Discours 1973



1.
2.
1 3. Maria Annunciata 19 31 2010-12-14T08:26:00Z 2010-12-14T08:57:00Z 55 52511 299314 2494 702 351123 12.00
4.
5. 140 Clean false 14 false false false IT X-NONE X-NONE MicrosoftInternetExplorer4
Discours 1973

Eglise et documents vol. V – Libreria editrice Vaticana








AU CORPS DIPLOMATIQUE*

Jeudi 11 janvier



AU SERVICE DE L’HUMANITE DANS LA RECHERCHE DE LA PAIX



Le jeudi 11 janvier, le Saint-Père a reçu, à 11 h., dans le Salle du Consistoire, le Corps Diplomatique accrédité auprès du Saint-Siège qui Lui a présenté ses voeux respectueux pour le Nouvel An. Avec les Chefs de Mission, les Conseillers et le Personnel des diverses Ambassades assistaient aussi à l’audience quelques membres de leurs familles. Etaient présents également : le Secrétaire d’Etat, M. le Card. Jean Villot ; le Substitut de la Secrétairerie d’Etat, Mgr Giovanni Benelli ; le Secrétaire du Conseil pour les Affaires Publiques de l’Eglise, Mgr Pio Gaspari ; S. E. Monsieur René Brouillet, Ambassadeur de France, en lieu et place de S. E. Monsieur Luis Amado-Blanco, Ambassadeur de Cuba et Doyen du Corps Diplomatique, absent pour des raisons de famille, s’est fait l’interprète des sentiments de tous les Diplomates en adressant au Souverain Pontife les voeux de Nouvel An. Le Saint-Père a répondu par le discours suivant :



Nous sommes très touché, Monsieur l’Ambassadeur, de ce discours que vous venez de tenir devant Nous, en votre nom et au nom de tous les membres du Corps diplomatique accrédité auprès du Saint-Siège. Il Nous plaît de Nous retrouver en cette assemblée, à l’image de la diversité du monde, réunie en ce moment pour Nous présenter les voeux de Nouvel An. Vous avez évoqué ce qui caractérise, non seulement l’activité de notre pontificat, mais ces mobiles de l’esprit et du coeur qui déterminent nos attitudes journalières, donnent le ton à nos interventions, suscitent nos initiatives. Vous cherchez notre propre image, telle qu’elle se reflète, comme en un miroir, dans nos paroles et dans nos actes ; vous scrutez le sens de la fonction que Nous cherchons à accomplir au milieu de vous tous, et à l’égard des peuples dont vous êtes ici les nobles représentants.

Et de fait, chers Messieurs, cette fonction n’est pas comparable à celle dont vous avez pu être les témoins en d’autres postes diplomatiques. Votre présence Nous provoque en quelque sorte à définir à nouveau le système des rapports originaux entre l’Eglise et les Etats, entre le Saint-Siège et le champ de l’activité internationale, constitué par les relations entre pays ou avec les plus hautes instances universelles.

A vrai dire, il n’y aurait point besoin, aujourd’hui, d’un long discours sur ce thème. L’an dernier, Nous avions longuement précisé le rôle particulier de l’Eglise, étrangère à l’action politique en tant que telle, et pourtant très présente à la recherche des hommes sur les chemins de la justice, bien plus, travaillant au service des hommes pour éduquer leurs consciences et collaborer, à sa manière, à la promotion culturelle et sociale. Aujourd’hui, sa place tout à fait originale dans le concert des nations n’est plus à démontrer. Tout homme de bonne volonté comprend que Nous n’avons d’autre ligne de conduite que celle tracée par notre divin Fondateur : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » (Mt 22,21).

Les deux ordres sont vraiment distincts, et c’est une chance de notre époque d’avoir redéfini cette distinction capitale du pouvoir temporel et du Royaume de Dieu que l’Eglise incarne, au-delà des vicissitudes et des nécessités de l’histoire qui ont pu amener les uns ou les autres à certaines confusions. En ce sens, Nous n’avons pas, en tant que porte-parole de l’Evangile, à indiquer les voies politiques, les moyens concrets, que les citoyens, en telle conjoncture précise, doivent utiliser pour réaliser le progrès de leur propre pays.

2 N’allez pas en conclure, chers Messieurs, que les deux ordres n’ont pas de rapports profonds à entretenir. Votre présence ici, fruit d’un désir commun de votre pays et du Saint-Siège, n’atteste-t-elle pas le contraire ? C’est sur ce point que Nous voudrions aujourd’hui insister. Même si votre fonction d’Ambassadeur près le Saint-Siège revêt un caractère singulier, vous impose une forme d’activité particulière, c’est un rôle très important, dont l’utilité se révèle chaque jour plus féconde, et qui correspond bien à la situation moderne.

Nous avons d’abord, bien entendu, à mieux tracer les frontières de notre compétence respective. Vous pouvez aussi observer, en témoins amicaux, les positions ou les lignes d’action du Saint-Siège, pour vous en faire l’écho auprès de vos gouvernements. Nous avons surtout à collaborer ensemble au bien commun de chacune de vos patries et de l’humanité entière. Telle est la perspective que Nous nous permettons d’offrir à votre compréhension et à vos possibilités d’action.

En ce sens, vous le savez, Nous ne sommes pas neutre. Nous voulons dire : l’Evangile Nous interdit d’être indifférent lorsque sont en cause le bien de l’homme, sa santé physique, l’épanouissement de son esprit, ses droits fondamentaux, sa vocation spirituelle ; de même, lorsque les conditions sociales subies par une population mettent ces biens en péril, ou encore lorsqu’une Institution internationale a besoin d’être appuyée pour jouer le rôle humanitaire qu’on attend d’elle.

Le Saint-Siège, comme témoin actif et organe central de la grande famille catholique, accueille alors avec bienveillance les confidences, les souhaits, les projets, dont vous voulez bien lui faire part. Il vous sait gré aussi de faire connaître à ceux que vous représentez ses propres voeux qui sont ceux de la conscience chrétienne, cependant qu’il contribue lui-même, par les divers moyens dont il dispose, y compris ceux des communications sociales, à éduquer, dans ce sens, le coeur des hommes. Ces rapports, noués librement et au plus haut niveau entre l’Eglise et la société civile, apparaissent dès lors comme une forme nouvelle de présence de l’Eglise au monde, dans la ligne de la Constitution conciliaire Gaudium et Spes. Une telle présence exclut subordination, concession, compromis ou confusion entre les deux institutions. Les relations qui s’établissent ici avec le Saint-Siège gardent comme but immédiat, bien sûr, le règlement des problèmes qui peuvent surgir entre l’Etat et la communauté chrétienne locale, même si cette communauté est très réduite. Mais on ne peut aujourd’hui en rester là. Il s’agit, dans le respect réciproque des compétences, d’assurer la conjonction des efforts visant à promouvoir les initiatives humaines et les oeuvres sociales bénéfiques à tous. Tel nous apparaît l’un des buts actuels de la diplomatie pontificale.

Vous voyez donc ce que vous pouvez attendre de ce centre de l’Eglise. Il ne s’agit pas d’un marchandage d’intérêts, comme entre deux Etats dont les objectifs peuvent diverger ou s’opposer. Nous travaillons ici, vous et Nous, pour le bien spirituel et temporel des mêmes individus, de la même communauté. Et le Saint-Siège ne réclamera, vous le savez, aucun privilège, sinon les droits de la liberté religieuse.

Pratiquement, l’Eglise est engagée avec vous à rendre plus efficients les principes capables d’éclairer et de guider au mieux la vie en société de tous ces hommes dont le sort tient à coeur aux responsables des nations comme à l’Eglise. Or, les mutations de la vie moderne bouleversent tellement les moeurs qu’il nous faut, les uns et les autres, regarder hardiment les questions nouvelles, et surveiller à chaque pas le chemin que nous prenons car il pèse lourd sur l’avenir.

Comment, par exemple, garantir la liberté des individus et des groupes, encourager les initiatives libératrices et maintenir en même temps les exigences du bien commun, ou plutôt donner le goût de ce bien commun à promouvoir ? Comment établir ou rétablir la justice pour toutes les catégories sociales, sans que certaines ne demeurent lésées, ou du moins dans la misère, face à la prospérité des autres ? Comment favoriser l’expansion économique, et en même temps permettre aux hommes de la maîtriser, d’assurer un équilibre écologique, d’accorder son prix au progrès qualitatif des personnes, de leur esprit, de leur coeur, de leur âme ? Comment adapter la législation aux légitimes aspirations du monde moderne et aux possibilités scientifiques nouvelles, sans que l’homme lui-même, la qualité de l’amour, le respect de la vie, la valeur de la famille, la responsabilité de la conscience humaine n’en fassent les frais, aujourd’hui ou demain ? Tels sont, n’est-il pas vrai, les intérêts profonds que nous avons à garantir ensemble. Ce siège Apostolique n’aspire qu’à y contribuer, et vous êtes, Messieurs les Ambassadeurs, au premier rang de ce dialogue entre lui et les gouvernements de votre pays.

Vous pouvez, à côté de la recherche de ces principes communs, faire également ici l’expérience d’une fraternité appréciable, entre les divers pays du monde. Certains de ces pays connaissent entre eux des différends qui, certes, ne peuvent trouver leur solution au Vatican. Mais le niveau auquel se situent ici les relations avec l’Eglise, passionnée de paix et respectueuse de tous les droits, et plus encore la mise en présence du Mystère de la foi chrétienne, créent un climat qui devrait contribuer à rapprocher les coeurs, à les placer devant leur plus haute responsabilité, à préparer la paix.

En plus de cette atmosphère de fraternité, le Saint-Siège, vous le savez, est prêt à faire tout ce qui est en son pouvoir pour donner à la vie internationale une plus grande consistance organique. Il existe en effet un égoïsme international qui semble empêcher les Etats de traduire en action collective les bons sentiments de leurs peuples. Sur cette terre pourtant, le monde ne sera sauvé, c’est notre conviction, que par une solidarité croissante, au-delà des nationalismes ombrageux. Il faudra sans doute encore un long apprentissage pour apprendre aux nations à se respecter, à échanger dans la justice et dans la paix, à partager, à se tourner ensemble vers les objectifs prioritaires, voire à accepter, s’il en est besoin, le contrôle d’une autorité internationale. L’Eglise catholique, de par sa vocation, est particulièrement sensible à cette universalité. Si la concertation mondiale devait se ralentir ou s’atrophier, laissant les grandes décisions effectives aux mains de deux ou trois puissances, ce serait à nos yeux un recul et une menace. Les Institutions internationales, que l’humanité s’est enfin donnée, sont appelées, grâce à une représentation équitable de toutes les nations participantes, à exprimer et à mettre en oeuvre la raison, le droit, la justice ; à réaliser, avec la coopération de tous ou du moins d’une quasi-unanimité, une loi sévère et pacifique capable de régler les rapports internationaux (cf. Message pour la Journée de la Paix 1973). Elles représentent à nos yeux, Nous n’hésitons pas à le redire, « le chemin obligé de la civilisation moderne et de la paix mondiale ». (Discours aux Nations Unies, 4 octobre 1965 : AAS 57, 1965, p. 878). Nous ne cesserons d’inviter les peuples à se hausser au niveau de ce bien commun universel qui correspond au dessein du Créateur du genre humain, et qui assurerait en définitive leur propre bien.

Faut-il citer un exemple ? Le monde entier commence à s’émouvoir de la recrudescence de la violence : Nous parlons du terrorisme international. C’est un problème grave et urgent, qu’il appartient à tous les partenaires de résoudre ensemble, par une loyale approche, sans omettre d’attirer aussi l’attention sur les causes de ce phénomène, ses modes et ses mobiles. Mais qui oserait soutenir que la fin justifie les moyens, que la terreur peut être une arme pour les causes légitimes, que l’action violente contre les innocents sert valablement la cause qu’on estime bonne ? Nous espérons qu’on saura trouver les moyens adéquats de se faire entendre et de préparer des remèdes efficaces, dans une large concertation.

Quant à l’Evangile, qui est la charte de l’Eglise, il contribue, c’est notre conviction et notre expérience, à mettre les hommes, non seulement sur le chemin de Dieu, mais sur la voie d’un humanisme plénier. Les valeurs morales auxquelles il éduque apportent un puissant remède aux maux qui défigurent le visage de l’humanité et qui atteignent son coeur : elles s’appellent vérité, justice, liberté, pardon, paix. Elles prennent leur source dans l’amour dont le dynamisme doit supplanter partout celui de la haine. Et elles apportent avec elles la confiance, bien plus, une espérance inébranlable : avec le meilleur de l’homme et le secours de Dieu, ce que nous souhaitons est possible. Pourquoi alors s’arrêter aux désillusions inévitables, se laisser décourager par certains faits, pourquoi attendre avant de reprendre patiemment les chemins de l’entente ? Nous vous savons gré d’avoir rappelé cette espérance de notre ultime message : oui, la paix est possible.

3 Telle est, chers Messieurs, au plan temporel, la signification de ce Siège Apostolique et du dialogue amical qu’il entretient avec vos gouvernements, par votre intermédiaire ; tel est aussi le sens de nos Représentations pontificales qui font pendant à vos Ambassades : aider le monde à ne faire qu’un, aplanir sans cesse les routes de son unité, de sa solidarité. Notre voix veut se faire l’écho de l’Evangile. Elle peut paraître faible, Nous le savons, elle est démunie des moyens qui sont entre les mains des Etats ; mais elle n’est pas seule : avec elle s’élève celle de nos multiples Frères dans l’épiscopat, dont la mission — faut-il le rappeler ? — est inséparable de la nôtre, et la voix aussi de ceux qui partagent la foi, l’espérance et la charité chrétiennes, et qui oeuvrent, à leur place, au même témoignage.

A ce service de l’humanité, vous oeuvrez, vous aussi, Messieurs les Ambassadeurs, dans un rôle que Nous estimons, honorons et encourageons. A travers vos personnes, Nous saluons respectueusement chacune de vos nations : Nous formons pour elles des voeux de bonheur et de paix, et Nous nous réjouissons de ce qu’elles prennent leur place active dans cette marche vers une Communauté humaine de plus en plus élargie et de plus en plus solidaire. A vous-mêmes, chers Messieurs, à vos familles, Nous présentons nos souhaits cordiaux au seuil de l’An Nouveau, invoquant sur votre mission l’assistance divine, et sur vos personnes les Bénédictions abondantes du Très-Haut.



*Version originale française dans:

AAS 65 (1973), p.35-41;

Insegnamenti di Paolo VI, vol. XI p.30-36;

ORf n. 3 p.1, 2;

La Documentation catholique, n.1625 p.109-111.



AUX PARTICIPANTS À LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE


DU SCOUTISME CATHOLIQUE


Mercredi 17 janvier 1973




Chers Fils du Bureau mondial de la Conférence internationale du Scoutisme catholique!

Vous avez exprimé le désir de Nous rendre visite pendant votre session de travail à Rome. Maintenant vous pouvez sentir, dans la cordialité de notre accueil, la sollicitude pastorale que Nous avons pour ceux que vous représentez, et l’intérêt que Nous portons aux richesses éducatives du scoutisme. Soyez donc les bienvenus auprès de Nous!

En cette période où la coutume est d’offrir des voeux, Nous vous souhaitons de tout coeur, au long de l’année nouvelle, de savoir apporter aux jeunes, auxquels vous consacrez votre temps et vos énergies, ce dont ils ont le plus besoin: une raison de vivre, une raison d’espérer, une raison de croire. Cette raison, c’est le Christ, qui les aime et que bien souvent ils connaissent mal. Puissent-ils comprendre qu’un engagement fraternel au service des hommes est digne de respect, mais qu’un engagement accompli en union avec le Christ et pour Lui acquiert une toute autre dimension!

4 Ces quelques mots vous encourageront dans le choix de vos orientations et l’adaptation des moyens pédagogiques très concrets que Nous avons en grande estime. Nous prions le Seigneur de susciter très nombreux autour de vous des éducateurs qualifiés, et Nous lui demandons de vous accorder, comme aux prêtres qui vous aident et spécialement à votre nouvel Assistant ecclésiastique, sa lumière et sa force, pour donner à la jeunesse l’impulsion morale et spirituelle dont la société a si grand besoin. Et Nous, de tout coeur, Nous vous bénissons.



AUX REPRÉSENTANTS DU MOUVEMENT MONDIAL


DES TRAVAILLEURS CHRÉTIENS


Mercredi 17 janvier 1973




Vivement sensible à la démarche filiale qui vous conduit à Nous à l’occasion de la Session de votre Bureau, Nous vous accueillons avec grande joie. Vous êtes pour Nous, pour l’Eglise, les représentants d’une Organisation internationale catholique qui s’est donné pour mission de révéler Jésus Christ et son Message libérateur et sauveur au monde du travail. Votre mouvement a en même temps pour tâche d’exprimer dans l’Eglise les besoins, les aspirations, l’attente spirituelle de ces millions de travailleurs, aimés d’une manière privilégiée par le Seigneur.

Nous n’ignorons pas les difficultés auxquelles votre engagement apostolique vous affronte. Difficulté de faire entendre un Message spirituel à des hommes que tourmentent trop souvent, hélas, des conditions de vie matériellement précaires ou des conditions de travail épuisantes ou instables; difficulté d’annoncer l’Evangile dans un monde que traversent et imprègnent des idéologies ou des préjugés étrangers ou hostiles à la foi chrétienne. Difficulté encore, et ce n’est pas la moins pénible, de faire reconnaître par une partie de la société, et même par certains de vos frères dans la foi, comme patrimoine de dignité et pierres d’attente du salut les efforts solidaires que votre milieu poursuit pour le respect de ses valeurs culturelles et pour l’instauration d’une plus grande justice sociale.

Nous voulons vous assurer, chers Fils et chères Filles, que vos préoccupations apostoliques sont les Nôtres. C’est Notre profond désir que soit partagée par tous les Chrétiens, à quelque milieu qu’ils appartiennent, la conviction que l’Eglise ne peut être l’Eglise de Jésus Christ sans la présence et la participation du monde ouvrier, de même que le vrai salut des travailleurs ne peut être réalisé en dehors du Christ.

En ce trop court moment de rencontre, Nous ne pouvons entamer un long discours sur les aspects multiples et complexes de l’apostolat en monde ouvrier. Nous nous sommes exprimé à ce sujet en des occasions récentes. Nous voudrions du moins ce matin vous renouveler Nos encouragements, vous dire Notre confiance, Notre espérance que, malgré le nombre limité de apôtres laïcs ouvriers, c’est d’abord par eux que se réalise et se réalisera de plus en plus la fondation de l’Eglise du Christ dans le monde des travailleurs. Il y faut certes le recours à une vie intérieure profonde, nourrie par l’Evangile et les sacrements; il y faut le concours de prêtres animés d’un amour vrai, et non partisan, du monde ouvrier et de ses richesses de salut. Votre mouvement, Nous en avons la conviction, est qualifié pour susciter de nouvelles générosités au service de cet apostolat si urgent et indispensable. C’est le voeu que Nous vous portons de grand coeur, chers Fils et chères Filles, en appelant sur chacun de vous, sur vos familles, sur les membres du M.M.T.C., sur vos frères ouvriers, la Bénédiction du Seigneur.



AUX MEMBRES DU SECRÉTARIAT POUR


LA PROMOTION DE L'UNITÉ DES CHRÉTIENS


Lundi 22 janvier 1973




Monsieur le Cardinal,
chers frères dans le Christ,

C'est avec une joie toute particulière que Nous vous accueillons aujourd’hui et Nous vous remercions bien sincèrement d’être venus expressément Nous présenter la traduction oecuménique du Nouveau Testament, partie de la «Traduction OEcuménique de la Bible». Par cette démarche, vous avez voulu Nous associer à cette étape si importante sur le chemin qui nous conduira vers le but tant désiré: l’unité de tous ceux qui croient en Christ et ont été baptisés en lui.

Le deuxième Concile du Vatican n’a pas hésité à exprimer la vénération de l’Eglise envers la Parole de Dieu écrite en la rapprochant de celle qu’elle exprime envers le Corps même du Seigneur dans l’Eucharistie. Il affirme en effet, dans la Constitution sur la Divine Révélation: «L’Eglise a toujours témoigné son respect à l’égard des Ecritures, tout comme à l’égard du Corps du Seigneur lui-même, puisque, surtout dans la Sainte Liturgie, elle ne cesse, de la table de la Parole de Dieu, comme de celle du Corps du Christ, de prendre le pain de vie et de le présenter aux fidèles» (Dei Verbum DV 21). De cela le Concile a tiré les conclusions en une phrase lapidaire: «Il faut que l’accès à la Sainte Ecriture soit largement ouvert aux chrétiens» (Ibid. 22).

5 Considérant maintenant le difficile cheminement de l’Eglise à travers l’histoire, on doit constater avec douleur comment le mal de la division a réussi à pénétrer même dans l’usage de ce don divin, faisant de lui une occasion de division. Le Concile reconnaît que, en ce qui concerne l’autorité des Livres Saints, les frères non catholiques «ont une opinion différente de la notre (et différente aussi entre eux), au sujet de la relation entre Ecritures et Eglise. Dans celle-ci, selon la foi catholique, le magistère authentique occupe une place particulière pour l’explication et la prédication de la Parole de Dieu écrite» (Unitatis Redintegratio UR 21). Mais le même Concile professe immédiatement sa foi dans la vertu unificatrice de l’Ecriture: «Cependant les paroles divines sont, dans le dialogue moi-même, des instruments insignes entre les mains puissantes de Dieu pour obtenir cette unité que le Sauveur offre à tous les hommes» (Ibid. 59).

Nous le constatons avec joie: à partir de telles déclarations est née une large collaboration entre catholiques et experts des Sociétés Bibliques pour publier des traductions communes de la Sainte Ecriture, facilement accessibles, même du point de vue économique, à de nombreux fidèles.

La traduction oecuménique que vous avez voulu nous présenter occupe cependant une place toute particulière. En effet, elle n’est pas seulement une traduction moderne, avec des notes de caractère géographique, historique et linguistique, comme cela se fait habituellement; elle offre au lecteur d’amples notes exégétiques et théologiques.

A propos de ces notes, nous pouvons faire cette observation: sauf une introduction à telle ou telle épître et à certains textes traditionnellement controversés - où d’ailleurs figurent les interprétations propres aux diverses confessions -, votre commentaire est tel que presque toujours il ne présente qu’une seule et même interprétation qui peut être honnêtement acceptée par les représentants de toutes les confessions ayant participé à ce travail.

Ce n’est pas ici le moment de nous arrêter au labeur que vous avez accompli. Qu’il Nous suffise d’exprimer notre satisfaction pour le fait que les cent cinquante artisans de cette traduction - protestants, orthodoxes et catholiques - aient pu se rencontrer d’une telle façon et collaborer dans une telle mesure pour présenter la Parole de Dieu.

Nous remercions les organisateurs et les collaborateurs de cette oeuvre et Nous formulons ce souhait: comme les auteurs de cette traduction ont connu une certaine union dans le travail, puissent les frères chrétiens des diverses confessions qui se serviront de ce texte se mettre à la même écoute de la Parole de Dieu! Que le Verbe de Dieu fait chair les conduise tous sur le chemin de l’unité qu’il veut pour son Eglise!






AUX REPRÉSENTANTS DE L'ASSOCIATION DE LA PRESSE ETRANGÈRE EN ITALIE

24 janvier



LA HAUTE MISSION D’OBJECTIVITE DU JOURNALISME SE REALISE DANS L’INFORMATION RELIGIEUSE



Le Pape a donné audience à l’« Association de la Presse Etrangère en Italie » à 12h. 30, le mercredi 24 janvier, dans la Salle du Consistoire.

Les représentants de divers journaux et agences, étaient conduits par M. Jacques Nobécourt, Président de l’Association de la Presse Etrangère en Italie, qui, à l’ouverture de l’audience, a prononcé une adresse d’hommage au Souverain Pontife. Paul VI a répondu par le discours suivant :



Chers Messieurs,



Nous vous remercions des paroles aimables et confiantes que vous venez de Nous adresser par la voix de votre Président. Vous avez voulu Nous associer au soixantième anniversaire de l’« Associazione della Stampa Estera in Italia », célébré en octobre dernier. Nous nous y prêtons bien volontiers, en cette fête de saint François de Sales, le saint patron des journalistes, qui a voulu mettre la vie spirituelle la plus authentique à la portée de tous les laïcs, comme vous vous efforcez de mettre l’actualité à la portée du grand public.

6 Vous êtes les bienvenus en cette maison où, voici vingt ans, notre prédécesseur Pie XII accueillait avec honneur les membres de votre Association. Le Pape Jean avait aussi adressé, en février 1963, à votre Conseil de direction, des paroles émouvantes, simples et nettes, jaillies de son coeur d’apôtre et de son expérience des hommes, tout empreintes de confiance. C’est sur ce ton de la conversation familière que Nous abordons cette rencontre, heureux, oui, très heureux, de pouvoir Nous entretenir avec vous de votre profession qui Nous a toujours tenu très à coeur.

Nous regardons d’abord avec une grande sympathie, imprégnée d’estime et de réalisme, la mission qu’il vous est donné d’assumer dans le monde moderne. C’est un fait, vous représentez une force immense dans notre civilisation. Aucune institution ne peut faire fi de l’opinion publique que vous contribuez singulièrement à former, avec les autres moyens de communication sociale. L’expérience confirme chaque jour davantage ces paroles que le regretté Père Emile Gabel écrivait il y a dix ans : « L’information... est le système nerveux de la vie moderne, par les réactions qu’elle déclenche et l’influx qu’elle propage à travers tout le corps social » (Etudes, t. 318, juillet-août 1963, p. 19). Il Nous revient aussi à la mémoire cette pensée judicieuse de Biaise Pascal : « Je voudrais de bon coeur voir le livre italien, dont je ne connais que le titre, qui vaut lui seul bien des livres : "Della opinione regina del mondo". J’y souscris sans le connaître, sauf le mal, s’il y en a » (Pensées, éd. Brunschvicg, n. 82). La façon dont vous recueillez les faits, dont vous les groupez, les présentez, les interprétez, fournit à vos lecteurs une matière à réflexion et des critères de jugement dont l’écho et la résonance commune — c’est ainsi que Pie XII qualifiait l’opinion publique — prennent une place capitale qu’il serait superflu de décrire. C’est dire le rôle passionnant qui vous échoit, comme aussi la responsabilité considérable attachée à ce pouvoir.

Mais Nous pourrions dire également que votre métier comporte des exigences, et aussi des servitudes qui ne Nous échappent pas : elles mettent les journalistes consciencieux devant une tâche lourde, délicate et difficile.

La première exigence est celle de vous soumettre au réel, qu’il s’agisse de faits, de situations, de mentalités. Tous les faits ne sont certes pas des « événements », objets d’information. Mais il ne s’ensuit pas que leur choix, et à plus forte raison leur interprétation, soient laissés entièrement à votre liberté. Les lecteurs attendent de vous une documentation honnête, précise, aussi complète que possible, qui leur permettra de juger, en responsables. Quelle que soit l’initiative que vous avez à mettre en oeuvre, il y a donc une certaine ascèse en face d’une réalité qui n’est pas une construction de l’esprit, et d’un public qui manifeste de justes exigences. En ce sens, vous n’apparaissez plus comme des maîtres, mais comme des serviteurs.

Par ailleurs, ce travail intéressant se révèle par lui-même très astreignant, à cause du foisonnement continuel de l’actualité. Il ne vous laisse guère de repos, car vous devez être prêts à accueillir quotidiennement l’événement. Bien plus, il vous faut faire vite pour saisir les informations à leur meilleure source, rassembler les antécédents qui les situent, décrire le contexte, rédiger d’une plume alerte, dans un article condensé, que les responsables de la mise en pages risquent de réduire à leur tour. Nous avons bien conscience de ces difficultés.

Il y a enfin et surtout les servitudes de la presse pour laquelle vous travaillez, et les goûts des lecteurs dont on cherche à capter l’intérêt, ne serait-ce que pour faciliter la vente. Cela met à rude épreuve le souci d’objectivité, disons d’indépendance, qui constitue à nos yeux l’honneur du journalisme. Il vous faut d’abord résister à la tentation du sensationnel à tout prix, qui entraîne à devancer l’actualité, à simplifier ou à déformer la réalité, voire à s’appesantir sur ses aspects les moins nobles: une telle presse se déshonore elle-même. Il existe aussi bien d’autres conditionnements, plus insidieux, qui peuvent s’exercer sur vous, d’ordre économique, politique, idéologique, ou issus de groupes de pression dont l’opinion semble faire la loi du jour et que l’on n’ose pas contrecarrer. Il y a tout simplement la concurrence implacable, qui peut vous inciter à publier vous aussi des éléments discutables dont on vous reprocherait de ne pas avoir parlé, ou à faire le silence sur des points importants qui ne passionnent malheureusement pas l’opinion publique. Toutes ces conditions actuelles des communications sociales ne font que souligner la conscience et le courage que requiert votre profession, et peut-être aussi la solidarité qu’elles vous appellent à mettre en oeuvre, avec vos collègues, dans votre milieu, pour assainir toujours davantage les moeurs journalistiques et vous assurer l’indépendance nécessaire à l’objectivité.

Toutes ces difficultés existent : néanmoins les impératifs de la « déontologie » de la presse demeurent. Ils impliquent amour incorruptible de la vérité, recherche laborieuse, droiture, humilité, aptitude au dialogue. Il ne s’agit pas d’une morale négative, faite d’interdits, qui risquerait effectivement de vous décourager. Il s’agit de répondre à ce droit de tout être humain à une information objective, comme le proclamait Jean XXIII dans Pacem in terris ; de lui permettre ainsi de savoir, de comprendre, de se cultiver, de mieux prendre en main son destin et de participer à la construction de la cité, en responsable éclairé. Cet objectif suppose un sain pluralisme de la presse, qui permet une confrontation des points de vue, une communication, un dialogue ouvert avec les lecteurs, à la recherche d’une plus grande vérité et d’un plus grand bien. Dans ce concert, vous avez pleinement le droit d’exprimer vos idées et de défendre vos préférences, mais jamais au détriment d’une information objective ni d’un jugement équitable. Ce serait une responsabilité redoutable que de répandre une conception tronquée de la réalité, qu’il s’agisse des institutions ou des personnes. Votre rôle est de susciter une formation pleinement humaine, d’être des éveilleurs, grâce à l’instrument de choix dont vous disposez. C’est dire l’honneur que Nous accordons à votre profession, l’estimant toujours capable d’un meilleur service des hommes.

Dans l’Eglise également, cette importance de la presse a fait l’objet d’une réflexion mûrie, notamment depuis le Concile Vatican II, et de dispositions appréciables. Les moyens de communication sociale y ont été envisagés dans leur signification la plus positive, en dépit de leurs imperfections et de leurs risques. Le droit à l’information, qui y a été proclamé et précisé, trouve son application dans l’Eglise elle-même : en même temps qu’une institution hiérarchique agissant au nom du Christ, n’est-elle pas aussi une communauté humaine, avec la nécessité du dialogue et de la participation ?

Comme témoin typique de cet effort, notre Commission pontificale a publié l’Instruction pastorale Communion et progrès : Nous vous invitons à la méditer de nouveau et Nous sommes heureux de l’offrir en hommage à chacun d’entre vous. Témoins aussi ces initiatives que le Saint-Siège a peu à peu mis en oeuvre au Vatican, et que vous avez eu la courtoisie d’évoquer : la salle de presse, près de laquelle la plupart d’entre vous sont accrédités et qui demeure en permanence à votre disposition ; les nombreuses conférences de presse qui ponctuent la parution des documents pontificaux ; la distribution aussi de ces textes et de leur traduction, avec embargo quand c’est possible. Vous avez reçu progressivement une information plus complète au cours du Concile, des divers Synodes d’évêques ; la salle du Synode a connu récemment des débats de qualité sur la justice et la paix... Il demeure évidemment des limites que la discrétion et le bien commun exigent, dans l’Eglise, plus encore que dans les autres sociétés. La raison en est simple. Si l’Eglise doit bien connaître le monde auquel sa pastorale est destinée et susciter une large collaboration de ses fils, ses décisions prennent leur appui dans l’Evangile et dans sa propre Tradition vivante, non dans l’esprit du monde, ni dans l’opinion publique, à laquelle échappe souvent d’ailleurs la complexité des problèmes théologiques ou pastoraux qui sont en cause. Mais nous ne prétendons pas pour autant, en ce qui concerne le Saint-Siège, avoir réalisé tout ce qui serait possible et souhaitable pour faciliter votre travail. De toute façon, c’est dans un climat de respect, de confiance, de sincère collaboration que pourront s’accomplir de nouveaux progrès.

Et maintenant, Nous n’oublions pas que vous êtes journalistes, en quête de nouvelles, d’interviews, au cours de toutes vos rencontres, y compris celle-ci. Et vous êtes vous-mêmes porteurs de questions, des vôtres, de celles de nos contemporains, dans le désir de contribuer à établir comme « un pont » entre l’Eglise et l’humanité. Le monde attend effectivement de Nous des réponses à sa recherche, à son inquiétude, à son espérance. Nous nous efforçons de le faire dans les actes habituels de notre ministère. Nous regrettons toutefois que, trop souvent, un seul aspect de nos paroles soit mis en relief. Ce matin, Nous nous contentons d’attirer votre attention sur quelques-unes des lignes maîtresses de notre pontificat, en faisant appel à votre collaboration.

Sur le plan de l’Eglise, dont il Nous revient de confirmer la foi et de garantir l’unité, Nous veillons à appliquer fermement et intégralement le Concile Vatican II, à marcher sur les chemins qu’il a ouverts. Nous tenons à le faire dans l’esprit de notre première encyclique Ecclesiam suam. A ce sujet, Nous voudrions vous dire un mot des multiples actes pontificaux, législatifs et pastoraux, qui ont jalonné ces dernières années. Mesurez-vous à quel point ils sont longuement préparés, dans leur ensemble, par une intense collaboration avec les représentants de tous nos Frères dans l’épiscopat ? Si leur préparation requiert de nous, Pasteurs, une étude théologique exigeante, leur présentation au grand public, qui se fait en partie par votre intermédiaire, vous demande aussi, à vous journalistes, une réflexion sérieuse en ce domaine.

7 Vous êtes témoins aussi des troubles qui agitent l’Eglise. Les réformes qui suivent un grand Concile nécessitent toujours un ajustement laborieux, et plus encore l’adaptation rapide aux mutations accélérées de notre époque. Mais ces conjonctures n’expliquent pas toute la profondeur des remises en question. Comme Pape, Nous en mesurons la gravité, et Nous devons, tel un veilleur, en signaler l’ambiguïté humaine, voire l’ivraie que le Malin sème dans le Royaume de Dieu. Au milieu de tant de phénomènes marginaux et contestataires, qui sont une proie facile pour le journalisme, comment ne pas souhaiter que vous sachiez discerner, vous aussi, ce qui peut être recherche loyale d’une attitude évangélique, et ce qui porte déjà la marque d’une aventure stérile, coupée de ses racines vivifiantes ? Souvent le bien ne fait pas autant de bruit !

Précisément, Nous ne cessons de relever ce qui manifeste un réveil authentique, un progrès dans la prière, dans l’engagement de charité, dans la participation active à l’oeuvre de l’Eglise. Ces signes sont nombreux, même s’ils sont discrets : ne pourraient-ils pas faire davantage l’objet de votre regard attentif, de votre témoignage ? Le journaliste, surtout le journaliste chrétien, doit, comme le théologien, avoir les yeux grand ouverts sur la chrétienté en travail (cf. M. D. chenu, O.P., dans La Parole de Dieu, II, L’évangile dans le temps, Cerf 1964,
PP 212-224). La véritable Eglise s’enfante aujourd’hui dans la fidélité et la hardiesse de l’Esprit, dans l’unité du Corps du Christ. Nous ne vous demandons pas d’en faire à priori l’apologie, mais d’accorder vraiment la place qu’ils méritent à ces faits positifs. Comme le Seigneur, Nous vous disons : venez et voyez ! (cf. Jn Jn 1,39).

Sans doute le mystère de l’Eglise sera-t-il toujours difficile à saisir pour ceux qui sont chargés, comme vous, d’en relever les aspects phénoménologiques. L’Eglise est faite d’hommes, de relations sociales. Le Saint-Siège lui-même utilise un appareil extérieur dont l’opinion publique a tendance à ne voir que les détails insignifiants. Vous connaissez les « lieux communs » qui circulent sur le Vatican et qui donnent une image insolite et fausse de la réalité, sans laisser bien souvent la possibilité pratique de faire les rectifications nécessaires. Peut-être êtes-vous plus sensibles encore à la tentation subtile de ne chercher, dans les actes du Saint-Siège, que la portée ou même les intentions « politiques ». Mais Nous vous estimons capables de vous élever au-dessus de ces visions partielles ou déformées. La loyauté demande qu’on interroge l’Eglise sur ce qu’elle dit d’elle-même, sur ce qu’elle est en réalité : une institution dont les mobiles ne sont pas politiques, mais spirituels, dont les racines sont évangéliques, dont la visée est eschatologique. En hommes de bonne volonté, sachez en découvrir le coeur, et le manifester à vos lecteurs, comme l’exigent la vérité et l’objectivité. Nous faisons particulièrement appel à ceux qui, parmi vous, partagent la foi chrétienne : comment pourraient-ils parler de l’Eglise, comme d’une réalité extérieure, alors qu’elle est pour eux aussi une mère ? Ne serait-ce pas la meilleure chance pour eux de la comprendre de façon adéquate ? On ne connaît bien qu’avec le coeur.

En dehors de la vie interne de l’Eglise, vous êtes témoins encore de nos préoccupations pour tout ce qui touche l’existence de nos contemporains : les droits de l’homme, la famille, la culture, les problèmes économiques et sociaux, la construction de la communauté internationale. C’est vrai : il n’est pas de domaine humain qui ne rencontre notre sollicitude. La Constitution Gaudium et Spes vous donne le secret de notre intérêt, de notre solidarité avec les espoirs ou les angoisses des hommes de notre temps. Dans tous ces secteurs les chrétiens ont un service à accomplir avec tous les autres hommes, sans perdre de vue l’achèvement dans le Royaume du Ciel ; ils s’y engagent avec l’urgence de la charité. Notre vision peut vous apparaître bien optimiste : elle, l’est en effet. Nous sommes sûrs que Dieu a sauvé le monde et promis aux hommes son Esprit. Puissiez-vous donner largement écho à notre espérance ! C’est d’elle que les hommes ont besoin pour entreprendre et pour bâtir un monde meilleur. Un acte d’amour généreux est un événement plus important qu’un acte de haine. Il dépend de vous aussi que l’humanité ne soit pas assombrie, mais éclairée, stimulée par la vision qu’elle puise dans vos journaux.

Quant à la paix elle-même, vous connaissez nos convictions, sans cesse reprises dans nos exhortations. Si la solution pratique des conflits échappe à notre compétence, nous voulons du moins exercer ce ministère de réconciliation dont le Seigneur nous a chargé, c’est-à-dire renverser sans cesse ce mur d’indifférence et de haine que le Christ est venu détruire en son principe (cf. Ep Ep 2,14). Et quand nous parlons de paix, nous ne la séparons jamais de la justice. Nous vous remercions de l’écho que vous y donnez.

Faut-il formuler un dernier souhait ? Nous vous invitions tout à l’heure à échapper à une certaine conspiration du silence qui se fait autour de problèmes vitaux pour l’humanité comme pour l’Eglise. Il est en effet des catégories entières de gens qu’on pourrait appeler les « laissés-pour-compte de l’information », qui ne créent pas aujourd’hui de problèmes politiques sur le plan international, mais qui sont oubliés dans leur misère, lésés dans leur dignité humaine, dans leurs droits humains élémentaires, dans leur liberté, dans leurs exigences spirituelles. L’esclavage n’est pas aboli autant qu’on le croit et les prisonniers dits politiques ont rarement été si nombreux. Vous Nous permettrez d’évoquer des situations qui Nous tiennent particulièrement à coeur: le sort injuste et douloureux fait à l’Eglise en certains pays. Prend-on suffisamment au sérieux la souffrance de ceux qui en sont victimes, qui ne peuvent, y exprimer librement leur foi ni disposer des moyens normaux de la transmettre à leurs enfants ? Puisque vous Nous demandez nos préoccupations, celle-là demeure essentielle.

Voilà, chers amis, quelques confidences amicales que Nous soumettons à votre réflexion. Elles vous manifestent notre estime et notre confiance. Nous sommes prêts à vous aider dans votre tâche difficile et prions l’Esprit-Saint dé vous assister. Puissiez-vous à votre tour faire connaître le vrai visage du Saint-Siège, de l’Eglise, travailler de concert avec Nous pour les grandes causes de l’humanité, pour la paix. Nous saluons en vous chacun des pays dont vous représentez la presse en Italie. Nous formons les meilleurs voeux pouf vous-mêmes comme pour vos familles, et Nous invoquons sur vous tous, avec le patronage de saint François de Sales, les Bénédictions de Celui qui nous a apporté l’Evangile, la Bonne Nouvelle.






Discours 1973