Discours 1978 21

LE CHRIST MARCHE AVEC VOUS CHAQUE JOUR





Le 20 mai le Saint-Père a reçu en audience plus de 12.000 jeunes membres de l’Action Catholique Italienne, venus de tous les diocèses du pays « pour répondre au Pape qui leur a confié le Message pour la paix de 1978 et le remercier de la confiance mise en eux ». Voici, en traduction, le texte du discours que Paul VI leur a adressé :



Très chers jeunes gens,



C’est vraiment une très grande joie pour nous de vous rencontrer aujourd’hui, de constater votre foi et votre enthousiasme et de voir avec quel frisson joyeux et avec quelle intensité de sentiments vous représentez ici tous vos amis de l’Action Catholique des jeunes d’Italie. Nous vous souhaitons très cordialement la bienvenue et, en même temps que vous, nous saluons avec paternelle affection vos très méritants éducateurs et les dirigeants centraux de l’Association et, de manière particulière, Mgr Marco Cè et le Professeur Mario Agnes (respectivement aumônier général et président de l’A.C.I. — note de la rédaction).

22 Votre présence, si nombreuse et si joyeuse, nous dit à elle seule déjà combien généreusement vous avez adhéré non seulement à la proposition chrétienne qui vous venait de la vie associative de cette organisation catholique, mais aussi à la Rencontre nationale de ces jours-ci et à ce rendez-vous avec nous : de tout coeur nous vous exprimons notre satisfaction et notre sincère gratitude.

Comment ne pas découvrir en vous, comme nous l’avons déjà écrit dans notre Message pour la Journée de la paix du 1er janvier dernier les « jeunes du temps nouveau » ? Vous êtes, en effet, un signe réconfortant de la présence vive et dynamique dans l’Eglise de ce Seigneur qui, selon le Prophète Isaïe fait nouvelles toutes les choses, produisant des germes denses de vie et de promesse (cf. Is
Is 43,19).

Chers jeunes gens, il y a quelques jours nous avons célébré la fête solennelle de la Pentecôte, c’est-à-dire la fête du Saint-Esprit qui seul est en mesure de « renouveler la face de la terre » (Ps 104,30). Et vous savez tous combien a besoin de renouvellement notre époque si fortement marquée d’actes de violence inhumaine qui sont de tristes signes de décadence, et des générateurs de mort. Et alors, vous-mêmes, que pouvez-vous faire pour rajeunir cette société ? Certainement beaucoup, si vous vous laissez docilement guider par l’Esprit de Dieu (cf. Rm Rm 8,14).

C’est l’Apôtre Saint Paul qui nous éclaire sur ce qui est demandé à notre comportement quotidien, vécu sous le signe de cet extraordinaire événement de la Pentecôte qui n’a pas eu lieu seulement à Jérusalem aux débuts de l’Eglise, mais s’est passé également en chacun de vous avec le Baptême puis, dans toute sa plénitude, avec le sacrement de la confirmation. Voici ce que nous dit Saint Paul : « Le fruit de l’Esprit est amour, joie, paix, générosité, bienveillance, bonté, fidélité, douceur, maîtrise de soi » (Ga 5,22). Vous comprenez aussitôt qu’il n’existe pas d’idéal plus élevé que ceux-là, rien de plus fécond et de plus constructif sur le plan des relations humaines. Une méditation au sujet de ces neuf fruits de l’Esprit proposés par l’Apôtre serait trop longue. Nous nous contenterons, en ce moment, d’en examiner brièvement les trois premiers, qui sont également les plus fondamentaux.

Avant tout, l’amour : de celui-ci nous pouvons bien dire qu’il n’est pas seulement une vertu parmi les autres mais qu’il renferme en soi la somme entière de tout ce qui compose la nouveauté chrétienne. En effet « nous savons, nous, que nous sommes passés de la mort à la vie, parce que nous aimons nos frères » (1Jn 3,14). Ceci est le témoignage dont le monde a absolument besoin. Notre but est d’édifier une « civilisation de l’amour » ; mais rappelez-vous bien que rien ne peut bâtir un monde d’amour sinon l’amour lui-même qui en est simultanément la fin et le moyen et, par conséquent la substance unique de la vie humaine à dimension chrétienne.

En deuxième lieu, l’Esprit crée de la joie (cf. Ac Ac 13,52) et la joie se propage. Ceci est également un témoignage que vous pouvez et devez offrir aux hommes de notre temps que l’égoïsme a souvent rendus froids et malheureux. Votre joie ne provient pas seulement de vos jeunes années, qui malheureusement passent, mais elle a de solides garanties d’incessante durée parce qu’elle s’enracine « dans le Seigneur » (Ph 3,1 Ph 4,4-10), en Celui que le Psalmiste chante comme « le Dieu de la joie et de ma jubilation » (Ps 42,4), parce qu’il assure à tous et à chacun son adorable miséricorde.

Et enfin la paix. Vous savez certainement combien ce thème nous tient à coeur. Comme nous le disions dans le Message précité, et dans la partie qui vous est réservée, la paix rend les chrétiens « capables de lutter pour la justice et de résoudre tant de questions avec la générosité, et mieux, avec le génie de l’amour ». Soyez, vous aussi, très chers jeunes gens, des artisans de paix, vous qui êtes l’espérance d’un demain meilleur, dans la mesure où vous vous engagez aujourd’hui dans une vie, non seulement de respect, mais d’authentique bonté envers tous.

Pour conclure, nous tenons à ne pas négliger une dernière et essentielle caractéristique de l’Esprit Saint : celle de susciter des Apôtres, engagés dans l’annonce du salut qui nous vient de Jésus Christ. En effet, pour nous, l’amour, la joie et la paix ne sont pas des sentiments superficiels, mais ils doivent être revêtus du sceau indélébile du Christ et de son Esprit. Donc vous aussi, jeunes de l’Action Catholique, vous êtes appelés dès maintenant à une oeuvre d’évangélisation, dans les formes et selon la manière que votre Association vous propose. Et de telle sorte que votre croissance chrétienne assure à l’Eglise de demain, le visage ancien et toujours nouveau d’une communauté radicalement fidèle à son Seigneur, mais également disponible et ouverte au service des hommes.

Et pour terminer, nous formons des voeux pour que « «l’Esprit de la vie en le Christ Jésus » (Rm 8,2) vous remplisse de sa force et vous guide par les chemins du monde, vous faisant découvrir la réconfortante présence de Celui qui « marche avec vous chaque jour » (Mt 28,20).

Nous vous suivons de tout coeur avec notre paternelle bénédiction apostolique que nous étendons à vos Educateurs, à vos Parents et à tous ceux qui vous sont chers.






26 mai



SERVIR LA VIE DANS SA TOTALITÉ





23 Le 26 mai le Saint-Père a reçu en audience à l’occasion de leur visite « ad limina » les Archevêques et Evêques de la VI° et VIII° Région pastorale des Etats-Unis. Avec le Cardinal John Dearden, archevêque de Détroit, Mgr Bernardin, archevêque de Cincinnati, ancien Président de la Conférence Episcopale des Etats-Unis et Mgr Roach, archevêque de St-Paul Minneapolis, étaient présents les évêques de Grand-Rapids, de Toledo, de las Columbus, de Cleveland, de New Ulm, de Youngstown, de Gaylord ainsi que plusieurs évêques auxiliaires.

A l’adresse d’hommage du Cardinal Dearden, le Saint-Père a répondu par un discours dont voici la traduction :



Vénérables et chers Frères en le Christ,



« Oui, Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique pour que tout homme qui croit en Lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle. Car Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour condamner le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui » (
Jn 3,16-17).

Aujourd’hui, Frères, par votre présence au Siège de Pierre, vous attestez solennellement par la parole et l’action, que vous croyez fermement en Jésus-Christ, Fils de Dieu, et que votre ministère est voué à son oeuvre de salut — le salut du monde. Comme Evêques de l’Eglise Catholique, vous êtes venus ici afin de célébrer de manière toute spéciale la communion de l’Eglise universelle. Tous ensemble nous sommes réunis dans l’Esprit Saint. Notre assemblée pastorale est placée sous le signe de la fidélité absolue au « Chef des Pasteurs » du troupeau (1P 5,4). Pour que ce moment acquière une plus profonde signification au cours de notre mission, il nous convient de lever les yeux vers Celui qui a dit : « Je suis venu pour que les brebis aient la vie et l’aient en abondance » (Jn 10,10).

Jésus-Christ, le Bon Pasteur, restera toujours le modèle de toutes nos activités pastorales. Nous sommes ses disciples et « pour le disciple il suffit qu’il devienne comme son maître » (Mt 10,25). Nous devons, pour notre ministère, nous modeler sur Lui. Nous avons été envoyés pour continuer, en son nom et par son pouvoir, l’oeuvre du Fils unique de Dieu. Nous avons été envoyés comme apôtres, chargés de prêcher l’Evangile du salut, de proclamer la vie en le Christ et, finalement, de conduire la famille humaine à la plénitude de la vie éternelle. Et comme, dans le dessein de Dieu, la personne tout entière est appelée à la vie éternelle, et que cette vie est déjà commencée sur cette terre, notre ministère comporte également le service de la vie humaine dans sa totalité.

Nous souhaitons aujourd’hui parler spécialement de la vie et vous assurer que nous sommes extrêmement proches dans les efforts, les efforts soutenus, les efforts conjoints que vous faites en faveur de la vie, précisément pour être fidèles à votre appel comme Pasteurs du Peuple de Dieu dans les Etats de l’Ohio, du Michigan et du Minnesota. De plus, en raison de la solidarité dans l’unité, la responsabilité et le mérite, qui en cette matière cruciale associe la hiérarchie toute entière dans votre patrie, nous adressons maintenant notre discours non pas à vous seuls, mais également à tous les Evêques des Etats-Unis — comme nous l’avons fait le mois dernier à l’occasion de la visite « ad limina » des Evêques de l’Etat de New York et comme, avec l’aide de Dieu, nous entendons encore le faire à l’avenir.

Nous nous adressons à vous en tant que Pasteur chargé de confirmer ses Frères (Lc 22,32) et pour cette raison, investi de l’autorité suprême dans l’Eglise de Jésus-Christ. Et ainsi, en son nom, au nom de Jésus-Christ, nous vous remercions pour votre ministère au service de la vie. Nous savons que vous avez travaillé précisément pour que s’accomplisse ce qu’a dit le Bon Pasteur : « Qu’ils aient la vie, et qu’ils l’aient en abondance ». Sous votre conduite, de nombreux membres du peuple catholique — prêtres, diacres, religieux et laïcs — se sont associés à de multiples initiatives ayant pour but la défense, le salut et la promotion de la vie humaine.

Sous l’éclairage de la foi, avec le stimulant de l’amour et la conscience de votre responsabilité pastorale, vous vous êtes opposés de toutes vos forces à tout ce qui offense, affaiblit ou déshonore la vie humaine. Votre charité pastorale a trouvé sa concrète expression dans une multitude de réalisations — toutes liées au problème de la vie, toutes tendues vers la protection de la vie dans ses multiples aspects. Vous vous êtes efforcés de proclamer en pratique que tous les aspects de la vie humaine sont sacrés.

A cet égard, vous avez tendu vos efforts vers le déracinement de la faim, vers l’élimination des conditions de vie inhumaines, vers la promotion de programmes en faveur des pauvres, des personnes âgées, des minorités. Vous avez oeuvré pour le progrès de l’ordre social lui-même. Et nous savons qu’en même temps vous avez conduit votre peuple « vers le but, en vue du prix que Dieu nous appelle à recevoir là-haut, dans le Christ Jésus » (Ph 3,14).

Parmi vos multiples activités au service de la vie, il en est une qui, spécialement en ce moment critique de l’histoire, requiert nos vives recommandations et notre plus ferme appui c’est la lutte incessante contre ce que le Concile Vatican II a appelé « le crime abominable » de l’avortement (Gaudium et Spes, GS 51). Mépriser le caractère sacré de la vie dans le sein maternel, c’est briser le tissu même de la civilisation : cela prépare une mentalité, et même un comportement public, qui peut entraîner d’autres pratiques qui sont contraires aux droits élémentaires de l’individu. Cette mentalité peut, par exemple, saper complètement l’intérêt pour ceux qui se trouvent dans la misère et se manifester par une totale insensibilité à l’égard des besoins sociaux ; elle peut entraîner le dédain des personnes âgées au point de préconiser l’euthanasie, elle peut ouvrir la voie à toutes ces techniques génétiques qui vont contre la vie et dont le danger est trop peu connu par le public en général.

24 C’est pourquoi il est extrêmement encourageant de voir le grand service que vous rendez à l’humanité en insistant auprès de votre peuple sur la valeur de la vie humaine. Nous savons, avec confiance, que, comptant sur les paroles du Bon Pasteur qui inspirent votre activité, vous ne manquerez jamais d’exercer le leadership à cet égard, soutenant la communauté ecclésiale tout entière dans sa propre vocation au service de la vie.

Votre patrie est digne de l’estime universelle parce que nombreux y sont les hommes et les femmes de convictions religieuses différentes unis loyalement dans un profond respect des lois du Créateur et Maître de la vie et parce que, se servant de tout moyen à leur disposition, ils se sont efforcés, comme en témoigne l’histoire, de prendre définitivement position en faveur de la vie humaine.

De plus, nous sommes convaincu, que tous les efforts exercés pour sauvegarder les droits humains favorisent actuellement la vie humaine. Tout ce qui vise à bannir la discrimination — dans la loi ou dans les faits — basée sur la race, l’origine, la couleur, la culture, le sexe ou la religion (cf. Octogesima adveniens, n. 16) est un service rendu à la vie. Lorsqu’on favorise les droits des minorités, qu’on assiste les handicapés physiques ou mentaux, lorsqu’on accorde une voix aux bannis de la société — dans toutes ces situations on favorise la dignité humaine, la plénitude de la vie humaine, le caractère sacré de la vie humaine. Comme est un service rendu à la vie dans le cadre de vos Eglises locales tout ce qui est accompli dans le cadre des écoles, au niveau de la justice sociale et sur le plan des situations sociales concernant les communautés sociales locales, nationales et internationales. En particulier, toute contribution apportée à l’amélioration du climat moral de la société, à la lutte contre l’hédonisme et le permissivisme, ainsi que toute assistance à la famille qui est la source de nouvelles vies, soutient effectivement les valeurs de la vie.

Nous savons que, à l’occasion du X° anniversaire d’Humanae Vitae, diverses initiatives ont été réalisées dans votre pays dans le but de faire connaître et expliquer la planification familiale naturelle, respectueuse de l’enseignement de l’Eglise. Ces activités honorent la vie directement dans la dignité et l’importance de ses origines. En soutenant les programmes de la planification familiale naturelle, l’Eglise donne témoignage non seulement de sa fidélité au dessein du Créateur, mais aussi de sa fidélité au service de la personne humaine qui demeure « le début, le sujet et le but de toute institution sociale » (Gaudium et Spes,
GS 25).

Votre mission au service de la vie humaine trouve toutefois son expression la plus haute dans l’orientation de votre peuple vers la plénitude de la vie éternelle : le salut dans le Christ. Par votre service, le Seigneur lui-même offre aux fidèles le pain de vie, « de la table de la Parole de Dieu comme de celle du Corps du Christ » (Dei Verbum, DV 21 comme l’a promis Jésus-Christ, celui qui se nourrit du pain vie aura la vie éternelle (cf. Jn 6, 54).

Dans toutes les espérances, dans toutes les difficultés et tous les défis de votre ministère, nous vous exhortons à marcher de l’avant avec fidélité et confiance, en communion avec l’Eglise Universelle, et à conduire votre peuple le long du chemin dé vie. Rappelez-vous que le Seigneur nous a dit : « Je suis avec vous tous les jours » (Mt 28,20).

Chers Frères en le Christ : Pourquoi vous parler de ces choses ? A cause de l’importance vitale du thème de la vie pour l’orientation de votre ministère. Mais aussi afin que, unis dans l’Esprit Saint, nous puissions expérimenter ensemble la joie de la vie dans le Christ et la joie d’être les apôtres de Celui qui lui-même est la Vie. Et nous prions pour que, par le pouvoir du Saint-Esprit, vous alliez de l’avant afin de préparer dans vos Eglises locales une nouvelle effusion de joie chrétienne parmi vos populations : une joie basée sur la ferme conviction que Dieu a mandé son Fils pour nous apporter la vie éternelle afin que le monde puisse être sauvé par Lui.

C’est avec ces sentiments, Frères, et avec une profonde affection dans le Seigneur, que nous envoyons notre salut et notre bénédiction apostolique à tous vos diocèses : à tous vos prêtres, religieux, séminaristes et laïcs, « Paix à vous tous qui êtes dans le Christ » (1P 5,14).








15 juin



LE SACRIFICE EUCHARISTIQUE CENTRE D’UNITÉ DE L’ÉGLISE





Visite « Ad limina » d’un groupe d’Evêque des U.S.A.

Le jeudi 15 juin le Saint-Père a reçu en audience, dans le cadre des visites canoniques « ad limina apostolorum », les Archevêques et Evêques de la IV° Région Pastorale des Etats-Unis.

25 Répondant à l’adresse d’hommage du Cardinal Carberry, archevêque de Saint Louis, le Saint-Père a prononcé un discours dont voici la traduction :



Vénérables et chers Frères,



Nous vous souhaitons la bienvenue au nom de notre Seigneur Jésus Christ et nous vous embrassons dans son amour. Nous voulons honorer en vous, nos frères évêques, les Eglises locales auxquelles vous présidez et que vous êtes appelés à servir dans la charité du Sauveur. Par votre intermédiaire nous adressons nos souhaits de joie et de paix à tous les fidèles que comptent vos diocèses : à tous nos fils et filles du Delaware, du District de Colombie, de la Floride, de la Géorgie, du Maryland, de la Caroline du Nord, des Iles Vierges, de la Virginie, de la Virginie Occidentale, du Kansas, de l’Iowa, du Missouri et du Nebraska.

En célébrant ensemble notre communion de foi et d’amour dans l’unité du Christ, nous avons conscience d’être les successeurs de ses Apôtres, les évêques de l’Eglise catholique investis de la mission de rendre témoignage au Seigneur Jésus et de proclamer le témoignage de son Père. Selon les paroles de Saint Jean « Voici ce témoignage : Dieu nous a donné la vie éternelle et cette vie est dans son Fils. Qui a le Fils a la vie, qui n’a pas le Fils n’a pas la vie» (
1Jn 5,11).

Aujourd’hui, nous désirons considérer le mystère de la vie en Jésus-Christ. Et comme la vie en Jésus est incarnée dans l’Eucharistie, c’est de l’Eucharistie que nous vous parlerons à vous et à toute la hiérarchie d’Amérique. L’Eucharistie est de suprême importance dans notre ministère de prêtres et d’évêques, rendant actuelle l’action salvifique du Christ. Elle est de suprême pertinence pour la vie chrétienne de nos fidèles. L’Eucharistie est d’une efficacité suprême pour la transformation du monde en un monde de justice, de sainteté et de paix, C’est donc, précisément, à cause du rapport intime existant entre l’Eucharistie et l’apostolat auquel nous nous dédions, que nous désirons réfléchir avec vous sur différents aspects de ce Sacrement qui est le Pain de la vie.

Le Concile Vatican II a rappelé à tous les prêtres que c’est dans le Sacrifice Eucharistique qu’ils auront à trouver la source principale de leur amour pastoral (cf. Presbyterorum Ordinis, PO 14). Il poursuit en affirmant que « c’est là qu’aboutit le ministère des prêtres et que c’est là qu’il trouve son accomplissement : commençant par l’annonce de l’Evangile il tire sa force et sa puissance du sacrifice du Christ » (ibid. n. 2). Puis il spécifie que c’est dans le mystère du Sacrifice eucharistique que les prêtres exercent leur fonction principale (cf. ibid. n. 13). Pour nous, Frères, comme pour tous nos collaborateurs dans le sacerdoce qui ont voué leur existence à mener les fidèles à la plénitude du Mystère pascal, cet enseignement est extrêmement important. Il donne une orientation décisive à toutes nos activités comme Pasteurs du Peuple de Dieu et comme messagers dd l’Evangile du salut dont la proclamation suprême se fait dans le Sacrifice eucharistique. En plus de la définition des priorités de notre propre ministère et de celui de nos prêtres, l’enseignement du Concile Vatican II apporte une grande joie au catholique en lui rappelant que du fait que l’Eucharistie contient le Christ lui-même, elle contient, en conséquence « tout le trésor spirituel de l’Eglise » (ibid. n. 5).

Quelques mois avant la promulgation du Décret conciliaire sur le ministère et la vie des prêtres, nous avons nous-mêmes réitéré la doctrine de l’Eglise sur la Présence Réelle du Christ dans l’Eucharistie, affirmant que « c’est une présence dans le sens le plus plein : parce que c’est une présence réelle par laquelle le Christ tout entier et complètement, Dieu et Homme, est présent » (Mysterium Fidei, MF 39). Nous poursuivions en déclarant que l’Eglise catholique « a donné de tous temps à ce grand Sacrement un culte connu sous le nom de culte de latrie et qui ne peut être rendu qu’à Dieu seul » (ibid. n. 55). Et nous sommes convaincus aujourd’hui qu’une place toujours plus grande donnée à cet enseignement sera une source de force pour tout le peuple de Dieu en pèlerinage. C’est pour cette raison que nous vous encourageons, vous et tous vos prêtres à prêcher fréquemment la riche doctrine de la présence du Christ : l’Eucharistie, dans la messe et hors la messe, contient le Corps et le Sang de Jésus-Christ et c’est pourquoi il lui est rendu le culte réservé au Dieu vivant et à lui seul. Un autre énoncé très clair de l’importance de l’Eucharistie est contenu dans la Constitution Dogmatique sur l’Eglise qui appelle le Sacrifice Eucharistique « source et sommet de toute vie chrétienne » (Lumen Gentium, LG 11). Le Sacrifice Eucharistique est lui-même le sommet de la liturgie de l’Eglise, la totalité de ce qui est la joyeuse expression du salut, et il a comme rôle primordial la gloire du Seigneur (cf. Adresse aux Evêques suisses : AAS 70, 1978, p. 104). Selon les paroles du Concile : « La liturgie sacrée est principalement le culte de la divine majesté » (Sacrosanctum Concilium, SC 33). Quel grand service rendu au peuple de Dieu: de semaine en semaine, d’année en année pour le rendre toujours plus conscient du fait qu’il peut tirer du Sacrement de l’Eucharistie des forces toujours plus grandes pour collaborer activement à la mission de l’Eglise. Il est le sommet de sa vie chrétienne, non pas en ce sens que ses autres activités ne sont pas importantes, mais dans le sens que, pour acquérir une pleine efficacité, ces activités doivent être unies à l’action salvifique du Christ et associées à son Sacrifice rédempteur.

Le Concile Vatican II nous assure que l’Eucharistie est également « la source et le sommet de l’évangélisation » (Presbyterorum Ordinis, PO 5). La véritable identité de l’Eglise, dans sa mission évangélisatrice, se trouve effectivement dans l’Eucharistie qui devient le but de toutes nos activités. Tout devoir pastoral de notre ministère est incomplet aussi longtemps que ceux que nous sommes appelés à servir n’auront pas été conduits jusqu’à la pleine et active participation à l’Eucharistie. Chaque initiative que nous entreprenons au nom de Dieu et comme ministres de l’Evangile doit trouver son accomplissement dans l’Eucharistie.

Il y a un an, lors de la canonisation de John Neumann, nous rappelions l’importance que l’Eucharistie avait pour lui, comme évêque de l’Eglise catholique, précisément dans le contexte de l’évangélisation. Et nous avons donné comme exemple l’importance qu’il attribuait à la « Dévotion des Quarante Heures ». Vénérables Frères, nous n’hésitons pas aujourd’hui à vous proposer à vous-mêmes et à vos fidèles la grande pratique de l’adoration eucharistique. Et en même temps nous vous demandons, à vous et à vos prêtres, de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour que le respect dû à l’Eucharistie soit bien compris par tous les fidèles et que les célébrations eucharistiques soient toujours caractérisées par leur dignité et enfin pour que tous les fils de Dieu s’approchent de leur Père, par Jésus Christ, dans un esprit de profonde révérence filiale. A cet égard, nous rappelons ce que nous avons dit l’an dernier à un groupe d’Evêques à l’occasion de leur visite « ad limina » : « La liturgie catholique doit rester théocentrique » (AAS 69, 1977, p. 474).

Tout en remerciant Dieu pour avoir donné aux fidèles de son Eglise une conscience plus nette de leur rôle liturgique, nous croyons bien — afin de vous aider à formuler les directives que vous donnez dans vos diocèses — de répéter ce que nous avons mentionné dans notre Lettre du Bicentenaire adressée aux Evêques Américains : « Il nous plaît de rappeler que le Saint-Siège a autorisé, dans certaines circonstances, la distribution de la Sainte Communion par des ministres extraordinaires dûment délégués à cette haute tâche. Mais nous insistons sur le fait que ce ministère est et reste un ministère extraordinaire, à exercer conformément aux normes précises édictées par le Saint-Siège. Par sa nature, donc, le rôle du ministre extraordinaire est différent des autres rôles de participation eucharistique qui sont l’expression ordinaire de la participation des laïcs » (AAS 68, 1976, p. 410). Distribuer l’Eucharistie au peuple de Dieu reste donc une habituelle fonction pastorale. Les ministres extraordinaires sont envisagés par l’Instruction Immensae Caritatis dans le cas d’une réelle carence de ministres et, dans ces conditions, ils remplissent un rôle providentiel.

Le Concile Vatican II nous assure, en outre, que l’Eucharistie est la racine et le centre de l’unité de l’Eglise (cf. Presbyterorum Ordinis, PO 6). Il n’est pas possible d’édifier une communauté chrétienne en dehors de l’Eucharistie. Dans l’Eucharistie les fidèles doivent expérimenter leur unité comme peuple de Dieu uni dans le Christ : dans sa vérité et dans son amour. Cette matière a été traitée dans le message pastoral « Enseigner comme l’a fait Jésus » dans lequel les évêques américains ont souligné vivement qu’un esprit d’association « est engendré spécialement par l’Eucharistie qui est en même temps signe de communauté et cause de sa croissance » (n. 24).

26 De ce point de vue, il est donc facile de voir comme l’Eucharistie est pour l’Eglise tout entière, un lien de charité et une source d’amour social. La tradition de l’Eglise nous parle, à chaque époque, de cette merveilleuse vérité. Dans notre Encyclique Mysterium Fidei, nous avons établi que le culte eucharistique mène à l’amour social « dans lequel nous plaçons le bien commun avant le bien individuel ; nous faisons nôtres les intérêts de la communauté, des paroisses et de l’Eglise tout entière ; et nous étendons notre charité au monde entier car nous savons qu’il y a partout des membres du Christ » (n. 69).

Chers Frères en le Christ, nous sommes absolument convaincu que ces vérités vous guideront et vous soutiendront dans votre ministère apostolique, dans la joyeuse espérance de la venue de Notre Seigneur Jésus Christ. L’Eucharistie est notre source d’espérance car elle est pour nous promesse de vie. Jésus lui-même a dit : « Je suis le pain de vie (...) Qui mangera ce pain vivra à jamais » (
Jn 6,48 et 51). Au milieu de tous les problèmes du monde moderne, demeurons constants dans cette espérance. Notre optimisme est basé, non pas sur la négation peu réaliste des immenses et manifestes difficultés et oppositions qui assaillent le royaume de Dieu, mais sur la certitude absolue que, dans l’Eucharistie, le Mystère Pascal du Seigneur Jésus est à jamais opérant et victorieux du péché et de la mort.

Nous vous remercions, vénérables Frères, pour votre généreux dévouement à l’Evangile et pour tout le travail que vous accomplissez dans ce domaine ; et nous vous demandons de persévérer, avec la puissance du Christ, le Pasteur Suprême de l’Eglise. Nous vous exhortons à être forts dans la proclamation du mystère de la vie dans le Christ, et dans la conduite de vos fidèles vers la source de cette vie, l’Eucharistie. Nous prions pour qu’à votre tour vous encouragiez les fidèles dans leur vocation eucharistique. Nous demandons tout spécialement que nos fils dans le sacerdoce soient soutenus et assistés dans leur inestimable rôle d’édification du peuple de Dieu, au moyen de l’Eucharistie. Nous prions pour que dans tous les secteurs de l’Eglise, il y ait une ère nouvelle de piété eucharistique, qui fasse naître la confiance et l’amour fraternel, et engendre la justice et la sainteté de la vie.

Avec ces sentiments, Frères, nous invoquons sur chacun de vous la sagesse et la vigueur de Pierre et Paul et des autres Apôtres ; et nous recommandons votre ministère à Marie, Vierge Immaculée, Mère de l’Eglise et Patronne de votre bien-aimé pays.

Au nom de Jésus nous vous bénissons tous et, par votre intermédiaire, nous envoyons notre bénédiction apostolique à « tous ceux qui nous aiment dans la foi. La grâce soit avec vous tous ! » (Tt 3,15-16).







À L’ASSOCIATION DES


JOURNALISTES CATHOLIQUES DE BELGIQUE


Mercredi 21 juin 1978




Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,

votre visite traditionnelle nous apporte toujours une joie nouvelle. Nous connaissons tellement l’histoire et les mérites de votre Association, son travail journalistique ouvertement chrétien, et ses générosités remarquables pour le ministère caritatif du Pape. A vous, chers Délégués, à tous les membres de l’Association des Journalistes Catholiques de Belgique, et à tous ceux qui ont participé, selon leurs moyens, à la souscription que vous avez organisée, notre chaleureuse gratitude!

Dans le monde souvent éprouvant que vous venez d’évoquer, Monsieur le Président, les chrétiens sont de plus en plus obligés à la lucidité et au courage. Ne craignez pas, vous qui avez la responsabilité si exigeante et si noble de diffuser la vérité dans la charité. Mettez en commun toutes vos capacités de connaissance des problèmes de notre société, de présentation adéquate de l’enseignement du Magistère de l’Eglise, de réveil des consciences anesthésiées par une opinion publique souvent manipulée et bassement matérialiste. Accueillez dans vos rangs la jeune génération des catholiques belges pour lui faire part de votre vaste expérience et vous familiariser avec ses questions et ses attentes. Tels sont nos voeux fervents. Nous les confions au Seigneur et Nous invoquons sur vos personnes et sur l’Association tout entière sa lumière et sa force.




22 juin



PRÉSENCE DES CATHOLIQUES DANS LE PROGRÈS DE LA SOCIÉTÉ





Paul VI aux Evêques de Cuba en visite « ad limina »

27 Le 22 juin, le Saint-Père a reçu en audience un groupe d’Evêques de Cuba venus au Vatican pour la visite canonique « ad limina Apostolorum ». Etaient présents l’Archevêque de Santiago de Cuba et les Evêques de Camaguey et de Cienfuegos-Santa Clara. Le Saint-Père a adressé à ses visiteurs un discours dont voici la traduction :



Vénérables Frères en l’Episcopat,



Nous éprouvons une grande satisfaction à vous recevoir aujourd’hui en cette Audience, Pasteurs du Peuple de Dieu dans les diocèses de Santiago de Cuba, Camaguey et Cienfuegos-Santa Clara venus à Rome pour la visite « ad limina Apostolorum ».

En vous nous saluons, avec une affection toute particulière, non seulement vos diocésains, mais aussi tout le noble peuple cubain, vous-mêmes nos frères en l’Episcopat, les prêtres, les religieux et religieuses, les séminaristes, les laïcs engagés dans l’apostolat, et spécialement les jeunes cubains dont nous connaissons bien et apprécions la générosité et les valeurs.

Le souvenir de votre cher pays, avec son passé et son présent, occupe en notre âme une place particulière. L’histoire est un témoin qualifié de la contribution que l’Eglise a apportée au progrès intégral de votre pays. En effet, elle invite sans cesse ses fils à être des hommes nouveaux dans la justice, dans la vérité, dans la charité, elle éduque la conscience sociale des fidèles, favorisant leur collaboration au bien commun, enseignant à tous à vaincre leur propre égoïsme, renforçant l’unité de la famille et les valeurs qu’elle contient. Oui, la foi chrétienne, non seulement ne fait pas du croyant un citoyen inférieur, mais, bien au contraire, elle l’élève vers les valeurs, les plus nobles et les plus positives.

Vous avez récemment célébré à Cuba les anniversaires de la fondation du couvent de Saint-Jean de Latran et de l’Université Saint-Jérôme qui a pris une si grande part au développement culturel, social et spirituel de votre pays. Vous avez rappelé en même temps les cent-vingt-cinq années de la mort d’un éminent prêtre et citoyen, le R.P. Félix Varela y Morales héraut de la conscience nationale cubaine. Ce sont des étapes importantes dans l’histoire passée de votre patrie.

Pensant au présent de votre peuple, jaillit dans notre âme le vif désir et naît l’espérance que les fruits du passé continuent à exercer leur vigoureuse influence sur le moment actuel, de sorte que les catholiques puissent contribuer efficacement au bien civique et social du pays, « dans un juste espace de liberté pour la foi dans ses expressions personnelles et communautaires », comme nous l’avons dit, au début de cette année, dans notre discours au Corps Diplomatique.

Dans une large perspective d’avenir, nous voudrions vous exhorter aujourd’hui à maintenir une union solide, non seulement avec le Siège de Pierre, mais aussi entre vous, les Pasteurs, et avec vos collaborateurs dans le champ de l’apostolat, ainsi qu’avec tous les fidèles qui attendent d’être guidés dans leur foi.

Veillez avec grand soin sur les vocations à la vie consacrée, prêtant l’attention la plus vive à la formation de la famille chrétienne et enseignant aux jeunes la générosité évangélique. Eduquez également la piété populaire ides gens simples pour qu’ils demeurent toujours plus fermement fixés au sein de la foi authentique.

Et surtout, vénérables Frères, emportez la parole de paternel encouragement et de profonde estime que nous adressons cordialement à tout votre .troupeau et spécialement à vous, pour votre fidélité au Christ au milieu de toutes les difficultés bien connues. Sachez que nous sommes toujours proches de vous, unissant notre prière à la vôtre et demandant au Seigneur, par l’intercession de Notre-Dame de la « Caridad del Cobre » qu’il vous aide à rester toujours « fermes dans la foi ».

Animé de ces sentiments nous vous donnons à vous-mêmes, à vos diocésains et à tous les fils de votre chère patrie, notre cordiale bénédiction apostolique.






23 juin




Discours 1978 21