Année C

Evangile selon saint Luc

 

1er dimanche de l’avent C *

2e dimanche de l’avent C *

3e dimanche de l’avent C *

4e dimanche de l’avent C *

Nativité du Seigneur C *

La Sainte Famille C *

1er janvier - Sainte Marie, Mère de Dieu C *

2e dimanche après Noël C *

Epiphanie du Seigneur C *

Baptême du Seigneur C *

1er dimanche de carême C *

2e dimanche de carême C *

3e dimanche de carême C *

4e dimanche de carême C *

5e dimanche de carême C *

Dimanche des Rameaux et de la Passion C *

Jeudi saint C *

Vendredi saint C *

Samedi saint C *

Dimanche de Pâques C *

Lundi de Pâques C *

2e dimanche de Pâques C *

3e dimanche de Pâques C *

4e dimanche de Pâques C *

5e dimanche de Pâques C *

6e dimanche de Pâques C *

Ascension du Seigneur C *

7e dimanche de Pâques C *

Pentecôte C *

La Sainte Trinité C *

Le Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ C *

Le Sacré-Cœur de Jésus C *

2e dimanche du temps ordinaire C *

3e dimanche du temps ordinaire C *

4e dimanche du temps ordinaire C *

5e dimanche du temps ordinaire C *

6e dimanche du temps ordinaire C *

7e dimanche du temps ordinaire C *

8e dimanche du temps ordinaire C *

10e dimanche du temps ordinaire C *

11e dimanche du temps ordinaire C *

12e dimanche du temps ordinaire C *

13e dimanche du temps ordinaire C *

14e dimanche du temps ordinaire C *

15e dimanche du temps ordinaire C *

16e dimanche du temps ordinaire C *

17e dimanche du temps ordinaire C *

18e dimanche du temps ordinaire C *

19e dimanche du temps ordinaire C *

20e dimanche du temps ordinaire C *

21e dimanche du temps ordinaire C *

22e dimanche du temps ordinaire C *

23e dimanche du temps ordinaire C *

24e dimanche du temps ordinaire C *

25e dimanche du temps ordinaire C *

26e dimanche du temps ordinaire C *

27e dimanche du temps ordinaire C *

28e dimanche du temps ordinaire C *

29e dimanche du temps ordinaire C *

30e dimanche du temps ordinaire C *

31e dimanche du temps ordinaire C *

32e dimanche du temps ordinaire C *

33e dimanche du temps ordinaire C *

34e dimanche du temps ordinaire C Le Christ Roi de l’univers *

 

 

Temps de l’avent C

 

1er dimanche de l’avent C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc Lc 21,25-36

Jésus parlait à ses disciples de sa venue : "Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées par le fracas de la mer et de la tempête."

Homélie

Les deux avènements du Seigneur

Sermon de saint Bernard († 1153)

1 Sermons sur l’avent du Seigneur, 4, 1, 3-4, Opera omnia, éd leclercq, 4, 1966, 182-185

Il va de soi, mes frères, que vous devez célébrer de toute votre dévotion l’avènement du Seigneur, étant charmés par une telle consolation, stupéfaits par une telle commisération, enflammés par une telle dilection ! Mais ne pensez pas seulement à l’avènement où le Seigneur est venu chercher et sauver ce qui était perdu (Lc 19,10); pensez à celui où il viendra pour nous prendre avec lui. Puissiez-vous consacrer à ces deux avènements une méditation prolongée, en ruminant dans vos cœurs ce qu’il a donné dans le premier, ce qu’il a promis dans le second! <>

Car voici le temps du jugement : il va commencer par la famille de Dieu. Mais comment finiront-ils, ceux qui refusent d’obéir à l’Évangile de Dieu (1 P 4,17)? Que sera le jugement final pour ceux qui ne se relèvent pas de ce jugement-ci? Tous ceux qui se dérobent au jugement qui a lieu maintenant, où le prince de ce monde est jeté dehors, qu’ils attendent, ou plutôt qu’ils redoutent ce juge par lequel eux-mêmes seront jetés dehors avec leur prince. Mais nous, si nous sommes pleinement jugés maintenant, attendons en sécurité comme Sauveur le Seigneur Jésus Christ, lui qui transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux (Ph 3,20-21). Alors les justes resplendiront comme le soleil dans le royaume de leur Père (Mt 13,43).

Lorsque le Seigneur reviendra, il transfigurera notre corps de misère à la ressemblance de son corps de gloire, mais seulement si notre cœur a été auparavant transfiguré en devenant conforme à l’humilité de son cœur. C’est pourquoi il disait: Devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur (Mt 11,29).

Découvrez dans ce texte qu’il y a deux sortes d’humilité: l’une de connaissance, l’autre d’amour, appelée ici l’humilité du cœur. La première nous enseigne que nous ne sommes rien, et nous en sommes instruits par nous-mêmes, par notre propre faiblesse. Avec la seconde, nous piétinons la gloire du monde, et nous en sommes instruits par celui qui s’est anéanti, en prenant la condition de serviteur; appelé au trône, il s’est enfui; mais appelé à tous les outrages et à l’ignominieux supplice de la croix, il s’y est offert lui-même de son plein gré.

Prière

Donne à tes fidèles, Dieu tout-puissant, d’aller avec courage sur les chemins de la justice à la rencontre du Seigneur, pour qu’ils soient appelés, lors du jugement, à entrer en possession du royaume des cieux. Par Jésus Christ.

 

2e dimanche de l’avent C

 

Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 3,1-6

L’an quinze du règne de l’empereur Tibère, Ponce Pilate étant gouverneur de Judée, Hérode, prince de Galilée, son frère Philippe, prince du pays d’Iturée et de Traconitide, Lysanias, prince d’Abilène, les grands prêtres étant Anne et Caïphe, la parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean, fils de Zacharie.

Homélie

Préparez votre cœur

Homélie d’Origène († 253)

Homélies sur saint Luc. 21. SC 87, 292-299

La parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean, fils de Zacharie, et il parcourait toute la région du Jourdain (Lc 3,2-3). Ce sont évidemment ces lieux proches du Jourdain que Jean devait parcourir : ainsi celui qui voulait faire pénitence pourrait facilement être plongé dans l’eau.

Le nom de "Jourdain" signifie: "celui qui descend." Le fleuve de Dieu "qui descend" avec la puissance d’un flot abondant, c’est le Sauveur, notre Seigneur, en qui nous sommes baptisés dans l’eau véritable, dans l’eau du salut.

Jean Baptiste prêche un baptême pour le pardon des péchés (Lc 3,4): "Venez, catéchumènes, faites pénitence afin de recevoir le baptême pour le pardon des péchés. Il reçoit ce baptême pour le pardon des péchés, celui qui cesse d’en commettre. Mais celui qui vient au baptême en demeurant dans le péché, ses péchés ne lui sont pas pardonnes. Ainsi, je vous en conjure, ne venez pas au baptême sans réflexion et examen attentif: donnez d’abord des fruits qui expriment votre conversion (Lc 3,8). Ayez pendant quelque temps une conduite honorable, gardez-vous purs de toutes les souillures et de tous les vices, et vous recevrez le pardon de vos péchés quand vous aurez commencé vous-mêmes à mépriser vos propres péchés. Quittez ces fautes, et l’on vous en tiendra quittes.

La citation de l’Ancien Testament, qui est alléguée ensuite, se lit chez le prophète Isaïe: Voix de celui qui crie dans le désert: Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers (cf. Is 40,3). Quel chemin allons-nous préparer pour le Seigneur? Un chemin matériel? Mais la Parole de Dieu suit-elle un pareil chemin? Ou faut-il préparer au Seigneur une route intérieure, et ménager dans notre cœur des sentiers droits et unis? Tel est le chemin par lequel est entré le Verbe de Dieu qui s’installe dans le cœur humain, capable de l’accueillir.

Il est grand le cœur de l’homme, il est spacieux et hospitalier, pourvu qu’il soit pur. Voulez-vous connaître son ampleur et sa largeur? Voyez quelle abondance de connaissances divines il peut embrasser! Il le dit lui-même : Il m’a donné une connaissance exacte du réel. Il m’a appris la structure de l’univers et l’activité des éléments, le commencement, la fin et le milieu des temps, les alternances des solstices et les changements de saisons, les cycles de l’année et les positions des astres, les natures des animaux et les humeurs des bêtes sauvages, les impulsions violentes des esprits et les pensées des hommes, les variétés des plantes et les vertus des racines (Sg 7,17-23). Vous voyez qu’il n’est pas petit, le cœur des hommes, pour embrasser tant de choses ! Entendez cette grandeur non de ses dimensions physiques, mais de la puissance de sa pensée, capable d’embrasser une aussi grande connaissance de la vérité.

Pour amener tous les gens simples à reconnaître la grandeur du cœur humain, j’apporterai quelques exemples familiers. Toutes les villes que nous avons traversées, nous les gardons dans notre esprit: leurs caractéristiques, la situation des places, des remparts et des édifices demeurent dans notre cœur. Le chemin que nous avons parcouru, nous le conservons dessiné et inscrit dans notre mémoire; la mer où nous avons navigué, nous la contenons dans notre pensée silencieuse. Je le répète, il n’est pas petit le cœur qui peut embrasser tant de choses ! Et s’il n’est pas petit pour embrasser tant de choses, on peut bien y préparer le chemin du Seigneur et rendre droit son sentier, pour que puisse y marcher celui qui est la Parole et la Sagesse. Préparez le chemin du Seigneur par une conduite honorable, par des œuvres excellentes; aplanissez le sentier afin que le Verbe de Dieu marche en vous sans rencontrer d’obstacle et vous donne la connaissance de ses mystères et de son avènement, lui à qui appartiennent la gloire et la puissance pour les siècles des siècles. Amen (1 P 4,11).

Prière

Seigneur tout-puissant et miséricordieux, ne laisse pas le souci de nos tâches présentes entraver notre marche à la rencontre de ton Fils ; mais éveille en nous cette intelligence du cœur qui nous prépare à l’accueillir et nous fait entrer dans sa propre vie. Eui qui règne avec toi et le Saint-Esprit, maintenant et pour les siècles des siècles. Amen.

 

3e dimanche de l’avent C

Évangile

Evangile de Jésus Christ selon saint Luc 3,10-18

Les foules qui venaient se faire baptiser par Jean lui demandaient: "Que devons-nous faire?" Jean leur répondait: "Celui qui a deux vêtements, qu’il partage avec celui qui n’en a pas ; et celui qui a de quoi manger, qu’il fasse de même ! "

Homélie

Il tient la pelle à vanner

Homélie d’Origène († 253)

Homélies sur saint Luc, 26, 3-5; SC 87, 340-342.

Le baptême par lequel Jésus baptise est dans l’Esprit Saint et dans le feu (Lc 3,17). Si tu es saint, tu seras baptisé dans l’Esprit Saint; si tu es pécheur, tu seras plongé dans le feu. Le même baptême deviendra condamnation et feu pour les pécheurs indignes ; mais les saints, ceux qui se convertissent au Seigneur avec une foi entière, recevront la grâce du Saint-Esprit et le salut.

Donc, celui qui est dit baptiser dans l’Esprit Saint et dans le feu tient la pelle à vanner et va nettoyer son aire à battre le blé; il amassera le grain dans son grenier; quant à la paille, il la brûlera au feu qui ne s’éteint pas (Lc 3,17-18). Je voudrais découvrir pour quel motif notre Seigneur tient la pelle à vanner, et par quel souffle la paille légère est emportée ça et là, tandis que le blé, plus lourd, s’accumule en un seul lieu, car, si le vent ne souffle pas, on ne peut séparer le blé de la paille.

Je crois que le vent doit s’entendre des tentations qui, dans la masse mélangée des croyants, révèlent que les uns sont de la paille, les autres, du froment. Car, lorsque votre âme a été dominée par une tentation, ce n’est pas la tentation qui l’a changée en paille, mais c’est parce que vous étiez de la paille, c’est-à-dire des hommes légers et sans foi, que la tentation a dévoilé votre nature cachée. En revanche, quand vous affrontez courageusement les tentations, ce n’est pas la tentation qui vous rend fidèles et constants ; elle révèle seulement les vertus de constance et de courage qui étaient en vous, mais de façon cachée. Penses-tu, dit le Seigneur, que j’avais un autre but, en parlant ainsi, que de faire apparaître ta justice (Jb 40,3 LXX)? Et il dit ailleurs: Je t’ai affligé et je t’ai fait sentir la faim pour manifester ce que tu avais dans le cœur (Dt 8,3-5).

De la même manière, la tempête ne rend pas solide l’édifice bâti sur le sable (Mt, 7,24-25). Mais, si tu veux bâtir, que ce soit sur la pierre. Alors, quand la tempête se lèvera, elle ne renversera pas ce qui est fondé sur la pierre; mais pour ce qui vacille sur le sable, elle montre aussitôt que ses fondations ne valent rien. Aussi, avant que s’élève la tempête, que se déchaînent les rafales de vent, que débordent les torrents, tandis que tout demeure encore en silence, tournons toute notre attention sur le fondement de l’édifice, construisons notre demeure avec les pierres variées et solides des commandements de Dieu ; quand la persécution se déchaînera et qu’une cruelle tourmente s’élèvera contre les chrétiens, nous pourrons montrer que notre édifice est fondé sur la pierre, le Christ Jésus.

Mais si quelqu’un le renie — que ce malheur nous soit épargné! — qu’il le sache bien: ce n’est pas au moment où son reniement est devenu visible qu’il a renié le Christ; il portait en lui des semences et des racines de reniement déjà anciennes ; mais c’est plus tard qu’on a découvert ce qu’il portait et qui, alors, devenait public.

Aussi, prions le Seigneur pour que nous soyons un édifice solide, qu’aucune tempête ne peut renverser, parce que fondé sur la pierre, sur notre Seigneur Jésus Christ, à qui appartiennent la gloire et la puissance pour les siècles des siècles. Amen.

Prière

Tu le vois, Seigneur, ton peuple se prépare à célébrer la naissance de ton Fils ; dirige notre joie vers la joie d’un si grand mystère, pour que nous fêtions notre salut avec un cœur vraiment nouveau. Par Jésus Christ.

 

4e dimanche de l’avent C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 1,39-45

En ces jours-là, Marie se mit en route rapidement vers une ville de la montagne de Judée. Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Elisabeth.

Homélie

Accueillir dans la joie les deux avènements du Sauveur

Sermon du bienheureux Guerric d’Igny († 1157)

Sermons pour l’avent, 2, 1-4; SC 166, 104-116.

Voici le Roi qui vient, accourons au-devant de notre Sauveur (texte liturgique). Salomon a fort bien dit: Le messager d’une bonne nouvelle venant d’un pays lointain, c’est de l’eau fraîche pour l’âme assoiffée (Pr 25,25). Oui, c’est un bon messager celui qui annonce l’avènement du Sauveur, la réconciliation du monde, les biens du siècle à venir. Qu’ils sont beaux, les pas de ceux qui annoncent la paix, qui annoncent la bonne nouvelle (Is 52,7).

De tels messagers sont une eau rafraîchissante et une boisson de sagesse salutaire pour l’âme assoiffée de Dieu. En vérité, celui qui lui annonce l’arrivée du Seigneur ou ses autres mystères lui donne à boire les eaux puisées dans la joie aux sources du Sauveur (Is 12,3). Aussi, à celui qui lui porte cette annonce, que ce soit Isaï’e ou n’importe quel prophète, cette âme répond, semble-t-il, avec les paroles d’Elisabeth, parce qu’elle était abreuvée au même Esprit: Et comment m’est-il donné que mon Seigneur vienne à moi ? Car lorsque la voix de ton annonciation est venue à mes oreilles, mon esprit a bondi de joie (cf. Lc 1,43-44) en moi-même, dans l’enthousiasme d’aller à la rencontre de Dieu son Sauveur. <>

Que notre esprit exulte donc d’une vive allégresse, qu’il accoure au-devant de son Sauveur, qu’il adore et salue celui qui vient de si loin, en l’acclamant par ces paroles: "Viens donc Seigneur," sauve-moi et je serai sauvé (Jr 17,14). Car c’est toi que nous avons attendu. Sois notre salut au temps de la calamité (Is 33,2). C’est ainsi que les prophètes et les justes allaient, avec tant de désir et d’amour, à la rencontre du Christ qui devait venir, en désirant, si c’était possible, voir de leurs yeux ce que, par avance, ils voyaient en esprit. <>

Nous attendons le jour anniversaire de la Nativité du Christ, dont on nous annonce que nous le verrons bientôt. Et l’Écriture semble exiger de nous une joie telle que l’esprit, s’élevant au-dessus de lui-même, s’empresse d’accourir au-devant du Christ qui vient; il se porte en avant par le désir, il s’efforce, sans tolérer aucun retard, de voir déjà ce qui est encore à venir.

Personnellement, je pense en effet que ce n’est pas seulement à propos du second avènement, mais déjà à propos du premier que tant de textes de l’Écriture nous pressent d’accourir à sa rencontre. Comment cela? demandez-vous. Voici : de même que nous accourrons au-devant du second avènement par un élan et une exultation de notre corps, de même devrons-nous accourir à la rencontre du premier par l’amour et l’exultation de notre cœur. <>

Or, selon le mérite et le zèle de chacun, cet avènement du Seigneur est plus ou moins fréquent pendant le temps qui s’écoule entre le premier avènement et le dernier; il nous rend conformes au premier et nous prépare au dernier. Certes, il vient en nous maintenant pour que le premier ne l’ait pas fait venir en vain, et que lors du dernier avènement il ne vienne pas en étant irrité contre nous.

En cet avènement-ci, il s’efforce de réformer notre esprit plein d’orgueil en le rendant conforme à cet esprit d’humilité qu’il a montré dans sa première venue, afin de pouvoir transformer pareillement nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux (Ph 3,21), celui qu’il nous montrera quand il reviendra une seconde fois. <>

Donc puisque le premier avènement est celui de la grâce, le dernier, celui de la gloire, l’avènement présent est à la fois celui de la grâce et de la gloire ; c’est-à-dire qu’il nous permet, par les consolations de la grâce, de goûter déjà d’une certaine façon la gloire future. <> Qu’ils sont heureux ceux dont l’ardente charité a déjà mérité de recevoir ce privilège !

Pour nous, mes frères, qui n’avons pas encore la consolation d’une expérience aussi élevée, pour que nous demeurions patients jusqu’à l’avènement du Seigneur, ayons, en attendant, la consolation d’une foi solide et d’une conscience pure qui nous permettra de dire, avec autant de félicité que de fidélité, comme saint Paul: Je sais en qui j’ai mis ma foi, et je suis sûr qu’il est assez puissant pour garder mon dépôt jusqu’à ce jour-là, c’est-à-dire jusqu’à l’avènement de gloire de Jésus Christ, notre grand Dieu et Sauveur (2 Tm 1,12; Tt 2,13), à qui appartient la gloire pour les siècles des siècles. Amen.

Prière

Que ta grâce, Seigneur notre Père, se répande en nos cœurs ; par le message de l’ange, tu nous as fait connaître l’incarnation de ton Fils bien-aimé; conduis-nous par sa passion et par sa croix jusqu’à la gloire de sa résurrection. Par Jésus Christ.

Temps de Noël C

 

Nativité du Seigneur C

Évangile

Commencement de l’Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 1,1-25; lecture brève : 1, 18-25

Voici la table des origines de Jésus Christ, fils de David, fils d’Abraham: Abraham engendra Isaac, Isaac engendra Jacob, Jacob engendra Juda et ses frères.

ou bien

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 2,1-14

En ces jours-là, parut un édit de l’empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre.

Homélie

au choix Le signe de l’enfant

Sermon de saint Aelred de Rievaux († 1167)

Sermons pour Noël, 2; PL 195, 226-227.

Aujourd’hui nous est né le Sauveur du monde, qui est le Christ Seigneur, dans la ville de David (cf. Lc 2,1 1-12), qui est Bethléem. Nous devons donc y accourir comme firent les bergers lorsqu’ils eurent entendu cette nouvelle, et mettre en pratique les paroles que nous chantons traditionnellement à cette date : Ils chantèrent la gloire de Dieu, ils accoururent à Bethléem (cf. Lc 2,15.20).

Et ceci, dit l’ange, sera pour vous un signe: vous trouverez un enfant enveloppé de langes et déposé dans une mangeoire (cf. Lc 2,12-13). Or, voici ce que je vous dis: vous devez aimer. Vous craignez le Seigneur des anges, mais aimez le petit enfant; vous craignez le Seigneur de majesté, mais aimez ce petit emmaillotté; vous craignez celui qui règne dans le ciel, mais aimez celui qui est couché dans une mangeoire.

Quel signe les bergers ont-ils donc reçu? Vous trouverez un enfant enveloppé de langes et couché dans une mangeoire. C’est lui le Sauveur, c’est lui le Christ, c’est lui le Seigneur. Mais qu’y a-t-il de remarquable à être emmaillotté et couché dans une mangeoire? Est-ce que les autres enfants ne sont pas emmaillottés aussi ? En quoi consiste donc ce signe?

Il est remarquable, certes, mais pourvu que nous le comprenions. Nous comprenons non seulement si nous entendons la nouvelle, mais si nous avons aussi dans notre cœur la lumière qui apparut avec les anges. L’ange qui proclama le premier la bonne nouvelle apparut entouré de lumière pour nous apprendre que ceux-là seuls entendent vraiment, qui ont dans l’esprit la lumière spirituelle.

On pourrait dire bien des choses sur ce signe, mais comme l’heure passe je n’en dirai que peu et brièvement. Bethléem, "la maison du pain", c’est la sainte Eglise, où l’on distribue le corps du Christ, le vrai pain. La mangeoire de Bethléem, dans l’Eglise, c’est l’autel. C’est là que se nourrissent les familiers du Christ. Au sujet de cette table, il est écrit: Tu prépares la table pour moi (cf. Ps 22,5). Dans cette mangeoire se trouve Jésus emmaillotté. Cet enveloppement de langes, c’est l’aspect extérieur des sacrements. Dans cette mangeoire, sous l’apparence du pain et du vin, il y a le vrai corps et le vrai sang du Christ. Là, nous voyons qu’il y a le Christ en personne, mais enveloppé de langes, c’est-à-dire présent de façon invisible sous les sacrements. Nous n’avons pas de signe aussi grand et aussi évident de la naissance du Christ que le fait de consommer quotidiennement son corps et son sang au saint autel, et le fait que lui, qui est né pour nous d’une vierge une seule fois, nous le voyons chaque jour s’immoler pour nous.

Donc, mes frères, hâtons-nous vers la crèche du Seigneur, mais, autant que nous le pouvons, préparons-nous à cette approche par sa grâce, en tant qu’associés aux anges, avec un cœur pur, une bonne conscience et une foi sincère (cf. 2 Co 6,6), nous chanterons au Seigneur par toute notre vie et notre comportement: Gloire à Dieu dans les hauteurs, et sur la terre paix aux hommes, objet de sa bienveillance (cf. Lc 2,14). Par notre Seigneur Jésus Christ, à qui appartiennent l’honneur et la gloire pour les siècles des siècles. Amen.

ou bien

Ta Parole toute-puissante est venue

Sermon de Julien de Vézelay († 1160)

Sermons sur Noël, 1 ; SC 192, 45.52.60.

Un silence paisible enveloppait toute chose, et la nuit était au milieu de son cours rapide, alors, ta Parole toute-puissante, Seigneur, est venue de ton trône royal (cf. Sg 18,14-15). Ce texte de l’Écriture désigne le temps très saint où la toute-puissante Parole de Dieu est venue jusqu’à nous pour nous parler de notre salut; partant du secret le plus intime du Père, elle descendait dans le sein d’une mère. Dieu qui avait parlé à nos pères par les prophètes sous des formes fragmentaires et variées dans les derniers temps, dans les jours où nous sommes, nous a parlé par ce Fils (He 1,1-2) dont il dit: Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui j’ai mis tout mon amour; écoutez-le (Mt 3,17.17,5). La Parole de Dieu vient donc à nous de son trône royal : elle s’abaisse pour nous élever; elle s’appauvrit pour nous enrichir; elle se fait homme pour nous diviniser.

Mais, pour que le peuple qui doit être racheté mette toute sa confiance et son espérance dans l’avènement et l’efficacité de cette parole, elle est appelée Parole toute-puissante. Car, si elle n’était pas la Parole toute-puissante, l’homme, damné et voué à toutes les misères, n’espérerait que de façon bien tiède et bien timide, qu’elle le délivrerait du péché. Donc, pour que l’homme perdu ait la certitude de son salut, la Parole qui le sauve est appelée "toute-puissante".

Et voyez quelle toute-puissance: le ciel n’existait pas encore ni ce qui est contenu dans son enceinte (Est 16,10); il parla, et ce qu’il dit exista (Ps 32,9). Ce fut fait de rien (2 M 7,28), car la toute-puissance de cette Parole créait, tout ensemble et instantanément, la matière avec la forme. Cette Parole a dit: Que le monde soit, et le monde a été fait. Elle a dit: Que l’homme soit, et l’homme a été fait.

Mais, ce qu’elle avait créé, la Parole ne l’a pas recréé aussi facilement. Elle a créé par son commandement, mais elle a recréé par sa mort; elle a créé en commandant, mais elle a recréé en souffrant. Vous m’avez donné bien de la peine (cf. Ml 2,17) avec vos péchés, dit-elle. La machine du monde ne m’a donné aucune peine pour l’organiser et la gouverner, car je déploie ma vigueur d’un bout du monde à l’autre et je gouverne l’univers avec douceur (Sg 8,1).

Seul l’homme, violateur obstiné de la loi fixée et promulguée par moi, m’a donné de la peine, avec ses péchés. C’est pourquoi, venant du trône céleste, je n’ai pas refusé de me renfermer dans le sein d’une vierge et de m’unir en une seule personne avec l’humanité déchue. Dès ma naissance on m’enveloppe de langes, on me couche dans une mangeoire parce qu’il n’y a pas de place à l’auberge pour le Créateur du monde. <>

Toutes choses étaient plongées au milieu du silence, c’est-à-dire entre les Prophètes qui ne parlaient plus, et les Apôtres qui parleront plus tard. Ce silence formait donc un "milieu" et une séparation entre la parole de ceux-ci et la parole de ceux-là. Donc, tandis que toutes choses étaient plongées au milieu du silence, la Parole toute-puissante, c’est-à-dire le Verbe du Père, est venue de son trône royal (Sg 18,14-15). Et il est beau que ce soit au milieu du silence que vienne le Médiateur entre Dieu et les hommes (1 Tm 2,5), homme vers les hommes, mortel pour sauver les mortels, lui qui, par sa mort, sauvera les morts. <>

Qu’elle vienne encore maintenant, je l’en prie, la parole du Seigneur, vers ceux qui font silence. Écoutons ce que le Seigneur nous dit au fond de nous-mêmes. Qu’ils se taisent, les mouvements et les cris malencontreux de notre chair; qu’elles fassent silence, les images désordonnées de notre spectacle intérieur, pour que nos oreilles attentives écoutent librement ce que dit l’Esprit, écoutent la voix qui est au-dessus du firmament. En effet, l’Esprit de vie parle toujours à notre âme, et une voix se fait entendre du firmament qui domine nos têtes (cf. Ez 1,26), c’est-à-dire notre esprit. Mais nous, en portant notre attention ailleurs, nous n’entendons pas l’Esprit qui nous parle.

Prière

Père, toi qui as merveilleusement créé l’homme et plus merveilleusement encore rétabli sa dignité, fais-nous participer à la divinité de ton Fils, puisqu’il a voulu prendre notre humanité. Lui qui règne.

 

La Sainte Famille C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 2,41-52

Chaque année les parents de Jésus allaient à Jérusalem pour la fête de la Pâque. Quand il eut douze ans, ils firent le pèlerinage selon la coutume.

Homélie

au choix

Chercher Jésus

Homélie d’Origène († 253)

Homélies sur saint Luc, 18, 2-5 ; GCS 9, 112-113 ; SC 87, 266-271

Comme il avait douze ans, il demeure à Jérusalem. Ne sachant où il est, ses parents le cherchent avec inquiétude et ne le trouvent pas. Ils le cherchent parmi leurs parents, ils le cherchent parmi leurs compagnons de route, ils le cherchent parmi leurs connaissances (Lc 2,44), et ils ne le trouvent pas. Jésus est donc recherché par ses parents, par son père nourricier qui l’avait accompagné dans sa descente en Egypte, et pourtant ils ne le trouvent pas aussitôt qu’ils le cherchent. Car on ne trouve pas Jésus parmi les parents et parmi les proches selon la chair, parmi ceux qui lui sont unis par le corps. Mon Jésus ne peut être trouvé dans la foule.

Apprenez-donc où l’ont découvert ceux qui le cherchaient, afin que vous aussi, en le cherchant avec Marie et Joseph, vous puissiez le découvrir. A force de le chercher, dit l’évangéliste, ils le trouvèrent dans le Temple (Lc 2,46). Non pas n’importe où, mais dans le Temple, et là, en outre, au milieu des docteurs de la Loi qu’il écoutait et interrogeait (Lc 2,46-47). Vous aussi, cherchez Jésus dans le Temple de Dieu, cherchez-le dans l’Église, cherchez-le auprès des maîtres qui sont dans le Temple et n’en sortent jamais. Si vous cherchez ainsi, vous le trouverez. Mais si quelqu’un se dit un maître, et ne possède pas Jésus, il n’est maître que de nom, et on ne peut trouver auprès de lui Jésus, qui est le Verbe et la Sagesse de Dieu. <>

Ils le trouvent assis au milieu des docteurs, et non seulement assis, mais les interrogeant et les écoutant. Maintenant encore Jésus est ici : il nous interroge et il nous écoute parler. Et tous étaient dans l’admiration (Lc 2,48). A propos de quoi? Non de ses interrogations, bien qu’elles fussent admirables, mais de ses réponses (Lc 2,47).

Dans la sainte Écriture, "répondre" ne désigne pas un simple dialogue, mais un enseignement. Que la loi divine te l’apprenne: Moïse parlait, et Dieu lui répondait par sa voix (cf. Ex 19,19). Tantôt Jésus interroge, tantôt il répond et, nous l’avons dit, bien que son interrogation soit admirable, sa réponse l’est bien davantage. Pour que nous puissions l’entendre, nous aussi, et qu’il nous propose des questions qu’il résoudra lui-même, supplions-le et cherchons-le avec beaucoup d’efforts et de douleur, et alors nous pourrons trouver celui que nous cherchons. Ce n’est pas pour rien qu’il est écrit: Moi et ton père, nous te cherchions tout affligés (cf. Lc 2,49). Celui qui cherche Jésus ne doit pas chercher avec négligence, mollement, par intermittence, ainsi que certains le cherchent et qui, à cause de cela, ne peuvent le trouver. Quant à nous, disons: Nous te cherchons tout affligés.

Et quand nous lui aurons parlé ainsi, il répondra à notre âme qui se fatigue à le chercher dans la douleur: Ne le saviez-vous pas ? C’est chez mon Père que je dois être (Lc 2,49-50).

ou bien

Grandir en humilité

Homélie de saint Bède le Vénérable († 735)

Homélies, 1, 19, CCL 122, 134-135 137-139.

La lecture du saint Évangile qu’on vient de proclamer, frères très chers, est limpide et n’a pas besoin que nous y ajoutions un commentaire. Elle englobe le bas âge et l’enfance de notre Rédempteur, par lequel il a daigné se faire participant de notre humanité; et elle rappelle l’éternité de la Majesté divine, par laquelle il est demeuré et demeure toujours égal au Père. C’est afin que nous-mêmes, rappelant à notre souvenir l’abaissement de l’Incarnation, nous nous efforcions de lutter contre toutes les blessures du péché en les guérissant par une sincère humilité. Nous qui sommes poussière et cendre, nous devrions toujours nous rappeler affectueusement combien, pour reconnaître l’amour divin aussi bien que pour assurer notre salut, nous devons nous humilier, puisque cette puissance souveraine n’a pas dédaigné de s’abaisser pour nous, au point de rejoindre les derniers degrés de notre faiblesse. <>

Que Jésus lui-même, à douze ans, soit assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant, c’est un témoignage de son humilité d’homme, et en outre un exemple éclatant qui nous enseigne à pratiquer cette vertu.

Ce que dit le Seigneur assis dans le Temple : C’est chez mon Père que je dois être (Lc 2,50), met en lumière que sa puissance et sa gloire sont coéternelles à celles du Père. Mais que, revenant à Nazareth, il était soumis (Lc 2,51) à ses parents, c’est à la fois un indice de vérité et un exemple d’humilité. Car il était soumis aux hommes selon cette nature qui le rend "inférieur au Père" (cf. Jn 14,28).

Et sa mère, dit l’Évangile, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur (Lc 2,19.51). Toutes les paroles dites au sujet du Seigneur, toutes les actions accomplies par lui, la Vierge Mère les gardait attentivement dans son cœur et les confiait soigneusement à sa mémoire. <>

Frères très chers, si nous désirons, dans la béatitude du siècle futur, habiter la maison du Seigneur pour le louer éternellement, il faut sans nul doute, dès ce siècle, montrer activement par avance ce que nous cherchons pour ce siècle futur. Il faut visiter les églises, non seulement en y chantant les louanges du Seigneur, mais encore en montrant, aussi bien par nos actes que par nos paroles, ce qui contribue à la louange et à la gloire de notre Créateur sur toute l’étendue de son empire (Ps 102,22).

Après avoir dit que Jésus grandissait en sagesse, en taille et en grâce, on a bien fait d’ajouter: sous le regard de Dieu et des hommes (Lc 2,52), parce que, en révélant aux hommes, avec les progrès en taille et en âge, les dons de sagesse et de grâce qui étaient en lui, il n’avait pas d’autre souci que de les exciter sans cesse à louer Dieu le Père. Ainsi accomplissait-il lui-même ce qu’il avait prescrit aux autres de faire: Que votre lumière brille devant les hommes : alors, en voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux deux (Mt 5,16).

Prière

Tu as voulu, Seigneur, que la Sainte Famille nous soit donnée en exemple ; accorde-nous de pratiquer, comme elle, les vertus familiales et d’être unis par les liens de ton amour, avant de nous retrouver pour l’éternité dans la joie de ta maison. Par Jésus Christ.

 

1er janvier - Sainte Marie, Mère de Dieu C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 2,16-21

Quand les bergers arrivèrent à Bethléem, ils découvrirent Marie et Joseph, avec le nouveau-né couché dans une mangeoire.

Vierge et Mère de Dieu

Homélie

Homélie attribuée à saint Jean Chrysostome († 407)

Homélie éditée par E. Bickersteth, dans Orientalia Christiana Periodica 32, 1966.

Recourons tous à la Vierge sainte, Mère de Dieu, pour recevoir ses bienfaits. Autant qu’il y a de vierges parmi vous, consacrez-vous à la Mère du Seigneur. Car elle est votre protectrice pour vous procurer ce privilège magnifique et incorruptible.

Réellement, cette Vierge est une grande merveille ! Car pourra-t-on jamais trouver un être plus grand que tout ce qui existe? Or, elle seule est apparue plus vaste que la terre et le ciel. Car qui donc est plus saint qu’elle? Ni nos ancêtres, ni les prophètes, ni les Apôtres, ni les martyrs, ni les patriarches, ni les pères, ni les anges, ni les Trônes, les Dominations, ni les Séraphins et les Chérubins, on ne peut trouver aucun être, visible ou invisible, dans toute la création, qui la dépasse. Elle est la servante et la Théotokos, la Vierge et la Mère. Et personne ne doit en douter en demandant : Comment peut-elle être la servante et la Théotokos ? Ou comment peut-elle être la Vierge et la Mère?

Accepte avec foi, ô homme, et ne mets pas en doute des doctrines qui ont été examinées et approuvées par les Pères. Demeure dans la crainte et crois sans discussion, sans trop de curiosité. Si tu mesures ta foi à tes pensées, vois quel danger tu cours ! Mais si tu crois la parole qui a été proclamée, ce n’est plus à toi de te défendre, mais au chef de la communauté.

Crois donc ce qui nous a été dit de la Vierge, et n’hésite pas à confesser qu’elle est en même temps servante et Théotokos, Vierge et Mère. En effet, elle est servante comme la créature de celui qui est né d’elle ; elle est Théotokos en tant que par elle Dieu a été enfanté dans une chair d’homme. Elle est Vierge parce qu’elle n’a pas conçu à partir d’une semence humaine. Elle est mère parce qu’elle a donné la vie à celui qui, de toute éternité, était engendré par le Père.

Elle est donc la mère du Seigneur des anges et des hommes. C’est en elle que le Fils de Dieu s’est incarné afin de pouvoir être crucifié. Et voulez-vous savoir comment la Vierge surpasse les puissances du ciel? Écoutez : celles-ci volent dans la crainte et le tremblement en voilant leurs regards, tandis que la Vierge offre à Dieu la race des hommes et que nous recevons par elle celui qui remet les péchés. C’est elle qui le portait quand les anges le glorifiaient en chantant à sa naissance : Gloire à Dieu au plus haut des deux, paix sur la terre, bienveillance aux hommes (cf. Lc 2,14) !

Réjouissez-vous donc, la mère de l’enfant et le ciel, la jeune fille et la nuée, la Vierge et la Mère, orgueil et fondement de notre Église. Priez pour nous sans relâche, afin que nous puissions atteindre le bonheur préparé pour ceux qui aiment Dieu, par la grâce et l’amour de notre Seigneur Jésus Christ envers les hommes. A lui, en même temps qu’au Père et à l’Esprit Saint, gloire, puissance, honneur, maintenant et toujours et pour les siècles des siècles. Amen.

Prière

Dieu tout-puissant, par la maternité virginale de la bienheureuse Vierge Marie, tu as offert au genre humain les trésors du salut éternel; accorde-nous de sentir qu’intervient en notre faveur celle qui nous permit d’accueillir l’auteur de la vie, Jésus Christ ton Fils, notre Seigneur. Lui qui règne.

 

2e dimanche après Noël C

Évangile

Commencement de l’Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 1,1-18

Au commencement était le Verbe, la Parole de Dieu, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu.

Homélie

Allons voir la Parole de Dieu

Sermon du bienheureux Guerric d’Igny († 1157)

Sermons pour Noël, 5, 1-2; SC 166, 223-226

Vous vous êtes réunis, mes frères, pour entendre la parole de Dieu. Mais Dieu nous a préparé quelque chose de meilleur: il nous est donné aujourd’hui non seulement d’entendre, mais aussi de voir le Verbe de Dieu, pourvu seulement que nous allions jusqu’à Bethléem pour voir cette parole que Dieu a réalisée et qu’il nous a montrée (cf. Lc 2,15).

Dieu savait bien que les sens de l’homme sont incapables de saisir l’invisible, rebelles aux enseignements célestes et réfractaires à la foi, à moins que la réalité même exposée par la foi ne soit elle-même présentée visiblement à nos sens pour les convaincre. Car s’il est vrai que la foi naît de ce qu’on entend (Rm 10,17), elle naît bien plus facilement et plus vite de ce qu’on voit, comme nous l’apprend l’exemple de celui qui s’entend dire: Parce que tu m’as vu, tu crois (Jn 20,29), toi qui étais incrédule à l’égard de ce que tu avais entendu. <>

Cependant Dieu, voulant condescendre à notre lourdeur, a aujourd’hui rendu visible pour nous son Verbe, qu’il avait d’abord rendu audible. Il l’a même rendu palpable, au point que certains d’entre nous ont pu dire: Ce qui était depuis le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons contemplé de nos yeux, ce que nous avons vu et que nos mains ont touché, c’est le Verbe, la Parole de vie (1 Jn 1,1).

Ce fut depuis le commencement de cette éternité qui n’a pas de commencement. Nous l’avons entendu quand il fut promis au commencement du temps, nous l’avons vu et touché quand il s’est montré à la fin des temps. <>

Cette parole qui vient de Dieu, j’ai parfois remarqué, mes frères, qu’on l’écoute avec ennui. Pourtant, la Parole qui vient de Dieu, peut-on la voir sans éprouver de la joie? Je serai le premier à me condamner, parce que le Verbe qui est Dieu, lorsqu’il se présente à moi aujourd’hui tel que je suis, s’il ne me réjouit pas, je suis un impie; s’il ne m’édifie pas, je suis un réprouvé.

S’il se trouve donc parmi nous un frère qui souffre de langueur spirituelle, je ne veux pas que ses oreilles se fatiguent plus longtemps à écouter ma parole méprisable. Qu’il se rende jusqu’à Bethléem, et que là il contemple celui que les anges désirent contempler (cf. 1 P 1,12), qu’il contemple le Verbe que le Seigneur nous a montré (cf. Lc 2,15). Qu’il se représente en esprit en quel état la Parole de Dieu, vivante et énergique (He 4,12), est couchée là, dans une mangeoire. <>

Parole sûre et qui mérite d’être accueillie sans réserve (1 Tm 1,15): ta Parole toute-puissante, Seigneur, qui dans une telle profondeur de silence, venant de ton trône royal bondit (Sg 18,14-15) jusque dans les crèches des animaux, elle nous parle mieux, pour l’instant, par son silence. Celui qui a des oreilles, qu’il entende (Mt 11,15) ce que nous dit ce saint et mystérieux silence du Verbe éternel; parce que, si mon oreille ne me trompe, entre autres choses qu’il dit, il parle de paix au peuple des saints et des fidèles (Ps 84,9), à qui le respect et l’exemple qu’il donne ont imposé un silence religieux.

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, lumière pour les hommes qui croient, daigne remplir de ta gloire le monde entier en te faisant connaître à tous les peuples. Par Jésus Christ.

Epiphanie du Seigneur C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 2, 1-12

Jésus était né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode le Grand. Or, voici que des mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent: "Où est le roi des Juifs qui vient de naître?"

Homélie

L’or, l’encens et la myrrhe

Homélie de saint Bruno de Segni († 1123)

Sermons sur l’Epiphanie, 1 ; PL 165, 863-864.

Frères très chers, le dernier verset de la lecture de l’Evangile qui vient de retentir à nos oreilles vise à édifier les fidèles; les mages, guidés par l’étoile, venant d’Orient jusqu’à Bethléem, entrèrent dans la maison où la bienheureuse Vierge Marie demeurait avec l’enfant; ouvrant leurs trésors, ils offrirent trois dons au Seigneur: l’or, l’encens et la myrrhe, par lesquels ils le confessèrent vrai Dieu, vrai homme et vrai roi.

Ce sont bien les dons que la sainte Église ne cesse d’offrir à Dieu son Sauveur. Elle offre l’encens lorsqu’elle le confesse et croit en lui comme étant le véritable Seigneur, créateur de l’univers; elle offre la myrrhe lorsqu’elle affirme qu’il a pris la substance de notre chair, dans laquelle il a voulu souffrir et mourir pour notre salut; elle offre l’or quand elle n’hésite pas à proclamer qu’il règne éternellement avec le Père et l’Esprit Saint. <>

Cette offrande peut recevoir un autre sens mystique. L’or signifie la sagesse céleste selon Salomon : Le trésor le plus désirable se trouve dans la bouche du sage (Pr 21,20). Et ailleurs: Les lèvres du juste redisent la sagesse (Ps 36,30). L’encens y symbolise la prière pure, selon le Psalmiste : Que ma prière, Seigneur, s’élève devant toi comme un encens (Ps 140,2). Car, si notre prière est pure, elle exhale vers Dieu un parfum plus pur que la fumée de l’encens ; et de même que cette fumée monte vers le ciel, ainsi notre prière se dirige vers le Seigneur. La myrrhe symbolise la mortification de notre chair.

Donc nous offrons l’or au Seigneur lorsque nous resplendissons devant lui par la lumière de la sagesse céleste. <> Nous lui offrons de l’encens lorsque nous élevons vers lui une prière pure. Et de la myrrhe lorsque, par l’abstinence, mortifiant notre chair avec ses vices et ses convoitises (Ga 5,24), nous portons la croix à la suite de Jésus.

Prière

Aujourd’hui, Seigneur, tu as révélé ton Fils unique aux nations, grâce à l’étoile qui les guidait; daigne nous accorder, à nous qui te connaissons déjà par la foi, d’être conduits jusqu’à la claire vision de ta splendeur. Par Jésus Christ.

 

Baptême du Seigneur C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 3,15-16.21-22

Le peuple venu auprès de Jean Baptiste était en attente, et tous se demandaient en eux-mêmes si Jean n’était pas le Messie.

Homélie

au choix

Les deux, s’ouvrirent

Homélie attribuée à saint Hippolyte († 236)

Sermon sur la sainte Théophanie 6-9; PG 10, 858-859.

Dès que Jésus fut baptisé, il sortit de l’eau ; voici que les deux s’ouvrirent, et il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et des deux, une voix disait: "Celui-ci est mon Fils bien-aimé; en lui j’ai mis tout mon amour" (Mt 3,16-17).

Voyez, mes bien-aimés, combien nous aurions subi la perte de biens nombreux et importants, si le Seigneur avait cédé à l’invitation de Jean et n’avait pas reçu le baptême. Auparavant les cieux étaient fermés, notre patrie d’en haut était inaccessible. Après être descendus au plus bas, nous ne pouvions plus regagner les hauteurs. Le Seigneur n’a pas été seul à recevoir le baptême. Il a renouvelé le vieil homme et il lui a confié de nouveau le sceptre de l’adoption divine. Car aussitôt les cieux s’ouvrirent. Les réalités visibles se sont réconciliées avec les invisibles ; les hiérarchies célestes ont été comblées de joie ; sur la terre les maladies ont été guéries ; ce qui était demeuré caché s’est révélé; ce que l’on rangeait parmi les ennemis est devenu amical. Car vous avez entendu l’évangéliste vous dire: les deux eux-mêmes s’ouvrirent, pour les trois merveilles que voici. Il fallait ouvrir au Christ, l’Époux, les portes de la chambre nuptiale. Semblablement, comme l’Esprit descendait sous la forme d’une colombe et que la voix du Père retentissait en tout lieu, il fallait que s’élèvent les portes du ciel (cf. ps 23,7). Et voici que les deux s’ouvrirent et qu’une voix se fit entendre, qui disait: "Celui-ci est mon Fils bien-aimé; en lui j’ai mis tout mon amour. "

Ce Fils bien-aimé, qui apparaît ici-bas, ne s’est pourtant pas séparé du sein du Père: il est apparu sans apparaître. Ce qui apparaissait était différent, car, à ce qu’il semblait, le baptiseur était supérieur au baptisé. C’est pourquoi le Père envoya l’Esprit Saint sur le baptisé. Car, de même que, dans l’arche de Noé, la colombe a manifesté l’amour de Dieu pour les hommes, ainsi maintenant, l’Esprit, descendant sous cette apparence, pareil à celle qui apportait une pousse d’olivier, s’est arrêté au-dessus de celui à qui il rend témoignage. Pourquoi? Pour que l’on constate avec certitude que c’est bien la voix du Père, et que l’on ajoute foi à la prédiction prophétique annoncée longtemps auparavant. Quelle prédiction? La voix du Seigneur domine les eaux, le Dieu de la gloire déchaîne le tonnerre, le Seigneur domine la masse des eaux (Ps 28,3). Que dit cette voix? Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en lui j’ai mis tout mon amour.

Je vous en prie, écoutez-moi attentivement: je veux remonter à la source de la vie et contempler la source d’où jaillissent les guérisons. Le Père de l’immortalité a envoyé dans le monde son Fils vivant, son Verbe. Celui-ci est venu vers l’homme pour le laver dans l’eau et dans l’Esprit. Il l’a fait renaître pour rendre incorruptibles son âme et son corps, il a éveillé en nous son souffle de vie, il nous a revêtus d’une armure incorruptible.

Je proclame donc, avec la voix du héraut: Venez, toutes les tribus des nations, au bain de l’immortalité! Par ce joyeux message, je vous annonce la vie, à vous qui demeurez encore dans la nuit de l’ignorance. Venez de la servitude à la liberté, de la tyrannie à la royauté, de la corruption à l’incorruptibilité. Vous voulez savoir comment? Par l’eau et par l’Esprit Saint, cette eau par laquelle l’homme régénéré est vivifié, cet Esprit, ton Défenseur, envoyé pour toi, afin de montrer que tu es Fils de Dieu.

ou bien

Jésus baptisé pour nous

Homélie de Grégoire Palamas († 1359)

Homélies, 16; PG 151, 198-199.

Lorsque Dieu voulut manifester et exposer clairement son dessein, qui dépasse toute expression, il envoya du désert Jean, appelé le Précurseur. Celui-ci baptise ceux qui se présentent et les exhorte à croire en celui qui doit venir. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint (Mt 3,11), dit-il. Il leur enseigne que celui-là est supérieur à lui-même autant que l’Esprit Saint est supérieur à l’eau. Il témoigne, en effet, que celui qui vient est le Maître, le Créateur de l’univers, qui a autorité sur les anges et sur les hommes. Tous les hommes constituent sa moisson spirituelle et il tient la pelle à vanner dans sa main (Mt 3,12), c’est-à-dire évidemment les puissances temporelles.

Sur lui-même, Jean atteste qu’il est seulement le Précurseur de celui qui vient ; il désigne également Isaïe comme étant le héraut du Seigneur. Quant à lui, il se proclame le serviteur envoyé pour annoncer à l’avance l’avènement de son maître, et pour préparer les fidèles à l’accueillir, car il dit: Je suis la voix qui crie à travers le désert: Aplanissez le chemin du Seigneur (Jn 1,23).

Jésus vient au baptême pour obéir à celui qui envoya Jean, comme lui-même l’a dit: C’est de cette façon que nous devons accomplir parfaitement tout ce qui est juste (Mt 3,15). Car son baptême devait le manifester à Israël. Puisqu’il venait pour ouvrir le chemin du salut et assurer aux baptisés qui le suivraient ce que lui-même a montré et révélé : que l’Esprit Saint leur est donné et que, par lui-même, il instituerait le baptême comme un remède pour purifier les souillures provenant de notre origine et de notre vie esclave des sens.

Lui-même, en tant qu’homme, n’avait pas besoin de purification, étant né d’une Vierge sans tache, et toute sa vie étant exempte de péché. Mais, parce que c’est pour nous qu’il est né, c’est aussi pour nous qu’il est purifié. Donc il est baptisé par Jean et, comme il sort de l’eau, les cieux s’ouvrent pour lui, et voici qu’on entend, venant d’en haut, la voix du Père : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en lui j’ai mis tout mon amour (Mt 3,17). Et, pareil à une colombe, l’Esprit de Dieu descend sur lui pour montrer quel est celui qui reçoit ce témoignage du ciel.

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, quand le Christ fut baptisé dans le Jourdain, et que l’Esprit Saint reposa sur lui, tu l’as désigné comme ton Fils bien-aimé; accorde à tes fils adoptifs, nés de l’eau et de l’Esprit, de se garder toujours dans ta sainte volonté. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu éternel, c’est dans la réalité de notre chair que ton Fils unique est apparu ; puisque nous reconnaissons que son humanité fut semblable à la nôtre, donne-nous d’être transformés par lui au plus intime de notre cœur. Lui qui règne.

Temps du carême C

 

1er dimanche de carême C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 4,1-13

Après son baptême, Jésus, rempli de l’Esprit Saint, quitta les bords du Jourdain; il fut conduit par l’Esprit à travers le désert où, pendant quarante jours, il fut mis à l’épreuve par le démon.

Homélie

au choix

Le rôle des tentations

Homélie de saint Jean Chrysostome († 407)

Homélies sur Matthieu, 13, 1 ; PG 57, 207-209.

Alors Jésus fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le démon (Mt 4,1). Que signifie cet "alors"? Après la descente de L’Esprit Saint, après la voix venue d’en-haut et qui disait : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en lui j’ai mis tout mon amour (Mt 3,17). Le plus surprenant est cette affirmation de l’évangéliste: c’est le Saint-Esprit qui le conduisit en ce lieu ! En effet, tout ce que Jésus a fait et enduré était destiné à nous instruire. Il a donc voulu être conduit en ce lieu pour lutter avec le démon, afin que nul parmi les baptisés ne soit troublé s’il subit après son baptême de plus grandes tentations, comme si c’était extraordinaire; mais il doit supporter tout cela comme étant dans l’ordre des choses. C’est pour cela que vous avez reçu des armes : non pour rester oisifs, mais pour combattre.

Voici pour quels motifs Dieu n’empêche pas les tentations qui vous surviennent. D’abord pour vous apprendre que vous êtes devenus beaucoup plus forts; puis, afin que vous gardiez la mesure, au lieu de vous enorgueillir des grands dons que vous avez reçus, car les tentations ont le pouvoir de vous humilier. En outre, vous serez tentés afin que ce génie du mal, se demandant encore si vous avez vraiment renoncé à lui, soit convaincu, par l’expérience des tentations, que vous l’avez totalement abandonné. Quatrièmement, vous êtes tentés pour être entraînés à être plus forts et plus solides que l’acier. Cinquièmement, afin que vous ayez la certitude absolue que des trésors vous ont été confiés. Car le démon ne vous aurait pas assaillis, s’il n’avait pas vu que vous receviez un plus grand honneur. <>

Et remarquez en quel lieu l’Esprit Saint a conduit Jésus : non pas en ville, ni sur la place publique, mais au désert. Car, puisqu’il voulait attirer le démon, il a donné prise à celui-ci non seulement en ayant faim, mais aussi en venant en ce lieu. Le démon s’attaque surtout à ceux qu’il voit seuls et à l’écart. <> Lorsqu’il voit des gens rassemblés, il n’a plus la même audace, il perd confiance. Aussi faut-il surtout que nous soyons toujours ensemble, pour ne pas offrir une proie facile au démon. Celui-ci trouve donc Jésus dans le désert, et un désert inaccessible.

Voyez avec quelle ruse et quelle perversité le démon s’approche, et comme il saisit le bon moment! Il n’aborde pas celui qui jeûne, mais celui qui a faim. Apprenez ainsi comme le jeûne est un grand bien, et l’arme la plus puissante contre le démon; sachez qu’après le baptême il ne faut pas se livrer au luxe, à l’ivrognerie, aux repas plantureux, mais s’adonner au jeûne. C’est pour cela que Jésus lui-même a jeûné, non pas qu’il en eût besoin, mais afin de nous instruire.

ou bien

Le Christ triomphe du Tentateur

Homélie d’Origène († 253)

Homélies sur le Cantique, 3, 13; GCS 8, 221,19 223,5.

La vie des mortels est pleine de pièges dangereux, pleine de lacets trompeurs, tendus contre le genre humain par celui qui est appelé le chasseur géant : Nemrod, dressé contre le Seigneur. Qui est ce géant, sinon le démon, qui se révolte contre Dieu même?

Et parce que l’ennemi avait tendu partout ses lacets, et qu’il y avait capturé presque toute l’humanité, il fallait que se dressât quelqu’un de plus fort et de plus digne, qui les déchirerait afin de frayer le chemin à ceux qui marcheraient à sa suite. C’est pourquoi le Sauveur lui-même, avant qu’il se fût uni en mariage avec l’Église, est tenté par le démon, si bien que, triomphant des pièges de la tentation, il découvre son épouse à travers eux, et il l’appelle à lui pour lui enseigner et lui montrer à l’évidence que ce n’est pas à travers l’oisiveté et les plaisirs, mais à travers beaucoup de détresses et de tentations qu’il lui faudra rejoindre le Christ.

Car personne d’autre ne s’est montré capable de vaincre tous ces pièges. En effet, il est écrit: Tous les hommes sont pécheurs (Rm 3,23). Et aussi: Car aucun homme n’est assez juste sur terre pour faire le bien sans pécher (Qo 7,20). Et encore: Nul n’est exempt de souillure, n’aurait-il vécu qu’un seul jour (cf. ps 50,7; Jb 15,14). Donc, notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ est le seul qui n’a pas fait de péché; mais le Père l’a pour nous identifié au péché (2 Co 5,21) afin que, dans cette ressemblance de la chair du péché, il condamnât le péché au moyen du péché. Le Sauveur est donc entré dans ces filets, mais il est le seul qui n’ait pu y être capturé. Au contraire, en les ayant rompus et déchirés, il donne à l’Église l’assurance d’oser rompre les filets, de traverser les pièges et de dire avec allégresse : Comme un oiseau, nous avons échappé au filet du chasseur; le filet s’est rompu: nous avons échappé (Ps 123,7).

Mais qui a rompu les filets, sinon celui-là seul qu’ils n’ont pu retenir? Pourtant il s’est livré à la mort volontairement, et non pas, comme nous, sous la contrainte du péché. Et parce qu’il fut libre entre les morts (cf. ps 77,6), après avoir vaincu celui qui détenait l’empire de la mort, il a supprimé la captivité qui contraignait à la mort. Et non seulement il s’est ressuscité lui-même d’entre les morts, mais en même temps il a éveillé ceux qui étaient captifs de la mort et il les a fait asseoir aussitôt dans les cieux. En effet, montant dans les hauteurs, il a emmené captive la captivité (cf. Ep 4,8), non seulement en entraînant les âmes, mais aussi en ressuscitant leurs corps. L’Évangile atteste en effet que les corps de nombreux saints qui étaient morts ressuscitèrent et entrèrent dans la ville sainte (Mt 27,52-53) du Dieu vivant, Jérusalem.

Prière

Accorde-nous, Dieu tout-puissant, tout au long de ce carême, de progresser dans la connaissance de Jésus Christ et de nous ouvrir à sa lumière par une vie de plus en plus fidèle. Lui qui règne.

 

2e dimanche de carême C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 9,28b-36

Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il alla sur la montagne pour prier. Pendant qu’il priait, son visage apparut tout autre, ses vêtements devinrent d’une blancheur éclatante.

Homélie

Le Christ annoncé par la Loi et les Prophètes

Homélie de saint Cyrille d’Alexandrie († 444)

Homélie sur la Transfiguration, 9, PG 77, 1011-1014.

Jésus gravit la montagne avec les trois disciples qu’il a choisis. Puis, il est transfiguré par une lumière éclatante et divine, au point que son vêtement semblait briller comme la lumière. Ensuite, Moïse et Élie, encadrant Jésus, parlaient entre eux de son départ qui devait s’accomplir à Jérusalem, c’est-à-dire du mystère de son Incarnation et de sa passion salvatrice, qui devait se réaliser sur la croix. Car il est vrai que la loi de Moïse et la prédication des prophètes avaient montré à l’avance le mystère du Christ. Sans doute la Loi décrivait cela comme sur un tableau, mais par des reflets et des esquisses; quant aux prophètes, ils le prédisaient sous des formes fragmentaires et variées (He 1,1), annonçant que nous verrions à découvert, le moment venu: qu’il ne refuserait pas de souffrir la mort sur le gibet, pour le salut et la vie de tous.

Quant à cette présence de Moïse et d’Élie et à leur entretien, ils avaient pour but de montrer que la Loi et les prophètes formaient comme l’escorte de notre Seigneur Jésus Christ, le Seigneur qu’ils avaient montré par des indications concordantes. En effet, les annonces des prophètes ne contredisaient pas la Loi. Après être apparus, ils ne se taisaient pas, mais ils parlaient de la gloire dont le Seigneur allait être comblé à Jérusalem par sa passion et sa croix, et surtout par sa résurrection.

Peut-être le bienheureux Pierre, ayant cru que l’avènement du règne de Dieu était arrivé, a-t-il désiré demeurer sur la montagne, car il a dit qu’il fallait dresser trois tentes, ne sachant ce qu’il disait (Lc 9,33). Car ce n’était pas le temps de la fin du monde, et ce n’est pas dans le temps présent que les saints jouiront de l’espérance qui leur a été promise. Car saint Paul affirme : Il transfigurera nos pauvres corps à l’image de son corps de gloire (Ph 3,21), celui du Christ.

Puisque le plan de salut n’était pas encore achevé, n’étant qu’à son commencement, il n’était pas possible que le Christ, venu par amour dans le monde, renonce à vouloir souffrir pour lui. Car il a gardé la nature humaine pour subir la mort dans sa chair, et la détruire par sa résurrection d’entre les morts.

D’ailleurs, outre ce spectacle étonnant et mystérieux de la glorification du Christ, il s’est produit quelque chose de nécessaire pour confirmer la foi en lui, non chez les disciples seulement, mais aussi chez nous. Du haut du ciel se fit entendre la voix de Dieu le Père, qui disait: Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis tout mon amour: écoutez-le (Mt 17,5)!

Prière

Tu nous as dit, Seigneur, d’écouter ton Fils bien-aimé; fais-nous trouver dans ta parole les vivres dont notre foi a besoin: et nous aurons le regard assez pur pour discerner ta gloire. Par Jésus Christ.

 

3e dimanche de carême C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 13,1-9

Un jour, des gens vinrent rapporter à Jésus l’affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer pendant qu’ils offraient un sacrifice.

Homélie

Courage et constance

Catéchèse de Syméon le Nouveau Théologien († 1022)

Catéchèses, 3, 347-370; SC 96, 308-310.

On suggère d’utiliser comme homélie le texte figurant comme seconde lecture dans le Livre des jours ou la Liturgie des Heures, et de prendre comme seconde lecture le texte qui est donné ici.

Tout péché non regretté et non avoué est une blessure mortelle, comme aussi de tomber dans le désespoir, ce qui dépend de notre liberté et de notre volonté. Car, si nous ne nous abandonnons pas au gouffre du laisser-aller et du désespoir, les démons ne pourront absolument rien contre nous. Même après avoir été blessés, nous devenons plus courageux et plus expérimentés, si nous le voulons, par un fervent repentir. <>

Nous garder de toute blessure ne dépend pas de nous, mais il dépend de nous d’être immortels ou mortels. En effet, si nous ne désespérons pas, nous ne mourrons pas, la mort n’aura sur nous aucun pouvoir; mais nous serons toujours puissants si nous nous réfugions par le repentir auprès de notre Dieu, le tout-puissant et l’ami des hommes.

C’est pourquoi je m’exhorte moi-même, et vous tous avec moi, à manifester par nos bonnes actions tout notre zèle, tout notre courage, par la constance et l’endurance. Alors, poursuivant notre route selon tous les commandements et toutes les prescriptions du Christ, dans la ferveur de notre âme, nous parviendrons aux demeures éternelles sous la conduite de l’Esprit Saint, et nous serons reconnus dignes de nous tenir debout devant l’unique et indivisible Trinité, et de l’adorer dans ce même Christ, notre Dieu. A lui la gloire et la puissance pour les siècles des siècles. Amen.

Prière

Tu es la source de toute bonté, Seigneur, et toute miséricorde vient de toi ; tu nous as dit comment guérir du péché par le jeûne, la prière et le partage ; écoute l’aveu de notre faiblesse : nous avons conscience de nos fautes : patiemment relève-nous avec amour. Par Jésus Christ.

 

4e dimanche de carême C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 15,1-3.11-32 Les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : "Cet homme fait bon accueil aux pécheurs et mange avec eux." Alors Jésus leur dit cette parabole: "Un homme avait deux fils."

Homélie

au choix Après le baptême, un autre pardon est possible

Homélie de saint Jean Chrysostome († 407)

Homélies sur la pénitence, 1,3-4; PG 49, 282-283.

Dieu se contente d’obtenir de nous un regret facile pour nous faire grâce de nos nombreux péchés. Voici une parabole à l’appui de cette affirmation. Il y avait deux frères. Après le partage de leur patrimoine, l’un d’eux resta à la maison et l’autre, après avoir dévoré toute sa part, se condamna à l’exil, ne pouvant supporter la honte de sa misère. J’ai choisi de vous raconter cette parabole pour vous enseigner qu’il y a un pardon pour les fautes postérieures au baptême, si nous le voulons vraiment. Je ne dis pas cela pour vous porter à l’insouciance, mais pour vous préserver du désespoir, car celui-ci nous fait plus de mal que l’indolence.

Donc, ce fils exilé offre l’image de ceux qui sont tombés après le baptême. Il est évident qu’il les représente, puisqu’il est appelé "fils". Car nul ne peut être appelé ainsi lorsqu’il n’est pas baptisé. En outre, il avait habité la maison de son père, qui lui avait donné une part de ses biens. Or, avant le baptême, on ne peut participer aux biens du Père, ni recevoir son héritage. Ainsi tous ces traits marquent la condition des fidèles. En outre, le prodigue était le frère d’un homme très estimable, et personne n’est un "frère" s’il n’a pas reçu la seconde naissance, celle que donne le Saint-Esprit.

Or, que dit le prodigue tombé dans la pire misère? Je vais retourner chez mon père (Lc 15,18). La raison pour laquelle son père l’a laissé s’éloigner et ne l’a pas empêché de partir à l’étranger, c’était qu’il découvrirait clairement par expérience de quel bienfait l’on jouit en restant à la maison. Souvent Dieu, lorsque ces paroles ne peuvent nous persuader, permet à l’expérience des faits de nous apporter ses leçons.

Après s’être éloigné dans un pays étranger, le prodigue, ayant appris par ses propres déboires dans quelle misère on tombe en quittant la maison paternelle, s’en revint donc vers son père. Celui-ci ne lui garda pas rancune, mais le reçut à bras ouverts. Et pourquoi donc? Parce qu’il était un père, non un juge. Et ce furent des danses, un festin, des réjouissances, bref toute la maisonnée rayonnait de joie.

Alors vous dites: "Est-ce ainsi que l’on récompense l’inconduite?" On ne fête pas son inconduite, mais son retour; ni son péché, mais sa conversion; ni sa méchanceté, mais sa transformation. Bien plus, quand le fils aîné s’est indigné de toute cette joie, le père l’a calmé avec douceur en lui disant : Toi, tu vis toujours avec moi. Mais lui était perdu, et il est retrouvé; il était mort, et il est revenu à la vie (cf. Lc 15,31.32). Lorsqu’il faut sauver celui qui se perd, ce n’est pas le moment de rendre des sentences, ni de faire une enquête minutieuse, mais uniquement celui de la miséricorde et du pardon.

ou bien

Même ceux qui sont loin de lui, Dieu les comprend

Homélie de saint Augustin († 430) sur le psaume 138

Homélies sur les psaumes, ps 138, 5-6; CCL 40, 1992-1993.

De loin tu as compris mes pensées, tu as découvert mon sentier, tu as prévu tous mes chemins (cf. ps 138,3-4). Que signifie de loin ? Pendant que je suis encore voyageur, avant mon arrivée dans la patrie, tu as compris ma pensée. Songez au plus jeune fils (Lc 15,11-32, passim), car lui aussi est devenu le Corps du Christ, l’Église venue des nations païennes. Le plus jeune était parti au loin. En effet, un père avait deux fils. L’aîné n’était pas parti au loin, il travaillait aux champs et il symbolisait les saints qui, sous la Loi, observaient les pratiques et les préceptes de la Loi.

Mais le genre humain, qui s’était égaré dans le culte des idoles, était parti au loin. Rien, en effet, n’est aussi loin de celui qui t’a créé que cette image modelée par toi-même, pour toi. Le fils cadet partit donc dans une région lointaine, emportant avec lui sa part d’héritage et, comme nous l’apprend l’Évangile, il la gaspilla en menant une vie de désordre. Souffrant de la famine, il s’engagea au service d’un propriétaire du pays qui le chargea de garder un troupeau de porcs, et le malheureux, mais en vain, désirait se rassasier des gousses que mangeaient les porcs.

Après tant de malheurs et d’accablement, d’épreuves et de dénuement, il se rappela son père et voulut revenir vers lui. Il se dit: Je me lèverai, et j’irai vers mon père. Reconnaissez donc sa voix dans cette parole du psaume : Tu sais quand je m’asseois et quand je me lève (Ps 138,2). Je me suis assis dans la misère, je me suis levé dans le désir de ton pain. De loin tu as compris mes pensées. Aussi, dans l’Évangile, le Seigneur nous dit-il que son père vint au-devant de lui. C’est vrai, parce qu’il avait compris de loin ses pensées. Tu as prévu tous mes chemins. Lesquels? sinon les mauvais chemins qu’il avait suivis pour abandonner son père, comme s’il pouvait se cacher à ses regards qui le réclament, ou comme si l’écrasante misère qui le réduisait à garder les porcs n’était pas le châtiment que le père lui infligeait, dans son éloignement, en vue de le recevoir à son retour?

Il ressemblait à un fuyard qu’on arrête, poursuivi par la légitime revendication de Dieu, qui sévit contre nos passions, où que nous allions, si loin que nous puissions nous éloigner. Donc, comme un fuyard qu’on arrête, il dit : Tu as découvert mon sentier, et tu as prévu tous mes chemins. Avant même que j’y sois entré, avant même que j’y aie marché, tu les as vus d’avance. Et tu as permis que je suive mes chemins dans la peine, pour que, si je ne voulais plus peiner, je revienne dans tes chemins.

Parce qu’il n’y a pas de dissimulation dans mon langage (cf. ps 138,4). Pourquoi parle-t-il ainsi? Parce que je confesse ma faute devant toi : j’ai suivi mon propre sentier, je me suis éloigné de toi ; je t’ai quitté, toi auprès de qui j’étais bien; et pour mon bien, il a été mauvais pour moi d’avoir été sans toi. Car, si je m’étais trouvé bien sans toi, je n’aurais peut-être pas voulu revenir à toi.

Donc le psalmiste qui confesse ainsi ses péchés déclare qu’il est le Corps du Christ, maintenant qu’il est justifié, non par lui-même, mais par la grâce, lorsqu’il dit: Il n’y a pas de dissimulation dans mon langage.

Prière

Dieu qui as réconcilié avec toi toute l’humanité en lui donnant ton propre Fils, augmente la foi du peuple chrétien, pour qu’il se hâte avec amour au-devant des fêtes pascales qui approchent. Par Jésus Christ.

 

5e dimanche de carême C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean Jn 8,1-11

Jésus s’était rendu au mont des Oliviers ; de bon matin il retourna au temple de Jérusalem. Comme tout le peuple venait à lui, il s’assit et se mit à enseigner. Les scribes et les pharisiens lui amènent une femme qu’on avait surprise en train de commettre l’adultère.

Homélie

Le pardon, suprême justice

Lettre de saint Ambroise († 397)

Lettre 26, 11-20; PL 16, 1044-1046

Une femme coupable d’adultère fut amenée par les scribes et les pharisiens devant le Seigneur Jésus. Et ils formulèrent leur accusation avec perfidie, de telle sorte que, si Jésus l’absolvait, il semblerait enfreindre la Loi, mais que, s’il la condamnait, il semblerait avoir changé le motif de sa venue, car il était venu afin de pardonner le péché de tous. Ils dirent en la lui présentant: Cette femme a été prise en flagrant délit d’adultère. Or dans la Loi, Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là. Et toi, qu’en dis-tu (Jn 8,4-5)?

Pendant qu’ils parlaient, Jésus, la tête baissée, écrivait avec son doigt sur le sol. Comme ils attendaient, il leva la tête et dit: Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter la pierre (Jn 8,7). Y a-t-il rien de plus divin que cette sentence: qu’il punisse le péché, celui qui est sans péché? Comment, en effet, pourrait-on tolérer qu’un homme condamne le péché d’un autre, quand il excuse son propre péché? Celui-là ne se condamne-t-il pas davantage, en condamnant chez autrui ce qu’il commet lui-même?

Jésus parla ainsi, et il écrivait sur le sol. Pourquoi? C’est comme s’il disait: Qu’as-tu à regarder la paille qui est dans l’œil de ton frère, alors que la poutre qui est dans ton œil, tu ne la remarques pas (Lc 6,41)? Il écrivait sur le sol, du doigt dont il avait écrit la Loi (Ex 31,18). Les pécheurs seront inscrits sur la terre, et les justes dans le ciel, comme Jésus dit aux disciples: Réjouissez-vous parce que vos noms sont inscrits dans les deux (Lc 10,20).

En entendant Jésus, les pharisiens sortaient l’un après l’autre, en commençant par les plus âgés, puis ils s’assirent pour délibérer entre eux. Et Jésus resta seul avec la femme qui était debout, là au milieu. L’évangéliste a raison de dire qu’ils sortirent, ceux qui ne voulaient pas être avec le Christ. Ce qui est à l’extérieur du Temple, c’est la lettre; ce qui est au-dedans, ce sont les mystères. Car ce qu’ils recherchaient dans les enseignements divins, c’étaient les feuilles et non les fruits des arbres ; ils vivaient dans l’ombre de la Loi et ne pouvaient pas voir le soleil de justice.

Quand ils furent tous partis, Jésus resta seul avec la femme debout au milieu. Jésus, qui va pardonner le péché, demeure seul, comme lui-même l’a dit: L’heure vient et même elle est venue, où vous serez dispersés chacun de son côté, et vous me laisserez seul (Jn 16,32). Car ce n’est ni un ambassadeur ni un messager qui a sauvé son peuple, mais le Seigneur en personne. Il reste seul parce qu’aucun des hommes ne peut avoir en commun avec le Christ le pouvoir de pardonner les péchés. Cela revient au Christ seul, lui qui enlève le péché du monde. Et la femme méritait d’être pardonnée, elle qui, après le départ des Juifs, demeure seule avec Jésus.

Relevant la tête, Jésus dit à la femme : Où sont-ils, ceux qui t’accusaient ? Est-ce que personne ne t’a lapidée ? Et elle répondit: Personne, Seigneur, Alors Jésus lui dit: Moi non plus, je ne te condamnerai pas. Va, et désormais, veille à ne plus pécher. Voilà, lecteur, les mystères divins, et la clémence du Christ. Quand la femme est accusée, le Christ baisse la tête, mais il la relève quand il n’y a plus d’accusateur, si bien qu’il veut ne condamner personne, mais pardonner à tous. <>

Que signifie donc : Va, et désormais veille à ne plus pécher! Cela veut dire: Puisque le Christ t’a rachetée, que la grâce te corrige, tandis qu’un châtiment aurait bien pu te frapper, mais non te corriger.

Prière

Que ta grâce nous obtienne, Seigneur, d’imiter avec joie la charité du Christ qui a donné sa vie par amour pour le monde. Lui qui règne.

Semaine sainte C

 

Dimanche des Rameaux et de la Passion C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 19,28-40

Jésus marchait en avant de ses disciples pour monter à Jérusalem. A l’approche de Bethphagé et de Béthanie, sur les pentes du mont des Oliviers, il envoya deux disciples.

Homélie

Le roi qui aime la justice

Commentaire de saint Cyrille d’Alexandrie († 444) sur le livre d’Isaïe

Commentaire du livre d’Isaïe, 4, 2, PG 70, 967-970

Voici qu’un roi régnera selon la justice, et les chefs gouverneront selon le droit (cf. Is 32,1). Le Verbe, Fils unique de Dieu, a toujours été, avec le Père, le roi de l’univers, et il a mis sous ses pieds toutes les créatures, visibles et invisibles. Mais si un habitant de la terre se dérobait à sa royauté, s’y soustrayait et méprisait son sceptre parce qu’il serait tombé au pouvoir du démon et serait retenu dans les filets du péché, alors ce ministre et ce dispensateur de toute justice le ramènerait sous son joug, car tous ses chemins sont droits.

Ce que nous appelons ses chemins, ce sont les préceptes de l’Évangile grâce auxquels, en recherchant toutes les vertus, en ornant notre tête des joyaux de la piété, nous obtenons la palme de notre vocation céleste. Oui, ces chemins sont droits, il n’y a rien en eux d’oblique ou de tortueux, mais ils sont directs et d’accès facile. Car il est écrit: Le sentier du juste, c’est la droiture, et son chemin a été bien dégagé (cf. Is 26,7). Car si le chemin de la Loi est rude, s’il oblige à traverser quantité de types et de figures, et s’il est d’une difficulté insurmontable, le chemin des préceptes évangéliques est uni et ne présente absolument rien de rocailleux. Donc les chemins du Christ sont droits, et lui-même a construit la cité sainte, l’Église où lui-même habite. En effet, il demeure dans ses saints et nous sommes devenus les temples du Dieu vivant, parce que nous avons le Christ en nous-mêmes, par notre participation à l’Esprit Saint.

Le Christ a donc fondé l’Église, et il est lui-même la pierre de fondation sur laquelle, comme des pierres de grand prix, nous sommes assemblés pour édifier un temple saint, la demeure de Dieu dans l’Esprit. L’Église est absolument indestructible, elle qui a le Christ pour assise et pour base inébranlable. Voici, dit-il, que je pose en Sion une pierre angulaire, une pierre choisie et de grande valeur; celui qui lui donne sa foi ne connaîtra pas la honte (1 P 2,6). Quand il a fondé l’Église, le Christ a délivré son peuple de la captivité. En effet, nous qui étions, sur la terre, opprimés par la tyrannie de Satan et du péché, il nous a sauvés et délivrés, il nous a soumis à son propre joug, sans verser ni rançon, ni gratification. Comme le dit son disciple Pierre: Ce qui vous a libérés de la vie sans but que vous meniez à la suite de vos pères, ce n’est pas l’or ni l’argent, car ils seront détruits : c’est le sang précieux du Christ, l’Agneau sans défaut et sans tache (1 P 1,18-19). Car il a donné pour nous son propre sang, si bien que nous n’appartenons plus à nous-mêmes, mais à celui qui nous a rachetés et sauvés.

Donc, en bonne justice, ceux qui transgressent la juste règle de la vraie foi sont accusés par la voix des saints de renier le Seigneur qui nous a rachetés.

 

Jeudi saint C

Le Jeudi saint, aux Vigiles célébrées le matin, il n’y a pas de lecture d’évangile On a cependant cru rendre service en proposant une homélie pour nourrir la méditation de ce jour là

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 13,1-15

Avant la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout.

Homélie

Sacrifice de la Passion, sacrifice de la messe

Sermon attribué à saint Augustin († 430)

Sermon édité par mai, 143, 1 3, PLS 2, 1238 1239

Mes bien-aimés, aujourd’hui nous rappelons pieusement la veille de la Passion du Seigneur, le jour sacré où il voulut faire un repas avec ses disciples, et, dans sa bonté, accepta d’endurer tout ce qui avait été écrit et annoncé touchant ses souffrances et sa mort, en vue de nous libérer tous. Nous devons donc célébrer dignement de si grands mystères de manière que, par notre participation volontaire à sa Passion, nous méritions d’avoir part à sa résurrection. Car tous les rites sacrés de l’Ancien Testament sont parvenus à leur plein achèvement dans le Christ, lorsqu’il confia à ses disciples le pain qui est son corps et le vin qui est son sang pour qu’ils en fassent l’offrande dans les mystères éternels, et lorsqu’il les donna en nourriture à tous les fidèles pour le pardon de toutes leurs fautes.

Cette Passion qu’il a endurée dans son corps, par amour pour nous, afin de nous délivrer de la mort éternelle et de nous préparer le chemin du Royaume céleste, il nous a montré qu’il voulait la souffrir journellement chaque fois que nous célébrerions ce même mystère dans le sacrifice du saint autel, en vue de nous emmener avec lui dans la vie éternelle.

Voilà pourquoi il a dit à ses disciples : Prenez-en tous, car ceci est mon corps, et ceci est la coupe de mon sang qui sera répandu pour la multitude en rémission de tous les péchés (cf. Mt 26,26-28). Ainsi, chaque fois que vous en prendrez, vous le ferez en mémoire de moi (cf. 1 Co 11,24.26). 0

Le Christ est donc présent sur la table ; le Christ est mis à mort et sacrifié; le corps et le sang du Christ sont reçus. Lui qui, en ce jour, a donné le pain et la coupe aux disciples, les consacre lui-même aujourd’hui. Non, vraiment, ce n’est pas un homme qui peut consacrer le corps et le sang du Christ posés sur la table, mais le Christ en personne, lui qui a été crucifié pour nous. Les paroles sont prononcées par la bouche du prêtre ; le corps et le sang sont consacrés par la puissance et la grâce de Dieu.

Aussi garderons-nous purs en toutes choses notre esprit et notre pensée, puisque nous avons un sacrifice pur et saint. Voilà pourquoi nous devons également nous employer à sanctifier nos âmes. <> Dès lors, nous célébrerons en toute simplicité ces mystères, en faisant attention à ces recommandations, et nous nous approcherons de la table du Christ avec les dispositions qui conviennent, afin de partager éternellement la vie du Christ, lui qui vit et règne avec le Père et le Saint-Esprit, pour les siècles des siècles. Amen.

Prière

Dieu qu’il est juste d’aimer par-dessus tout, multiplie en nous les dons de ta grâce; dans la mort de ton Fils, tu nous fais espérer ce que nous croyons; accorde-nous, par sa résurrection, d’atteindre ce que nous espérons. Par Jésus Christ.

 

Vendredi saint C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 23,1-49

Les chefs des prêtres et les scribes emmenèrent Jésus chez Pilate. Ils se mirent alors à l’accuser.

Homélie

Entre tes mains

Homélie de saint Cyrille d’Alexandrie († 444)

Commentaire sur l’évangile de Jean, 12, 30, PG 74, 667-670

Quand il eut pris le vinaigre, Jésus dit: Tout est accompli. Puis, inclinant la tête, il remit l’esprit (Jn 19,30). Jésus a raison de dire que tout est accompli. Mais maintenant son heure l’appelle à proclamer la parole aux esprits qui sont dans les enfers. Il s’y rend, en effet, pour montrer sa seigneurie sur les vivants et sur les morts. C’est pour nous qu’il s’est plongé jusque dans la mort, et qu’il subit cette passion commune à toute notre nature, c’est-à-dire la souffrance de la chair, alors qu’étant Dieu, il est, par nature, la vie. Il veut, après avoir dépouillé les enfers, ramener la nature humaine à la vie, lui que les Écritures appellent les prémices de ceux qui se sont endormis (cf. 1 Co 15,30), et le premier-né d’entre les morts (Col 1,18).

Donc, il inclina la tête, ce qui est habituel aux mourants, parce que l’esprit ou l’âme qui maintient et gouverne le corps quitte celui-ci. Quant à ce que l’Évangéliste ajoute: et il remit l’esprit, c’est bien ainsi que les gens parlent pour dire que quelqu’un vient de s’éteindre et de mourir. Mais il semble que ce soit de propos délibéré et avec une intention précise que l’Évangéliste n’a pas dit simplement que Jésus était mort, mais qu’il avait remis son esprit dans les mains de Dieu le Père, selon ce qu’il a dit de lui-même : Père, entre tes mains je remets mon esprit (Lc 23,46). La portée et le sens de ces paroles apportaient à nous-mêmes le principe et le fondement d’une joyeuse espérance.

On doit croire, en effet, que les âmes saintes, après s’être dégagées de leurs corps terrestres, sont remises, entre les mains du Père très aimant, à la bonté et à la miséricorde de Dieu. Contrairement à ce que certains infidèles ont pensé, elles ne demeurent pas auprès de leurs tombeaux, en attendant les libations funèbres, et elles ne sont pas, comme les âmes des pécheurs, précipitées dans le lieu d’un supplice sans fin, c’est-à-dire en enfer. Au contraire, elles se hâtent de se remettre entre les mains du Père de tous et en celles de notre Sauveur, le Christ, qui nous a montré cet itinéraire. Il a remis son âme entre les mains de son propre Père pour que, nous aussi, en nous engageant sur ce chemin, nous possédions une glorieuse espérance, en sachant et en croyant fermement qu’après avoir subi la mort de la chair, nous serons entre les mains de Dieu, et dans une condition bien préférable à celle que nous avions quand nous vivions dans la chair. C’est pourquoi saint Paul écrit à notre intention qu’il est bien préférable de s’en aller pour être avec le Christ (cf. Ph 1,23).

Prière

Regarde, Seigneur, nous t’en prions, la famille qui t’appartient: c’est pour elle que Jésus, le Christ, notre Seigneur, ne refusa pas d’être livré aux mains des méchants ni de subir le supplice de la croix. Lui qui règne.

 

Samedi saint C

Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 23,50-56

Alors arriva un membre du conseil, nommé Joseph; c’était un homme bon et juste. Il n’avait donné son accord ni à leur délibération ni à leurs actes.

Homélie

Le Christ vainqueur de la mort

Homélie attribuée à saint Augustin († 430)

Sermon édité par mai, 146, PLS 2, 1242-1243

C’est à bon droit, mes bien-aimés, qu’aujourd’hui le ciel exulte et la terre se réjouit, car en ce jour où nous sommes la lumière a jailli plus brillamment à partir du sépulcre qu’elle n’a resplendi à partir du soleil. En voici la raison: de même qu’avant de naître à notre humanité, notre Seigneur et Sauveur a éclairé le monde, de même aujourd’hui, où il est mort corporellement, il a éclairé les enfers à la fois par la puissance de sa divinité, et par son âme humaine.

Aujourd’hui, à la visite du Seigneur, les enfers ont dansé de joie parce que s’est accompli l’oracle prophétique: Le peuple qui marchait dans les ténèbres, c’est-à-dire tout le genre humain plongé dans l’obscurité des enfers, a vu se lever une grande lumière (Is 9,1). Parce que celui-là même qui créa l’homme, c’est lui en personne qui est allé le chercher dans les enfers et l’en a délivré par sa puissance. Étonnante et inexprimable bonté de notre Dieu! La mort avait pris d’assaut le paradis, mais la vie a terrassé les enfers ; et le Fils de Dieu, qui avait revêtu la condition mortelle, a écrasé la loi de la mort, accomplissant ainsi l’affirmation du prophète: O mort, je serai ta mort (cf. Os 13,14)! Parce que ceux que tu as fait mourir par le péché, moi, par ma mort, je les rassemblerai hors de ce lieu de ruine éternelle et je les délivrerai de la mort perpétuelle.

Voilà de quels liens est ligoté et immobilisé ce qui fait la perte des hommes ; car, de même que la mort a trompé, elle a été trompée; alors qu’elle tuait, elle a été anéantie.

Donc le Seigneur, quand son corps fut enseveli, descendit tout au fond des demeures infernales ; mais alors qu’on le jugeait captif du séjour des morts, c’est là qu’ayant lié la mort, il a délivré les morts de leurs liens. Et de ce séjour, d’où jamais personne, même seul, n’était revenu, il pénétra dans les cieux en emportant de riches dépouilles.

Voilà tout ce qu’a fait l’immense bonté de Dieu pour notre salut et notre rétablissement! Pour nous, il a été pareil à une brebis conduite à l’abattoir (cf. Is 53,7); pour nous, il a subi les maux présents, afin de nous accorder les biens éternels.

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, dont le Fils unique est descendu aux profondeurs de la terre, d’où il est remonté glorieux: accorde à tes fidèles, ensevelis avec lui dans le baptême, d’accéder par sa résurrection à la vie éternelle. Lui qui règne.

Temps pascal C

 

Dimanche de Pâques C

Le dimanche de Pâques, la Veillée nocturne tient lieu d’Office des Vigiles ou des Lectures. On a cependant cru rendre service en proposant une homélie pour nourrir la méditation de ce jour-là.

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 24,1-12

Le premier jour de la semaine, de grand matin, les femmes se rendirent au sépulcre, portant les aromates qu’elles avaient préparés. Elles trouvèrent la pierre roulée sur le côté du tombeau. Elles entrèrent, mais ne trouvèrent pas le corps du Seigneur Jésus.

Homélie

Comme l’année A.

 

Lundi de Pâques C

Comme l’année A.

 

2e dimanche de Pâques C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 20,19-31

C’était après la mort de Jésus, le soir du premier jour de la semaine. Les disciples avaient verrouillé les portes du lieu où ils étaient, car ils avaient peur des Juifs. Jésus vint, et il était là au milieu d’eux.

Homélie

Ceux qui croient sans avoir vu

Sermon de saint Augustin († 430)

Sermon 88, 1-2, éd des Mauristes, 5, 469-470

Vous le savez aussi bien que nous, mes frères: notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ est pour nous le médecin du salut éternel. Il a pris sur lui la faiblesse de notre nature pour empêcher que cette faiblesse fût éternelle. Car il a pris un corps mortel afin de tuer la mort. Et bien qu’il ait été crucifié en raison de notre faiblesse, il est vivant par la puissance de Dieu (cf. 2 Co 13,4), nous dit saint Paul.

Le même Apôtre dit encore: Désormais il ne meurt plus; sur lui la mort n’a plus aucun pouvoir (Rm 6,9). Votre foi sait bien tout cela. Par là même, il s’ensuit que tous les miracles accomplis sur les corps — nous devons le savoir — servent à notre éducation pour que nous sachions en dégager ce qui ne passera pas et n’aura pas de fin. Il a rendu aux aveugles des yeux que la mort fermerait certainement un jour. Il a ressuscité Lazare qui devait mourir une deuxième fois. Et tout ce qu’il a fait pour la santé des corps, il ne l’a pas fait pour l’éternité, bien qu’à la fin il doive donner aux corps eux-mêmes une éternelle guérison. Mais parce qu’on ne croyait pas ce qui ne se voyait pas, le Seigneur se servait de ces miracles temporaires que l’on voyait, pour susciter la foi envers les réalités invisibles.

C’est pourquoi, mes frères, personne ne doit dire que Jésus n’agit plus ainsi maintenant et que, pour cette raison, les premiers temps de l’Église étaient supérieurs aux nôtres. Il y a un endroit de l’Évangile où notre Seigneur place ceux qui croient sans avoir vu au-dessus de ceux qui croient parce qu’ils ont vu. Car jusque-là, la faiblesse des disciples était si hésitante que, après l’avoir vu ressuscité, ils voulaient encore le toucher pour croire en lui. Il ne leur suffisait pas de voir de leurs yeux, s’ils n’approchaient leurs mains de ses membres et ne touchaient les cicatrices de ses récentes blessures. C’est aussitôt après avoir touché et reconnu les cicatrices que le disciple incrédule s’écria: Mon Seigneur et mon Dieu (Jn 20,28)! Ces cicatrices révélaient celui qui, chez les autres, guérissait toutes les blessures. Est-ce que le Seigneur n’aurait pas pu ressusciter sans cicatrices? Mais il voyait dans le cœur de ses disciples des blessures que devaient guérir ces cicatrices qu’il avait gardées dans son corps.

Et que répond le Seigneur à celui qui le confesse en disant : Mon Seigneur et mon Dieu ? Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu (Jn 20,29). De qui parle-t-il donc, mes frères, sinon de nous? Et pas seulement de nous, mais aussi de ceux qui viendront après nous. Car, peu de temps après, lorsqu’il a échappé aux regards mortels, pour affermir la foi dans les cœurs, tous ceux qui sont devenus croyants ont cru sans avoir vu, et leur foi avait un grand mérite: pour l’obtenir, ils ont approché de lui non pas une main qui voulait le toucher, mais seulement un cœur religieux.

Prière

Dieu de miséricorde infinie, tu ranimes la foi de ton peuple par les célébrations pascales ; augmente en nous ta grâce pour que nous comprenions toujours mieux quel baptême nous a purifiés, quel Esprit nous a fait renaître, et quel sang nous a rachetés. Par Jésus Christ.

 

3e dimanche de Pâques C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 21,1-19

Jésus se manifesta encore aux disciples sur le bord du lac de Tibériade, et voici comment. Il y avait là Simon-Pierre avec Thomas, dont le nom signifie "Jumeau", Nathanaël de Cana en Galilée, les fils de Zébédée, et deux autres disciples. Simon-Pierre leur dit: "Je m’en vais à la pêche."

Homélie

au choix

Aimer le Christ, aimer nos frères

Homélie de saint Augustin († 430)

Sermon Guelferbytanus 16, 1 , PLS 2, 579

Voici que le Seigneur, après sa résurrection, apparaît de nouveau à ses disciples. Il interroge l’apôtre Pierre, il oblige celui-ci à confesser son amour, alors qu’il l’avait renié trois fois par peur. Le Christ est ressuscité selon la chair, et Pierre selon l’esprit. Comme le Christ était mort en souffrant, Pierre est mort en reniant. Le Seigneur Christ était ressuscité d’entre les morts, et il a ressuscité Pierre grâce à l’amour que celui-ci lui portait. Il a interrogé l’amour de celui qui le confessait maintenant, et il lui a confié son troupeau.

Qu’est-ce donc que Pierre apportait au Christ du fait qu’il aimait le Christ? Si le Christ t’aime, c’est profit pour toi, non pour le Christ. Si tu aimes le Christ, c’est encore profit pour toi, non pour lui. Cependant le Seigneur Christ, voulant nous montrer comment les hommes doivent prouver qu’ils l’aiment, nous le révèle clairement: en aimant ses brebis.

Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? — Je t’aime. Sois le pasteur de mes brebis. Et cela une fois, deux fois, trois fois. Pierre ne dit rien que son amour. Le Seigneur ne lui demande rien d’autre que de l’aimer, il ne lui confie rien d’autre que ses brebis. Aimons-nous donc mutuellement, et nous aimerons le Christ. Le Christ, en effet, éternellement Dieu, est né homme dans le temps. Il est apparu aux hommes comme un homme et un fils d’homme. Étant Dieu dans l’homme, il a fait beaucoup de miracles. Il a beaucoup souffert, en tant qu’homme, de la part des hommes, mais il est ressuscité après la mort, parce que Dieu était dans l’homme. Il a encore passé quarante jours sur la terre, comme un homme avec les hommes. Puis, sous leurs yeux, il est monté au ciel comme étant Dieu dans l’homme, et il s’est assis à la droite du Père. Tout cela nous le croyons, nous ne le voyons pas. Nous avons reçu l’ordre d’aimer le Christ Seigneur que nous ne voyons pas, et nous crions tous: "J’aime le Christ".

Mais, si tu n’aimes pas ton frère que tu vois, comment peux-tu aimer Dieu que tu ne vois pas (1 Jn 4,20)? En aimant les brebis, montre que tu aimes le Pasteur, car justement, les brebis sont les membres du Pasteur. Pour que les brebis soient ses membres, le Pasteur a consenti à devenir la brebis conduite à la boucherie (Is 53,7). Pour que les brebis soient ses membres, il a été dit de lui: Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde (Jn 1,29). Mais cet agneau avait une grande force. Veux-tu savoir quelle force s’est manifestée chez cet agneau? L’agneau a été crucifié, et le lion a été vaincu.

Voyez et considérez avec quelle puissance le Seigneur Christ gouverne le monde, lui qui a vaincu le démon par sa mort. Aimons-le donc, et que rien ne nous soit plus cher que lui.

ou bien

Pierre, figure de l’Eglise, corps du Christ

Homélie de saint Augustin († 430)

Sermon Guelferbytanus 16, 2-3; PLS 2, 580-581.

Quand vous entendez le Seigneur demander: Pierre, m’aimes-tu?, considérez Pierre comme un miroir et regardez-vous en lui. Est-ce que Pierre représentait autre chose que la figure de l’Église? Lorsque Je Seigneur interrogeait Pierre, c’est nous, c’est l’Église qu’il interrogeait. Pour comprendre que Pierre était la figure de l’Église, souvenez-vous de ce passage de l’Évangile: Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église; et la puissance de la mort ne l’emportera pas sur elle. Je te donnerai les clés du Royaume des deux (Mt 16,18-19). Un seul homme les a reçues et le Christ en personne a expliqué ce que sont ces clés du Royaume des cieux : Tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux. Et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les deux (Mt 16,19). Si c’est à Pierre seul que cette parole fut adressée, si c’est lui seul qui a pu faire cela, maintenant qu’il est mort, qu’il nous a quittés, quel est donc celui qui peut lier, qui peut délier? J’ose le dire, ces clés nous les possédons nous aussi. Irai-je jusqu’à dire que c’est nous qui lions et qui délions? Mais vous aussi, vous liez, vous aussi vous déliez. Car celui qui est lié, c’est de votre communauté qu’il est retranché, et quand il en est retranché, c’est par vous qu’il est lié. Et quand il est réconcilié, c’est par vous qu’il est délié, parce que c’est vous encore qui priez Dieu pour lui.

Nous tous, nous aimons le Christ, nous sommes ses membres. Lorsqu’il confie ses brebis à leurs pasteurs, tous ces pasteurs ne font qu’un dans le corps du pasteur unique. Vous devez savoir que tous les pasteurs ne font qu’un dans le corps unique de l’unique Pasteur. Pierre est pasteur, et il l’est pleinement. Paul est pasteur, et pleinement pasteur. Jean est pasteur, Jacques est pasteur, André est pasteur, et tous les autres Apôtres sont pasteurs. Tous les saints évêques sont certainement et pleinement pasteurs.

Alors, comment est-il vrai qu’il n’y aura plus qu’un seul troupeau et un seul pasteur (Jn 10,16)? Oui, s’il est vrai qu’il n’y aura plus qu’un seul troupeau et un seul pasteur, c’est que toute la foule innombrable des pasteurs se réduit au corps de l’unique pasteur. Mais, vous aussi, vous en êtes, et vous êtes ses membres. Ce sont ces membres que Saul piétinait tandis que leur chef intercédait pour eux: ce Saul, d’abord persécuteur, ensuite prédicateur, qui ne respirait que meurtres et qui repoussait la foi chrétienne. Une seule parole a jeté à terre toute sa rage. Quelle parole? Saul, Saul, pourquoi me persécuter ? (Ac 9,4) <> Mais quel mal Saul pouvait-il faire à celui qui siège dans le ciel? Quel mal pouvait lui faire une parole ou un cri? Saul ne pouvait rien faire contre Jésus, et pourtant celui-ci lui criait : Tu me persécutes. Quand il criait cela, il indiquait que nous sommes tous ses membres. C’est pourquoi l’amour du Christ que nous aimons en vous, l’amour du Christ que vous aussi aimez en nous, puisse-t-il, parmi les tentations, les travaux, les sueurs, les soucis, les misères, les gémissements, puisse-t-il nous conduire là où il n’y a ni labeur, ni misère, ni gémissement, ni soupir ni chagrin. Là où personne ne naît, là où personne ne meurt, où personne ne craint la colère d’un puissant, parce que tous ont les yeux fixés sur le Tout-Puissant.

Prière

Garde à ton peuple sa joie, Seigneur, toi qui refais ses forces et sa jeunesse ; tu nous as rendu la dignité de fils de Dieu, affermis-nous dans l’espérance de la résurrection. Par Jésus Christ.

 

4e dimanche de Pâques C

Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 10,27-30 Jésus avait dit aux Juifs : "Je suis le Bon Pasteur, le vrai berger." Il leur dit encore: "Mes brebis écoutent ma voix; moi, je les connais, et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle."

Homélie

La vie donnée à ceux qui suivent le Christ

Homélie de saint Cyrille d’Alexandrie († 444)

Commentaire sur l’évangile de Jean, 7, 10, 26, PG 74, 20.

La marque distinctive des brebis du Christ, c’est leur aptitude à écouter, à obéir, tandis que les brebis étrangères se distinguent par leur indocilité. Nous comprenons le verbe "écouter" au sens d’acquiescer à ce qui a été dit. Et ceux-là qui l’écoutent sont "connus" de Dieu, car "être connu" signifie être uni. Il n’y a personne qui soit entièrement ignoré de Dieu. Donc, lorsque le Christ dit: Je connais mes brebis, il veut dire: "Je les accueillerai et je les unirai à moi d’une union mystique et permanente."

On peut dire qu’en se faisant homme, il s’est apparenté à tous les hommes par communauté de nature: nous sommes tous unis au Christ par une relation mystique en raison de son incarnation. Mais tous ceux qui ne gardent pas de ressemblance avec sa sainteté lui sont devenus étrangers. <>

Mes brebis me suivent, dit encore le Christ. En effet, les croyants, par la grâce divine, suivent les pas du Christ. Ils n’obéissent pas aux préceptes de la Loi, qui n’étaient que des figures, mais, en suivant par la grâce les préceptes du Christ, ils s’élèveront jusqu’à sa hauteur, conformément à leur vocation de fils de Dieu. Quand le Christ monte au ciel, ils le suivent jusque-là.

Le Christ promet à ceux qui le suivent de leur accorder le salaire et la récompense de la vie éternelle. Il leur promet aussi de les soustraire à la mort et à la corruption, ainsi qu’aux supplices que le juge réclame contre eux pour leurs transgressions. Le Christ, du fait qu’il donne la vie, montre qu’il est par nature la vie en personne, et qu’il la donne de lui-même, sans la recevoir d’un autre.

Par vie éternelle, nous ne comprenons pas cette succession interminable de jours, que tous, bons ou mauvais, posséderont après la résurrection, mais cette vie où l’on demeure dans la joie. On peut aussi comprendre "la vie" au sens de l’eucharistie. Par celle-ci, le Christ greffe en nous sa propre vie, en faisant participer les croyants à sa propre chair, selon sa parole : Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle (Jn 6,54).

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, guide-nous jusqu’au bonheur du ciel ; que le troupeau parvienne, malgré sa faiblesse, là où son Pasteur est entré victorieux. Lui qui règne.

 

5e dimanche de Pâques C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 13,31-35

Au cours du dernier repas que Jésus prenait avec ses disciples, quand Judas fut sorti, Jésus déclara: "Maintenant le Fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui."

Homélie

Le commandement nouveau

Homélie de saint Cyrille d’Alexandrie († 444)

Commentaire sur l’évangile de Jean, 9; PG 74, 161-164.

Je vous donne un commandement nouveau : Aimez-vous les uns les autres. Mais, demandera-t-on peut-être, comment Jésus peut-il dire que ce commandement est nouveau, lui qui a prescrit aux anciens, par l’intermédiaire de Moïse : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit, et ton prochain comme toi-même (Dt 6,5; Mt 22,37)? <>

Il faut voir ce que Jésus ajoute. Il ne s’est pas contenté de dire: Je vous donne un commandement nouveau: aimez-vous les uns les autres. Mais pour montrer la nouveauté de cette parole et que son amour a quelque chose de plus fort et de plus remarquable que l’ancienne charité envers le prochain, il ajoute aussitôt: Comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. Il faut donc creuser le sens de ces paroles, et rechercher comment le Christ nous a aimés. Alors, en effet, nous pourrons apprécier ce qu’il y a de différent et de nouveau dans le précepte qui nous est donné maintenant. Donc, lui qui était dans la condition de Dieu, il n’a pas jugé bon de revendiquer son droit d’être traité à l’égal de Dieu, mais au contraire il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur. Devenu semblable aux hommes et reconnu comme un homme à son comportement, il s’est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à mourir, et à mourir sur une croix (Ph 2,6-8). Et saint Paul affirme encore: Lui qui est riche, il s’est fait pauvre (2 Co 8,9).

Voyez-vous la nouveauté de son amour envers nous? La Loi prescrivait en effet d’aimer son frère comme soi-même. Or notre Seigneur Jésus Christ nous a aimés plus que lui-même, puisque, vivant dans la même condition que Dieu le Père et dans l’égalité avec lui, il ne serait pas descendu jusqu’à notre bassesse, il n’aurait pas subi pour nous une mort physique aussi affreuse, il n’aurait pas subi les gifles, les moqueries et tout ce qu’il a subi, — si je voulais énumérer dans le détail tout ce qu’il a souffert, je n’en finirais pas — et d’abord, il n’aurait pas voulu, étant riche, se faire pauvre, s’il ne nous avait pas aimés plus que lui-même. Une telle mesure d’amour est donc inouïe et nouvelle.

Il nous ordonne d’avoir les mêmes sentiments, de ne faire passer absolument rien avant l’amour de nos frères, ni la gloire ni les richesses. Il ne faut même pas craindre, si c’est nécessaire, d’affronter la mort corporelle pour obtenir le salut du prochain. C’est ce qu’ont fait les bienheureux disciples de notre Sauveur et ceux qui ont suivi leurs traces. Ils ont fait passer le salut des autres avant leur propre vie, ils n’ont refusé aucun labeur. Ils ont accepté de supporter des maux extrêmes pour sauver des âmes qui se perdaient. C’est ainsi que saint Paul dit parfois: Je meurs chaque jour (1 Co 15,31), et aussi: Si quelqu’un faiblit, je partage sa faiblesse ; si quelqu’un vient à tomber, cela me brûle (2 Co 11,29).

Le Sauveur nous a ordonné de cultiver la racine de cette piété très parfaite envers Dieu, bien plus grande que l’amour prescrit par la loi ancienne. Il savait que nous n’avons pas d’autre moyen de plaire à Dieu que de suivre la beauté de l’amour, tel qu’il l’a introduit chez nous, et de recevoir ainsi les plus hautes et les plus parfaites bénédictions.

Prière

Dieu qui as envoyé ton Fils pour nous sauver et pour faire de nous tes enfants d’adoption, regarde avec bonté ceux que tu aimes comme un père ; puisque nous croyons au Christ, accorde-nous la vraie liberté et la vie éternelle. Par Jésus Christ.

 

6e dimanche de Pâques C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 14,23-29

A l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : "Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole. Mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui."

Homélie

au choix

Le Christ vient habiter en nous

Homélie de saint Bernard († 1153)

Sermon 27, 8-10, éd J leclercq, 1, 188. 189

Le Père et moi, disait le Fils, nous viendrons chez lui, c’est-à-dire chez l’homme qui est saint, nous irons demeurer auprès de lui (Jn 14,23). Et je pense que le prophète n’a pas parlé d’un autre ciel, lorsqu’il a dit: Tu habites chez les saints, toi la gloire d’Israël (cf. ps 21,4) ! Et l’Apôtre dit clairement: Par la foi, le Christ habite en nos cœurs (Ep 3,17).

Il n’est donc pas surprenant que le Christ se plaise à habiter ce ciel-là. Alors que pour créer le ciel visible il lui a suffi de parler, il a lutté pour acquérir celui-là, il est mort pour le racheter. C’est pourquoi, après tous ses travaux, ayant réalisé son désir, il dit: Voici le lieu de mon repos à tout jamais, c’est là le séjour que j’avais choisi (Ps 131,14). Et bienheureuse celle à qui il est dit: Viens, mon épouse choisie (Ct 2,10-13), je mettrai mon trône en toi.

Pourquoi, maintenant, te désoler, ô mon âme, et gémir sur moi (Ps 41,6)? Penses-tu trouver en toi aussi une place pour le Seigneur? Et quelle place en nous est digne d’une telle gloire, et suffit-elle à recevoir sa Majesté? Puisse-je seulement l’adorer aux lieux où se sont arrêtés ses pas? Qui m’accordera de pouvoir au moins suivre les traces d’une âme sainte qu’il s’est choisie pour son domaine (Ps 32,12)? Cependant puisse-t-il aussi daigner répandre en mon âme l’onction de sa miséricorde, si bien que je sois capable de dire, moi aussi : Je cours dans la voie de tes volontés, car tu mets mon cœur au large (Ps 118,32). Je pourrai peut-être, moi aussi, montrer en moi, sinon une grande salle toute prête, où il puisse manger avec ses disciples (Me 14,15), du moins un endroit où il puisse reposer sa tête (Mt 8,20).

Il est nécessaire que l’âme grandisse et s’élargisse pour être capable de Dieu. Or, sa largeur, c’est son amour, comme dit l’Apôtre: Élargissez-vous dans la charité (2 Co 6,13). Car, bien que l’âme n’ait aucune quantité corporelle puisqu’elle est esprit, la grâce lui confère ce que sa nature exclut. Oui, elle grandit et elle s’étend, mais de façon spirituelle. Elle grandit et elle progresse vers l’état de l’homme parfait, à la plénitude de la stature du Christ (Ep 4,13). Elle grandit aussi pour devenir un temple saint dans le Seigneur (Ep 2,21). La grandeur de chaque âme est donc à la mesure de sa charité. Si bien que celle qui a beaucoup de charité est grande, celle qui en a peu est petite, celle qui n’a rien est néant. Saint Paul affirme en effet: Si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien (1 Co, 13,12).

ou bien

Le retour du Christ au Père : notre gloire et notre joie

Homélie de saint Léon le Grand († 461)

Sermon 77, 5, CCL 138 A, 490-493.

Nous avons entendu dans l’Évangile le Seigneur dire à ses disciples: Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie puisque je pars vers le Père, car le Père est plus grand que moi (Jn 14,28). Mais nous avons aussi entendu souvent ces autres paroles : Le Père et moi, nous sommes UN (Jn 10,30), ou bien encore: Celui qui me voit voit aussi le Père (Jn 14,9). Aussi nous comprendrons le premier passage sans mettre une différence dans la divinité, dans cette essence que nous avons toujours reconnue comme coéternelle et consubstantielle avec le Père.

Donc, ce que le Christ souligne, même pour les Apôtres, c’est l’élévation procurée à l’homme par l’incarnation du Verbe. Alors qu’ils étaient troublés par l’annonce du départ du Seigneur, celui-ci vient les élever jusqu’aux joies éternelles en leur montrant l’accroissement de sa gloire : Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie puisque je pars vers le Père. C’est-à-dire, vous seriez dans la joie si vous pouviez voir, par une connaissance parfaite, quelle gloire vous apporte le fait que, engendré par le Père, je suis engendré aussi d’une mère appartenant à l’humanité: Oui, moi-même, Seigneur de l’éternité, j’ai voulu être l’un des mortels ; invisible par nature, je me suis rendu visible ; étant éternellement dans la condition de Dieu, j’ai pris la condition de serviteur (Ph 2,7). Vraiment, en voyant tout cela, vous devriez être dans la joie puisque je pars vers le Père.

En effet, cette ascension vous est avantageuse, et c’est votre bassesse qui, en ma personne, doit être établie au-dessus de tous les cieux, à la droite du Père. Quant à moi, qui suis avec le Père ce que le Père est lui-même, je demeure inséparable de celui qui m’engendre. Et ainsi, en venant vers vous, je ne m’éloigne pas de lui, de même qu’en venant vers lui je ne vous abandonne pas.

Soyez donc dans la joie puisque je pars vers le Père, car le Père est plus grand que moi. Je vous ai unis à moi, en effet, et je suis devenu fils d’homme pour que vous puissiez être fils de Dieu. Aussi, bien que je sois le même dans l’un et l’autre de ces états, du fait que je me rends semblable à vous, je suis inférieur au Père. Mais du fait que je ne me sépare pas de lui, je suis encore supérieur à moi-même.

Que la nature qui est inférieure au Père aille donc vers le Père, afin que la chair soit toujours là où est le Verbe. Et que l’unique foi de l’Église catholique, sans refuser qu’il soit inférieur au Père par son humanité, croie fermement qu’il lui est égal par sa divinité.

Prière

Dieu tout-puissant, accorde-nous, en ces jours de fête, de célébrer avec ferveur le Christ ressuscité : que le mystère de Pâques dont nous faisons mémoire reste présent dans notre vie et la transforme. Par Jésus Christ.

 

Ascension du Seigneur C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 24,46-53

Jésus ressuscité, apparaissant à ses disciples, leur disait : "Il fallait que s’accomplisse ce qui était annoncé par l’Écriture: les souffrances du Messie, sa résurrection d’entre les morts le troisième jour, et la conversion proclamée en son nom pour le pardon des péchés à toutes les nations, en commençant par Jérusalem."

Homélie

Il est allé nous préparer une place

Homélie de saint Cyrille d’Alexandrie († 444)

Commentaire sur l’évangile de Jean, 9, sur Jn 14,2-3; PG 74, 182-183.

Dans la maison de mon Père, beaucoup peuvent trouver leur demeure ; sinon, est-ce que je vous aurais dit : Je pars vous préparer une place ? (Jn 14,2) <> Si les demeures auprès du Père n’avaient pas été nombreuses, le Seigneur aurait dit qu’il partait en avant-coureur, manifestement afin de préparer les demeures des saints. Mais il savait que beaucoup étaient déjà prêtes et attendaient l’arrivée des amis de Dieu. Il donne donc un autre motif à son départ : préparer la route à notre ascension vers ces places du ciel en frayant un passage, alors qu’auparavant cette route était impraticable pour nous. Car le ciel était absolument fermé aux hommes, et jamais aucun être de chair n’avait pénétré dans ce très saint et très pur domaine des anges.

C’est le Christ qui inaugura pour nous ce chemin vers les hauteurs. En s’offrant lui-même à Dieu le Père comme les prémices de ceux qui dorment dans les tombeaux de la terre, il permit à la chair de monter au ciel, et il fut lui-même le premier homme apparu à ses habitants. Les anges ne connaissaient pas le mystère auguste et grandiose d’une intronisation céleste de la chair. Ils voyaient avec étonnement et admiration cette ascension du Christ. Presque troublés à ce spectacle inconnu, ils s’écriaient : Quel est celui-là qui arrive d’Édom (Is 63,1), c’est-à-dire de la terre? Mais l’Esprit ne permit pas que la milice céleste demeurât dans l’ignorance de cette disposition admirable de la sagesse de Dieu le Père. Il ordonna qu’on ouvrît les portes devant le Roi et Seigneur de l’univers: Princes, ouvrez vos portes, portes éternelles: qu’il entre, le roi de gloire (ps 23,7 LXX) !

Donc, notre Seigneur Jésus Christ inaugura pour nous cette voie nouvelle et vivante : comme dit saint Paul, il n’est pas entré dans un sanctuaire construit par les hommes, mais dans le ciel lui-même, afin de se tenir maintenant pour nous devant la face de Dieu (He 9,24).

En effet, le Christ n’est pas monté pour se faire voir de Dieu son Père, car il était, il est et il sera toujours dans le Père, sous le regard de celui qui l’engendre, et c’est en lui qu’il se réjouit éternellement. Il monte maintenant, d’une façon étrange et insolite pour un homme, lui, le Verbe qui, à l’origine, n’avait pas revêtu l’humanité. S’il l’a fait, c’est pour nous et en notre faveur, afin que, reconnu comme un homme (Ph 2,7), mais avec la puissance du Fils, et entendant avec sa chair ce décret: Siège à ma droite (Ps 109,1), il puisse, établi lui-même comme Fils, transmettre la gloire de la filiation à tout le genre humain.

Car, puisqu’il est devenu homme, c’est comme l’un de nous qu’il siège à la droite du Père, bien qu’il soit supérieur à toute la création et consubstantiel au Père — il est en effet vraiment venu de lui, puisqu’il est Dieu venu de Dieu et lumière venue de la lumière.

Comme homme, il s’est présenté devant le Père en notre faveur, pour nous rendre capables de nous tenir debout devant la face du Père, alors que l’antique péché nous en avait chassés. Comme Fils, il s’est assis pour que nous-mêmes, à cause de lui, nous puissions être appelés fils de Dieu.

Aussi Paul, persuadé de parler au nom du Christ (cf. 2 Co 13,3), enseigne-t-il que tout ce qui a été accordé au Christ est communiqué à l’humanité, puisque Dieu nous a ressuscités avec Jésus Christ et nous a fait asseoir dans les cieux avec lui (Ep 2,6). L’honneur et la gloire de siéger au ciel est propre au Christ, qui est Fils par nature. C’est à lui seul que cela revient et que nous le reconnaissons au sens strict. Il a beau avoir pris notre ressemblance en apparaissant comme un homme: la divinité lui appartient parce qu’il est Dieu, mais il nous transmet mystérieusement le don d’une telle dignité.

Prière

Dieu qui élèves le Christ au-dessus de tout, ouvre-nous à la joie et à l’action de grâce, car l’Ascension de ton Fils est déjà notre victoire : nous sommes les membres de son corps, il nous a précédés dans la gloire auprès de toi, et c’est là que nous vivons en espérance. Par Jésus Christ.

 

7e dimanche de Pâques C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 17,20-26

A l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, les yeux levés au ciel, il priait ainsi : "Je ne prie pas seulement pour ceux qui sont là, mais encore pour ceux qui accueilleront leur parole et croiront en moi."

Homélie

Unis au Christ par l’Esprit

Homélie de saint Cyrille d’Alexandrie († 444)

Commentaire sur l’évangile de Jean, 11, 11 ; PG 74, 553.557-560

Notre Seigneur Jésus Christ ne prie pas seulement pour les douze disciples. Il prie pour tous ceux qui, à toutes les époques, croiront à leur prédication et voudront bien se sanctifier par la foi et se purifier en communiant à l’Esprit Saint. <>

Que tous, ils soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi, pour qu’eux-mêmes soient un en nous (Jn 17,21). <> Le Fils unique est le rayonnement de la substance même de Dieu le Père, et il contient le Père tout entier dans sa propre nature. Il s’est fait chair (Jn 1,14) selon les Écritures, se mêlant en quelque manière à notre nature, par une union et conjonction indicible avec ce corps terrestre. Ainsi sont unies en lui des réalités qui, par nature, sont éloignées au maximum, et il accorde à l’homme de communier et de participer à la nature divine (2 P 1,4). En effet, la communication et l’habitation du Saint-Esprit se sont propagées jusqu’à nous, et elles subsistent en nous, alors qu’elles ont commencé par le Christ.

Devenu semblable à nous en devenant homme (cf. Ph 2,7), on comprend qu’il a été consacré et sanctifié, bien qu’il soit Dieu par nature, en tant qu’il est apparu comme issu du Père. Et lui-même, par son Esprit, sanctifie son temple et toute la création dont il est l’artisan, sur laquelle rejaillit la sanctification.

C’est pourquoi le mystère du Christ est comme le principe et le chemin par lequel nous obtiendrons d’être participants de l’Esprit (He 6,4) et unis à Dieu. Nous sommes tous sanctifiés en lui, de la manière que nous venons de dire. Par sa propre sagesse et par la décision du Père, le Fils a inventé une certaine manière de nous faire progresser dans l’union avec Dieu et entre nous, malgré les différences corporelles et spirituelles qui nous caractérisent.

Dans un seul corps, qui est évidemment le sien, il bénit tous ceux qui croient en lui. Par l’échange sacramentel, il les rend un même corps avec lui (Ep 3,6) et entre eux. Qui donc pourrait diviser, en brisant leur union naturelle, ceux qui, par ce saint corps, ont été amenés à l’unité avec le Christ? Car, si nous avons tous part à un seul pain, la multitude que nous sommes devient un seul corps (1 Co 10,17). Le Christ ne peut être divisé. C’est pourquoi l’Église est appelée le Corps du Christ, et nous, ses membres particuliers, comme le dit saint Paul (Ep 4,30). Car nous sommes tous totalement unis à l’unique Christ par son saint Corps. Lorsque nous prenons dans notre propre corps ce Corps unique et indivisible, c’est à lui plutôt qu’à nous que nos membres appartiennent.

Prière

Entends notre prière, Seigneur: nous croyons que le Sauveur des hommes est auprès de toi dans la gloire ; fais-nous croire aussi qu’il est encore avec nous jusqu’à la fin des temps. Lui qui règne.

 

Pentecôte C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 14,15-16.23b-26

A l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples: "Si vous m’aimez, vous resterez fidèles à mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous."

Homélie

au choix

L’Esprit de vérité

Homélie de Syméon le Nouveau Théologien († 1022)

Discours éthiques , 5, 377-424; SC 129, 106-110.

Quand viendra le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit (Jn 14,26). Et quant à ce que le Christ ne leur a pas dit, c’est l’Esprit Saint qui, en descendant sur les Apôtres, le leur a enseigné. Jésus affirme lui-même: J’aurais encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous n’avez pas la force de les porter. Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous guidera vers la vérité tout entière. En effet, ce qu’il dira ne viendra pas de lui-même : il redira tout ce qu’il aura entendu ; et ce qui va venir, il vous le fera connaître. Il me glorifiera, car il reprendra ce qui vient de moi pour vous le faire connaître (Jn 16,12-13).

Vous savez maintenant d’où vient l’enseignement de ceux qui ont écrit au sujet de ce Jour du Seigneur, de sa manifestation et de ce qui doit advenir aux pécheurs et aux justes. Et de même, pour tout le reste que nous ne voyons pas, eux, éclairés par l’Esprit Saint, l’ont vu en même temps qu’ils écrivaient.

Mais, dites-moi: Qu’est-ce que le Saint-Esprit? Il est Dieu, vrai Dieu, procédant du vrai Dieu, selon la foi que nous confessons. Donc, comme vous voyez, vous l’appelez Dieu conformément à l’enseignement de l’Église. En disant et en pensant qu’il est vrai Dieu, procédant du vrai Dieu, vous montrez que ceux qui ont le Saint-Esprit ont Dieu qui demeure toujours avec eux, conformément à la profession de foi, comme le Christ l’a dit aux Apôtres : Si vous m’aimez, vous resterez fidèles à mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous (Jn 14,15-16).

Vous avez donc appris qu’il reste et qu’il demeure pour les siècles sans fin. Les mots : qui sera pour toujours avec vous signifient en effet qu’il sera avec eux éternellement et sans fin, qu’il en sera inséparable dans le siècle futur comme dans le temps présent. Quant au fait que les divins Apôtres et tous ceux qui ont été dignes de recevoir le Saint-Esprit le voyaient, écoutez ce qui suit : L’Esprit de vérité, le monde est incapable de le recevoir, parce qu’il ne le voit pas et ne le connaît pas; mais vous, vous le connaissez, parce qu’il demeure auprès de vous (Jn 14,17). Et pour que vous sachiez qu’il sera vu aussi par ceux qui aiment le Christ et gardent ses commandements, écoutez le Seigneur lui-même qui dit : Celui qui a reçu mes commandements et y reste fidèle, c’est celui-là qui m’aime ; et celui qui m’aime sera aimé de mon Père ; moi aussi je l’aimerai, et je me manifesterai à lui (Jn 14,21).

Que tous les chrétiens le sachent donc, car le Christ ne ment pas, il est le Dieu de vérité. A ceux qui lui montrent de l’amour en gardant ses commandements, selon la profession de foi, il se manifeste, comme il l’a dit lui-même. Par sa manifestation il leur donne l’Esprit Saint en personne, et, de plus, par l’Esprit Saint, lui-même et le Père demeurent avec eux inséparablement.

ou bien

L’alliance du cinquantième jour

Sermon de saint Léon le Grand († 461)

Sermon 15, 1-3; CCL 138 A, 465-467.

La solennité de ce jour, mes bien-aimés, doit être vénérée parmi les fêtes principales, tous les cœurs catholiques le savent. Nous devons assurément le plus grand respect à ce jour que l’Esprit Saint a consacré par le prodige suprême du don de lui-même.

Ce jour est en effet le dixième après celui où le Seigneur a dépassé toute la hauteur des cieux pour s’asseoir à la droite de Dieu son Père. Il est le cinquantième jour à briller pour nous depuis sa résurrection, en Jésus par qui le jour a commencé. Ce jour contient en lui-même de grands mystères, ceux de l’économie ancienne et ceux de la nouvelle. Il y est en effet clairement montré que la grâce avait été annoncée d’avance par la Loi, et que la Loi a été accomplie par la grâce.

En effet, c’est cinquante jours après l’immolation de l’agneau que jadis le peuple hébreu, libéré des Égyptiens, reçut la Loi sur la montagne du Sinaï. De même, le cinquantième jour après la passion du Christ, qui fut l’immolation du véritable agneau de Dieu, cinquante jours après sa résurrection, l’Esprit Saint fondit sur les Apôtres et sur le peuple des croyants. Le chrétien attentif reconnaîtra donc facilement que les débuts de l’Ancien Testament étaient au service des débuts de l’Évangile, et que la seconde alliance fut constituée par le même Esprit qui avait fondé la première.

Car, au témoignage de l’histoire apostolique, quand arriva la Pentecôte, Us se trouvaient tous réunis ensemble. Soudain il vint du ciel un bruit pareil à celui d’un violent coup de vent : toute la maison où ils se trouvaient en fut remplie. Ils virent apparaître comme une sorte de feu qui se partageait en langues et qui se posa sur chacun d’eux. Alors ils furent tous remplis de l’Esprit Saint. Ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit (Ac 2,1-4).

Comme elle est rapide, cette parole de sagesse, et lorsque Dieu est le maître, comme on apprend vite ce qu’il enseigne! On n’a pas eu besoin de traduction pour comprendre, d’exercice pour pratiquer, ni de temps pour étudier. Mais, l’Esprit de vérité soufflant où il veut (Jn 3,8), les mots qui étaient propres à chacune des nations devinrent communs à tous dans la bouche de l’Église.

A partir de ce jour, la trompette de la prédication évangélique se mit à retentir. Dès ce moment, les ondées de charismes, les flots de bénédictions arrosèrent tout désert et toute terre aride parce que, pour renouveler la face de la terre (Ps 103,30), l’Esprit de Dieu était porté sur les eaux (Gn 1,2). Pour chasser les anciennes ténèbres, une lumière nouvelle jetait des éclairs. De l’éclat des lampes étincelantes naissaient et le Verbe du Seigneur qui illumine, et la parole enflammée qui, pour créer l’intelligence et consumer le péché, a le pouvoir d’illuminer et la force de brûler.

Prière

Aujourd’hui, Seigneur, par le mystère de la Pentecôte, tu sanctifies ton Église chez tous les peuples et dans toutes les nations ; répands les dons du Saint-Esprit sur l’immensité du monde, et continue dans les cœurs des croyants l’œuvre d’amour que tu as entreprise au début de la prédication évangélique. Par Jésus Christ.

Solennités du temps ordinaire C

 

La Sainte Trinité C

Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 16,12-15

A l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : "J’aurais encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous n’avez pas la force de les porter. Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous guidera vers la vérité tout entière."

Homélie

L’Esprit vient du Père par le Fils

Homélie de saint Hilaire († 367)

Sur la Trinité, 12, 55-56, PL 10, 469-472

Selon saint Paul, ton Esprit Saint, mon Seigneur et mon Dieu, scrute et connaît tes profondeurs (cf. 1 Co 2,10). Quand il intercède pour moi, il te parle à ma place par des cris inexprimables (cf. Rm 8,26). Rien, en dehors de toi, ne scrute ton mystère. Rien qui soit étranger ou extérieur n’est assez puissant pour mesurer la profondeur de ton infinie majesté. Tout ce qui pénètre en toi est de toi ; rien de ce qui est étranger à toi n’a le pouvoir de te scruter.

Que ton Esprit Saint vienne de toi par ton Fils unique, je ne le perçois pas sensiblement, mais j’en ai la conviction. Car, dans le domaine spirituel qui est le tien, mon esprit est obtus, comme l’assure ton Fils unique: Ne sois pas étonné si je t’ai dit qu’il vous faut renaître. Car le vent souffle où il veut: tu entends le bruit qu’il fait mais tu ne sais pas d’où il vient ni où il va. Il en est ainsi de tout homme qui est né de l’eau et de l’Esprit (Jn 3,7-8).

Je crois en ma nouvelle naissance sans la comprendre, et je suis déjà certain de vérités qui m’échappent. Sans que je comprenne comment, je renais, et ma nouvelle naissance s’accomplit réellement. Rien n’empêche l’Esprit de parler quand il veut et là où il veut. Le motif de sa venue et de son départ nous reste inconnu, même si j’ai la conviction de sa présence.

Jean, ton Apôtre, nous enseigne que tout a été fait par ton Fils qui était auprès de toi au commencement, qui est Dieu et Verbe de Dieu (cf. Jn 1,1-3). Et saint Paul énumère tout ce qui a été créé en lui, au ciel et sur la terre, êtres visibles et puissances invisibles ; il souligne que tout a été créé dans le Christ et par le Christ (cf. Col 1,16-17). Quant à l’Esprit Saint, il a jugé suffisant d’affirmer qu’il est ton Esprit.

Pour moi, je penserai comme ces deux hommes (Jean et Paul) que tu as choisis, et avec eux, je ne dirai rien sur ton Fils unique qui dépasse les capacités de mon intelligence: je me contenterai de dire qu’il est né. De même, avec eux, je ne dirai rien de ton Esprit Saint qui dépasse les ressources naturelles de l’homme: je déclarerai seulement qu’il est ton Esprit. Je ne veux pas d’une vaine querelle de mots : je m’en tiens à professer fermement une foi inébranlable.

Je t’en prie, mon Dieu, conserve intacte la ferveur de ma foi, et, jusqu’à mon dernier soupir, donne-moi d’exprimer ce qui est ma conviction, de garder toujours ce que j’ai professé dans le Symbole lors de ma nouvelle naissance, quand j’ai été baptisé dans le Père, le Fils et l’Esprit Saint. Accorde-moi de t’adorer, toi notre Père, et ton Fils qui ne fait qu’un avec toi; fais que je reçoive ton Esprit Saint, qui procède de toi par ton Fils unique.

J’ai, en faveur de ma foi, un témoin autorisé, celui qui déclare : Père, tout ce qui est à moi est à toi, et tout ce qui est à toi est à moi (Jn 17,10). Ce témoin, c’est mon Seigneur Jésus Christ, lui qui demeure en toi, lui qui vient et qui est toujours auprès de toi, étant toujours Dieu, pour les siècles des siècles. Amen.

Prière

Dieu notre Père, tu as envoyé dans le monde ta Parole de vérité et ton Esprit de sainteté pour révéler aux hommes ton admirable mystère ; donne-nous de professer la vraie foi en reconnaissant la gloire de l’éternelle Trinité, en adorant son Unité toute-puissante. Par Jésus Christ.

 

Le Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 9,11b-17

Jésus parlait du Règne de Dieu à la foule, et il guérissait ceux qui en avaient besoin.

Homélie

S’approcher de l’eucharistie avec respect

Homélie de saint Jean Chrysostome († 407)

Homélies sur la Première lettre aux Corinthiens, 24, 4; PO 61, 204-205.

Le Christ, pour nous attirer à l’aimer davantage, nous a donné sa chair en nourriture. Allons donc à lui avec beaucoup d’amour et de ferveur, afin de ne pas nous exposer au châtiment. Dans la mesure où nous avons reçu de plus grands bienfaits, nous serons punis plus durement, parce que nous nous serons montrés indignes de tant de bonté.

Ce corps, les mages l’ont adoré quand il était couché dans une mangeoire. Ces païens, ces étrangers, quittèrent leur patrie et leur maison, entreprirent un long voyage pour l’adorer avec crainte et tremblement. Imitons au moins ces étrangers, nous qui sommes citoyens des cieux. Car ceux-là, voyant l’enfant, le Christ, dans une mangeoire, sous un pauvre toit, ne voyant rien de ce que vous voyez, s’avancèrent avec un très grand respect.

Vous-mêmes, vous ne le voyez plus dans une mangeoire, mais sur l’autel. Vous ne voyez plus une femme qui le tient dans ses bras, mais le prêtre qui l’offre, et l’Esprit de Dieu, avec toute sa générosité, plane au-dessus des offrandes. Non seulement vous voyez le même corps que voyaient les mages, mais en outre vous connaissez sa puissance et sa sagesse, et vous n’ignorez rien de ce qu’il a accompli, après toute l’initiation aux mystères qui vous a été donnée avec exactitude. Réveillons-nous donc, et réveillons en nous la crainte de Dieu. Montrons beaucoup plus de piété que ces étrangers, afin de ne pas avancer n’importe comment vers l’autel et de ne pas attirer le feu sur nos têtes.

Je ne dis pas cela pour vous détourner d’avancer vers l’autel, mais pour vous empêcher de le faire inconsciemment. Car, de même qu’il est dangereux d’avancer n’importe comment, de même ne pas communier au repas sacramentel, c’est se condamner à la famine et à la mort. Cette table fortifie notre âme, rassemble notre pensée, soutient notre assurance; elle est notre espérance, notre salut, notre lumière, notre vie. Si nous quittons la terre après ce sacrifice, nous entrerons avec une parfaite assurance dans les parvis sacrés, comme si nous étions protégés de tous côtés par une armure d’or.

Mais pourquoi parler du futur? Dès ce monde, le sacrement transforme la terre en ciel. Ouvrez donc les portes du ciel, ou plutôt les portes des cieux les plus sublimes, et alors vous verrez ce que je viens de dire. Ce qu’il y a de plus précieux au ciel, je vous le montrerai sur la terre. Ce que je vous montre, ce n’est ni les anges, ni les archanges, ni les cieux des cieux, mais celui qui est leur maître. Vous voyez ainsi d’une certaine façon sur la terre ce qu’il y a de plus précieux. Et non seulement vous le voyez, mais vous le touchez, mais vous le mangez et vous l’emportez chez vous. Purifiez donc votre âme, préparez votre esprit à la réception de ces mystères.

Prière

Seigneur Jésus Christ, dans cet admirable sacrement, tu nous as laissé le mémorial de ta passion ; donne-nous de vénérer d’un si grand amour le mystère de ton corps et de ton sang, que nous puissions recueillir sans cesse le fruit de ta rédemption. Toi qui règnes.

 

Le Sacré-Cœur de Jésus C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 15,3-7

Jésus disait cette parabole: "Si l’un de vous a cent brebis et en perd une, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il la retrouve?"

Homélie

au choix

Viens chercher la brebis perdue

Homélie de saint Ambroise († 497)

Commentaire du psaume 118, 22, 3.27-30; CSEL 62, 489.502-504.

Le Seigneur Jésus lui-même, dans son Évangile, a déclaré que le berger avait abandonné quatre-vingt-dix-neuf brebis pour chercher la seule qui se soit perdue. La brebis dont on signale le vagabondage est donc la centième. La perfection et la plénitude signifiée par ce chiffre est instructive. Ce n’est pas sans raison que cette brebis est préférée aux autres, parce qu’il est plus difficile de se détourner du vice que de l’avoir presque entièrement ignoré. En effet, quand des âmes sont imprégnées par des vices, leur guérison, leur délivrance de la tyrannie des convoitises, exige non seulement une vertu accomplie, mais encore une grâce céleste. Se corriger dans l’avenir demande une vigilance humaine, mais pardonner les péchés passés est réservé à la puissance divine.

Quand le berger a enfin trouvé sa brebis, il la prend sur ses épaules. Vous reconnaissez là le mystère : comment la brebis épuisée retrouve ses forces. La nature humaine, quand elle est épuisée, ne peut se rétablir que par le sacrement de la passion du Seigneur et du sang de Jésus Christ, car l’insigne du pouvoir est sur ses épaules (Is 9,6). C’est sur la croix, en effet, qu’il a porté nos faiblesses, afin d’y anéantir tous nos péchés. Les anges ont raison de se réjouir, parce que celui qui s’était égaré désormais ne s’égare plus, il a oublié maintenant son égarement. <)

Je m’égare, brebis perdue : viens chercher ton serviteur. Je n’oublie pas tes volontés (Ps 118,176). <> Viens chercher ton serviteur, parce que le berger doit rechercher la brebis égarée pour la préserver de la mort. <> Celui qui s’est égaré peut être ramené sur la route.

Viens donc, Seigneur Jésus, chercher ton serviteur, viens chercher ta brebis épuisée. Viens, berger, à la recherche de tes brebis, comme Joseph. Ta brebis s’est égarée, pendant que tu tardais en demeurant dans la montagne. Laisse là les quatre-vingt-dix-neuf brebis et va chercher la seule qui se soit égarée. <> Viens, non avec le bâton, mais avec charité, et dans un esprit de douceur. <>

Cherche-moi, parce que je te recherche. Cherche-moi, accueille-moi, porte-moi. Tu peux trouver celui que tu recherches; daigne l’accueillir quand tu le trouveras; quand tu l’auras accueilli, mets-le sur tes épaules. Tu ne peux pas trouver fastidieuse cette œuvre de bonté ; tu ne peux pas trouver trop pesant le fardeau de la justice. Viens donc, Seigneur, car, si je me suis égaré, cependant je n’oublie pas tes volontés, je garde l’espérance de guérir. Viens, Seigneur, parce que tu es le seul qui puisse ramener la brebis errante. Et ceux que tu abandonneras ne seront pas attristés, car eux aussi se réjouiront de voir le retour des pécheurs. Viens, pour apporter sur la terre le salut, et dans le ciel la joie.

Viens donc, et maintenant ne cherche pas ta brebis par de pauvres serviteurs ni par des mercenaires, mais par toi-même. Accueille-moi, dans cette chair qui est tombée en la personne d’Adam. Accueille-moi comme un fils, non de Sara, mais de Marie, la vierge très pure, la vierge préservée par la grâce de toute souillure du péché. Porte-moi sur la croix salutaire aux égarés, seule capable de rendre des forces à ceux qui sont fatigués, et qui seule donne la vie à ceux qui meurent.

ou bien

Le Christ montre combien Dieu nous aime

Homélie de saint Augustin († 430)

De catechizandis rudibus, 1,7-8, PL 40, 314-315.

Quel est le motif le plus puissant de la venue du Seigneur? N’est-ce pas afin que Dieu montre son amour pour nous de la façon la plus convaincante? Car le Christ est mort pour nous, alors que nous étions encore ses ennemis (Rm 5,6-9). Et il en est ainsi, parce que la chanté est le but du précepte (1 Tm 1,5) et l’accomplissement parfait de la Loi (Rm 13,10). Parce que nous devons nous aimer les uns les autres (1 Jn 4,7) et que, comme lui-même a donné sa vie pour nous, nous devons, nous aussi, donner notre vie pour nos frères (1 Jn 3,16). Quant à Dieu lui-même, parce qu’il nous a aimés le premier (1 Jn 4,10) et qu’il n’a pas refusé son Fils unique, mais qu’il l’a livré pour nous tous (Rm 8,32), si autrefois il nous en coûtait de l’aimer, maintenant du moins devons-nous chercher à lui rendre son amour.

Car rien n’invite davantage à l’amour que d’aimer le premier. Et c’est avoir un cœur trop dur que refuser non seulement de donner l’amour, mais de le rendre. Donc, si le cœur qui sommeillait se réveille lorsqu’il se sent aimé, et si le cœur qui brûlait déjà s’enflamme davantage en découvrant qu’il est aimé de retour, il est évident qu’il n’y a rien de plus puissant pour susciter ou pour accroître l’amour que de se découvrir aimé quand on n’aimait pas encore, ou d’espérer qu’on pourra être aimé en retour, ou de l’éprouver enfin, quand on aimait le premier. <>

Bien que les supérieurs désirent être aimés par leurs inférieurs et prennent plaisir à leurs services empressés, et bien qu’ils les aiment d’autant plus qu’ils constatent ce dévouement, il vaut la peine de remarquer de quel amour s’enflamme un inférieur quand il se sent aimé par son supérieur. En effet, l’amour nous touche bien davantage quand il n’exprime pas le dessèchement de l’indigence, mais le ruissellement d’une bienfaisance généreuse. Dans le premier cas, il naît de la misère; dans le second, de la miséricorde.

En outre, si l’inférieur désespérait jusque-là de pouvoir seulement être aimé par son supérieur, il sera porté à l’aimer au-delà de toute expression si le supérieur, spontanément, a daigné montrer combien il l’aime, alors que cet inférieur n’aurait jamais osé se promettre un tel bonheur.

Qu’y a-t-il de plus élevé que Dieu dans son jugement, et de plus désespéré que l’homme dans son péché? Car cet homme s’était livré aux puissances d’orgueil, qui ne peuvent faire son bonheur, pour qu’elles le protègent et l’asservissent; et cela d’autant plus qu’il avait désespéré davantage de pouvoir intéresser la puissance qui veut s’élever non par le mal, mais par le bien.

Donc le Christ est venu surtout pour que l’homme sache que Dieu l’aime, et pour lui apprendre qu’il doit s’enflammer d’amour pour celui qui l’a aimé le premier. Et aussi pour qu’il aime son prochain comme le lui a ordonné et montré celui qui, en nous aimant, s’est fait notre prochain, alors que nous nous étions égarés au loin.

Prière

Seigneur notre Père, en vénérant le Cœur de ton Fils bien-aimé, nous disons les merveilles de ton amour pour nous ; fais que nous recevions de cette source divine une grâce plus abondante. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur notre Dieu, dans le Cœur de ton Fils meurtri par nos péchés, tu nous prodigues les trésors infinis de ton amour; permets qu’en lui rendant l’hommage de notre piété, nous lui rendions aussi les devoirs d’une juste réparation. Lui qui règne.

Temps ordinaire C

 

2e dimanche du temps ordinaire C

Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 2,1-11

Il y avait un mariage à Cana en Galilée. La mère de Jésus était là. Jésus aussi avait été invité au repas de noces avec ses disciples.

Homélie

Le vin nouveau de la vraie joie

Homélie attribuée à saint Maxime de Turin († vers 415)

Homélie 23 : PL 57. 274-276

Le Fils de Dieu est donc allé aux noces pour sanctifier par sa présence bénie le mariage qu’il avait institué par une décision souveraine. Il est allé à des noces célébrées selon l’ancienne coutume, en vue de se choisir dans la société des païens une épouse qui resterait toujours vierge. Lui qui n’est pas né d’un mariage humain est allé aux noces. Il y est allé non point pour prendre part à un joyeux banquet, mais pour se révéler par un exploit vraiment admirable. Il est allé aux noces non pour boire des coupes de vin, mais pour en donner. Car, dès que les invités manquèrent de vin, la bienheureuse Marie lui dit: Ils n’ont pas de vin. Jésus apparemment contrarié lui répondit: Femme, que me veux-tu (Jn 2,3-4)?

De telles paroles sont, sans aucun doute, le signe d’un mécontentement. Elles s’expliquent pourtant, à mon avis, par le fait que la mère lui avait signalé d’une manière inattendue qu’on manquait d’une boisson matérielle, alors qu’il était venu offrir aux peuples de la terre entière le calice nouveau de l’éternel salut. En répondant: Mon heure n’est pas encore venue (Jn 2,4), il prophétisait certainement l’heure très glorieuse de sa passion, ou bien le vin de notre rédemption qui procurerait la vie à tous. Car Marie demandait une faveur temporelle, tandis que le Christ préparait une joie éternelle.

Le Seigneur très bon n’a toutefois pas hésité à accorder cette grâce moindre, alors que de grandes grâces étaient attendues. La bienheureuse Marie, parce qu’elle était véritablement la mère du Seigneur, voyait par la pensée ce qui allait arriver et connaissait d’avance la volonté du Seigneur. Aussi prit-elle bien soin d’avertir les serviteurs par ces mots : Faites tout ce qu’il vous dira (Jn 2,5). Sa sainte mère savait assurément que la parole de reproche tombée de la bouche de son fils, le Seigneur, ne cachait pas le ressentiment d’un homme en colère, mais contenait une mystérieuse compassion.

Alors, pour rassurer sa mère déconcertée par cette réprimande, le Seigneur révéla aussitôt son pouvoir souverain. Il dit aux serviteurs qui attendaient: Remplissez d’eau les cuves (Jn 2,7). Les serviteurs, dociles, s’empressèrent d’obéir. Et voici que d’une manière soudaine et merveilleuse, ces eaux commencèrent à recevoir de la force, à prendre de la couleur, à répandre une bonne odeur, à acquérir du goût, et en même temps à changer entièrement de nature. Et cette transformation des eaux en une autre substance a manifesté la présence de la puissance créatrice. Personne, en vérité, hormis celui qui a créé l’eau de rien, ne peut la transformer en une substance destinée à d’autres usages. <>

Il n’y a aucun doute, mes bien-aimés, que celui-là même qui a changé l’eau en vin, lui a donné aussi, à l’origine, la consistance de la neige et la dureté de la glace. Il l’a changée en sang pour les Égyptiens. Pour étancher la soif des Hébreux, il lui a ordonné de couler d’un dur rocher, dont il a fait jaillir, comme du sein d’une mère, une source nouvelle qui a fait vivre une multitude innombrable de, peuples. <>

Tel fut, dit l’Écriture, le commencement des signes que Jésus accomplit. C’était à Cana en Galilée. Il manifesta sa gloire, et ses disciples crurent en lui (Jn 2,11). La foi des disciples ne s’appliquait pas du tout à ce qui s’accomplissait sous leurs yeux, mais à ce que les yeux du corps ne peuvent voir. Ils ont cru, non que Jésus Christ était le fils d’une vierge, car ils le savaient, mais qu’il était aussi le Fils unique du Très-Haut, ce dont le miracle leur fournissait la preuve.

Voilà pourquoi, mes frères, nous devons croire, nous aussi, de tout notre cœur, que celui-là même que nous appelons le fils de l’homme, est également le Fils de Dieu. Puisqu’il était présent aux noces en tant qu’homme, et qu’il a changé l’eau en vin en tant que Dieu, croyons que non seulement il partage notre nature, mais aussi qu’il est par nature égal au Père, afin que notre Seigneur, dans sa bonté, veuille nous donner à boire, en raison de cette foi, le vin très pur de sa grâce.

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, qui régis l’univers du ciel et de la terre : exauce, en ta bonté, les prières de ton peuple et fais à notre temps la grâce de la paix. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur notre Dieu, ton Fils a fait couler le vin pour la fête car, comme toi, il aime les hommes et ce qui les réjouit. Aide-nous à vivre les réalités quotidiennes en rendant grâce pour la joie que tu nous donnes et en cherchant toujours ta gloire. Par Jésus Christ.

 

3e dimanche du temps ordinaire C

Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 1,1-4; 4,14-21

Lorsque Jésus, avec la puissance de l’Esprit, revint en Galilée, sa renommée se répandit dans toute la région. Il enseignait dans les synagogues des Juifs, et tout le monde faisait son éloge.

Homélie

Jésus nous parle aujourd’hui

Homélie d’Origène († 253)

Homélie 32, 1-3.6, GCS 9, 193-195.

Quand vous lisez : Il enseignait dans leurs synagogues, et tout le monde faisait son éloge, gardez-vous de n’estimer heureux que ces gens-là, et de vous croire privés de son enseignement. Si les Ecritures sont vraies, le Seigneur n’a pas seulement parlé en ce temps-là, dans les assemblées juives, mais il parle également aujourd’hui dans notre assemblée. Et Jésus enseigne non seulement dans la nôtre, mais dans d’autres encore, et dans le monde entier. Et il cherche des instruments pour répandre ses enseignements. Priez pour qu’il me trouve, moi aussi, disposé et apte à le chanter. <>

Il vint ensuite à Nazareth, où il avait grandi. Comme il en avait l’habitude, il entra dans la synagogue le jour du sabbat, et il se leva pour faire la lecture. On lui présenta le livre du prophète Isaïe. Il ouvrit le livre et trouva le passage où il est écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction (Lc 4,16-18, citant Is 61,1).

Ce n’est pas par hasard, mais par une disposition de la divine Providence que Jésus ouvrit le livre et trouva un passage de l’Écriture qui prophétisait à son sujet. Il est écrit, en effet, qu’un moineau ne tombe pas dans le filet sans la volonté du Père (Mt 10,29), et que les cheveux de la tête des Apôtres sont tous comptés (Lc 12,7). Ne serait-ce pas aussi en vertu de sa providence que le livre d’Isaïe fut choisi plutôt qu’un autre, ainsi que ce passage précis qui parle du mystère du Christ: L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction (Is 61,1)? <>

Après avoir lu ces paroles, Jésus referma le livre, le rendit au servant et s’assit. Tous, dans la synagogue, avaient les yeux fixés sur lui (Lc 4,20). En ce moment aussi, dans notre synagogue, c’est-à-dire dans notre assemblée, vous pouvez, si vous le voulez, fixer les yeux sur le Sauveur. Car, lorsque vous tenez le regard le plus profond de votre cœur attaché à la contemplation de la sagesse, de la vérité et du Fils unique de Dieu, vos yeux sont fixés sur Jésus. Bienheureuse assemblée dont l’Écriture atteste que tous avaient les yeux fixés sur lui! Comme je voudrais que cette assemblée mérite un témoignage semblable, que tous, catéchumènes, fidèles, femmes, hommes et enfants, regardent Jésus avec les yeux non du corps, mais de l’âme ! Lorsque, en effet, vous tournerez vers lui votre regard, sa lumière et sa contemplation rendront vos visages plus lumineux, et vous pourrez dire : Sur nous, Seigneur, la lumière de ton visage a laissé ton empreinte (cf. ps 4,7), toi à qui appartiennent la gloire et la puissance pour les siècles des siècles. Amen (1 P 4,11).

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, dirige notre vie selon ton amour, afin qu’au nom de ton Fils bien-aimé, nous portions des fruits en abondance. Par Jésus Christ.

ou bien

En ta bonté, Seigneur, tu as voulu que la mission du Christ soit Bonne Nouvelle pour les pauvres, lumière pour les aveugles, libération pour les opprimés. Béni sois-tu! Aide-nous à déceler dans l’aujourd’hui de notre vie ta parole qui s’accomplit et ta grâce qui est à l’œuvre. Par Jésus Christ.

 

4e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 4,21-30

Dans la synagogue de Nazareth, après la lecture du livre d’Isaïe, Jésus déclara : "Cette parole de l’Écriture que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit."

Homélie

La bonne nouvelle

Commentaire de saint Cyrille d’Alexandrie († 444) sur le prophète Isaïe

Sur le prophète Isaie, 5, 5, PG 70, 1352 1353

Le Christ a voulu amener à lui le monde entier et conduire à Dieu le Père tous les habitants de la terre. Il a voulu rétablir toutes choses dans un état meilleur et renouveler, pour ainsi dire, la face de la terre. Voilà pourquoi, bien qu’il fût le Seigneur de l’univers, il a pris la condition de serviteur (Ph 2,7). Il a donc annoncé la bonne nouvelle aux pauvres, affirmant qu’il avait été envoyé dans ce but. Les pauvres, ou plutôt les gens que nous pouvons considérer comme pauvres, sont ceux qui souffrent d’être privés de tout bien, ceux qui n’ont pas d’espérance et sont sans Dieu dans le monde (Ép 2,12), comme dit l’Écriture.

Ce sont, nous semble-t-il, les gens venus du paganisme et qui, enrichis de la foi dans le Christ, ont bénéficié de ce divin trésor: la proclamation qui apporte le salut. Par elle, ils sont devenus participants du Royaume des cieux et compagnons des saints, héritiers des réalités que l’homme ne peut comprendre ni exprimer. Ce que, d’après l’Apôtre, l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme, ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment (1 Co 2,9).

A ceux qui ont le cœur brisé <>, le Christ promet la guérison et le pardon des péchés, et il rend aussi la vue aux aveugles. Comment ne seraient-ils pas aveugles, alors qu’ils adorent une créature, qu’ils disent à un morceau de bois : "Tu es mon père ", et à une pierre : "Tu m’a mis au monde" (Jr 2,27) et qu’ils ne reconnaissent pas Celui qui est Dieu véritable et par nature? Leur cœur n’est-il pas privé de la lumière divine et spirituelle? A eux, le Père envoie la lumière de la vraie connaissance de Dieu. Car, appelés par la foi, ils l’ont connu; plus encore, ils ont été connus par lui. Alors qu’ils étaient fils de la nuit et des ténèbres, ils sont devenus enfants de la lumière car le jour les a illuminés, le Soleil de justice s’est levé pour eux, et l’étoile du matin leur est apparue dans tout son éclat.

Rien pourtant ne s’oppose à ce que nous appliquions tout ce que nous venons de dire aux descendants d’Israël. Eux aussi, en effet, avaient le cœur brisé, ils étaient pauvres et comme prisonniers, et remplis de ténèbres. <> Mais le Christ est venu annoncer les bienfaits de son avènement, précisément aux descendants d’Israël avant les autres, et proclamer en même temps l’année de grâce du Seigneur et le jour de la récompense.

L’année de grâce, c’est celle où le Christ a été crucifié pour nous. Car c’est alors que nous sommes devenus agréables à Dieu le Père. Et nous portons du fruit par le Christ, comme lui-même nous l’a enseigné, en disant: Amen, amen, je vous le dis : si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul; mais s’il meurt, il donne un fruit plus abondant (Jn 12,24). Il dit encore: Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes (Jn 12,32). En vérité, il a repris vie le troisième jour, après avoir foulé aux pieds la puissance de la mort. Puis il a dit aux saints disciples : Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit (Mt 28,18-19).

Prière

Accorde-nous, Seigneur, de pouvoir t’adorer sans partage, et d’avoir pour tout homme une vraie charité. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur notre Dieu, ton Fils, venu pour accomplir les Écritures, a été rejeté par les siens. Ouvre nos cœurs à sa parole, même lorsqu’elle nous déconcerte. N’est-il pas le prophète, celui qui parle en ton nom et nous apporte ton message de grâce? Lui qui règne.

 

5e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 5,1-11

Un jour, Jésus se trouvait sur le bord du lac de Génésareth : la foule se pressait autour de lui pour écouter la parole de Dieu. Il vit deux barques amarrées au bord du lac ; les pêcheurs en étaient descendus et lavaient leurs filets. Jésus monta dans une des barques, qui appartenait à Simon.

Homélie

Pierre, simple pêcheur, apôtre du Christ

Homélie de saint Augustin († 430)

Sermon 43, 5-6, CCL41, 510-511

Tandis que le bienheureux apôtre Pierre se trouvait sur la montagne avec le Seigneur et deux autres disciples du Christ, Jacques et Jean, il entendit une voix venant du ciel. Elle disait: Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis tout mon amour, écoutez-le (Mt 17,5). Le même apôtre a évoqué ce souvenir quand il a dit: Cette voix venant du ciel, nous l’avons entendue nous-mêmes quand nous étions avec lui sur la montagne sainte. Et il a ajouté : Ainsi se confirme pour nous la parole des prophètes (2 P 1,18-19). Cette voix céleste a retenti, et la parole des prophètes a été confirmée. <>

Qu’elle est grande la bonté du Christ ! Celui dont nous venons de rapporter les paroles, c’est Pierre, qui fut pêcheur, et maintenant un orateur mérite un grand éloge s’il est capable de comprendre ce pêcheur. Voilà pourquoi l’apôtre Paul s’adresse aux premiers chrétiens en ces termes ; Frères, vous qui avez été appelés par Dieu, regardez bien: parmi vous, il n’y a pas beaucoup de sages aux yeux des hommes, ni de gens puissants ou de haute naissance. Au contraire, ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour couvrir de confusion ce qui est fort. Ce qu’il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour couvrir de confusion les sages. Ce qui est d’origine modeste, méprisé dans le monde, ce qui n’est rien, voilà ce que Dieu a choisi pour détruire ce qui est quelque chose (1 Co 1,26-27).

Car si le Christ avait choisi en premier lieu un orateur, l’orateur aurait pu dire: "J’ai été choisi pour mon éloquence". S’il avait choisi un sénateur, le sénateur aurait pu dire: "J’ai été choisi à cause de mon rang". Enfin, s’il avait choisi un empereur, l’empereur aurait pu dire: "J’ai été choisi en raison de mon pouvoir". Que ces gens-là se taisent, qu’ils attendent un peu, qu’ils se tiennent tranquilles. Il ne faut pas les oublier ni les rejeter, mais les faire attendre un peu; ils pourront alors se glorifier de ce qu’ils sont en eux-mêmes.

"Donne-moi, dit le Christ, ce pêcheur, donne-moi cet homme simple et sans instruction, donne-moi celui avec qui le sénateur ne daigne pas parler, même quand il lui achète un poisson. Oui, donne-moi cet homme. Certes, j’accomplirai aussi mon œuvre dans le sénateur, l’orateur et l’empereur. Un jour viendra où j’agirai aussi dans le sénateur, mais mon action sera plus évidente dans le pêcheur. Le sénateur, l’orateur et l’empereur peuvent se glorifier de ce qu’ils sont: le pêcheur, uniquement du Christ. Que le pêcheur vienne leur enseigner l’humilité qui procure le salut. Que le pêcheur passe en premier. C’est par lui que l’empereur sera plus aisément attiré."

Songez donc à ce pêcheur saint, juste, bon et rempli du Christ, qui a reçu la charge de prendre ce peuple et tous les autres en jetant son filet jusqu’au bout du monde. Rappelez-vous donc qu’il a dit: Ainsi se confirme pour nous la parole des prophètes (2 P 1,19).

Prière

Dans ton amour inlassable, Seigneur, veille sur ta famille; et puisque ta grâce est notre unique espoir, garde-nous sous ta constante protection. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu très bon, quand tu appelles les hommes à collaborer à ton œuvre, tu leur donnes des signes merveilleux: le filet s’est rempli de poissons et Simon-Pierre est devenu pêcheur d’hommes. Accorde-nous aujourd’hui des signes de ta présence. Alors, laissant tout, nous marcherons à la suite du Christ et nous proclamerons sa Bonne Nouvelle. Lui qui règne.

 

6e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 6,17.20-26

Jésus descendit de la montagne avec les douze Apôtres et s’arrêta dans la plaine. Il y avait là un grand nombre de ses disciples, et une foule de gens venus de toute la Judée, de Jérusalem, et du littoral de Tyr et de Sidon. Regardant alors ses disciples, Jésus leur dit: "Heureux, vous les pauvres : le royaume de Dieu est à vous ! "

Homélie

Un autre regard sur l’épreuve

Homélie de saint Jean Chrysostome († 407) sur la Deuxième lettre aux Corinthiens

Homélies sur la Deuxième lettre aux Corinthiens, 12, 4; PO 61, 486-487.

Seuls les chrétiens estiment les choses à leur vraie valeur, et ils n’ont pas les mêmes motifs de se réjouir et de s’attrister que le reste des hommes. A la vue d’un athlète blessé, portant sur la tête la couronne du vainqueur, celui qui n’a jamais pratiqué aucun sport considère seulement les blessures qui font souffrir cet homme. Il n’imagine pas le bonheur que lui procure sa couronne.

Ainsi font les gens dont nous parlons. Ils savent que nous subissons des épreuves, mais ignorent pourquoi nous les supportons. Ils ne considèrent que nos souffrances ! Ils voient les luttes dans lesquelles nous sommes engagés et les dangers qui nous menacent. Mais les récompenses et les couronnes leur restent cachées, non moins que la raison de nos combats.

Que voulait dire Paul en affirmant: On nous croit démunis de tout, et nous possédons tout (2 Co 6,10)? Il entendait par là les biens terrestres et spirituels. Lorsque les villes le recevaient comme un ange, que les gens se seraient fait arracher les yeux pour les lui donner et qu’ils se seraient laissé couper la tête pour lui, n’avait-il pas toutes leurs richesses à sa disposition?

Et si tu veux considérer les biens spirituels, tu reconnaîtras qu’il les possédait aussi en abondance. Aimé du Roi de l’univers, du Maître des anges, au point de partager ses secrets, il était le plus riche de tous, et tout lui appartenait. Aucun démon n’était capable de résister à son autorité, aucune souffrance ni maladie ne pouvait lui imposer sa loi.

Pour ce qui nous regarde, quand nous sommes soumis à l’épreuve à cause du Christ, supportons-la vaillamment, bien plus, avec joie. Si nous jeûnons, bondissons de joie comme si nous étions dans les délices. Si l’on nous outrage, dansons allègrement comme si nous étions comblés d’éloges. Si nous subissons un dommage, considérons-le comme un gain. Si nous donnons au pauvre, persuadons-nous que nous recevons. Celui qui ne donne pas de cette manière, ne donne pas de bon cœur.

Aussi bien, quand tu veux faire un don à quelqu’un, ne considère pas seulement ce que cela te coûte. Songe plutôt que tu en retires un profit plus important, car ceci l’emporte sur cela. En faisant l’aumône, comme en pratiquant n’importe quelle vertu, pense à la douceur de la récompense, plutôt qu’à la dureté du sacrifice.

Avant tout, rappelle-toi que tu combats pour le Seigneur Jésus. Alors tu entreras de bon cœur dans la lutte et tu vivras toujours dans la joie, car rien ne nous rend si heureux qu’une bonne conscience.

Prière

Dieu qui veux habiter les cœurs droits et sincères, donne-nous de vivre selon ta grâce; alors tu pourras venir en nous pour y faire ta demeure. Par Jésus Christ.

ou bien

Nombreux sont les hommes qui, maintenant, pleurent ou ont faim, nombreux sont les pauvres, nombreux les malaimés. Dieu notre Père, fais jaillir, au cœur même de leur détresse, une étincelle de ta joie, et suscite parmi tes disciples des hommes généreux qui sachent leur venir en aide. Par Jésus Christ.

 

7e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 6,27-38

Jésus déclarait à la foule: "Je vous le dis, à vous qui m’écoutez: Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent."

Homélie

Agir dans l’amour et la vérité

Homélie de saint Augustin († 430) sur le psaume 60

Homélies sur les psaumes, Ps 60, 9; CCL 39, 771.

Toutes les voies du Seigneur sont amour et vérité pour qui veille à son alliance et à ses lois (Ps 24,10). Ce que le psaume dit de l’amour et de la vérité est de première importance. <> Il parle de l’amour, car Dieu ne regarde pas nos mérites mais sa bonté, en vue de nous pardonner nos péchés et de nous promettre la vie éternelle. Il parle aussi de la vérité, parce que Dieu ne manque jamais de tenir ses promesses.

Conformons-nous donc à ce divin modèle et imitons Dieu qui nous a manifesté son amour et sa vérité : son amour en nous remettant nos péchés, sa vérité en réalisant ses promesses. Comme lui, accomplissons en ce monde des œuvres pleines d’amour et de vérité. Soyons bons envers les malades, les pauvres et même envers nos ennemis.

Vivons dans la vérité en évitant de faire le mal. Ne multiplions pas les péchés, car celui qui présume de la bonté de Dieu, laisse s’introduire en lui la volonté de rendre Dieu injuste. Il se figure que, même s’il s’obstine dans ses péchés et refuse de s’en repentir, Dieu viendra quand même lui donner une place parmi ses fidèles serviteurs.

Mais serait-il juste que Dieu te mette à la même place que ceux qui ont renoncé à leurs péchés, alors que tu persévères dans les tiens ? Veux-tu être injuste au point de rendre Dieu injuste? Pourquoi donc veux-tu le plier à ta volonté? Soumets-toi plutôt à la sienne.

Qui donc met en pratique ce que je viens de dire, sinon un petit nombre d’hommes, dont il est dit: Celui qui persévérera jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé (Mt 24,13)? Le psalmiste dit justement à ce propos: Qui recherchera l’amour et la vérité du Seigneur pour sa gloire (Ps 60,8 latin)? Que signifie: pour sa gloire! Il suffisait de dire : Qui recherchera l’amour et la vérité du Seigneur! Pourquoi ajoute-t-il : pour sa gloire! En voici la raison. Beaucoup cherchent à s’instruire de l’amour du Seigneur et de sa vérité dans les Livres saints. Mais une fois qu’ils y sont parvenus, ils vivent pour eux, non pour lui. Ils recherchent leurs propres intérêts, non ceux de Jésus Christ. Ils prêchent l’amour et la vérité et ne les pratiquent pas. Ils les connaissent pourtant, puisqu’ils les prêchent; ils ne pourraient d’ailleurs pas les enseigner sans les connaître.

Quant à celui qui aime Dieu et le Christ, lorsqu’il prêche la vérité et l’amour divins, il les recherche pour Dieu et non dans son propre intérêt. Il ne prêche pas pour en retirer des avantages matériels, mais pour le bien des membres du Christ, c’est-à-dire de ceux qui mettent leur foi en lui. Il leur dispense ses connaissances en esprit de vérité, de sorte que le vivant n’ait plus sa vie centrée sur lui-même, mais sur celui qui est mort pour tous (cf. 2 Co 5,15).

Prière

Accorde-nous, Dieu tout-puissant, de conformer à ta volonté nos paroles et nos actes dans une inlassable recherche des biens spirituels. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur notre Père, quand nous étions tes ennemis, tu as envoyé ton Fils pour réconcilier avec toi toute l’humanité. Accorde-nous, à son exemple, d’aimer ceux qui ne nous aiment pas, de faire du bien à ceux qui nous font du tort et d’être miséricordieux comme tu l’es toi-même. Par Jésus Christ.

 

8e dimanche du temps ordinaire C

Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 6,39-45

Jésus s’adressait à la foule en paraboles: "Un aveugle peut-il guider un autre aveugle? Ne tomberont-ils pas tous deux dans un trou? Le disciple n’est pas au-dessus du maître; mais celui qui est bien formé sera comme son maître."

Homélie

Être lucide à l’égard de soi-même

Homélie de saint Cyrille d’Alexandrie († 444)

Commentaire sur l’évangile de Luc, 6; PG 72, 601-604

Les bienheureux disciples étaient destinés à devenir les guides et les maîtres spirituels de la terre entière. Ils devaient donc faire preuve, plus que les autres, d’une éminente piété, être familiarisés avec la manière de vivre évangélique et entraînés à pratiquer toute œuvre bonne. Ils auraient à transmettre à ceux qu’ils instruiraient la doctrine exacte, salutaire et strictement conforme à la vérité, après l’avoir d’abord contemplée eux-mêmes, et avoir laissé la lumière divine éclairer leur intelligence.

Sans quoi, ils seraient des aveugles conduisant d’autres aveugles. Car ceux qui sont plongés dans les ténèbres de l’ignorance ne peuvent pas conduire à la connaissance de la vérité les hommes souffrant de cette même ignorance. Le voudraient-ils d’ailleurs, qu’ils rouleraient tous ensemble dans l’abîme de leurs passions.

Aussi le Seigneur a-t-il voulu éteindre la passion ostentatoire de la vantardise que l’on trouve chez tant de gens, et les dissuader de rivaliser avec leurs maîtres pour les dépasser en estime. Il leur a dit: Le disciple n’est pas au-dessus de son maître (Lc 6,39). Même s’il arrive à certains d’atteindre un degré de vertu égal à celui de leurs maîtres, ils se conformeront à la modestie dont ceux-ci font preuve, et ils les imiteront. Paul, à son tour, nous en donne la certitude quand il dit: Montrez-vous mes imitateurs, comme je le suis moi-même du Christ (1 Co 11,1).

Eh bien, pourquoi juges-tu, alors que le Maître ne juge pas encore? Car il n’est pas venu juger le monde, mais lui faire grâce. Entendue dans le sens que je viens précisément d’indiquer, la parole du Christ devient: "Si je ne juge pas, ne juge pas non plus, toi qui es mon disciple. Il se peut que tu sois coupable de fautes plus graves que celui que tu juges. Quelle ne sera pas ta honte quand tu en prendras conscience ! "

Le Seigneur nous donne le même enseignement dans une autre parabole où il dit : Qu’as-tu à regarder la paille dans l’œil de ton frère (Lc 6,41)? Il nous convainc par des arguments irréfutables de ne pas vouloir juger les autres, et de scruter plutôt nos cœurs. Ensuite il nous demande de chercher à nous libérer des passions qui y sont installées, en demandant cette grâce à Dieu. C’est lui, en effet, qui guérit ceux qui ont le cœur brisé et nous délivre de nos maladies spirituelles. Car si les péchés qui t’accablent sont plus grands et plus graves que ceux des autres, pourquoi leur fais-tu des reproches sans te soucier des tiens?

Tous ceux qui veulent vivre avec piété, et surtout ceux qui ont charge d’instruire les autres, tireront donc nécessairement profit de ce précepte. S’ils sont vertueux et tempérants, donnant précisément par leurs actions l’exemple de la vie évangélique, ils reprendront avec douceur ceux qui ne se sont pas résolus à agir de même, leur remontrant qu’ils ne prennent pas pour modèles les manières de vivre conformes à la vertu des maîtres.

Prière

Fais que les événements du monde, Seigneur, se déroulent dans la paix, selon ton dessein, et que ton peuple connaisse la joie de te servir sans inquiétude. Par Jésus Christ.

ou bien

Aide-nous, Seigneur, à découvrir la poutre qui est dans notre œil. Alors, lucides envers nous-mêmes, nous pourrons guider nos frères sur le chemin qui mène jusqu’à toi. Par Jésus Christ.

9e dimanche du temps ordinaire C

Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 7,1-10

Lorsque Jésus eut achevé de faire entendre au peuple toutes ses paroles, il entra dans Capharnaüm. Un centurion de l’armée romaine avait un esclave auquel il tenait beaucoup; celui-ci était malade, sur le point de mourir. Le centurion avait entendu parler de Jésus ; alors il lui envoya quelques notables juifs pour le prier de venir sauver son esclave.

Homélie

La foi du centurion

Homélie de saint Augustin († 430)

Sermon 62, 1.3-4, PL 38, 414-416.

Dans l’évangile qui vient d’être lu, nous avons entendu Jésus faire l’éloge de notre foi vécue dans l’humilité. Quand le Seigneur lui eut promis de se rendre chez lui pour y guérir son serviteur, le centurion répondit : Je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri (Mt 8,8). En faisant l’aveu de son indignité, il s’est rendu digne de la visite du Christ dans son cœur plutôt que dans sa demeure.

Ces paroles, si pleines de foi et d’humilité, le centurion ne les aurait pas prononcées s’il n’avait pas déjà accueilli dans son cœur celui qu’il craignait de laisser entrer dans sa maison. D’ailleurs, aurait-il été tellement heureux d’accueillir le Seigneur dans son habitation, sans l’avoir en même temps dans son cœur? Celui qui nous a enseigné l’humilité par sa parole et son exemple est allé manger, il est vrai, chez un pharisien orgueilleux appelé Simon. Le Fils de l’homme s’est bien attablé chez lui, mais il n’a trouvé dans son cœur aucune place où reposer la tête (cf. Lc 7,36). <>

Pourtant, sans entrer dans la maison du centurion, il a pris possession de son cœur. <> A celui qui a dit: Je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, le Seigneur a répondu : Amen, je vous le déclare, je n’ai trouvé une telle foi chez personne en Israël (Mt 8,10), c’est-à-dire dans l’Israël terrestre; cet homme, en effet, appartenait déjà à l’Israël spirituel. Le Seigneur était venu chez les Juifs, l’Israël selon la chair, pour chercher d’abord les brebis perdues de ce peuple, dans lequel et duquel il avait pris corps. Or, il dit lui-même : Je n’y ai pas trouvé une telle foi.

Nous pouvons évaluer la foi des hommes dans la mesure du possible. Mais celui qui voit le fond des cœurs et que personne ne peut tromper, a rendu témoignage aux dispositions intérieures d’un homme qui lui avait manifesté son humilité, et il a prononcé une sentence de guérison.

Comment donc cette confiance est-elle venue au centurion? "Ainsi, dit-il, moi qui suis soumis à une autorité, j’ai des soldats sous mes ordres. Je dis à l’un : ‘Va’, et il va. A un autre ‘Viens’, et il vient, et à mon esclave: ‘Fais ceci’, et il le fait (Mt 8,9). J’exerce un pouvoir sur mes subordonnés et je suis moi-même soumis à une autorité supérieure. Si donc moi, un subordonné, j’ai le pouvoir de donner des ordres, que ne pourras-tu pas faire, toi, de qui dépendent toutes les puissances?"

Cet homme, venu de chez les païens, était centurion. <> Ce soldat de métier réglait sa conduite dans les limites de son pouvoir de centurion. Soumis à une autorité, il exerçait également l’autorité. Il obéissait en tant que subordonné et il commandait à ses subordonnés. Le Seigneur, lui, <> appartenait au peuple juif. Mais il proclamait déjà qu’il enverrait ses Apôtres dans le monde entier pour y établir l’Église. Sans le voir, les païens ont cru en lui, tandis que les Juifs, qui l’avaient vu, l’ont mis à mort.

Le Seigneur n’est donc pas allé chez le centurion, mais il a fortifié sa foi. Sans y entrer, il a fait sentir sa divine présence dans cette maison et lui a apporté la guérison. De la même manière, le Seigneur n’est apparu visiblement que dans le peuple juif. Aucun autre peuple ne l’a vu naître d’une vierge, souffrir, marcher, supporter toutes les vicissitudes de l’existence humaine, ni accomplir des merveilles divines. Il n’a fait aucune de ces choses parmi les autres peuples, et pourtant ce qui avait été prophétisé de lui s’est accompli: Un peuple d’inconnus m’est asservi. Comment était-ce possible, puisque ces hommes ne l’ont pas connu? Au premier mot ils m’obéissent (Ps 17,44-45). C’est le monde entier qui a entendu et qui a cru.

Prière

Seigneur notre Père, nous en appelons à ta providence qui jamais ne se trompe en ses desseins : tout ce qui fait du mal, écarte-le, et donne-nous ce qui peut nous aider. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur notre Dieu, nous nous sommes engagés envers toi depuis longtemps, mais notre foi n’est pas aussi grande que celle du centurion. Malgré notre indignité, entre dans notre cœur et rends plus ferme notre foi, pour qu’elle puisse faire l’admiration de Jésus Christ, notre Seigneur. Lui qui règne.

 

10e dimanche du temps ordinaire C

Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 7,11-17

Jésus se rendait dans une ville appelée Naïm. Ses disciples faisaient route avec lui, ainsi qu’une grande foule. Il arriva près de la porte de la ville au moment où l’on transportait un mort pour l’enterrer; c’était un fils unique, et sa mère était veuve.

Homélie

Il y a mieux que les miracles visibles

Homélie de saint Augustin († 430)

Sermon 98, 1-3; PL 38, 591-592.

Les miracles de notre Seigneur et Sauveur, Jésus Christ, font certainement impression sur tous les croyants qui les entendent raconter. Mais cette impression n’est pas la même pour tous. Les uns s’extasient devant ses miracles matériels, mais n’ont pas l’intelligence d’autres miracles plus grands encore. Les autres s’émerveillent bien davantage de voir s’accomplir aujourd’hui dans les âmes les miracles que le Christ a opérés dans les corps.

Que personne donc, s’il est chrétien, ne doute qu’aujourd’hui encore des morts ressuscitent. Tout homme, il est vrai, a des yeux qui lui permettent de voir un mort ressusciter, comme le fils de la veuve, dont parle l’évangile qui vient d’être lu. Quant à voir ressusciter des hommes morts spirituellement, tous n’en sont pas capables. Seuls le peuvent ceux qui sont déjà eux-mêmes ressuscites spirituellement. Ressusciter quelqu’un pour la vie éternelle est un miracle plus grand que de ressusciter quelqu’un qui est destiné à mourir une seconde fois.

La veuve, mère de ce jeune homme, s’est réjouie de sa résurrection. L’Église, notre mère, se réjouit de voir chaque jour des hommes ressusciter spirituellement. Lui, il était mort de la mort du corps ; eux, de la mort de l’âme. Sa mort visible avait donné lieu à des lamentations publiques, puisque leur mort invisible n’a attiré ni l’attention ni les regards des hommes. Le seul à se soucier d’eux était celui qui les savait morts, et le seul qui les savait morts était celui qui pouvait leur rendre la vie.

Oui, vraiment, si le Seigneur n’était pas venu ressusciter les morts, l’Apôtre n’aurait pas pu dire: Réveille-toi, ô toi qui dors, relève-toi d’entre les morts, et le Christ t’illuminera (Ép 5,14).

Quand tu l’entends dire : Réveille-toi, ô toi qui dors, tu penses que quelqu’un est en train de dormir. Mais les mots suivants: Relève-toi d’entre les morts te font comprendre qu’il s’agit bien d’un mort. Des morts visibles aussi, on dit souvent qu’ils dorment. De toute évidence, ils dorment tous pour celui qui a le pouvoir de les réveiller.

Pour toi, un mort est réellement mort: tu as beau le secouer à ton gré, le pincer, mettre son corps en pièces, il ne se réveillera pas. Mais pour le Christ qui a dit au jeune homme: Lève-toi (Lc 7,17), celui-ci était en train de dormir, et il s’est levé aussitôt. Il est plus facile au Christ de faire lever un mort de sa tombe qu’à quiconque de réveiller un homme dans son lit. <>

En vérité, notre Seigneur Jésus Christ voulait que ses actions visibles soient également comprises dans leur sens spirituel. Or il n’opérait pas de miracles pour faire des miracles seulement, mais pour que ses œuvres soient un sujet d’admiration pour ceux qui les voyaient, et une source de vérité pour ceux qui les comprenaient. Prenons un exemple. Celui qui voit dans un livre des lettres d’une belle écriture, mais ne sait pas lire, peut bien admirer la beauté des caractères et louer la dextérité du copiste : il ne sait pas ce que ces lettres signifient ni ce qu’elles représentent. Ainsi, il loue ce que voient ses yeux, mais son esprit ne saisit rien. Un autre, en revanche, loue l’habileté du scribe et comprend le sens des mots. Il voit, bien sûr, le texte que tous peuvent voir, mais en outre il peut le lire : ce qui est impossible au premier, qui ne l’a pas appris.

De même, parmi ceux qui ont vu les miracles du Christ, les uns n’ont pas compris ce qu’ils signifiaient, ni ce qu’ils enseignaient, d’une certaine manière, à ceux qui en avaient l’intelligence; ils n’ont fait qu’admirer de simples faits matériels. Les autres sont tombés en admiration devant ces prodiges et ont compris en outre ce qu’ils signifiaient. A l’école du Christ, nous devons leur ressembler.

Prière

Seigneur, source de tout bien, réponds sans te lasser à notre appel : inspire-nous ce qui est juste, aide-nous à l’accomplir. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu très bon, c’est ta tendresse que Jésus a manifestée quand il a pris en pitié une mère et lui a rendu son fils unique; c’est ton amour pour tous les hommes qu’il a révélé en partageant leurs souffrances et leur mort. Console ceux qui pleurent, réconforte ceux qui sont dans le deuil et ranime en nous la foi en la victoire sur la mort de ton Fils Jésus Christ, notre Seigneur. Lui qui règne.

 

11e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 7,36—8,3

Un pharisien avait invité Jésus à manger avec lui. Jésus entra chez lui et prit place à table. Survint une femme de la ville, une pécheresse. Elle avait appris que Jésus mangeait chez le pharisien, et elle apportait un vase précieux plein de parfum.

La miséricorde de Jésus

Homélie d’un auteur syriaque anonyme (6e siècle)

Homélies anonymes sur la pécheresse, 1, 4.5.19 26.28; d’après la traduction du syriaque par F. graffin, dans L’Orient syrien, 7, 1962, 179.181 189.193.195.

L’amour de Dieu, sorti à la recherche des pécheurs, nous est proclamé par une femme pécheresse. Car en appelant celle-ci, c’est notre race tout entière que le Christ invitait à l’amour; et en sa personne, ce sont tous les pécheurs qu’il attirait à son pardon. Il parlait à elle seule ; mais il conviait à sa grâce la création tout entière. Personne d’autre ne l’a persuadé de lui donner la main pour qu’elle vienne au pardon. Seul son amour pour celle qu’il a modelée l’a persuadé, et sa grâce l’a prié pour l’œuvre de ses mains.

Qui ne serait touché par la miséricorde du Christ, lui qui, pour sauver une pécheresse, accepta l’invitation d’un pharisien? A cause de celle qui est affamée de pardon, il veut lui-même avoir faim de la table de Simon le pharisien, alors que, sous l’apparence d’une table de pain, il avait préparé à la pécheresse une table de repentance.

Le pasteur est descendu du ciel vers la brebis perdue, pour reprendre, dans la maison de Simon, celle qu’avait enlevée le loup rusé. Chez Simon le pharisien, il a trouvé celle qu’il cherchait. <>

Quand elle voyait les pieds de Jésus, la pécheresse les regardait comme le symbole de son incarnation, et quand elle les saisissait, elle croyait saisir son Dieu pour ainsi dire au niveau de sa nature corporelle. Par ses paroles, elle le priait comme son Créateur. Car il est clair que ses paroles, quoique non écrites, se laissent deviner par ses gestes. Celle qui, de ses larmes, baigne les pieds de Jésus, les essuie avec ses cheveux, verse sur eux un parfum de grand prix, ne peut que dire des paroles correspondant à ses actes. C’est une prière qu’elle présente au Dieu fait chair: en lui apportant son humilité, elle témoigne de sa confiance en lui. Et par le dialogue qu’ils ont entre eux, elle apporte la preuve qu’il est réellement homme. <>

Telles furent donc les paroles adressées à Jésus par la pécheresse, quand elle se tenait à ses pieds. Lui, dans sa patience, les écoutait, et il proclamait par son silence la constance de la femme. Par sa patience, il proclamait l’endurance de cette femme, et par sa bienveillance il approuvait son audace. Il montrait que c’était justice qu’elle obtienne de lui le pardon devant tous les invités. Il ne parla pas aussitôt, et, quand il parla, il ne dit qu’une parole. Mais, par cette parole, il détruisit les péchés, supprima les fautes, chassa l’iniquité, accorda le pardon, extirpa le péché, fit germer la justice. Son pardon apparut soudainement au-dedans de son âme et en chassa les ténèbres du péché : elle fut guérie, elle reprit sens et, avec la santé, recouvra la force. Car c’est ainsi que Jésus a coutume d’accorder ses dons : en plénitude. Il le fait aisément puisqu’il est le Dieu de l’univers. <>

Afin qu’il en soit ainsi pour toi, prends conscience que ton péché est grand, mais que désespérer de ton pardon, parce que ton péché te semble trop grand, c’est blasphémer contre Dieu et te faire du tort à toi-même. Car s’il a promis de pardonner tes péchés quel que soit leur nombre, vas-tu lui dire que tu ne peux pas le croire et lui déclarer: "Mon péché est trop grand pour que tu le pardonnes. Tu ne peux pas me guérir de mes maladies" ? Là, arrête-toi et crie avec le prophète: J’ai péché contre toi, Seigneur (2 S 12,13). Aussitôt il te répondra: "Moi, j’ai passé par-dessus ta faute; tu ne mourras pas." A lui, la gloire par nous tous, dans les siècles. Amen.

Prière

Dieu tout-puissant, force de ceux qui espèrent en toi, sois favorable à nos appels : puisque l’homme est fragile et que sans toi il ne peut rien, donne-nous toujours le secours de ta grâce; ainsi nous pourrons, en observant tes commandements, vouloir et agir de manière à répondre à ton amour. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu très bon, dans le parfum et les larmes de la pécheresse, ton Fils a reconnu le signe d’un grand amour. Révèle-nous la profondeur de ton pardon. Émerveillés de ta miséricorde, nous serons capables de porter le poids de nos péchés, grâce au soutien de celui qui nous a aimés, Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur. Lui qui règne.

 

12e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 9,18-24

Un jour, Jésus priait à l’écart. Comme ses disciples étaient là, il les interrogeait: "Pour la foule, qui suis-je?" Ils répondirent: "Jean Baptiste; pour d’autres, Élie; pour d’autres, un prophète d’autrefois qui serait ressuscité."

Homélie

Qui est Jésus ?

Homélie de saint Cyrille d’Alexandrie († 444)

Commentaire de l’évangile de Luc, 9, 5, 18.21 ; PG 72, 645-652. Ou: 49, éd. R. M. tonneau; CSCO Syr 70, 110-115.

Un jour, Jésus priait à l’écart. Comme ses disciples étaient là, il les interrogea: Pour la foule, qui suis-je (Luc 9,18)? Ainsi, en priant à l’écart, en compagnie des seuls disciples, le Sauveur et Seigneur du monde leur donnait l’exemple d’une vie sainte. Ce qu’il faisait là risquait pourtant de jeter le trouble dans l’esprit des disciples. En effet, ils le voyaient prier à la manière des hommes, alors que la veille il avait accompli sous leurs yeux des prodiges dignes d’un Dieu. Ils pouvaient donc se demander, avec de bonnes raisons: "Que devons-nous croire à son sujet? Est-il Dieu, ou bien homme?" <>

Jésus leur a donc posé cette question pour leur éviter d’être troublés par de semblables pensées. Comme il n’ignorait rien de ce qu’on répétait à son sujet en dehors de leur groupe, il voulait d’autant plus les détourner de l’opinion de la foule et faire naître en eux la foi droite. Il leur dit: Eh bien, pour la foule, qui suis-je ? <>

Et Pierre encore s’élance le premier. Il se fait l’interprète de tout le groupe et prononce des paroles inspirées par l’amour de Dieu. Il proclame une juste confession de foi en Jésus, en le nommant le Christ de Dieu. Le disciple parle avec circonspection. A la vérité, il ne l’appelle pas seulement Christ, mais bien le Christ de Dieu.

De fait, un très grand nombre d’hommes ont été oints par Dieu, et, pour cette raison même, ont été appelés christs, en des sens différents. Certains, en effet, avaient reçu l’onction des rois, d’autres, l’onction des prophètes, et il en existe encore d’autres: nous-mêmes, qui avons obtenu notre délivrance par le Christ lui-même, notre Sauveur à tous, nous avons aussi reçu l’onction de l’Esprit Saint et nous portons le nom de christ. Il y a donc de très nombreux christs, appelés de ce nom par suite de l’onction, mais il n’y a qu’un seul et unique Christ de Dieu le Père. <>

Dès que le disciple eut fait cette profession de foi, le Seigneur leur défendit vivement de révéler à personne (qu’il était le Christ). Mais quoi? Les disciples n’auraient-ils pas dû plutôt aller l’annoncer de tous côtés? Telle était, en effet, la tâche de ceux qu’il avait désignés pour la mission. Mais, comme le dit la sainte Écriture, il y a un temps pour chaque chose (Qo 3,1). Avant de pouvoir annoncer le Christ, il fallait que surviennent d’autres événements prédits mais pas encore accomplis: c’était la croix, la passion, la mort corporelle, la résurrection d’entre les morts, ce grand miracle, vraiment inouï, attestant que l’Emmanuel est Dieu véritable et Fils de Dieu le Père par nature. <>

Il leur enjoignit donc d’entourer de silence le mystère, pour un temps, en attendant que tout le plan divin parvienne à son propre achèvement. Car, dès qu’il fut ressuscité d’entre les morts, il ordonna de révéler le mystère aux habitants de la terre entière, en offrant à tous la justification par la foi et la purification par le saint baptême. Il déclare en effet: Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit: et apprenez-leur à garder tous les commandements que je vous ai donnés. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde (Mt 28, 18-20).

Prière

Fais-nous vivre à tout moment, Seigneur, dans l’amour et le respect de ton saint nom, toi qui ne cesses jamais de guider ceux que tu enracines solidement dans ton amour. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur notre Dieu, toi dont le Fils a choisi d’être un Messie partageant nos souffrances et notre mort pour manifester ton amour sans mesure, fais-nous la grâce de découvrir qui est en vérité le Fils de l’homme et de porter avec lui notre croix sur le chemin qui mène à la vie éternelle. Par Jésus Christ.

 

13e dimanche du temps ordinaire C

Evangile

Evangile de Jésus Christ selon saint Luc 9,51-62

Comme le temps approchait où Jésus allait être enlevé de ce monde, il prit avec courage la route de Jérusalem.

Homélie

Ce que veut Jésus

Commentaire de saint Hilaire († 367) sur le psaume 139

Commentaire sur les psaumes, ps 139, 12; CSEL 22, 784-785.

Sûr d’être protégé au jour du combat, le Christ fait aussi cette prière : Seigneur, n’accorde rien au pécheur à l’encontre de mon désir (cf. ps 139,9). Lui qui a dit: Je ne suis pas venu faire ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé (Jn 6,38), est également pressé de réaliser la tâche entreprise par obéissance, non sans toutefois nous rappeler qu’il peut exercer librement sa volonté.

Il veut, en vérité, ce qu’a voulu le Père. Par ces paroles : Je ne suis pas venu faire ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé. Jésus montre, en effet, qui est celui qui l’a envoyé et à qui il obéit, sans pourtant supprimer son vouloir propre. Il aspire donc à accomplir toutes les volontés de son Père. Il s’empresse aussi de réaliser tout ce que lui-même désire voir accompli dans sa passion, de peur qu’un pécheur ne prenne les devants pour le déjouer.

Il a ardemment désiré (Lc 22,15) manger la Pâque avec ses disciples. Il a célébré à la hâte le repas de la Pâque. Désirant boire le calice de sa passion, il a dit: Est-ce que je vais refuser la coupe que mon Père m’a donné à boire (Jn 10,11)? Quand les hommes qui le cherchaient se présentèrent pour se saisir de lui et demandèrent qui était Jésus, il s’avança de lui-même. Sachant qu’il devait boire la coupe de vinaigre, il demanda à la boire et, aussitôt après y avoir bu et après avoir ainsi mené à bonne fin son grand dessein, il dit: Tout est accompli (Jn 19,30), mettant dans ces mots toute sa joie de voir réalisé ce qu’il désirait tellement.

Dans les psaumes, le Christ avait souvent prié pour que sa vie soit préservée du glaive. Il avait annoncé qu’aucun de ses os ne serait brisé. Il avait prédit que sa tunique serait tirée au sort (Ps 21).

Il prie pour que tout cela se réalise selon son désir, afin que l’on croie en l’accomplissement des prophéties. Il ne veut pas que les pécheurs aient la possibilité d’agir sur un de ces événements, ni d’empêcher la célébration de la Pâque si ardemment désirée, ou qu’ils n’osent pas lui présenter la coupe de sa passion. Car la première réponse que le Sauveur avait adressée aux pécheurs venus l’arrêter, les avait tous terrassés.

Il ne faut pas que manque le vinaigre qui doit lui être offert, que le soldat lui perce le côté avant qu’il ne rende l’esprit, ni qu’il trouve dans la lenteur de sa mort un motif pour lui briser les os.

Il veut qu’aucune prophétie ne soit retranchée, et que rien de ce qu’il attend ne soit laissé au bon plaisir du pécheur. Il veut que s’accomplissent en lui tous les événements annoncés dans les prophéties et que lui-même désire. Et il prie pour leur réalisation, non qu’ils puissent ne pas s’accomplir, mais afin que les hommes comprennent que ces prophéties le concernaient.

Prière

Tu as voulu, Seigneur, qu’en recevant ta grâce nous devenions des fils de lumière ; ne permets pas que l’erreur nous plonge dans la nuit, mais accorde-nous d’être toujours rayonnants de ta vérité. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu d’amour et de feu, tu fais miséricorde à ceux qui te repoussent, mais tu exiges de tes disciples un attachement sans partage. Prends-nous à ton service pour l’annonce du Royaume et accorde-nous de suivre, sans regard en arrière, Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur. Lui qui règne.

 

14e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 10,1-12.17-20

Parmi ses disciples, Jésus en désigna encore soixante-douze, et il les envoya deux par deux devant lui dans toutes les villes et localités où lui-même devait aller. Il leur dit: "La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux."

Homélie

La première moisson a lieu dans le peuple juif

Homélie de saint Augustin († 430)

Sermon 101, 1-211, PL 38, 605-607 610

L’évangile qui vient d’être lu nous invite à nous interroger sur la moisson dont le Seigneur a dit: La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson (Lc 10,2). Alors, aux douze disciples auxquels il avait donné le nom d’Apôtres, il en adjoignit soixante-douze autres. Puis il les envoya tous, comme ses paroles l’indiquent, à une moisson déjà préparée.

Quelle était donc cette moisson? Certainement pas la moisson des païens, puisque chez eux rien n’avait été semé. Il nous faut donc l’entendre du peuple juif. C’est pour cette moisson-là qu’est venu le maître de la moisson, et il y a envoyé ses moissonneurs. Quant aux païens, il leur a envoyé des semeurs, non des moissonneurs. Sachons donc que la moisson était faite chez les Juifs et les semailles chez les païens. Le Seigneur avait choisi ses Apôtres dans cette moisson, où le grain était mûr et prêt à être coupé, car les prophètes l’y avaient semé. Quel plaisir de parcourir du regard la terre que Dieu cultive ! Quel délice de contempler ses dons et les ouvriers qui travaillent dans son champ! <>

Vous pouvez y observer deux moissons, l’une qui est en cours, l’autre, encore à faire; celle-ci chez les païens, celle-là chez les Juifs. Prouvons ce que nous venons de dire en nous appuyant simplement sur la divine Écriture, celle du maître de la moisson. Voici. Nous savons qu’il est dit dans le passage que nous venons d’entendre: La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson. <>

Il est bien dans mon propos de vous montrer que la moisson a rapport aux peuples parmi lesquels les prophètes ont prêché. Ce sont eux en effet qui étaient les semeurs, afin que les Apôtres puissent être les moissonneurs. <> Pour germer et grandir, le blé avait dû être semé par les prophètes ; arrivé à maturité, il attendait que les Apôtres viennent le moissonner. <> Le Seigneur n’a-t-il pas déclaré alors à ses disciples : Vous dites que l’été est encore loin. Levez les yeux et regardez les champs, ils sont blancs pour la moisson (Jn 4,35). Il a dit encore: D’autres ont pris de la peine, et vous, vous profitez de leurs travaux (Jn 4,38). Abraham, Isaac, Jacob, Moïse et les prophètes ont pris de la peine. Ils ont peiné pour semer le grain. A son avènement, le Seigneur a trouvé la moisson mûre. Et il a envoyé les moissonneurs avec la faux de l’Évangile. <>

Les prédicateurs de l’Évangile ne saluent personne en chemin. Ils ne veulent rien faire d’autre qu’annoncer la Bonne Nouvelle par amour de leurs frères. Qu’ils entrent dans les maisons et qu’ils disent: Paix à cette maison (Lc 10,5). Ils ne se bornent pas à en parler, mais ils répandent la paix dont ils sont remplis. Ils proclament la paix et la possèdent. <> Celui qui est rempli de paix salue en disant : Paix à cette maison. S’il y a là un ami de la paix, la paix du messager ira reposer sur lui (Lc 10,6).

Prière

Dieu qui as relevé le monde par les abaissements de ton Fils, donne à tes fidèles une joie sainte: tu les as tirés de l’esclavage du péché; fais-leur connaître le bonheur impérissable. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur Dieu, maître de la terre, nous te prions d’envoyer dans ta moisson de nombreux ouvriers, des hommes désintéressés, des artisans de paix. Qu’ils proclament par leurs paroles et par toute leur vie que ton Règne est arrivé et que la puissance du mal est vaincue. Par Jésus Christ.

 

15e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 10,25-37

Pour mettre Jésus à l’épreuve, un docteur de la Loi lui posa cette question : "Maître, que dois-je faire pour avoir part à la vie éternelle?" Jésus lui demanda: "Dans la Loi, qu’y a-t-il d’écrit? Que lis-tu?"

Homélie

Le Christ, bon Samaritain

Homélie d’Origène († 253)

Homélies sur l’évangile de Luc, 34, 3 7-9, GCS 9, 201 202 204-205

D’après un ancien qui voulait interpréter la parabole du bon Samaritain, l’homme qui descendait de Jérusalem à Jéricho représente Adam, Jérusalem le paradis, Jéricho le monde, les brigands les forces hostiles, le prêtre la Loi, le lévite les prophètes, le Samaritain le Christ.

Par ailleurs, les blessures symbolisent la désobéissance, la monture le corps du Seigneur, et le "pandochium", c’est-à-dire l’auberge accueillant tous ceux qui veulent y entrer, est l’image de l’Église. En outre, les deux deniers représentent le Père et le Fils, l’aubergiste le chef de l’Église qui a charge de l’administrer. Et la promesse de revenir, faite par le Samaritain, figure, selon cet interprète, le second avènement du Seigneur. <>

Le Samaritain avait de l’huile dont l’Écriture dit: Que l’huile fasse briller le visage (Ps 103,15), le visage de celui dont il avait pris soin, assurément. Pour calmer l’inflammation des plaies, il les nettoya avec de l’huile et aussi avec du vin mêlé de quelque substance amère. Puis il chargea le blessé sur sa monture, c’est-à-dire sur son propre corps, puisqu’il a daigné assumer la condition de l’homme.

Ce Samaritain porte nos péchés (Mt 8,17) et souffre pour nous. Il porte le moribond et le conduit dans une auberge, c’est-à-dire dans l’Église. Celle-ci est ouverte à tous, elle ne refuse son secours à personne et tous y sont invités par Jésus : Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi je vous procurerai le repos (Mt 11,28).

Après y avoir conduit le blessé, le Samaritain ne part pas aussitôt, mais demeure toute la journée dans l’hôtellerie auprès du moribond. Il soigne ses blessures non seulement le jour, mais encore la nuit, l’entourant de toute sa sollicitude empressée.

Voulant partir le matin, il prélève sur son argent deux pièces d’argent (Lc 10,35) et en gratifie l’aubergiste, qui est certainement l’ange de l’Eglise. Puis il commande de soigner avec diligence et de ramener à la santé celui à qui il a lui-même prodigué aussi ses soins pendant un temps trop court.

Les deux deniers représentent, à mon avis, la connaissance du Père et du Fils et la connaissance du mystère que voici : le Père est dans le Fils et le Fils est dans le Père. C’est là le salaire donné à l’ange pour qu’il soigne avec un plus grand empressement l’homme qui lui a été confié. L’aubergiste reçoit en outre la promesse que tout ce qu’il dépensera de son bien pour la guérison du blessé lui sera aussitôt remboursé.

Vraiment ce gardien des âmes s’est montré plus proche des hommes que la Loi et les Prophètes en faisant preuve de bonté (Lc 10,37) envers celui qui était tombé dans les mains des bandits et il s’est montré son prochain (Lc 10,36) moins en paroles qu’en actes.

Il nous est donc possible, en suivant cette parole : Soyez mes imitateurs comme je le suis moi-même du Christ (1 Co 11,1), d’imiter le Christ et d’avoir pitié de ceux qui sont tombés dans les mains des bandits, de nous approcher d’eux, de verser de l’huile et du vin sur leurs plaies et de les bander, de les charger sur notre propre monture et de porter leurs fardeaux. Aussi, pour nous y exhorter, le Fils de Dieu a-t-il dit en s’adressant à nous tous, plus encore qu’au docteur de la Loi: Va, et toi aussi, fais de même (Lc 10,37). Et si nous le faisons, nous obtiendrons la vie éternelle dans le Christ Jésus, à qui appartiennent la gloire et la puissance pour les siècles des siècles. Amen (1 P 4,11).

Prière

Dieu qui montres aux égarés la lumière de ta vérité pour qu’ils puissent reprendre le bon chemin, donne à tous ceux qui se déclarent chrétiens de rejeter ce qui est indigne de ce nom, et de rechercher ce qui lui fait honneur. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu de toute bonté, accorde-nous la grâce de ne jamais passer outre, quand, au détour du chemin, tu nous fais rencontrer un être meurtri par la vie. Toi dont le Fils est venu partager nos souffrances, donne-nous de l’imiter dans sa grande pitié pour les hommes en détresse. Lui qui règne.

 

16e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 10,38-42

Alors qu’il était en route avec ses disciples, Jésus entra dans un village. Une femme appelée Marthe le reçut dans sa maison. Elle avait une sœur, nommée Marie, qui, se tenant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.

Homélie

Vie contemplative et vie active

Homélie de saint Bruno de Segni (†1123)

Commentaire sur l’évangile de Luc, 1, 10, PL 165, 390-391

Toutes les actions de notre Sauveur sont remplies de significations symboliques. Ce qu’il faisait en tous lieux avait valeur de signe. Ainsi accomplit-il toujours dans la sainte Église les actions visibles qu’il a faites en ce temps-là dans la bourgade de Béthanie. <> Le Seigneur Jésus entre donc chaque jour dans la bourgade de l’Eglise. Il ne dédaigne pas de la visiter continuellement. Marthe l’y accueille et le fait entrer dans sa maison.

Voyons donc ce que Marthe symbolise, de même que Marie. Chacune d’elles est vraiment le signe de quelque chose d’emportant, puisqu’à elles deux, elles constituent toute l’Église. <> Marthe symbolise la vie active, Marie la vie contemplative. Voilà pourquoi, d’après ce que dit l’Écriture, c’est Marthe, et non Marie, qui reçut le Christ dans sa maison.

Marie, en effet, n’a pas de maison, car la vie contemplative entraîne le renoncement à tous les biens de ce monde. Le contemplatif ne demande rien d’autre que de s’asseoir aux pieds du Seigneur, et de consacrer tout son temps à lire les Livres saints, à prier et à contempler Dieu. Il lui suffit encore d’écouter sans cesse la parole de Dieu et d’alimenter son âme plutôt que son corps. Telle a été la vie des prophètes, des Apôtres et de beaucoup d’autres : ils ont tout abandonné, ils ont fui le monde et se sont attachés à Dieu, eux qu’on croyait démunis de tout, et qui possédaient tout (2 Co 6,10). Il n’y a que les hommes de bien qui mènent ce genre de vie.

Quant à la vie active, les bons et les méchants peuvent la mener. On l’appelle du reste "vie active" parce qu’elle est faite d’activités incessantes, de fatigues et de tâches sans fin, et qu’elle ne laisse presque aucune place à un moment de tranquillité. Mais nous ne parlons pas de cette espèce de vie active qui occupe les malfaiteurs, agite les tyrans, séduit les cupides, tourmente les adultères et incite tous les méchants à commettre de mauvaises actions. Comme nous ne parlons que de cette Marthe, sœur de Marie, nous ne parlons en réalité que de la vie active qui se rapproche le plus de la vie contemplative.

Cette sorte de vie active est pure, exempte de péché et très proche, en effet, de la vie contemplative. Que l’Apôtre prêche, qu’il baptise, qu’il travaille de ses mains pour vivre, qu’il parcoure les villes et qu’il se soucie de toutes les Églises, cela ne relève-t-il pas de la vie active? Ainsi le même évangile dit-il, en parlant de Marthe, qu’elle était accaparée par les multiples occupations du service (Lc 10,40). Du reste, nous voyons encore aujourd’hui des chefs et ministres de l’Église s’affairer à courir partout, se fatiguer, se démener, se donner beaucoup de peine pour subvenir de multiples façons aux besoins de leurs frères, si bien que nous pouvons dire à juste titre qu’eux aussi sont accaparés par les multiples occupations du service.

La vie contemplative est donc meilleure que la vie active, pour la raison qu’elle est exempte de soucis et ne cessera jamais. Cependant la vie active est à ce point nécessaire que, sans elle, la vie contemplative elle-même ne peut exister ici-bas.

Prière

Sois favorable à tes fidèles, Seigneur, et multiplie les dons de ta grâce: entretiens en eux la foi, l’espérance et la charité, pour qu’ils soient attentifs à garder tes commandements. Par Jésus Christ.

ou bien

La seule chose qui soit vraiment nécessaire, c’est d’écouter ta Parole, ton Verbe, Seigneur Dieu. Aide-nous à ne pas nous inquiéter pour ce qui est vain, à garder la paix dans les occupations qui nous absorbent, et à trouver du temps pour nous tenir, émerveillés, aux pieds de Jésus Christ. Lui qui règne.

 

17e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 11,1-13

Un jour, quelque part, Jésus était en prière. Quand il eut terminé, un de ses disciples lui demanda: "Seigneur, apprends-nous à prier, comme Jean Baptiste l’a appris à ses disciples."

Homélie

Demander la grâce de l’Esprit

Homélie de saint Bède le Vénérable († 735)

Homélies, 14, CCL 122, 272-273 275-279

Notre Seigneur et Sauveur désire que nous parvenions aux joies du Royaume céleste. Il nous a appris à le prier lui-même afin de les obtenir, et il a promis qu’il nous les donnerait si nous les lui demandions. Demandez, dit-il, vous obtiendrez; cherchez, vous trouverez; frappez, la porte vous sera ouverte (Lc 11,9).

Frères bien-aimés, il nous faut méditer sérieusement et très attentivement ces paroles du Seigneur. Il affirme en effet que le Royaume n’appartiendra pas aux inactifs et aux désœuvrés, mais qu’il sera donné, manifesté et ouvert à ceux qui demandent, "cherchent et frappent. Nous devons donc demander dans notre prière que la porte du Royaume nous soit ouverte, la chercher par notre vie droite et y frapper par notre persévérance. Car il ne suffit pas de prier uniquement en paroles, il nous faut encore chercher avec beaucoup de soin de quelle manière nous devons vivre pour être dignes d’obtenir ce que nous demandons. Il déclare lui-même: Ce ne sont pas tous ceux qui me disent : Seigneur, Seigneur ! qui entreront dans le Royaume des deux, mais celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux deux (Mt 7,21). <>

Voilà pourquoi, mes frères, il nous faut faire des demandes pressantes et des prières incessantes. Prosternons-nous devant Dieu, versons des larmes en présence du Seigneur qui nous a faits (cf. ps 94,6). Et pour mériter d’êtres exaucés, examinons soigneusement comment celui qui nous a faits veut que nous vivions, et ce qu’il nous a ordonné de faire. Cherchons le Seigneur et sa puissance, recherchons sans trêve sa face (cf. ps 104,4). Et pour mériter de le trouver et de le voir, purifions-nous de toute souillure de la chair et de l’esprit (2 Co 7,1), car, au jour de la résurrection, seuls ceux qui auront gardé leur corps chaste monteront au ciel, et seuls ceux qui auront le cœur pur contempleront la gloire de la majesté divine. <>

Et si nous désirons savoir ce que le Seigneur veut que nous demandions, écoutons cette parole de l’Évangile: Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît (Mt 6,33). Or, chercher le Royaume de Dieu et sa justice, c’est désirer les dons de la patrie céleste et s’employer sans cesse à découvrir par quelles saintes actions nous devons les obtenir. Craignons que, si nous venions à nous écarter du chemin qui y mène, nous ne puissions jamais parvenir au but auquel nous tendons. <>

Les biens que nous devons donc demander à Dieu en premier lieu, et la justice de son Royaume que nous devons chercher par-dessus tout, ce sont la foi, l’espérance et la charité. Il est écrit en effet: Le juste vit de la foi (Ga 3,11) ; la grâce du Seigneur entourera ceux qui comptent sur lui (Ps 31,10); et l’accomplissement parfait de la loi, c’est l’amour (Rm 13,10), car toute la loi atteint sa perfection dans un seul commandement : Tu aimeras ton prochain comme toi-même (Ga 5,14). <>

Aussi le Seigneur fait-il cette promesse pleine de bonté : Le Père céleste donnera l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent (Lc 11,13). Il veut certainement nous faire comprendre comment les hommes, qui sont naturellement mauvais, peuvent devenir bons en accueillant la grâce de l’Esprit Saint. Il promet que le Père donnera l’Esprit Saint à ceux qui le demandent, parce que la foi, l’espérance et la charité, comme tous les autres biens célestes que nous désirons obtenir, nous sont accordés uniquement par la grâce de l’Esprit Saint. <>

Mes frères bien-aimés, poursuivons notre marche sur les pas du Seigneur, autant que nous le pouvons, et prions Dieu le Père de nous conduire par la grâce de son Esprit sur le chemin de la foi droite qui produit son effet par l’amour. Et pour mériter d’obtenir les biens que nous désirons, appliquons-nous à n’être pas indignes d’un Père si grand. Bien plus, gardons toujours intact, dans une âme et un corps purs, le sacrement de notre renaissance baptismale qui a fait de nous des fils de Dieu. Si nous observons, en effet, les commandements de notre Père, le Très-Haut, il nous donnera certainement en récompense l’éternelle bénédiction que, depuis le commencement, il nous a réservée comme part d’héritage. Par Jésus Christ notre Seigneur qui vit et règne avec lui, Dieu dans l’unité du Saint-Esprit, pour tous les siècles des siècles. Amen.

Prière

Tu protèges, Seigneur, ceux qui comptent sur toi; sans toi rien n’est fort et rien n’est saint ; multiplie pour nous tes gestes de miséricorde afin que, sous ta conduite, en faisant un bon usage des biens qui passent, nous puissions déjà nous attacher à ceux qui demeurent. Par Jésus Christ.

ou bien

Notre Père: tel est le nom par lequel tu veux être invoqué, Seigneur. Que ce nom soit béni et sanctifié par toute la terre. Donne-nous le pain pour le corps et pour l’âme, afin que chacune de nos journées soit consacrée au service de ton règne d’amour. Par Jésus Christ.

 

18e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 12,13-21

Du milieu de la foule, un homme demanda à Jésus : "Maître, dis à mon frère de partager avec moi notre héritage."

Homélie

Que faire des grandes richesses ?

Homélie de saint Basile († 379)

Homélies sur la richesse, 6, 1-2; PG 31, 261 -265.

Il y avait, dit l’évangile, un homme riche dont les terres avaient beaucoup rapporté. Il se disait: Que vais-je faire ? <> Je vais démolir mes greniers et j’en construirai de plus grands (Lc 12,16-18). Pourquoi donc cette terre avait-elle tant rapporté à un homme qui ne devait faire aucun bon usage de cette fertilité? C’était pour mieux mettre en lumière la patience de Dieu dont la bonté s’étend même sur de telles gens. Car il fait tomber sa pluie sur les justes et sur les injustes, et il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons (Mt 5,45) <>.

De quel état d’esprit cet homme faisait-il montre? L’aigreur du caractère, la haine des hommes, l’égoïsme, voilà ce qu’il offrait en retour à son bienfaiteur. Il oubliait que nous appartenons tous à la même nature. Il ne jugeait pas nécessaire de distribuer son superflu aux pauvres. <>

Mais ses greniers craquaient, trop étroits pour ses immenses dépôts, et son cœur d’avare n’était pas encore comblé. D’ailleurs, ses nouvelles récoltes s’ajoutaient sans cesse aux anciennes et les apports annuels venaient accroître son opulence, de sorte qu’il se trouva dans une situation sans issue. Il n’acceptait pas de se défaire de ses anciennes réserves, tant il était avare, et il n’arrivait plus à entreposer les nouvelles récoltes trop abondantes. De là les projets non réalisés et les angoisses insurmontables.

Que vais-je faire ? Qui n’aurait pitié d’un homme en proie à un pareil tourment? <> Car ce ne sont pas des bénéfices que la terre lui apporte, mais des soupirs. Elle ne lui procure pas d’abondants revenus, mais des soucis, des peines et un embarras extrême. Il pousse des lamentations comme le ferait un miséreux. Ne sont-ce pas là les plaintes de celui qui est réduit à la mendicité ? Que vais-je faire ? Comment vais-je me nourrir, me vêtir? <>.

Considère, homme, celui qui t’a comblé de ses dons. Souviens-toi de toi-même. Rappelle-toi qui tu es, quelles affaires tu conduis, qui te les a confiées, pour quelle raison tu as été préféré à beaucoup. Tu es le serviteur du Dieu bon, tu as la charge de tes compagnons de service. Ne crois pas que tous ces biens sont destinés à ton ventre. Dispose des biens que tu as entre les mains comme s’ils appartenaient à autrui : ils te donneront du plaisir pendant quelque temps, puis s’évanouiront et disparaîtront. Mais il t’en sera demandé un compte détaillé.

Que vais-je faire ? La réponse était simple : "Je rassasierai les affamés, j’ouvrirai mes greniers et j’inviterai les pauvres. J’imiterai Joseph, j’annoncerai à tous ma charité, je ferai entendre une parole généreuse: ‘Vous tous, qui manquez de pain, venez à moi. Que chacun prenne une part suffisante des dons que Dieu m’a accordés! Venez y puiser comme à des fontaines publiques.’ "

Prière

Assiste tes enfants, Seigneur, et montre à ceux qui t’implorent ton inépuisable bonté; c’est leur fierté de t’avoir pour Créateur et Providence : restaure pour eux ta création, et l’ayant renouvelée, protège-la. Par Jésus Christ.

ou bien

Garde-nous, Seigneur, de mettre notre confiance dans les richesses. Sois pour nous l’appui que rien ne peut ébranler, afin qu’au terme de notre vie nous soyons trouvés riches du seul vrai bien : ton amour. Par Jésus Christ.

 

19e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 12,32-48

Jésus disait à ses disciples : "Restez en tenue de service, et gardez vos lampes allumées. Soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces pour lui ouvrir dès qu’il arrivera et frappera à la porte."

Homélie

Veiller dans l’attente de l’Epoux

Homélie de saint Grégoire de Nysse († 395)

Homélies sur le Cantique des cantiques, 11 ; éd jaeger, 6, 317-319

Quand Jésus dit: Restez en tenue de service (gardez votre ceinture aux reins) et tenez vos lampes allumées (Lc 12,35), il nous enseigne le moyen de rester éveillés. En effet, l’éclat de la lumière frappe les yeux pour en chasser le sommeil. Et la ceinture, serrée autour des reins, produit une sensation de gêne qui ne permet pas au corps de se relâcher ni de s’abandonner au sommeil.

Le sens des symboles est tout à fait clair. L’homme portant la ceinture de la tempérance passe sa vie dans la lumière d’une conscience pure, qui jaillit de la lampe de la droiture pour éclairer sa conduite. La vérité ainsi manifestée tient son âme en éveil, la garde de l’erreur et l’empêche de jamais se distraire par des rêves trompeurs.

Si nous pratiquons ces vertus conformément à l’enseignement du Verbe, la vie angélique nous sera en quelque sorte communiquée. Car le Christ nous déclare semblables aux anges en nous donnant ce divin commandement : Soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces, pour lui ouvrir dès qu’il arrivera et frappera à la porte (Lc 12,35). En effet, les anges attendaient que le Seigneur revienne des noces. Ils se tenaient, les yeux grands ouverts, aux portes du ciel, avec l’espoir que le Roi de gloire, de retour des noces, rentrerait par là dans le céleste et bienheureux séjour.

Il en était sorti comme sort de sa chambre le jeune époux, dont parle le psaume (cf. ps 18,6). Nous sommes la vierge prostituée aux idoles, qu’il s’est unie par la renaissance sacramentelle, rétablissant notre humanité dans son incorruptibilité virginale. Ainsi, une fois les noces célébrées, l’Église est devenue l’Épouse du Verbe, selon cette parole de Jean Baptiste: Celui qui a l’épouse est l’époux (Jn 3,29). Elle a été admise dans la chambre des mystères, tandis que les anges attendaient patiemment que le Roi revienne à la béatitude qui convient à sa nature.

Il faut donc, comme il l’a dit, que notre vie soit semblable à la leur. Parce qu’ils vivent en se gardant du vice et de l’erreur, ils sont bien préparés à accueillir la venue du Seigneur. Comme eux, nous veillerons aussi à l’entrée de notre demeure et nous nous préparerons à lui obéir lorsqu’il se tiendra à la porte et frappera (cf. Ap 3,20). Heureux, dit-il, ces serviteurs, que leur maître, en arrivant, trouvera occupés de la sorte (Lc 12,43)!

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, toi que nous pouvons déjà appeler notre Père, fais grandir en nos cœurs l’esprit filial, afin que nous soyons capables d’entrer un jour dans l’héritage qui nous est promis. Par Jésus Christ.

ou bien

Puisses-tu nous trouver vigilants lors de ton retour, Seigneur Jésus. Que notre lampe reste allumée et notre cœur ardent, afin qu’au jour de ta venue nous soyons prêts à t’accueillir et méritions d’être invités à la table éternelle. Toi qui règnes.

 

20e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 12,49-53

Jésus disait à ses disciples : "Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé! Je dois recevoir un baptême, et comme il m’en coûte d’attendre qu’il soit accompli!"

Homélie

Une paix qui n’est pas sans rupture

Commentaire de Denys le Chartreux († 1471)

Commentaire sur l’évangile de Luc, Opéra omnia, 12, 72-74.

Je suis venu apporter un feu sur la terre, je suis descendu du haut du ciel et, par le mystère de mon Incarnation, je me suis manifesté aux hommes pour allumer dans les cœurs humains le feu de l’amour divin; et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé (Lc 12,49), c’est-à-dire qu’il prenne et devienne une flamme activée par l’Esprit Saint, et qu’il fasse jaillir des actes de bonté! Le Christ annonce ensuite qu’il subira la mort sur la croix avant que le feu de cet amour n’enflamme l’humanité. C’est, en effet, la très sainte passion du Christ qui a valu à l’humanité un don aussi grand, et c’est avant tout le souvenir de sa passion qui allume une flamme dans les cœurs fidèles.

Je dois recevoir un baptême, autrement dit: "Il m’incombe et il m’est réservé par une disposition divine de recevoir un baptême de sang, de me baigner et de me plonger comme dans l’eau, dans mon sang répandu sur la croix pour racheter le monde entier ; et quelle n’est pas mon angoisse <> jusqu’à ce qu’il soit accompli (Lc 12,50), en d’autres termes jusqu’à ce que ma passion soit achevée, et que je puisse dire: Tout est accompli (Jn 19,30)!" Le Christ, en effet, était sans cesse animé par l’amour. <>

Il expose ensuite le moyen de parvenir à la perfection de l’amour divin: Pensez-vous que je sois venu mettre la paix dans le monde (Lc 12,51) ? C’est comme s’il disait: "Ne pensez pas que je sois venu donner aux hommes la paix selon la chair et le monde, la paix sans aucune règle, qui les ferait vivre en bonne entente dans le vice et leur assurerait la prospérité sur cette terre."

Non, je vous le dis, ce qui signifie: "Je ne suis pas venu apporter une paix de ce genre, mais la division (Lc 12,52), une bonne et très salutaire séparation des esprits et même des corps. Ainsi, parce qu’ils aiment Dieu et recherchent la paix intérieure, ceux qui croient en moi se trouveront naturellement en désaccord avec les méchants ; ils se sépareront de ceux qui tentent de les détourner du progrès spirituel et de la pureté de l’amour divin, ou s’efforcent de leur créer des difficultés".

Donc, la paix spirituelle, intérieure, la bonne paix, c’est la tranquillité de l’âme en Dieu, ou la bonne entente selon l’ordre juste. Le Christ est venu apporter cette paix avant toutes choses. <> La paix intérieure a sa source dans la charité. Elle consiste en une joie inaltérable de l’âme qui est en Dieu. On l’appelle la paix du cœur. Elle est le commencement et un certain avant-goût de la paix des saints qui sont dans la patrie, de la paix de l’éternité.

Prière

Pour ceux qui t’aiment, Seigneur, tu as préparé des biens que l’œil ne peut voir : répands en nos cœurs la ferveur de ta charité, afin que t’aimant en toute chose et par-dessus tout, nous obtenions de toi l’héritage promis qui surpasse tout désir. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur, Dieu de paix, en venant sur la terre ton Fils s’est heurté à l’opposition de beaucoup, il a été plongé dans la souffrance et dans la mort. Par la grâce de sa passion, accorde à tes fidèles la force de toujours choisir Jésus Christ comme maître de vie, même lorsque les hommes semblent se liguer contre lui. Qui règne.

 

21e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 13,22-30

Dans sa marche vers Jérusalem, Jésus passait par les villes et les villages en enseignant. Quelqu’un lui demanda: "Seigneur, n’y aura-t-il que peu de gens à être sauvés?" Jésus leur dit: "Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et ne le pourront pas."

Homélie

Le prix du Royaume

Lettre de saint Anselme († 1109)

Lettre 112, à Hugues le Reclus; Opera omnia, t. 3, 244-246.

Dieu proclame qu’il a mis en vente le Royaume des cieux. Mais ce Royaume est si beau que l’œil de l’homme mortel ne peut voir, ni l’oreille entendre, ni l’esprit imaginer sa félicité et sa gloire. <> Tout homme qui cherche à en connaître le prix obtiendra cette réponse : "Celui qui veut nous donner un Royaume dans le ciel n’a pas besoin d’argent terrestre, et nul ne peut rien donner à Dieu qui ne lui appartienne déjà, puisqu’il possède tout."

Par ailleurs, Dieu ne donne pas un bien si précieux d’une manière totalement gratuite, car il ne l’accorde pas à celui qui n’aime pas. Personne, en effet, ne donne une chose qui lui est chère à celui pour qui elle n’a aucune valeur. Et comme Dieu n’a pas besoin de ce que tu as, et qu’il n’a pas à donner un bien si précieux à celui qui ne veut pas aimer ce bien, ce qu’il demande simplement, c’est l’amour, sans lequel il ne doit pas faire ce don. Donne donc l’amour et reçois le Royaume; aime, et il est à toi.

En somme, régner dans le ciel signifie simplement être uni à Dieu, à tous les anges et à tous les saints, ne faire qu’une volonté avec eux par l’amour, de façon à exercer tous ensemble une même puissance. Aime donc Dieu plus que toi-même et tu commenceras déjà à avoir ce que tu veux posséder parfaitement dans le ciel. Sois en accord avec Dieu et avec les hommes — à la seule condition qu’ils ne soient pas en désaccord avec lui — et tu commenceras aussitôt à régner avec Dieu et avec tous les saints. Car, dans le ciel, Dieu et tous les saints ajusteront leur volonté à la tienne, dans la mesure où tu auras ajusté en cette vie ta volonté à la leur. Si donc tu veux être roi dans le ciel, aime Dieu et les hommes comme tu dois le faire, et tu mériteras de devenir ce que tu désires.

Mais tu ne pourras parvenir à ce parfait amour qu’après avoir vidé ton cœur de tout autre amour. <> Voilà pourquoi ceux qui remplissent leur cœur de l’amour de Dieu et du prochain, ne veulent que les choses voulues par Dieu ou par les autres, pourvu que les choses voulues par ces derniers n’aillent pas à rencontre de la volonté de Dieu.

En conséquence, ils sont assidus aux prières, aux entretiens et aux pensées célestes, car il leur est doux de soupirer après Dieu, de lui parler, de l’entendre et de penser à celui qu’ils aiment tant. De là vient qu’ils sont joyeux avec ceux qui sont dans la joie, qu’ils pleurent avec ceux qui pleurent, qu’ils prennent les malheureux en pitié, qu’il donnent à ceux qui sont dans le besoin, car ils aiment les autres comme eux-mêmes. Aussi dédaignent-ils les richesses, les pouvoirs, les plaisirs, les honneurs et les louanges, car celui qui aime ces choses agit souvent contre Dieu et son prochain.

C’est ainsi que tout ce qu’il y a dans la Loi et les prophètes dépend de ces deux commandements (Mt 22,40). Donc, celui qui veut parvenir à l’amour parfait avec lequel s’achète le Royaume, aimera le détachement, la pauvreté, l’effort et l’obéissance, comme font les saints.

Prière

Dieu qui peux mettre au cœur de tes fidèles un unique désir, donne à ton peuple d’aimer ce que tu commandes et d’attendre ce que tu promets; pour qu’au milieu des changements de ce monde, nos cœurs s’établissent fermement là où se trouvent les vraies joies. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur, ouvre-nous ! Tu sais d’où nous sommes, tu connais notre faiblesse. Nous n’avons aucun mérite à invoquer. Que ta miséricorde nous fasse franchir la porte qui donne accès au Royaume. Par Jésus Christ.

 

22e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 14,1.7-14

Un jour de sabbat, Jésus était entré chez un chef des pharisiens pour y prendre son repas. Remarquant que les invités choisissaient les premières places, il leur dit cette parabole: "Quand tu es invité à des noces, ne va pas te mettre à la première place."

Homélie

Avoir une place aux noces du Seigneur

Homélie de saint Bruno de Segni († 1123)

Commentaire sur l’évangile de Luc, 2, 14; PL 165, 406-407

Le Seigneur avait été invité à un banquet de noces. En observant les convives, il remarqua que tous choisissaient les premières places et les plus honorables, chacun désirant se placer avant tous les autres et s’élever au-dessus de tous. Il leur raconta cette parabole qui, même prise en son sens littéral, est bien utile et nécessaire à tous ceux qui aiment jouir de la considération des gens et qui ont peur d’être rabaissés. Elle accorde, en effet, des marques de courtoisie aux plus humbles et des signes de respect aux personnes d’un rang élevé.

Mais comme cette histoire est une parabole, elle renferme une signification qui dépasse le sens littéral. Voyons donc quelles sont ces noces et qui sont les invités aux noces. Celles-ci s’accomplissent quotidiennement dans l’Eglise. Chaque jour le Seigneur célèbre des noces, car chaque jour il s’unit les âmes fidèles lors de leur baptême ou de leur passage de ce monde-ci au Royaume céleste.

Eh bien ! nous qui avons reçu la foi en Jésus Christ et le sceau du baptême, nous sommes tous invités à ces noces. Une table y est dressée pour nous, dont l’Ecriture dit : Tu prépares la table pour moi devant mes ennemis (Ps 22,5). Nous y trouvons les pains de l’offrande, le veau gras, l’Agneau qui enlève les péchés du monde. Ici nous sont offerts et le pain vivant descendu du ciel et le calice de l’Alliance nouvelle. Ici nous sont présentés les évangiles et les épîtres des Apôtres, les livres de Moïse et des prophètes, qui sont comme des mets remplis de toutes les délices.

Que pourrions-nous donc désirer de plus? Pourquoi choisirions-nous les premières places ? Quelle que soit la place que nous occupions, nous avons tout en abondance et ne manquons de rien. Mais toi qui cherches à avoir la première place, qui que tu sois, va t’asseoir à la dernière place. Ne permets pas que ta science te gonfle d’orgueil, et ne te laisse pas exalter par la renommée. Mais plus tu es grand, plus il faut t’humilier en toute chose et tu trouveras grâce auprès de Dieu (Lc 1,30), si bien qu’au moment favorable il te dira : Mon ami, avance plus haut, et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui sont à table avec toi (Lc 14,10).

Assurément, pour autant que cela dépendait de lui, Moïse occupait la dernière place. Lorsque le Seigneur voulut l’envoyer vers les fils d’Israël et l’invita à accéder à un rang plus élevé, il lui répondit: Je t’en prie, Seigneur, envoie qui tu voudras envoyer car je n’ai pas la parole facile (Ex 4,13). C’est comme s’il avait dit: "Je ne suis pas digne d’une fonction aussi haute." Saûl aussi se considérait comme un homme d’humble condition, quand le Seigneur fit de lui un roi. Et de même Jérémie, craignant de monter à la première place, disait: Oh! Seigneur mon Dieu ! Vois donc : je ne sais pas parler, je ne suis qu’un enfant (Jr 1,6) !

C’est donc par l’humilité, non par l’orgueil, par les vertus, non par l’argent, que nous devons chercher à occuper la première place, le premier rang dans l’Église.

Prière

Dieu puissant, de qui vient tout don parfait, enracine en nos cœurs l’amour de ton nom; resserre nos liens avec toi, pour développer ce qui est bon en nous ; veille sur nous avec sollicitude, pour protéger ce que tu as fait grandir. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur notre Dieu, toi qui élèves les humbles et repousses les orgueilleux, garde-nous de briguer les honneurs. Fais-nous rechercher la dernière place à l’imitation de celui qui s’est abaissé jusqu’à mourir sur la croix, Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur. Lui qui règne.

 

23e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 14,25-33 De grandes foules faisaient route avec Jésus ; il se retourna et leur dit: "Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut être mon disciple."

Homélie

Un triple renoncement

Conférence de saint Jean Cassien († 435)

Conférences 3, 6-7, CSEL 13/2, 73-75.

Selon la tradition des Pères et l’autorité des saintes Écritures, les renoncements sont au nombre de trois, et chacun de nous doit mettre tout son zèle à les pratiquer. Le premier concerne ve qui est matériel: il nous fait mépriser toutes les richesses et les biens du monde. Par le deuxième, nous répudions notre ancienne manière de vivre, avec les vices et les passions de l’âme et de la chair. Par la troisième, nous détachons notre esprit de toutes les réalités présentes et visibles .pour ne contempler que les réalités futures et ne désirer que les invisibles. Ces renoncements doivent être observés tous les trois, comme le Seigneur l’a ordonné à Abraham, lorsqu’il lui a dit: Quitte ton pays, ta famille et la maison de ton père (Gn 12,1).

Il a dit en premier lieu: Quitte ton pays, c’est-à-dire les biens de ce monde et les richesses de la terre. En second lieu: Quitte ta famille, c’est-à-dire la façon de vivre, les habitudes et les vices passés qui, en s’attachant à nous depuis notre naissance, nous sont étroitement unis par une sorte d’affinité et de parenté. En troisième lieu : Quitte la maison de ton père, c’est-à-dire tout souvenir du monde actuel qui se présente à nos yeux. <>

Ce détachement devient réalité lorsque, morts avec le Christ aux éléments de ce monde, nous contemplons, comme le dit l’Apôtre, non pas ce qui se voit, mais ce qui ne se voit pas; ce qui se voit est provisoire, mais ce qui ne se voit pas est éternel (2 Co 4,18). Il en va de même lorsque, abandonnant de cœur cette demeure temporelle et visible, nous tournons les yeux de notre âme vers celle que nous habiterons éternellement. Et nous y parviendrons, dès que, vivant dans la chair, mais non selon la chair, nous engagerons le combat (2 Co 10,3) pour le Seigneur, et que nous proclamerons par nos actions vertueuses ces paroles de l’Apôtre: Nous, nous sommes citoyens des deux (Ph 3,20). <>

Cela étant, il ne nous servirait pas à grand-chose d’exercer, fût-ce avec la foi la plus ardente, le premier renoncement, si nous n’accomplissions pas le deuxième avec le même zèle et la même ardeur. De même, après avoir pratiqué celui-ci, nous serons en mesure de passer également au troisième. Nous sortirons ainsi de la maison de notre ancien père, celui qui était, nous le savons, notre père selon le vieil homme, dès notre naissance, quand nous étions par nature voués à la colère comme tous les autres (Ep 2,3), et nous porterons toute l’attention de notre esprit aux choses célestes <>.

Nous mériterons dès lors d’atteindre à la vraie perfection de ce troisième renoncement lorsque notre âme aura été débarrassée, en effet, de toute la pesanteur de la chair qui l’engourdissait, et purifiée de toute attache et disposition terrestre, grâce à un polissage très soigneux. Notre âme s’élèvera alors jusqu’au monde invisible par la méditation constante des choses de Dieu et la contemplation spirituelle, si bien qu’elle n’aura plus conscience d’être enfermée dans un corps fragile et un lieu particulier, tant elle sera attentive aux réalités célestes et incorporelles.

Prière

Dieu qui as envoyé ton Fils pour nous sauver et pour faire de nous tes enfants d’adoption, regarde avec bonté ceux que tu aimes comme un père ; puisque nous croyons au Christ, accorde-nous la vraie liberté et la vie éternelle. Par Jésus Christ.

ou bien

Pour que nous soyons disciples de ton Fils, tu exiges de nous, Seigneur, un amour sans partage et un renoncement total. Ce que nous sommes incapables de faire par nous-mêmes, que ta grâce nous en donne la force: alors nous pourrons porter notre croix et marcher à la suite du Christ. Lui qui règne.

 

24e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 15,1-32

Les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter. Les pharisiens et les publicains récriminaient contre lui : "Cet homme fait bon accueil aux pécheurs et il mange avec eux ! " Alors Jésus leur dit cette parabole: "Si l’un de vous a cent brebis et en perd une, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il la retrouve?"

Homélie

Le Christ est venu chercher ce qui était perdu

Homélie de saint Pierre Chrysologue († 450)

Sermon 168, 4-6; CCL 24 B, 1032-1034.

Le fait de retrouver un objet que nous avions perdu nous remplit chaque fois d’une joie nouvelle. Et cette joie est plus grande que celle que nous éprouvions, avant de le perdre, quand cet objet était bien gardé. Mais la parabole de la brebis perdue parle davantage de la tendresse de Dieu que de la façon dont les hommes se comportent habituellement. Et elle exprime une vérité profonde. Délaisser ce qui a de l’importance pour l’amour de ce qu’il y a de plus humble, est propre à la puissance divine, non à la convoitise humaine. Car Dieu fait même exister ce qui n’est pas ; il part à la recherche de ce qui est perdu tout en gardant ce qu’il a laissé sur place, et il retrouve ce qui était égaré sans perdre ce qu’il tient sous sa garde.

Voilà pourquoi ce berger n’est pas de la terre mais du ciel. La parabole n’est nullement la représentation d’œuvres humaines, mais elle cache des mystères divins, comme les nombres qu’elle mentionne le démontrent d’emblée: Si l’un de vous, dit le Seigneur, a cent brebis et en perd une... (Lc 15,3) <>

Vous le voyez, la perte d’une seule brebis a douloureusement éprouvé ce berger, comme si le troupeau tout entier, privé de sa protection, s’était engagé dans une mauvaise voie. Aussi, laissant là les quatre-vingt-dix-neuf autres, il part à la recherche d’une seule, il ne s’occupe que d’une seule, afin de les retrouver et de les sauver toutes en elle.

Mais il est temps d’expliquer le sens caché de cette parabole céleste. Cet homme qui possède cent brebis, le Christ, est le bon pasteur, le pasteur miséricordieux qui a établi tout le troupeau de la race humaine en une seule brebis, c’est-à-dire en Adam. Il avait placé la brebis dans le paradis enchanteur et dans la région des pâturages de vie. Mais elle, se fiant aux hurlements des loups, a oublié la voix du berger, elle a perdu le chemin qui conduit au bercail du salut et s’est trouvée toute couverte de blessures mortelles. Le Christ est venu dans le monde chercher la brebis et l’a retrouvée dans le sein de la Vierge. Il est venu, il est né dans la chair, il a placé la brebis sur la croix, et l’a prise sur les épaules de sa passion. Puis, tout rempli de la joie de la résurrection, il l’a élevée, par son ascension, jusqu’à la demeure du ciel.

Il réunit ses amis et ses voisins, c’est-à-dire les anges, et il leur dit: Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé ma brebis, celle qui était perdue (Lc 15,6)! Les anges jubilent et exultent avec le Christ pour le retour de la brebis du Seigneur. Ils ne s’irritent pas de la voir siéger devant eux sur le trône de majesté. Car l’envie n’existe plus au ciel dont elle a été bannie avec le diable. Grâce à

l’Agneau qui a enlevé le péché du monde, le péché d’envie ne peut plus pénétrer dans les cieux.

Frères, le Christ est venu nous chercher sur la terre; cherchons-le dans les cieux. Il nous a emportés dans la gloire de sa divinité; nous, portons-le dans notre corps par la sainteté de toute notre vie. Rendez gloire à Dieu, dit l’Apôtre, et portez-le dans votre corps (1 Co 6,20 latin). Celui qui vit dans la chair sans lui faire accomplir aucune œuvre de péché, celui-là porte Dieu dans son corps.

Prière

Dieu créateur et maître de toutes choses, regarde-nous, et pour que nous ressentions l’effet de ton amour, accorde-nous de te servir avec un cœur sans partage. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu de miséricorde, quand nous étions encore pécheurs, tu as envoyé ton Fils pour nous réconcilier avec toi, car tu es un père qui pardonne et tu te réjouis de retrouver ce qui était perdu. Avive en nos cœurs la conscience de notre péché, pour que nous nous laissions trouver par celui qui est parti à notre recherche, Jésus Christ, notre Seigneur. Lui qui règne.

 

25e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 16,1-13

Jésus disait à ses disciples : "Un homme riche avait un gérant qui lui fut dénoncé parce qu’il gaspillait ses biens."

Homélie

Nous ne sommes pas propriétaires des biens d’ici-bas

Homélie de saint Gaudence de Brescia († 410)

Sermon 18; PL 20, 973-975

Le Seigneur Jésus est le maître véritable qui enseigne à ses disciples les préceptes nécessaires au salut. Il a raconté à ses Apôtres d’alors la parabole de l’intendant pour les exhorter, ainsi que tous les croyants d’aujourd’hui, à se montrer fidèles à faire l’aumône. En faisant le portrait de ce personnage, il a voulu nous apprendre que rien ne nous appartient ici-bas, mais que notre Seigneur nous a remis l’administration de ses richesses pour en faire un usage convenable, en rendant grâce, ou pour les distribuer à nos compagnons de service selon les besoins de chacun. Il ne nous est pas permis de gaspiller au hasard les richesses qui nous ont été confiées, ni de les employer à des dépenses superflues, car nous devrons rendre compte de leur usage au Seigneur, lors de sa venue.

A la fin, le Seigneur a ajouté cette conclusion à la parabole: Eh bien, moi, je vous dis : Faites-vous des amis avec l’argent trompeur afin que, le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles (Lc 16,9). <> Ces amis, qui obtiendront notre salut, sont évidemment les pauvres, car, selon la parole du Christ, c’est lui-même, l’auteur de la récompense éternelle, qui recueillera en eux les services que notre charité leur aura procurés. Dès lors, les pauvres nous feront bon accueil, non point en leur propre nom, mais au nom de celui qui, en eux, goûte le fruit rafraîchissant de notre obéissance et de notre foi.

Ceux qui accomplissent ce service de l’amour seront reçus dans les demeures éternelles du Royaume des cieux, puisqu’aussi bien le Christ dira : Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le royaume préparé pour vous depuis le commencement du monde. Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire (Mt 25,34). <>

Il a dit également : Si vous n’avez pas été fidèles avec l’argent trompeur, qui vous confiera le bien véritable (Lc 16,11)? Si quelqu’un, en effet, ne se montre pas fidèle dans l’administration des richesses terrestres, qui procurent les moyens de commettre beaucoup d’actions malhonnêtes, qui pensera à lui confier les vraies richesses célestes, dont jouissent avec raison et équitablement ceux qui se sont montrés justes, et fidèles à faire des dons aux pauvres? <>

Aussitôt après avoir dit cela, le Seigneur ajoute, finalement : Et si vous n’avez pas été dignes de confiance pour des biens étrangers, le vôtre, qui vous le donnera (Lc 16,12)? En effet, rien de ce qui est dans ce monde ne nous appartient vraiment. Car nous qui attendons la récompense future, nous sommes invités à nous conduire ici-bas comme des hôtes et des pèlerins, de façon que nous puissions tous dire au Seigneur avec assurance : Je suis un étranger, un passant comme tous mes pères (ps 38,13).

Mais les biens éternels appartiennent en propre aux croyants. Ils se trouvent au ciel, là où, nous le savons, sont notre cœur et notre trésor (Mt 6,21), et où — c’est notre intime conviction — nous habitons dès maintenant par la foi. Car, selon l’enseignement de saint Paul: Nous sommes citoyens des deux (Ph 3,20).

Prière

Seigneur, tu as voulu que toute la loi consiste à t’aimer et à aimer son prochain; donne-nous de garder tes commandements, et de parvenir ainsi à la vie éternelle. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur Dieu, tu es notre maître et notre seule vraie richesse; pourtant nous nous laissons asservir par les biens de ce monde. Accorde-nous d’être libres à l’égard de l’argent, habiles à ton service et généreux envers les pauvres, tes amis, qui nous recevront dans les demeures éternelles. Par Jésus Christ.

 

26e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 16,19-31

Jésus disait cette parabole : "Il y avait un homme riche qui portait des vêtements de luxe et faisait chaque jour des festins somptueux. Un pauvre, nommé Lazare, était couché devant le portail, couvert de plaies."

Homélie

Accueillir le pauvre et l’inconnu

Homélie de saint Jean Chrysostome († 407)

Homélie sur Lazare 2, 5 ; PG 48, 988-989

A propos de cette parabole, il convient de nous demander pourquoi le riche voit Lazare dans le sein d’Abraham plutôt qu’en compagnie d’un autre juste. C’est qu’Abraham s’est montré hospitalier. Il apparaît donc à côté de Lazare pour accuser le riche d’avoir été inhospitalier. En effet, le patriarche cherchait à retenir même les simples passants pour les faire entrer sous sa tente. Le riche, au contraire, n’avait eu que dédain pour celui qui logeait dans sa propre maison. Or, il avait les moyens, avec tout l’argent dont il disposait, d’assurer la sécurité du pauvre. Mais il a continué, jour après jour, à l’ignorer et il a négligé de lui donner l’aide dont il avait besoin.

Le patriarche n’a pas agi de cette façon, bien au contraire! Assis à l’entrée de sa tente, il mettait la main sur tous ceux qui passaient, à la manière dont un pêcheur jette son filet dans la mer pour y prendre du poisson, et souvent même de l’or et des pierres précieuses. Ainsi, en ramenant des hommes dans son filet, il est arrivé qu’Abraham prenne des anges et, chose étonnante, sans même le deviner!

Paul lui-même en a été tout émerveillé, ce qui nous a valu cette exhortation: N’oubliez pas l’hospitalité. Elle a permis à certains, sans le savoir, de recevoir chez eux des anges (He 13,2). Paul a raison de dire: sans le savoir. Si Abraham avait su que ceux qu’il accueillait avec tant de bienveillance étaient des anges, il n’aurait rien fait d’extraordinaire ni d’admirable. Il reçoit donc cet éloge uniquement parce qu’il ignorait l’identité des passants. En effet, ces voyageurs qu’il invitait si généreusement chez lui, il les prenait pour des hommes ordinaires.

Tu sais bien, toi aussi, te montrer plein d’empressement pour recevoir un personnage célèbre, mais cela ne vaut pas que l’on s’en émerveille. Car il arrive souvent qu’un homme, même inhospitalier, dès qu’il est obligé de recevoir une personne de qualité, y mette toute sa bonne volonté. En revanche, il est très remarquable et vraiment admirable de réserver un accueil plein de bonté aux premiers venus, aux gens inconnus et ordinaires. Ceux qui pratiquent cet accueil, le Christ les reçoit avec ces garoles : Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits, c’est à moi que vous l’avez fait (Mt 25,40). Il leur dit aussi: Ainsi, votre Père ne veut pas qu’un seul de ces petits soit perdu (Mt 18,14). Et encore: Celui qui entraînera la chute d’un seul de ces petits, il est préférable pour lui qu’on lui accroche au cou une de ces meules que tournent les ânes et qu’on l’engloutisse en pleine mer (Mt 18,6). Dans tout son enseignement, d’ailleurs, le Christ fait une grande place aux petits et aux humbles.

Abraham était également animé de la même conviction quand il s’interdisait d’interroger les passants pour connaître leur identité ou leur origine, comme nous le faisons en pareilles circonstances. Il accueillait simplement tous les passants. Car celui qui veut faire du bien à quelqu’un n’a pas à lui demander des comptes sur sa vie, mais à soulager sa pauvreté et à remédier à son indigence. <> C’est ce que le Christ nous a ordonné de faire en disant : Imitez votre Père qui est dans les deux; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes (Mt 5,45).

Prière

Dieu qui donnes la preuve suprême de ta puissance, lorsque tu patientes et prends pitié, sans te lasser, accorde-nous ta grâce; en nous hâtant vers les biens que tu promets, nous parviendrons au bonheur du ciel. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur, Dieu d’Abraham et Dieu de Jésus Christ, tu combles de biens les affamés et tu renvoies les riches les mains vides. Fais de nous des pauvres en esprit et en vérité. Alors nous deviendrons capables de comprendre les avertissements que tu nous donnes en cette vie et nous pourrons obtenir dans l’autre le bonheur. Par Jésus Christ.

 

27e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 17,5-10

Les Apôtres dirent au Seigneur : "Augmente en nous la foi?" Le Seigneur répondit: "La foi, si vous en aviez gros comme une graine de moutarde, vous diriez au grand arbre que voici: ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’ ; il vous obéirait."

Homélie

Prier pour que grandisse notre foi

Homélie de saint Augustin († 430)

Sermon 115, 1; PL 38, 655.

La lecture du saint évangile fortifie notre prière et notre foi, et nous dispose à nous appuyer non sur nous-mêmes mais sur le Seigneur. Y a-t-il un moyen plus efficace de nous encourager à la prière que la parabole du juge inique qui nous a été racontée par le Seigneur? Le juge inique, évidemment, ne craignait pas Dieu ni ne respectait les hommes. Il n’éprouvait aucune bienveillance pour la veuve qui recourait à lui et cependant, vaincu par l’ennui, il finit par l’écouter. Si donc il exauça cette femme qui l’importunait par ses prières, comment ne serions-nous pas exaucés par celui qui nous encourage à lui présenter nos prières? C’est pourquoi le Seigneur nous a proposé cette comparaison tirée des contraires pour nous faire comprendre qu’il faut toujours prier sans se décourager (Lc 18,1). Puis il a ajouté: Mais le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre! (Lc 18,8).

Si la foi disparaît, la prière s’éteint. Qui pourrait, en effet, prier pour demander ce qu’il ne croit pas? Voici donc ce que l’Apôtre dit en exhortant à prier: Tous ceux qui invoqueront le nom du Seigneur seront sauvés. Puis, pour montrer que la foi est la source de la prière et que le ruisseau ne peut couler si la source est à sec, il ajoute : Or, comment invoquer le Seigneur sans avoir d’abord cru en lui (Rm 10,13-14)? Croyons donc pour pouvoir prier et prions pour que la foi, qui est au principe de notre prière, ne nous fasse pas défaut. La foi répand la prière, et la prière, en se répandant, obtient à son tour l’affermissement de la foi.

D’ailleurs, pour que la foi ne faiblisse pas dans les tentations, le Seigneur a dit : Veillez et priez, pour ne pas entrer en tentation (Mt 26,41). Telles sont ses paroles : Veillez et priez, pour ne pas entrer en tentation. Qu’est-ce qu’entrer en tentation? Simplement, sortir de la foi. Car la tentation est d’autant plus forte que la foi est plus faible, et la tentation est d’autant plus faible que la foi est plus forte. Oui, vraiment, mes bien-aimés, c’est pour que la foi ne s’affaiblisse pas et ne se perde pas que le Seigneur a dit: Veillez et priez, pour ne pas entrer en tentation. Afin que vous le compreniez mieux, il a dit au même endroit dans l’évangile: Satan vous a réclamés pour vous passer au crible comme le froment. Mais j’ai prié pour toi, Pierre, afin que ta foi ne sombre pas (Lc 22,31-32). Et celui que guette le danger ne ferait pas sienne la prière de son protecteur?

Mais lorsque le Seigneur dit: Le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ?, il a en vue la foi parfaite, celle qu’on peut à peine trouver sur la terre. Voyez: l’église de Dieu est remplie. Qui y viendrait s’il n’avait aucune foi? Mais si cette foi était parfaite, qui ne transporterait pas les montagnes ? Regardez les Apôtres eux-mêmes: s’ils n’avaient pas eu une grande foi, ils n’auraient pas renoncé à tout ce qu’ils avaient, ils n’auraient pas foulé aux pieds les espoirs terrestres pour suivre le Christ. Et pourtant, leur foi n’était pas parfaite, car ils n’auraient pas dit au Seigneur: Augmente en nous la foi (Lc 17,5).

Prière

Dans ton amour inépuisable, Dieu éternel et tout-puissant, tu combles ceux qui t’implorent, bien au-delà de leurs mérites et de leurs désirs ; répands sur nous ta miséricorde en délivrant notre conscience de ce qui l’inquiète et en donnant plus que nous n’osons demander. Par Jésus Christ.

ou bien

Fais de nous des hommes qui vivent de la foi, Seigneur Dieu. Développe ce que tu as semé en nous le jour de notre baptême, pour que nous mettions toutes nos forces à te servir, sans attendre de récompense. Notre joie n’est-elle pas d’être des serviteurs de Jésus Christ? Lui qui règne.

 

28e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 17,11-19

Jésus, marchant vers Jérusalem, traversait la Samarie et la Galilée. Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre. Ils s’arrêtèrent à distance et lui crièrent: "Jésus, maître, prends pitié de nous." En les voyant, Jésus leur dit: "Allez vous montrer aux prêtres."

Homélie

La foi qui purifie

Homélie de saint Bruno de Segni († 1123)

Commentaire sur l’évangile de Luc, 2, 40, PL 165, 426-428

Jésus, marchant vers Jérusalem, traversait la Samarie. Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre (Lc 17,11-12). Que représentent les dix lépreux sinon l’ensemble des pécheurs? <> Lorsque vint le Christ notre Seigneur, tous les hommes souffraient de la lèpre de l’âme, même s’ils n’étaient pas tous atteints de celle du corps. Or la lèpre de l’âme est bien pire que celle du corps. Mais voyons la suite. Ils s’arrêtèrent à distance et lui crièrent: Jésus, maître, prends pitié de nous (Lc 17,13). Ces hommes se tenaient à distance car ils n’osaient pas, étant donné leur état, s’avancer plus près de lui. Il en va de même pour nous : tant que nous demeurons dans nos péchés, nous nous tenons à l’écart. Donc, pour recouvrer la santé et guérir de la lèpre de nos péchés, supplions d’une voix forte et disons : Jésus, maître, prends pitié de nous. Cette supplication ne doit toutefois pas venir de notre bouche, mais de notre cœur, car le cœur parle d’une voix plus forte. La prière du cœur pénètre dans les cieux et s’élève très haut, jusqu’au trône de Dieu.

En les voyant, Jésus leur dit: Allez vous montrer aux prêtres (Lc 17,14). En vérité, lorsque Dieu regarde, il prend pitié. Il voit donc les lépreux, et aussitôt, saisi de pitié, il leur prescrit d’aller trouver les prêtres, non pour que les prêtres les purifient, mais pour qu’ils les déclarent purs. <>

En cours de route, ils furent purifiés (Lc 17,15). Il faut que les pécheurs entendent cette parole et fassent l’effort de la comprendre. Il est facile au Seigneur de remettre les péchés. Souvent, en effet, le pécheur est pardonné avant de venir trouver le prêtre. En réalité, il est guéri à l’instant même où il se repent. Quel que soit, en effet, le moment où il se convertit, il passe de la mort à la vie. <> Qu’il se rappelle cependant de quelle conversion il s’agit. Qu’il écoute ce que dit le Seigneur : Revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil! Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements (Jl 2,12) Toute conversion doit donc s’opérer dans le cœur, au-dedans. Car Dieu ne repousse pas un cœur brisé et broyé (Ps 50,19).

L’un d’eux, voyant qu’il était guéri, revint sur ses pas, en glorifiant Dieu à pleine voix. Il se jeta la face contre terre aux pieds de Jésus, en lui rendant grâce. Or, c’était un Samaritain (Lc 17,15-16). En réalité, cet homme représente tous ceux qui ont été purifiés dans l’eau du baptême ou guéris par le sacrement de pénitence. Ils ne suivent plus le démon, mais imitent le Christ, ils marchent à sa suite en le glorifiant et en lui rendant grâce, et ils n’abandonnent pas son service. <>

Jésus lui dit : Relève-toi et va : ta foi t’a sauvé (Lc 17,19). Grande est donc la puissance de la foi, car sans elle, selon la parole de l’Apôtre, il est impossible d’être agréable à Dieu (He 11,6). Abraham eut foi en Dieu, et, de ce fait, Dieu estima qu’il était juste (Rm 4,3). C’est donc la foi qui sauve, la foi qui justifie, la foi qui guérit l’homme dans son âme et dans son corps.

Prière

Nous t’en prions, Seigneur, que ta grâce nous devance et qu’elle nous accompagne toujours, pour nous rendre attentifs à faire le bien sans relâche. Par Jésus Christ.

ou bien

Nous te rendons gloire, Seigneur Dieu. Tu nous as purifiés de la lèpre du péché et tu nous as donné le salut par la foi en ton Fils. Prends pitié de ceux qui souffrent de la lèpre dans leur chair, et donne à tous les hommes que tu as sauvés de vivre sans cesse dans l’action de grâce. Par Jésus Christ.

 

29e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 18,1-8

Jésus dit une parabole pour montrer à ses disciples qu’il faut toujours prier sans se décourager : "Il y avait dans une ville un juge qui ne respectait pas Dieu et se moquait des hommes. Dans cette même ville, il y avait une veuve qui venait lui demander : ‘Rends-moi justice contre mon adversaire.’"

Homélie

Prier

Homélie de saint Grégoire de Nysse († 395)

Homélies sur la prière du Seigneur, 1 , PG 44, 1120 1124-1125

Le Verbe de Dieu nous livre ses enseignements sur la prière lorsqu’il apprend aux disciples qui en sont dignes et qui cherchent avec ferveur à s’en instruire, avec quelles paroles il convient de prier pour se faire entendre de Dieu. <> Au contraire, celui qui ne s’unit pas à Dieu par la prière, se détachera de lui. Ce discours devra donc nous faire comprendre en premier lieu qu’il faut toujours prier sans se décourager (Lc 18,1). Car la prière a pour effet d’unir l’homme à Dieu, et celui qui est en communion avec Dieu est loin de l’Adversaire.

La prière sauvegarde la tempérance, maîtrise la colère, abat l’orgueil, extirpe la rancune. <> La prière est le sceau de la virginité et la fidélité du mariage. Elle est le bouclier des voyageurs, la garde de ceux qui dorment, la confiance de ceux qui veillent, la prospérité des agriculteurs, la sécurité des navigateurs. <>

Vraiment, quand bien même nous passerions toute notre vie à converser avec Dieu dans la prière et l’action de grâce, nous resterions, je crois, aussi indignes de cet échange avec notre bienfaiteur que si nous n’avions même pas conçu le désir de lui manifester notre reconnaissance.

Le temps se divise en trois moments : le passé, le présent et l’avenir. En chacun d’eux nous saisissons la bienveillance divine. Penses-tu au présent? Tu es en vie grâce au Seigneur. Si tu envisages l’avenir, l’espoir de réaliser tes désirs repose sur le Seigneur. Quant au passé, tu n’aurais pas existé si le Seigneur ne t’avait pas créé.

Il t’a accordé sa faveur en te faisant naître, et depuis ta naissance il te l’accorde encore. Comme l’Apôtre le dit: Tu as en lui la vie et le mouvement (cf. Ac 17,28). Tu fondes sur cette même faveur ton espoir des réalités à venir. Toi, tu n’es maître que du présent.

Même si tu ne cesses de rendre grâce à Dieu durant toute ta vie, cela égalera à peine la grâce qu’il te fait au moment présent, et tu ne trouveras jamais le moyen de payer ta dette de reconnaissance pour le passé et pour l’avenir. Que nous sommes loin, d’ailleurs, de lui rendre grâce selon la mesure de nos capacités ! C’est au point que nous n’employons même pas les possibilités qui nous sont offertes de manifester notre gratitude. Nous négligeons, en effet, de réserver, je ne dis pas toute la journée, mais même une infime partie de celle-ci, à la méditation des réalités divines. <>

Qui a rétabli dans la grâce originelle l’image divine que le péché avait ternie en moi ? Qui me fait monter vers le bonheur que je possédais avant d’être exilé du paradis, privé de l’arbre de vie et englouti dans l’abîme de cette existence charnelle? Il n’y a personne qui comprenne (Rm 3,11), dit l’Écriture. Car, en vérité, si nous y étions vraiment attentifs, durant toute notre vie nous ne cesserions de rendre grâce à Dieu.

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, fais-nous toujours vouloir ce que tu veux et servir ta gloire d’un cœur sans partage. Par Jésus Christ.

Fais venir ton Règne, Seigneur Dieu. Quand le monde nous paraît s’éloigner de toi et la foi s’étioler, fortifie notre espérance et ranime notre ardeur à te prier. N’as-tu pas promis de faire justice à tes élus qui crient vers toi jour et nuit? Par Jésus Christ.

 

30e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 18,9-14

Jésus dit une parabole pour certains hommes qui étaient convaincus d’être justes et qui méprisaient tous les autres : "Deux hommes montèrent au Temple pour prier. L’un était pharisien et l’autre, publicain."

Homélie

Aux humbles Dieu accorde sa grâce

Homélie de Grégoire Palamas († 1359)

Homélie 2; PG 151, 17-20.28-29.

Cet être spirituel qui est le premier auteur du mal et qui s’ingénie à le répandre, se montre très habile à détruire par le désespoir et l’infidélité les fondements de la vertu dans l’instant même où ils ont été posés dans une âme. Ensuite, lorsque se dressent les murs de ce j’appellerai la maison de la vertu, il se sert aussi très astucieusement du découragement et de la négligence pour leur donner l’assaut. Même quand le toit des bonnes œuvres vient d’être construit, il l’abat encore avec l’arrogance et la présomption.

Restez fermes pourtant, ne vous effrayez pas, car l’homme zélé pour le bien est plus habile que lui. Et la vertu possède, pour résister au mal, une force plus grande que la sienne. Elle bénéficie, en effet, de l’assistance et du secours envoyés d’en haut par Celui qui peut tout. Dans sa bonté, il rend forts tous ceux qui aiment la vertu.

De la sorte, celle-ci restera inébranlable face aux multiples et funestes machinations ourdies par l’Adversaire. Elle pourra en outre relever et rétablir ceux qui sont tombés dans l’abîme des maux, et les conduire facilement à Dieu par le repentir et l’humilité.

La parabole nous le fait comprendre suffisamment. Le publicain, bien qu’il soit publicain et passe sa vie dans ce que j’appellerai l’abîme du péché, s’unit par une simple prière à ceux qui mènent une vie conforme à la vertu. Grâce à cette courte prière il se sent léger, il s’élève, il triomphe de tout mal, il est agrégé au chœur des justes et justifié par le Juge impartial. Le pharisien, lui, est condamné sur ce qu’il dit, bien qu’il soit pharisien et se considère comme quelqu’un d’important. Car il n’est pas vraiment juste, et de sa bouche sortent beaucoup de paroles d’orgueil qui, toutes, provoquent la colère de Dieu.

Pourquoi l’humilité élève-t-elle l’homme à la hauteur de la sainteté, tandis que la présomption le précipite dans le gouffre du péché? Voici. Celui qui se prend pour quelqu’un d’important devant Dieu est à juste titre abandonné par Dieu, puisqu’il pense ne pas avoir besoin de son secours. L’autre reconnaît son néant et, de ce fait, se tourne vers la miséricorde divine. Il trouve à juste raison la compassion, l’assistance et la grâce de Dieu. L’Écriture dit en effet: le Seigneur résiste aux orgueilleux, mais il accorde aux humbles sa grâce (cf. Pr 3,34 grec; Je 4,6; 1 P 5,5). <>

Selon la parole du Seigneur, quand ce dernier rentra chez lui, c’est lui qui était devenu juste et non pas l’autre. Qui s’élève sera abaissé; qui s’abaisse sera élevé (Lc 18,14). Du fait que le diable est l’orgueil même, et l’arrogance son vice propre, ce mal conquiert puis entraîne avec lui toute vertu humaine à laquelle il se mêle. Pareillement, s’abaisser devant Dieu est la vertu des bons anges : elle triomphe également de tous les vices humains dont sont affligés les pécheurs. Car l’humilité est le char qui nous emmène vers Dieu, sur ces nuées qui doivent emporter jusqu’à lui ceux qui lui seront unis dans les siècles sans fin, selon la prophétie de l’Apôtre: Nous serons emportés, dit-il, sur les nuées du ciel à la rencontre du Seigneur. Ainsi, nous serons pour toujours avec le Seigneur (1 Th 4,17). Car l’humilité est semblable à une nuée : elle prend corps dans le repentir, elle fait jaillir des yeux un torrent de larmes, elle rend dignes les indignes, elle conduit et unit à Dieu ceux qui, en raison de leur volonté droite, sont justifiés par la grâce.

Prière

Dieu éternel et tout-puissant, augmente en nous la foi, l’espérance et la charité; et pour que nous puissions obtenir ce que tu promets, fais-nous aimer ce que tu commandes. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur notre Dieu, toi qui rends justes ceux qui se reconnaissent pécheurs, prends pitié de nous. Fais-nous fuir relèvement et donne-nous la force d’imiter celui qui s’est abaissé jusqu’à la mort, Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur. Lui qui règne.

 

31e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 19,1-10

Jésus traversait la ville de Jéricho. Or il y avait un homme du nom de Zachée ; il était le chef des collecteurs d’impôts, et c’était quelqu’un de riche. Il cherchait à voir qui était Jésus, mais il n’y arrivait pas à cause de la foule, car il était de petite taille.

Homélie

Dieu, notre seul bien

Homélie de Philoxène de Mabboug († 523)

Homélie 4, 79-80, version remaniée de SC 44, 96-97

Tous ceux qui ont été appelés par le Seigneur ont obéi aussitôt à sa voix dès lors que l’amour des choses terrestres n’alourdissait pas leur âme. Car les liens du monde asservissent le cœur et ses pensées, et celui qui en est entravé entend difficilement résonner la voix de Dieu. Mais il n’en alla pas ainsi des Apôtres, ni des justes, ni des Patriarches qui vécurent avant eux: ils obéirent comme des vivants et prirent la route, légers, parce qu’aucune lourde chaîne ne les attachait au monde. Rien ne peut lier ni entraver l’âme qui aperçoit Dieu: elle est ouverte et prête, si bien que la lumière de la loi divine, chaque fois qu’elle s’approche de cette âme, la trouve disposée à la recevoir.

Notre Seigneur a aussi appelé Zachée du sycomore sur lequel il était monté, et aussitôt Zachée s’empressa de descendre et le reçut dans sa maison, car, avant même d’être appelé, il avait l’espoir de le voir et de devenir son disciple. L’admirable est que, sans que le Seigneur lui eût parlé et sans l’avoir vu avec les yeux du corps, Zachée ait cru en lui, simplement sur la parole des autres, car la foi qui était en lui avait été préservée dans sa vie et sa santé naturelles. Le fait qu’il ait cru en notre Seigneur au moment même où il apprit son arrivée, a rendu sa foi manifeste. Et la simplicité de sa foi est apparue lorsqu’il promit de donner la moitié de ses biens aux pauvres et de rendre au quadruple ce qu’il avait pris d’une manière malhonnête.

En effet, si la simplicité qui convient à la foi n’avait pas rempli à ce moment l’âme de Zachée, il n’aurait pas fait cette promesse à Jésus, et il n’aurait pas dépensé et distribué en peu de temps ce qu’il avait amassé en tant d’années de travail. La simplicité a répandu de tous côtés ce que l’astuce avait amassé, la pureté de l’âme a dispersé ce que la tromperie avait acquis, la foi a renoncé à ce que l’injustice avait obtenu et possédé, et elle a proclamé que cela ne lui appartenait pas.

Car Dieu est le seul bien de la foi et celle-ci refuse de posséder d’autres biens avec lui. La foi ne fait aucun cas des biens, quels qu’ils soient, en dehors de Dieu, son seul bien durable. Nous avons reçu en nous la foi pour parvenir à Dieu, ne posséder que lui et regarder comme un désavantage tout ce qui n’est pas lui.

Prière

Dieu de puissance et de miséricorde, c’est ta grâce qui donne à tes fidèles de pouvoir dignement te servir; accorde-nous de progresser sans que rien nous arrête vers les biens que tu promets. Par Jésus Christ.

ou bien

Descends chez nous, Seigneur Jésus, car le péché nous tient, et nous avons besoin de ta présence pour nous libérer. Viens chercher ce qui est en train de se perdre et sauve-le à jamais. Par Jésus Christ.

 

32e dimanche du temps ordinaire C

Evangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 20,27-38

Des sadducéens — ceux qui prétendent qu’il n’y a pas de résurrection — vinrent trouver Jésus, et ils l’interrogèrent: "Maître, Moïse nous a donné cette loi: Si un homme a un frère marié mais qui meurt sans enfant, qu’il épouse la veuve pour donner une descendance à son frère."

Homélie

Le Dieu des vivants

Traité de saint Irénée († 200)

Contre les hérésies, 4, 5, 2-4; d’après la traduction d’A. rousseau, Paris, Cerf, 1984, 416-417.

Quand notre Seigneur et Maître répondit aux sadducéens qui niaient la résurrection et, à cause de cela, méprisaient Dieu et ridiculisaient la Loi, il a tout à la fois prouvé la résurrection et fait connaître Dieu : Au sujet de la résurrection des morts, n’avez-vous pas lu ce que Dieu vous a dit: Moi, je suis le Dieu d Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob (Mt 22,31-32)? Et il ajoute: Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants (Mt 22,32; Lc 20,38). Par là il a fait connaître clairement que celui qui, du sein du buisson, parla à Moïse et déclara être le Dieu des pères, c’est lui le Dieu des vivants. Or qui donc serait le Dieu des vivants, sinon le vrai Dieu, au-dessus duquel il n’y a pas d’autre Dieu? C’est lui qu’avait annoncé le prophète Daniel. A Cyrus, le roi des Perses, qui lui demandait : Pourquoi n’adores-tu pas Bel ?, celui-ci répondait : Parce que je ne vénère pas des idoles faites de main d’homme, mais le Dieu vivant qui a créé le ciel et la terre et qui a pouvoir sur toute chair (Dn 14,5). Il disait encore: J’adorerai le Seigneur, mon Dieu, parce que c’est lui le Dieu vivant (Dn 14,25).

Ainsi le Dieu qu’adoraient les prophètes, le Dieu vivant, c’est lui le Dieu des vivants, ainsi que son Verbe, qui a parlé à Moïse, qui a aussi confondu les sadducéens et accordé la résurrection; à partir de la Loi, il a démontré à ces aveugles deux choses : la résurrection et Dieu. Car s’il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants, et si lui-même est appelé le Dieu des pères qui se sont endormis, sans aucun doute ils sont vivants pour Dieu et n’ont pas péri, puisqu’ils sont fils de la résurrection (Lc 20,36).

Or la résurrection, c’est notre Seigneur en personne, ainsi qu’il le dit lui-même : Je suis la résurrection et la vie (Jn 11,25). Et les pères sont ses fils, car il a été dit par le prophète: Au lieu de pères qu’ils étaient, ils sont devenus tes fils (d’après ps 44,17). Le Christ lui-même est donc bien, avec le Père, le Dieu des vivants qui a parlé à Moïse et qui s’est manifesté aux pères.

C’est précisément ce qu’il enseignait, lorsqu’il disait aux Juifs: Abraham votre père a tressailli d’allégresse dans l’espoir de voir mon Jour. Il l’a vu, et il a été dans la joie (Jn 8,56). Qu’est-ce à dire? Abraham eut foi en Dieu, et de ce fait, Dieu estima qu’il était juste (Rm 4,3 ; Ga 3,6; cf. Gn 15,6). Il crut, en premier lieu, que c’était lui l’Auteur du ciel et de la terre, le seul Dieu (cf. Gn 14,22); ensuite, qu’il rendrait sa postérité pareille aux étoiles du ciel (cf. Gn 15,5). C’est le mot même de Paul: Vous brillez comme des astres dans l’univers (Ph 2,15).

C’est donc à juste titre que, laissant là toute sa parenté terrestre, il suivait le Verbe de Dieu, se faisant étranger avec le Verbe afin de devenir concitoyen du Verbe (cf. Gn 12,1-5). C’est ajuste titre aussi que les Apôtres, ces descendants d’ Abraham, laissant là leur barque et leur père, suivaient le Verbe (cf. Mt 4,22). C’est ajuste titre enfin que nous, qui avons la même foi qu’Abraham, prenant notre croix comme Isaac prit le bois (cf. Gn 22,6), nous suivons ce même Verbe. Car, en Abraham, l’homme avait appris par avance et s’était accoutumé à suivre le Verbe de Dieu.

Prière

Dieu qui es bon et tout-puissant, éloigne de nous tout ce qui nous arrête, afin que sans aucune entrave, ni d’esprit ni de corps, nous soyons libres pour accomplir ta volonté. Par Jésus Christ.

ou bien

Seigneur, Dieu des vivants, par le Christ vainqueur de la mort tu nous appelles à une vie sans déclin. Fais de nous tes fils et les héritiers de la résurrection, pour que nous puissions, avec les anges, contempler ta gloire à jamais. Par Jésus Christ.

 

33e dimanche du temps ordinaire C

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 21,5-19

Certains disciples de Jésus parlaient du Temple, admirant la beauté des pierres et les dons des fidèles. Jésus leur dit: "Ce que vous contemplez, des jours viendront où il n’en restera pas pierre sur pierre : tout sera détruit."

Homélie

Tenir jusqu’au bout

Lettre de Nil d’Ancyre († vers 430)

Lettres, livre 3, 35; PG 79, 401-404.

Quand survient l’épreuve, la force de la supporter en conformité avec la volonté de Dieu est d’un grand secours. Le Seigneur dit en effet: C’est par votre persévérance que vous sauverez vos vies (Lc 21,10). Il ne dit pas: "par votre jeûne", ni "par votre solitude et votre silence", ni "par le chant des psaumes" — tout cela est certainement utile au salut de nos âmes —, mais il dit: par votre persévérance.

Cela vaut pour toutes les épreuves et difficultés qui se présenteront: que ce soit l’insulte, le mépris, la honte infligée par tel homme obscur ou important ; que ce soit l’infirmité corporelle, les attaques furieuses de Satan et les épreuves de toutes sortes causées par les hommes ou les esprits mauvais.

C’est par votre persévérance que vous sauverez vos vies. Non par votre seule persévérance, mais aussi par une parfaite action de grâce, par votre prière et par votre humilité. De sorte que vous fassiez monter des louanges et des hymnes vers Dieu, le Sauveur du monde, le bienfaiteur qui dispose toutes choses et les dirige toutes, bonnes ou mauvaises, pour votre bien.

Et l’Apôtre écrit: Nous courons avec endurance l’épreuve de la foi qui nous est proposée (He 12,1). Qu’y a-t-il, en effet, de plus puissant que la vertu? De plus solide et de plus fort que la patience? J’entends la patience conforme à la volonté de Dieu, la reine des vertus, le fondement des actes méritoires, le port que les vagues ne peuvent atteindre.

La patience donne, en effet, la paix au milieu des guerres, la tranquillité sur une mer houleuse, la sécurité parmi les complots et les dangers. Elle rend celui qui la met en pratique plus résistant que l’acier. Ni les armes, ni les arcs que l’on brandit, ni l’agitation des camps, ni l’approche des machines de guerre, ni les volées de flèches et de lances, ni l’armée même des démons, ni les sombres troupes des puissances hostiles, ni le diable en personne, prêt à combattre avec toute son armée et ses stratagèmes, ne pourra infliger aucun mal à celui qui a acquis cette vertu par la grâce du Christ.

Prière

Accorde-nous, Seigneur, de trouver notre joie dans notre fidélité : car c’est un bonheur durable et profond de servir constamment le créateur de tout bien. Par Jésus Christ.

ou bien

Dieu qui es l’origine et la fin du monde, fais vivre tes disciples dans l’espérance de ta venue. Que les épreuves qui surviennent n’ébranlent pas leur confiance, et que les persécutions subies à cause du Nom de Jésus leur soient une occasion de rendre témoignage à ton Fils. Lui qui règne.

 

34e dimanche du temps ordinaire C Le Christ Roi de l’univers

Évangile

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 23,35-43

On venait de crucifier Jésus, et le peuple restait là à regarder. Les chefs ricanaient en disant : "Il en a sauvé d’autres ! qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu!"

Homélie

Sur la croix, il est roi

Homélie de saint Jean Chrysostome († 407)

Homélie sur la croix et le larron, 1,3-4, PG 49, 403-404.

Seigneur, souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton Règne (Lc 23,42). Le larron n’a pas osé faire cette prière avant d’avoir déposé par son aveu le fardeau de ses péchés. Tu vois, chrétien, quelle est la puissance de la confession! Il a avoué ses péchés et le paradis s’est ouvert. Il a avoué ses péchés et il a eu assez d’assurance pour demander le Royaume après ses brigandages.

Songes-tu à tous les bienfaits que la croix nous procure ? Tu veux connaître le Royaume ? Dis-moi : Que vois-tu donc ici qui y ressemble? Tu as sous les yeux les clous et une croix, mais cette croix même, disait Jésus, est bien le signe du Royaume. Et moi, en le voyant sur la croix, je le proclame roi. Ne revient-il pas à un roi de mourir pour ses sujets? Lui-même l’a dit: Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis (Jn 10,11). C’est également vrai pour un bon roi: lui aussi donne sa vie pour ses sujets. Je le proclamerai donc roi à cause du don qu’il a fait de sa vie. Seigneur, souviens-toi de moi quand tu seras dans ton Royaume.

Comprends-tu maintenant comment la croix est le signe du Royaume? Si tu le veux, voici encore une autre preuve. Le Christ n’a pas laissé sa croix sur la terre, mais il l’a soulevée et emportée avec lui dans le ciel. Nous le savons parce qu’il l’aura près de lui quand il reviendra dans la gloire. Tout cela pour t’apprendre combien est vénérable la croix qu’il a appelée sa gloire. <>

Lorsque le Fils de l’homme viendra, le soleil s’obscurcira et la lune perdra son éclat (Mt 24,29). Il régnera alors une clarté si vive que même les étoiles les plus brillantes seront éclipsées. Les étoiles tomberont du ciel. Alors paraîtra dans le ciel le signe du Fils de l’homme (Mt 24,29-30).

Tu vois quelle est la puissance du signe de la croix ! < > Quand un roi entre dans une ville, les soldats prennent les étendards, les hissent sur leurs épaules et marchent devant lui pour annoncer son arrivée. C’est ainsi que des légions d’anges et d’archanges précéderont le Christ, lorsqu’il descendra du ciel. Ils porteront sur leurs épaules ce signe annonciateur de la venue de notre Roi.

Prière

Dieu éternel, tu as voulu fonder toutes choses en ton Fils bien-aimé, le Roi de l’univers ; fais que toute la création, libérée de la servitude, reconnaisse ta puissance et te glorifie sans fin. Par Jésus Christ.