'Eglise, telle qu'elle s'exprime et est rendue présente dans l'eucharistie" FC 84. A cette raison fondamentale s'en ajoute une seconde, qui est de nature plus pastorale: "Si l'on admettait ces personnes à l'eucharistie, les fidèles seraient induits en erreur et comprendraient mal la doctrine de l'Eglise concernant l'indissolubilité du mariage" FC 84.
Certains théologiens ont objecté que cette norme ne rendrait pas justice au discernement, demandé par le pape, des situations diverses; on devrait tenir compte de chaque cas particulier et faire preuve de souplesse quant au problème de la réception de la communion. Cette opinion n'est cependant pas compatible avec Familiaris consortio, comme l'affirme expressément la lettre de la Congrégation pour la doctrine de la foi: "La structure de l'exhortation et la teneur de ses paroles font comprendre clairement que cette pratique, présentée comme obligatoire, ne peut être changée sur la base des différentes situations" Lettre, 5 .

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D'autres ont proposé de distinguer entre l'admission officielle à la sainte communion, qui ne serait pas possible, et l'accès de ces fidèles à la Table du Seigneur, qui serait permis en certains cas, s'ils estiment en conscience y être autorisés. Contre cette opinion, la lettre souligne: "Le fidèle qui vit habituellement more uxorio avec une personne qui n'est pas sa femme légitime ou son mari légitime, ne peut accéder à la communion eucharistique. Si ce fidèle jugeait possible de le faire, les pasteurs et les confesseurs auraient, étant donné la gravité de la matière ainsi que les exigences du bien spirituel de la personne 1Co 11,27-29 et du bien commun de l'Eglise, le grave devoir de l'avertir qu'un tel jugement de conscience est en opposition patente avec la doctrine de l'Eglise. Ils doivent aussi rappeler cette doctrine dans l'enseignement à tous les fidèles qui leur sont confiés" Lettre, 6 .
Il est important de bien expliquer aux fidèles le sens de cette norme obligatoire. Il ne s'agit pas d'exclure quiconque, de quelque manière que ce soit, ou d'exercer une discrimination à son égard. Il s'agit "seulement de fidélité absolue à la volonté du Christ qui nous a redonné et confié de nouveau l'indissolubilité du mariage comme don du Créateur " Lettre, 10 . Si les fidèles qui se trouvent dans une telle situation l'accueillent avec une conviction intérieure, ils rendent ainsi témoignage, à leur manière, de l'indissolubilité du mariage et de leur fidélité à l'Eglise Lettre, 9 . Certes, en agissant ainsi, on rappelle aussi sans cesse à leur conscience la nécessité de la conversion.
En réalité - et ceci est aujourd'hui pratiquement oublié dans l'Eglise, - il existe beaucoup d'autres situations qui s'opposent à une réception digne et fructueuse de la communion. Cela devrait être rappelé bien davantage et beaucoup plus clairement dans la prédication et la catéchèse. Alors, les fidèles divorcés remariés pourraient comprendre plus facilement quelle est leur situation.

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5 - A cause de leur situation objective, les fidèles divorcés remariés ne peuvent pas " exercer certaines responsabilités ecclésiales" CEC 1650.
Cela vaut, par exemple, pour la fonction de parrain. Selon le droit canonique en vigueur, le parrain doit mener "une vie cohérente avec la foi et avec la fonction qu'il va assumer" CIC 874 Par. 1,n. 3. Les fidèles divorcés remariés ne répondent pas à cette norme parce que leur situation est objectivement en contradiction avec le commandement de Dieu. Une nouvelle étude - menée également avec le concours du Conseil pontifical pour l'interprétation des textes législatifs - a montré que cette norme juridique est claire et évidente. A cet égard, on a cependant souligné que les conditions que l'on doit exiger pour qu'une personne exerce la fonction de parrain - bien au-delà des problèmes soulevés ici - devraient être précisées avec plus d'exactitude, afin de mettre en valeur cette charge dans toute sa signification, et d'éviter des abus dans la pastorale. Depuis, on a quelque peu progressé dans cette direction.
D'autres fonctions ecclésiales également, qui présupposent un témoignage de vie chrétienne particulier, ne peuvent être confiées à des divorcés qui se sont remariés civilement: des services liturgiques (lecteur, ministre extraordinaire de l'eucharistie); des services catéchétiques (enseignant de religion, catéchiste pour la première communion ou pour la confirmation); la participation comme membre du Conseil pastoral diocésain ou paroissial. Les membres de ces conseils doivent être totalement insérés dans la vie ecclésiale et sacramentelle, et mener aussi une vie qui soit en consonance avec les principes moraux de l'Eglise. Le droit canonique établit que, dans les conseils pastoraux diocésains - et cela vaut de manière analogique pour les conseils paroissiaux -, "ne seront députés que des fidèles remarquables par leur foi solide, leurs bonnes moeurs et leur prudence" CIC 512 Par. 3. (Cf. également sur ce sujet l'instruction sur quelques questions concernant la collaboration des laïcs au ministère des prêtres, du 15 août 1997, art. 5, Par. 2, et art. 13: DC, n. 2171, 1997, p. 1015 et 1018). On doit déconseiller que des fidèles divorcés remariés exercent la fonction de témoins lors de mariages, même si, en cette circonstance, il n'existe pas de raisons intrinsèques qui l'interdisent.

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note (Ces normes sont reprises brièvement et clairement dans le Directoire pour la pastorale familiale des évêques italiens: "La participation des divorcés remariés à la vie de l'Eglise demeure de toute façon conditionnée par leur appartenance non plénière à celle-ci. Il est donc évident qu'ils ne peuvent pas accomplir dans la communauté ecclésiale ces services qui exigent une plénitude de témoignage chrétien, comme le sont les services liturgiques et en particulier celui de lecteur, le ministère de catéchiste, la fonction de parrain pour les sacrements. Dans la même perspective, on doit exclure leur participation aux Conseils pastoraux, dont les membres, partageant en plénitude la vie de la communauté chrétienne, sont d'une certaine manière ses représentants et ses délégués. En revanche, il n'y a pas de raisons intrinsèques pour empêcher qu'un divorcé remarié exerce la fonction de témoin lors de la célébration d'un mariage; cependant, la sagesse pastorale demanderait de l'éviter, étant donné la claire contradiction qui existe entre le mariage indissoluble dont le sujet se fait témoin et la situation de violation de cette même indissolubilité qu'il vit personnellement" (n. 218).

Même sur ce point, on ne peut objecter que les fidèles intéressés sont l'objet d'une discrimination. Il s'agit plutôt de conséquences intrinsèques à leur situation objective de vie. A cet égard, le bien commun de l'Eglise exige que l'on évite la confusion et, en tout cas, un scandale possible. De plus, dans cette problématique également, la question ne peut être restreinte unilatéralement aux fidèles divorcés remariés mais doit être posée d'une manière plus profonde et plus large.

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6 - Si les fidèles divorcés remariés se séparent ou bien s'ils vivent comme frère et soeur, ils peuvent être admis aux sacrements.
Pour que les divorcés qui ont contracté une nouvelle union civile puissent recevoir validement le sacrement de la réconciliation, qui ouvre l'accès à la sainte communion, ils doivent être sérieusement disposés à changer leur situation de vie, de telle manière qu'elle ne soit plus en contradiction avec l'indissolubilité du mariage.
Concrètement, cela signifie qu'ils doivent se repentir d'avoir brisé le lien sacramentel matrimonial, qui est l'image de l'union sponsale entre le Christ et son Eglise, et se séparer de la personne qui n'est pas leur conjoint légitime. Si, pour des motifs sérieux, par exemple l'éducation des enfants, cela n'est pas possible, ils doivent avoir le ferme propos de vivre dans une totale continence FC 84 Avec l'aide de la grâce qui surmonte tout obstacle, et par leur engagement décisif, leur relation doit se transformer toujours davantage en un lien d'amitié, d'estime et d'aide réciproque. C'est l'interprétation que Familiaris consortio donne à ce que l'on appelle la "probata praxis Ecclesiae in foro interno" (la pratique issue de la longue expérience de l'Eglise, au for interne). Dans la lettre de la Congrégation pour la doctrine de la foi, cette solution est à nouveau proposée, ainsi que cet ajout: "l'obligation d'éviter le scandale demeurant toutefois" Lettre, 4 .
Il est clair pour tous que cette solution est exigeante, surtout s'il s'agit de personnes jeunes. Pour cette raison, il est tout particulièrement important qu'un accompagnement prudent et paternel soit donné par un confesseur, qui puisse guider pas à pas les fidèles intéressés qui désirent vivre comme frère et soeur. Sur ce point, des initiatives pastorales beaucoup plus nombreuses devraient être prises.

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7 - Les fidèles divorcés remariés, qui sont subjectivement convaincus que leur précédent mariage était invalide, doivent régler leur situation au for externe.
Le mariage a essentiellement un caractère public. Il constitue la cellule première de la société. Le mariage chrétien possède une dignité sacramentelle. Le consentement des époux, qui constitue le mariage, n'est pas une simple décision privée, mais crée pour chacun des partenaires une situation spécifique, ecclésiale et sociale.
Le mariage est une réalité de l'Eglise et ne concerne pas que la relation immédiate des époux avec Dieu. Il n'appartient donc pas en dernière instance à la conscience personnelle des intéressés de décider, sur le fondement de leur propre conviction, de l'existence ou non d'un mariage précédent et de la valeur de la nouvelle relation Lettre, 7 et 8 .
Pour cette raison, le droit canonique révisé confirme la compétence exclusive des tribunaux ecclésiastiques en ce qui concerne l'examen de la validité du mariage des catholiques. Cela signifie que même ceux qui sont convaincus en conscience que leur mariage précédent, qui a abouti à un échec irrémédiable, n'a jamais été valide, doivent s'adresser au tribunal ecclésiastique compétent qui, par une procédure au for externe établie par l'Eglise, examine s'il s'agit objectivement d'un mariage invalide. Le Code de droit canonique de 1983 - et ceci vaut de manière analogue pour le Code des canons des Eglises orientales - offre de nouvelles voies pour prouver la nullité d'un mariage. Son Excellence Mgr Mario Pompedda, doyen de la Rote romaine, écrit à cet égard dans son commentaire "Problématique canonique", publié dans ce volume: "faisant preuve d'un profond respect pour la personne humaine, en conformité avec le droit naturel, et en dépouillant le droit processuel de tout formalisme juridique superflu, le tout dans le respect des exigences imprescriptibles de la justice (en l'occurrence l'obtention d'une certitude morale et la sauvegarde de la vérité qui concerne même ici la valeur d'un sacrement), il (le Législateur) a établi des normes en vertu desquelles CIC 1536 Par. 2 et CIC 1679 les seules déclarations des parties peuvent constituer une preuve suffisante de nullité, naturellement lorsque ces déclarations, correspondant aux circonstances de la cause, offrent une garantie de pleine crédibilité."
Par cette nouvelle réglementation canonique qui, malheureusement, est encore trop peu envisagée et appliquée dans la pratique des tribunaux ecclésiastiques de nombreux pays, on devrait "exclure le plus possible quelque discordance que ce soit entre la vérité vérifiable dans le procès et la vérité objective connue par la conscience droite" Lettre, 9 .

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8 - Les fidèles divorcés remariés ne doivent jamais perdre l'espérance de parvenir au salut.
Le dernier paragraphe du chapitre correspondant de Familiaris consortio est une claire invitation à ne jamais perdre l'espérance "Avec une ferme confiance, (l'Eglise) croit que même ceux qui se sont éloignés du commandement du Seigneur et continuent de vivre dans cet état pourront obtenir de Dieu la grâce de la conversion et du salut, s'ils persévèrent dans la prière, la pénitence et la charité" FC 84; cf. Discours, 4 .
Même si l'Eglise ne peut jamais approuver une pratique qui s'oppose aux exigences de la vérité et au bien commun de la famille et de la société, néanmoins elle ne cesse jamais d'aimer ses fils et ses filles qui se trouvent dans des situations matrimoniales difficiles, de porter avec eux leurs difficultés et leurs souffrances, de les accompagner d'un coeur maternel et de les confirmer dans la foi confiante qu'ils ne sont pas exclus de ce courant de grâce qui purifie, éclaire, transforme et conduit au salut éternel.

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III - Objections faites à la doctrine de l'Eglise.

Eléments de réponse.

La lettre de la Congrégation pour la doctrine de la foi de 1994 a rencontré, on le sait, un grand écho en divers lieux de l'Eglise. A côté de nombreuses réactions positives, on a aussi entendu d'assez nombreuses critiques. Les objections essentielles faites à la doctrine et à la pratique de l'Eglise sont présentées ci-dessous sous une forme que nous avons d'ailleurs simplifiée.
Certaines objections plus significatives - surtout la référence à la pratique, jugée plus souple, des Pères de l'Eglise, qui inspirerait la pratique des Eglises orientales séparées de Rome, de même que l'invitation à recourir aux principes traditionnels de l'epikeia et de l'aequitas canonica - ont été étudiées d'une manière approfondie par la Congrégation pour la doctrine de la foi. Les articles des professeurs Pelland, Marcuzzi et Rodriguez Luno ont été élaborés au cours de cette étude. Les résultats principaux de cette recherche, qui indiquent la direction d'une réponse aux objections avancées, seront également brièvement résumés ici.

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1 - Beaucoup estiment, alléguant divers passages du Nouveau Testament, que la parole de Jésus sur l'indissolubilité du mariage permet une application souple et ne peut pas être classée avec rigidité dans une catégorie juridique.
Quant à l'indissolubilité du mariage, certains experts ont avancé, de manière critique, que le Magistère citerait presque exclusivement une seule péricope c'est-à-dire Mc 10,11-12 - et ne tiendrait pas suffisamment compte d'autres passages de l'évangile de Matthieu et de la première lettre aux Corinthiens. Ces passages bibliques mentionneraient quelques "exceptions" à la parole du Seigneur sur l'indissolubilité du mariage, c'est-à-dire dans le cas de la porneia Mt 5,32 Mt 19,9 et dans celui de la séparation pour raison de foi 1Co 7,12-16. Ces textes seraient des indications que les chrétiens se trouvant dans des situations difficiles auraient connu, déjà aux temps apostoliques, une application souple de la parole de Jésus.

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On doit répondre à cette objection que les documents magistériels n'ont pas l'intention de présenter d'une manière complète et exhaustive les fondements bibliques de la doctrine sur le mariage. Ils laissent cette tâche importante aux experts compétents. Le Magistère souligne cependant que la doctrine de l'Eglise sur l'indissolubilité du mariage découle de la fidélité envers la parole de Jésus. Jésus définit clairement la pratique vétéro-testamentaire du divorce comme une conséquence de la dureté du coeur de l'homme. Il renvoie - au-delà de la loi - au commencement de la création, à la volonté du Créateur, et résume son enseignement par ces mots: "Donc, ce que Dieu a uni, que l'homme ne le sépare pas!" Mc 10,9. Avec la venue du Rédempteur, le mariage est donc ramené à sa forme originelle à partir de la création et soustrait à l'arbitraire humain, surtout à l'arbitraire du mari car, en effet, il n y avait pas en réalité pour la femme de possibilité de divorce. La parole de Jésus sur l'indissolubilité du mariage est le dépassement de l'ancien ordre de la loi par l'ordre nouveau de la foi et de la grâce. C'est seulement ainsi que le mariage peut rendre pleinement justice à l'appel de Dieu à l'amour et à la dignité humaine, et devenir un signe de l'Alliance d'amour inconditionnel de la part de Dieu, c'est- à-dire un "sacrement" Ep 5,32.

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La possibilité d'une séparation, que Paul envisage en 1Co 7 concerne les mariages entre un conjoint chrétien et un autre qui n'est pas baptisé. La réflexion théologique postérieure a clarifié le fait que seuls les mariages entre baptisés sont un "sacrement", au sens strict du mot, et que l'indissolubilité absolue ne vaut que pour les mariages qui se situent dans le cadre de la foi dans le Christ. Ce que l'on appelle le "mariage naturel" a sa dignité à partir de l'ordre de la création et est donc orienté vers l'indissolubilité, mais il peut être dissous, dans des circonstances déterminées, en raison d'un bien plus élevé, en l'occurrence: la foi. Ainsi, la systématisation théologique a classifié juridiquement l'indication de saint Paul comme "privilège paulin", c'est-à-dire comme possibilité de dissoudre, pour le bien de la foi, un mariage non sacramentel. L'indissolubilité du mariage vraiment sacramentel est donc sauvegardée: il ne s'agit donc pas d'une exception à la Parole du Seigneur. Nous y reviendrons un peu plus loin.
En ce qui concerne la compréhension correcte des clauses sur la porneia, il existe une vaste littérature avec beaucoup d'hypothèses diverses, même contradictoires. De fait, il n'y a pas, parmi les exégètes, unanimité sur cette question. Beaucoup pensent qu'il s'agit ici d'unions matrimoniales invalides et non pas d'exceptions a l'indissolubilité du mariage. En tout cas, l'Eglise ne peut construire sa doctrine et sa pratique sur des hypothèses exégétiques incertaines. Elle doit s'en tenir à l'enseignement clair du Christ.

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2 - D'autres objectent que la tradition patristique laisserait place à une pratique plus différenciée, qui rendrait mieux justice aux situations difficiles; à ce propos, l'Eglise catholique pourrait apprendre quelque chose du principe de l'"économie" des Eglises orientales séparées de Rome.
On affirme que le Magistère actuel ne s'appuierait que sur un filon de la tradition patristique, mais non pas sur tout l'héritage de l'Eglise ancienne. Si les Pères s en sont clairement tenus au principe doctrinal de l'indissolubilité du mariage, certains d'entre eux ont toléré, sur le plan pastoral, une certaine souplesse devant des situations particulières difficiles. Sur cette base, les Eglises orientales séparées de Rome auraient développé plus tard, à côté du principe d'"acribie", de la fidélité à la vérité révélée, le principe de
l'"économie", c'est-à-dire de la condescendance bienveillante, dans des circonstances particulières difficiles. Sans renoncer au principe de l'indissolubilité du mariage, elles permettraient, dans des cas déterminés, un deuxième et même un troisième mariage qui, de plus, est différent du premier mariage sacramentel et est marqué du caractère de la pénitence. Cette pratique n'aurait jamais été condamnée explicitement par l'Eglise catholique. Le Synode des évêques de 1980 aurait suggéré d'étudier à fond cette tradition, afin de mieux faire resplendir la miséricorde de Dieu.

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L'étude faite par le Père PELLAND montre la direction où il faut chercher la réponse à ces questions. Pour l'interprétation des textes patristiques pris en particulier, l'historien reste naturellement compétent. Etant donné la difficulté de situer ces textes, les controverses ne s'apaiseront pas, même dans le futur. Du point de vue théologique, on doit affirmer
a) - Il existe un clair consensus des Pères en faveur de l'indissolubilité du mariage. Puisque celle-ci découle de la volonté du Seigneur, l'Eglise n'a aucun pouvoir sur elle. C'est bien pour cela que, dès le début, le mariage chrétien fut différent du mariage de la civilisation romaine même si, dans les premiers siècles, il n'existait encore aucune réglementation canonique le concernant. L'Eglise du temps des Pères exclut clairement le divorce et un nouveau mariage, et cela à cause d'une obéissance fidèle au Nouveau Testament.
b) - Dans l'Eglise du temps des Pères, les fidèles divorcés remariés ne furent jamais admis officiellement à la sainte communion après un temps de pénitence. Il est vrai, en revanche, que l'Eglise n'a pas rigoureusement révoqué en tous les pays des concessions en la matière, même si elles étaient qualifiées de non compatibles avec la doctrine et la discipline. Il semble qu'il soit également vrai que certains Pères, par exemple Léon le Grand, ont cherché des solutions "pastorales" pour de rares cas "à la limite".
c) - Par la suite, on en arriva à deux développements opposés l'un à l'autre.
- Dans l'Eglise impériale, après Constantin, on chercha, à la suite de l'imbrication toujours plus forte entre l'Etat et l'Eglise, une plus grande souplesse et une plus grande disponibilité au compromis dans des situations matrimoniales difficiles. Jusqu'à la réforme grégorienne, cette tendance se manifesta aussi dans les milieux gaulois et germanique. Dans les Eglises orientales séparées de Rome, ce développement continua par la suite au second millénaire et conduisit à une pratique toujours plus libérale. Il existe aujourd'hui, en de nombreuses Eglises orientales, toute une série de motifs de divorce, sinon même une "théologie du divorce", qui n'est, en aucune manière, conciliable avec les paroles de Jésus sur l'indissolubilité du mariage. Ce problème doit être absolument abordé dans le dialogue oecuménique.
- En Occident, grâce à la réforme grégorienne, on retrouva la conception originelle des Pères. Ce développement trouva, d'une certaine manière, sa confirmation lors du concile de Trente et fut à nouveau proposé comme doctrine de l'Eglise par le concile Vatican II.

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- La pratique des Eglises orientales, conséquence d'un processus historique complexe, d'une interprétation toujours plus libérale - et qui s'est éloignée toujours davantage de la Parole du Seigneur - de certains passages patristiques obscurs, influencée aussi à l'évidence par la législation civile, ne peut pas, pour des motifs doctrinaux, être assumée par l'Eglise catholique. A cet égard, il n'est pas exact d'affirmer que l'Eglise catholique aurait simplement toléré la pratique orientale. Certes, le concile de Trente n'a prononcé aucune condamnation formelle. Néanmoins, les canonistes médiévaux en ont parlé constamment comme d'une pratique abusive. De plus, il existe des témoignages selon lesquels des groupes de fidèles orthodoxes, qui devenaient catholiques, devaient signer une confession de foi avec mention expresse de l'impossibilité d'un second mariage.

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3 - Beaucoup proposent de permettre des exceptions à la norme ecclésiale, sur la base des principes traditionnels de l'epikeia et de l'aequitas canonica.
Certains cas matrimoniaux, dit-on, ne peuvent être soumis régulièrement au for externe. L'Eglise pourrait non seulement renvoyer à des normes juridiques, mais devrait aussi respecter et tolérer la conscience de chacun. Les doctrines traditionnelles de l'"épikie" et de l'"équité canonique" pourraient justifier, du point de vue de la théologie morale ou du point de vue juridique, une décision de la conscience, qui s'éloignerait de la norme générale. Surtout dans la question de la réception des sacrements, l'Eglise devrait faire des pas en avant et ne pas simplement opposer aux fidèles des interdictions.

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Les deux contributions de Don MARCUZZI et du professeur Rodriguez LUNO illustreront cette problématique complexe. A cet égard, on doit distinguer clairement trois types de questions.
a) - L'"epikeia" et l'aequitas canonica sont d'une grande importance dans le cadre des normes humaines et purement ecclésiales, mais elles ne peuvent pas être appliquées dans le cadre de normes sur lesquelles l'Eglise n'a aucun pouvoir discrétionnaire. L'indissolubilité du mariage est une de ces normes qui remontent au Seigneur lui-même et qui sont donc désignées comme normes " de droit divin". L'Eglise ne peut pas non plus approuver des pratiques pastorales - par exemple dans la pastorale des sacrements - qui contrediraient le clair commandement du Seigneur. En d'autres mots, si le mariage précédent de fidèles divorcés et remariés est valide, leur nouvelle union ne peut être considérée en aucune circonstance comme conforme au droit et donc, pour des motifs intrinsèques, la réception des sacrements n'est pas possible. La conscience de chacun est liée, sans exception, par cette norme.
b) - En revanche, l'Eglise a le pouvoir de tirer au clair les conditions à remplir pour qu'un mariage puisse être considéré comme indissoluble selon l'enseignement de Jésus. Dans la ligne des affirmations pauliniennes de 1Co 7 elle a décidé que seuls deux chrétiens peuvent contracter un mariage sacramentel. Elle a développé les figures juridiques du "privilège paulin" et du "privilège pétrinien". En référence aux clauses sur la porneia chez Matthieu et en Ac 15,20, des empêchements matrimoniaux ont été formulés. On a en outre identifié toujours plus clairement les motifs de nullité matrimoniale et on a largement développé les procédures processuelles. Tout cela a contribué à délimiter et à préciser le concept de mariage indissoluble. On pourrait dire que, ainsi, même dans l'Eglise occidentale, on a fait une place au principe de l'"économie", sans toucher cependant à l'indissolubilité du mariage comme tel.

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C'est dans cette ligne aussi que se situe l'autre développement juridique apparu dans le Code de 1983, selon lequel même les déclarations des parties ont force probatoire. En soi, au jugement de personnes compétentes (cf. l'étude de Mgr Pompedda), semblent ainsi pratiquement exclus les cas où l'invalidité d'un mariage ne pourrait pas être prouvée comme telle par la voie processuelle. Etant donné que le mariage a essentiellement un caractère public et ecclésial, et que vaut le principe fondamental "Nemo iudex in propria causa" ("Personne n'est juge dans sa propre cause"), les questions matrimoniales doivent être résolues au for externe. Chaque fois que des fidèles divorcés remariés estiment que leur mariage précédent n'a jamais été valide, ils sont donc obligés de s'adresser au tribunal ecclésiastique compétent, qui devra examiner le problème objectivement et en appliquant toutes les possibilités juridiquement disponibles.
c) - Certes, il n'est pas exclu que des erreurs se produisent dans les procès matrimoniaux. En certains endroits de l'Eglise, il n'y a pas encore de tribunaux ecclésiastiques qui fonctionnent bien. Parfois, les procès ont une durée excessivement longue. En certains cas, ils se terminent par des sentences douteuses. Il ne semble pas que soit ici exclue, en principe, l'application de l'epikeia au "for interne". On fait allusion à cela dans la lettre de la Congrégation pour la doctrine de la foi de 1994, quand il est dit que, avec les nouvelles voies canoniques, devrait être exclu "le plus possible", toute discordance entre la vérité vérifiable lors du procès et la vérité objective Lettre, 9 . De nombreux théologiens pensent que les fidèles doivent absolument s'en tenir, même au "for interne", aux jugements du tribunal même si, à leur avis, ils sont erronés. D'autres estiment que, au "for interne", des exceptions sont pensables parce que, dans la législation concernant les procès, il ne s'agit pas de normes de droit divin mais de normes de droit ecclésial. Cette question exige cependant des études et des clarifications ultérieures. On devrait en effet clarifier d'une manière très précise les conditions pour que se vérifie une "exception", dans le but d'éviter l'arbitraire et de protéger le caractère public - soustrait au jugement subjectif - du mariage.

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4 - Certains accusent le Magistère actuel de repli sur soi par rapport au Magistère du Concile, et de proposer une vision pré-conciliaire du mariage.
Certains théologiens affirment que, à la base des nouveaux documents magistériels sur les questions du mariage, on trouverait une conception naturaliste, légaliste, du mariage. L'accent serait mis sur le contrat entre les époux et sur le ius in Corpus. Le Concile aurait dépassé cette compréhension statique et décrit le mariage d'une manière plus personnaliste, comme pacte d'amour et de vie. Il aurait ainsi ouvert la possibilité de résoudre d'une manière plus humaine des situations difficiles. Développant cette ligne de pensée, certains spécialistes posent la question de savoir si on ne peut pas parler de "mort du mariage" quand le lien personnel de l'amour entre deux époux n'existe plus. D'autres soulèvent la vieille question: en de tels cas, le pape n'a-t-il pas la possibilité de dissoudre le mariage?
Pourtant, quiconque a lu attentivement les récentes déclarations ecclésiastiques reconnaîtra que, dans leurs affirmations centrales, elles se fondent sur Gaudium et Spes et que, par des traits totalement personnalistes, elles développent un peu plus, sur la trace indiquée par le Concile, la doctrine qui y est contenue. Il est cependant inadéquat d'introduire une opposition entre la visée personnaliste et la visée juridique du mariage. Le Concile n'a pas rompu avec la Conception traditionnelle du mariage, mais l'a développée. Quand, par exemple, on répète continuellement que le Concile a remplacé le concept strictement juridique de "contrat" par le concept plus large et théologiquement plus profond de "pacte", on ne peut oublier à ce propos que même le "pacte" contient l'élément du "contrat", bien qu'il se situe dans une perspective plus large. Que le mariage aille bien au-delà de l'aspect purement juridique, enraciné qu'il est dans la profondeur de l'humain et dans le mystère du divin, en réalité cela a toujours été affirmé par le mot "sacrement", mais, certes, souvent cela n'a pas été mis en lumière avec la clarté que le Concile a donnée à ces aspects. Le droit n'est pas tout, mais il est une partie absolument indispensable, une dimension du tout. Il n'existe pas de mariage sans prescriptions juridiques, qui l'insèrent dans un ensemble global de société et d'Eglise. Si la réorganisation du droit après le Concile touche aussi le domaine du mariage, alors cela n'est pas une trahison du Concile mais une réalisation de sa tâche.

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Si l'Eglise acceptait la théorie qu'un mariage est mort quand deux conjoints ne s'aiment plus, elle approuverait alors le divorce et ne soutiendrait plus l'indissolubilité du mariage que de manière purement verbale, mais non pas dans les faits. L'opinion selon laquelle le pape pourrait éventuellement dissoudre des mariages qui ont abouti de manière irrémédiable à des échecs doit donc être qualifiée d'erronée. Le mariage sacramentel, consommé, ne peut être dissous par personne. Lors de la célébration nuptiale, les époux se promettent la fidélité jusqu'à la mort.
En revanche, des études ultérieures approfondies sont nécessaires pour éclaircir la question des chrétiens non croyants: des baptisés - qui n'ont jamais cru ou ne croient plus en Dieu - peuvent-ils vraiment contracter un mariage sacramentel'? En d'autres mots, on devra clarifier la question: est-ce que vraiment tout mariage entre deux baptisés est ipso facto un mariage sacramentel? De fait, le Code lui-même indique que seul le contrat matrimonial "valide" entre baptisés est en même temps sacrement CIC 1055 Par. 2. La foi appartient à l'essence du sacrement; reste à éclaircir la question juridique: quelle évidence de"non-foi" aurait pour conséquence qu'un sacrement n'est pas réalisé?

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5 - Beaucoup affirment que l'attitude de l'Eglise dans la question des divorcés remariés est unilatéralement normative et non pas pastorale.
Toute une série d'objections critiques contre la doctrine et la pratique de l'Eglise concerne des problèmes de caractère pastoral. On dit, par exemple, que le langage des documents ecclésiaux serait trop légaliste, que la dureté de la loi prévaudrait sur la compréhension de situations humaines dramatiques. L'homme d'aujourd'hui ne pourrait plus comprendre ce langage. Jésus aurait prêté une oreille attentive aux besoins de tous les hommes, surtout de ceux qui étaient en marge de la société. Au contraire, l'Eglise apparaîtrait plutôt comme un juge qui exclut, des sacrements et de certaines charges, des personnes blessées.
On peut sans doute admettre que, parfois, les formes d'expression du Magistère ecclésial n'apparaissent pas précisément comme facilement compréhensibles. Elles doivent être traduites par les prédicateurs et les catéchistes dans un langage qui corresponde aux diverses personnes et à leur milieu culturel respectif. Le contenu essentiel du Magistère ecclésial à ce sujet doit pourtant être maintenu. On ne peut l'atténuer pour des motifs que l'on estime "pastoraux", parce qu'il transmet la vérité révélée. Certes, il est difficile de faire comprendre les exigences de l'Evangile à l'homme sécularisé. Mais cette difficulté pastorale ne peut amener à des compromis avec la vérité. Dans sa lettre encyclique Veritatis splendor, Jean Paul II a clairement repoussé les solutions prétendument "pastorales" mais qui sont en contradiction avec les déclarations du Magistère VS 56.

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En ce qui concerne la position du Magistère sur le problème des divorcés remariés, il faut en outre souligner que les documents récents de l'Eglise unissent, de manière très équilibrée, les exigences de la vérité et celles de la charité. Si, par le passé, dans la présentation de la vérité, parfois la charité n'a pas resplendi suffisamment, à l'inverse le danger est grand aujourd'hui de se taire ou de compromettre la vérité au nom de la charité. Certes, la parole de vérité peut faire mal et être mal commode. Mais elle est le chemin de la guérison, de la paix, de la liberté intérieure. Une pastorale qui veut vraiment aider les personnes doit toujours se fonder sur la charité. Seul ce qui est vrai peut être aussi pastoral. "Alors, vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres" Jn 8,32.

CARD. JOSEPH RATZINGER.




2002 Magistère Mariage 1709