1996 Universi Dominici Gregis 78

VI - CE QUI DOIT ETRE OBSERVE OU EVITE DANS L'ELECTION DU SOUVERAIN PONTIFE

78. Si dans l'élection du Pontife Romain était perpétrée - que Dieu nous en préserve! - le crime de simonie, je décide et je déclare que tous ceux qui s'en rendraient coupables encourront l'excommunication latae sententiae et qu'est cependant supprimée la nullité ou la non validité de cette élection simoniaque, afin que, pour cette raison - comme cela a déjà été établi par mes Prédécesseurs -, ne soit pas mise en cause la validité de l'élection du Pontife Romain. (Cf. S. PIE X, Const. ap. Vacante Sede Apostolica (25.12.1904), n. 79: Pii X Pontificis Maximi Acta, III, (1908), p. 282; PIE XII, Const. ap. Vacantis Apostolicæ Sedis (8.12.1945), n. 92: AAS 38 (1946), p. 94; PAUL VI, Const. ap. Romano Pontifici eligendo (1.10.1975), n. 79: AAS 67 (1975), p. 641).

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79. De même, confirmant les prescriptions de mes Prédécesseurs, j'interdis à quiconque, fût-il revêtu de la dignité cardinalice, de contracter des engagements, tandis que le Pontife est vivant et sans l'avoir consulté, à propos de l'élection de son Successeur, ou de promettre des voix ou de prendre des décisions à ce sujet dans des réunions privées.

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80. De même, je veux confirmer ce qui fut sanctionné par mes Prédécesseurs, afin d'exclure toute intervention extérieure dans l'élection du Souverain Pontife. C'est pourquoi de nouveau, en vertu de la sainte obéissance et sous peine d'excommunication latae sententiae, j'interdis à tous et à chacun des Cardinaux électeurs, présents et futurs, et également au Secrétaire du Collège des Cardinaux et à toutes les autres personnes ayant part à la préparation et au déroulement de ce qui est nécessaire pour l'élection, d'accepter, sous aucun prétexte, de n'importe quel pouvoir civil, la mission de proposer un veto, ou une exclusive, même sous forme d'un simple désir, ou de le révéler soit à tout le Collège des électeurs réunis, soit à chacun des électeurs, par écrit ou oralement, directement et immédiatement ou indirectement ou par des intermédiaires, avant le début de l'élection ou pendant son déroulement. Je veux que cette interdiction s'étende à toutes formes d'ingérences, d'oppositions, de désirs, par lesquels les autorités civiles de quelque ordre et de quelque degré que ce soit, ou n'importe quel groupe ou des individus voudraient s'immiscer dans l'élection du Pontife.

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81. En outre, que les Cardinaux électeurs s'abstiennent de toute espèce de pactes, d'accords, de promesses ou d'autres engagements de quelque ordre que ce soit, qui pourraient les contraindre à donner ou à refuser leur vote à un ou à plusieurs candidats. Si ces choses se produisaient de fait, même sous serment, je décrète qu'un tel engagement est nul et non avenu, et que personne n'est obligé de le tenir; et dès à présent, je frappe d'excommunication latae sententiae les transgresseurs de cette interdiction.
Cependant, je n'entends pas interdire les échanges d'idées en vue de l'élection, durant la vacance du Siège.

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82. Pareillement, j'interdis aux Cardinaux d'établir des accords avant l'élection, ou bien de prendre, par une entente commune, des engagements qu'ils s'obligeraient à respecter dans le cas où l'un d'eux accéderait au Pontificat. Si de telles promesses se réalisaient en fait, même par un serment, je les déclare également nulles et non avenues.

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83. Avec la même insistance que mes Prédécesseurs, j'exhorte vivement les Cardinaux électeurs à ne pas se laisser guider, dans l'élection du Pontife, par la sympathie ou l'aversion, ou influencer par des faveurs ou par des rapports personnels envers quiconque, ou pousser par l'intervention de personnalités en vue ou de groupes de pression, ou par l'emprise des moyens de communication sociale, par la violence, par la crainte ou par la recherche de popularité. Mais, ayant devant les yeux uniquement la gloire de Dieu et le bien de l'Eglise, après avoir imploré l'aide divine, qu'ils donnent leur voix à celui qu'ils auront jugé plus capable que les autres, même hors du Collège cardinalice, de gouverner l'Eglise universelle avec fruit et utilité.

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84. Pendant la vacance du Siège, et surtout durant la période où se déroule l'élection du Successeur de Pierre, l'Eglise est unie de manière toute particulière à ses Pasteurs et spécialement aux Cardinaux électeurs du Souverain Pontife, et elle implore de Dieu un nouveau Pape, comme don de sa bonté et de sa providence. En effet, à l'exemple de la première communauté chrétienne dont il est question dans les Actes des Apôtres (cf. 1, 14), l'Eglise universelle, spirituellement unie à Marie, Mère de Jésus, doit persévérer unanimement dans la prière; ainsi l'élection du nouveau Pontife ne sera pas un fait étranger au Peuple de Dieu et réservé au seul Collège des électeurs, mais, dans un sens, elle sera une action de toute l'Eglise. En conséquence, j'établis que dans toutes les villes et autres lieux, au moins les plus importants, à peine connue la nouvelle de la vacance du Siège apostolique et, de manière particulière, de la mort du Pontife, ainsi qu'après la célébration des services solennels à son intention, on élève des prières humbles et assidues vers le Seigneur (cf. Mt 21, 22; Mc 11, 24), pour qu'il éclaire le coeur des électeurs et réalise si bien leur accord dans l'élection que cette dernière soit rapide, unanime et utile, comme l'exige le salut des âmes et le bien de tout le Peuple de Dieu.

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85. Je recommande cela de manière très vive et très cordiale aux vénérés Pères Cardinaux qui, en raison de leur âge, ne jouissent plus du droit de participer à l'élection du Souverain Pontife. En vertu du lien très spécial avec le Siège apostolique que comporte la pourpre cardinalice, qu'ils guident le Peuple de Dieu particulièrement dans les Basiliques patriarcales de la ville de Rome et aussi dans les sanctuaires des autres Eglises particulières, pour que, par la prière assidue et intense, surtout pendant que se déroule l'élection, soient accordées par Dieu Tout-Puissant l'assistance et les lumières de l'Esprit Saint nécessaires à leurs confrères électeurs; ils participent ainsi efficacement et réellement à la lourde charge de donner un nouveau Pasteur à l'Eglise universelle.

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86. Enfin, je prie celui qui sera élu de ne pas se dérober à la charge à laquelle il est appelé, par crainte de son poids, mais de se soumettre humblement au dessein de la volonté divine. Car Dieu qui lui impose la charge le soutient par sa main, pour que l'élu ne soit pas incapable de la porter; Dieu qui donne cette lourde charge est aussi celui qui l'aide à l'accomplir, et celui qui confère la dignité, donne la force, afin que l'élu ne succombe pas sous le poids de la mission.

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VII - ACCEPTATION, PROCLAMATION ET DEBUT DU MINISTERE DU NOUVEAU PONTIFE

87. L'élection ayant eu lieu canoniquement, le dernier des Cardinaux diacres appelle dans le lieu de l'élection le Secrétaire du Collège des Cardinaux et le Maître des Célébrations liturgiques pontificales; ensuite, le Cardinal Doyen, ou le premier des Cardinaux par l'ordre et par l'ancienneté, au nom de tout le Collège des électeurs, demande le consentement de l'élu en ces termes: "Acceptez-vous votre élection canonique comme Souverain Pontife?"
Et aussitôt qu'il a reçu le consentement, il lui demande: "De quel nom voulez-vous être appelé?" Alors le Maître des Célébrations liturgiques pontificales, faisant fonction de notaire et ayant comme témoins deux cérémoniaires qui seront appelés à ce moment-là, rédige un procès-verbal de l'acceptation du nouveau Pontife et du nom qu'il a pris.

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88. Après l'acceptation, l'élu qui a déjà reçu l'ordination épiscopale est immédiatement Evêque de l'Eglise de Rome, vrai Pape et Chef du Collège épiscopal; il acquiert de facto et il peut exercer le pouvoir plein et suprême sur l'Eglise universelle.
Si l'élu n'a pas le caractère épiscopal, il doit aussitôt être ordonné évêque.

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89. Une fois accomplies les autres formalités, conformément à l'Ordo rituum Conclavis, les Cardinaux électeurs s'avancent selon les règles fixées pour rendre hommage et pour faire acte d'obédience au nouveau Pontife. Puis on rend grâce à Dieu; après quoi, le premier des Cardinaux diacres annonce au peuple dans l'attente l'élection accomplie et le nom du nouveau Pontife, qui, aussitôt après, donne la Bénédiction apostolique Urbi et Orbi, depuis le balcon de la Basilique vaticane.
Si l'élu n'a pas le caractère épiscopal, l'hommage lui est rendu et l'annonce est faite au peuple seulement après qu'il aura été solennellement ordonné évêque.

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90. Si l'élu se trouve hors de la Cité du Vatican, il faut observer les normes contenues dans l'Ordo rituum conclavis déjà cité.
L'ordination épiscopale du Souverain Pontife élu qui n'est pas encore évêque, dont il est question aux numéros 88 et 89 de la présente Constitution, sera faite selon l'usage de l'Eglise par le Doyen du Collège des Cardinaux ou, en son absence, par le Vice-Doyen ou, si celui-ci est lui-même empêché, par le plus ancien des Cardinaux évêques.

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91. Le Conclave prendra fin aussitôt après que le nouveau Souverain Pontife aura donné son consentement à son élection, à moins qu'il n'en décide autrement. A partir de ce moment, pourront se rendre auprès du nouveau Pontife le Substitut de la Secrétairerie d'Etat, le Secrétaire pour les Relations avec les Etats, le Préfet de la Maison pontificale et toute autre personne qui aura à traiter avec le Pontife de questions à ce moment-là nécessaires.

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92. Après la cérémonie solennelle d'inauguration du pontificat et dans un délai convenable, le Pontife prendra possession de l'Archibasilique patriarcale du Latran, selon le rite prescrit.


PROMULGATION

93 Par conséquent, après de mûres considérations et poussé par l'exemple de mes Prédécesseurs, j'établis et je prescris ces normes, décidant que personne ne doit oser s'opposer à la présente Constitution et à ce qu'elle contient pour quelque raison que ce soit. Elle doit être inviolablement observée par tous, nonobstant toutes choses contraires, mêmes dignes de mention très spéciale. Qu'elle soit publiée et obtienne ses effets pleins et intégraux, et qu'elle serve de guide à tous ceux à qui elle se réfère.
Je déclare en même temps abrogées, comme il a été établi plus haut, toutes les Constitutions et les dispositions prises à ce sujet par les Pontifes romains, et, en même temps, je déclare nul et non avenu ce qui, par quiconque, quelle que soit son autorité, consciemment ou inconsciemment, sera tenté en opposition à cette Constitution.


Donné à Rome, près de Saint-Pierre,
le 22 février 1996, fête de la Chaire de saint Pierre Apôtre,
en la dix-huitième année de mon Pontificat.

JEAN-PAUL II

1996 Universi Dominici Gregis 78