Bernard Opuscules 200

PARABOLES VULGAIREMENT ATTRIBUÉES A SAINT BERNARD




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PREMIÈRE PARABOLE.

Le combat spirituel.

201 1. Un roi riche et très-puissant, le Dieu tout-puissant, a adopté pour fils l'homme qu'il avait créé,et à qui comme à un enfant jeune et délicat il a donna pour précepteurs la loi et les prophètes, avec les autres tuteurs et acteurs jusqu'au temps marqué d'avance par lui pour sa majorité. Il le pourvut de toutes choses et ne lui épargna point ses avis eu l'établissant le maître du paradis terrestre, et lui montra tous les trésors de sa gloire, en lui promettant de lui en faire part, s'il ne l'abandonnait point. Puis, afin que rien ne manquât aux biens dont il l'enrichissait, il lui donna aussi le libre arbitre pour que le bien qu'il ferait fût volontaire au lieu d'être forcé. Quand l'homme eut reçu le pouvoir du bien et du mal, il prit tous ses biens en dégoût dans son ardent désir de connaître le bien et le mal. Sortant donc du paradis de sa bonne conscience, il se mit à la recherche de nouveautés qu'il ignorait, lui qui jusqu'alors ne connaissait encore que le bien : oubliant les lois de son père, et quittant ses précepteurs, il mangea du fruit de l'arbre de la science du bien et du mal, en dépit de la défense de son père, et, le malheureux, se cachant et fuyant la présence du Seigneur, il se mit à terrer, comme un enfant insensé, sur les montagnes de la hauteur, dans les vallées de la curiosité, à travers les champs de la licence, par les bois de la luxure, au milieu des marécages des voluptés charnelles et jusques sur les flots des soins de ce monde.

202 2. Mais l'antique brigand, en apercevant cet enfant révolté sans garde et sans guide, errant loin de la maison de son père , s'approcha de lui, et lui présente de la main du mauvais conseil, les pommes de la désobéissance, comme pour s'assurer de son consentement; puis il fond sur lui, le renverse par terre, c'est-à-dire dans les désirs terrestres, alors il lui garrotte les pieds, c'est-à-dire, les affections de l'âme, pour l'empêcher de se relever, et le charge des liens très-forts de la concupiscence du siècle, dont il couvre aussi les mains de son opération et les yeux de son âme. Ensuite il le place dans le vaisseau de. la mauvaise sécurité, et faisant souffler avec force le vent de l'adulation, il le conduit bien loin dans les parages de la dissimilitude. Mais lui, cet enfant, en arrivant dans un pays qui n'est pas le sien, se voit mis en vente au plus offrant de tous ceux qui passent le long du chemin. Il apprend à faire paître les porcs et à manger les gousses dont on les nourrit; tandis qu'il désapprend ce qu'il avait appris auparavant, il apprend ce qu'il avait ignoré jusqu'alors, je veux dire les oeuvres serviles. En chaîné dans le cachot du désespoir, où ne rôdent que les impies, il se voit contraint, ô douleur, de moudre sous la meule du moulin de l'impiété la récompense de la mauvaise conscience.

203 3. Mais pendant ce temps-là, où est donc son père très-puissant, très-doux et très-libéral? Peut-il avoir oublié le fils de ses entrailles? Non, non, il ne l'oublie pas, loin de là, il en a pitié, au contraire, il compatit au malheur, il se plaint de l'absence et de la perte de son fils. Il recommande à ses amis, il presse ses serviteurs, il demande à tout le monde de se mettre à sa recherche. Un de ses serviteurs, nommé la Crainte, sur l'ordre de son maître, se précipite sur les pas de cet enfant fugitif, et découvre le fils de son roi, au fond d'un cachot, couvert des ordures dégoûtantes du péché, lié des chaînes et chargé des fers de la mauvaise habitude, fou de misère et pourtant tranquille et souriant dans son malheur. Il le presse de la voix et du fouet de se lever, de sortir et de retourner chez son père, il couvre ce malheureux enfant d'une telle confusion qu'il demeure étendu à terre à demi-mort, son ventre se colle au sol. Sur les pas du premier, un second serviteur s'élance à son tour, il se nomme l'Espérance, et, en voyant que la crainte n'a pu arracher de sa place le fils de son roi, qu'elle l'y a plutôt plus fortement attaché ; qu'au lieu de l'aider elle l'a abattu, elle s'approche doucement de lui, elle tire ce pauvre de la poussière, et sort cet indigent de son fumier (1R 2,8), elle lui relève la tête, puis, avec le vêtement de la consolation, lui essuie les yeux et la figure et s'écrie Ah ! combien de mercenaires dans la maison de ton père ont du pain en abondance, pendant que toi, tu meurs de faim ici! Lève-toi, je t'en prie, retourne à ton père et dis lui : Mon père, traitez-moi comme un de vos. serviteurs. Mais alors lui revenant enfin et à grand' peine un peu à soi, n'es-tu pas l'Espérance, dit-il? comment as-tu donc pu trouver accès dans le cachot si profond et si horrible de mon désespoir? Oui, oui, c'est bien moi, reprend l'Espérance, c'est ton père qui m'envoie vers toi pour t'aider, non point pour t'abandonner, et pour te ramener dans sa maison et dans la chambre même de ta mère. Et lui: ô toi, s'écrie-t-il, doux allégement des peines, douce consolation des malheureux! O toi qui n'es pas le moindre des trois serviteurs qui se tiennent debout près du lit du roi, tu vois la profondeur immense de mon cachot; tu vois mes fers, il est vrai que depuis que tu es entrée ici, ils sont déjà en grande partie rompus ou détachés. Tu vois l'immense multitude de ceux qui me tiennent captif, tu vois leur force, leur rapidité et leur, ruse. Comment peux-tu te trouver ici? Hais l'Espérance lui répond : ne crains rien, celui qui doit nous aider est plein de miséricorde; celui qui combattra pour nous est tout-puissant, et si tes tyrans sont nombreux, ceux qui sont pour nous le sont plus encore. D'ailleurs, je t’ai amené, de la part de ton père un cheval, le cheval du désir; une fois que tu seras monté dessus, tu pourras, sous ma conduite, t'éloigner en sûreté de tous tes ennemis. Elle dit, et, étendant sur le dos du Désir les douces couvertures de la pieuse Dévotion, elle attache aux talons du fils du roi les éperons des bons exemples et le fait monter ensuite sur le Désir; mais le frein manquait, oublié dans la précipitation de la fuite. Le cheval s'élance donc à l'instant, mais sans frein, et l'Espérance marche devant lui, et le tire à sa suite. La crainte est derrière e le presse du fouet et de la voix. A cette vue les princes d'Édom se troublent, les forts de Moab se sentent saisis de crainte, tous les habitants de Chanaan sont glacés de terreur (Ex 15,15) Que le tremblement et l'effroi fondent sur eux dans la force de votre bras, Seigneur, qu'ils deviennent immobiles comme la pierre jusqu'à ce que votre fils soit passé, ce fils que vous avez possédé. Dans leur course précipitée, ils s'échappent sans doute, mais ce n'est point sans courir quelques dangers, car ils fuient sans mesure et sans conseil.

204 4. Aussi, voit-on accourir au devant d'eux, envoyée par son père, la Prudence, une des plus grandes princesses de son palais, ayant nec elle la Tempérance. Elle les arrête dans leur course, et s'écrie doucement, je vous en prie, doucement; car notre grand Salomon a dit : «Quiconque marche trop vite, se heurte (Pr 9,2). » Si vous ,parez ainsi vous butterez, et si vous tombez, vous rendrez à ses ennemis le fils du roi que vous avez mission de délivrer; car s'il tombe, à l’instant ils mettront la main sur lui. Ce disant, elle met au Désir, !pli écumait de chaleur, le frein de la discrétion, et confie les rênes de la Tempérance. Comme la Crainte, par derrière, se plaignait, à cause de l'approche et de la force des ennemis , qu'on ralentit de la fuite, la Prudence lui dit : arrière, Satan, tu es pour nous une cause de scandale. Notre force et notre gloire, c'est le Seigneur, il s'est fait notre salut. D'ailleurs voici venir la Force, le vaillant soldat de Dieu, il accourt à travers le champ de la confiance, brandissant dans sa main le glaive de la joie. Ne vous troublez pas, dit-il, nous sommes plus nombreux qu'eux. Alors la Prudence, conseillère habituée des conseils de la cour céleste, s'écrie : prenez garde, je vous en prie, car, selon le mot de notre grand Salomon, « l'héritage qu'on a hâte d'acquérir, ne sera point un héritage béni (Pr 20,21). » Fuyez donc, mais fuyez avec non moins de prudence que de hâte; car il n'y a plus d’ennemis le long de la route, mais ils ont continué de semer le scandale sur le chemin, aux bifurcations des routes , aux carrefours et dans les détours. Je vais donc marcher devant vous ; pour vous, ne vous écartez point de la route de la justice, et avant peu nous vous ferons entrer dans le camp de la Sagesse qui n'est plus fort éloigné de nous maintenant. Car c'est de la sagesse qu'il est dit : « Si vous voulez acquérir la sagesse, apprenez la justice. »

205 5. Mais, pendant qu'ils organisent ainsi leur marche, la Crainte les pousse, l'Espérance les tire, la Force les protège, la Tempérance modère leurs pas, la Prudence les guide et les éclaire, la Justice les mène et les conduit. Le Fils du roi approche du camp de la Sagesse qui, à la première nouvelle de l'arrivée d'un nouvel hôte, va au devant de lui et fait accueil à cet étranger qui désire la voir, elle se montre à lui sur la route même avec un visage souriant. L'humilité a entouré son camp de fossés très-profonds, au dessus desquels s'élève jusqu'aux nues un mur très-solide et très-beau, le mur de l'obéissance que décorent dans toute sa hauteur les histoires de bons exemples peints partout avec un art admirable. Ces murs sont attenants aux remparts d'où on voit pendre mille boucliers et toutes les armes des forts. La porte de la profession est toute grande ouverte, mais un portier placé sur le seuil ne laisse entrer que ceux qui sont dignes d'y entrer, et en éloigne les indignes. Un héraut crie au-dessus de la porte : « Que celui qui aime la sagesse passe par ici et il la trouvera; et quand il l'aura trouvée, il sera bienheureux s'il sait la garder. » C'est là que le fils du roi se voit conduit par la main, que dis-je ? porté dans les bras de la sagesse qui a volé à sa rencontre, entouré de toutes les prévenances de la domesticité du roi, il arrive ainsi dans la forteresse qui s'élève au milieu de la ville, où elle s'est construit une demeure, et a élevé sept colonnes, où elle soumet la nation à son empire, où elle foule de son pied le cou des grands et des superbes. Là il est déposé dans le lit de la Sagesse qu'entourent soixante des plus vaillants soldats d'Israël, l'épée au côté. David est là avec ses tympans et ses choeurs, ses instruments à cordes et ses instruments à vents. Les autres paranymphes de la cour céleste y sont aussi dans une joie et une allégresse plus grande pour ce pécheur qui fait pénitence, que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n'ont pas besoin de pénitence.

206 6. Alors, souffle de l'Aquilon un tourbillon de vent et de feu qui enveloppe et ébranle la maison tout entière et jette la confusion dans le camp de la sagesse. En effet, Pharaon, avec ses chariots et ses cavaliers, s'était mis à la poursuite d'Israël. On a vu conspirer ensemble et faire alliance contre lui, les tentes des Iduméens et des Ismaélites, Moab et les Agaréniens, Gébal, Ammon et Amalec, les étrangers et les habitants de Tyr (Ps 82,5 Ps 82,9). L'Assyrien, je veux dire le diable, ce grand exterminateur, vint aussi avec eux.

207 7). Bref, la cité se vit assiégée. Les machines de ta tentation se dressent, et, de tous côtés, l'ennemi la presse comme un dragon dans ses embuscades et comme un lion dans les attaques ouvertes. Il assemble ses alliés, il lance des brandons allumés dans la place, il mine les murs, il suscite des guerres, il dresse des embûches et menace la; ville entière d'une destruction complète. Au dedans tout est dans la crainte et les angoisses, dans l'appréhension d’une invasion violente et soudaine de l'ennemi, on est dans un trouble général, tout le monde chancelle comme un homme ivre, et la sagesse de chacun est renversée tous crient vers le Seigneur, du milieu de leur consternation (Ps 106,26-27). On court à la citadelle de la sagesse; on lui fait part ces mauvaises nouvelles, on lui demande un conseil. La prudence, rentrant en elle-même, consulte la sagesse sur les nécessités du moment. Celle-ci est d'avis qu'on doit hâter de solliciter du secours du grand roi. Mais, répond la prudence, qui ira le solliciter pour nous? Ce sera la prière, dit la sagesse, et pour qu'elle ne soit point attardée dans sa marche, qu'elle monte sur le cheval de la foi. On cherche pendant longtemps la prière, et on a beaucoup de peine à la trouver au milieu d'un si grand trouble. Elle monte sur le cheval de la foi et s'élance dans la voie qui conduit au ciel, elle n'a de cesse qu'elle n'en passe les portes, en louant Dieu, et qu'elle ne pénètre dans l'intérieur, en chantant des hymnes (Ps 99,4). Alors, servante fidèle, elle s'approche avec confiance du trône de la grâce, et fait l'exposé de la situation. Le Roi, en apprenant le danger que court son fils, se tourne du côté de la charité qui est assise à ses côtés sur le même trône que lui : qui donc, enverrai-je, et qui se chargera d'aller à son secours pour moi? Mais elle : ce sera moi, envoyez-moi, je suis prête. Alors, le Roi réplique : tu es forte, tu auras le dessus et tu le délivreras. Pars et fais selon qu'il est convenu. A l'instant, la reine du ciel s'éloigne de la présence du Seigneur, toute la cour céleste marche sur les pas de la Charité, elle s'avance et descend vers le camp qu'elle remplit à l'instant de joie et de courage par sa seule présence; elle calme l'émotion et apaise l'agitation qui y règne. La lumière de l'espérance brille de nouveau aux yeux des malheureux assiégés, et la confiance rentre au coeur des plus timides. L'espérance qui allait s'enfuir, revient sur ses pas ; la force qui se sentait presque abattue, se ranime, et toute la troupe de la sagesse reprend courage. De leur côté, les ennemis qui assiègent la citadelle, se demandent d'où vient la joie qu'ils remarquent au camp ennemi : il n'en était pas ainsi hier ni avant-hier, disent-ils , il s'en faut de beaucoup. Malheur à nous ! c'est Dieu même qui est descendu au camp, malheur à nous ! fuyons Israel, car le Seigneur combat pour lui (Ps 45,5). Pendant qu'ils prennent la fuite, le torrent de la grâce de Dieu réjouit sa cité sainte et le Très-Haut, sanctifie son tabernacle. Dieu est au milieu d'elle, elle ne sera point ébranlée et il la protégera dès le matin. Les nations sont remplies de trouble et les royaumes sont abaissés; car il a fait entendre sa voix et la terre a été ébranlée. Le Seigneur des armées est avec nous et le Dieu de Jacob est notre défenseur. Alors, la reine du ciel, la charité, prenant le Fils de Dieu dans ses bras, l'emporte vers le ciel et le rend à Dieu son père, et ce père accourt au devant de lui, et d'une voix douce et d'un regard serein, il s'écrie : « Apportez promptement la plus belle robe qui soit dans ma maison et l'en revêtez, et mettez-lui un anneau au doigt, et des souliers aux pieds. Amenez un veau gras, tuez-le, faisons bonne chère et réjouissons-nous, parce que mon fils que voici, était mort et il est ressuscité, il était perdu et il est retrouvé (Lc 15,22-24). »

208 7. Il faut remarquer quatre choses dans la manière dont notre enfant s'est sauvé. D'abord, son repentir, mais un repentir sans énergie; en second lieu sa fuite, mais une fuite téméraire et déraisonnable ; troisièmement sa lutte contre l'ennemi, mais une lutte craintive et tremblante ; et en quatrième lieu, enfin, la victoire; mais une victoire vaillamment remportée et pleine de sagesse. Voilà, ce que vous trouverez dans toute âme qui fuit le monde. D'abord, elle est dénuée de tout et sans dessein arrêté : puis, elle est précipitée et téméraire dans la voie du succès; ensuite, on la voit tremblante et pusillanime dans les épreuves; et enfin, pourvue de tout, instruite, et parfaite dans le royaume de la charité.



SECONDE PARABOLE.

Le combat spirituel.

209 1. Il n'y a point de paix, mais une guerre à outrance, entre Babylone et Jérusalem. Ces deux Cités ont chacune leur Roi. A Jérusalem, c'est le Christ notre seigneur qui règne, à Babylone, c'est le diable. Et comme l'un se plait à régner dans la justice, l'autre dans la malice, le roi de Babylone s'efforce par ses ministres, c'est-à-dire, par les esprits immondes, d'attirer à Babylone le plus de citoyens qu'il peut de Jérusalem, pour les rendre les iniques esclaves de l'iniquité. Aussi, une sentinelle placée sur les murs de Jérusalem, apercevant un de ses concitoyens entraîné captif par l'ennemi à Babylone, informa de ce qui se passait le roi de Jérusalem. Alors, celui-ci, appelant à lui l'esprit de crainte, un soldat qui a fait ses preuves dans ces sortes d'expéditions, il lui dit : Va et ramène la proie qu'on nous a ravie. Celle-ci, toujours prête à exécuter les ordres qui lui sont donnés, s'élance avec rapidité sur les pas de l'ennemi, et ce dernier ne tarde point à entendre comme le bruit d'un vent impétueux qui fond sur lui; en effet, la crainte lui parle d'une voix de tonnerre, et à ses accents, toute la force des ennemis est glacée. Ils n'avaient fait que quelques pas dans leur fuite, quand la crainte les atteignit, elle leur enlève leur proie et la ramène vers ses foyers. Mais un des ennemis, l'esprit de tristesse, n'était point à son rang quand la crainte fondit sur eux ; mais en voyant les siens s'enfuir tout à coup, il accourt du fond de ses embuscades où il se tenait caché. La crainte était seule, lui disent ses compagnons d'armes, pour accomplir cet exploit, nous sommes tous plongés dans la confusion. Mais lui, n'ayez pas peur de la crainte, s'écrie-t-il, je sais bien ce que je vais faire, je vais aller par là, et, me plaçant sur la route comme un esprit de mensonge, je me déguiserai en ami de la crainte. Je la connais, il ne faut point, avec elle, recourir à la force, mais à la ruse. Quant à vous, attendez la fin de tout cela. Ce qui fut dit fut fait, et prenant des chemins de traverse, il devance la Crainte. Revenant alors sur ses pas, le long de la route que suivait la crainte, il la rencontre, lie conversation avec elle comme une amie, mais avec, des sentiments hostiles, et fait si bien qu'il commence à la séduire. La Crainte, qui ne se doutait de rien, le suit paisiblement, et, il s'en fallait de peu que la tristesse ne la fit tomber dans le fossé du désespoir. Mais la sentinelle informe le roi de ce qui se passe; celui-ci fait appeler un de ses soldats, l'Espérance, et lui ordonne de monter sur le cheval le Désir et, l'épée de la joie à la main, de voler au secours de la crainte. Le fidèle soldat accomplit les ordres qu'il a reçus, et, à peine arrivé à l'endroit indiqué, il brandit l'épée de la joie et met la tristesse en fuite. Ayant donc ainsi délivré son concitoyen, il le place sur le dos du désir et marche devant le tirant après lui avec la longe des promesses. De son côté, la crainte qui marche par derrière presse la monture du fouet qu'elle s'est tressé avec les cordes des péchés.

210 2. Le Désir marchait donc ainsi volontiers , d'un côté tiré par la Joie et de l'autre poussé par la Crainte ; mais dans une course si rapide il avait à craindre que les ennemis ne vinssent à la rescousse ; en effet, les soldats de Babylone tiennent conseil et se disent : Que faire ? Car voilà que celui que nous nous croyions à peu près sûrs de tenir, nous échappe. Comment les cris de triomphe de l'enter se trouvent-ils changés en soupirs de deuil? Il a suffi de deus soldats seulement pour rendre la joie et l'allégresse au ciel parla délivrance d'un de ses habitants. Comment donc nos ruses diaboliques ont-elles échoué? Alors un d'eux, plus pervers que les autres, car c'était l'artisan même de ce crime, émit cet avis profond : vous ne savez donc pas une chose et vous n'y pensez pas? Il est plus facile de le reprendre maintenant, et une fois repris, il ne sera pas aussi aisé de nous l'enlever. Mettez-vous donc de loin à sa poursuite, et moi je vais me transfigurer en ange de lumière, pour les tromper, sous prétexte de leur apprendre la route qu'ils ignorent, car ils sont étrangers dans ces contrées et ne font que d'y arriver. La ruse étant donc ainsi préparée, la sentinelle informe notre roi qu'il voit venir son homme, monté sur le Désir, mais que sa monture va d'un train trop précipité, parce qu'il n'a ni frein ni selle. Je vois , dit-il, dans le lointain, les ennemis qui le poursuivent; quelques-uns d'entre eux, qui ont vieilli dans le mal, prennent des chemins de traverse ; j'en aperçois même un dont les armes brillent de l'éclat des nôtres ; pourtant il n'est pas sorti de nos rangs. Il faut absolument envoyer quelqu'un lui demander s'il est des nôtres où si c'est un ennemi.

211 3. Le roi que le soin des âmes préoccupe sans cesse, envoie deux de ses conseillers, la Prudence et la Tempérance. Celui-ci met au Désir le frein de la discrétion et conseille à l'Espérance de modérer le pas. De son côté, la Prudence blâme la Crainte, lui reproche sa conduite peu sage, et lui donne ses recommandations pour l'avenir; en même temps, elle met au Désir la selle de la circonspection, afin que son cavalier ne tombe point à la renverse, et qu'il se trouve soutenu par derrière par la confession de ses péchés passés, par devant par la méditation du jugement de Dieu, à gauche par la patience et à droite par l'humilité. L'Espérance et la Crainte lui mettent des éperons aux pieds, à droite l'éperon de l'attente de la récompense, c'est l'Espérance qui le lui attache; à gauche l'éperon de l'appréhension du supplice, c'est la Crainte qui le lui met.

212 4. Après une courte halte, comme le soir approchait, et que le jour touchait à sa fin, les ennemis se réunirent de nouveau en foule, polir tenter un coup de main. La Crainte a peur, l'Espérance hâte le pas; c'est à grand'peine que la Prudence et la Tempérance les ramènent à de plus sages desseins. Vous voyez, dit la première, que le jour baisse et que la nuit approche, quiconque marche dans les ténèbres ne sait où il met le pied. Or il vous reste beaucoup de chemin à faire, et le nombre des ennemis est grand. Notre roi a un soldat d'une fidélité éprouvée, je le connais, il est campé près d'ici et sa tente est un abri des plus sûrs, car il l'a établie au milieu des rochers. Allons le trouver, si vous voulez, car on est bien chez lui. L'avis est goûté de tant de monde et on se demande qui se charge de montrer le chemin. Alors la Prudence dit : mon héraut d'armes, la Raison va marcher devant nous. Il connaît très-bien la route et il est connu et même un peu parent de la Justice. On se met donc en marche, la raison en tète, suivie du reste de la troupe. La raison ayant salué la justice, lui annonce que des hôtes lui arrivaient. Celle-ci lui demande qui sont ces hôtes, d'où et pourquoi ils viennent. Quand elle reconnut le roi, elle se lève le visage radieux et accourt au-devant des fuyards, les mains pleines de pains, et se présente à eux comme une vénérable matrone. L'âme met pied à terre, la justice la reçoit et s'empresse de la conduire dans l'intérieur de la maison.

213 5. Cependant les ennemis arrivent, assiègent le château fort, cherchent partout, s'il n'y a point quelque voie pour y pénétrer, ce sont des lions qui rôdent en cherchant une proie à dévorer. Mais le trouvant fortifié de tous côtés, ils dressent leurs tentes, établissent des gardes avancées pour empêcher d'entrer et de sortir, dans le dessein, quand le jour sera venu, de battre la muraille en brèche, et de fondre sur ceux qu'elle met à couvert de leurs coups. Cependant la Crainte que la peur et les soucis tiennent éveillée et qui ne se sent jamais rassurée, excite ses compagnons, va trouver la Justice, la questionne sur la force de la place, sur l'état des armes, ajoute et ceci et cela, et témoigne ses appréhensions que les provisions ne fassent défaut. La Justice lui répond que l'endroit où la forteresse est assise, comme elle peut s'en convaincre d'un coup d'oeil, est un rocher inaccessible et qu'il n'y a rien à craindre ni des armes ni des machines de l'ennemi. Cependant comme ce site est aride, il y a peu d'habitants, mais un morceau de pain d'orge sec suffit à leur nourriture. Or, il nous reste encore cinq: pains d'orge et deux poissons. A ces mots la Crainte s'écrie : qu'est-ce que cela pour tant de monde? et se prit de plus belle à avoir peur et à regretter d'être entrée là; puis, blâmant l'âme d'être descendue du Désir, elle ne cessait de lui répéter ces paroles : le dernier état de cet homme est devenu pire que le premier. Car son cheval, dans sa course précipitée, volait vers la ville, et maintenant il se trouve abandonné à la conduite de la Raison : qu'il dise maintenant, s'il ne se trouvait pas mieux alors qu'à présent.

214 6. Les choses en étaient presque au point qu'il s'en fallait peu que la Crainte n'attaquât l'Espérance qui ne partageait point son avis; mais la tempérance appela la Prudence qui reprochant à la Crainte ses procédés méchants lui dit : tu ferais mieux, ô Crainte, de tourner tes armes contre tes ennemis. Ignores-tu que notre roi, est le roi des vertus, le Seigneur fort et puissant, le Seigneur puissant dans le combat? Envoyons-lui donc un messager qui lui expose l'extrémité où se trouvent ses enfants, lui demande du secours et nous amène un auxiliaire. Mais qui se chargera de ce message, reprend la Crainte? La contrée est dans les ténèbres, un ennemi vigilant et nombreux assiège nos murs, et nous ne connaissons point les routes, attendu que nous nous trouvons en pays étranger. Ils appellent donc leur hôtesse, la Justice, et lui disent : si vous pouvez faire quelque chose, venez à notre aide. Celle-ci leur répond: prenez courage, car j'ai un messager rempli de fidélité pour le roi, il est bien connu de la cour céleste, c'est la Prière, il sait dans le silence de la nuit, par des sentiers inconnus, pénétrer dans les retraites du ciel, s'approcher du lit du roi, et par un mot, dit à-propos, toucher son âme charitable, et il est dans l'habitude d'obtenir du secours pour les malheureux en danger, en implorant le roi d'un ton lamentable. Qu'il aille le trouver, si vous le voulez bien, il est prêt, le voici. Tous ayant répondu : nous le voulons bien, la Prudence lui dit quelles insinuations il doit faire au roi, la justice lui dicte une règle de conduite pleine de fidélité et lui recommande de ne pas revenir les mains vides, les autres, et particulièrement la crainte, le prient de hâter sa marche , puis on le fait partir par une porte secrète de la forteresse. Alors traversant sans crainte les bataillons ennemis, plus rapide que l'oiseau, en un moment, en un clin d'oeil il arrive aux portes de la Jérusalem nouvelle. Les trouvant fermées, il frappe, en dépit des gardes qui ne pouvaient supporter qu'au beau milieu du silence de la nuit, il fit retentir la cité sainte de ses cris, sans se mettre en peine d'être importun au roi lui-même, et ne cessait de frapper et de faire entendre sa voix. Ouvrez-moi, dit-il, ouvrez-moi les portes de la justice, et quand je serai entré, je confesserai à haute voix au Seigneur notre roi, toute l'étendue des maux qui sont dans mon coeur. Car c'est ici, dit-il, la porte de mon Seigneur. C'est la justice qui m'a envoyé vers vous, pour être introduit auprès du roi, car j'ai des secrets importants à lui communiquer. Une voix de trouble s'est fait entendre dans notre contrée.

215 7. En apprenant que c'était un messager de la Justice, le roi ordonne qu'on l’introduise auprès de lui. Une fois arrivée près du roi, la Prière l'adore, et lui dit. Roi, vivez à jamais. Le roi lui repartit : Tout va-t-il bien pour votre maître et pour les siens. Oui, grâce à vous, Seigneur, lui dit la Prière. Votre serviteur, celui que vous savez, ravi sur l'ordre du roi, aux cornes des monocornes, a fait un détour pour se reposer chez votre soldat, mon maître ; or, Seigneur, le pays par là est exposé au vent du midi, il est aride et n'a point de vivres. Que le Seigneur donne sa bénédiction et notre contrée donnera du fruit. Les ennemis se sont réunis en. grand nombre pour combattre contre nous ; secourez-nous, Seigneur, dans notre tribulation, car il n'y a que vous, notre Dieu, qui puissiez combattre pour nous, nul autre ne saurait le faire. A ces larmes notre roi dont la nature est la bonté même, se sent ému et il dit: qui enverrai-je? Alors la Charité répond : me voici, Seigneur, envoyez-moi. Le roi voulait lui donner des compagnons, mais la charité lui dit que ses gens à elle lui suffisaient. Elle part donc, suivie de son noble cortège, la joie, la paix, la patience, la longanimité, la bénignité, la bonté et la mansuétude. Entouré de cette troupe, notre illustre chef s'avance ; il est sûr de la victoire, et, enseignes triomphalement déployées, il passe à travers la première et la seconde ligne des sentinelles ennemies. A peine est-il arrivé à la porte de la ville, qu'elle s'ouvre devant lui. A son entrée, toute la cité est dans la joie, et comme sur les instances de la joie, tout te monde se mit à pousser des cris d'allégresse et à acclamer la Charité, ces clameurs jettent l'épouvante dans le camp des ennemis qui se disent : que signifie ce cri d'allégresse qui retentit du camp d'Israël jusqu'à nous? Il n'en était pas ainsi hier ni avant-hier. Peut-être leur est-il venu du secours et il va faire une sortie contre nous. Fuyons donc Israël, car le Seigneur combat pour lui contre nous. Cependant la Charité impatiente de tout retard, fait ranger l'armée en bataille et ouvrir les portes, puis ordonne à haute voix de fondre sur les ennemis, en s'écriant: j'irai jusqu'aux portes de l'enfer. Voilà comment toute l'armée de la charité s'élance comme un seul homme et met en fuite les Babyloniens qui ne peuvent soutenir le choc, ni échapper à ses coups. On en voit mille tomber aux côtés de la Crainte et dix mille à ceux de la Charité.



TROISIÈME PARABOLE.

Le combat spirituel.

216 1. Jérusalem et Babylone ont levé des troupes l'une contre l'autre. D'un côté David, guerrier plein de vaillance, marche à la tête de l'armée des vertus, armée terrible et bien rangée en ordre de bataille; de l'autre, Nabuchodonosor conduit à sa rencontre, les esprits de malice (Ep 4,12), et son armée de vices qui, s'avance en désordre. Du camp de David sort une jeune recrue, récemment engagée sous les drapeaux de son roi, que l'éternel David a ceinte lui-même du glaive de la parole de Dieu, et a revêtue des armes de l'esprit, elle est animée d'un grand courage et se montre on ne peut plus impatiente de se mesurer avec l'ennemi, beaucoup moins dans le désir de le vaincre que dans l'espoir de se faire un nom. Son cheval est bouillant d'ardeur, c'est son corps ; encore tout nourri du suc du siècle, vigoureux, ardent, ce coursier répond admirablement par ses dispositions, au cavalier insigne qu'il porte. Dédaignant la discipline du camp, ce jeune soldat, plein de mépris pour ses compagnons d'armes, s'avance dans une sotte présomption, plus loin que les autres ; il bout d'ardeur, et n'aspire qu'à une chose, se faire un nom. David, en voyant son impétueuse présomption, lui fait dire sous peine de mort par son fils Salomon : « Malheur à celui qui est seul, car s'il tombe il n'a personne pour le relever (Qo 4,10). » Mais lui, sans tenir compte de ces avis, ne recherche que les occasions de montrer à lui-même et aux autres son courage, et roule dans sa pensée quelque action d'éclat. Il aperçoit de loin, dans le camp ennemi, couvert des armes de feu, un adversaire d'une forte malice et d'une méchanceté pleine de ruse et d'artifice ; ses mains étaient remplies de traits enflammés; il multipliait les blessures de tous côtés, tuait les blessés, foulait aux pieds les morts, faisait des prisonniers avec une facilité extrême, ne lâchait prise que très-difficilement, c'était l'esprit de Fornication.

217 2. Pensant donc dans sa présomption qu'il va donner un rare exemple de courage, il s'élance sur cet ennemi, et, pressant l'ardeur de son jeune coursier, du fouet de ses jeûnes et de l'éperon de ses veilles, il fond tête baissée sur lui. La Prudence lui crie par derrière: modère, modère ton ardeur ! La Discrétion lui dit : prends garde, prends garde ; toute (armée de David le blâme ; mais lui, faisant la sourde oreille, il passe outre, et se précipite, l'infortuné! à sa perte sans s'en douter. Nabuchodonosor l'aperçoit et frémit de rage, et pour le perdre il dresse des pièges ; en effet, pendant qu'il se précipite de la sorte à sa perte, deux soeurs, l'orgueil et la vaine gloire se placent à ses côtés et lui crient dans une pensée de ruse : Hardi! hardi! l'infortuné, trop docile à leur voix, précipite sa course encore davantage, il est au milieu des embûches et ne s'en aperçoit point. L'esprit de Fornication, qui a une longue expérience de ces sortes d'attaques et de cette espèce de combattants, feint de fuir, et, en trompant ainsi son malheureux adversaire, il l'engage à le suivre, jusqu'à ce que, l'ayant attiré au sein même des murs de Babylone, par la porte qui en était demeurée ouverte, il le livre à ses compagnons pour se moquer de lui. Maître Gaster et la Fornication réclament son cheval et ne lui laissent plus aucun droit sur lui. Au milieu de la lutte, il s'était abattu, et dans sa chute il avait gravement blessé son cavalier ; mais ses ennemis lui prodiguèrent à manger, quand il fut à Babylone, et après l'avoir bien engraissé de nouveau, ils le firent servir à leurs compagnons; quant à notre malheureux soldat il vit se dresser contre lui, la colère, l'envie et le cortège entier des autres vices, les pécheurs frappent sur son dos en pleine sécurité comme des forgerons sur une enclume. Quant à la Fornication dont il n'avait encore vu que le dos pendant qu'elle fuyait devant lui, elle se retourne sur lui avec un front levé et impudent, lui darde au coeur ses traits enflammés, brandit son glaive sur sa tête, le jette à terre et le foule aux pieds, puis, le livrant au cuisinier du roi de Babylone, nommé Nabuzardam, elle lui permet de se moquer de lui dans des orgies immondes. Elle ne permet même plus que ce soient les vices honnêtes qui portent la main sur lui, mais elle l'expose aux plaisanteries impures des bouffons de la cuisine de son roi, c'est-à-dire aux souillures de vices honteux et horribles. Ainsi réduit en servitude par ses ennemis, il est chargé des liens de la mauvaise habitude et précipité dans le cachot du désespoir.

218 3. De son côté David la tête couverte d'un voile répandait des larmes, en disant : Absalom, mon fils, mon fils Absalom. Puis, appelant à lui quelqu'un de sa suite qui s'asseyait sur les degrés de son trône, un courtisan utile et éprouvé, la Crainte est son nom, il l'envoie à sa recherche, il la fait accompagner de, l'Obéissance, afin qu'après l'avoir tiré de la prison, elle le remette entre ses mains. La Crainte part donc, et arrive auprès du malheureux conscrit, elle le ranime, et, après l'avoir tiré des chaînes et des cachots de la chair, suivant l'ordre qu'elle en avait reçu, elle le remet à l'Obéissance, elle lui rend son cheval, mais devenu rebelle et indomptable et qui veut à peine reconnaître encore son maître. L'Obéissance le prend, lui passe un mords de fer à la bouche, bien qu'il n'en veuille point, et qu'il se montre récalcitrant, puis replace son ancien maître sur son dos et lui apprend à changer sa force.

219 4. L'Obéissance reçoit donc le soldat du Christ des mains de la Crainte, elle le ramène dans son pays, par un autre chemin, et lui rétablit une première demeure chez la Piété, pour que la Piété paternelle lui redonne, en le rappelant, un peu de courage et ranime ses esprits que la Crainte avait abattus. Elle lui en construit une seconde chez la science, afin qu'il apprenne d'où il doit revenir et où il doit aller, et qu'il sache se servir de la Piété et de la Crainte, en sorte que la Piété t te l'élève pas trop à ses yeux et que la Crainte ne le rabaisse point à l'excès. Elle lui en bâtit une troisième chez la Force, afin que celle-ci lui donne l'énergie nécessaire pour accomplir son voyage de retour. La quatrième habitation qu'elle lui destine, elle la place chez le Conseil, pour qu'il fasse toutes ses actions avec le conseil d'un autre et qu'il ne se soustraie point à la conduite de l'Obéissance pour se mettre sous une autre conduite. La cinquième, elle la met chez l'Indulgence, afin qu'il commence à comprendre, non pas seulement par l'intelligence des tommes, mais par lui-même quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait à ses yeux (Rm 12,2). Le soldat du Christ arrive à sa sixième demeure chez la Sagesse, où il vient suivi de tous ses hôtes qui n'ont point quitté la route, et qui lui ont appris à trouver lu goût aux biens du Seigneur et à contempler de cette demeure, comme Moïse du haut du mont Abarim , les promesses de Dieu (Dt 32,49). Après cela, on arrive à Jérusalem, dans le royaume et la cité de David, dans la vision de la paix. Là les bienheureux, les pacifiques enfants de Dieu qui n'y arrivent qu'après avoir tout pacifié au dedans et dehors, célèbrent la joie de leur Seigneur, le sabbat des sabbats. Ainsi soit-il.




Bernard Opuscules 200