5e dimanche de carême A

Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean 11, 1-45

Un homme était tombé malade. C’était Lazare, de Béthanie, le village de Marie et de sa sœur Marthe.

 

Homélies

 

Homélie de saint Pierre Chrysologue (+ 450) Sermon 63 ; CCL 24 A, 373-376.

La résurrection de Lazare, miracle des miracles

Voici que Lazare, revenu du séjour des morts, se présente à nous, portant une figure de la mort qui va être vaincue, et présentant un échantillon de la résurrection. Avant de pénétrer la profondeur d’un tel événement, arrêtons-nous à contempler l’aspect extérieur de cette résurrection, parce que nous y reconnaissons le miracle des miracles, la puissance des puissances, la merveille des merveilles.

Le Seigneur avait déjà ressuscité la fille du chef de synagogue, Jaïre, mais alors que la puissance de la mort venait de s’exercer sur elle. Il avait ressuscité aussi le fils unique d’une veuve, mais avant qu’il fût mis au tombeau, ce qui devait arrêter la corruption, prévenir la mauvaise odeur et rendre la vie au défunt avant qu’il fût pleinement tombé au pouvoir de la mort.

Mais au sujet de Lazare, tout ce qui se produit est exceptionnel. Sa mort et sa résurrection n’ont rien de commun avec les cas précédents car, ici, toute la puissance de la mort s’est déployée, toute la splendeur de la résurrection s’est manifestée. J’ose dire que Lazare eût accaparé tout le mystère de la résurrection du Seigneur s’il était revenu des enfers le troisième jour. Car le Christ est revenu le troisième jour comme étant le Seigneur, Lazare est rappelé à la vie le quatrième jour comme étant le serviteur. Mais pour établir ce que nous venons d’affirmer, parcourons quelques pages de cette lecture.

Ses sœurs envoyèrent dire au Seigneur : Seigneur, celui que tu aimes est malade. En parlant ainsi, elles frappent à la porte de son cœur, elles atteignent sa charité, elles s’efforcent de vaincre leur détresse par la force de leur amitié. Mais, pour le Christ, il importe davantage de vaincre la mort que d’éloigner la maladie. Aimer, pour lui, ce n’est pas tirer du lit, mais ramener des enfers et, pour son ami, ce qu’il va lui procurer bientôt, ce n’est pas le remède à sa langueur, mais la gloire de sa résurrection.

Bref, quand il apprit que Lazare était malade, il demeura deux jours au même endroit. Vous voyez comment il laisse le champ libre à la mort, il donne ses chances au tombeau, il permet à la décomposition de s’exercer, il n’empêche ni la pourriture ni l’odeur infecte. Il accepte que le séjour des morts se saisisse de Lazare, l’engloutisse, le garde prisonnier. Il agit pour que tout espoir humain soit perdu, et que toute la violence de la désespérance terrestre se déchaîne, afin qu’on voie bien que ce qui va se passer est l’œuvre de Dieu, non de l’homme.

Il reste au même endroit à attendre la mort de Lazare jusqu’à ce qu’il puisse l’annoncer lui-même et déclarer qu’il ira vers lui. En effet, dit-il, Lazare est mort et je m’en réjouis. C’est donc cela aimer ? Le Christ se réjouissait parce que la tristesse de la mort allait bientôt se transformer en la joie de la résurrection. Et je m’en réjouis à cause de vous. Pourquoi à cause de vous? Parce que, dans la mort et la résurrection de Lazare, se peignait toute la figure de la mort et de la résurrection du Seigneur, et ce qui allait bientôt suivre chez le maître était déjà réalisé chez le serviteur. Elle était donc nécessaire, cette mort de Lazare, pour que la foi des disciples, ensevelie avec Lazare, ressuscite avec lui.

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Canon de saint Jean Damascène, prêtre

Étant Dieu véritable, tu connaissais, Seigneur, le sommeil de Lazare et tu l’as prédit à tes disciples, les convainquant de la puissance infinie de ta divinité. Étant dans la chair, toi sans limites, tu viens à Béthanie. Vrai homme, Seigneur, tu pleures sur Lazare ; vrai Dieu, par ta volonté tu ressuscites le mort de quatre jours.

Aie pitié de moi, Seigneur, nombreuses sont mes transgressions. De l’abîme des maux, je t’en prie, ramène-moi. C’est vers toi que j’ai crié, écoute-moi, Dieu de mon salut.

Pleurant sur ton ami, tu as mis fin dans ta compassion aux larmes de Marthe, et, par ta Passion volontaire, tu as ôté toute larme du visage de ton peuple. Dieu de nos Pères, tu es béni.

Trésorier de la vie, Seigneur, tu as appelé le mort comme s’il dormait. Par une parole tu as déchiré le ventre des enfers et tu as ressuscité celui qui se mit à jubiler Dieu de nos Pères, tu es béni. Tu as réveillé le mort sentant déjà, lié de bandelettes. Moi, étranglé par les liens de mes péchés, relève-moi aussi et je chanterai Dieu de nos Pères, tu es béni.

Tu cherches ton ami comme un mortel, mais, comme Dieu, tu ressuscites un mort de quatre jours à ta seule parole. C’est pourquoi nous te chantons et t’exaltons dans tous les siècles.

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Marie, dans sa reconnaissance, t’apporte, comme un dû pour son frère, un vase de myrrhe, Seigneur, et elle te chante dans tous les siècles. Comme mortel, tu invoques le Père, comme Dieu, tu réveilles Lazare. C’est pourquoi nous te chantons, ô Christ, pour les siècles des siècles. Honorant ton Père et montrant que tu n’es pas un ennemi de Dieu (comme le prétendaient les juifs), tu as réveillé librement par la prière, ô Christ, un mort de quatre jours. Tu réveilles Lazare, un mort de quatre jours, et le fais surgir du tombeau, le désignant ainsi comme témoin véridique de ta résurrection le troisième jour, ô Christ.

Tu marches, tu pleures, tu parles, mon Sauveur, montrant ton énergie humaine, mais en réveillant Lazare tu révèles ton énergie divine. De manière indicible, Seigneur mon Sauveur, tu as, selon tes deux natures, librement opéré mon salut.

Prière

Que ta grâce nous obtienne, Seigneur, d’imiter avec joie la charité du Christ qui a donné sa vie par amour pour le monde. Lui qui règne.