QUATRE BIENFAITS DE LA LITURGIE

Éditions Sainte-Madeleine

Dom Gérard Calvet,

Octobre 1995

 

 

 

Le Très Révérend Père Dom Gérard, père abbé de l'abbaye Sainte-Madeleine-du-Barroux, dans le diocèse d'Avignon, est né en 1927. Ordonné prêtre en 1956, il fonde à Bédoin un monastère bénédictin en 1975. Le monastère a été érigé canoniquement en abbaye en 1989 et compte aujourd'hui plus de soixante moines. Depuis plusieurs années, à travers de nombreuses conférences et plusieurs ouvrages, en particulier "La Sainte Liturgie" paru en 1982, ainsi que par de multiples articles sur la spiritualité liturgique, Dom Gérard essaie de faire partager au plus grand nombre les inestimables bienfaits de la grande tradition liturgique de l'Eglise.

Les jeunes gens qui viennent en retraite à l'abbaye nous demandent souvent pour quelle raison nous donnons une si grande place à la liturgie dans notre vie monastique. Laissons la parole à un de nos novices, aujourd'hui moine et prêtre, qui avait connu de lourdes épreuves pendant son noviciat. Il nous fit un jour cette confidence : "Je n'aurais pas persévéré dans ma vocation si, chaque jour au cours de l'année, par la grâce de la sainte liturgie, Dieu ne m'avait tendu une main secourable." C'est bien cela que chacun éprouve dans nos monastères, plus ou moins confusément : la liturgie opère au plus profond de nos âmes une sorte de charme séducteur. Jour après jour, une voix se fait entendre avec une douceur et une justesse de ton qui ne trompe pas, éclairant les âmes de l'intérieur par une succession de touches légères.
Ensuite, on verra que la liturgie est essentielle à la vocation monastique comme déploiement naturel de la grâce baptismale. S'il y a un premier bonheur à se savoir inséré pour toujours dans la famille des enfants de Dieu, il y a encore un autre bonheur, c'est de devenir le chantre de la gloire divine et de recevoir comme par avance quelque rayon de cette lumière d'en haut. C'est ainsi que le moine, au moyen des symboles, signes, sacrements et sacramentaux, entre dans la jubilation de l'Eglise, à travers le drame sacré d'une liturgie immémoriale, latine et grégorienne. S'il fallait résumer tous les bienfaits que nous apporte la fréquentation quotidienne de la prière publique de l'Eglise, on devrait les ramener à quatre points essentiels :


- le rappel incessant de la transcendance divine,
- le pouvoir attrayant de la beauté liturgique,
- le sens de l'Eglise,
- l'éducation de l'homme intérieur.

 

 

I - D'abord la transcendance divine


L'homme n'est vraiment lui-même que lorsqu'il adore. L'adoration est le signe par lequel la créature s'identifie et se résume. Depuis des milliers d'années, l'humanité aveugle avançait vers Dieu en tâtonnant, et malgré des errements inimaginables se montrait invariablement fidèle à l'austère devoir de l'adoration. Qu'il se mêlât beaucoup de crainte servile dans l'approche de la divinité, soit. Mais il y avait tout de même l'humble aveu d'un lien de dépendance où tout ne sonnait pas faux : la religion de l'Antiquité avait valeur d'attente. On se souvient de l'épisode fameux de la stèle dédiée au Dieu inconnu, dont saint Paul s'était servi pour entrer en dialogue avec les Athéniens (Actes, 17, 23). Il semblerait que Dieu préfère être adoré sans être connu, plutôt que d'être connu sans être adoré, parce qu'il s'agirait alors d'une fausse connaissance, d'une notion rabaissée et trompeuse de la divinité. On reconnaîtra ici tout le drame du monde moderne.
Comment définir l'adoration ? Elle est, au sens le plus large, une libre et amoureuse soumission de tout l'être envers la transcendance divine, par laquelle le croyant reconnaît les droits souverains de Dieu sur sa créature. Mais ce que la Révélation devait apporter d'original marquera un seuil. D'abord la notion de surnaturel : la divinité cessera d'apparaître comme une force supérieure située au sommet de la série ascendante des forces de la nature, elle se situera sur un plan infiniment supérieur à l'ordre naturel.
Il faudrait éviter à ce mot tout risque de banalisation ; surnaturel n'est pas synonyme d'insolite ou de merveilleux. Il désigne une réalité située infiniment au-dessus des conceptions naturelles que l'homme peut se faire de la sainteté. Le mot sanctus signifie séparé. Il y a dans l'Evangile une parole très forte : "Vous, vous êtes d'en bas ; moi, je suis d'en haut. Vous, vous êtes de ce monde, moi, je ne suis pas de ce monde." (Jean 8, 23). Ensuite, second effet de la Révélation, ce Dieu trois fois saint se révèle comme Père : loin d'écraser ou de terrifier, il élève sa créature à la dignité de fils. L'adoration n'exclut pas la tendresse. Tel sera l'apanage de l'ordre liturgique.
L'oubli de la transcendance divine a plongé le monde dans une situation dramatique, c'est le commencement de la grande apostasie annoncé par l'Ecriture, et l'état présent du monde est inférieur à celui de l'Antiquité parce que son rejet de Dieu fait en sorte qu'il n'est même plus le monde de l'attente mais le monde du refus. Le monde actuel se meurt de l'effacement du surnaturel. Culte de l'homme, hypertrophie du social, affirmation du moi ; qui peut prétendre que ce naturalisme n'ait pas pénétré dans la manière de prier de l'homme moderne ? Cela apparaît sous les formes les plus diverses : fringale de nouveauté et d'adaptation ; invasion de la musique moderne et des langues vulgaires (ô combien ! disait Marie Noël) ; inculturation, qui noie l'immuable prière de l'Epouse dans le flot toujours mouvant de la sensibilité du jour ; créativité enfin, qui est une des formes les plus subtiles de l'orgueil humain. Résumons en un mot : l'homme moderne cède à la tentation d'adapter la religion à l'homme au lieu d'adapter, comme l'Eglise cherche à le faire depuis des siècles, l'homme à la religion.
Tournant résolument le dos à ces tendances naturalistes, il nous sera aisé d'apercevoir que l'expression liturgique, parce qu'elle transcende les modes et les particularismes est, par essence et par vocation, parfaitement adaptée à ce que l'homme porte en lui de plus essentiel et de plus profond : l'instinct du sacré, la soif de l'adoration. Ce qui n'est jamais monté vers Dieu ne descendra jamais vers les hommes. "Celui qui est de la terre est terrestre et terrestre est aussi son langage." (Jean 3, 34). Le langage liturgique doit descendre de Dieu, si nous voulons qu'il nous fasse monter vers Lui.
Comme remède à ces déviations, l'Eglise nous offre le théocentrisme de sa prière. Autel, prêtre, fidèles doivent se tourner en esprit d'adoration vers la majesté infinie de Dieu. Notre liturgie est essentiellement adoratrice. La "messe face au peuple" est une ineptie. "Il y a péril, dit le cardinal Ratzinger, quand le caractère communautaire tend à transformer l'assemblée en un cercle fermé. Il faut réagir de toutes ses forces contre l'idée d'une communauté autonome et autosuffisante : la communauté ne doit pas dialoguer avec elle-même ; elle est une force collective tournée vers le Seigneur qui vient." (Entretiens sur la Foi). Que les lecteurs de l'épître et de l'évangile se présentent face aux fidèles qui les écoutent, quoi de plus normal ? Mais ensuite, dès que commence la partie sacrificielle, le célébrant monte à l'autel, et, tourné vers le Dieu trois fois saint, il offre la victime propitiatoire. Au Te igitur, le prêtre lève les yeux vers la croix et s'incline profondément dans une attitude d'adoration et de révérence. Il se présente alors vers l'orient, face au Seigneur crucifié qui est aussi le Seigneur de gloire, parce que c'est de l'orient que le Fils de l'Homme reviendra, entouré de ses anges avec une grande puissance et une grande majesté.
Deuxième aspect de cette orientation : chaque matin, le célébrant se tourne vers le soleil levant comme vers la plus belle image cosmique du Christ ressuscité, naissant éternellement du Père et sans cesse renaissant victorieux dans le cœur des baptisés. Le silence lui-même, quand il succède au chant choral, est un silence d'adoration où toute parole créée s'efface devant le Créateur. Le premier bienfait de la liturgie est son théocentrisme. Voyez ce qu'en dit le père Bouyer : "Comme il serait désirable que la chrétienté retrouvât ce sens premier de la Messe : ce sens théocentrique, cette réorientation de toute l'humanité, de l'univers entier sur son seul authentique foyer ; ce retour universel opéré dans le Christ crucifié et monté au ciel ; cette reprise de toutes choses dans le flot immense de l'amour divin, refluant enfin en amour filial vers la source paternelle !" (Le Sens de la Vie monastique)

 

 

II - Le pouvoir attrayant de la beauté liturgique

Mais adoration n'implique pas anéantissement. La beauté des rites sacrés anoblit les âmes, elle les élève en exerçant sur elles une suave attirance du Ciel. La vraie tradition n'est pas triste. Nos messes abbatiales du dimanche le disent bien. Durée : deux heures ; personne, ni enfant, ni adolescent, ne manifeste de signe d'impatience. Pourquoi ? Mac Nabb, historien des religions, donne la réponse ; il remarque qu'on entre dans l'Eglise par deux portes : la porte de l'intelligence et la porte de la beauté. La porte étroite, dit-il, est celle de l'intelligence ; elle s'ouvre aux intellectuels et aux savants. La plus large est celle de la beauté. Henri Charlier disait dans le même sens : "Il faut perdre l'illusion que la vérité puisse se communiquer avec fruit sans l'éclat qui lui est connaturel et qu'on appelle le beau." (L'Art et la Pensée)
L'Eglise dans son Mystère impénétrable d'épouse du Christ, Kyrios de Gloire, avait besoin d'une épiphanie terrestre accessible à tous : ce sera la majesté de ses temples, l'éclat de sa liturgie et la douceur de ses chants. J'observais l'an dernier un groupe de jeunes officiers de marine japonais visitant la cathédrale de Paris. Leurs regards s'attardent sur la hauteur des voûtes, la splendeur des verrières, l'harmonie des proportions. Supposez qu'à cet instant, des officiants, revêtus de chapes de velours et d'orfrois, entrent en procession pour des Vêpres solennelles. Les visiteurs regardent en silence ; ils sont saisis : la beauté leur a ouvert ses portes. Or la Somme de saint Thomas d'Aquin et Notre-Dame de Paris sont deux architectures contemporaines. Elles disent la même chose. Mais qui parmi les visiteurs a lu la Somme de saint Thomas ? Le même phénomène se retrouve à tous les niveaux. Les touristes qui visitent l'Acropole d'Athènes reçoivent le choc d'une civilisation de la beauté. Mais, parmi eux, combien comprennent Aristote ?
Ainsi de la beauté liturgique. Plus que tout autre, elle mérite d'être appelée la splendeur du vrai. Elle ouvre aux petits et aux grands les trésors de sa magnificence : beauté de la psalmodie, chant et littérature sacrés, lumières, harmonie des mouvements, dignité du maintien. Avec un art souverain, la liturgie exerce une véritable séduction sur les âmes, qu'elle touche directement, avant même de mouvoir les énergies de l'esprit. Mais c'est un art délicat, aux antipodes d'une certaine liturgie post-conciliaire, "devenue opaque et ennuyeuse, par son goût du banal et du médiocre, au point d'en donner le frisson." (Cardinal Ratzinger, Entretiens sur la Foi) Craignons également la race des animateurs qui se mêlent d'introduire du nouveau dans la célébration pour la rendre plus attrayante. C'est encore le cardinal Ratzinger qui nous avertit : "La liturgie n'est pas un show, un spectacle qui ait besoin de metteurs en scène géniaux ni d'acteurs de talent. La liturgie ne vit pas de surprises "sympathiques", de "trouvailles" captivantes, mais de répétitions solennelles." (Ibidem)
Disons quelques mots de la solennité. Surtout, ne pas la confondre avec le décorum. Loin de peser comme une surcharge, la solennisation des rites veut exprimer par transparence l'éclat du surnaturel. Parvenue à une certaine hauteur, toute liturgie sacrée tend au moyen d'un rituel à nous faire sortir du banal et du quotidien, non pas dans un but esthétique, mais pour suggérer au regard des fidèles que l'action qui se déroule vient de Dieu. La majesté du déploiement liturgique n'a pas d'autre fin, elle signifie que quelque chose de céleste vient toucher la terre. Saint Grégoire, le grand pape bénédictin du VIe siècle, l'a écrit dans ses Dialogues : "A l'heure du sacrifice, le ciel s'ouvre à la voix du prêtre ; en ce mystère de Jésus-Christ, les chœurs des anges sont présents, ce qui est en haut vient rejoindre ce qui est en bas, le Ciel et la Terre s'unissent, le visible et l'invisible ne font plus qu'un."(IV, 60).
La solennité du culte est partie intégrante de la liturgie catholique et doit être cultivée comme un élément de son propre message, à la condition toutefois que cette solennisation ne sombre pas dans le pompeux et le maniérisme. La réussite suprême de l'ornement est de si bien convenir qu'il se fasse oublier. Mais les accusations de triomphalisme sont une insulte à la joie des pauvres qui aiment voir exalter la grandeur. Voici encore ce qu'en pense le cardinal Ratzinger : "Il n'y a pas trace de triomphalisme dans la solennité du culte avec laquelle l'Eglise exprime la gloire de Dieu, la joie de la foi, la victoire de la vérité et de la lumière sur l'erreur et les ténèbres. La richesse liturgique n'est pas la richesse de quelque caste sacerdotale ; c'est la richesse de tous, des pauvres aussi, qui la désirent en fait et ne s'en scandalisent absolument pas." (Ibidem)
Veut-on saisir à plein le pouvoir convertisseur de la beauté liturgique ? Rien de plus éclairant sur ce sujet que la savoureuse Chronique de Nestor. Elle relate que, lorsque le prince Vladimir de Kiev, encore païen, voulut adorer le Dieu unique, il écouta Musulmans, Juifs et Grecs, venus lui exposer chacun leur religion. Il envoya donc une ambassade de dix hommes pour aller voir de leurs propres yeux comment chacun des solliciteurs pratiquait sa liturgie. Après avoir visité les mosquées chez les Bulgares, ils arrivèrent à Constantinople.
"L'empereur de Byzance, raconte Nestor, envoya un message au patriarche disant : "Des Russes sont venus dans l'intention d'étudier notre religion ; prépare l'église et ton clergé, revêts ton costume pontifical afin qu'ils voient la gloire de notre Dieu". Alors le patriarche appela le clergé ; on célébra les solennités suivant l'usage, on brûla de l'encens, et on chanta des chœurs. Et l'empereur alla avec les Russes dans la basilique, et on les fit placer dans un endroit d'où l'on pût bien voir ; puis on leur montra les beautés de l'église, les chants et le service de l'évêque, le ministère des diacres, en leur expliquant le service divin. () Revenus au pays, ils dirent aux princes et aux Boyards : "Nous avons été d'abord chez les Bulgares et nous avons observé comment ils adorent dans leurs temples ; ils se tiennent debout sans ceinture ; ils s'inclinent, s'assoient, regardent ça et là comme des possédés, et il n'y a pas de joie parmi eux, mais une tristesse et une puanteur affreuses. Leur religion n'est pas bonne C'est alors que nous sommes allés en Grèce et on nous a conduits là où ils adorent leur Dieu. Dès cet instant, nous ne sûmes plus si nous étions dans le ciel ou sur la terre ; car il n'existe pas de tel spectacle ici-bas, ni de telle beauté. Nous ne sommes pas capables de le raconter ; mais nous savons seulement que c'est là que Dieu habite au milieu des hommes ; et leur office est plus merveilleux que dans les autres pays"".
La leçon se dégage d'elle-même. La liturgie fait plus que nous décrire les merveilles de la Patrie céleste. Elle nous entrouvre les portes du Royaume. L'homme y pénètre corps et âme : la vue, l'ouïe, l'odorat, tout lui parle de Dieu. Mais combien de nos contemporains et même, hélas ! combien de fils de l'Eglise, savent qu'ils ont là la clef d'or du Paradis ?

 

 

III - Le sens de l'Eglise

Ce que les théologiens appellent le sensus Ecclesiæ est une sensibilité surnaturelle par laquelle les fidèles sentent comme par intuition ce qui est conforme à la foi et à la tradition de l'Eglise. Un peu comme les enfants d'une famille sentent ce qui est en accord ou en opposition avec l'esprit de la maison : "Chez nous, on ne fait pas des choses comme ça", diront-ils. De même, le "sens de l'Eglise" ne sera pas le fruit d'un enseignement didactique, mais l'effet d'un instinct supérieur souvent départi aux plus démunis, que la pratique multiséculaire de la liturgie éclaire de l'intérieur pour leur faire sentir comment témoigner de leur foi, fût-ce en présence d'esprits plus savants.
On s'interroge parfois sur les causes du maintien de la foi dans les temps de persécution, spécialement dans les régions du globe où la religion est privée de ses moyens extérieurs d'expression, comme la liberté de la presse et de la prédication. Voici ce que dit Maxime V, patriarche melchite, au Ier synode des évêques (1977) consacré à la catéchèse : "Ce qui durant les siècles de persécution musulmane a conservé la foi des fidèles, c'est la célébration de la divine liturgie."
Le même phénomène a été observé dans les pays de l'Est : baptême et Eucharistie ont constitué pour la foi l'appui unique mais irrépressible auquel s'est heurté l'appareil communiste. On touche ici du doigt le caractère social et missionnaire de la liturgie : elle exerce un ministère de rassemblement autour d'un point fixe, elle retient les fidèles sur la pente de l'oubli et de la dérive, elle est, disait Dom Guéranger, la Tradition à son plus haut degré de puissance et de solennité. L'abbé de Solesmes citant Bossuet à plusieurs reprises en appelle à la liturgie comme "principal instrument de la Tradition", montrant qu'elle peut être appelée "la Tradition professée" face aux propositions des conciles qui représentent "la Tradition définie". Le père Clérissac rapporte qu'au Moyen-Age un juif avait demandé le baptême parce qu'il avait remarqué que le lyrisme de la synagogue était passé dans la liturgie de l'Eglise. Pour que l'Eglise du Christ se distingue des autres religions, il faut que sa prière et ses sacrements s'entourent d'un voile assez transparent afin de laisser deviner le mystère de ses origines. Raison profonde d'une langue sacrée : non seulement exprimer l'universalité d'une religion, mais lui servir de référence fixe dans le flot mouvant de l'histoire.
Les papes savent très bien que le peuple ne lit pas les encycliques. Lorsque Pie XI écrivit Quas Primas, sa grande encyclique sur le Christ-Roi, il avait comme dessein arrêté de combattre ce qu'il appelait la peste du laïcisme. Or le texte même de l'encyclique contenait l'annonce d'une fête nouvelle en l'honneur de la Royauté sociale du Rédempteur. Voici comme Pie XI justifia l'introduction de cette messe, inconnue jusqu'alors, dans le cycle de l'année liturgique : "Pour pénétrer le peuple des vérités de la foi et l'élever ainsi aux joies de la vie intérieure, les solennités annuelles des fêtes liturgiques sont bien plus efficaces que tous les documents, même les plus graves, du magistère ecclésiastique : ceux-ci n'atteignent habituellement que le petit nombre et les plus cultivés () celles-là étendent leur influence salutaire au cœur et à l'intelligence, donc à l'homme tout entier."
On aperçoit là le lien étroit qui unit foi et liturgie. Avec la liturgie, j'entre dans l'être de l'Eglise, dans son sanctuaire intime. Je vois qu'elle vient de Dieu, donc qu'elle sait mieux que moi comment croire, comment parler à Dieu, comment se tenir devant la majesté divine, et quand je dis l'amen qui conclut ses oraisons, je souscris à une pensée objective que je fais mienne et qui me dépasse infiniment. Ainsi s'acquiert peu à peu cet instinct surnaturel qui conduira tout naturellement les fidèles au sentire cum Ecclesia : le goût de sentir et de penser avec l'Eglise.
Lorsque dans les terribles années 70 de l'après-concile, un clergé dévastateur brocardait agenouillements, rites sacrés, grégorien, culte des anges et des saints, ce qui sauva la foi dans le peuple chrétien, c'est l'amour de ces choses saintes que la liturgie avait allumé dans les coeurs. Et l'Eglise elle-même, si attaquée, et parfois, hélas ! si mal représentée, comment pourrions-nous lui garder notre admiration et notre amour, si ce n'est par l'influence douce et continue de sa prière et de ses sacrements ? C'est là que nous la reconnaissons comme Vierge et Mère, composée de pécheurs mais sans péché, enfoncée dans le temps mais appartenant déjà à l'éternité par l'attirance qu'exerce sur son Corps le Chef parvenu dans la gloire.
Comment fidèles et incroyants reconnaîtraient-ils le visage de l'Ecclesia Mater, si elle-même ne faisait preuve constamment de ce qu'on pourrait appeler sa puissance de sanctification ? Dom Vonier remarque : "La puissance que l'Eglise catholique possède de sanctifier est vraiment prodigieuse ; elle n'en fait pas de secret ; elle le proclame devant le monde entier ; elle remplit sa mission spéciale, d'une manière magnifique, comme reine du monde spirituel. La consécration ou dédicace d'une église est la contrepartie, inspirée par Dieu, des efforts de l'esprit impur, dont le Christ dans l'Evangile nous a donné le tableau. L'Eglise livre un assaut à la construction matérielle achevée, elle y entre en gloire et en grâce, et elle invite ses enfants à la suivre et à trouver du repos pour leurs âmes dans une maison réservée à la sainteté." (Christianus)
Si nous interrogeons les convertis, leurs témoignages iront toujours dans le même sens :
"Le jeune homme que j'étais à dix-huit ans, qui cherchait son chemin dans une grande ténèbre, en quête d'une vérité qu'il pressentait confusément - une vérité vivante, faite pour l'âme et non seulement pour l'esprit -, eut la révélation de la sainteté par le chant grégorien. () Dans sa nudité et sa simplicité, le chant grégorien m'emmenait beaucoup plus loin que les musiques humaines, il me faisait entrevoir la réalité de ces mystères que je ne soupçonnais pas ; il m'emplissait de cette "plénitude de Dieu" dont parle saint Paul ; il me disait que cette plénitude était pour moi si je voulais ; j'avais la certitude que c'était Dieu lui-même qui me parlait par ce chant." (André CHARLIER, Le Chant Grégorien)
Dom Grammont, à l'issue d'une messe solennelle à laquelle assistaient des pasteurs protestants, remarqua l'un d'eux bouleversé qui se dirigeait vers lui en s'exclamant dans un transport : "J'ai vu l'Eglise !" Il l'avait vue à travers le déploiement de sa plus pure et plus antique tradition. C'est par les paroles, les chants, et par le rituel immuable de la liturgie, que l'âme chrétienne se trouve reliée à une Patrie qui transcende les siècles.

 

 

IV - L'éducation de l'homme intérieur


Ce qu'il y a de plus caché et de plus secret en chacun de nous, ce qui se dérobe au regard des hommes et qui donne son véritable sens à la vie, la perle précieuse, le trésor enfoui dans le champ, que cherchent les contemplatifs et, l'ayant trouvé, ne voudraient le perdre pour tout l'or du monde, c'est la découverte du Dieu intérieur.
Le plus haut bienfait de la liturgie, et sa plus profonde raison d'être - car la beauté sacrale n'est pas une fin en soi -, c'est de nous introduire d'une main sûre dans le sanctuaire de l'âme où se déroule le seul drame vraiment essentiel de l'existence humaine : la croissance de notre vie surnaturelle.
Mis à part les carmélites, ces anges du ciel prisonnières du temps, qu'une vocation particulière appelle à chercher Dieu sans image, la plupart d'entre nous devront puiser dans l'immense trésor de signes, de paroles et d'actions rituelles de quoi alimenter leur méditation. Pendant seize siècles, l'Eglise a enseigné à ses enfants le difficile art de prier non à l'aide des industries humaines mais par le moyen d'une pédagogie divine dont elle a le secret.
Le goût de l'oraison et de la prière silencieuse ne s'acquiert pas à coups de raisonnements ; c'est en apprenant à couler le mouvement intérieur de notre âme dans celui de l'Epouse du Christ que l'on pénètre en Dieu.
Ecoutons un père abbé parler à ses moines : "L'oraison telle que la conçoit saint Benoît a pour thème le texte même de l'uvre de Dieu. Elle jaillit des entrailles de l'Office divin. Laissez-vous donc prendre. Ensuite, continuez à puiser à ce que vous avez recueilli pendant l'Office. Dieu s'est incliné à ce moment. Dans le silence, interrogez les idées ainsi semées. L'oraison est l'intime note de l'uvre de Dieu durant sa célébration, pour devenir ensuite son écho prolongé, le parfum précieux, le fruit personnel approprié aux dispositions et aux besoins de chacun selon la conduite de l'Esprit Saint. Comme l'uvre de Dieu recommence sept fois le jour et une fois la nuit, le fleuve de l'oraison coule sans cesse au milieu des enfants de saint Benoît, et l'âme qui demeure constamment sur sa rive bénie, peut s'y abreuver à longs traits de manière à en ressentir la fraîcheur salutaire du matin au soir et du soir au matin." (Dom Romain BANQUET, La Doctrine Monastique)
Dom Delatte ne parlait pas autrement. Evoquant L'Année Liturgique qui fut le grand ouvrage de Dom Guéranger, il souligne en quelques mots quel fut le secret de son rayonnement : "Assurément les révolutions font plus de bruit, les oeuvres humaines ont souvent plus d'éclat, au lieu que le bien surnaturel se fait sans bruit et se dérobe dans le silence. Mais qui pourrait calculer la pénétration douce et tranquille de cet enseignement universel dont les âmes, lorsqu'elles l'ont une fois goûté, ne peuvent plus se déprendre, comme si elles y reconnaissaient l'accent de l'Eglise et la saveur de leur baptême ?" Quant à la méditation des textes liturgiques, il la définit d'un trait rapide : recueillir des lèvres et du cœur de l'Eglise la pensée de Dieu.
Ceci n'est pas vrai seulement pour les religieux. Georges Bernanos, homme bien planté dans son siècle, en fut une illustration vivante : la vie intérieure puisée aux sources de la liturgie fit que de brillant pamphlétaire il devint un écrivain de l'âme. Le voici pris sur le vif par Bruckberger : "Chaque jour, il lisait le journal, écoutait la radio. Cependant, chaque matin, et quoi qu'il arrivât, il y avait une demi-heure réservée, sacrée. Avant que la maison ne s'éveillât, ne s'emplît de brouhaha, il lisait, dans son vieux missel usé, la messe du jour en latin, avec toute la concentration de l'esprit et de l'âme dont il était capable : ce prédestiné avait reçu le privilège divin de l'attention. Il se nourrissait avidement des formules inchangées de la liturgie, leur trouvant chaque matin l'éclat du neuf : chaque matin, c'était à lui seul que ces paroles étaient dites pour la première fois dans toute l'histoire du monde, c'était son pain quotidien et supersubstantiel. Ainsi commençait sa journée. Le dimanche, il allait à la messe avec toute la famille et habituellement communiait."(Bernanos Vivant)
Mais l'éducation de l'homme intérieur n'est pas seulement redevable à l'atmosphère calme et recueillie des offices de l'Eglise. Il y a, semblable à un accumulateur d'énergie, la présence quasi sacramentelle du Christ insérée dans les mystères de l'année liturgique.
Qu'appelle-t-on les mystères ? Ce sont des actions du Christ Jésus accomplies dans une portion du temps, comme sa passion, sa résurrection et son ascension, abolies pour toujours quant à leur historicité, mais prolongées et comme véhiculées au cours de l'action sacrificielle, à la manière d'une étoile éteinte depuis des milliers d'années, dont la lumière continue de briller dans la nuit ; ainsi le Christ dans ses différents mystères vient-il à la rencontre des âmes au cours de l'année liturgique pour les recréer à son image. Cette œuvre d'identification au Christ a trouvé chez Dom Delatte des accents admiratifs pour exalter "la beauté surnaturelle, cette ressemblance parfaite avec Lui que toute l'économie surnaturelle s'emploie à graver, cette empreinte divine que la frappe du balancier liturgique imprime perpétuellement en nos âmes". On verra donc dans le déploiement de l'année liturgique non pas une représentation froide et inerte de la vie de Notre-Seigneur, mais une irradiation de la personne du Rédempteur revivant en chacun des fidèles l'action salvatrice de sa passion et de sa montée dans la gloire. C'est ainsi, conclut saint Léon, que ce qui était visible dans la vie de notre Rédempteur est passé dans les mystères : "Quod itaque Redemptoris nostri conspicuum fuit in sacramenta transivit."
Chez les Pères, les mots mysteria et sacramenta sont synonymes. Ils désignent une action sacrée dans laquelle l'oeuvre de notre rédemption est rendue présente non pas comme le ferait un emblème purement symbolique, mais comme l'enveloppe rituelle d'une réalité ineffable. Cette doctrine du réalisme sacramentel est du plus haut intérêt pour la vie de prière. On la perdit de vue au XVIe siècle pour insister sur l'effort individuel et psychologique, au détriment d'une piété objective, centrée sur les mystères. Lorsque la liturgie pascale s'empare de l'Ecriture, elle ne prononce pas seulement un récit propre à favoriser une méditation personnelle à laquelle chacun pourra se livrer par la suite, elle réalise une présence actuelle du Seigneur à laquelle il nous est loisible de communier tout au long de l'office ; c'est l'Eglise tout entière qui participe à la mort et à la résurrection de son Sauveur, et nous en elle. Cette participation n'est pas le fruit d'un effort de l'esprit ou de l'imagination ; elle est objective, c'est-à-dire qu'elle se développe par l'effet de son propre dynamisme et non par l'effet d'une industrie humaine, comme le sont les dévotions privées.
Quel élargissement de nos perspectives cela implique et quel approfondissement de la foi, si du moins, par l'estime que nous avons de l'action liturgique et de son efficacité souveraine, nous consentons à laisser vivre et s'accomplir en nous l'oeuvre divine de notre rédemption. C'est alors que le choix judicieux et la calme répétition des grands textes de l'Ecriture, leur puissance d'expression, l'art du chant grégorien, les sacrements et les mystères de la vie du Christ qui passent et repassent sans cesse sous nos yeux, impriment dans les âmes cette image du Fils qui les transforme et les réconcilie avec le Père.
Heureuses, quatre fois heureuses les âmes formées à l'école de la sainte liturgie !

 

 

 

La liturgie: joie de Dieu et joie des hommes (Sermon par un moine bénédictin)

 

"Qu’est-ce que la liturgie?", demandait un jour Charlemagne à son savant ministre et chapelain, Alcuin. "La liturgie, répondit le moine, c’est la joie de Dieu!" La liturgie, c’est la joie de Dieu, parce qu’elle est le culte que lui rend son Fils unique, prêtre éternel; parce qu’elle est le culte public, l’expression de l’hommage, de l’adoration, de la louange, de l’action de grâce, que la Sainte Eglise rend, elle aussi, à la majesté divine, en mettant en œuvre le Sacerdoce royal de son époux, le Christ, notre Seigneur.

La liturgie, c’est la joie de Dieu, parce que, tout au long de ce cycle annuel où elle se déroule, c’est tout le mystère du Verbe incarné, rédempteur de tous les hommes — ce mystère qui seul, finalement, intéresse Dieu —, qui se déploie, qui est commémoré et, en quelque sorte, rendu de nouveau présent, réactualisé : la venue du Christ sur la terre, sa naissance, sa manifestation au monde, sa prédication du royaume des cieux, sa douloureuse passion, sa mort sur la croix, sa glorieuse résurrection, son admirable ascension, le don fait à son Eglise de l’Esprit Saint consolateur.

La liturgie, c’est la joie de Dieu, parce que, chaque jour, par le ministère des prêtres, se renouvelle à l’autel le sacrifice unique de l’agneau qui ôte les péchés du monde et qui rend à son Père, au nom de la création entière, "tout honneur et toute gloire". La messe est le cœur de la liturgie, et les autres parties du service divin, de l’office divin, en sont comme le rayonnement. En ce point central surtout, Dieu trouve sa joie, puisque c’est là — dans le Saint Sacrifice — que se rétablissent les relations de l’homme avec Dieu, rompues par le péché, que s’équilibre le rapport de toute la création avec son Créateur.

La liturgie, c’est la joie de Dieu, parce que c’est son œuvre; Il en est l’objet, Il en est le but; la liturgie magnifie Dieu; Il est l’agent principal de cette œuvre qui réalise des choses divines, mais qu’Il a voulu pourtant voir s’achever par des mains et sur des lèvres humaines.

Joie de Dieu, la liturgie est aussi, affirme Dom Guéranger, la "joie des peuples", c’est-à-dire la joie des hommes devenus fils de Dieu, notre joie! "Etant la grâce sanctifiante qui s’épanouit en chant et s’exprime en foi, espérance et charité, la liturgie est l’acte propre de celui qui a la grâce, qui est habilité par le caractère baptismal à traiter avec Dieu"; elle est le bien propre des enfants de Dieu.

La liturgie est la joie des hommes; les hommes sont faits pour Dieu, pour aller à Dieu; ils ont besoin de rédemption, ils ont besoin de sainteté, pour retrouver ou maintenir le contact avec le Dieu Saint. Or c’est la liturgie qui leur procure tout cela. "En elle, l’Esprit Saint a eu l’art de concentrer, d’éterniser, de diffuser par tout le Corps du Christ, la plénitude inaltérable de l’œuvre rédemptrice, toutes les richesses surnaturelles du passé de l’Eglise, du présent, de l’éternité."

La liturgie est la joie des hommes, parce qu’elle est pour eux le moyen privilégié de l’approche divine, "une voie majeure, quasi sacramentelle"; la source de leur progrès spirituel :

jour après jour, dimanche après dimanche, "la frappe du balancier liturgique imprime dans l’âme baptisée une plus grande ressemblance avec le Seigneur."

Par la liturgie, notre foi s’éclaire d’année en année, le sens de Dieu s’affine en nous, la prière nous conduit à une meilleure connaissance des choses de Dieu, car "le cycle liturgique est un Credo vécu." Les mystères restent mystères, mais leur splendeur devient plus vive... L’espérance, elle aussi, s’avive au spectacle des mirabilia Dei, des merveilles que Dieu a accomplies en faveur de l’homme. Enfin, notre charité s’enflamme sous l’action de l’Esprit Saint qui nous travaille tout à son aise dans la divine liturgie.

La liturgie est la joie des hommes, parce qu’elle est la plus haute école d’oraison : d’une manière persuasive, presque sans contrainte, elle nous apprend la contemplation chrétienne, qui est prière et amour. C’est dans le cadre de la liturgie que nous recevons les sacrements, canaux de la grâce, que nous participons au Sacrifice du Calvaire, que nous communions au Corps du Christ. Quand, prêtre, je dis la messe, "j’ai en mains ce qu’il faut pour dire à Dieu un merci digne de Lui, puisque je Lui offre Jésus-Christ. Quand, membre du Christ par le baptême, je communie, je possède Jésus-Christ. Quand on a Jésus-Christ, on a tout. La supplication, l’adoration, l’action de grâce, c’est Lui, et quand je L’offre au bon Dieu, je suis quitte avec le bon Dieu, parce que Jésus-Christ c’est tout, c’est l’Offrande Infinie!" Par l’eucharistie, nous touchons Dieu et Dieu nous touche, c’est déjà pour nous le Ciel anticipé. Où trouverions-nous un plus grand sujet de joie?

La liturgie est encore la joie des hommes, parce qu’elle est une œuvre de beauté, propre, de bout en bout, à nous ravir l’esprit et le cœur; elle nous fait chanter Dieu et jubiler en Lui. La liturgie de l’Eglise, c’est le plus vaste, le plus grandiose, le plus vivant des poèmes. La poésie est partout dans la liturgie, dit encore Dom Guéranger, parce qu’elle seule est à la hauteur de ce qui doit être exprimé. Tout ce lyrisme, toutes ces prières, toutes ces cérémonies, tous ces chants et cantiques aux mélodies si variées, l’Eglise les a choisis et les a mis en place pour nous hausser au niveau divin, pour nous suggérer la grandeur de Dieu, pour nous donner comme un avant-goût de la joie du Ciel. Ce don de l’Eglise aux hommes, qui le mesure? Tout ce trésor, toute cette magnificence, pourtant, l’Eglise l’a ouvert et l’ouvrira, de siècle en siècle, au moindre de ses petits. La liturgie, c’est ainsi notre vie théologale devenue chant d’admiration et chant d’allégresse. Enfin, la liturgie est la joie des hommes, parce qu’elle ramène chaque année les fêtes des saints que nous aimons et qui sont nos intercesseurs auprès de Dieu, Notre-Dame surtout! C’est ainsi que le 8 décembre, nous aurons la joie de chanter la pureté incomparable de l’Immaculée Conception de notre Mère, la Vierge Marie, pleine de grâce… En ce début de l’Avent, demandons-lui de nous obtenir la pureté du cœur, si nécessaire pour accueillir Jésus qui vient, et de nous rapprocher toujours plus de son Fils en cette nouvelle année liturgique.

Amen.

 

 

 

 

 

Achevé d’imprimer sur les presses de l’artisanat Monastique de Provence, en la fête de l’assomption, le quinze août mil neuf cent quatre-vingt-quinze.