Catéchisme de la

Somme théologique

par le fr. Thomas Pègues O.P.

 

Bref du pape Benoît XV_ 2

Préface 2

Avertissement pour la nouvelle édition_ 4

 

Première partie : Dieu  (Être souverain, source et maître de tout être) 6

1. Existence 6

2. Nature et attributs 6

3. Opérations 8

4. Personnes 11

5. Œuvre de création_ 13

6. Le monde 13

7. Les anges : leur nature 14

8. Leur vie intime 15

9. Création des anges 16

10. Leur épreuve 16

11. Chute des mauvais anges 16

12. Les corps : leur création et l’œuvre des six jours 17

13. L’homme : sa nature, son âme spirituelle et immortelle 18

14. Ses facultés végétatives et sensibles 19

15. Son intelligence et son acte de connaître 20

16. Ses facultés d’aimer ; son libre arbitre 22

17. L’origine de l’homme, ou sa création et sa formation par Dieu_ 22

18. L’état de bonheur où il fut créé 23

19. Œuvre de conservation et de gouvernement 24

20. Action personnelle de Dieu dans ce gouvernement. Les miracles 25

21. L’action des créatures dans ce gouvernement : l’ordre de l’univers 26

22. Parmi les anges : les hiérarchies et les ordres 27

23. Action des bons anges sur le monde des corps 30

24. Action des bons anges à l’endroit de l’homme : les anges gardiens 30

25. Action des mauvais anges ou des démons 32

26. Action du monde matériel ou de l’ensemble du cosmos 33

27. Action de l’homme lui-même 33

28. Point de convergence où se retrouve toute la marche du gouvernement divin_ 34

 

Deuxième partie : L’homme  (venu de Dieu et devant retourner à Dieu) 34

 

Première section : Vue générale de ce retour de l’homme à Dieu_ 34

1. Ressemblance de l’homme avec Dieu dans la libre gestion de ce qui le concerne 34

2. De la fin dernière de l’homme en toutes ses actions, qui est le bonheur 34

3. De l’objet de ce bonheur 36

4. De la possession de ce bonheur 36

5. Du moyen de s’assurer cette possession, ou des actes bons qui la méritent et des actes mauvais qui la font perdre  37

6. Ce que comporte l’acte humain à l’effet d’être un acte bon méritoire, ou un acte mauvais déméritoire, à parler du mérite et du démérite en général 37

7. Des mouvements affectifs qui sont dans l’homme et qu’on appelle du nom de passions 39

8. Des vertus, qui peuvent et doivent être dans l’homme le principe de ses actes bons 41

9. Des dons, qui couronnent et complètent les vertus 42

10. Des béatitudes et des fruits du Saint-Esprit, résultat des vertus et des dons 43

11. Des vices qui peuvent être, dans l’homme, principe de ses actes mauvais 44

12. Du péché originel et de ses suites, ou des blessures de la nature humaine 45

13. De la diverse gravité des péchés et de la peine qui leur est due 47

14. Des péchés mortels et des péchés véniels 48

15. Du principe extérieur qui dirige l’homme dans ses actions : ou de la loi 49

16. Des diverses lois : la loi éternelle 49

17. La loi naturelle 50

18. La loi humaine 51

19. La loi divine – le Décalogue 52

20. Du principe extérieur qui aide l’homme dans la pratique des actes bons : ou de la grâce 54

 

Bref du pape Benoît XV

 

Au cher fils Thomas Pègues, de l’ordre des prêcheurs

 

Cher fils,

salut et bénédiction apostolique.

 

Les éloges, d’éclat exceptionnel, que le Siège Apostolique a faits de Thomas d’Aquin ne permettent plus à aucun catholique de douter que ce docteur n’ait été, dans ce but, suscité par Dieu, afin que l’Église eût un maître de la doctrine qu’elle suivrait par excellence en tout temps. D’autre part, il semblait convenable que la sagesse unique de ce docteur fût directement ouverte, non pas seulement aux hommes du clergé, mais encore à tous ceux, quels qu’ils soient, qui cultiveraient à un degré plus élevé les études religieuses, et jusqu’à la multitude elle-même : la nature veut, en effet, que plus on approche de la lumière, plus on s’en trouve abondamment éclairé. Vous êtes donc grandement à louer, vous qui, ayant entrepris d’expliquer par un commentaire littéral en français l’œuvre principale du Docteur angélique, la Somme théologique — et les volumes déjà parus montrent que votre projet se réalise avec succès — avez récemment publié la même Somme rendue en forme de catéchisme. Par là, vous n’avez pas d’une façon moins apte approprié les richesses de ce grand génie à l’usage des moins instruits qu’à celui des plus doctes, donnant, sous une forme brève et succincte, dans le même ordre lumineux, tout ce que lui-même avait exposé d’une façon plus copieuse. Et, assurément, Nous vous félicitons de ce fruit d’un travail et d’une étude prolongés, dans lequel il est permis de reconnaître votre grande connaissance et votre grande science de la doctrine thomiste ; et Nous souhaitons, ce qui est le vœu que vous inspire votre amour de la sainte Église, que ce travail serve au plus grand nombre possible pour connaître à fond la doctrine chrétienne. Comme gage des faveurs divines et comme témoignage de Notre bienveillance très spéciale, Nous vous accordons très affectueusement, à vous, cher fils, et à vos disciples, la bénédiction apostolique.

 

Donné à Rome, près Saint-Pierre, le 5 février 1919, de Notre Pontificat, la cinquième année.

 

Benoît XV, pape.

 

 

Préface

 

DANS le compte rendu de la Revue thomiste, où il présentait aux lecteurs de cette revue, dont il était le fondateur, les deux premiers volumes du Commentaire français littéral de la Somme théologique, le père Coconnier, bon juge en la matière, parlant de la Somme théologique elle-même, l’appelait « le plus beau livre sur la plus belle des sciences ». C’était l’écho, sous une forme littéraire et moderne, de la grande parole du pape Jean XXII, proclamant, au moment de la canonisation de saint Thomas d’Aquin, après avoir évoqué de nombreux miracles opérés par le saint docteur : « Quot scripsit articulos, tot fecit miracula : Il a fait autant de miracles qu’il a écrit d’articles ». De nos jours, une autre grande voix pontificale, celle du pape Léon XIII, qui semblait ne pouvoir se lasser d’exalter le Docteur angélique, déclarait, dans l’encyclique Gravissimo Officio ,que la Somme de saint Thomas contenait, renfermé en elle, tout ce qui avait pu être pensé et agité de plus profond dans le domaine de la raison et de la foi par quelques sages que ce pût être, et que c’est là qu’on trouvait les principaux points et les sources de cette doctrine éminente entre toutes qui s’appelle la théologie chrétienne.

 

Cette excellence hors de pair de la Somme théologique de saint Thomas d’Aquin, devait recevoir sa consécration la plus précieuse dans le Motu proprio du pape Pie X, ordonnant que dans les principaux centres d’études ecclésiastiques la Somme de saint Thomas devînt désormais le livre de texte que les maîtres devraient expliquer à leurs élèves.

 

Et, enfin, mettant le sceau définitif à tous ces actes pontificaux en l’honneur du Docteur angélique, le pape Benoît XV, dans le Code nouveau (1) faisant loi désormais pour toute l’Église, édictait deux canons, le canon 589 et le canon 1366, où tous les professeurs de philosophie et de théologie, dans l’Église, recevaient l’ordre formel de traiter de tout point les matières de leur enseignement et la formation de leurs disciples selon la méthode, la doctrine et les principes de Thomas d’Aquin et de s’y tenir saintement.

 

C’est donc un fait acquis désormais que l’Église catholique considère Thomas d’Aquin comme son docteur préféré et que son désir le plus ardent est de voir toutes les intelligences aller puiser, selon qu’il est en leur pouvoir, à la source de lumière que constituent les écrits du saint docteur, notamment le plus complet et le plus parfait de tous, sa Somme théologique.

 

Nous inspirant de ce désir, nous avions déjà voulu, dans la mesure de nos moyens, mettre à la portée d’un public d’élite cet enseignement de saint Thomas, en entreprenant le Commentaire français littéral de la Somme théologique.

 

L’œuvre se continue, grâce à Dieu, et de précieux témoignages nous persuadent que ce travail aura facilité, en effet, l’étude du chef-d’œuvre du saint docteur. Mais, en raison même de son étendue (douze volumes ont déjà paru, et l’œuvre entière en comprendra une vingtaine environ), comme aussi en raison de certains points de doctrine nécessitant des explications plus développées ou plus techniques, cette œuvre ne pouvait et ne peut atteindre qu’un public restreint.

 

Fallait-il donc renoncer au dessein de mettre à la portée de tous, par un exposé rapide et cependant complet, où serait gardé scrupuleusement l’ordre si lumineux de saint Thomas lui-même et où serait reproduite toute sa pensée essentielle, le trésor de doctrine qu’est son immortelle Somme ?

 

Le présent travail montrera, nous l’espérons, qu’il était possible de faire descendre des plus hautes sphères de l’enseignement théologique jusque dans les milieux les moins habitués à son caractère technique et spécial, la moelle substantielle et savoureuse de cet enseignement.

On trouvera dans ce petit livre toute la substance doctrinale de la grande Somme théologique. Pas un point essentiel n’y a été omis de ce qui nous a paru nécessaire pour la mise à la portée de tous de son enseignement lumineux.

 

Et, afin de rendre sa lecture plus facile, plus attrayante, plus vivante aussi et plus pénétrante, nous avons voulu lui donner la forme catéchistique, qui est bien, sans doute, la forme d’enseignement la plus parfaite pour atteindre toutes les intelligences. N’est-elle pas comme la réalisation idéale de ce qu’on a pu appeler l’enseignement socratique, procédant par voie d’interrogation graduée et ordonnée, qui éveille l’esprit et conduit insensiblement jusqu’aux plus hautes sphères de la doctrine ?

 

Elle est aussi la réalisation parfaite du dialogue platonicien, où l’intelligence qui écoute, mise en éveil par l’intelligence de celui qui parle, pose à son tour de nouvelles questions, et où toutes deux vivant ainsi du pain de la vérité, goûtent excellemment le charme du plus délicieux vivre ensemble dans une sorte de divin banquet.

 

Nous dédions ce petit livre à tous les amis de la vérité.

 

Ils la trouveront exposée, ici, dans sa suite la plus parfaite. Et, s’il en était qui fussent d’abord étonnés de la forme plus humble que nous avons voulu lui donner, ils en auront tout le sens quand ils se souviendront des paroles du Fils de Dieu dans son Évangile nous disant que de se faire tout petit est une excellente condition pour pénétrer les secrets du royaume des cieux : « Nisi efficiamini sicut parvuli, non intrabitis in regnum cœlorum — Abscondisti hæc a sapientibus et revelasti ea parvulis (2). » – La simplicité, du reste, n’enlève rien à la profondeur. L’enseignement de Thomas d’Aquin dans sa Somme théologique est d’une telle richesse, d’une telle fécondité, d’un tel charme, que ceux qui le connaissent à fond dans son exposé complet éprouveront, à le retrouver dans un résumé vivant et intégral, une sorte de ravissement : et ceux qui ne le connaîtront encore que par ce résumé fidèle, voudront, par une sorte de désir irrésistible, le posséder autant qu’il leur sera possible, dans toute l’ampleur de son exposé magistral.

 

Puissent toutes les intelligences qui ont faim et soif de vérité, de la grande vérité, qui, seule, intéresse le bien dernier et souverain de l’homme, venir puiser à cette source. Nulle part ailleurs, elles n’en trouveront de plus pure, ou qui soit en rapport plus intime et plus direct avec cette source d’eau vive qui rejaillit jusqu’à la vie éternelle.

 

Rome, en la fête de la Toussaint, 1918.

 

 

Avertissement pour la nouvelle édition

 

Un mois, à peine, s’était écoulé depuis la mise en vente du Catéchisme ; et, malgré la crise des transports qui sévissait en plein à ce moment, les deux mille exemplaires de la première édition ne suffisaient plus à satisfaire les demandes qui se multipliaient de tous côtés. Il a donc fallu, tout de suite, penser à rééditer le volume.

 

La nouvelle édition ne diffèrera en rien de la première. On s’est borné simplement à faire disparaître les quelques fautes matérielles d’impression qui avaient pu se glisser dans un premier tirage ; et l’on a inséré, à leur place, les deux ou trois addenda qui étaient marqués à la fin du livre.

 

Nous remercions Dieu de la bénédiction qu’il a daigné accorder à ce modeste travail. L’accueil qu’il lui a fait rencontrer dans les milieux les plus divers montre bien, semble-t-il, que l’ouvrage est venu à son heure.

 

Nous ne pouvons songer à reproduire, ici, les témoignages qui ont accompagné cet accueil et en ont fixé le vrai caractère. L’impression la plus générale qu’on a bien voulu nous traduire est que désormais il n’est plus une intelligence, « à partir de quinze ans et au-dessus », comme daignait nous l’écrire un de NN. SS. les évêques de France, qui ne puisse s’initier à la moelle de doctrine contenue dans la Somme théologique de saint Thomas d’Aquin.

 

Rien ne pouvait nous être plus sensible qu’un tel témoignage. Car c’est bien là ce que nous avons voulu en publiant ce travail. L’ordre de la Somme, que nous avons toujours regardé comme si essentiel et qu’on retrouve avec tout son relief dans ce catéchisme, a vivement frappé aussi les intelligences du dehors. L’un de nos meilleurs penseurs catholiques, venu de très loin à la foi par l’action même de la doctrine de saint Thomas d’Aquin et qui fait maintenant sa vie de cette doctrine, nous écrivait, parlant de lui et de sa femme également convertie par l’influence de saint Thomas : « Ce qui nous a frappés le plus en lisant votre livre, c’est le relief où il met le plan général de la Somme, que bien des lecteurs “fragmentaires”, si j’ose dire, de saint Thomas perdent trop souvent de vue, et qui apparaît si bien dans votre catéchisme. Ce livre, le modèle des catéchismes, sera d’une extrême utilité pour la diffusion de la doctrine catholique intégrale et pour toutes les œuvres d’éducation chrétienne. Puissent tous les prêtres de paroisses instruites s’en servir pour l’instruction de la jeunesse cultivée et pour leurs catéchismes de persévérance ! »

Un autre de nos excellents écrivains catholiques, d’autant plus frappé de l’ordre de la Somme théologique, mis en relief dans le catéchisme, qu’il était en contact avec lui pour la première fois, nous écrivait : « La limpidité du style, la clarté des démonstrations, la pertinence et l’enchaînement des réponses aux questions et des questions entre elles, tiennent du prodige. » N’est-ce pas, ici encore, comme un écho, et d’autant plus admirable qu’il vient de quelqu’un qui se dit « profane » dans le sujet, de la parole du pape Jean XXII, disant de saint Thomas : Il a fait autant de miracles qu’il a écrit d’articles.

 

Mais le témoignage qui domine tous les autres et qui a été pour nous la plus douce des récompenses est celui du vicaire même de Notre-Seigneur Jésus-Christ, Sa Sainteté le pape Benoît XV. Nous avons eu l’insigne honneur de lui offrir personnellement ce Catéchisme de la Somme. Il a bien voulu l’agréer, nous a dit sa haute satisfaction et a souligné lui-même l’opportunité d’un travail qui permettait enfin de mettre entre toutes les mains l’œuvre par excellence de l’enseignement sacré jusque-là inabordable pour le plus grand nombre. Sa Sainteté a daigné exprimer le désir que ce catéchisme fût traduit le plus tôt possible dans les autres langues. Un tel désir est pour nous un ordre ; et, dans le plus bref délai, il sera fait tout le possible pour le réaliser.

 

Rome, 28 janvier 1919,

en la fête de la Translation des reliques de saint Thomas d’Aquin à Toulouse.

 

P.S. — Les épreuves de cet « avertissement » nous arrivent au lendemain de la réception du Bref que sa Sainteté le pape Benoît XV a daigné nous adresser en date du 5 février, et qu’on a pu lire en tête de cette nouvelle édition. On y aura remarqué deux choses :

• l’affirmation renouvelée, sous une forme encore plus explicite et plus pressante, de l’autorité exceptionnelle que Dieu a voulu donner à saint Thomas d’Aquin, dans son Église, comme maître de la doctrine, et qu’il n’est plus permis à aucun catholique de mettre en doute ;

• la recommandation si haute de travailler à rendre accessible à tous directement la source incomparable de sagesse que constituent les écrits du saint docteur, surtout sa Somme théologique. Le Saint Père a poussé même son extrême bonté jusqu’à exprimer dans son Bref, sous forme de souhait personnel, la pensée qu’il nous avait manifestée de voir ce modeste travail du Catéchisme de la Somme « servir au plus grand nombre possible pour s’instruire à fond de la doctrine chrétienne ». Nous déposons humblement, aux pieds de sa Sainteté, l’hommage ému de notre profonde reconnaissance.

 

Rome, 7 mars 1919,

en la fête de saint Thomas d’Aquin.

 


(1) — Code de 1917. Le Nouveau Code de 1983 est très en retrait sur ce sujet : cf. Le sel de la terre 2, p. 2, note 2.

(2) — A moins que vous ne deveniez comme de tout petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux (Mt 18, 3). Vous avez caché ces choses aux sages et vous les avez révélées aux petits (Lc 1, 21).

 

 

Première partie
Dieu
(Être souverain, source et maître de tout être)

 

1. Existence

 

— Dieu existe-t-il ?

— Oui, Dieu existe (q. 2).

 

— Pourquoi dites-vous que Dieu existe ?

— Parce que, si Dieu n’existait pas, rien n’existerait (q. 2, a. 3). — On le montre par ce raisonnement : — Ce qui n’existe que par Dieu, n’existerait pas si Dieu n’existait pas. Or, tout ce qui existe et qui n’est pas Dieu, n’existe que par Dieu. Donc, si Dieu n’existait pas, rien n’existerait.

 

— Mais comment montrez-vous que ce qui existe et n’est pas Dieu, n’existe que par Dieu ?

— Par ce raisonnement : — Ce qui existe et n’existe point par soi, n’existe en dernière analyse que par un autre qui est par soi et que nous appelons Dieu. Or, ce qui existe et n’est pas Dieu, n’existe point par soi. Donc ce qui existe et n’est pas Dieu, n’existe en dernière analyse que par Dieu.

 

— Et comment montrez-vous que ce qui existe et n’est pas Dieu, n’existe point par soi ?

— Par ce raisonnement : — Rien de ce qui a besoin de quelque chose, n’existe par soi. Or, tout ce qui existe et n’est pas Dieu, a besoin de quelque chose. Donc ce qui existe et n’est pas Dieu, n’existe point par soi.

 

— Pourquoi dites-vous que rien de ce qui a besoin de quelque chose, n’existe par soi ?

— Parce que ce qui existe par soi ne dépend ni ne peut dépendre de rien, ni de personne; et que tout ce qui a besoin de quelque chose ou de quel qu’un, dépend de ce quelque chose ou de ce quelqu’un.

 

— Et pourquoi dites-vous que ce qui existe par soi ne dépend ni ne peut dépendre de rien ni de personne ?

— Parce qu’existant par soi, il a tout en lui même et par lui-même, et ne peut rien recevoir, de rien ni de personne.

 

— Tout être donc qui existe et qui a besoin de quelque chose prouve manifestement par sa seule existence, que Dieu existe ?

— Oui, tout être qui existe et qui a besoin de quelque chose, prouve manifestement, par sa seule existence que Dieu existe.

 

— Que font donc ceux qui nient Dieu ?

— Ils affirment équivalemment que ce qui a besoin de tout, n’a besoin de rien.

 

— Mais c’est là une contradiction ?

— Exactement, et on ne peut nier Dieu sans se contredire.

 

— C’est donc une véritable folie de nier Dieu ?

— Oui, c’est une véritable folie de nier Dieu.

 

2. Nature et attributs

 

— Qu’est-ce que Dieu ?

— Dieu est un Esprit, en trois Personnes, Créateur et Souverain Maître de toutes choses.

 

— Que voulez-vous dire quand vous dites que Dieu est un Esprit ?

— Je veux dire qu’il n’a point de corps, comme nous, et qu’il est libre de toute matière, ou même de toute nature distincte de son être (q. 3, a. 1-4).

 

— Que s’ensuit-il de cela pour Dieu ?

— Il s’ensuit que Dieu n’est pas un être comme les autres êtres, qui ne sont que tels ou tels êtres particularisés ; mais qu’il est, au sens le plus vrai, le plus transcendant et le plus absolu, I’Être même (q. 3, a. 4).

 

— Dieu est-il parfait ?

— Oui, Dieu est parfait ; car il ne lui manque rien (q. 4, a. 1).

 

— Dieu est-il bon ?

— Oui, Dieu est la Bonté même ; car il est le principe et le terme de tout amour (q. 6).

 

— Dieu est-il infini ?

— Oui, Dieu est infini ; car il n’est limité par rien (q. 7, a. 1).

 

— Dieu est-il partout ?

— Oui, Dieu est partout; car tout ce qui est, est en lui et par lui (q. 8).

 

— Dieu est-il immuable ?

— Oui, Dieu est immuable ; car il n’a rien à acquérir (q. 9).

 

— Dieu est-il éternel ?

— Oui, Dieu est éternel ; car il n’y a pas de succession en lui (q. 10).

 

— Y a-t-il plusieurs Dieux ?

— Non, il n’y a qu’un seul Dieu (q. 11).

 

— Pourquoi affirmez-vous de Dieu ces divers attributs ?

— Parce que, s’il ne les avait pas, il ne serait plus lui-même.

 

— Comment montrez-vous que, si Dieu n’avait pas ces attributs, il ne serait plus lui-même ?

— Parce que Dieu ne serait plus lui-même s’il n’était pas celui qui existe par soi. Or celui qui existe par soi doit être parfait, car il a tout en lui-même ; et, s’il est parfait, il est nécessairement bon. Il doit être infini, sans quoi quelque chose aurait action sur lui pour le limiter ; et, s’il est infini, il faut qu’il soit partout. Il doit être immuable, sans quoi il serait à la recherche de quelque chose ; et, s’il est immuable, il est éternel, le temps étant une succession qui implique le changement. D’autre part, étant infiniment parfait, il ne peut être qu’un ; deux infiniment parfaits étant absolument impossibles, car l’un n’aurait rien par où il se distinguerait de l’autre (q. 3-11).

 

— Pouvons-nous voir Dieu sur cette terre ?

— Non, nous ne pouvons pas voir Dieu sur cette terre, notre corps mortel y faisant obstacle (q. 12, a. 11).

 

— Pourrons-nous voir Dieu au ciel ?

— Oui, nous pourrons voir Dieu au ciel, des yeux de l’âme glorifiée (q. 12, a. 1-10).

 

— Comment pouvons-nous connaître Dieu sur cette terre ?

— Nous pouvons connaître Dieu sur cette terre par la raison et par la foi (q. 12, a. 12-13).

 

— Qu’est-ce que connaître Dieu sur cette terre par la raison ?

— C’est connaître Dieu à l’aide des créatures qu’il a faites (q. 12, a. 12).

 

— Qu’est-ce que connaître Dieu sur cette terre par la foi ?

— C’est connaître Dieu par ce qu’il nous a dit lui-même de lui-même (q. 12, a. 13).

 

— De ces deux sortes de connaissances que nous pouvons avoir de Dieu, sur cette terre, quelle est la plus parfaite ?

— C’est, à n’en pas douter, la connaissance que nous avons de lui par la foi ; car elle nous fait atteindre Dieu sous un jour que la raison ne pouvait même pas soupçonner ; et, bien que ce jour soit encore pour nous mêlé d’ombre et d’obscurité impénétrable, il est cependant comme un commencement du jour de la vision au ciel dont la pleine clarté constituera notre bonheur pendant toute l’éternité (q. 12, a. 13).

 

— Quand nous parlons de Dieu ou que nous nous exprimons à son sujet, les mots ou les termes que nous employons ont-ils un sens précis et que nous puissions légitimer ?

— Assurément ; car ces termes, ou ces mots, bien qu’usités d’abord pour désigner les perfections de la créature, ont pu être transférés ensuite à désigner ce qui, en Dieu, correspond à ces mêmes perfections (q. 13, a. 1-4).

 

— Ces termes, ou ces mots, ont-ils le même sens quand nous les disons de Dieu et de la créature, ou ont-ils un sens tout à fait différent ?

— Ils ont le même sens ; mais avec une portée plus haute. Et cela veut dire qu’employés pour désigner les perfections des créatures, ils les désignent dans leur plénitude et en disant tout ce qu’elles sont ; tandis qu’employés pour désigner les perfections divines ou ce qui est en Dieu, si tout ce qu’ils disent de perfection est bien véritablement en Dieu, ils ne disent pas tout ce que sont en Dieu les perfections qu’ils expriment (q. 13,a. 5).

 

— Il est donc vrai que Dieu demeure pour nous ineffable, quoi que nous puissions dire de lui et quelque sublimes que puissent être nos expressions à son sujet ?

— Oui ; mais nous ne pouvons rien faire de mieux cependant, ni de plus vrai ou de plus parfait, que de parler de lui et de nous exprimer à son sujet, quelque imparfait que demeure sur cette terre tout ce que nous pouvons penser de lui ou dire de lui (q. 13, a. 6-12).

 

3. Opérations

 

— Que fait Dieu en lui-même ?

— Il vit de sa connaissance et de son amour (q. 14-26).

 

— Est-ce que Dieu connaît toutes choses ?

— Oui, Dieu connaît toutes choses (q. 14, a. 5).

 

— Est-ce que Dieu sait tout ce qui se passe sur la terre ?

— Oui, Dieu sait tout ce qui se passe sur la terre (q. 14, a. 11).

 

— Est-ce que Dieu connaît les secrets des cœurs ?

— Oui, Dieu connaît les secrets des cœurs (q. 14, a. 10).

 

— Est-ce que Dieu connaît l’avenir ?

— Oui, Dieu connaît l’avenir (q. 14, a. 13).

 

— Pourquoi dites-vous que cette science se trouve en Dieu ?

— Parce que Dieu, étant au souverain degré de l’immatérialité, est d’une intelligence infinie ; et qu’il ne peut rien ignorer de ce qui est, ou sera, ou serait, ou pourrait être, en quelque être que ce soit, tout cela étant dans un rapport d’effet à cause, à l’endroit de sa science, faite d’intelligence et de volonté (q. 14, a. 1-5).

 

— Il y a donc aussi une volonté en Dieu ?

— Oui, il y a aussi une volonté en Dieu, la volonté étant toujours où est l’intelligence (q. 19, a. 1).

 

— Est-ce que tout dépend de la volonté de Dieu ?

— Oui, tout dépend de la volonté de Dieu, parce qu’elle est la cause première et suprême de tout (q. 19, a. 4-6).

 

— Est-ce que Dieu aime toutes ses créatures ?

— Oui, Dieu aime toutes ses créatures, ne les ayant faites que par amour (q. 20, a. 2).

 

— L’amour de Dieu pour ses créatures a-t-il quelque effet en elles ?

— Oui, I’amour de Dieu pour ses créatures a son effet en elles.

 

— Quel est l’effet de l’amour de Dieu dans ses créatures ?

— C’est tout le bien qui est en elles (q. 20, a. 3).

 

— Dieu est-il juste ?

— Oui, Dieu est la justice même (q. 21, a. 1).

 

— Pourquoi dites-vous que Dieu est la justice même ?

— Parce qu’il donne à tout être ce que sa nature exige (q. 21, a. 1-2).

 

— Y a-t-il un mode spécial de la justice de Dieu envers les hommes ?

— Oui, il y a un mode spécial de la justice de Dieu envers les hommes.

 

— Quel est le mode spécial de la justice de Dieu envers les hommes ?

— Le mode spécial de la justice de Dieu envers les hommes, c’est qu’il récompense les bons et punit les méchants (q. 21, a. 1, ad 3).

 

— Est-ce sur cette terre que Dieu récompense les bons et punit les méchants ?

— Ce n’est jamais qu’en partie que Dieu sur cette terre récompense les bons et punit les méchants.

 

— Où Dieu récompense-t-il entièrement les bons et punit-il les méchants ?

— C’est au ciel que Dieu récompense entièrement les bons et dans l’enfer qu’il punit les méchants.

 

— Y a-t-il en Dieu la miséricorde ?

— Oui, il y a en Dieu la miséricorde (q. 21, a. 3)

 

— En quoi consiste la miséricorde de Dieu ?

— La miséricorde de Dieu consiste en ce qu’il donne à tout être bien plus que sa nature n’exige, et aussi qu’il récompense les bons au-delà de leurs mérites et punit les méchants en deçà même de tout ce qu’ils méritent (q. 21, a. 4).

 

– Dieu en lui-même s’occupe-t-il du monde ?

– Oui, Dieu en lui-même s’occupe du monde.

 

– De quel nom s’appelle le soin que Dieu a en lui-même du monde ?

– Le soin que Dieu a en lui-même du monde s’appelle la Providence (q. 22, a. 1).

 

– La Providence de Dieu s’étend-elle à toutes choses ?

– Oui, la Providence de Dieu s’étend à toutes choses; car il n’est rien, dans le monde, que Dieu n’ait prévu et préordonné de toute éternité (q. 22, a. 2).

 

– S’étend-elle aussi aux êtres inanimés ?

– Oui, elle s’étend aussi aux êtres inanimés, ces êtres eux-mêmes faisant partie de l’œuvre de Dieu (q. 22, a. 2, ad 5).

 

– S’étend-elle aux hommes dans leurs actes libres ?

– Oui, elle s’étend aux hommes dans leurs actes libres (q. 22, a. 2, ad 4).

 

– Qu’entendez-vous quand vous dites que la Providence de Dieu s’étend aux hommes dans leurs actes libres ?

– J’entends par là que tous les actes libres des hommes sont soumis à la disposition de la divine Providence, et que rien dans ces actes-là n’arrive que Dieu ne l’ordonne ou ne le permette, la liberté de l’homme n’impliquant aucunement son indépendance à l’endroit de Dieu (Ibid.).

 

– La Providence de Dieu à l’endroit des justes a-t-elle un nom spécial ?

– Oui, on l’appelle la prédestination (q. 23, a. 1).

 

– Que comporte la prédestination à l’endroit des hommes qui en sont l’objet ?

– Elle comporte que ces hommes possèderont un jour dans le ciel le bonheur de la gloire (q. 23, a. 2).

 

– Comment appelle-t-on ceux qui ne doivent pas avoir ce bonheur ?

– On les appelle les réprouvés ou les non-élus (q. 23, a. 3).

 

– D’où vient que les prédestinés auront ce bonheur, tandis que les réprouvés ou les non-élus ne l’auront pas ?

– Cela vient de ce que les prédestinés ont été choisis par Dieu, ou aimés d’un amour de préférence, en vertu duquel Dieu disposera toutes choses dans leur vie de telle sorte qu’ils aboutiront finalement au bonheur du ciel (q. 23, a. 4).

 

– Et pourquoi les réprouvés ou les non-élus n’aboutiront-ils pas, finalement, au même bonheur ?

– Parce qu’ils n’auront pas été aimés du même amour que les prédestinés (q. 23, a. 3, ad 1).

 

– Mais n’est-ce pas là une injustice de la part de Dieu ?

– Non ; parce que Dieu ne doit à personne le bonheur du ciel, et que ceux qui l’auront ne l’auront que par grâce (q. 23, a. 3, ad 2).

 

– Ceux qui ne l’auront pas seront-ils punis de ne pas l’avoir ?

– Ils ne seront punis de ne pas l’avoir qu’en raison d’une faute qu’il y aura de leur part à ne pas l’avoir (q. 23, a. 3, ad 3).

 

– Comment peut-il y avoir faute de la part des hommes à ne pas avoir le bonheur du ciel ?

– Il peut y avoir faute de leur part en ce que Dieu aura offert ce bonheur à tous et que, l’homme étant libre, il aura pu ne pas répondre à l’offre que Dieu lui faisait, ou mépriser cette offre, en lui préférant autre chose (Ibid.).

 

– Ce mépris ou le choix d’une chose contraire est-il une injure faite à Dieu ?

– C’est une injure très grave faite à Dieu et qui mérite les plus grands châtiments, quand elle est le fait d’un péché personnel (Ibid.).

 

– Ceux qui répondent à l’offre de Dieu et qui arrivent au bonheur du ciel doivent-ils à Dieu lui-même d’avoir ainsi répondu à son offre et mérité leur bonheur ?

– Oui, ils devront tout cela au choix de la prédestination divine (q. 23, a. 3, ad 2).

 

– Ce choix est-il fait de toute éternité en Dieu ?

– Ce choix est fait de toute éternité en Dieu (q. 23, a. 4).

 

– Que comporte ce choix à l’endroit de ceux qui en sont l’objet ?

– Il comporte que Dieu a fixé pour eux une place dans son ciel et que, par l’action de sa grâce, il les mettra en mesure de la posséder un jour (q. 23, a. 5-7).

 

– Que doivent faire les hommes à la pensée de ce choix éternel de la prédestination en Dieu ?

– Ils doivent, par un abandon complet à l’action de la grâce, se donner à eux-mêmes, autant qu’il est possible sur cette terre, la certitude qu’ils sont du nombre des prédestinés (q. 23, a. 8).

 

– Dieu est-il tout-puissant ?

– Oui, Dieu est tout-puissant (q. 25, a. 1-6).

 

– Pourquoi dites-vous que Dieu est tout-puissant ?

– Parce que, Dieu étant l’Être même, tout ce qui ne répugne pas à être lui demeure soumis (q. 25, a. 3).

 

– Dieu est-il heureux ?

– Oui, Dieu est le Bonheur même; car il jouit, en infini, du Bien infini, qui n’est autre que lui (q. 26, a. 1-4).

 

4. Personnes

 

– Qu’entendez-vous quand vous dites que Dieu est un Esprit en trois Personnes ?

– J’entends qu’ils sont trois à être chacun le même Esprit qui est Dieu, avec tous les attributs de la Divinité (q. 30, a. 2).

 

– Quels sont les noms de ces trois Personnes qui sont le même Dieu, avec tous les attributs de la Divinité ?

– On les appelle le Père, le Fils et le Saint-Esprit.

 

– Qu’est-ce que le Père en Dieu ?

– C’est celui qui, sans avoir de principe, engendre le Fils et de qui procède le Saint-Esprit.

 

– Qu’est-ce que le Fils en Dieu ?

– Le Fils est celui qui est engendré par le Père et de qui, en même temps que du Père, procède le Saint-Esprit.

 

– Qu’est-ce que le Saint-Esprit en Dieu ?

– C’est celui qui procède du Père et du Fils.

 

– Ces trois Personnes en Dieu sont-elles distinctes de Dieu lui-même ?

– Ces trois Personnes en Dieu ne sont pas distinctes de Dieu lui-même.

 

– Sont-elles distinctes entre elles ?

– Elles sont distinctes entre elles.

 

– Qu’entendez-vous quand vous dites que les trois Personnes en Dieu sont distinctes entre elles ?

– J’entends que le Père n’est pas le Fils ni l’Esprit-Saint ; que le Fils n’est ni le Père ni l’Esprit-Saint ; que l’Esprit-Saint n’est ni le Père ni le Fils.

 

– Ces trois Personnes peuvent-elles être séparées les unes des autres ?

– Ces trois Personnes ne peuvent pas être séparées les unes des autres.

 

– Sont-elles ensemble de toute éternité ?

– Elles sont ensemble de toute éternité.

 

– Le Père, dans son rapport au Fils, a-t-il en lui tout ce que nous avons vu qui était en Dieu ?

– Oui, le Père, dans son rapport au Fils, a en lui tout ce que nous avons vu qui était en Dieu.

 

– Le Fils, dans son rapport au Père, a-t-il en lui tout ce que nous avons vu qui était en Dieu ?

– Oui, le Fils, dans son rapport au Père, a en lui tout ce que nous avons vu qui était en Dieu.

 

– Le Père et le Fils, dans leur rapport au Saint-Esprit, ont-ils en eux tout ce que nous avons vu qui était en Dieu ?

– Oui, le Père et le Fils, dans leur rapport au Saint-Esprit, ont en eux tout ce que nous avons vu qui était en Dieu.

 

– Le Saint-Esprit, dans son rapport au Père et au Fils, a-t-il en lui tout ce que nous avons vu qui était en Dieu ?

– Oui, le Saint-Esprit, dans son rapport au Père et au Fils, a en lui tout ce que nous avons vu qui était en Dieu.

 

– Sont-ce trois Dieux qui ont ainsi rapport entre eux de toute éternité en Dieu ?

– Non, ce ne sont pas trois Dieux, mais trois Personnes qui s’identifient chacune au même Dieu, et qui demeurent cependant pleinement distinctes entre elles.

 

– Ces trois Personnes en Dieu forment-elles entre elles une véritable société ?

– Oui, ces trois Personnes en Dieu forment entre elles une véritable société, qui est même la plus parfaite de toutes les sociétés (q. 31, a. 1, ad 1).

 

– Pourquoi dites-vous que la société des trois Personnes en Dieu est la plus parfaite des sociétés ?

– Parce qu’ils sont trois, dont chacun est le même infini en perfection, en durée, en science, en amour, en puissance, en bonheur, qui jouissent d’eux-mêmes, au sein de la divinité.

 

– Comment savons-nous qu’il y a ainsi trois Personnes en Dieu ?

– Nous savons qu’il y a ainsi trois Personnes en Dieu par la foi.

 

– La raison, sans la foi, pourrait-elle savoir qu’il y a trois Personnes en Dieu ?

– Non, la raison, sans la foi, ne pourrait pas savoir qu’il y a trois Personnes en Dieu (q. 32, a. 1).

 

– Et quand nous savons par la foi qu’il y a trois Personnes en Dieu, la raison peut-elle le comprendre ?

– Non, même quand nous savons par la foi qu’il y a trois Personnes en Dieu, la raison ne peut pas le comprendre (q. 32, a. 1, ad 2).

 

– Comment s’appellent ces vérités que nous connaissons par la foi sans que la raison puisse les comprendre ?

– On les appelle des mystères.

 

– L’existence des trois Personnes en Dieu est donc un mystère ?

– Oui, et c’est même le plus profond de tous les mystères.

 

– Comment s’appelle ce mystère des trois Personnes en Dieu ?

– Il s’appelle le mystère de la Sainte Trinité (q. 31, a. 1).

 

– Pourrons-nous connaître un jour en lui-même le mystère de la Sainte Trinité ?

– Oui, nous pourrons connaître un jour en lui-même le mystère de la Sainte Trinité, et cette connaissance fera notre bonheur éternel au ciel.

 

– Ne pouvons-nous pas, sur cette terre, entrevoir quelque chose des harmonies du mystère de la Sainte Trinité en considérant la nature des opérations qui sont le propre des esprits ?

– Oui, car ces opérations impliquent, dans le sujet qui agit, un double rapport de principe et de terme de l’opération, soit dans l’acte de penser, soit dans l’acte d’aimer ; d’où il résulte qu’en Dieu, selon que la foi nous l’enseigne, dans l’acte de penser, le Père a raison de principe qui dit, et le Verbe a raison de terme qui est dit ; et, dans l’acte d’aimer, le Père et le Fils ont raison de principe commun à l’endroit de l’Esprit-Saint qui a raison de terme.

 

– Qu’est-ce qui fonde en Dieu le mystère de la Sainte Trinité ?

– C’est l’infinie richesse ou la fécondité de sa nature qui fait qu’il y a place en elle pour de mystérieuses processions d’origine (q. 27, a. 1).

 

– Comment s’appellent ces processions d’origine en Dieu ?

– Elles s’appellent la génération et la procession (q. 27, a. 2-3).

 

– Que s’ensuit-il de cette génération et de cette procession en Dieu ?

– Il s’ensuit qu’entre chacun des deux termes de la génération et de la procession existent des relations réelles que ces divers termes constituent (q. 28, a. 1).

 

– Quelles sont ces relations en Dieu ?

– Ce sont, au nombre de quatre, la paternité et la filiation, la spiration active et la procession ou la spiration passive (q. 28, a. 4).

 

– Ces relations en Dieu sont-elles la même chose que les Personnes divines ?

– Oui, ces relations en Dieu sont la même chose que les Personnes divines (q. 40, a. 1).

 

– Pourquoi y a-t-il donc quatre relations et n’y a-t-il que trois Personnes en Dieu ?

– Parce que l’une des relations, la spiration active, ne s’opposant point, d’une opposition relative, à la paternité et à la filiation, mais au contraire, convenant à l’une et à l’autre, il s’ensuit que les deux mêmes Personnes qui sont constituées, l’une par la paternité, l’autre par la filiation, peuvent et doivent être le sujet de la spiration active qui, dès lors, ne constitue pas une personne, mais convient tout ensemble à la Personne du Père et à la Personne du Fils (q. 30, a. 2).

 

– Y a-t-il un certain ordre en Dieu entre les Personnes divines ?

– Il y a l’ordre d’origine, qui permet au Fils d’être envoyé par le Père ; et au Saint-Esprit d’être envoyé par le Père et par le Fils (q. 42-43).

 

– Quand les Personnes divines agissent d’une action autre que les actes notionnels, qui sont l’acte de dire ou d’engendrer et l’acte de spirer, agissent-elles d’une seule et même action commune à toutes trois ?

– Oui : et c’est ainsi que l’acte de penser et l’acte d’aimer conviennent à toutes les trois Personnes ; et, de même, toutes les actions qui aboutissent à quelque effet en dehors de Dieu (q. 39-41).

 

– N’y a-t-il pas cependant certains actes ou certains principes d’actions qu’on attribue plus spécialement à telle ou telle personne ?

– Oui ; et l’on fait ces sortes d’attributions en raison d’une certaine harmonie que ces actes ou ces principes d’actions présentent avec les caractères distinctifs de telle ou telle personne : c’est ainsi qu’on attribue, par mode d’appropriation, la puissance au Père, la sagesse au Fils, la bonté à l’Esprit-Saint, bien qu’elles conviennent également à tous trois (q. 39, a. 7-8 ; q. 45, a. 6).

 

– Lors donc que nous parlons de Dieu dans ses rapports avec le monde extérieur, s’agit-il toujours de Dieu dans l’unité de sa nature et dans la Trinité de ses Personnes ?

– Oui ; à la seule exception de ce qui a trait à la Personne du Verbe dans les mystères de son Incarnation (q. 45, a. 6).

 

5. Œuvre de création

 

– Qu’entendez-vous quand vous dites que Dieu est le créateur de toutes choses ?

– J’entends que toutes choses ont été faites par lui de rien (q. 44-45).

 

– Il n’y avait donc rien en dehors de Dieu, avant que Dieu eût fait toutes choses ?

– Non, il n’y avait rien en dehors de Dieu, avant que Dieu eût fait toutes choses, lui seul étant par lui-même, et tout le reste n’étant que par lui (q. 44, a. 1).

 

– Quand est-ce que Dieu a fait ainsi toutes choses de rien ?

– Dieu a fait ainsi toutes choses de rien quand il lui a plu (q. 44).

 

– Il aurait donc pu, s’il l’avait voulu, ne pas créer les choses qu’il a faites ?

– Oui, Dieu aurait pu, s’il l’avait voulu, ne pas créer les choses qu’il a faites.

 

– Et pourquoi Dieu a-t-il ainsi voulu créer à un moment donné les choses qu’il a faites ?

– Dieu a créé les choses qu’il a faites pour manifester sa gloire (q. 45, a. 4).

 

– Qu’entendez-vous quand vous dites que Dieu a créé les choses qu’il a faites pour manifester sa gloire ?

– J’entends qu’il a voulu montrer hors de lui sa bonté, en communiquant à d’autres quelque chose du bien infini qu’il est lui-même.

 

– Ce n’est donc pas par besoin ni pour acquérir quelque chose que Dieu a créé les choses qu’il a faites ?

– Non, c’est au contraire pour donner à d’autres quelque chose de ce qu’il a infiniment en lui-même, et par pure bonté, qu’il a créé les choses qu’il a faites (q. 44, a. 4, ad 1).

 

6. Le monde

 

– Comment s’appelle l’ensemble des choses créées par Dieu ?

– On l’appelle le monde ou l’univers (q. 47, a. 4).

 

– Le monde ou l’univers est donc l’œuvre même de Dieu ?

– Oui, le monde ou l’univers est l’œuvre même de Dieu (q. 47, a. 1-2-3).

 

– Que comprend le monde ou l’univers, œuvre de Dieu ?

– Le monde ou l’univers, œuvre de Dieu, comprend trois catégories d’êtres, qui sont : les purs esprits ; les corps ; et l’esprit uni à un corps.

 

– C’est donc Dieu lui-même qui a créé les purs esprits, les corps et l’esprit uni à un corps ?

– Oui, c’est Dieu lui-même qui a créé les purs esprits, les corps et l’esprit uni à un corps.

 

– L’a-t-il fait lui-même, par lui-même, et tout seul ?

– Oui, Dieu a fait tout cela lui-même, par lui-même, et tout seul, lui seul étant à même de créer (q. 45, a. 5).

 

– Comment Dieu a-t-il fait par lui-même et tout seul le monde des esprits et des corps ?

– Il l’a fait par sa parole ou son verbe et avec son amour (q. 45, a. 6).

 

7. Les anges : leur nature

 

– Pourquoi Dieu a-t-il voulu qu’il y eût de purs esprits dans l’œuvre faite par lui ?

– Dieu a voulu qu’il y eût de purs esprits dans l’œuvre faite par lui parce qu’ils devaient être le couronnement de cette œuvre (q. 50, a. 1).

 

– Qu’entendez-vous quand vous dites que les purs esprits devaient être le couronnement de l’œuvre faite par Dieu ?

– J’entends qu’ils en sont la partie la plus haute, la plus parfaite et la plus belle (Ibid.).

 

– Pourriez-vous me dire quelle est la nature des purs esprits ?

– Oui, les purs esprits sont des natures ou des substances qui existent libres de tout corps et de toute matière (q. 50, a. 1-2).

 

– Ces purs esprits sont-ils en très grand nombre ?

– Oui, ces purs esprits sont en très grand nombre (q. 50, a. 3).

 

– Leur nombre dépasse-t-il le nombre de toutes les autres natures créées ?

– Oui, leur nombre dépasse le nombre de toutes les autres natures créées (Ibid.).

 

– Pourquoi fallait-il qu’ils fussent si nombreux ?

– Parce qu’il convenait que ce qu’il y avait de plus beau l’emportât en grandeur sur tout le reste dans l’œuvre de Dieu (Ibid.).

 

– De quel nom s’appellent ordinairement ces purs esprits ?

– On les appelle des anges.

 

– Pourquoi appelle-t-on les purs esprits du nom d’anges ?

– Parce qu’ils sont les messagers dont Dieu se sert pour administrer le reste de son œuvre.

 

– Est-ce que les anges peuvent prendre un corps comme nous ?

– Non, les anges ne peuvent point prendre un corps comme nous et, si quelquefois ils ont pu se montrer revêtus d’un corps, ils n’en avaient que l’apparence extérieure (q. 51, a. 1-2-3).

 

– Les anges existent-ils quelque part ?

– Oui, les anges existent quelque part (q. 52, a. 1).

 

– Où est le lieu ordinaire des anges ?

– Le lieu ordinaire des anges est le ciel (q. 61, a. 4).

 

– Les anges peuvent-ils aller d’un lieu à un autre ?

– Oui, les anges peuvent aller d’un lieu à un autre (q. 53, a. 1).

 

– Est-ce qu’il leur faut du temps pour aller d’un lieu à un autre ?

– Les anges peuvent se porter d’un lieu à un autre, seraient-ils les plus opposés, quasi instantanément (q. 53, a. 2).

 

– Peuvent-ils aussi quitter lentement un lieu et se rendre lentement dans un autre selon qu’il leur plaît ?

– Oui, ils peuvent aussi quitter lentement un lieu et se rendre lentement dans un autre selon qu’il leur plaît, leur mouvement n’étant qu’une application successive de leur vertu ou de leur action à divers êtres ou aux diverses parties d’un même tout (q. 53, a. 3).

 

8. Leur vie intime

 

– En quoi consiste la vie des anges selon leur nature de purs esprits ?

– La vie des anges, selon leur nature de purs esprits, consiste à connaître et à aimer.

 

– Quelle sorte de connaissance se trouve dans les anges ?

– Dans les anges se trouve la connaissance intellectuelle (q. 54).

 

– N’y a-t-il point dans les anges la connaissance sensible comme chez nous ?

– Non, il n’y a point dans les anges de connaissance sensible comme chez nous (q. 54, a. 5).

 

– Pourquoi n’y a-t-il pas dans les anges de connaissance sensible comme chez nous ?

– Parce que la connaissance sensible se fait par l’intermédiaire du corps et que les anges n’ont point de corps (Ibid.).

 

– La connaissance intellectuelle des anges est-elle plus parfaite que notre connaissance intellectuelle ?

– Oui, la connaissance intellectuelle des anges est plus parfaite que notre connaissance intellectuelle.

 

– Pourquoi dites-vous que la connaissance intellectuelle des anges est plus parfaite que notre connaissance intellectuelle ?

– Parce qu’ils n’ont pas, comme nous, à puiser leur connaissance dans le monde extérieur et qu’ils saisissent toute la vérité d’un seul regard de leur esprit sans avoir besoin comme nous de raisonnement (q. 55, a. 2 ; q. 58, a. 3-4).

 

– Les anges connaissent-ils toutes choses ?

– Non, les anges ne connaissent point toutes choses ; car ils ont une nature finie : et Dieu seul, parce qu’il est infini, connaît toutes choses (q. 53, a. 1-2-3).

 

– Connaissent-ils tout l’ensemble des créatures ?

– Oui, ils connaissent tout l’ensemble des créatures, leur nature de purs esprits demandant qu’il en soit ainsi (q. 55, a. 2).

 

– Les anges connaissent-ils tout ce qui se passe dans le monde extérieur ?

– Oui, les anges connaissent tout ce qui se passe dans le monde extérieur, les idées de leur esprit leur manifestant ces choses à mesure qu’elles se réalisent (Ibid.).

 

– Connaissent-ils les pensées des cœurs ?

– Non, les anges ne connaissent point les pensées des cœurs ; parce que ces pensées, étant libres, ne rentrent pas dans l’enchaînement nécessaire des événements extérieurs (q. 57, a. 4).

 

– Que faut-il pour que les anges connaissent les pensées des cœurs ?

– Il faut que Dieu les leur révèle, ou que le sujet lui-même les fasse connaître (Ibid.).

 

– Les anges connaissent-ils l’avenir ?

– Non, les anges ne connaissent point l’avenir, à moins que Dieu ne le leur révèle (q. 57, a. 3).

 

– Quelle sorte d’amour y a-t-il dans les anges selon leur nature ?

– Il y a dans les anges, selon leur nature, un amour parfait de Dieu, d’eux-mêmes et de toutes les créatures, à moins que le péché, dans l’ordre surnaturel, ne dénature ce qu’il y a de libre dans leur amour d’ordre naturel (q. 60).

 

9. Création des anges

 

– Tous les anges ont-ils été créés immédiatement par Dieu ?

– Oui, tous les anges ont été créés immédiatement par Dieu, chacun d’eux étant un pur esprit qui n’a pu venir à l’être que par voie de création (q. 61, a. 1)

 

– Quand est-ce que tous les anges ont été créés par Dieu ?

– Tous les anges ont été créés par Dieu instantanément, au premier moment où il créa aussi tous les éléments du monde corporel (q. 61, a. 3).

 

– Les anges furent-ils créés par Dieu dans un lieu corporel ?

– Oui, les anges furent créés par Dieu dans un lieu corporel, l’harmonie de l’œuvre divine voulant qu’il en fût ainsi (q. 61, a. 4, ad 1).

 

– Comment s’appelle le lieu corporel où furent créés les anges par Dieu ?

– Nous l’appelons le ciel tout court et quelquefois aussi le ciel empyrée (q. 61, a. 4).

 

– Que signifient ces mots : le ciel empyrée?

– Ils signifient un lieu tout de lumière et de splendeur, qui est la partie la plus belle du monde corporel (Ibid.).

 

– Le ciel empyrée est-il le même que le ciel des bienheureux ou le ciel tout court ?

– Oui, le ciel empyrée est le même que le ciel des bienheureux ou le ciel tout court (Ibid..ad. 3).

 

10. Leur épreuve

 

– Dans quel état les anges furent-ils créés par Dieu ?

– Les anges furent créés par Dieu dans l’état de grâce (q. 62, a. 3).

 

– Qu’est-ce que vous entendez quand vous dites que les anges furent créés par Dieu dans l’état de grâce ?

– J’entends qu’au moment de leur création ils reçurent de Dieu une nature revêtue de la grâce sanctifiante qui les faisait enfants de Dieu et leur donnait de pouvoir conquérir la gloire de la vie éternelle (q. 62, a. 1, 2, 3).

 

– Fut-ce par un acte de leur libre arbitre que les anges purent conquérir la gloire de la vie éternelle ?

– Oui, ce fut par un acte de leur libre arbitre que les anges purent conquérir la gloire de la vie éternelle (q. 62, a. 4).

 

– En quoi consista cet acte du libre arbitre des anges par lequel ils purent conquérir la gloire de la vie éternelle ?

– Cet acte consista à suivre le mouvement de la grâce qui les portait à se soumettre à Dieu et à recevoir de lui avec amour et reconnaissance le don de sa propre gloire qu’il leur offrait (Ibid.).

 

– Fallut-il longtemps aux anges pour se prononcer sous l’action de la grâce sur ce choix que Dieu leur offrait ?

– Ce choix se fit par eux instantanément (Ibid.).

 

– Les anges furent-ils admis dans la gloire aussitôt après avoir fait ce choix ?

– Oui, les anges furent admis dans la gloire aussitôt après avoir fait ce choix (q. 62, a. 5).

 

11. Chute des mauvais anges

 

– Est-ce que tous les anges firent le choix qui leur était proposé comme épreuve méritoire par Dieu ?

– Non, tous les anges ne firent pas ce choix, et il y en eut qui le refusèrent (q. 63, a. 3).

 

– Pourquoi y eut-il des anges qui refusèrent de faire ce choix ?

– Par sentiment d’orgueil et pour être semblables à Dieu, se suffisant à eux-mêmes comme Dieu se suffit (q. 63, a. 2, 3).

 

– Ce sentiment d’orgueil fut-il un grand péché ?

– Ce sentiment d’orgueil fut un horrible péché qui provoqua immédiatement la colère de Dieu.

 

– Que fit Dieu dans sa juste colère contre ce péché des anges?

– Il les précipita aussitôt dans l’enfer, qui sera éternellement le lieu de leur supplice (q. 64, a. 4).

 

– Comment appelle-t-on les mauvais anges qui se révoltèrent contre Dieu et furent précipités dans l’enfer ?

– On les appelle les démons (q. 63, a. 4).

 

12. Les corps : leur création et l’œuvre des six jours

 

– Quelle est la seconde catégorie d’êtres créés par Dieu dans le monde à l’extrémité opposée de la catégorie des esprits ?

– La seconde catégorie d’êtres créés par Dieu dans le monde à l’extrémité opposée de la catégorie des esprits est celle des corps.

 

– Est-ce que tout l’ensemble du monde des corps a été créé par Dieu ?

– Oui, tout l’ensemble du monde des corps a été créé par Dieu (q. 63, a. 5).

 

– C’est donc Dieu lui-même qui a créé la terre et tout ce que nous y voyons, la mer et tout ce qu’elle contient, le ciel avec le soleil, la lune et les étoiles ?

– Oui, c’est Dieu lui-même qui a créé la terre et tout ce que nous y voyons, la mer et ce qu’elle contient, le ciel avec le soleil, la lune et les étoiles.

 

– Quand est-ce que Dieu a créé tout ce monde des corps?

– Dieu a créé tout ce monde des corps au commencement du monde, en même temps qu’il créait le monde des esprits (q. 61, a. 3 ; q. 66, a. 4).

 

– Est-ce instantanément que Dieu a créé le monde des corps, en même temps que le monde des esprits ?

– Oui, c’est instantanément que Dieu a créé le monde des corps, en même temps que le monde des esprits (Ibid.).

 

– Le monde des corps fut-il dès ce premier instant tel qu’il est aujourd’hui ?

– Non, le monde des corps ne fut pas dès ce premier instant tel qu’il est aujourd’hui (q. 66, a. 1).

 

– Dans quel état le monde des corps fut-il créé par Dieu?

– Le monde des corps fut créé par Dieu à l’état de chaos.

 

– Qu’entendez-vous quand vous dites que le monde des corps fut créé par Dieu à l’état de chaos ?

– J’entends que Dieu créa d’abord les éléments d’où devait sortir le monde des corps tel que nous le voyons aujourd’hui (q. 66, a. 1 & 2).

 

– Qui est-ce qui a fait sortir des premiers éléments le monde des corps tel que nous le voyons aujourd’hui ?

– C’est Dieu qui a fait sortir des premiers éléments le monde des corps tel que nous le voyons aujourd’hui.

 

– Est-ce d’un seul coup que Dieu a fait sortir des premiers éléments le monde des corps tel que nous le voyons aujourd’hui ?

– Non, ce n’est pas d’un seul coup, mais par plusieurs interventions successives que Dieu a fait sortir des premiers éléments le monde des corps tel que nous le voyons aujourd’hui.

 

– Combien y a-t-il eu de ces interventions de Dieu pour amener le monde des corps à l’état où nous le voyons aujourd’hui ?

– Il y a eu six interventions de Dieu pour amener le monde des corps à l’état où nous le voyons aujourd’hui.

 

– Comment appelle-t-on les six interventions de Dieu pour amener le monde des corps à l’état où nous le voyons aujourd’hui ?

– On les appelle les six jours de la création (q. 64, a. 1 & 2).

 

– Sur quoi porta le premier jour de la création ?

– Le premier jour de la création porta sur la production de la lumière (q. 67, a. 4).

 

– Sur quoi porta le second jour de la création ?

– Le second jour de la création porta sur la production du firmament (q. 68, a. 1).

 

– Sur quoi porta le troisième jour de la création ?

– Le troisième jour de la création porta sur la séparation ou la distinction des mers et des continents, et sur la production des plantes (q. 69).

 

– Sur quoi porta le quatrième jour de la création ?

– Le quatrième jour de la création porta sur la production du soleil, de la lune et des étoiles (q. 70).

 

– Sur quoi porta le cinquième jour de la création ?

– Le cinquième jour de la création porta sur la production des poissons et des oiseaux (q. 71).

 

– Sur quoi porta le sixième jour de la création ?

– Le sixième jour de la création porta sur la production des animaux terrestres et sur la création de l’homme (q. 72).

 

– Comment savons-nous que c’est ainsi que Dieu a fait le monde tel que nous le voyons ?

– Nous savons que c’est ainsi que Dieu a fait le monde tel que nous le voyons parce que c’est lui-même qui nous l’a dit.

 

– Où est-ce que Dieu nous a dit qu’il avait ainsi fait le monde tel que nous le voyons ?

– C’est dans le premier chapitre de la Genèse, au début de son Écriture Sainte, que Dieu nous a dit qu’il avait ainsi fait le monde tel que nous le voyons.

 

– Est-ce que la science s’accorde avec ce premier chapitre de la Genèse ?

– Il n’est pas douteux que la vraie science s’accordera toujours avec ce premier chapitre de la Genèse.

 

– Pourquoi dites-vous que la vraie science s’accordera toujours avec ce premier chapitre de la Genèse ?

– Parce que la vraie science voit les choses comme elles sont, et que nul ne sait mieux comment sont les choses que Dieu lui-même qui les a faites et qui nous a dit comment il les avait faites dans ce premier chapitre de la Genèse.

 

– Il ne pourra donc jamais y avoir de contradiction entre la science et l’Écriture sur ce qui regarde la création du monde des corps ?

– Non, jamais il ne pourra y avoir de contradiction entre la vraie science et l’Écriture sur ce qui regarde la création du monde des corps (q. 67 à 74).

 

13. L’homme : sa nature, son âme spirituelle et immortelle

 

– Parmi ce monde des corps, y a-t-il un des êtres qui s’y trouvent qui forme cependant comme un monde à part, ou une catégorie tout à fait distincte dans l’ensemble du monde créé par Dieu ?

– Oui, c’est l’homme.

 

– Qu’est-ce que l’homme ?

– L’homme est un composé d’esprit et de corps, où se trouvent en quelque sorte réunis le monde des esprits et le monde des corps (q. 75).

 

– Comment s’appelle l’esprit qui est dans l’homme ?

– Il s’appelle l’âme (q. 75, a. 1 à 4).

 

– Est-ce qu’il n’y a que l’homme à avoir une âme dans le monde des corps ?

– Non, il n’y a pas que l’homme à avoir une âme dans le monde des corps.

 

– Quels sont les autres êtres qui ont aussi une âme dans le monde des corps ?

– Ce sont les plantes et les animaux.

 

– Quelle différence y a-t-il entre l’âme des plantes ou des animaux et celle de l’homme ?

– Il y a cette différence que l’âme des plantes n’est que pour la vie végétative ; que celle des animaux n’est que pour la vie végétative et sensitive ; et qu’en plus de cela l’âme de l’homme est pour la vie de la pensée.

 

– C’est donc par la vie de la pensée que l’homme se distingue de tous les autres êtres vivants du monde des corps ?

– Oui, c’est par la vie de la pensée que l’homme se distingue de tous les autres êtres vivants du monde des corps.

 

– Est-ce que dans cette vie de la pensée l’âme humaine est en soi indépendante du corps ?

– Oui, dans cette vie de la pensée l’âme humaine est en soi indépendante du corps (q. 75 a. 2).

 

– Pourriez-vous me donner une raison qui établisse cette vérité ?

– Oui, et cette raison est que l’objet de la pensée est chose tout à fait incorporelle.

 

– Comment s’ensuit-il de là que l’âme humaine dans la vie de la pensée est en soi indépendante du corps ?

– Parce que, si elle n’était pas elle-même tout à fait incorporelle, elle ne pourrait pas atteindre l’objet de la pensée qui est tout à fait incorporel (Ibid.).

 

– Que s’ensuit-il de cette vérité ?

– Il s’ensuit de cette vérité que l’âme humaine est immortelle (q. 75, a. 6).

 

– Pourriez-vous me montrer comment il s’ensuit de cette vérité que l’âme humaine est immortelle ?

– Oui, c’est parce que, si elle a une opération où le corps n’a point de part, il faut qu’elle ait aussi un être propre indépendant du corps.

 

– Que s’ensuit-il de ce que l’âme humaine a un être propre indépendant du corps ?

– Il s’ensuit que, si le corps vient à périr par la séparation d’avec l’âme, l’âme elle-même ne peut pas périr (Ibid.).

 

– L’âme humaine doit donc demeurer toujours ?

– Oui, l’âme humaine doit demeurer toujours.

 

– Mais pourquoi donc l’âme humaine a-t-elle été unie à un corps ?

– L’âme humaine a été unie à un corps pour former avec lui ce tout harmonieux et substantiel qui s’appelle l’homme (q. 75, a. 4).

 

– Ce n’est donc pas accidentellement que l’âme humaine est unie à son corps ?

– Non, ce n’est pas accidentellement que l’âme humaine est unie à son corps, mais parce qu’elle est faite pour lui (q. 76, a. 1).

 

– Que fait l’âme humaine dans le corps auquel elle est unie ?

– Elle donne à ce corps tout ce qu’il a comme perfection, c’est-à-dire qu’elle lui donne d’être, de vivre et de sentir, se réservant pour elle seule l’acte de penser (q. 76, a. 3 & 4).

 

14. Ses facultés végétatives et sensibles

 

– Devons-nous admettre dans l’âme humaine diverses facultés se rapportant à ces divers actes ?

– Oui, il faut admettre dans l’âme humaine diverses facultés se rapportant à ces divers actes, à la seule exception de la première perfection que l’âme donne par elle-même, savoir : l’être du corps (q. 77).

 

– Quelles sont les facultés de l’âme qui donnent au corps de vivre ?

– Les facultés de l’âme qui donnent au corps de vivre sont les facultés végétatives.

 

– Pourriez-vous me dire quelles sont ces facultés ?

– Oui, elles sont au nombre de trois, savoir : la faculté de se nourrir, de grandir et de se reproduire (q. 78, a. 2).

 

– Quelles sont les facultés de l’âme qui donnent au corps de sentir ?

– Les facultés de l’âme qui donnent au corps de sentir sont les facultés sensibles.

 

– Pourriez-vous me dire quelles sont ces facultés ?

– Oui, ces facultés sont d’une double sorte, savoir : les facultés de connaître et les facultés d’aimer.

 

– Quelles sont les facultés sensibles qui donnent au corps de connaître ?

– Les facultés sensibles qui donnent au corps de connaître sont les facultés des cinq sens extérieurs [et des quatre sens intérieurs] (q. 78, a. 3).

 

– Comment appelez-vous les facultés des cinq sens extérieurs ?

– On les appelle les facultés de voir, d’entendre, de sentir ou d’odorer, de goûter et de toucher (Ibid .).

 

– Et les cinq sens extérieurs, comment les appelez-vous ?

– On les appelle : la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût et le toucher (Ibid.).

 

– Y a-t-il aussi des facultés sensibles de connaître qui soient intérieures et ne se voient pas au dehors ?

– Oui, ce sont : le sens central, l’imagination, l’instinct et la mémoire (q. 78, a. 9).

 

15. Son intelligence et son acte de connaître

 

– Y a-t-il d’autres facultés de connaître qui soient aussi dans l’homme ?

– Oui, il y a une autre faculté de connaître qui est aussi dans l’homme et qui est en lui sa faculté principale.

 

– Comment appelez-vous cette faculté principale de connaître qui est ainsi dans l’homme ?

– Elle s’appelle la raison ou l’intelligence (q. 79, a. 1).

 

– La raison ou l’intelligence, est-ce une même faculté de connaître dans l’homme ?

– Oui, la raison et l’intelligence sont une même faculté de connaître dans l’homme (q. 79, a. 8).

 

– Pourquoi l’appelle-t-on de ce double nom ?

– On l’appelle de ce double nom parce que, dans son acte de connaître, quelquefois elle saisit tout de suite, sans avoir besoin de raisonner, tandis que d’autres fois il faut qu’elle raisonne (Ibid.).

 

– Est-ce que le raisonnement est l’acte propre à l’homme ?

– Oui, le raisonnement est l’acte propre à l’homme ; parce que, de tous les êtres qui sont, il n’y a que lui qui puisse raisonner, ou qui ait besoin de raisonner.

 

– Est-ce une perfection pour l’homme de pouvoir raisonner ?

– Oui, c’est une perfection pour l’homme de pouvoir raisonner, mais c’est une imperfection d’avoir besoin de raisonner.

 

– Pourquoi dites-vous que c’est une perfection pour l’homme de pouvoir raisonner ?

– Parce que de la sorte l’homme peut connaître la vérité, ce que ne peuvent point les êtres inférieurs à lui, comme sont les animaux sans raison.

 

– Pourquoi dites-vous que c’est une imperfection pour l’homme d’avoir besoin de raisonner ?

– Parce que de la sorte il n’arrive à connaître la vérité que lentement et avec possibilité de se tromper, tandis que l’ange et Dieu, qui n’ont pas besoin de raisonner, saisissent la vérité d’un seul coup et sans qu’ils puissent se tromper.

 

– Pourriez-vous me dire ce que c’est que connaître la vérité ?

– Connaître la vérité, c’est savoir ce qui est.

 

– Et ne pas savoir ce qui est, qu’est-ce que c’est ?

– C’est être dans l’ignorance ou dans l’erreur.

 

– Y a-t-il une différence entre ces deux choses : être dans l’ignorance ou être dans l’erreur ?

– Oui, il y a une très grande différence entre le fait d’être dans l’ignorance et celui d’être dans l’erreur ; car être dans l’ignorance, c’est simplement ne pas savoir ce qui est ; tandis qu’être dans l’erreur, c’est affirmer qu’une chose est quand elle n’est pas, ou qu’elle n’est pas quand elle est.

 

– Est-ce un mal pour l’homme d’être dans l’erreur ?

– Oui, c’est un très grand mal pour l’homme d’être dans l’erreur ; parce que le bien propre de l’homme consiste dans la vérité, qui est le bien de son intelligence.

 

– L’homme en naissant porte-t-il en lui-même la vérité ?

– Non, l’homme en naissant ne porte pas en lui-même la vérité ; car, s’il a, dès lors, son intelligence, il ne l’a qu’à l’état de faculté vide, qui doit attendre, pour acquérir la vérité, le développement suffisant des facultés sensibles destinées à la servir (q. 84, a. 5).

 

– Quand est-ce que l’homme commence à connaître la vérité ?

– L’homme commence à connaître la vérité quand il a l’usage de la raison, c’est-à-dire aux environs de sa septième année.

 

– Est-ce que l’homme peut tout connaître par sa raison ?

– Non, l’homme ne peut pas tout connaître, d’une connaissance propre, par sa raison, à considérer cette raison dans les seules limites de ses forces naturelles (q. 12, a. 4 ; q. 86, a. 2 & 4).

 

– Quelles sont les choses que l’homme peut connaître naturellement par sa raison ?

– L’homme peut connaître naturellement par sa raison les choses sensibles et tout ce que ces choses sensibles révèlent.

 

– L’homme peut-il se connaître lui-même par la raison naturelle ?

– Oui, l’homme peut se connaître lui-même par la raison naturelle ; parce qu’il est lui-même un être sensible et qu’à l’aide de ce qui tombe sous ses sens il peut, en se servant du raisonnement, connaître ce qui est requis pour être ce qu’il est (q. 87) .

 

– L’homme peut-il connaître les anges ou les purs esprits ?

– L’homme ne peut connaître qu’imparfaitement les anges ou les purs esprits.

 

– Pourquoi dites-vous que l’homme ne peut connaître qu’imparfaitement les anges ou les purs esprits ?

– Parce qu’il ne peut pas les connaître en eux-mêmes, en raison de leur nature, qui n’appartient pas aux natures sensibles, objet propre de la raison de l’homme (q. 88, a. 1 & 2).

 

– Est-ce que l’homme peut connaître Dieu en lui-même ?

– Non, l’homme ne peut pas naturellement connaître Dieu en lui-même, Dieu étant infiniment au-dessus des natures sensibles, qui sont pour la raison de l’homme le seul objet proportionné, dans l’ordre de sa connaissance naturelle (q. 88, a. 3).

 

C’est donc imparfaitement aussi que l’homme peut connaître Dieu par sa raison, laissée à ses seules forces naturelles ?

– Oui, c’est aussi d’une manière seulement imparfaite que l’homme peut connaître Dieu par sa raison, laissée à ses seules forces naturelles.

 

– Est-ce cependant une perfection pour l’homme de pouvoir ainsi connaître Dieu par sa raison ?

– Oui, c’est une très grande perfection pour l’homme de pouvoir ainsi connaître, même imparfaitement, Dieu par sa raison ; parce qu’il s’élève par là infiniment au-dessus des autres êtres qui n’ont pas la raison ; et qu’il a pu même à cause de cela être élevé à la souveraine dignité d’enfant de Dieu par la grâce, où sa raison est appelée à connaître Dieu selon qu’il est en lui-même, d’abord, imparfaitement, par la foi, et puis dans la pleine clarté de la lumière de gloire (q. 12, a. 4, ad 3 ; 5, 8, 10, 13).

 

– Est-ce qu’en pouvant ainsi être élevé à la dignité d’enfant de Dieu par la grâce, l’homme a pu devenir l’égal des anges ?

– Oui, en étant ainsi élevé à la dignité d’enfant de Dieu par la grâce, l’homme devient en quelque sorte l’égal des anges, pouvant même être supérieur à eux dans cet ordre de la grâce, quoiqu’il leur demeure inférieur dans l’ordre de la nature (q. 108, a. 8).

 

16. Ses facultés d’aimer ; son libre arbitre

 

– Y a-t-il dans l’homme quelque autre faculté en plus des facultés de connaître ?

– Oui, il y a encore dans l’homme les facultés d’aimer.

 

– Qu’entendez-vous par les facultés d’aimer dans l’homme ?

– J’entends le pouvoir qui est en lui de se porter d’un mouvement affectif vers tout ce qui lui est présenté comme un bien par ses facultés de connaître, et de s’éloigner de tout ce qui lui est présenté comme un mal.

 

– Est-ce qu’il y a plusieurs sortes de ces facultés d’aimer dans l’homme ?

– Oui, il y a deux sortes de ces facultés d’aimer dans l’homme ; en raison des deux genres de connaissance qui sont en lui.

 

– Comment s’appelle la première de ces deux sortes de facultés d’aimer dans l’homme ?

– Elle s’appelle le cœur, au sens affectif, sensible, donné à ce mot (q. 81).

 

– Et comment s’appelle la seconde de ces sortes de facultés d’aimer dans l’homme ?

– La seconde sorte de ces facultés d’aimer dans l’homme s’appelle la volonté (q. 82).

 

– Peut-on donner aussi le nom de cœur à la volonté dans l’homme ?

– Oui, on peut donner aussi le nom de cœur à la volonté dans l’homme, mais dans un sens plus élevé et tout à fait immatériel.

 

– Quelle est la plus parfaite de ces deux facultés d’aimer qui sont dans l’homme ?

– C’est la volonté.

 

– Est-ce par la volonté que l’homme est dit doué de libre arbitre ?

– Oui, c’est par la volonté que l’homme est dit doué de libre arbitre ; car cette volonté, ne se portant d’elle-même et nécessairement qu’au bien sous sa raison générale de bien, demeure maîtresse de son acte, toutes les fois qu’il s’agit d’un bien particulier quelconque, pouvant tout ensemble le vouloir et pouvant ne le vouloir pas (q. 83).

 

– Est-ce la volonté seule qui constitue le libre arbitre de l’homme ?

– Non, ce n’est pas la volonté seule qui constitue le libre arbitre de l’homme, mais la volonté en union avec l’intelligence ou la raison.

 

– L’homme par son intelligence et sa volonté douées de libre arbitre est-il le roi de la création dans le monde des corps ?

– Oui, l’homme par son intelligence et sa volonté douées de libre arbitre est le roi de la création dans le monde des corps, tous les autres êtres du monde des corps étant au-dessous de lui par leur nature, et tous étant faits pour le servir, dans sa marche de retour vers Dieu par les actes de son libre arbitre.

 

17. L’origine de l’homme, ou sa création et sa formation par Dieu

 

– Les hommes qui sont actuellement sur la terre et tous ceux qui les ont précédés viennent-ils d’un seul père et d’une seule mère ?

– Oui, tous les hommes qui sont actuellement sur la terre et ceux qui les ont précédés viennent d’un seul père et d’une seule mère.

 

– Comment s’appellent le premier homme et la première femme d’où tous les hommes sont venus ?

– Ils s’appellent Adam et Ève.

 

– Qui a été l’auteur d’Adam et d’Ève ?

– C’est Dieu qui a été l’auteur d’Adam et d’Ève.

 

– Comment Dieu a-t-il produit Adam et Ève ?

– Dieu a produit Adam et Ève en leur donnant leur corps et leur âme.

 

– Comment Dieu a-t-il donné leur âme à Adam et Ève ?

– Dieu a donné leur âme à Adam et Ève en la créant (q. 90, a. 1 & 2).

 

– Comment Dieu nous a-t-il dit qu’il avait donné leur corps à Adam et Ève ?

– Dieu nous a dit qu’il avait donné à Adam son corps en le formant lui-même du limon de la terre, et qu’il avait donné à Ève son corps en la formant d’une côte d’Adam (q. 91 & 92).

 

– Devons-nous dire que l’homme a été fait à l’image et à la ressemblance de Dieu ?

– Oui, nous devons dire que l’homme a été fait à l’image et à la ressemblance de Dieu (q. 93).

 

– Que voulons-nous dire quand nous disons que l’homme a été fait à l’image et à la ressemblance de Dieu ?

– Nous voulons dire que Dieu a donné à l’homme une nature et des opérations qui, dans ce qu’elles ont de plus élevé, nous permettent d’entrevoir ce qu’est Dieu dans sa nature spirituelle et dans la vie intime de ses trois augustes Personnes, et d’imiter la perfection qui est le propre des Personnes divines (q. 93, a. 5 à 9).

 

– Pourriez-vous me montrer comment la nature et les opérations de l’homme, en ce qu’elles ont de plus élevé, permettent d’entrevoir ce qu’est Dieu dans sa nature spirituelle et dans la vie intime de ses trois augustes Personnes ?

– C’est que notre âme, elle aussi, dans sa partie supérieure, est une nature spirituelle et que ses opérations les plus hautes sont l’acte de penser et d’aimer portant sur la première Vérité et le premier Bien qui est Dieu lui-même (q. 93, a. 5 à 7).

 

– Comment dans cet acte de penser et d’aimer pouvons-nous entrevoir la vie intime des trois augustes Personnes de la Sainte Trinité ?

– Parce que notre esprit, quand il pense à Dieu, conçoit un verbe intérieur où il retrouve son objet, et que, sous le coup de cette pensée concevant le verbe, se produit l’acte d’amour portant sur ce même objet que l’esprit a conçu (q. 93, a. 6).

 

– Comment pouvons-nous imiter la perfection qui est le propre des Personnes divines ?

– Nous pouvons imiter la perfection qui est le propre des Personnes divines en faisant, comme Dieu lui-même, de Dieu conçu et aimé dans notre esprit et dans notre cœur, l’objet premier et dernier de toute notre vie pensante et aimante (q. 93, a. 7).

 

– N’y a-t-il que l’homme à avoir été fait à l’image et à la ressemblance de Dieu dans le monde corporel ?

– Oui, il n’y a que l’homme à avoir été fait à l’image et à la ressemblance de Dieu dans le monde corporel, en raison de sa nature spirituelle (q. 93, a. 2).

 

– Les autres créatures du monde corporel ne gardent-elles rien de Dieu qui les a faites ?

– Oui, les autres créatures du monde corporel gardent en elles le vestige ou la trace de Dieu qui les a faites, en raison des perfections d’ordre inférieur qui sont en elles (q. 93, a. 6).

 

18. L’état de bonheur où il fut créé

 

– L’homme fut-il créé par Dieu dans un grand état de perfection ?

– Oui, l’homme fut créé par Dieu dans un grand état de perfection.

 

– Pourriez-vous me dire ce que comportait cet état de perfection dans lequel l’homme fut créé par Dieu ?

– Cet état de perfection dans lequel l’homme fut créé par Dieu comportait : une science complète sans ombre d’erreur dans son intelligence ; la justice originelle et toutes les vertus dans son âme et dans son cœur ; l’empire absolu de l’âme sur le corps et sur toute créature inférieure à l’homme (q. 94, 95 & 96).

 

– Cet état de perfection était-il propre au seul premier homme, ou devait-il être commun à tous dans la suite des générations ?

– Il était propre à Adam pour ce qui est de la science ; mais la justice originelle et les dons d’intégrité devaient se communiquer à tous par voie d’origine, étant inséparables de la nature elle-même tant qu’elle n’en serait pas dépouillée par le péché (q. 94, a. 1, ad 1).

 

– Est-ce que l’homme aurait dû mourir, dans l’état où il fut créé par Dieu ?

– Non, l’homme n’aurait pas dû mourir, dans l’état où il fut créé par Dieu (q. 97, a. 1).

 

– Est-ce que l’homme aurait pu souffrir, dans l’état où il fut créé par Dieu ?

– Non, l’homme n’aurait pas pu souffrir, dans l’état où il fut créé par Dieu ; son âme, par un privilège spécial, tenant son corps à l’abri de tout mal, et elle-même ne pouvant être contrariée

par rien, tant qu’elle resterait soumise à Dieu par sa volonté (q. 97, a. 2).

 

– L’homme fut donc créé par Dieu dans un véritable état de bonheur ?

– Oui, l’homme fut créé par Dieu dans un véritable état de bonheur.

 

– Est-ce que cet état de bonheur dans lequel l’homme fut créé par Dieu était l’état de son bonheur dernier et parfait ?

– Non, cet état de bonheur dans lequel l’homme fut créé par Dieu n’était pas l’état de son bonheur dernier et parfait ; car il était temporaire et devait être suivi d’un autre état qui serait définitif (q. 94, a. 1, ad 1).

 

– Comment donc pourrait-on appeler cet état de bonheur dans lequel l’homme fut créé par Dieu ?

– On pourrait l’appeler un état de bonheur premier qui devait préparer l’homme par voie de mérite à recevoir son état de bonheur dernier et parfait, à titre de récompense (q. 94, a. 1, ad 2 ; q. 95, a. 4).

 

Où est-ce que l’homme aurait reçu cet état de bonheur dernier et parfait, s’il était resté fidèle ?

– Il l’aurait reçu dans le ciel de la gloire, avec les anges, où Dieu l’aurait transféré après un certain temps d’épreuve (q. 94, a. 1, ad 1).

 

– Où était placé l’homme en attendant d’être transféré dans le ciel de la gloire ?

– Il était placé dans un jardin de délices préparé par Dieu pour le recevoir (q. 92).

 

– Comment a-t-on appelé ce jardin de délices ?

– On l’a appelé le Paradis terrestre (Ibid.).

 

19. Œuvre de conservation et de gouvernement

 

– Qu'est-ce que vous entendez quand vous dites que Dieu est le souverain Maître de toutes choses ?

– J'entends que toutes choses, dans le monde créé par Dieu, sont soumises au gouvernement unique, suprême et absolu de Dieu lui-même (q. 103, a. 1 & 3).

 

– Qu'est-ce que vous entendez quand vous dites que toutes choses, dans le monde créé par Dieu sont soumises au gouvernement unique, suprême et absolu de Dieu lui-même ?

– J'entends qu'il n'est rien dans le monde des esprits, dans le monde des corps, et dans le monde humain qui puisse échapper à l'action de Dieu conservant tous ces êtres et les conduisant à la fin pour laquelle il les a tous créés (q. 103, a. 4 à 8).

 

Quelle est cette fin à laquelle Dieu conduit par son gouvernement tous les êtres qu’il a créés et qu’il conserve ?

– Cette fin à laquelle Dieu conduit par son gouvernement tous les êtres qu’il a créés et qu'il conserve, c'est lui-même ou sa propre gloire (q. 103, a. 2).

 

– Comment dites-vous que Dieu et sa gloire sont la fin de tout l'univers conservé et gouverné par lui ?

– Je dis que Dieu et sa gloire sont la fin de tout l'univers conservé et gouverné par lui, parce que Dieu meut toutes choses dans cet univers créé et conservé par lui, pour que se manifeste et s'explique, dans l'ordre même de l'univers, ce qui est dans l'intelligence et dans la volonté de celui qui l'a fait, le conserve et le gouverne (Ibid.).

 

– C'est donc dans l’ordre même de l'univers qu'éclate et que se manifeste la gloire de Dieu au-dehors ?

– Oui, c'est dans l'ordre même de l'univers qu'éclate et que se manifeste la gloire de Dieu au-dehors (Ibid.).

 

– Peut-il y avoir quelque chose de plus grand et de plus parfait, en dehors de Dieu, que cet ordre de l'univers créé, conservé et gouverné par lui ?

– Non, il ne peut y avoir, dans l'ordre actuel des choses, rien de plus grand ni de plus parfait, en dehors de Dieu, que cet ordre de l'univers créé, conservé et gouverné par lui (q. 25, a. 5 & 6).

 

– Pourquoi dites-vous : dans l'ordre actuel des choses ?

– Parce que Dieu étant infini et tout-puissant, aucun ordre créé, si parfait qu'il soit, ne saurait égaler l'infinie puissance de Dieu (Ibid.).

 

20. Action personnelle de Dieu dans ce gouvernement. Les miracles

 

– Comment Dieu gouverne-t-il cet univers créé par lui ?

– En le conservant et en le mouvant à sa fin (q. 103, a. 4).

 

– Est-ce par lui-même que Dieu conserve tous les êtres créés par lui ?

– Oui, c'est par lui-même que Dieu conserve tous les êtres créés par lui, bien qu’il se serve aussi de tels êtres déterminés pour conserver dans l'être tels autres êtres déterminés, selon l'ordre de dépendance qu’il a établi parmi eux en les créant (q. 104, a. 1 & 2).

 

– Qu'entendez-vous quand vous dites que c'est par lui-même que Dieu conserve tous les êtres créés par lui ?

– J'entends que ce qu'il y a au fond de tous les êtres de l'univers et qui fait qu'ils communiquent tous dans le fait d'être leur est continué à tous par l’action de Dieu lui-même directement (q. 104, a. 1).

 

– Cette conservation dans l'être de tous les êtres qui sont est-elle aussi propre à Dieu que l'est leur création ?

– Oui, cette conservation dans l'être de tous les êtres qui sont est aussi propre à Dieu que l'est leur création ; parce que c'est directement et immédiatement à l'être, effet propre de Dieu, que toutes deux se terminent (q. 104, a. 1, ad 4 ; q. 8, a. 1).

 

– Dieu pourrait-il faire que tous les êtres qui sont cessassent d'être ?

– Oui, Dieu pourrait faire que tous les êtres qui sont cessassent d'être (q. 104, a. 3).

 

– Que faudrait-il à Dieu pour faire que tous les êtres qui sont cessassent d'être ?

– Il suffirait qu’il cesse de vouloir leur continuer l'être qu'ils ont et qu'ils continuent de recevoir de lui à chaque instant (Ibid.).

 

– C'est donc dans une dépendance absolue de Dieu qu'est continuellement l'être de tout ce qui est dans le monde ?

– Oui, c'est dans une dépendance absolue de Dieu qu'est continuellement l'être de tout ce qui est dans le monde : un peu comme la lumière du jour est dans une dépendance absolue de la présence et de l'action du soleil ; seulement, tandis que l'action du soleil est nécessitée, l'action de Dieu est toute de liberté et d'infinie bonté (Ibid.).

 

– Est-ce que Dieu a jamais rien anéanti de ce qu'il a fait ?

– Non, Dieu n’a jamais rien anéanti de ce qu'il a fait (q. 104, a. 4).

 

– Est-ce que Dieu ne doit jamais rien anéantir de ce qu'il a fait ?

– Non, Dieu ne doit jamais rien anéantir de ce qu'il a fait (Ibid.).

 

– Pourquoi dites-vous que Dieu n'a jamais rien anéanti et qu'il ne doit jamais rien anéantir de ce qu’il a fait ?

– Parce que Dieu n'agit que pour sa gloire ; et sa gloire demande, non qu’il anéantisse ce qu’il a fait, mais, au contraire, qu’il le conserve dans l'être (Ibid.).

 

– Est-ce qu'il peut se produire des changements dans les choses que Dieu a faites ?

– Oui, il peut se produire des changements dans les choses que Dieu a faites, changements plus ou moins profonds selon la diversité des natures et selon la diversité des états pour une même nature.

 

– Est-ce que ces changements, qui peuvent se produire et qui se produisent en fait dans les choses faites par Dieu, entrent dans l'ordre du gouvernement divin ?

– Oui, tous les changements qui peuvent se produire et qui se produisent en fait dans les choses faites par Dieu entrent dans l'ordre du gouvernement divin, tout cela pouvant et devant servir à la fin de ce gouvernement, qui est la gloire de Dieu et le bien de son œuvre.

 

– Y a-t-il des changements dans les choses faites par Dieu qui soient dus à l'action propre de Dieu ?

– Oui, il y a des changements dans les choses faites par Dieu qui sont dus à I'action propre de Dieu (q. 105, a. 1).

 

– Quels sont les changements dans les choses faites par Dieu qui sont dus à l'action propre de Dieu ?

– Ce sont tous les changements qui portent, d'une façon immédiate, sur le dernier fond des êtres matériels, ou sur la partie affective des êtres spirituels ; et aussi ce qu'il y a de premier en toute action de la créature (q. 105, a. 1, 4 & 5).

 

– Est-ce à l'action propre de Dieu qu'il faudrait attribuer les changements qui se produiraient, dans les choses matérielles faites par lui, en dehors des causes secondes proportionnées à ces changements selon le cours ordinaire de la nature ?

– Oui, et c'est là ce qu'on appelle proprement les miracles (q. 105, a. 6 & 7).

 

– Y a-t-il des miracles ainsi faits par Dieu ?

– Oui, très certainement, il y a des miracles ainsi faits par Dieu dans le monde matériel, qu'on peut ranger en trois grandes catégories, selon qu'il s'agit de faits que la nature est impuissante à réaliser en eux-mêmes, ou dans le sujet qui les porte, ou selon le mode dont ils se produisent (q. 105, a. 8).

 

– Pourquoi Dieu a-t-il fait ou fait-il encore ces sortes de miracles ?

– Dieu a fait ou fait encore, quand il lui plaît, ces sortes de miracles, pour frapper l’esprit des hommes et les amener à reconnaître son intervention divine en vue de leur bien et de sa gloire.

 

21. L’action des créatures dans ce gouvernement : l’ordre de l’univers

 

– Est-ce que, pour les changements qui se produisent ou peuvent se produire dans les choses créées par Dieu, les créatures peuvent agir et agissent les unes sur les autres ?

– Oui ; et c’est même par cette action des créatures les unes sur les autres qu’est constitué proprement l’ordre de l’univers (q. 47, a. 3).

 

– Cette action des créatures les unes sur les autres est-elle soumise elle aussi à l’action du gouvernement divin ?

– Oui, cette action des créatures les unes sur les autres est soumise, elle aussi, au plus haut point, à l’action du gouvernement divin (q. 103, a. 6).

 

– Que voulez-vous dire quand vous dites que cette action des créatures les unes sur les autres est soumise au plus haut point à l’action du gouvernement divin ?

– Je veux dire que c’est par cette action même des créatures les unes sur les autres que Dieu conduit à la fin qu’il leur a marquée tout l’ensemble des créatures (Ibid).

 

– Dieu aurait-il pu, lui tout seul, par son action propre, conduire chacune de ses créatures à sa fin ?

– Il l’aurait pu, sans aucun doute ; mais c’était chose meilleure qu’il voulût se servir ainsi de l’action des créatures les unes sur les autres pour les conduire à leur fin ; car les créatures en sont plus parfaites et lui-même en apparaît plus grand.

 

– Comment dites-vous que les créatures en sont plus parfaites ?

– Parce qu’elles participent à l’action souveraine de Dieu agissant sur ses créatures pour les conduire à leur fin (q. 103, a. 6, ad 2).

 

– Comment dites-vous que Dieu en apparaît plus grand ?

– Parce que c’est une marque de grandeur et de puissance ou de majesté pour un souverain d’avoir à son service une multitude de ministres qui exécutent ses ordres absolus (q. 103, a. 6, ad 3).

 

– Ce sont donc les ordres absolus de Dieu qu’exécutent toutes les créatures, quand elles agissent les unes sur les autres ?

– Oui, ce sont les ordres absolus de Dieu qu’exécutent toutes les créatures quand elles agissent les unes sur les autres, leur action ne pouvant jamais échapper à la parfaite et souveraine ordination du gouvernement divin (q. 103, a. 3).

 

– Est-il tout à fait impossible qu’il y ait aucun désordre dans l’action des créatures les unes sur les autres, agissant comme instruments de Dieu dans son gouvernement du monde ?

– Oui ; car toujours leur action, quelle qu’elle soit, est amenée à concourir, sous l’action suprême de Dieu, au bien de l’univers (q. 103, a. 8, ad 1 & 3).

 

– Les créatures peuvent-elles, par leur action des unes sur les autres, être causes d’un mal particulier ?

– Oui, les créatures peuvent, par leur action des unes sur les autres, être causes d’un mal particulier, soit dans l’ordre physique, soit même dans l’ordre moral ; car elles peuvent troubler tel ou tel ordre subalterne parmi les créatures ou même parmi les diverses manifestations subordonnées des conseils et des vouloirs divins (q. 103, a. 8, ad 1).

 

– Ce mal particulier arrive-t-il contrairement à l’ordre du gouvernement divin ?

– Non, ce mal particulier n’arrive pas contrairement à l’ordre du gouvernement divin pris dans son ensemble.

 

– Pourquoi dites-vous que ce mal particulier n’arrive pas contrairement à l’ordre du gouvernement divin pris dans son ensemble ?

– Parce que Dieu est si souverainement puissant qu’il subordonne ce mal particulier à un ordre supérieur en vertu duquel il sert lui aussi au bien de l’ensemble. (Ibid. ; q. 19, a. 6 ; q. 23, a. 5, ad 3)

 

– Tout est donc merveilleusement ordonné dans l’action des créatures les unes sur les autres sous l’action suprême et souveraine du gouvernement divin ?

– Oui, tout est merveilleusement ordonné dans l’action des créatures les unes sur les autres sous l’action suprême et souveraine du gouvernement divin ; car, même si une chose paraît désordonnée vue d’un plan subalterne, elle a toujours sa raison très sage et très profonde en quelque sphère plus élevée.

 

– Pouvons-nous sur cette terre comprendre cet ordre merveilleux du gouvernement divin dans le monde ?

– Nous ne le pouvons absolument pas ; car il faudrait, pour cela, connaître tout l’ensemble des créatures et des conseils divins.

 

– Où verrons-nous dans toute sa splendeur la beauté et l’harmonie du gouvernement de Dieu dans le monde ?

– Ce n’est qu’au ciel que nous verrons dans toute sa splendeur la beauté et l’harmonie du gouvernement de Dieu dans le monde.

 

22. Parmi les anges : les hiérarchies et les ordres

 

– Est-ce que l’action des créatures les unes sur les autres existe dans le monde des purs esprits ou des anges ?

– Oui, dans le monde des purs esprits ou des anges existe l’action de ces esprits les uns sur les autres.

 

– De quel nom s’appelle l’action des purs esprits les uns sur les autres ?

– On l’appelle du nom d’illumination (q. 106, a. 1).

 

– Pourquoi appelez-vous du nom d’illumination l’action des purs esprits les uns sur les autres ?

– Parce que les purs esprits n’agissent les uns sur les autres que pour se transmettre la lumière qu’ils reçoivent de Dieu sur la conduite de son gouvernement (Ibid.).

 

– Est-ce d’une manière graduée et ordonnée que cette lumière de Dieu est communiquée aux purs esprits ?

– Oui, c’est d’une manière graduée et merveilleusement ordonnée que cette lumière de Dieu est communiquée aux purs esprits.

 

– Qu’entendez-vous quand vous dites que c’est d’une manière merveilleusement ordonnée que la lumière de Dieu est communiquée aux purs esprits ?

– J’entends que Dieu la communique d’abord à ceux qui sont le plus rapprochés de lui, et ceux-ci aux autres anges, par ordre, depuis les plus élevés jusqu’aux derniers, de telle sorte que l’action des premiers se communique aux derniers par l’action de ceux du milieu (q. 106, a. 2).

 

– Il y a donc des premiers, des seconds et des derniers dans cette subordination de l’action des purs esprits les uns sur les autres, pour se communiquer la lumière qui descend de Dieu sur eux ?

– Oui, il y a des premiers, des seconds et des derniers dans cette subordination de l’action des purs esprits les uns sur les autres pour se communiquer la lumière qui descend de Dieu sur eux (q. 108, a. 2).

 

– Pourriez-vous faire entendre par une comparaison ce qu’est cette subordination de l’action des purs esprits les uns sur les autres, pour se communiquer la lumière qui descend de Dieu sur eux ?

– On pourrait la comparer à un fleuve de lumière qui descendrait limpide de roche en roche, alimenté sans cesse par les eaux d’un beau lac au plus haut sommet de la montagne.

 

– Cette subordination des anges entre eux comprend-elle divers groupes ?

– Oui, cette subordination des anges entre eux comprend divers groupes (q. 108).

 

– De combien de sortes sont ces divers groupes ?

– Ces divers groupes sont de deux sortes.

 

– Comment appelez-vous ces deux sortes de groupes qui existent dans la subordination des anges entre eux ?

– On les appelle hiérarchies et ordres ou chœurs angéliques (q. 108).

 

– Qu’est-ce que vous entendez par le mot hiérarchie ?

– Le mot hiérarchie est un mot tiré du grec, qui signifie la « principauté sacrée ». Le mot de « principauté » comprend deux choses : le prince lui-même et la multitude ordonnée sous lui (q. 108, a. 1).

 

– Et quand on dit « principauté sacrée », que veut-on dire par là ?

– La « principauté sacrée », entendue dans son sens plein et parfait, désigne toute la multitude des créatures raisonnables appelées à participer aux choses saintes sous le gouvernement unique de Dieu, Prince suprême et Roi souverain de toute cette multitude (Ibid.).

 

– Il n’y aurait donc qu’une seule principauté sacrée et qu’une seule hiérarchie dans le monde gouverné par Dieu ?

– Oui, à considérer la principauté sacrée du côté de Dieu, Prince suprême et souverain Roi de toutes les créatures raisonnables gouvernées par lui, il n’y a qu’une seule principauté sacrée ou une seule hiérarchie qui comprend les anges et les hommes (q. 108, a. 1).

 

– Comment donc et en quel sens parle-t-on de hiérarchies au pluriel et même, d’une façon spéciale, dans le seul monde des purs esprits ou des anges ?

– Parce que, du côté de la multitude ordonnée sous le Prince, la principauté se diversifie selon que la multitude doit recevoir de diverses manières le gouvernement du Prince (q. 108, a. 1).

 

– Pourriez-vous me donner un exemple de cette diversité dans les choses humaines ?

– Oui, c’est ainsi que sous un même roi se trouvent des cités ou des provinces différentes qui sont régies par des lois diverses et des ministres divers (q. 108, a. 1).

 

– Y a-t-il une hiérarchie différente pour les hommes et pour les anges ?

– Oui, tant que les hommes sont sur la terre, il y a une hiérarchie différente pour les hommes et pour les anges (q. 108, a. 1).

 

– Pourquoi dites-vous : tant que les hommes sont sur la terre ?

– Parce qu’au ciel les hommes seront admis dans la hiérarchie des anges (q. 108, a. 8).

 

– Il y a donc plusieurs hiérarchies parmi les anges ?

– Oui, il y a plusieurs hiérarchies parmi les anges (q. 108, a. 1).

 

– Combien y a-t-il de hiérarchies parmi les anges ?

– Il y a trois hiérarchies parmi les anges (q. 108, a. 1).

 

– Pourriez-vous me dire comment se distinguent ces trois hiérarchies parmi les anges ?

– Ces trois hiérarchies parmi les anges se distinguent selon une triple manière de connaître les raisons des choses qui touchent au gouvernement divin (q. 108, a. 1).

 

– De quelle manière la première hiérarchie connaît-elle les raisons des choses qui touchent au gouvernement divin ?

– Elle les connaît selon que ces raisons procèdent du Premier Principe universel qui est Dieu (q. 108, a. 1).

 

– Que s’ensuit-il de là pour les anges de cette première hiérarchie ?

– Il s’ensuit de là, pour les anges de la première hiérarchie, qu’ils sont dits se tenir près de Dieu, de telle sorte que tous les ordres de cette hiérarchie tireront leurs noms de quelque office ayant pour objet Dieu lui-même (q. 108, a. 1 & 6).

 

– De quelle manière la seconde hiérarchie connaît-elle les raisons des choses qui touchent au gouvernement divin ?

– Elle les connaît selon que ces sortes de raisons dépendent des causes universelles créées (q. 108, a. 1).

 

– Que s’ensuit-il de là pour les anges de cette seconde hiérarchie ?

– Il s’ensuit de là, pour les anges de cette seconde hiérarchie, qu’ils reçoivent leur illumination de la première hiérarchie, et que leurs ordres tirent leurs noms de quelque office ayant trait à l’universalité des créatures gouvernées par Dieu (q. 108, a. 1 & 6).

 

– De quelle manière la troisième hiérarchie connaît-elle les raisons des choses qui touchent au gouvernement divin ?

– Elle les connaît selon qu’elles s’appliquent aux choses particulières et selon qu’elles dépendent de leurs causes propres (q. 108, a. 1).

 

– Que s’ensuit-il de là pour les anges de cette troisième hiérarchie ?

– Il s’ensuit de là, pour les anges de cette troisième hiérarchie, qu’ils reçoivent la lumière divine selon des formes particulières qui leur permettent de se communiquer à nos intelligences sur cette terre, et que leurs ordres tirent leurs noms d’actes limités à un homme, tels que les anges gardiens, ou à une province, tels que les Principautés (q. 108, a. 1 & 6).

 

– Trouverait-on un exemple de cette triple sorte de hiérarchie dans les choses de la terre ?

– Oui, on pourrait trouver un exemple de cette triple sorte de hiérarchie dans les choses de la terre ; et c’est ainsi que, parmi les officiers du roi, il y a les chambellans, les conseillers, les assesseurs, qui sont toujours auprès de la personne du Prince ; puis les officiers de la curie royale, auxquels ressortissent les affaires de tout le royaume en général ; et enfin les officiers qui sont préposés à telle partie déterminée dans le royaume (q. 108, a. 6).

 

– Est-ce que les ordres sont distincts des hiérarchies parmi les anges ?

– Oui, les ordres sont distincts des hiérarchies parmi les anges (q. 108, a. 2).

 

– En quoi consiste cette distinction des ordres et des hiérarchies parmi les anges ?

– Elle consiste en ce que les hiérarchies constituent diverses multitudes d’anges formant des principautés diverses sous le même gouvernement divin ; tandis que les ordres constituent diverses classes dans chacune des multitudes qui forment une hiérarchie (q. 108, a. 2).

 

– Combien y a-t-il d’ordres dans chaque hiérarchie ?

– Il y a trois ordres dans chaque hiérarchie (q. 108, a. 2).

 

– Pourquoi dites-vous qu’il y a trois ordres dans chaque hiérarchie ?

– Parce que, même chez nous, toutes les diverses classes qui distinguent les hommes dans une même cité se ramènent à trois classes principales, qui sont les notables, la bourgeoisie et le petit peuple (q. 108, a. 2).

 

– Il y a donc, dans chaque hiérarchie, des anges supérieurs, des anges du milieu et des anges inférieurs ?

– Oui, et c’est là ce qu’on appelle les trois ordres dans chaque hiérarchie (q. 108, a. 2).

 

– C’est donc en tout neuf ordres angéliques qu’il faut distinguer ?

– Oui, il y a en tout neuf principaux ordres angéliques (q. 108, a. 5 & 6).

 

– Pourquoi dites-vous : principaux ?

– Parce que, dans chaque ordre, il y a encore d’autres subordinations presque à l’infini, chaque ange ayant sa place distincte et son office particulier ; mais il ne nous appartient pas de les connaître sur cette terre (q. 108, a. 3).

 

– Les neuf ordres sont-ils la même chose que les neuf chœurs des anges ?

– Oui, les neuf ordres sont la même chose que les neuf chœurs des anges.

 

– Pourquoi a-t-on donné le nom de chœurs aux ordres angéliques ?

– Parce que les divers ordres, en remplissant leurs offices en vue du gouvernement divin, constituent, chacun, des groupements pleins d’harmonie, qui font éclater merveilleusement la gloire de Dieu dans son œuvre.

 

– Pourriez-vous me dire quels sont les noms des neuf chœurs des anges ?

– Oui, ce sont, par ordre descendant, les séraphins, les chérubins, les trônes, les dominations, les vertus, les puissances, les principautés, les archanges et les anges (q. 108, a. 5).

 

– Les ordres sont-ils demeurés parmi les démons ?

– Oui, les ordres sont demeurés parmi les démons ; car ils sont proportionnés à la nature des anges, et la nature est restée la même dans les démons.

 

– Les démons sont donc subordonnés entre eux, comme ils l’étaient avant leur chute ?

– Oui, les démons demeurent subordonnés entre eux, comme ils l’étaient avant leur chute (q. 109, a. 1 & 2).

 

– Cet ordre parmi eux s’exerce-t-il jamais en vue du bien ?

– Non, cet ordre parmi eux ne s’exerce jamais qu’en vue du mal (q. 109, a. 3).

 

– Il n’y a donc pas d’illumination parmi les démons ?

– Parmi les démons il n’y a que les ténèbres du mal ; et c’est pourquoi leur empire est appelé l’empire des ténèbres (Ibid.).

 

23. Action des bons anges sur le monde des corps

 

– Est-ce que Dieu se sert des anges pour l’administration du monde corporel ?

– Oui, Dieu se sert des anges pour l’administration du monde corporel ; parce que ce monde corporel est inférieur aux anges ; et que, dans tout gouvernement ordonné, les êtres inférieurs sont régis par ceux qui leur sont supérieurs (q. 110, a. 1).

 

– A quel ordre appartiennent les anges qui administrent le monde corporel ?

– Ils appartiennent à l’ordre des vertus (q. 110, a. 1, ad 3).

 

– Que font les anges qui servent à l’administration du monde corporel ?

– Les anges qui servent à l’administration du monde corporel veillent à l’accomplissement parfait du plan providentiel et des volontés divines dans tout ce qui se passe parmi les divers êtres qui constituent le monde des corps (q. 110, a. 1, 2 & 3).

 

– Est-ce par l’entremise de ces anges de l’ordre des vertus que Dieu accomplit tous les changements qui se font dans le monde des corps, y compris même les miracles ?

– Oui, c’est par l’entremise de ces anges de l’ordre des vertus que Dieu accomplit tous les changements qui se font dans le monde des corps, y compris même les miracles (q. 110, a. 4).

 

– Quand Dieu se sert de ses anges pour accomplir quelque miracle, est-ce par la vertu propre de l’ange que le miracle s’accomplit ?

– Non, il ne s’accomplit que par la vertu propre de Dieu ; mais l’ange peut y concourir par mode d’intercession ou à titre d’instrument (q. 110, a. 4, ad 1).

 

24. Action des bons anges à l’endroit de l’homme : les anges gardiens

 

– Est-ce que l’ange peut agir sur l’homme ?

– Oui, l’ange peut agir sur l’homme, en raison de sa nature spirituelle, qui est d’un ordre supérieur (q. 111).

 

– Est-ce que l’ange peut illuminer l’intelligence et l’esprit de l’homme ?

– Oui, l’ange peut illuminer l’intelligence et l’esprit de l’homme, fortifiant sa vertu et mettant à sa portée la vérité pure que lui-même contemple (q. 111, a. 1).

 

– Est-ce que l’ange peut changer la volonté de l’homme en agissant sur elle directement ?

– Non, l’ange ne peut pas changer la volonté de l’homme en agissant sur elle directement, le mouvement de la volonté étant une inclination intérieure, qui ne peut dépendre directement que de la volonté elle-même ou de Dieu qui en est l’auteur (q. 111, a. 2).

 

– Il n’y a donc que Dieu qui peut ainsi changer la volonté de l’homme en agissant sur elle directement ?

– Oui, il n’y a que Dieu qui peut changer la volonté de l’homme en agissant sur elle directement (q. 111, a. 2).

 

– L’ange peut-il agir sur l’imagination de l’homme et sur ses autres facultés sensibles ?

– Oui, l’ange peut agir sur l’imagination de l’homme et sur ses autres facultés sensibles, ces facultés étant liées à des organe, et, par suite, dépendantes du monde corporel soumis à l’action des anges (q. 111, a. 3).

 

– Est-ce que l’ange peut agir sur les sens de l’homme ?

– Oui, et pour la même raison, l’ange peut agir sur les sens extérieurs de l’homme et les impressionner comme il lui plaît, à moins, s’il s’agit des mauvais anges, que leur action soit entravée par celle des bons anges (q. 111, a. 4).

 

– Est-ce que les bons anges peuvent être envoyés par Dieu en ministère auprès des hommes ?

– Oui, les bons anges peuvent être envoyés par Dieu en ministère auprès des hommes, Dieu se servant de leur action auprès des hommes pour promouvoir le bien de ces derniers, ou pour l’exécution de ses conseils à leur endroit (q. 112, a. 1).

 

– Sont-ce tous les bons anges qui peuvent être ainsi envoyés par Dieu en ministère auprès des hommes ?

– Non, ce ne sont pas tous les bons anges qui peuvent être ainsi envoyés par Dieu en ministère auprès des hommes (q. 112, a. 2).

 

– Quels sont ceux qui ne sont jamais envoyés en ministère auprès des hommes ?

– Ce sont tous ceux de la première hiérarchie (q. 112, a. 2 & 3).

 

– Pourquoi aucun de ces anges n’est-il envoyé en ministère auprès des hommes ?

– Parce que le privilège de leur hiérarchie est de se tenir constamment devant Dieu (q. 112, a. 3).

 

– Comment appelle-t-on les anges de la première hiérarchie, en raison de ce privilège ?

– On les appelle les anges qui assistent (q. 112, a. 3).

 

– Sont-ce tous les anges des deux autres hiérarchies qui peuvent être envoyés en ministère auprès des hommes ?

– Oui, ce sont tous les anges des deux autres hiérarchies qui peuvent être envoyés en ministère auprès des hommes ; de telle sorte cependant que les dominations président à l’exécution des conseils divins, tandis que les autres, vertus, puissances, principautés, archanges, anges, vaquent directement à cette exécution (q. 112, a. 4).

 

– Y a-t-il des anges qui soient envoyés par Dieu auprès des hommes pour les garder ?

– Oui, il y a des anges qui sont envoyés auprès des hommes pour les garder, la providence du gouvernement divin ayant voulu que l’homme, aux pensées et aux volontés si changeantes et si fragiles, fût assisté, dans sa marche vers le ciel, par un des esprits bienheureux à jamais fixé dans le bien (q. 113, a. 1).

 

– Est-ce un même ange pour plusieurs hommes ou, distinctement, un ange pour chaque homme que Dieu députe ainsi auprès des hommes pour les garder ?

– C’est distinctement un ange pour chaque homme, que Dieu députe en ministère auprès des hommes pour les garder, chaque âme humaine étant plus chère à Dieu que ne peuvent l’être les diverses espèces des créatures matérielles, auxquelles cependant est préposé un ange distinct qui veille à promouvoir leur bien (q. 113, a. 2).

 

– A quel ordre appartiennent les anges qui sont ainsi députés par Dieu, distinctement, auprès de chaque homme, pour le garder ?

– Les anges qui sont ainsi députés par Dieu, distinctement, auprès de chaque homme, pour le garder, appartiennent tous au dernier des neuf chœurs des anges (q. 113, a. 3).

 

– Sont-ce tous les hommes, sans exception, qui sont ainsi confiés par Dieu à la garde d’un de ses anges ?

– Oui, ce sont tous les hommes, sans exception, qui sont ainsi confiés par Dieu à la garde d’un de ses anges, tant qu’ils vivent sur cette terre, en raison du chemin périlleux qu’ils doivent tous parcourir avant de parvenir au terme (q. 113, a. 4).

 

– Est-ce que Notre-Seigneur Jésus-Christ, en tant qu’homme, a eu, lui aussi, un ange pour le garder ?

– Non, en raison de ce qu’il était Dieu en personne, il ne convenait pas à Notre-Seigneur Jésus-Christ d’avoir un ange pour le garder ; mais il a eu des anges préposés à l’insigne honneur de le servir (q. 113, a. 4, ad 1).

 

– Quand est-ce que l’ange personnel à chaque homme est député par Dieu auprès de lui pour le garder ?

– C’est à l’instant même où chaque homme vient au monde qu’il reçoit ainsi près de lui l’ange chargé par Dieu de le garder (q. 113, a. 5).

 

– Est-ce que l’ange gardien laisse quelquefois l’homme à la garde duquel il est préposé ?

– Non, l’ange gardien ne laisse jamais l’homme à la garde duquel il est préposé, et il continue de veiller sur lui, sans interruption aucune, jusqu’au dernier moment de sa vie terrestre (q. 113, a. 6).

 

– Est-ce que les anges s’attristent des maux de ceux qu’ils gardent ?

– Non, car après qu’ils ont fait ce qui dépendait d’eux pour les empêcher, s’ils se produisent, ils adorent, en cela comme en tout, la profondeur des conseils divins (q. 113, a. 7).

 

– Est-ce chose bonne et à recommander, dans la pratique, de se confier en tout et souvent à la protection de son ange gardien ?

– Oui, c’est chose excellente et à recommander au plus haut point, dans la pratique, de se confier en tout et souvent à la protection de son ange gardien.

 

– Cette protection, quand on l’invoque, nous est-elle toujours infailliblement assurée ?

– Oui, cette protection, quand on l’invoque, nous est toujours infailliblement assurée, en fonction cependant des éternels conseils de Dieu et selon que ce qui nous touche est ordonné à sa gloire (q. 113, a. 8).

 

25. Action des mauvais anges ou des démons

 

– Est-ce que les démons peuvent attaquer et tenter les hommes ?

– Oui, les démons peuvent attaquer et tenter les hommes.

 

– Pourquoi les démons peuvent-ils attaquer et tenter les hommes ?

– Les démons peuvent attaquer et tenter les hommes en raison de leur malice, et parce que Dieu fait tourner cette tentation elle-même au bien de ses élus (q. 114, a. 1).

 

– Le fait de tenter les hommes est-il propre aux démons ?

– Oui, le fait de tenter les hommes est propre aux démons.

 

– En quel sens dites-vous que le fait de tenter les hommes est propre aux démons ?

– Le fait de tenter les hommes est propre aux démons en ce sens qu’eux seuls le tentent toujours dans le dessein de lui nuire et de le perdre (q. 114, a. 2).

 

– Les démons, pour tenter les hommes et les séduire, peuvent-ils opérer des miracles ?

– Non, les démons, pour tenter les hommes et les séduire, ne peuvent pas opérer de vrais miracles ; mais seulement des semblants de miracles.

 

– Qu’entendez-vous par ces mots : des semblants de miracles ?

– J’entends des prodiges qui dépassent le mode d’agir des êtres qui nous entourent, tel que nous le connaissons, mais qui ne dépassent pas le pouvoir naturel de l’ensemble des créatures (q. 114, a. 4).

 

– A quel signe surtout reconnaît-on les faux miracles accomplis par les démons ?

– On les reconnaît surtout à ce signe qu’impliquant toujours quelque chose de mauvais ils ne peuvent pas avoir Dieu pour auteur comme les vrais miracles (q. 114, a. 4, ad 3).

 

26. Action du monde matériel ou de l’ensemble du cosmos

 

– N’y a-t-il que les seuls esprits bons ou mauvais qui concourent à l’action de Dieu dans son gouvernement du monde ?

– Non, il n’y a pas que les seuls esprits, bons ou mauvais qui concourent à l’action de Dieu dans son gouvernement du monde.

 

– Quels sont les autres êtres qui y concourent encore ?

– Ce sont tous les agents cosmiques dont les forces mues par Dieu concourent à la fin de son gouvernement (q. 115, a. 1).

 

– Est-ce que toute la marche du monde de la nature est ainsi entre les mains de Dieu dans son gouvernement ?

– Oui, c’est toute la marche du monde de la nature, avec tout l’ensemble de ses lois, qui est ainsi entre les mains de Dieu dans son gouvernement (q. 116, a. 2).

 

– C’est donc en vue de la réalisation des conseils de Dieu et pour y servir que chaque jour le soleil paraît, que les jours alternent avec les nuits, et les saisons entre elles, et que se déroulent, dans un ordre que rien n’altère, les jours, les mois, les années et les siècles ?

– Oui, c’est en vue de la réalisation des conseils de Dieu et pour y servir, que chaque jour le soleil paraît, que les jours alternent avec les nuits, et les saisons entre elles, et que se déroulent, dans un ordre que rien n’altère, les jours, les mois, les années et les siècles.

 

– Peut-on dire que c’est en vue de l’homme et pour promouvoir son bien que Dieu a ainsi ordonné, et maintient dans son cours régulier la marche du monde de la nature ?

– Oui, on peut et on doit dire que c’est en vue de l’homme et pour promouvoir son bien que Dieu a ainsi ordonné, et maintient dans son cours régulier la marche du monde de la nature.

 

– L’homme est donc la créature à laquelle Dieu a, en quelque sorte, ordonné toutes les autres en vue de subvenir à ses besoins ?

– Oui, l’homme est la créature à laquelle Dieu a, en quelque sorte, ordonné toutes les autres en vue de subvenir à ses besoins.

 

– Pourquoi Dieu en a-t-il agi ainsi avec l’homme ?

– Dieu en a agi ainsi avec l’homme, parce que l’homme est la plus faible de ses créatures et qu’il a besoin de tout pour le bien de son âme et de son corps.

 

27. Action de l’homme lui-même

 

– L’homme, tout faible qu’il est, peut-il, lui aussi, concourir à l’action de Dieu dans son gouvernement du monde ?

– Oui, l’homme peut aussi, malgré sa faiblesse, concourir puissamment à l’action de Dieu dans son gouvernement du monde.

 

– Comment l’homme peut-il ainsi concourir à l’action de Dieu dans son gouvernement du monde ?

– L’homme concourt à l’action de Dieu dans son gouvernement du monde en coopérant, lui aussi, au bien de l’homme.

 

– De quelle manière l’homme peut-il coopérer, lui aussi, au bien de l’homme ?

– L’homme coopère au bien de l’homme en servant d’instrument à Dieu en vue de l’âme et du corps de l’homme.

 

– Comment est-ce que l’homme sert d’instrument à Dieu en vue de l’âme de l’homme ?

– L’homme sert d’instrument à Dieu en vue de l’âme de l’homme, parce que c’est à l’occasion de l’acte ou de l’opération de l’homme, que Dieu crée l’âme de chaque enfant qui vient au monde ; et parce que cette âme se développe ensuite et grandit en perfection sous l’action du maître qui l’enseigne (q. 117 & 118).

 

– Et comment est-ce que l’homme sert d’instrument à Dieu en vue du corps de l’homme ?

– Parce que, selon les lois de la nature fixées par lui, Dieu a voulu que le corps de l’enfant soit formé et vienne au monde par la suave entremise d’un père et d’une mère (q. 119).

 

28. Point de convergence où se retrouve toute la marche du gouvernement divin

 

– C’est donc autour du berceau de l’enfant, parmi les hommes, que nous voyons éclater, comme dans leur centre, toutes les suavités du gouvernement de Dieu dans le monde ?

– Oui, c’est autour du berceau de l’enfant, parmi les hommes, que nous voyons éclater, comme dans leur centre, toutes les suavités du gouvernement de Dieu dans le monde ; car tout, dans le monde, est ordonné au bien de cet enfant : le père et la mère qui l’entourent, toute la nature qui le fait vivre, les anges qui l’assistent, et Dieu qui le destine à la gloire de son ciel.

 

– Y a-t-il eu un berceau ou une naissance d’enfant parmi les hommes sur lesquels aient éclaté d’une façon incomparable toutes les splendeurs du gouvernement de Dieu dans le monde ?

– Oui, c’est sur le berceau et sur la naissance de l’enfant, qui nous apparaîtra bientôt comme la voie ou le chemin du retour de l’homme vers Dieu (q. 119, a. 2, ad 4).

 

– Et que vit-on en effet à la naissance de cet Enfant ?

– L’on vit, à la naissance de cet Enfant, une conception due à l’action toute surnaturelle de l’Esprit-Saint, une mère demeurée vierge, des rois et mages conduits par une étoile et une multitude d’esprits célestes louant Dieu et disant : Gloire à Dieu dans les hauteurs ; et, sur la terre, paix aux hommes de bonne volonté.

 

– Comment s’appelle cet enfant de bénédiction ?

– Il n’est autre que l’Emmanuel ou Dieu avec nous, et il s’appelle : Jésus.

 

Fin de la première partie de la Somme théologique.

 

 

 

Deuxième partie
L’homme
(venu de Dieu et devant retourner à Dieu)


 

Première section : Vue générale de ce retour de l’homme à Dieu

 

1. Ressemblance de l’homme avec Dieu dans la libre gestion de ce qui le concerne

 

– Est-ce que l’homme a quelque ressemblance spéciale avec Dieu dans ses actions ?

– Oui, l’homme a une ressemblance spéciale avec Dieu dans ses actions.

 

– En quoi consiste cette ressemblance spéciale que l’homme a avec Dieu dans ses actions ?

– Elle consiste en ce que, comme Dieu dispose de tout l’univers, qui dépend de lui, à son gré et en toute liberté, de même l’homme dispose à son gré et en toute liberté de ce qui dépend de lui (Prologue).

 

2. De la fin dernière de l’homme en toutes ses actions, qui est le bonheur

 

– L’homme a-t-il toujours un but en chacune de ses actions ?

– Oui, l’homme a toujours un but en chacune de ses actions, quand il agit comme homme et non comme une machine ou par impulsion et réaction purement physique ou instinctive (q. 1, a. 1).

 

– N’y a-t-il que l’homme, dans le monde matériel, à avoir un but dans ses actions ?

– Oui, il n’y a que l’homme, dans le monde matériel, à avoir un but dans ses actions (q. 1, a. 2).

 

– S’ensuit-il que tous les autres êtres, dans le monde matériel, agissent sans aucun but ?

– Non, il ne s’ensuit pas que tous les autres êtres, dans le monde matériel, agissent sans aucun but ; et tous, au contraire, agissent toujours pour un but très déterminé ; mais eux-mêmes n’ont point ce but comme une chose qu’ils se proposent ; c’est Dieu qui l’a pour eux et qui le leur a fixé (q. 1, a. 2).

 

– Tous les autres êtres agissent donc en vue d’une fin ou pour atteindre un but qui leur a été marqué par Dieu ?

– Oui, tous les autres êtres agissent en vue d’une fin ou pour atteindre un but qui leur a été marqué par Dieu (q. 1, a. 2).

 

– Est-ce que Dieu n’aurait point marqué à l’homme le but pour lequel il agit ?

– Si ! Dieu a marqué aussi à l’homme le but pour lequel il agit.

 

– Quelle est donc la différence entre l’homme et les autres êtres du monde matériel, quand il agit ?

– C’est que l’homme peut se fixer à lui-même, sous l’action supérieure de Dieu et en dépendance de cette action, le but pour lequel il agit, tandis que les autres êtres du monde matériel ne font qu’exécuter aveuglément, par leur nature ou leur instinct, ce que Dieu a marqué comme fin de leur action (q. 1, a. 2).

 

– A quoi tient cette différence entre l’homme et les autres êtres matériels, dans ses actions ?

– Cette différence tient à ce que l’homme a la raison et que les autres ne l’ont pas (q. 1, a. 2).

 

– Y a-t-il pour l’homme un but suprême ou une fin dernière qu’il se propose dans ses actions ?

– Oui, il y a toujours pour l’homme un but suprême ou une fin dernière qu’il se propose dans ses actions ; puisque sans cette fin dernière ou ce but suprême, il ne pourrait rien vouloir (q. 1, a. 4-5).

 

– Est-ce que l’homme ordonne tout, dans ses actions, à cette fin dernière ou à ce but suprême qu’il se propose dans ses actions ?

– Oui, l’homme ordonne tout, dans ses actions, à cette fin dernière ou à ce but suprême qu’il se propose dans ses actions, sinon toujours d’une façon consciente et explicite, du moins implicitement et par une sorte d’instinct naturel dans l’ordre de la raison (q. 1, a. 6).

 

– Quelle est la fin dernière ou quel est le but suprême que l’homme se propose toujours et à laquelle ou auquel il ordonne tout dans ses actions ?

– Cette fin dernière ou le but suprême que l’homme se propose toujours et à laquelle ou auquel il ordonne tout dans ses actions, c’est le bonheur (q. 1, a. 7).

 

– L’homme veut donc nécessairement être heureux ?

– Oui, l’homme veut nécessairement être heureux.

 

– Est-il absolument impossible de rencontrer un homme qui veuille être malheureux ?

– Il est absolument impossible de rencontrer un homme qui veuille être malheureux (q. 5, a. 8).

 

– L’homme peut-il se tromper sur l’objet de son bonheur ?

– Oui, l’homme peut se tromper sur l’objet de son bonheur ; parce que, pouvant chercher son bien en des biens multiples et divers, il peut se tromper sur son bien véritable (q. 1, a. 7).

 

– Qu’arrive-t-il si l’homme se trompe sur l’objet de son bonheur ?

– Il arrive, si l’homme se trompe sur l’objet de son bonheur, qu’au lieu de trouver le bonheur au terme de ses actions, il n’aura pour lui que le plus affreux malheur.

 

– Il est donc souverainement important pour l’homme de ne pas se tromper sur l’objet de son bonheur ?

– Il n’y a rien de plus important pour l’homme que de ne pas se tromper sur l’objet de son bonheur.

 

3. De l’objet de ce bonheur

 

– Quel est l’objet du bonheur de l’homme ?

– L’objet du bonheur de l’homme est un bien qui est au-dessus de lui et en qui seul il peut trouver sa perfection (q. 2, a. 1-8).

 

– Cet objet du bonheur de l’homme, sont-ce les richesses ?

– Non, ce ne sont point les richesses ; car elles sont au-dessous de l’homme et elles ne suffisent point à assurer son bien total et sa perfection (q. 2, a. 1).

 

– Sont-ce les honneurs ?

– Non, ce ne sont point les honneurs ; parce que les honneurs ne donnent point la perfection, mais la supposent, quand ils ne sont point faux ; et, s’ils sont faux, ils ne sont rien (q. 2, a. 2).

 

– Est-ce la gloire ou la renommée ?

– Non, car elles n’ont de valeur que si on les mérite ; et, de plus, c’est chose très fragile et très vaine parmi les hommes (q. 2, a. 3).

 

– Est-ce le pouvoir ?

– Non, parce que le pouvoir est pour le bien des autres ; et qu’il est à la merci de leurs caprices et de leurs révoltes (q. 2, a. 4).

 

– Est-ce la santé ou la beauté du corps ?

– Non, parce que ce sont là des biens trop fragiles, et que d’ailleurs ils ne sont que la perfection de l’extérieur de l’homme, non de son âme ou de son intérieur (q. 2, a. 5).

 

– Sont-ce les plaisirs où le corps peut avoir part ?

– Non, ce ne sont point les plaisirs où le corps peut avoir part, attendu que ces plaisirs sont très peu de chose, comparés aux plaisirs supérieurs de l’esprit qui sont le propre de l’âme (q. 2, a. 6).

 

– Le bonheur de l’homme consisterait-il dans ce qui est le bien de l’âme ?

– Oui, le bonheur de l’homme consiste dans ce qui est le bien de l’âme (q. 2, a. 7).

 

– Et quel est ce bien de l’âme en quoi consiste le bonheur de l’homme ?

– Le bien de l’âme en quoi consiste le bonheur de l’homme, c’est Dieu, le Bien Suprême, Souverain et Infini (q. 2, a. 8).

 

4. De la possession de ce bonheur

 

– Comment l’homme peut-il arriver à posséder Dieu, son Bien Suprême, et à en jouir ?

– L’homme peut arriver à posséder Dieu, son Bien Suprême, et à en jouir, par un acte de son intelligence, mue à cette fin par sa volonté (q. 3, a. 4).

 

– Que faut-il pour que l’homme trouve son bonheur parfait dans cet acte de son intelligence ?

– Pour que l’homme trouve son bonheur parfait dans cet acte de son intelligence, il faut que Dieu soit atteint par lui, selon qu’Il est en lui-même, et non pas seulement tel qu’Il peut être atteint à l’aide des créatures, quelles qu’elles soient (q. 3, a. 5-8).

 

– Comment s’appelle cet acte par lequel Dieu est atteint par l’intelligence, selon qu’Il est en lui-même ?

– Cet acte s’appelle la vision de Dieu (q. 3, a. 8).

 

– Est-ce donc dans la vision de Dieu que consiste le bonheur parfait de l’homme ?

– Oui, c’est dans la vision de Dieu que consiste le bonheur parfait de l’homme (q. 3, a. 8).

 

– Cette vision de Dieu, quand l’homme la possédera dans toute sa perfection, entraînera-t-elle avec elle tout ce qui peut être une perfection pour l’homme dans son âme, dans son corps, et dans tout ce qui sera autour de lui ?

– Oui, cette vision de Dieu, quand l’homme la possédera dans toute sa perfection, entraînera nécessairement avec elle tout ce qui peut être une perfection pour l’homme, dans son âme, dans son corps et dans tout ce qui sera autour de lui ; car, étant le bien de l’homme en sa plus haute source, elle dérive en tout ce qui est de l’homme pour le combler et le parfaire (q. 4, a. 1-8).

 

– Ce sera donc pour l’homme la possession de tout bien et l’exclusion de tout mal ?

– Oui, ce sera pour l’homme la possession de tout bien et l’exclusion de tout mal (Ibid.).

 

5. Du moyen de s’assurer cette possession, ou des actes bons qui la méritent et des actes mauvais qui la font perdre

 

– Cette vision de Dieu constituant le bonheur parfait de l’homme, l’homme peut-il l’avoir sur cette terre et dans cette vie ?

– Non, l’homme ne peut avoir sur cette terre et dans cette vie cette vision de Dieu qui constitue le bonheur parfait de l’homme, les conditions et les misères de la vie présente étant incompatibles avec une telle plénitude de bonheur ou de félicité (q. 5, a. 3).

 

– Comment l’homme pourra-t-il obtenir cette vision de Dieu qui doit constituer son bonheur parfait ?

– L’homme ne pourra obtenir cette vision de Dieu qui doit constituer son bonheur parfait qu’en la recevant de Dieu lui-même (q. 5, a. 5).

 

– Est-ce que Dieu la lui donnera sans qu’il s’y prépare et la mérite ?

– Non, Dieu ne la lui donnera pas sans qu’il s’y prépare et la mérite (q. 5, a. 7).

 

– Qu’est-ce que l’homme a donc à faire sur cette terre et dans cette vie ?

– L’homme, sur cette terre et dans cette vie, n’a qu’à se préparer, par voie de mérite, à recevoir de Dieu, un jour, la vision de Dieu et tout ce qui devra la suivre quand Dieu donnera à l’homme sa récompense.

 

6. Ce que comporte l’acte humain à l’effet d’être un acte bon méritoire, ou un acte mauvais déméritoire, à parler du mérite et du démérite en général

 

– Pourriez-vous me dire ce par quoi l’homme, sur cette terre et dans cette vie, peut se préparer, par voie de mérite, à recevoir de Dieu, un jour, la vision de Dieu qui doit faire son éternel bonheur à titre de récompense ?

– Oui, c’est uniquement par ses actes (q. 6, prologue).

 

– Que sont ces actes par lesquels l’homme peut, sur cette terre et dans cette vie, se préparer, par voie de mérite, à recevoir de Dieu, un jour, la vision de Dieu qui doit faire son éternel bonheur à titre de récompense ?

– Ce sont les actes de vertu.

 

– Qu’est-ce que vous entendez par les actes de vertu ?

– Ce sont les actes que l’homme fait par sa volonté en conformité de la volonté divine sous l’action de la grâce (q. 6 & 114).

 

– Que faut-il pour que les actes de l’homme soient faits par sa volonté ?

– Il faut qu’il les fasse spontanément et en connaissance de cause (q. 6, a. 1-8).

 

– Qu’est-ce que vous entendez quand vous dites qu’il faut qu’il les fasse spontanément ?

– J’entends qu’il faut qu’il les fasse de lui-même et sans y être contraint ou forcé (q. 6, a. 1-4-5-6).

 

– Comment l’homme peut-il être contraint ou forcé à faire quelque chose contre sa volonté ?

– L’homme peut être contraint ou forcé à faire quelque chose contre sa volonté de deux manières : par la violence et par la peur (q. 6, a. 4-5-6).

 

– Qu’entendez-vous par la violence ?

– J’entends une force extérieure à l’homme qui lie ses membres et qui l’empêche d’agir comme il voudrait, ou lui fait faire extérieurement ce que sa volonté repousse (q. 6, a. 4-5).

 

– Et qu’entendez-vous par la peur ?

– J’entends un mouvement intérieur qui porte l’homme à vouloir une chose qu’il ne voudrait pas en d’autres circonstances, mais qu’il consent à vouloir en telles circonstances pour éviter un mal qui le menace (q. 6, a. 6).

 

– Ce qu’on fait sous le coup de la violence est-il tout à fait involontaire ?

– Oui, ce qu’on fait sous le coup de la violence extérieure est tout à fait involontaire (q. 6, a. 5).

 

– Pourquoi dites-vous sous le coup de la violence extérieure ?

– Parce que le mot violence se prend aussi quelquefois pour le mouvement intérieur de la colère.

 

– Dans ce cas et dans le cas des autres mouvements intérieurs qui excitent ou inclinent la volonté, peut-on parler aussi d’acte involontaire ?

– Non, dans ces divers cas, on ne peut point parler d’acte involontaire, à moins que ces mouvements intérieurs ne soient si véhéments qu’ils arrivent à lier l’usage de la raison (q. 6, a. 7).

 

– Et, quand on agit par peur, y a-t-il alors acte involontaire ?

– Quand on agit par peur, l’acte est volontaire, mais il y a un certain mélange d’involontaire : en ce sens qu’on veut bien ce qu’on fait, mais qu’on le veut à contre cœur et à cause d’un mal qu’il s’agit d’éviter (q. 6, a. 6).

 

– Vous avez dit aussi qu’il faut, pour que les actes de l’homme soient faits par sa volonté, qu’ils soient faits en connaissance de cause ?

– Oui ; et cela veut dire que, si l’on fait une chose en se trompant au sujet de cette chose, la chose que l’on fait n’est pas volontaire (q. 6, a. 8).

 

– Cette chose-là est-elle involontaire ?

– Oui, si en la sachant, on ne l’eût point faite (q. 6, a. 8).

 

– Ce que l’on fait ou que l’on ne fait pas, à cause de l’ignorance ou de l’erreur dans laquelle on se trouve, peut-il quelquefois être cependant volontaire ?

– Oui ; ce le sera toujours, si l’on est responsable de son ignorance ou de son erreur (q. 6, a. 8).

 

– Et quand est-on responsable de son ignorance ou de son erreur ?

– Quand on l’a voulue directement ou qu’elle est l’effet d’une négligence coupable (q. 6, a. 8).

 

– L’acte que l’homme fait par sa volonté se présente-t-il revêtu de certaines circonstances dont il faille tenir compte et qui puissent contribuer au caractère de cet acte ?

– Oui ; et rien n’est plus important que la considération de ces circonstances pour apprécier comme il convient l’acte que l’homme fait par sa volonté (q. 7, a. 1-2).

 

– Pourriez-vous me dire quelles sont ces circonstances ?

– Ce sont les circonstances de personne, d’objet, ou d’effet produit, de lieu, de motif, de secours, de temps (q. 7, a. 3).

 

– Que faut-il entendre par ces diverses circonstances ?

– Ces diverses circonstances portent sur le caractère ou la condition de la personne qui agit, sur ce qu’elle fait ou ce qui résulte de son acte, sur le lieu où elle agit, sur le but pour lequel elle agit, sur ceux qui lui servent de moyens, sur le temps où elle agit (q. 7, a. 3).

 

– De ces circonstances, quelle est la plus importante ?

– C’est celle du motif pour lequel on agit, ou du but que l’on se propose dans son action (q. 7, a. 4).

 

– Est-ce toujours la volonté qui produit les actes que l’homme fait par sa volonté ?

– Oui, c’est toujours la volonté ; mais quelquefois la volonté toute seule ; et, d’autres fois, ce sont d’autres facultés ou même les membres extérieurs du corps, mais sous l’impulsion et par l’ordre de la volonté (q. 8 & 17).

 

– C’est donc toujours à la volonté que tout se ramène, pour l’homme, dans les actes qui constituent sa vie et le prix de cette vie en vue du bonheur du ciel à conquérir ou à perdre ?

– Oui, c’est toujours à la volonté que tout se ramène, pour l’homme, dans les actes qui constituent sa vie et le prix de cette vie en vue du bonheur du ciel à conquérir ou à perdre ; et cela veut dire que l’acte de l’homme n’a de valeur qu’autant qu’il émane de sa volonté : soit qu’elle-même le produise ; soit qu’elle meuve à la produire les autres facultés ou membres qui le produisent (q. 8 & 21).

 

– Quel est, de tous les actes intérieurs de la volonté, celui qui est le plus important et qui engage définitivement la responsabilité de l’homme ?

– C’est l’acte de choisir ou le choix (q. 13, a. 1-6).

 

– Pourquoi l’acte de choisir ou le choix ont-ils cette importance ?

– Parce qu’ils font que la volonté s’arrête, en connaissance de cause et après délibération, sur tel bien déterminé qu’elle accepte et qu’elle entend faire sien de préférence à ce qui n’est pas lui (q. 13, a. 1).

 

– Le choix est-il proprement l’acte même du libre arbitre ?

– Oui, le choix est proprement l’acte même du libre arbitre (q. 13, a. 6).

 

– C’est donc par le choix qu’il fait sur toutes choses que l’homme prend son vrai caractère moral et sa valeur réelle en vue de son bonheur éternel à conquérir ou à perdre ?

– Oui, c’est par le choix qu’il fait sur toutes choses que l’homme prend son vrai caractère moral et sa valeur réelle, en vue de son bonheur éternel à conquérir ou à perdre.

 

– Comment se divise le choix de l’homme quant à son vrai caractère et à sa valeur réelle en vue de son vrai bonheur éternel à conquérir ou à perdre ?

– Il se divise en choix bon et en choix mauvais (q. 18 à 21).

 

– Qu’est-ce que le choix bon ?

– C’est celui qui porte sur une chose bonne, en vue d’une fin bonne, et dont toutes les circonstances qui l’accompagnent sont bonnes (q. 18 & 19).

 

– D’où se tire la bonté de la chose, et la bonté de la fin, et la bonté des circonstances ?

– Cette bonté se tire du rapport qu’ont toutes ces choses avec la droite raison (q. 19, a. 3-6).

 

– Qu’entendez-vous par la droite raison ?

– J’entends la raison éclairée de toutes les lumières venues de Dieu, ou qui, du moins, ne leur est pas sciemment contraire.

 

– C’est donc quand l’homme veut ou choisit une chose conforme à la droite raison, dans un but ou pour une fin que la droite raison approuve, et avec les circonstances dont toutes et chacune s’harmonisent avec la droite raison, que l’acte voulu ou choisi et fait par l’homme est un acte bon ?

– Oui ; c’est alors, et alors seulement, que l’acte de l’homme est un acte bon. Si, sur un de ces points quelconques, l’acte de l’homme n’est pas conforme à la droite raison, il n’est plus un acte bon, et il devient, bien qu’à des degrés divers, un acte mauvais (q. 18 à 21).

 

– Comment s’appelle l’acte mauvais ?

– L’acte mauvais s’appelle la faute ou le péché (q. 21, a. 1).

 

7. Des mouvements affectifs qui sont dans l’homme et qu’on appelle du nom de passions

 

– N’y a-t-il dans l’homme, en ce qui est d’actes affectifs pouvant contribuer au prix de sa vie, que les actes de sa volonté ?

– Il y a encore d’autres actes affectifs dans l’homme.

 

– Quels sont ces autres actes affectifs qui sont dans l’homme ?

– Ce sont les passions (q. 22 à 48).

 

– Qu’entendez-vous par les passions ?

– J’entends, par les passions, des mouvements affectifs de la partie sensible dans l’homme.

 

– N’y a-t-il que l’homme à avoir ces mouvements affectifs de la partie sensible ?

– Non, ces mouvements affectifs de la partie sensible se trouvent dans tous les animaux (q. 22, a. 1-2-3).

 

– Ces mouvements affectifs de la partie sensible dans les autres animaux ont-ils une valeur morale ?

– Non, ces mouvements affectifs de la partie sensible dans les autres animaux n’ont pas une valeur morale ; c’est seulement dans l’homme qu’ils ont une valeur morale.

 

– Pourquoi est-ce seulement dans l’homme que ces mouvements affectifs de la partie sensible ont une valeur morale ?

– Parce que c’est seulement dans l’homme qu’ils sont en rapport avec les actes supérieurs de la volonté libre et qu’ils sont soumis à leur empire (q. 25, et 24, a. 1-4).

 

– Quels sont ces mouvements affectifs de la partie sensible dans l’homme, qu’on appelle du nom de passions ?

– Ces mouvements affectifs de la partie sensible dans l’homme, qu’on appelle du nom de passions, sont les mouvements du cœur, se portant vers le bien ou s’éloignant du mal que les sens nous présentent (q. 23, 24 et 25).

 

– Combien y a-t-il de ces sortes de mouvements du cœur ?

– Il y en a onze (q. 22, a. 4).

 

– De quels noms les appelle-t-on ?

– On les appelle des noms : d’amour, de désir, de plaisir ou de joie ; de haine, de dégoût, de tristesse ; d’espoir, d’audace, de crainte, de désespoir, de colère (q. 22, a. 4).

 

– Ces mouvements du cœur occupent-ils une grande place dans la vie des hommes ?

– Oui, ces mouvements du cœur occupent une grande place dans la vie des hommes.

 

– Et pourquoi ces mouvements du cœur occupent-ils une si grande place dans la vie des hommes ?

– Parce que les hommes portent en eux une double nature : raisonnable, et sensible ; et que la nature sensible est celle qui est émue la première par l’action du monde sensible au milieu duquel nous vivons et d’où nous tirons toutes les données mêmes de notre vie raisonnable.

 

– Les mouvements du cœur ou les passions ne sont donc pas toujours et de soi chose mauvaise ?

– Non, les mouvements du cœur ou les passions ne sont pas toujours et de soi chose mauvaise.

 

– Quand ces mouvements du cœur ou ces passions sont-ils chose mauvaise ?

– Quand ils ne sont pas dans l’ordre voulu par la droite raison.

 

– Et quand ne sont-ils pas dans l’ordre voulu par la droite raison ?

– Quand ils se portent à un bien sensible ou qu’ils s’éloignent d’un mal sensible en prévenant le jugement de la raison ou contrairement à ce jugement (q. 25, et 24, a. 3).

 

– N’y a-t-il que dans la partie sensible des mouvements d’amour, de désir, de joie, de haine, de dégoût, de tristesse, d’espoir, d’audace, de crainte, de désespoir et de colère ?

– Ces mêmes mouvements se retrouvent aussi dans la volonté (q. 26, a. 1).

 

– Quelle différence y a-t-il entre ces mouvements selon qu’ils sont dans la partie sensible ou selon qu’ils sont dans la volonté ?

– Il y a cette différence que, dans la partie sensible, ils impliquent toujours une participation de l’organisme ou du corps, tandis que, dans la volonté, ils sont purement spirituels (q. 31, a. 4).

 

– Quand on parle des mouvements du cœur, de quels mouvements affectifs s’agit-il, de ceux de la partie sensible ou de ceux de la volonté ?

– Il s’agit, au sens propre, des mouvements de la partie sensible ; mais, dans un sens métaphorique, il s’agit aussi de ceux de la volonté.

 

– Lors donc qu’on parle du cœur de l’homme, peut-il s’agir de cette double sorte de mouvements ?

– Oui, lorsqu’on parle du cœur de l’homme, il peut s’agir de cette double sorte de mouvements.

 

– Et lorsqu’on dit d’un homme qu’il a du cœur, que veut-on dire par là ?

– Quand on dit d’un homme qu’il a du cœur, on veut dire tantôt qu’il est affectueux et tendre, de quelque ordre d’affection qu’il s’agisse, ou purement sensible, ou aussi d’ordre supérieur ; et, d’autres fois, on veut dire qu’il a du courage, de l’énergie.

 

– Pourquoi dit-on quelquefois qu’il faut veiller sur son cœur, et que veut-on dire par là ?

– Quand on dit qu’il faut veiller sur son cœur, on veut dire qu’il faut prendre garde à ne pas suivre inconsidérément les premiers mouvements affectifs, surtout d’ordre sensible, qui nous portent à rechercher ce qui nous plaît ou à fuir ce qui nous déplaît.

 

– On parle aussi quelquefois de la culture du cœur ; que veut-on dire par là ?

– On veut dire qu’il faut s’appliquer à n’avoir en soi que de bons mouvements affectifs.

 

– Cette culture du cœur ainsi entendue est-elle chose importante ?

– Cette culture du cœur ainsi entendue résume tout l’exercice de l’homme dans l’acquisition de la vertu et dans la fuite du vice.

 

8. Des vertus, qui peuvent et doivent être dans l’homme le principe de ses actes bons

 

  Qu’entendez-vous par l’acquisition de la vertu ?

– J’entends l’obtention ou le perfectionnement de toutes les bonnes habitudes qui portent l’homme à bien agir (q. 49 à 68).

 

– Que sont ces bonnes habitudes qui portent l’homme à bien agir ?

– Ce sont des dispositions ou des inclinations qui se trouvent dans ses diverses facultés et qui rendent bons les actes de ces facultés (q. 55, a. 1-4).

 

– D’où viennent, dans les diverses facultés de l’homme, ces dispositions ou ces inclinations qui le portent à bien agir ?

– Elles viennent tantôt, partiellement, de la nature elle-même ; quelquefois, du sujet agissant dans le sens de la vertu ; quelquefois aussi directement de Dieu, qui les produit dans l’âme par son action surnaturelle (q. 43, a. 1-4).

 

– Y a-t-il de ces dispositions ou de ces bonnes habitudes et de ces vertus dans l’intelligence de l’homme ?

– Oui, il y a de ces inclinations ou de ces bonnes habitudes et de ces vertus dans l’intelligence de l’homme (q. 56, a. 3).

 

– Quel effet ont ces vertus dans l’intelligence de l’homme ?

– Elles la portent à ne se prononcer que pour la vérité (q. 56, a. 3).

 

– Quelles sont-elles, ces vertus, dans l’intelligence de l’homme ?

– Ce sont : l’intelligence, la science, la sagesse, l’art et la prudence (q. 57, a. 1-6).

 

– Quel est l’objet de chacune de ces vertus dans l’intelligence ou la raison de l’homme ?

– La première donne la connaissance des principes ; la seconde, la connaissance des conclusions ; la troisième, la connaissance des plus hautes causes ; la quatrième, la direction pour l’exécution des œuvres extérieures ; la cinquième, la direction de toute la vie morale (q. 57, a. 1-6).

 

– C’est donc la prudence qui est la plus importante dans la pratique de la vie morale ?

– Oui, c’est la prudence qui est la plus importante dans la pratique de la vie morale (q. 57, a. 5).

 

– N’y a-t-il que ces sortes de vertus dans l’intelligence de l’homme ?

– Il y a encore une autre vertu dans l’intelligence de l’homme, et qui est d’un ordre tout à fait supérieur (q. 62, a. 1-4).

 

– Quelle est cette autre vertu dans l’intelligence de l’homme, qui est d’un ordre tout à fait supérieur ?

– C’est la vertu de foi (Ibid.).

 

– Y a-t-il aussi des vertus du même ordre dans la volonté ?

– Oui, il y a aussi des vertus du même ordre dans la volonté (Ibid.).

 

– Comment les appelle-t-on, ces vertus du même ordre, dans la volonté ?

– On les appelle l’espérance et la charité (Ibid.).

 

– Ces vertus de foi, d’espérance et de charité portent-elles un nom spécial ?

– Oui, on les appelle vertus théologales (Ibid.).

 

– Qu’est-ce qu’on entend par ces mots : vertus théologales ?

– On entend signifier, par ces mots, que les vertus de foi, d’espérance et de charité s’occupent de Dieu lui-même, et qu’elles ont aussi leur unique source en Dieu (q. 62, a. 1).

 

– Y a-t-il encore quelque autre vertu dans la volonté ?

– Oui, il y a encore, dans la volonté, la vertu de justice ; et les autres vertus qui en dépendent (q. 56, a. 6 ; q. 59, a. 4 ; q. 60, a. 2-3).

 

– Y a-t-il d’autres facultés, dans l’homme, où des vertus se trouvent ?

– Oui, il y a les facultés affectives sensibles (q. 56, a. 4 ; q. 60, a. 4).

 

– Quelles sont les vertus qui se trouvent dans les facultés affectives sensibles ?

– Ce sont les vertus de force et de tempérance, et les autres vertus qui en dépendent.

 

– Comment appelle-t-on les vertus de justice, de force et de tempérance, et aussi de prudence ?

– On les appelle des vertus morales (q. 58, a. 1).

 

– Ne les appelle-t-on pas encore du nom de vertus cardinales ?

– Oui, on les appelle encore du nom de vertus cardinales (q. 56, a. 1-4).

 

– Qu’entend-on signifier par ces mots : vertus cardinales ?

– On veut dire par là que ce sont des vertus particulièrement importantes, qui sont comme les gonds (en latin cardo, cardinis), sur lesquels roulent toutes les autres vertus, en deçà des vertus théologales (Ibid.).

 

– Les vertus d’ordre naturel, ou acquises, intellectuelles ou morales, doivent-elles avoir, dans l’homme, des vertus correspondantes, qui soient d’ordre surnaturel, infusées par Dieu, en vue de perfectionner l’homme dans chacun des actes de sa vie morale ?

– Oui ; car ces vertus infuses seules sont proportionnées aux actes qu’impose à l’homme, dans sa vie morale surnaturelle, la fin surnaturelle que les vertus théologales lui donnent d’atteindre (q. 58, a. 3-4).

 

– Toutes ces vertus, théologales et cardinales, sont-elles nécessaires pour que l’homme vive bien ?

– Oui, toutes ces vertus sont nécessaires pour que l’homme vive bien (q. 65, a. 1-5).

 

– Et si l’homme manquait d’une quelconque de ces vertus, ne pourrait-il pas être dit vertueux ?

– Non ; car, si l’homme manque de l’une quelconque de ces vertus, ce qui peut lui rester des autres vertus n’a jamais en lui le caractère ou la raison de vertu parfaite (q. 65, a. 4).

 

9. Des dons, qui couronnent et complètent les vertus

 

– Suffit-il à l’homme, pour que sa vie soit ce qu’elle doit être en vue du ciel à conquérir, qu’il possède toutes les vertus dont il a été parlé ?

– Non ; il faut qu’il ait encore les dons du Saint-Esprit (q. 68, a. 2).

 

– Qu’entendez-vous par les dons du Saint-Esprit ?

– J’entends des dispositions habituelles qui existent dans l’homme par l’action de l’Esprit-Saint et qui rendent l’homme souple et docile à toutes les inspirations et à tous les mouvements intérieurs de l’Esprit-Saint mouvant l’homme en vue de la possession de Dieu dans le ciel (q. 68, a. 1-2-3).

 

– Pourquoi requérez-vous ces dons du Saint-Esprit en plus des vertus marquées précédemment ?

– Parce que l’homme, étant appelé à vivre en enfant de Dieu ne peut arriver à la perfection de cette vie que si Dieu lui-même, par son action propre, à laquelle les dons disposent, vient achever ce que l’action de l’homme, due à la mise en œuvre des vertus, ne peut qu’ébaucher (q. 68, a. 2).

 

– Combien y a-t-il de dons du Saint-Esprit ?

– Il y a sept dons du Saint-Esprit (q. 68, a. 4).

 

– Quels sont les sept dons du Saint-Esprit ?

– Ce sont les dons de sagesse, d’intelligence, de science, de conseil, de piété, de force et de crainte de Dieu (q. 68, a. 4).

 

10. Des béatitudes et des fruits du Saint-Esprit, résultat des vertus et des dons

 

– Lorsque l’homme est ainsi revêtu des vertus et des dons, a-t-il tout ce qu’il faut, en ce qui est de lui, pour vivre d’une vie parfaite en vue du ciel à conquérir ?

– Oui, lorsque l’homme est ainsi revêtu des vertus et des dons, il a tout ce qu’il faut, en ce qui est de lui, pour vivre d’une vie parfaite en vue du ciel à conquérir.

 

– Peut-on dire même qu’il a déjà en quelque sorte cette vie du ciel commencée ici sur la terre ?

– Oui, on peut dire même qu’il a déjà en quelque sorte cette vie du ciel commencée ici sur la terre ; et c’est en ce sens qu’on parle de béatitudes, sur cette terre, et de fruits du Saint-Esprit (q. 69, 70).

 

– Qu’entend-on par les béatitudes ?

– On entend, par les béatitudes, les actes des vertus et des dons, énumérés par Notre Seigneur Jésus-Christ dans l’Évangile, et qui, par leur présence dans l’âme, ou par les mérites qu’ils y ont laissés, forment pour nous comme le gage de la future béatitude promise à chacun d’eux (q. 69, a. 1).

 

– Et qu’entend-on par les fruits du Saint-Esprit ?

– On entend, par les fruits du Saint-Esprit, des actes bons, de nature à causer du plaisir à l’homme vertueux, alors qu’il agit, dans l’ordre surnaturel, sous l’influence de l’Esprit-Saint (q. 70, a. 1).

 

– Les fruits se distinguent-ils des béatitudes ?

– Si les fruits sont tout ce qu’il y a de plus parfait, au sens absolu, pour l’homme, ils se confondent avec le fruit par excellence, qui est la béatitude du ciel. Ils peuvent aussi s’identifier aux béatitudes de la terre ; mais ils s’en distinguent en ce sens que la seule raison de bonté leur suffit, sans requérir la raison de perfection ou d’excellence essentielle aux béatitudes (q. 70, a. 2).

 

– Quelles sont les béatitudes et leurs récompenses ?

– Ce sont : Bienheureux les pauvres en esprit, parce que le Royaume des Cieux est à eux ; – bienheureux ceux qui sont doux, parce qu’ils posséderont la terre ; – bienheureux ceux qui pleurent, parce qu’ils seront consolés ; – bienheureux ceux qui ont faim et soif de la justice, parce qu’ils seront rassasiés ; – bienheureux les miséricordieux, parce qu’ils obtiendront miséricorde ; – bienheureux les purs de cœur, parce qu’ils verront Dieu ; – bienheureux les pacifiques, parce qu’ils seront appelés enfants de Dieu (q. 69, a. 2-4).

 

– Quels sont les fruits du Saint-Esprit ?

– Les fruits du Saint-Esprit sont : la charité, la joie, la paix, la patience, la bénignité, la bonté, la longanimité, la mansuétude, la fidélité, la modestie, la continence et la chasteté (q. 70, a. 3).

 

– Où trouve-t-on énumérés ces fruits du Saint-Esprit ?

– On les trouve énumérés dans l’épître de saint Paul aux Galates, ch. 5, vv. 22-23.

 

– Et les béatitudes, où les trouve-t-on énumérées ?

– On trouve les béatitudes énumérées en saint Matthieu, ch. 5, vv. 3-10 ; et, d’une manière moins complète, en saint Luc, ch. 6, vv. 20-22.

 

– N’y a-t-il pas une huitième béatitude en saint Matthieu qui se trouve aussi reproduite en saint Luc ?

– Oui, c’est la béatitude de ceux qui souffrent persécution pour la justice ; mais elle se ramène aux sept premières, et en est comme le résumé ou la conséquence (q. 69, a. 3, ad 5).

 

– Il ne peut donc y avoir rien de meilleur pour l’homme, sur cette terre, que de vivre ainsi de la vie des vertus et des dons s’épanouissant dans les béatitudes et les fruits du Saint-Esprit ?

– Non, il ne peut rien y avoir de meilleur pour l’homme, sur cette terre, que de vivre ainsi de la vie des vertus et des dons s’épanouissant dans les béatitudes et les fruits du Saint-Esprit.

 

11. Des vices qui peuvent être, dans l’homme, principe de ses actes mauvais

 

— Y a-t-il une autre vie dont l’homme puisse vivre sur cette terre, et qui soit opposée à la vie des vertus et des dons s’épanouissant dans les béatitudes et les fruits du Saint-Esprit ?

— Oui, c’est la vie du péché ou du vice (q. 71 et 89).

 

— Qu’est-ce que vous entendez par le vice ?

— J’entends, par le vice, l’état de l’homme qui vit dans le péché (q. 71, a. 1-6).

 

— Qu’est-ce que le péché ?

— Le péché est un acte ou une omission volontaire qui est chose mauvaise (q. 71, a. 5-6).

 

— Quand est-ce qu’un acte ou une omission volontaire est chose mauvaise ?

— Quand cet acte ou cette omission est contraire au bien de Dieu, ou au bien du prochain, ou au bien de l’homme lui-même (q. 72, a. 4).

 

— Comment se fait-il que l’homme puisse ainsi vouloir quelque chose qui soit contraire au bien de Dieu, ou au bien du prochain, ou à son propre bien à lui ?

— Parce qu’il peut vouloir quelque autre bien qui s’oppose au bien de Dieu, ou au bien du prochain, ou à son propre bien à lui (q. 71, a. 2 ; q. 77, a. 4).

 

— Quel est cet autre bien que l’homme peut vouloir et qui s’oppose au bien de Dieu, ou au bien du prochain, ou à son propre bien à lui ?

— C’est le bien qui flatte ses sens, ou son ambition, ou son orgueil (q. 72, a. 2-3 ; q. 77, a. 5).

 

— Et d’où vient que l’homme peut ainsi vouloir le bien qui flatte ses sens, ou son ambition, ou son orgueil, en opposition avec le bien de Dieu, le bien du prochain et son propre bien à lui ?

— Cela vient de ce que ses sens peuvent se porter à ce qui leur plaît, prévenant ou entraînant la raison et la volonté, qui ne s’y opposent pas, quand elles pourraient et devraient s’y opposer (q. 71, a. 2, ad 3).

 

— C’est donc dans la recherche indue des biens sensibles et temporels que se trouvent, pour l’homme, le commencement, et, en quelque sorte, la raison de tous ses péchés ?

— Oui, c’est dans la recherche indue des biens sensibles et temporels, que se trouvent, pour l’homme, le commencement, et, en quelque sorte, la raison de tous ses péchés.

 

— Comment appelle-t-on cette pente à rechercher, d’une façon indue, les biens sensibles et temporels, qui se trouve dans l’homme ?

— On l’appelle la concupiscence ou la convoitise (q. 77, a. 1-5).

 

12. Du péché originel et de ses suites, ou des blessures de la nature humaine

 

— Est-ce que cette concupiscence existait dans l’homme selon le premier état où il fut créé par Dieu ?

— Non, cette concupiscence n’existait pas dans l’homme selon le premier état où il fut créé par Dieu.

 

— Pourquoi donc se trouve-t-elle maintenant dans l’homme ?

— Elle se trouve maintenant dans l’homme, parce que l’homme est dans l’état de chute (q. 81 et 83).

 

— Qu’est-ce que vous entendez par l’état de chute dans l’homme ?

— J’entends l’état qui a succédé au premier péché du premier homme, et qui est l’effet de ce premier péché (q. 81, a. 1 ; q. 82, a. 1).

 

— Pourquoi cet état qui a succédé au premier péché du premier homme et qui est l’effet de ce premier péché se trouve-t-il en chacun de nous maintenant ?

— Cet état se trouve en chacun de nous maintenant, parce que nous avons reçu du premier homme la nature qui est la nôtre (q. 81, a. 1).

 

— Si le premier homme n’avait pas péché, aurions-nous reçu de lui notre nature dans un autre état ?

— Oui, si le premier homme n’avait pas péché, nous aurions reçu de lui notre nature dans l’état d’intégrité et de justice originelle (q. 81, a. 2).

 

— L’état dans lequel nous recevons maintenant du premier homme notre nature est-il un état de péché ?

— Oui, l’état dans lequel nous recevons maintenant du premier homme notre nature est un état de péché (q. 81, a. 1 ; q. 82, a. 1).

 

— Pourquoi cette nature que nous recevons maintenant du premier homme est-elle dans un état de péché ?

— Parce que nous la recevons de lui telle qu’elle est, en raison même et comme suite de son péché (q. 81, a. 1).

 

— Et comment s’appelle cet état de péché de la nature que nous recevons ainsi du premier homme comme suite de son péché ?

— Cet état s’appelle le péché originel (Ibid.).

 

— C’est donc par le fait même que nous recevons d’Adam pécheur notre nature dans cet état, que se transmet à chacun de nous le péché originel ?

— Oui, c’est par le fait même que nous recevons d’Adam pécheur notre nature dans cet état, que se transmet à chacun de nous le péché originel (Ibid.).

 

— Que comporte cet état de péché affectant la nature humaine en chacun de nous, qu’on appelle le péché originel ?

— Il comporte la privation de tous les dons surnaturels ou gratuits, que Dieu avait mis dans notre nature, en la personne du premier homme, notre père commun (q. 82, a. 1).

 

— Quels étaient ces dons surnaturels ou gratuits, dont la privation constitue en nous l’état de péché qui est le péché originel ?

— Ces dons surnaturels ou gratuits étaient : d’abord, la grâce sanctifiante avec les vertus surnaturelles infuses et les dons du Saint-Esprit ; et aussi le privilège de l’intégrité qui était attaché à ces dons surnaturels.

 

— Que comportait ce privilège de l’intégrité accordé à notre nature ?

— Il comportait la parfaite subordination des sens à la raison et du corps à l’âme.

 

— Que résultait-il de cette parfaite subordination des sens à la raison et du corps à l’âme ?

— Il en résultait que l’homme ne pouvait avoir, dans la partie affective sensible, aucun mouvement désordonné ; et que son corps était impassible et immortel.

 

— La mort et les autres misères corporelles sont donc l’effet propre du péché ?

— Oui, la mort et les autres misères corporelles sont l’effet propre du péché (q. 85, a. 5).

 

— Comment appelle-t-on les suites du péché du côté de l’âme ?

— On les appelle les blessures de l’âme.

 

— Pourriez-vous me dire quelles sont ces blessures de l’âme ?

— Ce sont : l’ignorance, la malice, l’infirmité et la concupiscence (q. 85, a. 3).

 

— Qu’entendez-vous par l’ignorance ?

— J’entends cet état de l’intelligence ou de la raison qui fait qu’elle se trouve destituée de l’ordre connaturel qu’elle avait au vrai dans l’état d’intégrité (q. 85, a. 3).

 

— Qu’entendez-vous par la malice ?

— J’entends cet état de la volonté qui fait qu’elle se trouve destituée de l’ordre connaturel qu’elle avait au bien dans l’état d’intégrité (q. 85, a. 3).

 

— Qu’entendez-vous par l’infirmité ?

— J’entends cet état de la partie affective sensible qui fait qu’elle se trouve destituée de l’ordre connaturel à tout ce qui est ardu ou difficile qu’elle avait dans l’état d’intégrité (q. 85, a. 3).

 

— Qu’entendez-vous par la concupiscence ?

— J’entends cet état de la partie affective sensible, qui fait qu’elle se trouve destituée de l’ordre connaturel au plaisir sensible modéré par la raison, qu’elle avait dans l’état d’intégrité (q. 85, a. 3).

 

— Ces quatre blessures de la nature sont-elles proprement l’effet du premier péché du premier homme ?

— Oui, ces quatre blessures de la nature sont proprement l’effet du premier péché du premier homme (q. 85, a. 3).

 

— Sont-elles aggravées par les péchés personnels des parents et des individus ?

— Oui, elles sont aggravées par les péchés personnels des parents et des individus (q. 85, a. 1-2).

 

— Y a-t-il des péchés personnels qui aient une influence particulièrement mauvaise pour amener l’homme à commettre d’autres péchés ?

— Oui ; ce sont les péchés capitaux.

 

— Quels sont les péchés capitaux ?

— Ce sont : la vaine gloire ; l’avarice ; la gourmandise ; la luxure ; la paresse ; l’envie ; la colère.

 

— Malgré toutes ces causes de péché qui sont dans l’homme et qui proviennent soit du premier péché du premier homme, soit des autres péchés qui ont suivi dans les divers hommes, devons-nous dire que l’homme demeure libre dans ses actes moraux et n’est jamais nécessité à pécher ?

— Oui, malgré toutes ces causes de péché qui sont dans l’homme, et qui proviennent soit du premier péché du premier homme, soit des autres péchés qui ont suivi dans les divers hommes, nous devons dire que l’homme demeure libre dans ses actes moraux et qu’il n’est jamais nécessité à pécher.

 

— Que faudrait-il pour que l’homme cessât d’être libre dans ses actes en raison de toutes ces suites du péché ?

— Il faudrait qu’elles eussent pour effet de lui faire perdre la raison (q. 77, a. 7).

 

— A moins donc que l’homme perde sa raison, il demeure toujours libre dans ses actes, de telle sorte qu’il dépend de lui de ne pas pécher ?

— Oui ; à moins que l’homme perde sa raison, il demeure toujours libre dans ses actes, de telle sorte qu’il dépend de lui de ne pas pécher.

 

— Cette liberté peut-elle cependant être moins pleine et moins parfaite à cause de ces suites du péché, de telle sorte que l’homme, quand il pèche encore, se trouve moins coupable ?

— Oui, la liberté de l’homme est moins pleine et moins parfaite à cause de ces suites du péché, de telle sorte que l’homme, quand il pèche encore, se trouve moins coupable ; à moins que ses fautes personnelles soient elles-mêmes pour une part dans cette diminution de sa parfaite liberté (q. 77, a. 6).

 

13. De la diverse gravité des péchés et de la peine qui leur est due

 

— Tous les péchés ne sont donc pas également graves quand l’homme les commet ?

— Non, tous les péchés ne sont pas également graves quand l’homme les commet.

 

— D’où se tire le plus ou moins de gravité des péchés de l’homme quand il les commet ?

— Le plus ou moins de gravité des péchés de l’homme, quand il les commet, se tire du degré qu’occupe, dans l’échelle des biens à vouloir par la raison, celui qui est atteint par le péché ; et de la plus ou moins grande raison d’acte volontaire libre, qui se trouve dans ce péché (q. 73, a. 1-8).

 

— Tout péché, de soi, mérite-t-il d’être puni ?

— Oui, tout péché, de soi, mérite d’être puni (q. 87, a. 1).

 

— Pourquoi tout péché, de soi, mérite-t-il d’être puni ?

— Parce que tout péché, de soi, est un empiètement de la volonté libre sur un domaine qui n’est pas de son droit ; et que la peine est comme la restitution, faite par la volonté, de ce qu’elle avait pris contre son droit (q. 87, a. 1).

 

— La peine du péché est donc une question de rigoureuse justice ?

— Oui, la peine du péché est une question de rigoureuse justice.

 

— Et qui est-ce donc qui inflige la peine due au péché ?

— C’est l’une des trois raisons qui peuvent intervenir dans l’ordre que lèse le péché (q. 87, a. 1).

 

— Quelles sont ces trois raisons qui peuvent intervenir dans l’ordre que lèse le péché ?

— C’est la raison divine toujours ; la raison de l’autorité humaine pour les choses qui dépendent d’elle ; et la raison du pécheur lui-même, selon le degré de responsabilité qu’il a dans le péché (q. 87, a. 1).

 

— Comment peut intervenir cette raison du pécheur lui-même dans la peine infligée pour le péché ?

— La raison du pécheur lui-même dans la peine infligée pour le péché peut intervenir de deux manières : par le remords ; et par la pénitence volontaire (q. 87, a. 1).

 

— Comment intervient la raison de l’autorité humaine dans la peine qui peut ou doit être infligée pour le péché ?

— La raison de l’autorité humaine intervient dans la peine qui peut ou doit être infligée pour le péché, par mode de châtiment (q. 87, a. 1).

 

— Et comment intervient la raison divine dans la peine qui peut ou doit être infligée pour le péché ?

— La raison divine intervient dans la peine qui peut ou doit être infligée pour le péché, de deux manières : médiatement et immédiatement (q. 87, a. 1).

 

— Qu’entendez-vous quand vous dites que la raison divine intervient médiatement dans la peine qui peut ou doit être infligée pour le péché ?

— J’entends qu’elle intervient par l’entremise même de la raison du pécheur et de la raison de l’autorité humaine (q. 87, a. 1).

 

— Pourquoi dites-vous que la raison divine intervient par l’entremise de la raison du pécheur lui-même et de la raison de l’autorité humaine dans la peine qui peut ou doit être infligée pour le péché ?

— Parce que la raison du pécheur et la raison de l’autorité humaine agissent en dépendance de la raison divine et sont en quelque sorte ses instruments (q. 87, a. 1).

 

— N’y a-t-il pas encore une autre manière dont la raison divine peut intervenir quasi médiatement dans la peine qui peut ou doit être infligée pour le péché ?

— Oui, c’est par l’entremise des créatures elles-mêmes ou de l’ordre des choses que le pécheur trouble par son péché (q. 87, a. 1).

 

— Est-ce dans ce sens qu’on peut parler d’une certaine justice immanente ?

— Oui ; on peut, dans ce sens, parler d’une certaine justice immanente, qui fait que les choses elles-mêmes, instruments de la justice divine, vengent, par les contrariétés que le pécheur y rencontre et qui sont la suite de son péché, le péché commis par lui (q. 87, a. 1).

 

— Qu’entendez-vous lorsque vous dites que la raison divine intervient immédiatement dans la peine qui peut et doit être infligée pour le péché ?

— J’entends l’intervention spéciale et d’ordre surnaturel par laquelle Dieu lui-même venge les infractions faites par le pécheur à l’ordre surnaturel établi par lui (q. 87, a. 3-5).

 

— Que comporte de particulièrement spécial l’intervention d’ordre surnaturel par laquelle Dieu venge lui-même les infractions faites par le pécheur à l’ordre surnaturel établi par lui ?

— Elle comporte, au sujet de certains péchés, des peines qui seront éternelles (q. 87, a. 3-5).

 

14. Des péchés mortels et des péchés véniels

 

— Quels sont les péchés au sujet desquels Dieu inflige des peines éternelles ?

— Ce sont les péchés mortels (q. 87, a. 3).

 

— Qu’entendez-vous par les péchés mortels ?

— J’entends les péchés qui causent la mort de l’âme, en lui faisant perdre la charité, qui est le principe de sa vie surnaturelle (q. 88, a. 1).

 

— Pourquoi est-ce au sujet de ces péchés que Dieu inflige des peines éternelles ?

— Parce que ces péchés, faisant perdre la vie de l’âme que Dieu seul peut donner, ne permettent plus au pécheur de réparer son péché ; et le péché demeurant toujours, il faut que la peine demeure de même (Ibid).

 

— Tous les péchés que l’homme commet sont-ils des péchés mortels ?

— Non, tous les péchés que l’homme commet ne sont pas des péchés mortels (q. 88, a. 1-2).

 

— Comment appelle-t-on les péchés qui ne sont pas mortels ?

— On les appelle des péchés véniels (Ibid).

 

— Que signifie ce mot péchés véniels ?

— Il signifie des péchés moins graves, qui n’enlèvent point le principe de la vie surnaturelle qu’est la charité ou la grâce, et qui, par suite, peuvent être réparés par un mouvement contraire du pécheur lui-même sous l’action ordinaire de la grâce ; et, à ce titre, leur peine n’est jamais que temporelle : c’est pour cela qu’on les dit véniels, ou facilement pardonnables, du mot latin venia, qui signifie pardon (q. 88, a. 1).

 

— Si cependant les péchés véniels étaient commis par un homme en état de péché mortel et que cet homme mourût dans cet état, ses péchés véniels seraient-ils punis d’une peine éternelle ?

— Oui, en raison de son état et parce que, n’ayant pas la charité, il n’aurait point pu réparer ses péchés qui, après la mort, demeurent éternellement irréparables.

 

— D’où vient qu’il y a des péchés qui sont mortels et qu’il y a d’autres péchés qui ne sont que véniels ?

— Cela vient de la nature du désordre constitué par ces divers péchés ; ou aussi du plus ou moins de liberté de la part du sujet qui pèche (q. 88, a. 2).

 

— Qu’entendez-vous lorsque vous dites que cela vient de la nature du désordre constitué par ces divers péchés ?

— Cela veut dire qu’il y a des péchés qui, par eux-mêmes, s’opposent directement à l’amour surnaturel de Dieu, principe de la vie de l’âme, ou qu’ils sont incompatibles avec cet amour ; tandis que d’autres ne constituent qu’un léger désordre accidentel, compatible avec l’amour surnaturel de Dieu existant habituellement dans l’âme (Ibid).

 

— Quels sont les péchés qui, par eux-mêmes, s’opposent directement à l’amour surnaturel de Dieu, principe de la vie de l’âme, ou qui sont incompatibles avec cet amour ?

— Ce sont les péchés qui portent sur le refus de l’amour surnaturel de Dieu, ou qui impliquent un mal et un désordre troublant essentiellement l’ordre de l’homme à Dieu, ou l’ordre des hommes entre eux, ou l’ordre de l’homme en lui-même.

 

— Pourriez-vous nommer quelques-uns de ces péchés ?

— Oui ; tels sont les péchés du mépris de l’amour surnaturel divin, ou le péché contre l’honneur de Dieu, ou les péchés de vol, d’homicide, d’adultère, ou les péchés contre nature.

 

— Pour connaître ces divers péchés et leur gravité, quel est le moyen le plus sûr et le plus complet ?

— C’est de les considérer dans leur rapport avec chacune des vertus prises dans le détail de leurs espèces.

 

— Aurez-vous l’occasion de montrer ce rapport des vices ou des péchés avec chacune des vertus considérées dans le détail de leurs espèces ?

— Oui ; nous le ferons, quand nous aurons achevé de voir, en général, ce qui est requis pour que l’homme puisse vivre de la vie des vertus et éviter la vie contraire des péchés ou des vices.

 

— Que reste-t-il encore à considérer pour avoir achevé de voir, en général, ce qui est requis afin que l’homme puisse vivre de la vie des vertus et éviter la vie contraire des péchés ou des vices ?

— Il reste à considérer les secours extérieurs nécessaires à l’homme pour cette fin.

 

— Quels sont ces secours extérieurs nécessaires à l’homme pour cette fin ?

— Ce sont : la loi qui le dirige ; et la grâce qui aide sa marche (q. 90 et 94).

 

15. Du principe extérieur qui dirige l’homme dans ses actions : ou de la loi

 

— Qu’entendez-vous par la loi ?

— J’entends un ordre de la raison, en vue du bien commun, émanant de l’autorité, et manifesté par elle (q. 90, a. 1-4).

 

— Un ordre qui serait contraire à la raison ne serait donc pas une loi ?

— Non ; un ordre ou un commandement contraire à la raison n’est jamais une loi ; c’est un acte d’arbitraire ou de tyrannie (q. 90, a. 1, ad 3).

 

— Et qu’entendez-vous lorsque vous dites que la loi est un ordre de la raison, en vue du bien commun ?

— Cela signifie que la loi pourvoit d’abord au bien de l’ensemble ou du tout ; et ne s’occupe de la partie ou de l’individu, qu’en tant qu’il doit concourir lui-même au bien de l’ensemble (q. 90, a. 2).

 

— Quelle est cette autorité de laquelle émane la loi ?

— C’est la raison à qui il incombe de veiller au bien de l’ensemble comme à son bien propre (q. 90, a. 3).

 

— Est-il nécessaire qu’une loi soit manifestée et connue pour qu’elle oblige ?

— Oui, il est nécessaire qu’une loi soit manifestée de façon à pouvoir être connue pour qu’elle oblige (q. 90, a. 4).

 

— Et si on l’ignorait par sa faute, serait-on excusé de ne pas y obéir ?

— Non ; si on l’ignore par sa faute, on n’est pas excusé de ne pas y obéir.

 

— Il est donc très important de s’instruire des lois qui peuvent nous regarder ?

— Oui, il est souverainement important de s’instruire des lois qui peuvent nous regarder.

 

16. Des diverses lois : la loi éternelle

 

— Y a-t-il plusieurs sortes de lois qui puissent nous regarder et qui nous regardent en effet ?

— Oui, il y a plusieurs sortes de lois qui peuvent nous regarder et qui nous regardent en effet.

 

— Quelles sont ces diverses sortes de lois qui peuvent nous regarder et qui nous regardent en effet ?

— Ce sont : la loi éternelle, la loi naturelle, la loi humaine et la loi divine (q. 91, a. 1-5).

 

— Qu’entendez-vous par la loi éternelle ?

— J’entends, par la loi éternelle, la loi suprême, qui régit toutes choses, et de laquelle dépendent toutes les autres lois, qui n’en sont que des dérivations ou des manifestations particulières (q. 93, a. 1-3).

 

— Où se trouve la loi éternelle ?

— La loi éternelle se trouve en Dieu (q. 93, a. 1).

 

— Comment cette loi est-elle manifestée dans les choses ?

— Cette loi est manifestée dans les choses par l’ordre même des choses tel qu’il se déroule dans le monde (q. 93, a. 4-6).

 

17. La loi naturelle

 

— La loi éternelle se trouve-t-elle aussi participée dans l’homme ?

— Oui, la loi éternelle est aussi participée dans l’homme (q. 93, a. 6).

 

— Comment s’appelle la manifestation ou la participation de la loi éternelle dans l’homme ?

— Elle s’appelle la loi naturelle (q. 94, a. 1).

 

— Qu’entendez-vous par la loi naturelle ?

— J’entends cette lumière innée de la raison pratique, dans l’homme, qui est appelée à faire que l’homme se dirige lui-même et produise sciemment des actions, qui seront, par voie d’action consciente, l’exécution de la loi éternelle, comme les actions naturelles, produites par les agents naturels en vertu de leur inclination naturelle, sont l’exécution de cette même loi, par mode d’action inconsciente (q. 94, a. 1).

 

— Y a-t-il un premier principe de cette raison pratique ou un premier précepte de cette loi naturelle dans l’homme ?

— Oui, c’est celui qui repose sur la raison même de bien, au sens métaphysique de ce mot, comme le premier principe de la raison spéculative repose sur la raison d’être (q. 94, a. 2).

 

— En quoi consiste ce premier principe de la raison pratique ou ce premier précepte de la loi naturelle dans l’homme ?

— Il consiste à proclamer que ce qui est bon doit être pris par l’homme et que ce qui n’est pas bon doit être laissé par lui (q. 94, a. 2).

 

— Ce premier principe ou ce premier précepte porte-t-il tous les autres ?

— Oui, ce premier principe ou ce premier précepte porte tous les autres ; et les autres n’en sont que des applications plus ou moins immédiates (q. 94, a. 2).

 

— Pourriez-vous me dire quelles sont les premières applications qui en sont faites dans l’homme ?

— Ces premières applications qui en sont faites dans l’homme sont la proclamation par sa raison du triple bien superposé qui convient à sa nature (q. 94, a. 2).

 

— Quelle est cette proclamation faite par la raison de l’homme, en vertu du premier principe de la loi naturelle, du triple bien superposé qui convient à sa nature ?

— C’est que : cela est bon, pour lui, ce qui conserve sa vie physique ou la perfectionne ; et aussi ce qui conserve cette vie dans l’espèce humaine ; et aussi tout ce qui convient à sa vie d’être raisonnable (q. 94, a. 2).

 

— Que s’ensuit-il de cette triple proclamation de la raison pratique dans l’homme ?

— Il s’ensuit que tout ce qui sera essentiel à la conservation de cette triple vie ou qui pourra concourir à son perfectionnement sera proclamé chose bonne par la raison pratique de tout homme, d’une façon subordonnée cependant, de telle sorte que, par ordre de dignité, viendra d’abord le bien de la raison, puis le bien de l’espèce, puis le bien de l’individu (q. 94, a. 2).

 

— Pourriez-vous me dire ce que proclame d’essentiel le premier principe de la loi naturelle qui regarde le bien de l’individu ?

— Ce principe proclame que l’homme doit se nourrir et ne peut jamais attenter à sa vie (q. 94, a. 2).

 

— Que proclame d’essentiel le premier principe de la loi naturelle qui regarde le bien de l’espèce ?

— Ce principe proclame qu’il doit y avoir des hommes qui vaquent à la conservation de l’espèce en acceptant les charges et aussi les joies de la paternité et de la maternité ; et qu’il n’est jamais permis de rien faire qui aille directement contre la fin de la paternité et de la maternité (q. 94, a. 2).

 

— Que proclame d’essentiel le premier principe de la loi naturelle qui regarde le bien de la raison ?

— Ce principe proclame que l’homme, étant l’œuvre de Dieu de qui il a tout reçu, et, comme être doué de raison, étant fait pour vivre en société avec les autres hommes, doit honorer Dieu comme son souverain seigneur et maître, et traiter avec les autres hommes selon que le demande la nature des rapports qu’il peut avoir avec eux (q. 94, a. 2).

 

— Est-ce de ces trois premiers principes et de leur subordination que viennent, par voie de conséquence, toutes les autres prescriptions de la raison pratique dans l’homme ?

— Oui, c’est de ces trois premiers principes et de leur subordination que viennent, par voie de conséquence plus ou moins éloignée, toutes les autres prescriptions ou déterminations de la raison pratique affirmant que telle chose est ou n’est point bonne pour tel homme et lui faisant un devoir de s’y tenir ou de la laisser (q. 94, a. 2).

 

— Ces autres prescriptions ou déterminations de la raison pratique, qui viennent, par voie de conséquence plus ou moins éloignée, des trois premiers principes de la loi naturelle, sont-elles identiques chez tous les hommes ?

— Non, ces autres prescriptions ou déterminations ne sont pas les mêmes pour tous ; car, à mesure qu’on s’éloigne des premiers principes ou des choses qui regardent pour tous essentiellement le bien de l’individu le bien de l’espèce et le bien de la raison, on pénètre dans la zone des déterminations positives, pouvant varier à l’infini selon la diversité des conditions particulières des divers hommes (q. 94, a. 4).

 

— Comment se font ces autres déterminations qui peuvent varier à l’infini, selon la diversité des conditions particulières des divers hommes ?

— Elles se font par la raison particulière de chaque individu humain ou par la raison des autorités compétentes en chacun des divers groupements humains vivant d’une vie de société déterminée.

 

18. La loi humaine

 

— Ces autres déterminations peuvent-elles devenir une matière ou un sujet de loi ?

— Oui, ces autres déterminations peuvent devenir une matière ou un sujet de loi.

 

— De quelles lois sont-elles la matière ou le sujet ?

— Elles sont la matière ou le sujet propre des lois humaines (q. 95 et 97).

 

— Qu’entendez-vous par les lois humaines ?

— J’entends les ordres de la raison en vue du bien commun de telle ou telle société parmi les hommes, qui émanent de l’autorité souveraine en toute société et sont manifestés par elle (q. 91, a. 1).

 

— Ces ordres doivent-ils être obéis par tous ceux qui font partie de cette société ?

— Oui, ces ordres doivent être obéis par tous ceux qui font partie de cette société (q. 96, a. 5).

 

— Est-ce là un devoir de conscience qui oblige devant Dieu ?

— Oui, c’est là un devoir de conscience qui oblige devant Dieu (q. 96, a. 4).

 

— Peut-il y avoir des cas où l’on n’ait pas à obéir ?

— Oui, il peut y avoir des cas où l’on n’ait pas à obéir (q. 96, a. 4).

 

— Quels peuvent être ces cas où l’on n’a pas à obéir à une loi ?

— C’est le cas d’impossibilité ou le cas de dispense (q. 96, a. 4).

 

— Qui est-ce qui peut dispenser d’obéir à une loi ?

— Celui-là seul peut dispenser d’obéir à une loi qui est l’auteur de cette loi, ou qui a la même autorité que l’auteur de la loi, ou qui a reçu de cette autorité le pouvoir de dispenser (q. 97, a. 4).

 

— Si une loi était injuste, serait-on tenu d’y obéir ?

— Non, si une loi était injuste, on ne serait pas tenu d’y obéir, à moins que le refus d’obéissance ne causât du scandale ou n’eût de plus graves inconvénients (q. 96, a. 4).

 

— Qu’entendez-vous par une loi injuste ?

— J’entends une loi faite sans autorité, ou en opposition avec le bien commun, ou qui lèse les justes droits des membres de la société (q. 96, a. 4).

 

Si une loi était injuste parce qu’elle s’attaque aux droits de Dieu aux droits essentiels ou de son Église, faudrait-il lui obéir ?

— Non, si une loi était injuste parce qu’elle s’attaque aux droits de Dieu ou aux droits essentiels de l’Église, il ne faudrait jamais lui obéir (q. 96, a. 4).

 

Qu’entendez-vous par les droits de Dieu et les droits essentiels de l’Église ?

— J’entends tout ce qui touche à l’honneur et au culte de Dieu, Créateur et Souverain Maître de toutes choses ; et ce qui touche à la mission de l’Église catholique dans la sanctification des âmes par la prédication de la vérité et l’administration des sacrements.

 

Si donc une loi humaine s’attaquait à la religion, il ne faudrait pas lui obéir ?

— Si une loi humaine s’attaquait à la religion, il ne faudrait à aucun prix lui obéir (q. 96, a. 4).

 

Cette loi serait-elle une véritable loi ?

— Non, cette loi ne serait qu’une odieuse tyrannie (q. 90, a. 1, ad 3).

 

19. La loi divine – le Décalogue

 

— Qu’entendez-vous par la loi divine ?

— J’entends, par la loi divine, la loi que Dieu a donnée aux hommes, en se manifestant à eux surnaturellement (q. 91, a. 4 et 5).

 

— Quand Dieu a-t-il donné cette loi aux hommes ?

— Dieu a donné cette loi aux hommes, une première fois, d’une manière très simple, avant leur chute, dans le paradis terrestre ; mais il l’a donnée, d’une façon beaucoup plus spéciale, plus tard, par l’entremise de Moïse et des prophètes ; et, d’une manière beaucoup plus parfaite, par Jésus-Christ et les apôtres (q. 91, a. 5).

 

— Comment s’appelle la loi divine donnée par Dieu aux hommes par l’entremise de Moïse ?

— Elle s’appelle la loi ancienne (q. 98, a. 6).

 

Et comment s’appelle la loi divine donnée par Dieu aux hommes par Jésus-Christ et les apôtres ?

— Elle s’appelle la loi nouvelle (q. 106, a. 3 et 4).

 

— La loi ancienne était-elle pour tous les hommes ?

— Non, la loi ancienne était seulement pour le peuple juif (q. 98, a. 4 et 5).

 

— Pourquoi Dieu avait-il donné une loi spéciale au peuple juif ?

— Parce que ce peuple était destiné à préparer dans l’ancien monde la venue du Sauveur des hommes qui devait sortir de lui (q. 96, a. 4).

 

Comment s’appellent les préceptes qui étaient propres au peuple juif et ne regardaient que lui dans la loi ancienne ?

— Ils s’appellent les préceptes judiciaires et les préceptes cérémoniels (q. 99, a. 3 et 4).

 

— N’y avait-il pas aussi dans la loi ancienne d’autres préceptes qui sont demeurés dans la loi nouvelle ?

— Oui, il y avait aussi dans la loi ancienne des préceptes qui sont demeurés dans la loi nouvelle.

 

— Comment s’appellent ces préceptes de la loi ancienne qui sont demeurés dans la loi nouvelle ?

— On les appelle les préceptes moraux (q. 99, a. 1 et 2).

 

— Pourquoi ces préceptes moraux de la loi ancienne sont-ils demeurés dans la loi nouvelle ?

— Parce qu’ils constituent ce qu’il y a d’essentiel et d’absolument inaliénable dans les règles de la moralité se rapportant à tout homme, du simple fait qu’il est homme (q. 100, a. 1).

 

— Ces préceptes moraux ont donc toujours été et seront toujours les mêmes pour tous les hommes ?

— Oui, ces préceptes moraux ont toujours été et seront toujours les mêmes pour tous les hommes (q. 100, a. 8).

 

— Sont-ils la même chose que la loi naturelle ?

— Oui, ces préceptes moraux sont la même chose que la loi naturelle (q. 100, a. 1).

 

— Pourquoi dites-vous donc qu’ils font partie de la loi divine ?

— Parce que, pour leur donner encore plus de force et pour empêcher que la raison humaine dévoyée ne les oublie ou ne les corrompe, Dieu a voulu les promulguer lui-même solennellement, quand il s’est manifesté à son peuple choisi, du temps de Moïse ; et aussi parce que Dieu les a promulgués en vue de la fin surnaturelle à laquelle tout homme est appelé par lui (q. 100, a. 3).

 

— Comment s’appellent ces préceptes moraux ainsi promulgués solennellement par Dieu du temps de Moïse ?

— Ils s’appellent le Décalogue (q. 100, a. 3 et 4).

 

— Que signifie ce mot : Décalogue ?

— Ce mot est un mot grec qui veut dire les dix paroles, parce que c’est au nombre de dix que Dieu donna ces préceptes.

 

— Quels sont ces dix préceptes du Décalogue ?

— Ces dix préceptes du Décalogue sont les suivants :

1°) Tu n’auras point d’autres dieux que moi ;

2°) Tu ne prendras point en vain le nom du Seigneur, ton Dieu ;

3°) Tu sanctifieras le jour du Seigneur ;

4°) Honore ton père et ta mère ;

5°) Tu ne tueras point ;

6°) Tu ne commettras point d’adultère ;

7°) Tu ne commettras point de vol ;

8°) Tu ne porteras point de faux témoignage contre ton prochain ;

9°) Tu ne convoiteras point la femme de ton prochain ;

10°) Tu ne convoiteras rien de ce qui est à ton prochain (q. 100, a. 4, 5 et 6).

 

— Ces dix préceptes suffisent-ils à régler toute la vie morale de l’homme dans l’ordre de la vertu ?

— Oui ; ils suffisent, quant aux vertus principales, qui regardent les devoirs essentiels de l’homme envers Dieu et le prochain ; mais, pour la perfection de toutes les vertus, ils ont dû être expliqués et complétés par l’enseignement des prophètes dans l’ancienne loi, et plus encore par l’enseignement de Jésus-Christ et des apôtres dans la loi nouvelle (q. 100, a. 3 et 11).

 

— Quel est le meilleur moyen de bien entendre ces préceptes et ce qui les explique ou les complète pour la perfection de la vie morale ?

— C’est de les étudier à l’occasion de chacune des vertus considérées dans le détail.

 

— Cette étude se fera-t-elle alors d’une manière aisée ?

— Oui, car la nature même de la vertu expliquera la nature et l’obligation du précepte.

 

— Sera-ce en même temps le moyen de bien entendre toute la perfection de la loi nouvelle ?

— Oui, parce que la perfection de cette loi consiste précisément dans son rapport avec l’excellence de toutes les vertus (q. 100, a. 2 ; q. 108).

 

— Cette excellence de toutes les vertus revêt-elle un caractère particulier dans la loi nouvelle ?

— Oui, elle y revêt le caractère de conseils s’ajoutant aux préceptes (q. 108, a. 4).

 

— Qu’entendez-vous par les conseils s’ajoutant aux préceptes ?

— J’entends les invitations faites, par Jésus-Christ, à toutes les âmes de bonne volonté, de se détacher, par amour pour lui et pour obtenir une plus parfaite jouissance de lui dans son ciel, des choses qu’elles pourraient vouloir sans compromettre l’essentiel de la vertu, mais qui peuvent être un obstacle à la perfection de cette vertu (q. 108, a. 4).

 

— A combien se ramènent ces conseils ?

— Ils se ramènent à trois : la pauvreté, la chasteté et l’obéissance (q. 108, a. 4).

 

— Y a-t-il un état spécial où l’on puisse pratiquer excellemment ces conseils ?

— Oui, c’est l’état religieux (q. 108, a. 4).

 

20. Du principe extérieur qui aide l’homme dans la pratique des actes bons : ou de la grâce

 

— Suffit-il de la direction donnée par la loi pour que l’homme vive de la vie de la vertu et laisse de côté la vie contraire du péché ou du vice ?

— Non, il y faut encore le secours de la grâce (q. 109 et 94).

 

— Qu’est-ce que vous entendez par la grâce ?

— J’entends, par la grâce, un secours spécial de Dieu, qui aide l’homme à faire le bien et à fuir le mal.

 

— Ce secours spécial de Dieu est-il toujours nécessaire à l’homme ?

— Oui, ce secours spécial de Dieu est toujours nécessaire à l’homme.

 

— L’homme ne peut-il donc jamais de lui-même faire aucun bien ou éviter aucun mal ?

— Oui, l’homme peut, de lui-même, c’est-à-dire avec les principes de sa nature que Dieu lui a donnés, et les autres secours naturels qu’il trouve autour de lui, accomplir certain bien et éviter certain mal, même dans l’ordre moral ou de la vertu ; mais, si Dieu ne vient pas, par sa grâce, guérir la nature humaine blessée par le péché, l’homme ne pourra pas accomplir, même dans l’ordre de la vertu naturelle, tout le bien et éviter tout le mal ; et, dans l’ordre de la vertu surnaturelle ou de la vie morale en vue du ciel à conquérir, l’homme, par sa seule nature, sans la grâce, ne peut absolument rien (q. 109, a. 1 et 10).

 

— Que comprend cette grâce d’ordre surnaturel ?

— Cette grâce d’ordre surnaturel comprend deux choses : un état habituel de l’homme ; et des motions surnaturelles de l’Esprit-Saint lui-même (q. 109, a. 6).

 

— Qu’entendez-vous par cet état habituel de l’homme ?

— J’entends, par cet état habituel, un ensemble de qualités produites et conservées par Dieu lui-même dans l’âme, qui divinisent l’homme dans son être et dans ses facultés (q. 110, a. 1 et 4).

 

— Comment s’appelle la qualité foncière qui divinise l’être de l’homme ?

— Elle s’appelle la grâce habituelle ou sanctifiante (q. 110, a. 1, 2 et 4).

 

— Et comment s’appellent les autres qualités surnaturelles qui divinisent les facultés de l’homme ?

— Ce sont les vertus et les dons (q. 110, a. 3).

 

— Est-ce que les vertus et les dons sont liés à la grâce habituelle ou sanctifiante ?

— Oui, les vertus et les dons sont liés à la grâce habituelle ou sanctifiante, de telle sorte qu’ils dérivent de cette grâce et qu’elle ne peut jamais exister dans l’âme sans qu’ils existent dans les facultés.

 

— Cette grâce et ces vertus et ces dons qui divinisent l’âme et ses facultés, sont-ils quelque chose de bien précieux et de bien grand ?

— Oui, car c’est ce qui fait l’homme enfant de Dieu et lui donne le pouvoir d’agir comme tel.

 

— Un homme revêtu et orné de la grâce avec les vertus et les dons l’emporte-t-il en perfection sur tout le monde créé, dans l’ordre de la nature ?

— Oui, sans en excepter même les anges, considérés dans leur nature seule (q. 113, a. 9, ad 2).

 

— Il n’y a donc rien qui doive être davantage souhaité par l’homme, sur cette terre, que d’avoir ainsi la grâce de Dieu avec les vertus et les dons ?

— Non, il n’y a rien que l’homme doive plus désirer, sur cette terre, que de posséder et conserver, en y progressant tous les jours, cette grâce de Dieu avec les vertus et les dons.

 

— Comment est-ce que l’homme peut ainsi posséder et conserver, en y progressant tous les jours, sur cette terre, la grâce de Dieu avec les vertus et les dons ?

— En correspondant fidèlement à l’action surnaturelle de l’Esprit-Saint, qui le sollicite à se préparer à recevoir la grâce, s’il ne l’a pas encore, ou à y progresser tous les jours, s’il la possède déjà (q. 112, a. 3 ; q. 113, a. 3 et 5).

 

— Comment s’appelle cette action de l’Esprit-Saint ?

— Cette action de l’Esprit-Saint porte le nom de grâce actuelle (q. 109, a. 6 ; q. 112, a. 3).

 

— C’est donc avec le secours ou sous l’action de la grâce actuelle que nous nous disposons à recevoir la grâce habituelle ou sanctifiante, si nous ne l’avons pas encore, ou à y progresser, si nous l’avons déjà ?

— Oui, c’est avec le secours ou sous l’action de la grâce actuelle que nous nous disposons à recevoir la grâce habituelle ou sanctifiante, si nous ne l’avons pas encore, ou à y progresser, si nous l’avons déjà.

 

— Cette grâce actuelle peut-elle produire son plein effet en nous, sans nous, et malgré nous ?

— Non, cette grâce actuelle ne peut pas produire son plein effet en nous, sans nous et malgré nous (q. 113, a. 3).

 

— Il faut donc que notre libre arbitre coopère à l’action de la grâce actuelle ?

— Oui, il faut que notre libre arbitre coopère à cette action de la grâce actuelle.

 

— Comment s’appelle cette coopération de notre libre arbitre à l’action de la grâce actuelle ?

— Elle s’appelle la correspondance à la grâce.

 

— Quel caractère revêt l’acte de notre libre arbitre, quand il correspond ainsi à l’action de la grâce actuelle et que la grâce habituelle est dans l’âme ?

— Il revêt toujours le caractère d’acte méritoire (q. 114, a. 1 et 2).

 

— Y a-t-il plusieurs sortes de mérites, pour notre acte méritoire ?

— Oui, il y a le mérite condigne et le mérite de convenance (q. 114, a. 2).

 

— Qu’entendez-vous par le mérite condigne ?

— J’entends le mérite qui donne un droit strict et de justice à recevoir la récompense (q. 114, a. 2).

 

— Que faut-il pour que l’acte de l’homme soit méritoire du mérite condigne ?

— Il faut que cet acte soit fait sous la motion de la grâce actuelle ; qu’il émane de la grâce sanctifiante par la vertu de charité ; et qu’il tende à l’acquisition de la vie éternelle pour soi, ou encore à l’augmentation en soi de la grâce et des vertus (q. 114, a. 2 et 4).

 

— Ne peut-on pas mériter pour les autres la vie éternelle, ou la grâce sanctifiante, ou l’augmentation de cette grâce, d’un mérite condigne ?

— Non, on ne peut mériter ces sortes de biens, pour les autres, que d’un mérite de convenance, le mérite condigne pour les autres étant le propre de Jésus-Christ, comme chef et tête de l’Église (q. 114, a. 5 et 8).

 

— Qu’entendez-vous par le mérite de convenance ?

— J’entends le mérite qui fait que Dieu, en raison de l’amitié qui l’unit aux justes, estime à propos et en harmonie avec ce qui leur convient de répondre au plaisir qu’ils s’appliquent à lui faire par leurs bonnes œuvres, en leur faisant lui-même plaisir par la concession de ce qu’ils lui demandent ou de ce qu’ils désirent (q. 114, a. 6).

 

— C’est donc toujours dans l’intimité de Dieu avec les justes, ou dans la vie de la grâce et des vertus sous l’action de l’Esprit-Saint, que consiste toute la raison de mérite pour l’homme ?

— Oui, c’est toujours dans l’intimité de Dieu avec les justes, ou dans la vie de la grâce et des vertus sous l’action de l’Esprit-Saint, que consiste toute la raison de mérite pour l’homme ; et tout ce qu’il fait, hors de ce cadre, même si ce n’est pas mauvais en soi, est chose absolument vaine, ou qui ne lui servira de rien au jour des suprêmes rétributions (q. 114, a. 6).

 

— Pourriez-vous m’expliquer le détail de cette vie de la grâce et des vertus sous l’action de l’Esprit-Saint, qui doit constituer le tout de la vie de l’homme sur cette terre ?

— Oui, et ce sera l’objet de tout ce qui nous reste à dire dans l’étude de la marche ou du retour de l’homme vers Dieu par ses actes moraux.