Monseigneur Fernando Arêas Rifan

Évêque et Administrateur apostolique

Le magistère vivant de l’Église

Orientation pastorale

Instruction et orientation adressées aux prêtres et aux fidèles de l’Administration Apostolique
personnelle Saint-Jean-Marie-Vianney
et aux autres catholiques liés
à la liturgie traditionnelle
auxquels cela pourra être utile


PRÉFACE
À L’ÉDITION FRANÇAISE

J’ai écrit cette simple Orientation pastorale sur le Magistère vivant de l’Église[1] aux prêtres et fidèles de notre Ad­ministration apostolique, mais je crois qu’elle pourra être utile aussi aux autres prêtres et fidèles, à ceux d’autres pays, surtout de langue française. Ce sont certains de ces derniers eux-mêmes qui m’en ont demandé une version française, traduction que mes amis les moines du Barroux m’ont généreusement proposé de faire.

Je vous prie de la recevoir et de la lire avec un sincère esprit de fidélité à la Sainte Église et avec amour pour la vérité (il est à peine besoin de le rappeler, car je connais votre esprit catholique).

J’ai cherché à me baser sur le Magistère de l’Église, en le défendant de beaucoup d’idées étrangères, malheureusement communes aujourd’hui dans nos milieux catholiques.

Lisez-la, s’il vous plaît, avec calme et réflexion, surtout la première partie, en vous rappelant que les deux autres parties, concernant les conséquences pratiques et les applications des principes, doivent être lues à la lumière de la première partie, théorique. C’est une question doctrinale très sérieuse, qui concerne les principes dogmatiques de notre foi catholique.

Comme je le dis dans le texte, nous avons pris et prenons pour guides et pour lumières exclusivement la doctrine de la Sainte Église, transmise par son Magistère toujours assisté par le divin Esprit Saint, et notre engagement de conscience envers le bon Dieu, Notre-Seigneur, envers la Sainte Église et les âmes, sans nous laisser influencer par des considérations et des jugements humains.

Votre amour pour l’Église et votre désir d’être fidèles à sa doctrine vous feront bien saisir toutes les explications contenues ici. Nous croyons que ces éclaircissements, bien qu’incomplets, seront suffisants pour que les catholiques comprennent bien la question et acceptent l’orien­­tation de l’Église, quoique nous soyons conscients que pour ceux qui ont bon esprit, surtout ceux qui ont le bon sens catholique, peu d’explications sont nécessaires ; mais pour ceux qui ne l’ont pas, hélas !, aucune explication ne sera suffisante.

Heureusement, après la publication de notre présente Orien­tation pastorale, nous avons eu la satisfaction de recevoir avec reconnaissance du Saint-Père, le Pape Benoît XVI, la lettre apostolique sous forme de Motu Proprio Summorum Pontificum, dans laquelle, en un geste de bonté et de générosité, « ouvrant tout grand son cœur », comme il s’exprime lui-même, et cherchant la « ré­con­ci­liation interne au sein de l’Église », il vient de libérer pour le monde entier, comme forme extraordinaire, l’usage de la forme antique de l’unique rite romain, à côté de sa forme ordinaire, la Messe dans le rite de Paul VI, en vigueur actuellement dans l’Église.*

Et, pour parler en termes de réconciliation et de convivialité, disons que la nouvelle forme (ordinaire) de la Messe se présente comme impliquant une plus grande participation, et la forme ancienne (extraordinaire) exprime davantage la sacralité et la révérence due au mystère eucharistique. Pour cette raison, le Pape affirme que « les deux formes d’usage du rite romain peuvent s’en­ri­chir réciproquement ». Ainsi, de même que le missel ancien pourra s’enrichir avec les nouveaux saints et de nouvelles préfaces, « dans la célébration de la Messe selon le Missel de Paul VI, pourra être manifestée de façon plus forte que cela ne l’a été souvent fait jusqu’à présent, cette sacralité qui attire de nombreuses personnes vers le rite ancien ».**

Notre Administration apostolique, déjà en possession de ce privilège concédé par le Saint-Siège, applaudit avec effusion à cette initiative du Saint-Père, tellement bénéfique pour toute l’Église, et en exprime sa reconnaissance.

À ce propos, le cardinal Darío Castrillón Hoyos, dans son discours à l’Assemblée de la 5e Conférence du CELAM, à Aparecida, le 16 mai dernier, se référant à notre Ad­ministration apostolique et à son influence dans cette décision du Pape, influence due aux bonnes relations établies entre le diocèse de Campos et nous, rappela les bons fruits que celles-ci ont portés, après notre reconnaissance canonique. Voici les termes mêmes du cardinal : « … les fidèles qui se sont inscrits à l’Admi­nis­tration apostolique sont contents de pouvoir vivre en paix dans leurs communautés paroissiales ; qui plus est, de fait, certains diocèses brésiliens ont noué des contacts avec l’Administration apostolique de Campos, laquelle a mis à leur disposition des prêtres pour le soin pastoral des fidèles traditionalistes de leurs Églises locales. Le projet du Saint-Père a déjà été partiellement expérimenté à Campos, où la cohabitation pacifique des deux formes de l’unique rite romain de l’Église est une belle réalité. Nous espérons qu’un tel modèle produira de bons fruits aussi dans d’autres lieux de l’Église, où vivent ensemble des fidèles catholiques de sensibilités liturgiques différentes. Et nous espérons, en outre, qu’une telle modalité de vie en commun attirera aussi ceux des traditionalistes qui sont encore éloignés ».

Par ailleurs, nous recevons aussi avec beaucoup de joie le document en forme didactique du 10 juillet 2007, Réponses à des questions relatives à certains aspects de la Doctrine sur l’Église, émanant de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, ratifié et confirmé par le Saint-Père lui-même, qui en a ordonné la publication, veillant une fois de plus à donner, contre l’interprétation moderniste, l’interprétation catholique officielle des textes du concile Vatican II.

Ces documents viennent corroborer l’enseignement que nous donnons dans notre présente Orientation pastorale sur le magistère vivant de l’Église, ce qui nous apporte beaucoup de réconfort, car nous savons ainsi que nous sommes en parfaite consonance avec les enseignements du Saint-Père et du Magistère de l’Église dans les circonstances actuelles.

La prière de chaque jour, la dévotion à la Très Sainte Vierge, Mère de l’Église, la Très Sainte Eucharistie, sacrifice et sacrement, seront l’assurance de notre fidélité et de notre persévérance.

À tous les lecteurs, avec mes humbles prières, ma cordiale bénédiction épiscopale.

 

 

 

 

 

 

En Jésus et Marie,

 

 

† Fernando Arêas Rifan

Évêque titulaire de Cedamusa,

Administrateur Apostolique.

 

 

 

Campos (Brésil), le 11 juillet 2007

 

Partie Introductive

I. Objectif de cette
orientation pastorale

La crise actuelle que traverse la Sainte Église, comme le furent toutes les autres de son histoire, est une épreuve pour notre foi et peut devenir une tentation et une occasion de chute pour beaucoup de catholiques. Et, malheureusement, elle a fait des victimes, tant du côté dit « pro­gres­siste » que du côté nommé « traditionaliste », causant des blessures doctrinales chez beaucoup de catholiques de tous les milieux.

J’écris pour les prêtres et les fidèles de notre Administration apostolique, cette portion du peuple de Dieu, équi­valente à un diocèse, dont le soin pastoral me fut con­fié par le Souverain Pontife, au nom de qui je la gouverne.[2] Je m’adresse par conséquent aux catholiques de ten­dance plutôt conservatrice. De ce fait, la finalité de la présente Orientation n’est pas proprement de traiter des nombreux abus et erreurs que l’on rencontre dans l’aile progressiste de l’Église, mais plutôt, outre de conforter et d’animer ceux qui luttent pour la tradition doctrinale, liturgique et disciplinaire catholique, de les mettre en garde en même temps contre les erreurs qui s’infiltrent jusque dans les tendances les plus conservatrices, et ce, afin que la position de ces fidèles catholiques soit mise en parfaite syntonie avec la théologie catholique. « Celui qui veut corriger le monde doit commencer par lui-même », affirme le dicton.a

Par conséquent, pour que nous soyons des instruments utiles à l’Église dans la crise présente, nous devons commencer par observer et corriger nos propres faux-pas et incorrections.

Une des principales erreurs qui atteignent les deux aires, et de façon spéciale les traditionalistes, concerne le Magistère vivant de l’Église. Il existe un danger de protestantisation des deux côtés. Si, d’un côté, nous nous plaignons de la protestantisation liturgique au sein de l’aile la plus progressiste, nous regrettons aussi profondément une infiltration du principe protestant du « libre examen » dans les milieux traditionalistes. Beaucoup ne font aucun cas des documents du Magistère actuel, et ne les lisent même pas. Beaucoup se posent de façon absurde en juges du Magistère voire en juges à la place du Magistère.

Notre objectif est donc, je le répète, de purifier notre « tra­ditionalisme », en en corrigeant les distorsions, les imprécisions et jusqu’aux déviations doctrinales, afin que, ainsi purifiés, nous puissions réellement rendre service à la Hiérarchie de l’Église, en combattant efficacement, à son côté et sous son autorité, l’« autodé­molition » de l’Église, dont se plaignit le pape Paul VI.[3] Ainsi nous sauverons beaucoup d’âmes, spécialement les nôtres. La « fumée de Satan » tellement dénoncée par ce pape et qui a pénétré dans le temple de Dieu[4] a fait mal aux yeux de beaucoup de catholiques, progressistes et conservateurs. Ma fonction d’Évêque est d’alerter, de donner l’alarme comme sentinelle placée par Dieu pour protéger son troupeau, lui montrant le droit chemin dans ces moments de crise. J’espère qu’il m’entendra, chacun pour le bien de son âme.

« Je t‘ai fait guetteur pour la maison d‘Israël… celui qui en a tenu compte [du cor], sa vie est sauve… Si au contraire tu as averti [le méchant] d‘abandonner sa conduite pour se convertir et qu‘il ne se soit pas converti, il mourra, lui, à cause de son péché, mais toi, tu auras sauvé ta vie. »[5]

II. Introduction - Comparaisons

Un certain jour, un groupe de touristes visitait un jardin botanique, plein de chemins et de sentiers, munis de multiples indications. Ils suivaient les panneaux indicateurs, mais même ainsi, comme certains panneaux n’ont pas toujours un sens clair, il leur venait des doutes, ils commencèrent à prendre un chemin erroné et à se perdre. Heureusement, apparut un guide qui leur demanda de le suivre et qui les conduisit avec sécurité où ils voulaient aller.

Pourquoi ces promeneurs avaient-ils des doutes et se perdaient-ils, même en regardant les indications écrites ? Parce que les panneaux indicateurs ne sont pas vivants. Ils ne cheminent pas avec nous. Il y a certaines circonstances où, même avec eux, nous sommes dans le doute et nous courons le risque de nous perdre. Surgissent alors diverses interprétations et, par voie de conséquence, des divisions et des dangers. Il est nécessaire qu’un guide vivant, sûr, chemine avec nous, pour résoudre les doutes qui pourraient se présenter pendant la marche ; un guide avec des garanties de sûreté, qui interprète les panneaux de signalisation.

Autre comparaison. Les lois de la circulation disent que, quand il y a un policier qui oriente le trafic, ses ordres l’emporteront sur les autres dispositifs. En effet, il peut y avoir une circonstance qui exige nécessairement une orientation par le policier différente de la lettre du dispositif.

Ce serait insensé et très risqué pour un touriste ou un automobiliste, arguant des plaques ou des feux, de vouloir contester les indications du guide ou du gardien de la paix présents, lesquels souvent ont connaissance de circonstances ignorées des voyageurs, et se trouvent là précisément pour nous guider et nous indiquer le meilleur chemin.


Première Partie : Principes sur le magistère vivant

III. L’institution
du Magistère vivant

Dans le chemin du bien et de la vérité il ne peut y avoir d’erreurs ou de tromperies, vu qu’est en jeu notre salut éternel. Pour cette raison, Notre Seigneur, dans sa sagesse divine, pour nous conduire avec sécurité, a laissé non seulement les sources de la Révélation (la Sainte Écriture et la Tradition orale), mais aussi des guides vivants, susceptibles de nous orienter à leur sujet, sur leur authenticité, leur véracité et leur interprétation. Des guides vivants devant accompagner le cheminement de l’Église jusqu’à la consommation des siècles.

« Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu’à la fin du monde. » (Mt 28,20). « Qui vous écoute m’écoute, qui vous rejette me rejette, et qui me rejette rejette Celui qui m’a envoyé. » (Lc 10,16).

Le pape Pie XII nous enseigne :

« La norme prochaine et universelle de la vérité » est le « Magistère de l’Église », « car le Christ Seigneur lui a confié tout le dépôt de la foi, à savoir l’Écriture sainte et la “tradition” divine, à garder, à défendre et à interpréter ».[6] « Le Sauveur, en effet, a confié l’explication des doctrines contenues dans le dépôt de la foi, non pas au jugement privé, mais au Magistère ecclésiastique ».[7]

Pour cette raison, saint Augustin écrivait :

« Je ne croirais pas à l’Évangile, si ne m’y portait l’autorité de l’Église catholique ».[8]

Le libre examen, en d’autres termes l’interprétation privée que chacun ferait des sources de la Révélation, serait une plus grande source de divisions : « autant de têtes, autant d’opi­nions ».[9]

Martin Luther, avec son principe du libre examen et de la « sola Scriptura », citait l’Épître aux Romains contre la doctrine catholique : la Bible sans le Magistère et contre lui ; « le Christ, oui, l’Église, non ! »[10] Il créa ainsi le protestantisme, lequel se fragmente en sectes chaque jour plus nombreuses, toutes avec la Bible à la main. En outre, les protestants actuels citent saint Bernard et saint Thomas d’Aquin contre la doctrine de l’Église sur l’Im­ma­culée-Conception de Notre-Dame : c’est la Tradition sans le Magistère et contre lui.

Malheureusement, ce principe protestant du « libre exa­men » a pénétré dans les milieux catholiques liés à la Tradition. Contre ce principe nous avertissait Dom Antônio de Castro Mayer quand il écrivait :

« Personne n’a le droit de juger la parole du pape, en ne l’ac­ceptant que s’il l’approuve » (Veritas, avril-mail 1980, p. 8).

Mais au contraire, selon le Magistère lui-même,

« “la charge d’interpréter de façon authentique la Parole de Dieu, écrite ou transmise a été confiée au seul Magistère vivant de l’Église, dont l’autorité s’exerce au nom de Jésus-Christ”, c’est-à-dire aux évêques en communion avec le successeur de Pierre, l’évêque de Rome » ;[11] « la sainte Tradition, la sainte Écriture et le magistère de l’Église, par une très sage disposition de Dieu, sont tellement reliés et solidaires entre eux qu’aucune de ces réalités ne subsiste sans les autres, et que toutes ensemble, chacune à sa façon, sous l’action du seul Esprit Saint, contribuent efficacement au salut des âmes. »[12]

Saint Thomas d’Aquin nous enseignait déjà :

« Ce qui fait autorité au plus haut degré, c’est la coutume de l’Église. C’est toujours l’Église qu’il faut suivre en toutes choses. Car l’enseignement même des Docteurs catholiques tient son autorité de l’Église. Il faut donc s’en tenir plus à l’autorité de l’Église qu’à celle d’un Augustin ou d’un Jérôme ou de quelque Docteur que ce soit ».[13]

D’où la réflexion de Dom Antônio de Castro Mayer :

« Nous ne comprenons donc pas comment on peut former des catholiques en ignorant totalement la source la plus prochaine de la vérité révélée, laquelle est le Magistère vivant. Rien que par une telle attitude les fauteurs d’un nouveau christianisme deviennent suspects. »[14]

De la sorte, le Magistère que le Christ a institué est un Magistère vivant, constitué de personnes vivantes, destinées à nous guider perpétuellement à tous les instants, à nous accompagner sur le chemin, à interpréter les principes pérennes et à les appliquer dans les diverses circonstances qui se présenteraient. Le pape Léon XIII a enseigné :

« Il est donc évident […] que Jésus-Christ a institué dans l’Église un magistère vivant, authentique et, de plus, perpétuel, qu’il a investi de sa propre autorité, revêtu de l’Esprit de vérité, confirmé par des miracles, et il a voulu et très sévèrement ordonné que les enseignements doctrinaux de ce magistère fussent reçus comme les siens propres. »[15]

IV. Qu’est-ce qu’un
Magistère vivant ?

« Un magistère vivant, c’est-à-dire qui s’exerce continuellement dans l’Église par la communication de la doctrine révélée. Ce magistère est vivant, en tant qu’il s’oppose au magistère encore exercé actuellement dans l’Église par des hommes qui ont disparu, mais auxquels leurs ouvrages ont survécu. Les protestants admettent que les Apôtres exercent encore actuellement dans l’Eglise un magistère, mais seulement par l’influence de leurs écrits : ils n’admettent donc qu’un magistère pour ainsi dire posthume ».[16]

« Magistère […] vivant, c’est-à-dire qui demeure toujours dans des maîtres vivants et s’exprime par leur bouche, et non pas ce Magistère, divin sans doute, mais mort, que les protestants cherchent dans l’Écriture ».[17]

« On a l’habitude de diviser le Magistère en écrit et vivant. Le magistère purement écrit est celui que n’importe quel auteur exerce par ses écrits même après sa mort. Tel est, par exemple, le magistère qu’Aristote exerce encore actuellement par ses œuvres. On appelle vivant le magistère exercé par des actes vitaux et conscients d’hommes, que le maître se serve ou non d’écrits ».[18]

V. Magistère continu,
sans interruption

« Allez, enseignez toutes les nations… » (Mt 28,20). « Qui vous écoute, m’écoute » (Lc 10,16). « L’Esprit de Vérité demeurera éternellement avec vous » — « L’Esprit Saint vous enseignera toutes choses » (Jn 14, 16.26).

Pour nous guider, Jésus a institué le collège apostolique, avec saint Pierre comme chef, et ses successeurs, guides vivants et perpétuels, jusqu’à la fin du monde :

« … Ut iisdem rectoribus gubernetur, quos operis tui vicarios eidem contulisti praeesse pastores » « Afin qu’il [ton troupeau] soit gouverné par les mêmes responsables que ceux que tu as placés à sa tête pour le régir comme tes lieutenants dans ton œuvre ».[19]

Ainsi, comme guide de l’Église universelle, nous avons le pape, successeur de saint Pierre. Comme guide des Églises particulières (diocèses, prélatures, Administrations apostoliques, ordinariats, etc.) nous avons les Évêques, successeurs des Apôtres.

Il est faux, par conséquent, de penser que l’assistance de l’Esprit Saint de Dieu à l’Église puisse être intermittent, autrement dit, être absent durant une quelconque période de son histoire.

Le concile Vatican I, dans la Constitution dogmatique Pastor aeternus nous enseigne que

« Saint Pierre, jusqu’à aujourd’hui et toujours, vit, gouverne et juge dans ses successeurs. » (DzSch 3056).

Et le Catéchisme de l’Église catholique précise :

« Le pontife romain et les évêques en “docteurs authentiques, pourvus de l’autorité du Christ, prêchent au peuple à eux confié la foi qui doit être crue et appliquée dans les moeurs” (LG 25). Le magistère ordinaire et universel du pape et des évêques en communion avec lui enseigne aux fidèles la vérité à croire, la charité à pratiquer, la béatitude à espérer ».[20]

VI. Garantie de
l’assistance divine contre l’erreur

Dieu l’Esprit Saint, qui assiste continuellement et sans interruption l’Église, comme Notre Seigneur l’a promis et l’accomplit, ne permet pas que les papes inventent des doctrines nouvelles ou cessent de garder correctement le dépôt de la foi. C’est ce qu’enseigne la Constitution dogmatique Pastor aeternus du concile Vatican I :

« En effet, le Saint-Esprit n’a pas été promis aux successeurs de Pierre pour qu’ils fassent connaître sous sa révélation une nouvelle doctrine, mais pour qu’avec son assistance ils gardent saintement et ex­posent fidèlement la Révélation transmise par les apôtres, c’est-à-dire le dépôt de la foi. Et leur doctrine apostolique a été embrassée par tous les vénérables pères, vénérée et suivie par les saints docteurs orthodoxes ; ils savaient parfaitement que ce siège de saint Pierre demeure toujours pur de toute erreur, aux termes de la promesse divine de notre Seigneur et Sauveur au chef de ses disciples : “J’ai prié pour toi, pour que ta foi ne défaille pas ; et quand tu seras revenu, affermis tes frères” [Lc 22, 32]. » (DzSch 3070).

À quoi fera écho le Catéchisme de l’Église catholique :

« Le degré suprême dans la participation à l’autorité du Christ est assuré par le charisme de l’infaillibilité. Celle-ci s’étend aussi loin que le dépôt de la Révélation divine (cf. LG 25) ; elle s’étend encore à tous les éléments de doctrine, y compris morale, sans lesquels les vérités salutaires de la foi ne peuvent être gardées, exposées ou observées ».[21]

Et cette garantie d’infaillibilité assiste le pape et l’épiscopat universel en union avec lui. Un évêque, pris isolément, ou même plusieurs, y compris l’épiscopat entier d’une nation, peuvent errer, même en matière de foi. Mais l’épiscopat de l’Église uni au pape ne peut pas tomber tout entier dans l’erreur.

Ainsi, le critère pour dirimer les doutes sera toujours le Magistère de l’Église, conformément à ce que nous enseigne Pie XII, que nous citions plus haut :

« La norme prochaine et universelle de la vérité est le Magistère de l’Église ».[22]

La crise actuelle dans l’Église, bien que grande, a ses limites, posées par Dieu. Voici ce que dit saint Thomas :

« Si on considère la Providence divine qui dirige son Église par l’Esprit Saint pour qu’elle n’erre pas, comme lui-même l’a promis en Jn 14,26, [disant] que l’Esprit, quand il viendrait enseignerait toute la vérité, c’est-à-dire ce qui concerne les choses nécessaires au salut, il est certain qu’il est impossible que le jugement de l’Église universelle se trompe sur les choses relatives à la foi ».[23]

De la même manière, saint Robert Bellarmin :

« Si tous les évêques se trompaient, toute l’Église se tromperait, or le peuple est tenu de suivre ses Pasteurs, comme le dit Jésus en Luc 10,16 : “Qui vous écoute, m’écoute” et Matthieu 23,3 : “Faites tout ce qu’ils vous diront” ».[24]

Dom Antônio en tirait la conclusion :

« Au cas où toute la hiérarchie viendrait à défaillir, ce serait la parole de Jésus-Christ qui aurait failli, puisque le Divin Sauveur à confié à la hiérarchie le gouvernement et la direction de son Église jusqu’à la fin des siècles, et, qui plus est, son assistance pour qu’elle ne défaille pas ».[25]

Et Pie VI déclarait déjà solennellement :

« 1. La proposition qui affirme : “Dans ces derniers siècles un obscurcissement général a été répandu sur des vérités de grande importance relatives à la religion et qui sont la base de la foi et de la doctrine morale de Jésus Christ” (est) hérétique. » (1ère proposition condamnée dans le synode janséniste de Pistoie).[26]

VII. Assentiment au Magistère,
même non infaillible

Même en dehors du domaine de l’infaillibilité, nous devons suivre le Magistère vivant et les pasteurs placés par Notre Seigneur pour nous guider.

Les situations dans lesquelles le guide vivant n’est pas infaillible, comme c’est le cas du père de famille ou du curé uni à son évêque, ne signifient pas que nous ne devons pas le suivre. C’est seulement dans l’hypothèse d’une opposition frontale à la Loi de Dieu que nous devons lui refuser notre soumission.

La Constitution dogmatique Pastor aeternus du concile Vatican I proclame :

« Ainsi donc, Nous enseignons et déclarons que l’Église romaine, par disposition du Seigneur, possède sur toutes les autres une primauté de pouvoir ordinaire et que ce pouvoir de juridiction du pontife romain, qui est vraiment épiscopal, est immédiat. Les pasteurs de tous rites et de tous rangs ainsi que les fidèles, tant chacun séparément que tous ensemble, sont tenus au devoir de subordination hiérarchique et de vraie obéissance, non seulement dans les questions qui concernent la foi et les moeurs, mais aussi dans celles qui touchent à la discipline et au gouvernement de l‘Église répandue dans le monde entier ; de telle manière que, en gardant l’unité de communion et de profession de foi avec le pontife romain, l’Église est un seul troupeau sous un seul pasteur suprême Jn 10,16. Telle est la doctrine de la vérité catholique, dont personne ne peut s’écarter sans danger pour la foi et le salut. » (DzSch 3060).

Plus récemment, le Catéchisme de l’Église catholique explique :

« Le magistère des pasteurs de l’Église en matière morale s’exerce ordinairement dans la catéchèse et dans la prédication, avec l’aide des oeuvres des théologiens et des auteurs spirituels. Ainsi s’est transmis de génération en génération, sous l’égide et la vigilance des pasteurs, le “dépôt” de la morale chrétienne, composé d’un ensemble caractéristique de règles, de commandements et de vertus procédant de la foi au Christ et vivifiés par la charité. Cette catéchèse a traditionnellement pris pour base, à côté du Credo et du Pater, le Décalogue, qui énonce les principes de la vie morale valables pour tous les hommes ».[27]

Selon la théologie, d’ailleurs :

« Vu que l’enseignement non infaillible de l’Église, même si ce n’est pas de manière absolue, est cependant assisté par le Saint-Esprit, il se tromperait beaucoup, celui qui croirait qu’il nous laisse entièrement libres d’y assentir ou non. Ne pas obliger sous peine d’hérésie est loin d’équivaloir à ne pas obliger du tout, comme l’enseigne le concile Vatican I : “il ne suffit pas d’éviter la perversité de l’hérésie si l’on ne fait aussi très attention à fuir les erreurs qui en sont plus ou moins proches” (DzSch 3045). S. Pie X condamna ceux qui prétendaient exempter de toute faute morale ceux qui ne tenaient pas compte des censures décrétées par les Congrégations romaines (DzSch 3408). Il revient à l’Église non seulement de proposer la vérité révélée, mais encore de montrer ce qui — directement ou indirectement — y mène ou en écarte. Et il ne suffit pas d’accueillir cet enseignement avec un silence respectueux ; une adhésion intellectuelle s’impose (Clément XI, DzSch 2390 ; S. Pie X, DzSch 3407) ».[28]

Écoutons encore Dom Antônio :

« Il est certain que le concile Vatican I a défini que le Magistère du Pontife Romain est infaillible dans des conditions déterminées… Cependant, il serait absurde d’en conclure que le pape se trompe toujours quand il ne fait pas usage de sa prérogative d’infaillibilité. Au contraire, nous devons supposer qu’il a raison, vu que normalement il agit avec prudence et n’émet pas son opinion avant de bien peser les choses. Sans parler des grâces spéciales par lesquelles le Saint-Esprit l’assiste. »[29]

Pie XII avait déjà affirmé :

« Il ne faut pas estimer non plus que ce qui est proposé dans les encycliques ne demande pas de soi l’assentiment, les papes n’y exerçant pas le pouvoir suprême de leur Magistère. Cet enseignement est celui du Magistère ordinaire, auquel s’applique aussi la parole : “qui vous écoute, m’écoute” [Lc 10, 16] ».[30]

La Congrégation pour la Doctrine de la Foi rappelait naguère à ce propos :

« La volonté d’acquiescement loyal à cet enseignement du Magistère en matière de soi non irréformable doit être la règle. […]. Dans ce domaine des interventions d’ordre prudentiel, il est arrivé que des documents magistériels ne soient pas exempts de déficiences. Les pasteurs n’ont pas toujours perçu aussitôt tous les aspects ou toute la complexité d’une question. Mais il serait contraire à la vérité de conclure, à partir de certains cas déterminés, que le Magistère de l’Église puisse se tromper habituellement dans ses jugements prudentiels, ou qu’il ne jouisse pas de l’assistance divine dans l’exercice intégral de sa mission ».[31]

VIII. Le Guide oriente
dans les diverses circonstances

Ainsi, selon nos explications, Jésus a institué un Magistère vivant, des guides vivants pour nos âmes. Un guide vivant applique les principes éternels aux circonstances actuelles. Il interprète les lois et les principes, les appliquant à telle occasion.

Ainsi saint Paul, tout en défendant le principe proclamé dans le concile de Jérusalem, lequel avait aboli la circoncision (Act 15, 1-29 ; 1 Cor 7, 18.24) et tout en résistant à saint Pierre pour ce motif (Gal 2, 11-14), conseilla-t-il à Timothée de se faire circoncire. Bien plus, c’est lui-même qui circoncit Timothée, « en considération des Juifs » (Act 16,3). Mêmes principes, mais circonstances différentes. Saint Paul, Apôtre, guide vivant, en jugea et agit ainsi. Quelqu’un de mauvais esprit pourrait vouloir jouer saint Paul contre saint Paul et l’accuser d’op­portunisme. Mais saint Grégoire loue la discrétion de saint Paul :

« Souvent on perd une vertu pour la vouloir conserver avec trop d’indiscrétion, au lieu qu’on la conserve mieux en l’interrompant avec prudence ».b

Et saint Jean Chrysostome, expliquant le cas de saint Paul faisant circoncire Timothée, attribua les conversions si nombreuses (décrites au verset 5 du même chapitre) à l’effort de saint Paul en vue de la concorde (cf. Cornelius a Lapide, commentaire sur ce passage).

Saint Pie X, même s’il ne s’agit pas d’un usage de l’in­fail­li­bi­lité, autorisa l’usage de la médaille comme substitut du scapulaire carmélitain de laine. Cela ne serait pas du bon esprit catholique de citer contre lui saint Simon Stock ou le pape Jean XXII, qui reçurent les apparitions de Notre-Dame en parlant seulement du scapulaire de laine.[32]

Un autre exemple est celui de la suggestion du pape Jean‑Paul II que l’on ajoute au Rosaire les mystères lumineux, comme enrichissement de la méditation de la vie de Jésus-Christ.

Ainsi, ce ne serait pas du bon esprit catholique, par exemple, d’en rester à citer seulement les papes antérieurs comme s’ils étaient le pape actuel. Ou seulement les évêques antérieurs, comme s’ils étaient l’évêque actuel. Ce serait une négation du Magistère vivant et l’institution d’un Magistère posthume, dans le style protestant.

IX. Le danger d’un
« magistère » parallèle

Le Magistère de l’Église, l’Église enseignante, est constituée du pape et des évêques en communion avec lui. Les simples prêtres et les laïcs appartiennent à l’Église enseignée et ne font pas partie du Magistère de l’Église.

Dans les époques de crise, il existe toujours le péril de s’éloigner du Magistère vivant de l’Église, de recourir à la direction de laïcs comme orientant l’orthodoxie, sous le prétexte que le Magistère de l’Église aurait défailli. Sur ce sujet, Dom Antônio de Castro Mayer avertissait :

« C’est une subversion hérétique, par défiance envers la hiérarchie, de suivre habituellement comme porte-parole et arbitre de l’orthodoxie quelqu’un qui n’est pas membre de la hiérarchie ».

Cet avertissement coïncide exactement avec l’en­sei­gne­­ment du pape Pie XII :

« Ce n’est pas sans un motif grave que Nous avons voulu donner devant vous, vénérables frères, ces avertissements. En effet, il arrive malheureusement que certains professeurs cherchent trop peu la liaison avec le magistère vivant de l’Église […]. Récemment […] s’est fait jour çà et là, et a commencé à se répandre ce qu’on appelle une théologie laïque et on a vu naître une catégorie de théologiens laïques qui se déclarent autonomes ; cette théologie tient des cours, imprime des écrits, a des cercles, des chaires, de professeurs. Ceux-ci distinguent leur magistère du Magistère public de l’Église, et l’opposent en quelque manière au sien […]. Il faut cependant retenir en sens opposé qu’i n’y eut jamais, qu’il n’y a pas, et qu’il n’y aura jamais dans l’Église de magistère légitime des laïcs soustrait par Dieu à l’autorité, à la conduite et à la vigilance du Magistère sacré ; bien plus, le refus même de se soumettre fournit un argument convaincant et un critère sûr : les laïcs qui parlent et agissent de la sorte ne sont pas conduits par l’Esprit de Dieu et du Christ. »[33]


Deuxième partie : Conséquences, Applications

Première conséquence : Application
de ces principes théologiques
à la question de la messe

§ 1. L’unité de culte, la variété des rites
et le pouvoir de l’Église

L’unité de l’Église catholique est l’une de ses notes caractéristiques essentielles, avec la sainteté, la catholicité et l’apostolicité. L’Église, par conséquent, ne peut jamais perdre son unité,[34] sous peine de cesser d’exister. Et l’unité de l’Église est triple : unité de gouvernement — un seul gouvernement, celui du Pontife Romain et des Évêques en communion avec lui —, l’unité de la foi — une seule doctrine — et l’unité du culte rendu à Dieu, surtout à travers les sacrements, spécialement la Très Sainte Eucharistie.

Le Code de droit canonique actuel définit ainsi la Très Sainte Eucharistie, comme sacrement et comme sacrifice :

« Le Sacrement le plus vénérable est la très sainte Eucharistie, dans laquelle le Christ Seigneur lui-même est contenu, offert et reçu, et par laquelle l’Église vit et croît continuellement. Le Sacrifice eucharistique, mémorial de la mort et de la résurrection du Seigneur, dans lequel le Sacrifice de la croix est perpétué au long des siècles, est le sommet et la source de tout le culte et de toute la vie chrétienne, par lequel est signifiée et réalisée l’unité du peuple de Dieu et s’achève la construction du Corps du Christ. En effet, les autres sacrements et toutes les oeuvres d’apostolat de l’Église sont étroitement liés à la très sainte Eucharistie et y sont ordonnés » (CDC, can. 897).

L’Eucharistie est, pour ainsi dire, le centre, la caractéristique et l’identité de l’Église catholique. Mais pour sa célébration, il existe diverses formes ou rites.

« Les diverses traditions liturgiques, ou rites, légitimement reconnues, parce qu’elles signifient et communiquent le même Mystère du Christ, manifestent la catholicité de l’Église ».[35]

La diversité liturgique, quand elle est légitime, est source d’enrichissement et ne porte pas préjudice à l’unité de l’Église.[36] Et l’Église catholique compte des dizaines de rites différents, orientaux et latins, tous étant des expressions différentes du même culte catholique rendu à Dieu.

L’Église a le pouvoir de créer et de modifier ses rites. Ainsi, sur « le pouvoir de l’Église concernant l’admi­nis­tration du sacrement de l’Eucharistie », le concile de Trente déclare expressément que

« l’Église a toujours eu le pouvoir, dans l’administration des sacrements, leur substance étant sauve, de déterminer et de changer les choses qu’elle juge convenable à l’utilité de ceux qui les reçoivent ou à la vénération de ces sacrements, selon la variété des choses, des temps et des lieux ».[37]

Le pape Pie XII nous enseigne, dans sa célèbre encyclique sur la sainte liturgie :

« De tout temps, la hiérarchie ecclésiastique a usé de ce droit sur les choses de la liturgie ; elle a organisé et réglé le culte divin, rehaussant son éclat de dignité et de splendeurs nouvelles, pour la gloire de Dieu et le pro­fit spirituel des chrétiens. Et, de plus, elle n’a pas hésité — tout en sauvegardant l’intégrité sub­stantielle du sacrifice eucharistique et des sacrements — à modifier ce qu’elle jugeait n’ê­tre pas parfaitement convenable et à ajouter ce qui lui paraissait plus apte à accroître l’honneur ren­du à Jésus-Christ et à l’au­guste Trinité, et à instruire et stimuler le peuple chrétien de façon plus bienfaisante.

En effet, la sainte liturgie est formée d’éléments humains et d’élé­ments divins ; ceux-ci, é­vi­dem­ment, ayant été établis par le divin Rédempteur, ne peuvent en aucune façon être changés par les hommes ; les premiers, au contraire, peuvent subir des modifications diverses, selon que les nécessités des temps, des choses et des âmes les demandent, et que la hiérarchie ec­clé­sias­ti­que, forte de l’aide de l’Esprit-Saint, les aura approuvées. De là vient l’admirable variété des ri­tes orientaux et occidentaux ».[38]

Et seule l’autorité de l’Église peut déclarer ce qui est légitime ou non dans la célébration des sacrements, spécialement de la Très Sainte Eucharistie.

Le droit canonique nous enseigne qu’il revient à l’autorité de l’Église de déterminer ce qui est valide et licite dans la célébration, l’administration et la réception des sacrements, vu qu’ils sont les mêmes pour toute l’Église et appartiennent au dépôt divin (cf. CDC, can. 841[39]).

Quant à la liturgie romaine traditionnelle, dite de saint Pie V, établie par la Bulle Quo primum tempore, que certains pensent ne jamais pouvoir être modifiée pas même par un pape postérieur, il existe une réponse officielle de la Congrégation du Culte divin, du 11 juin 1999, que nous citons :

« “Un pape peut-il fixer un rite pour toujours ?” [Réponse :] Non. A propos du “pouvoir de l’Église concernant la dispensation du sacrement de l’Eucharistie”, le concile de Trente déclare expressément : “Dans l’administration des sacrements, il y eut toujours dans l’Église le pouvoir de décider ou de modifier, la substance de ces sacrements étant sauve, ce qu’elle jugerait mieux convenir à l’utilité de ceux qui les reçoivent ou au respect des sacrements eux-mêmes, selon la diversité des choses, des temps et des lieux” (DzSch 1728). Au point de vue canonique, on doit dire que, quand un pape écrit “Nous concédons à perpétuité”, on doit toujours sous-entendre “jusqu’à ce qu’il soit pourvu autrement”. C’est le propre de l’autorité souveraine du Pontife romain de ne pas être liée aux lois purement ecclésiastiques, de même qu’aux dispositions de ses prédécesseurs. Il est lié seulement à l’immutabilité de la loi divine et naturelle, et à la constitution même de l’Église ».[40]

Les expressions de perpétuité et de prohibition de modification utilisées par saint Pie V dans la Bulle quo primum tempore, par laquelle il publia le Missel, sont identiques à celles que lui-même utilisa dans la Bulle Quod a nobis, par laquelle il publia le Bréviaire Romain. Malgré cela, saint Pie X modifia ce bréviaire par la Bulle Divino afflatu, utilisant à son tour les mêmes expressions consacrées solennelles de perpétuité et de prohibition de modification, interdiction qui évidemment n’atteignit pas le pape Pie XII quand il le modifia par la Lettre apostolique In cotidianis precibus, tout comme le bienheureux pape Jean XXIII, quand il modifia les rubriques du Bréviaire, en même temps que celles du Missel, par la Lettre apostolique Rubricarum instructum, modifications adoptées par tout le monde traditionaliste.

§ 2. La réforme liturgique
postérieure au concile Vatican II

Le pape actuel, quand il était cardinal préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, déclara que « la crise de l’Église que nous vivons aujourd’hui repose largement sur la désintégration de la liturgie ».[41] Le pape constate par conséquent l’existence d’un écroulement de ce que l’Église considère comme son sommet, avec des influences délétères sur toute la vie catholique.

Ainsi, tout comme le concile Vatican II, la réforme liturgique qui en provient se produisit en une période troublée de vaste crise dans l’Église, et servit d’occasion et de prétexte pour d’amples abus et erreurs, commis et propagés en leur nom.

Ont émis des réserves et des critiques quant à la manière dont fut faite la réforme liturgique postérieure à Vatican II, spécialement dans son application pratique, des personnes autorisées, parmi lesquelles divers théologiens et liturgistes, par exemple le cardinal Ratzinger,[42] notre pape actuel, le cardinal Ferdinando Antonelli, qui avait été le secrétaire de la Commission conciliaire pour la Liturgie,[43] et le cardinal Édouard Gagnon, [alors] président du Comité pontifical pour les Congrès eucharistiques internationaux.[44]

C’est dans cette même ligne que le Saint-Père le pape Jean‑Paul II écrivit :

« Je voudrais demander pardon — en mon nom et en votre nom à tous, vénérés et chers Frères dans l’épiscopat — pour tout ce qui, en raison de quelque faiblesse humaine, impatience, négligence que ce soit, par suite également d’une application parfois partielle, unilatérale, erronée des prescriptions du concile Vatican II, peut avoir suscité scandale et malaise au sujet de l’interprétation de la doctrine et de la vénération qui est due à ce grand sacrement. Et je prie le Seigneur Jésus afin que désormais, dans notre façon de traiter ce mystère sacré, soit évité ce qui peut affaiblir ou désorienter d’une manière quelconque le sens du respect et de l’amour chez nos fidèles. » (Lettre Dominicae cenae, n° 12).c

Le Secrétaire de la Congrégation pour le Culte divin récemment nommé, Mgr Albert Malcolm Ranjith Patabendige Don, s’est exprimé récemment sur les déviations en matière liturgique au sein de l’Église. Analysant l’aggiornamento demandé par le concile Vatican II, il a déclaré que

« malheureusement, après le concile, certains changements peu réfléchis ont été faits, dans la rapidité, dans l’en­thou­siasme, dans le rejet de certaines exagérations du passé. Ceci a amené à une situation opposée à celle que l’on souhaitait ».

Et il en donne des exemples :

« On voit que la liturgie a pris des directions erronées comme l’abandon du sacré et de la mystique, la confusion entre le sacerdoce commun et le sacerdoce consacré avec un appel spécifique. En d’autres mots, la confusion des rôles entre les laïcs et les prêtres. Il y a aussi la vision du concept d’Eucha­ristie comme un banquet commun plutôt que l’ac­cen­tua­tion sur la mémoire du sacrifice du Christ au calvaire et sur son efficacité sacramentelle pour le salut, ou encore certains changements comme d’avoir vidé les églises en les “protestantisant”… Ces changements de mentalité ont affaibli le rôle de la liturgie plutôt que de le renforcer. […]. Ceci a causé d’autres résultats négatifs pour la vie de l’Église. Ainsi, pour faire face à la progression du sécularisme dans le monde, il ne fallait pas devenir nous aussi sécularistes. Il fallait que nous approfondissions encore plus, car le monde a toujours plus besoin de l’Esprit, de l’intériorité. […] On voit bien, chez des jeunes d’aujourd’hui, y compris chez de jeunes prêtres, une nostalgie du passé, une nostalgie pour certains aspects perdus. Il y a, en Europe, un réveil très positif ».[45]

Comme ce qui nous intéresse, c’est le bien de toute l’Église, nous appuyons l’idée, soutenue par le Saint-Père actuel, d’entreprendre la réforme de la réforme liturgique, corrigeant plus efficacement les abus et corrigeant tout ce qui, dans les normes liturgiques, peut donner prise à ceux-ci. Le même Secrétaire de la Congrégation pour le Culte divin et la discipline des Sacrements, Mgr Albert Malcolm Ranjith Don affirme : « on peut parler d’une nécessaire correction, d’une réforme dans la réforme ».[46]

§ 3. La conservation aujourd’hui
de la messe dans sa forme traditionnelle

Poussés par le légitime désir de conserver la richesse liturgique du rite traditionnel, et choqués, non sans raison, dans leur foi et leur piété par les abus, les sacrilèges et les profanations auxquels a donné prise la réforme liturgique (cf. aussi notes 41, 52, et 77), les catholiques de la ligne traditionnelle, ne voulant pas voir « la liturgie transformée en show » (cf. note 42) et ne désirant pas pactiser avec les erreurs et profanations qu’ils ont constatées, se sont attachés légitimement aux formes traditionnelles de la liturgie.

Pour cette raison, ils méritent toute notre compréhension, nos éloges et notre appui, tous ceux qui luttent pour la conservation de la Liturgie dans sa forme traditionnelle.

Pour cette raison aussi, tous nos applaudissements sont acquis au Motu Proprio tellement souhaité du pape Benoît XVI qui concédera la liberté universelle pour la Messe dans le rite romain traditionnel, ce qui sera au bénéfice de toute l’Église. Le cardinal George, archevêque de Chicago, affirme que la messe de saint Pie V est

« une source précieuse de compréhension liturgique pour tous les autres rites […]. Cette liturgie appartient à l’Église tout entière comme le riche véhicule de l’esprit qui doit rayonner aussi sur la célébration de la troisième édition typique du missel romain actuel… » (cf. citation complète dans la note 48, ci-après).

Pour tous ces motifs encore, dans notre Administration apostolique, en vertu de la faculté à nous concédée par le Saint-Siège, nous conservons le rite de la Messe dans sa forme traditionnelle, c’est-à-dire l’antique forme du rite romain, comme le font également de nombreuses communautés religieuses, groupes et milliers de fidèles dans le monde entier. Nous l’aimons, nous la préférons et la conservons parce qu’elle est, pour nous, la meilleure expression liturgique des dogmes eucharistiques et un solide aliment spirituel,[47] pour sa richesse, sa beauté, son élévation, sa noblesse et la solennité de ses cérémonies,[48] pour son sens du sacré[49] et de la révérence,[50] pour son sens du mystère,[51] pour sa plus grande précision et rigueur dans les rubriques, ce qui représente une plus grande sécurité et protection contre les abus, en ne donnant pas d’espace aux « ambiguïtés, libertés, créativités, adaptations, réductions et instrumentalisations », dont s’était plaint le pape Jean‑Paul II.[52] Et le Saint-Siège reconnaît notre adhésion susdite comme parfaitement légitime.[53]

Ainsi, vu qu’il s’agit d’une des richesses liturgiques catholiques, nous exprimons à travers la Messe dans sa forme traditionnelle notre amour pour la Sainte Église et notre communion avec elle.

En outre, ne se refroidit pas, mais se poursuit notre combat contre les hérésies liturgiques telles que la négation de la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie, la transformation de la Messe en un simple souper, la négation ou l’obscurcissement du caractère sacrificiel et propitiatoire de la Sainte Messe, la confusion entre le sacerdoce ministériel et le sacerdoce commun des fidèles, la désacralisation de la sainte Liturgie, le manque de vénération, d’adoration et de modestie dans les tenues au cours du culte divin, la mondanisation de l’Église, etc.

Et contre ces erreurs nous résistons toujours, d’où qu’elles viennent. La doctrine de la résistance demeure, identique : « si nous-même ou un ange venu du ciel vous annonçait un Évangile différent de celui que nous vous avons prêché, qu’il soit anathème » (saint Paul aux Galates, 1, 8). Cette nôtre position doctrinale fut et continue à être la même que nous soutenons toujours.

§ 4. Critères et limites à observer

Nous avons parlé plus haut des vrais et sains motifs qui poussèrent et poussent un grand nombre de catholiques à l’amour légitime et à la préférence envers la richesse liturgique du rite traditionnel, et, par conséquent, en faveur de sa conservation.

Mais il faut reconnaître et regretter que, parfois, dans l’adhésion et la résistance, on a fait des critiques illégitimes à la réforme liturgique[54] et on a franchi les limites permises par la doctrine catholique.[55]

Souvent, dans le souci de défendre des choses correctes et sous la pression des attaques des opposants, même avec une droite intention, on peut commettre des erreurs et des exagérations que, après une période de plus grande réflexion, on doit rectifier et corriger. Saint Pie X remarquait que, dans la chaleur de la bataille, il est difficile de mesurer la précision et la portée des coups. D’où des fautes ou des excès, compréhensibles, mais incorrects. On peut comprendre et expliquer des erreurs, mais non les justifier. Saint Thomas d’Aquin nous enseigne :

« On ne peut pas justifier une action mauvaise, même faite avec une bonne intention ».[56]

C’est pour cette raison que, dans leur lettre au Pontife romain du 15 août 2001, les prêtres de l’ancienne Union Sacerdotale Saint-Jean-Marie-Vianney, maintenant constituée par le pape en Administration apostolique,[57] ont écrit :

« Et si, éventuellement, dans la chaleur de la bataille pour la défense de la vérité catholique, nous avons commis quelque er­reur ou causé quelque peine à Votre Sainteté, bien que notre in­tention ait toujours été de servir la Sainte Église, nous sup­plions humblement que vous nous pardonniez pa­ter­nel­le­ment ».

Il est nécessaire de toujours ajuster la pratique avec les principes que nous défendons. Si nous reconnaissons les autorités de l’Église, il est nécessaire de les respecter comme telles, sans jamais les discréditer, quand nous attaquons les erreurs. De toute éventuelle erreur ou exagération du passé sous cet aspect, nous ne voyons aucun problème à nous corriger.

Les principes, l’adhésion aux vérités de notre foi et le rejet des erreurs condamnées par l’Église subsistent comme auparavant. Ce qui est nécessaire, c’est d’éviter les généralisations, les amplifications et les attributions indues et injustes. La justice et la charité, même dans le combat, sont indispensables. S’il y a eu quelque défaillance aussi sur ce point, se corriger n’est pas un déshonneur. Après tout, se tromper est humain, pardonner est divin, se corriger est chrétien, et persévérer dans l’erreur est diabolique.

L’objectif de la présente Orientation pastorale n’est pas de refroidir la lutte contre le modernisme ou les autres hérésies qui cherchent à s’infiltrer dans la Sainte Église de Dieu, et encore moins de pactiser avec quelque erreur que ce soit, mais bien de faire en sorte que notre attaque soit efficace, basée sur la vérité, sur la justice et sur l’honnêteté. Dans le cas contraire, elle serait inefficace, préjudiciable et même offensante pour Dieu, Notre Seigneur et son Église. C’est seulement ainsi que nous collaborerons réellement avec la hiérarchie de l’Église dans ce combat contre le mal. C’est ce que nous écrivîmes au pape, dans notre lettre du 15 août 2001 :

« Nous demandons officiellement à collaborer avec Votre Sainteté à la propagation de la Foi et de la doctrine catholique, dans le zèle pour l’honneur de la Sainte Église — “Signum levatum in nationes” — et dans le combat contre les erreurs et les hérésies qui tentent de détruire la Barque de Pierre, inutilement puisque “les portes de l’Enfer ne prévaudront pas contre Elle” ».

Et le Saint-Père, avec bonté, a accueilli notre offre :

« Nous y avons lu avec une grande joie pastorale que vous désirez “collaborer avec le successeur de saint Pierre dans l’œuvre de la propagation de la foi et de la doctrine catholique, pour l’honneur de la Sainte Église — “Signum levatum in nationes (Is 11,12)” — ; et dans le combat contre ceux qui s’efforcent de détruire la barque de Pierre, inutilement puisque les portes de l‘Enfer ne prévaudront pas contre elle (Mt 16,18)." »d

Ainsi, on ne peut jamais utiliser l’adhésion à la liturgie traditionnelle dans un esprit de contestation envers l’autorité de l’Église, ou de rupture de communion. Il faut conserver l’adhésion à la tradition liturgique sans pécher contre la saine doctrine du Magistère et sans jamais offenser la communion ecclésiale. Comme je l’ai écrit dans mon premier message pastoral, le 5 janvier 2003 :

« Conservons la Tradition et la Liturgie traditionnelle, en union avec la Hiérarchie et le Magistère vivant de l’Église, et non en opposition avec eux ».

De son côté, le pape Jean‑Paul II constatait en 1988 :

« La diversité liturgique peut être source d’enrichissement, elle peut aussi provoquer des tensions, des incompréhensions réciproques et même des schismes. Dans ce domaine, il est clair que la diversité ne doit pas nuire à l’unité. Elle ne peut s’exprimer que dans la fidélité à la foi commune, […] et à la communion hiérarchique. »[58]

Toutes les personnes autorisées, théologiens et liturgistes, cités plus haut, comme celui qui était alors le cardinal Ratzinger, notre pape actuel, le cardinal Ferdinando Antonelli, qui fut secrétaire de la Commission conciliaire de liturgie, et le cardinal Édouard Gagnon, qui eurent certaines réserves quant à la manière dont fut faite la réforme liturgique post-conciliaire, spécialement dans son application pratique, demeurèrent toujours à l’intérieur des limites permises par la doctrine catholique, dogmatique et canonique, et dans le respect envers le Magistère de l’Église.

Ces limites, imposées aux réserves et critiques par la théologie catholique, nous empêchent, par exemple, de dire que le Novus Ordo Missae, la Messe promulguée par le Saint-Père Paul VI, serait hétérodoxe ou non catholique. Sa promulgation[59] (forme, au sens philosophique) est la garantie contre toute irrégularité doctrinale qui aurait pu se produire dans sa confection (matière), même s’il est vrai qu’elle peut être améliorée dans son expression liturgique. Et c’est sa promulgation officielle, et non son mode de confection, qui en fait un document du Magistère de l’Église.[60]

Qui considérerait la Nouvelle Messe, en elle-même, comme invalide, sacrilège, hétérodoxe ou non catholique, peccamineuse, et donc illégitime, devrait en toute logique tirer les conséquences théologiques de cette position et l’appliquer au pape et à tout l’épiscopat résidentiel du monde, c’est-à-dire, à toute l’Église enseignante : en d’autres termes, soutenir que l’Église a officiellement promulgué, conserve depuis des décennies et offre à Dieu tous les jours un culte illégitime et peccamineux — proposition réprouvée par le Magistère (cf. notes 78 et 79) — et que, par conséquent, les portes de l’Enfer ont prévalu contre elle, ce qui serait une hérésie. Ou alors, il serait en train d’adopter le principe sectaire que lui seul et ceux qui pensent comme lui sont l’Église et que en dehors d’eux il n’y a pas de salut, ce qui serait une autre hérésie. Ces positions ne peuvent pas être acceptées par un catholique, ni en théorie, ni dans la pratique.

Il résulte donc avec clarté de tout ce que nous avons enseigné jusqu’ici, que, bien que nous ayons comme rite propre de notre Administration apostolique la Messe dans le rite romain traditionnel, la participation d’un fidèle, ou la concélébration de l’un de nos prêtres ou de son Évêque, à une Messe dans le rite promulgué officiellement par la hiérarchie de l’Église, déterminé par elle comme légitime, et adopté par elle, comme c’est le cas de la Messe célébrée dans le rite romain actuel, ne peut pas être considérée comme étant une action mauvaise ou passible de la moindre critique. Et cela ne signifie pas la perte de notre identité liturgique, mais bien une démonstration occasionnelle et opportune de notre communion avec les autres Évêques, prêtres et fidèles, malgré la différence de rite.

On ne peut pas nier le fait objectif que de nos jours le rite de Paul VI est le rite officiel de l’Église latine, célébré par le pape et par tout l’Épiscopat catholique. Personne ne peut être catholique en maintenant une attitude de refus de communion avec le pape et l’Épiscopat catholique. De fait, l’Église définit comme schismatique celui qui refuse de se soumettre au Pontife Romain, ou de rester en communion avec les autres membres de l’Église qui lui sont soumis (canon 751). Or, refuser continuellement et explicitement de participer à toute Messe dans le rite célébré par le pape et par tous les Évêques de l’Église, pour la raison qu’on juge que ce rite, en lui-même, est incompatible avec la foi ou peccamineux, représente un refus formel de communion avec le pape et avec l’Épiscopat catholique.

Le fait d’avoir, dans notre Administration apostolique, le rite de saint Pie V comme rite propre et exclusif, conformément à ce que nous a concédé le Saint-Siège, ne signifie pas que l’on ne peut jamais participer à la Messe dans sa forme actuelle, en la considérant, dans la pratique, comme si elle était invalide ou illicite, c’est-à-dire peccamineuse.

En outre, cela ne veut absolument pas signifier que nous sommes en train d’approuver les abus et profanations qui se produisent avec une certaine fréquence dans les Messes célébrées dans le nouveau rite. Nous sommes en train de parler du rite en latin comme il fut promulgué par le Saint-Père Paul VI, et approuvé par ses successeurs. Et une éventuelle participation dans les messes du nouveau rite ne signifie pas une approbation de quelconques abus (dont le pape s’est plaint), et qui ici ou là peuvent se produire.

Nous ne sommes pas en train d’envoyer simplement les fidèles à la nouvelle Messe. Si nous luttons tellement pour avoir la faculté de posséder et de conserver le rite traditionnel, comme nous l’a concédé le Saint-Père avec la création de l’Administration apostolique, c’est précisément pour que les prêtres et les fidèles aient toujours un accès légitime et tranquille à ce trésor liturgique de l’Église. On peut en outre, pour les motifs légitimes que nous indiquons ici, participer à la seule Messe traditionnelle et la célébrer exclusivement, comme nous le faisons dans notre Administration apostolique, par faculté concédée par le Saint-Siège.

Ce n’était pas le propos spécifique de la présente Orientation pastorale d’analyser et de passer complètement au crible tous les aspects de l’actuelle réforme liturgique. Nous sommes plutôt en train de défendre le Magistère et l’indéfectibilité de l’Église, laquelle continue de façon pérenne, même avec les désastres actuels, auxquels a pu donner occasion la réforme liturgique.

Notre propos, assurément, est de combattre ici l’erreur doctrinale de ceux qui considèrent la nouvelle Messe, telle qu’elle fut promulguée officiellement par la hiérarchie de l’Église, comme étant peccamineuse, et, par conséquent, qui pensent impossible qu’on y assiste sans commettre un péché, attaquant violemment ceux qui, en des circonstances déterminées, y participent, comme s’ils avaient commis une offense à Dieu.

Nous avons déjà rapporté plus haut que, conformément à ce que statue le Droit canonique, il relève exclusivement de l’autorité de l’Église de déterminer ce qui est valide et licite dans la célébration, l’administration et la réception des Sacrements, vu qu’ils sont les mêmes pour toute l’Église et appartiennent au dépôt divin (cf. CDC, can. 841[61]). Ce serait donc usurper la place de l’autorité suprême de l’Église de dire que la Messe dans le rite romain actuel est invalide ou illicite, ou, comme certains le disent, ne permet pas d’accomplir le précepte dominical.

Il y en a malheureusement certains qui pensent que l’unique motif pour célébrer la Messe ou y assister dans le rite traditionnel est que la Nouvelle Messe est invalide ou hétérodoxe et, par conséquent, illicite. Or, les motifs très sérieux et graves que nous avons fournis plus haut sont suffisants pour notre adhésion à la Messe traditionnelle telle que nous l’a concédée le Saint-Siège, et dispensent de recourir au précédent argument qui, d’ailleurs serait faux et injuste. Et c’est seulement la vérité et la justice qui doivent être notre norme dans cette lutte. C’est seulement la vérité qui nous rendra libres (Jn 8,32). Dans le cas contraire, nous serions en train de frapper dans le vide (1 Cor 9,26).

C’est à bien juste titre qu’un écrivain catholique d’actualité, Michael Davies, grand défenseur de la Messe traditionnelle et de grand renom dans les milieux traditionalistes écrivait ce qui suit :

« À l’intérieur du mouvement traditionaliste, certains ont pré­tendu que la Nouvelle Messe n’avait pas été promulguée en for­me selon les normes reconnues de la loi canonique, que ce n’est pas une Messe officielle de l’Église catholique, qu’en y as­sistant, on n’accomplit pas le précepte dominical, qu’elle est mau­vaise, néfaste ou même intrinsèquement mauvaise. Vu que le pape Paul VI était un vrai pape, et que le Missel de 1970 constitue ce qui est connu sous le nom de loi disciplinaire uni­ver­selle, de telles allégations sont absolument indéfendables à la lumière de la doctrine de l’indéfectibilité de l’Église. Aucun vrai pape ne pourrait imposer ou même autoriser pour un usage universel un rite liturgique qui serait en lui-même dommageable pour les fidèles. Les allégations complètement intenables auxquelles je me suis référé sont l’illustration d’une attitude troublante qui prévaut dans certains secteurs du mouvement traditionaliste, où le fait d’attaquer le Missel de 1970 semble être plus prioritaire que de combattre en faveur de celui de 1570. Il n’existe absolument aucun espoir que le Vatican reconnaisse des prêtres qui soutiennent de telles hypothèses indéfendables, ce qui ne semble pas troubler ceux-ci. Et ils ne semblent pas troublés non plus par le fait que ces théories ne sont approuvées par aucun théologien compétent extérieur au mouvement traditionaliste, ni par le fait que le consensus d’opinion à l’intérieur du mouvement rejette celles-ci. Certains de ces prêtres sans aucun doute s’imaginent qu’on ne peut pas être un vrai traditionaliste sans accepter que la Nouvelle Messe est mauvaise. La documentation qui suit devrait être suffisante pour prouver que ce sont en réalité ceux qui adoptent cette position qui ne peuvent pas prétendre être des catholiques traditionnels, vu que maintenir qu’un rite sacramentel approuvé par le Pontife Romain est mauvais est totalement incompatible avec l’enseignement traditionnel de l’Église ».[62]

§ 5. Un très grave avertissement

Je fais ici une petite pause pour émettre un avertissement sérieux et grave. Beaucoup de catholiques pensent, de manière erronée, parfois avec la crainte de tomber dans le libéralisme ou le progressisme, qu’il est toujours meilleur de prendre la position la plus dure et la plus radicale, soupçonnant tout et tout le monde. Ce n’est cependant pas toujours la position la plus dure et la plus radicale qui est la vraie, la meilleure, la plus certaine et la plus efficace.

Pour prendre une comparaison de type philosophique, en logique, on apprend que pour combattre une proposition déterminée, il faut lui opposer la proposition contradictoire et non la proposition contraire. Apparemment, la contraire nie davantage, elle est plus radicale. Pourtant, elle peut être aussi fausse que celle qu’elle cherche à combattre, en effet, elle nie de trop. Alors que la proposition contradictoire, bien qu’elle paraisse ne pas être autant opposée, est plus efficace, vu qu’elle nie juste ce qui doit être nié et pas plus que ce qui est nécessaire.

L’abbé Didier Bonneterre, de la Fraternité Saint-Pie X, dans l’avant-propos de son livre Le Mouvement liturgique,[63] émet un grave avertissement :

« Nous voudrions aussi mettre nos lecteurs en garde contre une certaine mode intellectuelle qui se répand comme une peste dans nos milieux réputés “traditionalistes” : l’esprit de surenchère dans l’opinion la plus extrême qui fait rechercher, à tout prix, la position la plus “dure”, comme si la vérité d’une proposition souffrait d’être influencée par un parti pris volontariste d’anti-quoi-que-ce-soit ».

Souvent la position radicale, qui généralise, est aussi plus commode que celle qui fait les distinctions requises. Mais elle n’en est pas davantage d’accord avec la vérité, la justice et l’honnêteté, qui doivent régler notre pensée, notre manière de procéder et notre combat pour le bien, comme nous l’avons dit plus haut.

Beaucoup de ceux qui ont lutté pour la tradition liturgique et doctrinale de l’Église, pour n’avoir pas respecté ces limites requises, ont abouti à tomber dans le schisme et dans l’hérésie. Beaucoup de ceux qui considéraient la Nouvelle Messe, en elle-même, comme invalide ou hérétique, sacrilège, hétérodoxe, non catholique, peccamineuse, et, par conséquent, illégitime, ont fini dans la réalité par tirer logiquement les conséquences théologiques de cette position et l’ont appliquée au pape et à tout l’Épiscopat résidentiel du monde, c’est-à-dire à toute l’Église enseignante : ou, en d’autres termes, ils eurent à soutenir que l’Église a promulgué officiellement, a conservé depuis des décennies et offre tous les jours à Dieu un culte illégitime et peccamineux. De là, logiquement, ils conclurent que l’Église hiérarchique telle qu’elle existe aujourd’hui n’est plus l’Église catholique, puisqu’elle est tombée officiellement dans l’erreur et qu’elle ne subsiste plus que dans un petit groupe, dont évidemment ils font partie. À partir de cette argumentation, ex absurdo, c’est-à-dire à partir de l’absurdité où mènent ces idées, on doit conclure à leur opposé : l’Église ne peut pas adopter (a priori) et n’a pas (a posteriori) adopté une Messe invalide ou hérétique, sacrilège, hétérodoxe, non catholique, peccamineuse, et donc, illégitime.

Il faut noter que la majorité des critiques radicales contre le Novus Ordo provient de personnes inclinées au sédévacantisme.[64] Beaucoup d’entre eux ensuite ont fini par adhérer publiquement à cette position, sinon à un schisme formel.[65]

Moi-même j’ai connu, et je connais certains de ceux qui combattaient avec nous, et qui, pour être tombés dans ce radicalisme, ont perdu complètement la foi dans l’Église,[66] d’autres ont participé à l’élection d’un faux pape et d’autres encore ont apostasié complètement la foi catholique,[67] ou sont tombés dans le schisme formel et dans l’hérésie. Ils pensent garder la tradition, mais en dehors de l’Église hiérarchique.[68]

Elle est pour eux la grave admonestation du Saint-Père Pie XII :

« Ceux-là se trompent donc dangereusement qui croient pouvoir s’attacher au Christ Tête de l’Église sans adhérer fidèlement à son Vicaire sur la terre. Car en supprimant ce Chef visible et en brisant les liens visibles de l’unité, ils obscurcissent et déforment le Corps mystique du Rédempteur au point qu’il ne puisse plus être reconnu ni trouvé par les hommes en quête du port du salut éternel ».[69]

Aucun hérétique ou schismatique d’aucune époque n’a jamais pensé qu’il se trompait. Tous pensaient que c’était l’Église qui se trompait et eux qui avaient raison. Et ils se vantaient d’avoir conservé la saine doctrine. Pour cette raison, pour que personne ne se fasse illusion en pensant avoir raison pour avoir préservé de bonnes choses traditionnelles, mais en dehors de la communion avec l’Église hiérarchique, rappelons les propos de saint Augustin :

« Personne ne peut trouver le salut sinon en étant dans l’Église catholique. En dehors de l’Église, on peut avoir tout, sauf le salut. On peut avoir l’honneur, on peut avoir les sacrements, on peut chanter l’alléluia, on peut répondre Amen, on peut avoir la foi au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et prier celui-ci aussi, mais jamais on ne peut, sauf dans l’Église catholique, trouver le salut ».[70]

C’est contre ce très grave péril et risque d’hérésie et de schisme que je désire alerter tous ceux qui luttent en faveur de la tradition catholique.

Le Magistère de l’Église nous rappelle la nécessité de la communion avec la hiérarchie pour qu’il y ait légitime célébration de la Sainte Messe. Le pape Jean‑Paul II nous enseigne cela dans son encyclique Ecclesia de Eucharistia :

« C’est seulement dans ce contexte qu’il y a la célébration légitime de l’Eucharistie et la véritable participation à ce Sacrement. »[71]

Saint Ignace d’Antioche dit :

« Que cette eucharistie seule soit regardée comme légitime, qui se fait sous la présidence de l’évêque ou de celui qu’il en aura chargé. »[72]

Je cite à nouveau l’éminent écrivain catholique traditionaliste Michael Davies :

« On peut paraphraser le pape Paul VI et déplorer que la fumée de Satan ait pénétré le mouvement traditionaliste pour étrangler sa défense de l’orthodoxie. Quand nous nous rappelons que nous avons affaire à un adversaire surnaturel d’une énorme ruse et intelligence, nous devons être bien sûrs qu’il est prêt à faire tout ce qui serait en son pouvoir pour diviser et détruire ces groupes qui ont été très efficaces pour s’opposer à la destruction de l’Église. Quels moyens plus efficaces pourrait-il employer que de les tenter de faire schisme ? En dehors de l’Église, leur défense de la Tradition serait privée d’effet. Une fois que de telles personnes ont abandonné l’Église, bien que, comme tous les hérétiques et schismatiques elles prétendent constituer la vraie Église, il apparaît que seul un miracle peut les amener à prendre conscience de leur vraie situation. L’orgueil qui a amené la chute de Satan est évident ici. Il y a beaucoup de satisfaction attachée au fait de faire partie des élus, ce qui, comme le Père van der Ploeg remarque dans sa préface,[73] “est toujours la caractéristique la plus voyante d’une secte” ».[74]

Dom Antônio de Castro Mayer, s’exprimant au sujet des groupes traditionalistes, nous a aussi prévenus contre cet esprit sectaire exclusiviste :

« La secte est exclusiviste : ses membres seront les élus, ils savent que peu nombreux sont les élus, et ce petit nombre, c’est eux… Ils sont les dépositaires de la Vérité. Sans eux, point de salut » (Monitor Campista des 13 avril 1983 et 22 décembre 1985).

Concernant ceux qui critiquent et attaquent la position de notre Administration apostolique et de son Évêque, le même Michael Davies m’écrivit, le 2 mai 2004 :

« Il est très triste qu’il y en ait tant qui affirment être traditionalistes qui sont davantage intéressés à attaquer d’autres membres de notre mouvement que de lutter pour la tradition. L’apostolat unique et courageux de Votre Excellence est une inspiration pour les catholiques traditionalistes dans le monde entier… Je suis sûr que tous ceux qui aiment la tradition l’honorent et l’admirent, et apprécient l’immense contribution que V. Exc. a apporté à la cause que nous aimons… Ceux qui répandent ces méchantes rumeurs sont seulement une minorité insignifiante et malicieuse qui a davantage besoin de nos prières que de notre condamnation ».

§ 6. Pour en revenir à la question de
la légitimité de la Nouvelle Messe

Les choses étant ainsi, une fois que la nouvelle Liturgie de la Messe fut promulguée officiellement et solennellement par le Siège de Pierre comme une loi liturgique universelle de l’Église, et adoptée par l’Épiscopat mondial en communion avec le pape pendant quasi quatre décennies,[75] — et il s’agit d’une matière liée à la foi —,[76] il est impossible que cette liturgie, en elle-même, soit hérétique, non catholique, illicite, peccamineuse ou même préjudiciable à la foi. Elle peut l’être en vertu de circonstances extérieures qui malheureusement se produisent souvent,[77] mais pas en elle-même, telle qu’elle fut promulguée.

Affirmer le contraire, c’est encourir la réprobation promulguée déjà par le Magistère de l’Église, vu que c’est une proposition censurée de dire que l’Église, régie par l’Esprit de Dieu, puisse promulguer une discipline dangereuse ou préjudiciable aux âmes (cf. le pape Pie VI,[78] et le pape Grégoire XVI[79]). Au contraire, les lois universelles de l’Église sont très saintes (cf. le pape Pie XII[80]).

L’unanimité des théologiens (voir plus loin § 7) nous enseigne l’infaillibilité ou inerrance de l’Église dans ses lois universelles, parmi lesquelles se situent les lois liturgiques universelles. Ça ne veut pas dire qu’elles ne peuvent pas être modifiées ou améliorées. Cela signifie qu’elles ne peuvent pas contenir d’erreurs contre la foi ou la morale, ou être préjudiciables aux âmes. Le concile de Trente, par exemple, proclama l’inerrance de la Vulgate, traduction faite par saint Jérôme. Cela ne veut pas dire qu’elle est parfaite ni qu’elle ne peut pas être corrigée ou améliorée, comme de fait elle le fut en divers passages par l’autorité de l’Église. La déclaration infaillible du concile de Trente signifie qu’elle ne contient pas d’erreurs doctrinales.

Les interprétations données par les modernistes et les déclarations faites par les protestants dès le début de la réforme liturgique ont impressionné le monde catholique et beaucoup pensèrent qu’il s’agissait là de l’interprétation à donner au nouveau rituel de la Messe. Mais, tout au contraire, le sens des actions et expressions liturgiques est donné par le Magistère de l’Église.[81] Et, grâce à Dieu, diverses interprétations postérieures du Magistère ont corrigé toute ambiguïté qui pouvait exister, et donnèrent aux textes et aux rituels leur véritable sens, le sens catholique, et non le sens moderniste ou protestant.[82]

Quelqu’un pourra objecter que, même avec beaucoup d’éclaircissements postérieurs du Magistère, le texte du Nouvel Ordo est resté le même. Mais, exactement, ce sont les élucidations qui précisent le sens. Comme cela se produit avec les Saintes Écritures, dont le texte très souvent se prête à des interprétations hérétiques, mais qui a un sens correct donné par le Magistère, lequel le fournit sans modifier le texte. Autrement dit, c’est exactement la même différence qu’entre la Bible catholique et la Bible protestante, pour les mêmes textes : les notes explicatives avec le sens donné par le Magistère.[83]

§ 7. Des théologiens traditionnels approuvés confirment ce point

La doctrine sur l’infaillibilité de la discipline liturgique de l’Église est enseignée unanimement par les théologiens catholiques les plus approuvés, sans même l’exception d’un seul.

Et il est bon de souligner que le consensus moralement unanime des théologiens sur un point spécifique de doctrine représente une opinion certaine (theologice certum), et est un signe certain de la Divine Tradition.[84] Citons-en seulement quelques-uns.

Le chanoine Hervé :

L’Église « cesserait d’être sainte » et par conséquent « cesserait d’être la vraie Église du Christ », si « elle prescrivait en vertu de sa suprême autorité à tous les fidèles quelque chose de contraire à la foi ou aux bonnes mœurs ».[85]

Le Père Haegy, liturgiste :

« Les actes de la liturgie ont une valeur dogmatique ; ils sont l’expression du culte de Dieu dans l’Église. Or, la manifestation extérieure du culte a une relation intime avec la foi. Pour être raisonnable, le culte ne peut cesser d’être conforme à la foi ».[86]

Les célèbres canonistes Wernz et Vidal :

« Les Pontifes Romains sont infaillibles quand ils portent des lois universelles sur la discipline ecclésiastique, de manière que jamais ils n’établissent quoi que ce soit de contraire à la foi et aux bonnes mœurs, même s’ils n’atteignent pas le degré suprême de la prudence ».[87]

Monsieur Tanquerey, prêtre de Saint-Sulpice :

« Cette infaillibilité consiste en ce que l’Église, par un jugement doctrinal, n’établira jamais une loi universelle qui soit opposée à la foi, aux mœurs et au salut des âmes. Comme c’est évident, ce type d’infaillibilité est bien compatible avec la mutabilité des lois disciplinaires ; et se distingue de leur opportunité : car [Néanmoins] nulle part n’est promis à l’Église le degré suprême de la prudence en vue de porter les lois les meilleures pour toutes les circonstances de temps et de lieu ».[88]

Hermann :

« L’Église est infaillible dans sa discipline générale. Par l’expression “discipline générale” on entend les lois et les pratiques qui relèvent de l’organisation externe de toute l’Église. C’est-à-dire relativement aux éléments tels que le culte externe, la liturgie et les rubriques ou l’administration des sacrements […]. Si elle avait la capacité de prescrire ou d’organiser ou de tolérer dans sa discipline quelque chose de contraire à la foi ou aux mœurs, ou quelque chose de préjudiciable à l’Église ou de nuisible pour les fidèles, elle défaillirait dans sa mission divine, ce qui serait impossible ».[89]

Enfin le R.P. van der Ploeg, O.P. :

« La doctrine de l’indéfectibilité de l’Église est une conséquence de la promesse de Notre Seigneur à saint Pierre : “Sur cette pierre je bâtirai mon Église et les portes de l’Enfer ne prévaudront pas contre elle” (Mt 16, 18). Dans le passé, ces mots étaient familiers à tout Catholique et étaient une source légitime de fierté pour lui. Il savait qu’il appartenait à une institution “indéfectible” d’origine divine, alors que toutes celles qui ont été instituées par des hommes ont fini par atteindre un stade de décadence et de mort. Certains catholiques, pendant les tribulations présentes se sont convaincus que le Siège de Pierre est maintenant vacant. L’“occupant” du Siège, comme ils l’appellent, ne correspond pas à ce qu’ils attendent d’un pape. Certains prétendent aussi que la Messe et les sacrements ont été détruits par les plus récents “occupants” du Siège de saint Pierre. Si ces personnes avaient raison, cela voudrait dire que Notre Seigneur Jésus-Christ a abandonné Son Église […] Mais c’est là quelque chose qui ne peut jamais se produire et qui contredirait la promesse solennelle de Notre Seigneur citée plus haut. Il est impossible aussi que Notre Seigneur abandonne son Église car cela frustrerait le but même pour lequel l’Église a été fondée, à savoir d’être l’instrument de Dieu pour le salut de nos âmes. Si Notre Seigneur abandonnait son Église, les paroles : “Celui qui vous écoute m’écoute” seraient vraies seulement pour un groupe excessivement réduit de personnes, qui se considéreraient comme les élus, ce qui est toujours la caractéristique le plus évidente d’une secte. Notre Seigneur n’a pas fondé une secte, mais l’Église catholique, c’est-à-dire universelle. »[90]

§ 8. L’opinion finale
des cardinaux Ottaviani et Antonelli

Le cardinal Ottaviani, bien qu’ayant présenté au pape ses réserves au sujet du Nouvel Ordo Missae, célébrait la messe dans le rite nouveau, et ce, jusqu’à sa mort. De même les Cardinaux Ratzinger, Antonelli et Gagnon, cités plus haut.

Quant à l’intervention du cardinal Ottaviani, souvent citée, il faut noter que sa critique (lettre du 5 octobre 1969) fut faite avant la version finale corrigée de la Messe du nouveau rite. Pour prendre en compte la lettre du cardinal Ottaviani et y répondre, le pape Paul VI consacra deux audiences générales au nouveau rite de la Messe. Après celles-ci, le cardinal Ottaviani écrivit :

« Je me suis profondément réjoui à la lecture des Discours du Saint-Père sur les questions du Nouvel Ordo Missae, et surtout de ses précisions doctrinales contenues dans les Discours aux audiences publiques du 19 et du 26 novembre : après quoi, je crois, personne ne peut plus sincèrement se scandaliser. Pour le reste il faudra faire une œuvre prudente et intelligente de catéchèse afin d’enlever quelques perplexités légitimes que le texte peut susciter. »

Et, dans la même lettre, il se plaint :

« De ma part [= pour ma part], je regrette seulement que l’on ait abusé de mon nom dans un sens que je ne désirais pas, par la publication d’une lettre que j’avais adressée au Saint-Père sans autoriser personne à la publier ».[91]

Ultérieurement, le cardinal Ottaviani publia aussi une autre déclaration intéressante :

« La beauté de l’Église resplendit aussi dans la variété des rites liturgiques qui enrichissent son culte divin quand ils sont légitimes et se conforment à la foi. C’est précisément la légitimité de leur origine qui les protège et les garde contre l’infiltration d’erreurs […]. La pureté et l’unité de la foi sont de cette manière aussi soutenues par le Magistère suprême du pape et par les lois liturgiques ».[92]

Le cardinal Antonelli, dont nous avons publié plus haut les critiques sur la manière dont fut élaborée la réforme liturgique (cf. note 43), écrit dans le même livre :

« En substance, mes impressions sur la réforme liturgique sont bonnes. Le nouvel Ordo Missae, entré en vigueur le 30 novembre 1969, contient beaucoup d’éléments positifs. Il pouvait être perfectionné, comme toute chose, mais la substance est bonne. L’Institutio Generalis Missalis Romani est plus imparfaite. Toutefois, la substance est bonne. Avec le temps on pourra rééquilibrer certaines dispositions ».[93]

§ 9. Attitude et exemple de
Dom Antônio de Castro Mayer

Après le concile, de 1965 à 1967, furent introduites certaines modifications dans la liturgie de la Messe, que Dom Antônio accepta docilement et adopta dans le diocèse, y compris la concélébration avec les prêtres à la Messe chrismale du Jeudi Saint.

En 1969, quoique en concédant un temps de vacation de la loi, le pape Paul VI promulgua un Nouvel Ordo Missae, qui n’a pas manqué de causer de la perplexité chez beaucoup de catholiques, y compris des personnalités importantes, comme certains cardinaux de la Curie Romaine, que nous citons plus haut, spécialement à cause des abus qui se commettaient dans le domaine liturgique.

Mû par des perplexités similaires, Dom Antônio, avant que le Nouvel Ordo entrât en vigueur, écrivit au pape Paul VI, « suppliant humblement et respectueusement Votre Sainteté de daigner nous autoriser à continuer d’user de l’Ordo Missae de saint Pie V ».[94]

Mais, quand il présenta à nouveau au Souverain Pontife sa pensée concernant le nouveau rite de la Messe, sa fidélité et son respect — caractéristiques de sa vie — pour la personne du Saint-Père le pape et pour le Magistère de l’Église, lui firent préciser :

« Il sera superflu d’ajouter que, dans cette circonstance, comme déjà en d’autres situations de ma vie, j’accomplirai, dans toute la mesure prescrite par les lois de l’Église, le devoir sacré de l’obéissance. Et, dans cet esprit, avec un cœur ardemment filial et tout dévoué envers le pape et la Sainte Église, j’accueillerai toute parole de Votre Sainteté sur cette question ».[95]

Les véritables esprit et pensée de Dom Antônio ne peuvent pas être connus par une phase unique de sa vie, par une de ses phrases, par une lettre ou un article pris isolément, mais par tout l’ensemble de sa vie, de ses écrits, de ses propos et de ses attitudes. Sinon, nous courons le risque de les fausser ou de les interpréter de façon inadéquate.

Ainsi, bien qu’ayant envoyé au pape ses réserves et ses critiques concernant le Nouvel Ordo de 1969, Dom Antônio, dans sa manière d’agir, ne considérait pas la nouvelle liturgie de la messe, en elle-même, comme hétérodoxe ou peccamineuse, puisque, jusqu’en 1981, comme Évêque diocésain, il garda dans leurs paroisses les curés qui s’étaient mis à la célébrer, il nomma curés des prêtres qui la célébraient, il visitait cordialement ces prêtres dans leurs paroisses, où il alla jusqu’à célébrer la Messe versus populum, il assista à la nouvelle liturgie en de nombreuses occasions, il ne fit jamais de remontrance à ces prêtres pour le fait de la célébrer, il corrigeait ceux qui disaient qu’il ne s’agissait pas d’une messe catholique, et il institua des ministres extraordinaires de la communion pour y servir.

Après la promulgation de la nouvelle messe (3 avril 1969), Dom Antônio écrivit une lettre pastorale sur le Sacrifice de la Messe (12 septembre 1969), sans toucher à la question de la nouvelle messe ; il interdit de critiquer celle-ci publiquement et de traiter de cette question en public et ne voulut pas qu’on publiât ses lettres au pape sur la Nouvelle Messe. Dom Antônio préférait le combat positif, la conservation de le Messe traditionnelle, et l’exaltation de ses valeurs, aux attaques envers la nouvelle Messe, qui pouvaient atteindre l’autorité suprême de l’Église.

D’esprit droit et de conscience délicate, Dom Antônio n’aurait pas fait ou permis tout cela, s’il avait considéré la nouvelle liturgie de la Messe, en elle-même, comme offensante envers Dieu et telle qu’on ne pouvait en aucun cas y assister ou la célébrer.[96]


Deuxième conséquence : Application de ces principes théologiques au concile Vatican II

§ 1. La grande et grave crise post-conciliaire

Le concile Vatican II survint en une période troublée de grande crise dans l’Église et sa réalisation servit d’occasion et de prétexte pour de grandes erreurs, propagées en son nom,[97] engendrant la confusion entre ce qui était réellement du concile et ce qui était diffusé sous son nom, ce qui a poussé de nombreuses personnes à faire une analyse négative de celui-ci.

Le pape Paul VI se lamentait en ces termes : « On croyait qu’après le concile le soleil aurait brillé sur l’histoire de l’Église. Mais au lieu de soleil, nous avons eu les nuages, la tempête, les ténèbres, la recherche, l’incertitude » (Homélie du 29 juin 1972e).

Celui qui était alors le cardinal Ratzinger, notre pape d’aujourd’hui, dans une interview à L’Osservatore Romano, affirma, en 1984 :

« Les résultats qui ont suivi le concile semblent cruellement opposés à l’attente de tous, à commencer par celle du pape Jean XXIII, puis de Paul VI… Il est incontestable que les dix dernières années ont été décidément défavorables pour l’Église catholique ».[98]

Et le pape actuel a aussi remarqué :

« Le cardinal Julius Doepfner disait que l’Église de l’après-concile est un grand chantier, mais un esprit critique a ajouté que c’est un chantier où le projet a été perdu et où chacun continue à construire selon son goût. Le résultat est évident ».[99]

Néanmoins, il ajoute, avec la même clarté :

« dans ses expressions officielles, dans ses documents authentiques, Vatican II ne peut pas être considéré comme responsable de cette évolution, laquelle, au contraire contredit radicalement tant la lettre que l’esprit des Pères conciliaires ».[100]

Cet aspect négatif fut causé surtout par le fameux et pernicieux « esprit du concile » que le cardinal Ratzinger appelait « anti-esprit ».[101] Et cet « esprit du concile » impressionna tellement que jusqu’à aujourd’hui, quand on veut expliquer quelque chose sur le concile, certains pensent que l’on est en train de parler de celui-ci interprété à la façon moderniste, et comme si l’on était en train d’approuver toutes les erreurs qui en dérivent.

L’objectif spécifique de notre présente Orientation pastorale n’est pas de défendre le concile, mais plus exactement de sauver l’indéfectibilité de l’Église et de son Magistère, énonçant les distinctions voulues, et éclairer nos catholiques pour qu’ils ne se trompent pas de cible : en attaquant les erreurs on risque de frapper en même temps l’Église même et son Magistère.

§ 2. Valeur des documents du
concile Vatican II

On ne peut pas oublier que le concile Vatican II fut un vrai concile de l’Église catholique, légitimement convoqué et présidé par le Bienheureux pape Jean XXIII[102] et continué par le pape Paul VI, avec la participation d’évêques du monde entier.

Le fait que le concile Vatican II a été pastoral n’enlève rien à son autorité de magistère, comme l’a bien expliqué le pape Paul VI :

« étant don­né le caractère pastoral du concile, il a évi­té de prononcer d’une ma­nière extraor­di­nai­re des dogmes compor­tant la note d’in­fail­li­bilité, mais il a muni ses enseignements de l’au­torité du magistère ordinaire suprême ; ce ma­gistère ordi­naire et manifestement au­then­ti­que doit être accueilli docilement et sin­cè­re­ment par tous les fidèles, selon l’esprit du concile concernant la nature et les buts de cha­que document. »[103]

Rappelons aussi ce que j’avais dit plus haut sur l’as­sen­ti­ment au Magistère même non infaillible.f

Relativement aux conciles, Bossuet (et, avec lui, la théologie catholique), distingue entre l’histoire d’un concile et son autorité doctrinale.g Son histoire est souvent pleine de discussions et de problèmes. Mais, une fois ses décisions promulguées et approuvées par le pape, il revêt l’autorité du magistère, et le côté humain de son histoire s’efface devant la valeur de ses décrets.

Or, tous les documents du concile Vatican II se terminent avec l’acte solennel de promulgation formulé comme suit :

« Tout l’ensemble et chacun des points qui ont été édictés dans cette (Constitution dogmatique ou pastorale, ce décret ou cette déclaration) ont plu aux Pères du concile. Et Nous, en vertu du pouvoir apostolique que Nous tenons du Christ, en union avec les vénérables Pères, Nous les approuvons, arrêtons et décrétons dans le Saint-Esprit, et Nous ordonnons que ce qui a été ainsi établi en concile soit promulgué pour la gloire de Dieu. Rome, … Moi, PAUL, évêque de l’Église catholique [suivent les signatures des Pères] ».

Dans son instruction pastorale sur l’Église, traitant des documents du concile Vatican II, Dom Antônio de Castro Mayer écrivait :

« … Dans le cas des décisions conciliaires approuvées et promulguées par le pape Paul VI, toute une série de publications catholiques a osé faire des restrictions quant à la position du pape, alors que précisément, conformément au dogme catholique, il approuva les décisions des Pères conciliaires de la manière que, assisté par le Saint-Esprit, il jugea devoir le faire ».[104]

§ 3. L’interprétation des textes
du concile Vatican II :
l’interprétation moderniste et
l’interprétation authentique par le magistère

Le concile doit être compris et interprété selon une herméneutique de continuité et non de rupture avec le passé, comme l’a bien expliqué le pape Benoît XVI.[105] Et c’est ce qu’entendait le pape Jean‑Paul II quand il parlait de « l’enseignement intégral du concile », « c’est-à-dire entendu à la lumière de la sainte Tradition et sur la base du Magistère constant de l’Église ».[106]

C’est comme la Parole de Dieu écrite, la Sainte Écriture, qui a besoin d’être lue à la lumière de la Tradition et du Magistère de l’Église. Personne ne va dire que la Bible est mauvaise parce qu’elle a besoin d’une telle lumière pour qu’on la comprenne et qu’on évite ainsi les interprétations des hérétiques.

Le pape actuel, quand il était cardinal, avait déjà expliqué :

« Premièrement : il est impossible [pour un catholique] de prendre position “en faveur” de Vatican II et “contre” le concile de Trente et Vatican I. Quiconque accepte Vatican II tel qu’il s’est lui-même clairement exprimé et compris, affirme en même temps toute la tradition ininterrompue de l’Église catholique, et en particulier les deux conciles précédents. [Ceci vaut pour ce qu’on appelle le “progressisme” au moins dans ses formes extrêmes.] Deuxièmement : de la même manière, il est impossible de se ranger “en faveur” du concile de Trente et de Vatican I et “contre” Vatican II. Quiconque nie Vatican II nie l’autorité qui soutient les deux autres conciles et l’abolit dans son principe même. [Ceci vaut pour ce qu’on appelle le “traditionalisme”, lui aussi dans ses formes extrêmes.] Ici, tout choix partisan détruit le tout, [l’histoire même de l’Église], qui ne peut exister que comme unité indivisible ».[107]

Ayant participé au concile Vatican II de 1962 à 1965, et même, ayant lutté contre le courant moderniste qui essayait d’y imposer ses thèses, Dom Antônio de Castro Mayer signa, uni au pape Paul VI, tout comme Mgr Marcel Lefebvre, les actes de promulgation de tous les documents du concile, les considérant « comme la doctrine du magistère suprême de l’Église ». Il écrivit, comme évêque diocésain, trois lettres pastorales sur l’application du concile Vatican II dans son diocèse, essayant d’y donner aux prêtres et aux fidèles la légitime interprétation de l’aggiornamento désiré par le pape Jean XXIII, mettant en garde contre ceux qui, profitant du concile, essayaient de faire revivre dans l’Église le modernisme et son ensemble d’hérésies. Il montrait ainsi comment le concile peut et doit être interprété selon la Tradition, c’est-à-dire que ses documents « doivent être compris à la lumière de la doctrine traditionnelle de l’Église ».[108]

Dans sa lettre pastorale du 19 mars 1966 intitulée « Considérations à propos de l’application des documents promulgués par le concile œcuménique Vatican II », Dom Antônio cite l’avertissement du « Saint-Père glorieusement régnant », Paul VI, en date du 18 novembre 1965, contre l’interprétation moderniste des textes conciliaires. Dom Antônio déclare :

« Voici ses paroles : “C’est le moment [dit Paul VI] du véritable aggiornamento, préconisé par Notre vénéré prédécesseur Jean XXIII. Celui-ci, en employant ce mot programme, n’y mettait certainement pas la signification que d’aucuns tentent de lui donner, et qui permettrait de ‘relativiser’, selon la mentalité du monde, tout ce qui touche à l’Église, dogme, lois structures, traditions, alors qu’il y a dans ce mot un sens si vif et si ferme de la permanence de la doctrine et des structures de l’Église, que celle-ci en fait l’idée maîtresse de sa pensée et de son action.” […]

[Dom Antônio poursuivait alors :] Notons, chers fils, […] que le Saint-Père […] attire l’attention sur l’existence d’une fausse interprétation du concile, comme si l’Église avait renoncé à l’immutabilité de sa doctrine, de sa structure fondamentale, de la valeur salvifique de ses traditions, pour se lancer dans la mer houleuse de l’évolution qui fait délirer les hommes d’aujourd’hui, et leur fait croire que rien, absolument rien de pérenne et d’éternel ne s’impose à l’esprit humain ».[109]

C’est dans la même ligne que l’avertissement du cardinal Ratzinger, cité plus haut, contre ceux qui cherchent à séparer le concile Vatican II de toute la tradition passée de l’Église.

Comme nous l’avons dit plus haut (IV et V), le magistère vivant et authentique existant dans l’Église est continu, sans interruption, et l’assistance continuelle et ininterrompue de l’Esprit Saint divin est sa garantie contre toute erreur quant à la foi et aux mœurs. Et cette assistance divine ne s’est pas interrompue au concile Vatican II. Le pape Jean XXIII, dans la convocation du concile, a bien rappelé cette vérité. Après avoir cité le passage de l’Évangile : « voici que je serai avec vous tous les jours jusqu’à la fin des siècles » (Mt 28,20), il ajoutait :

« Cette consolante présence du Christ n’a jamais cessé d’être vivante et opérante dans la sainte Église, mais particulièrement dans les périodes les plus graves de l’humanité ».[110]

Même s’il y a eu, de la part de certains Pères conciliaires de tendance moderniste, l’intention mauvaise de produire dans le concile des textes qui seraient comme une bombe à retardement, comme certains d’entre eux l’ont avoué, néanmoins, l’Esprit Saint qui est Dieu n’a pas permis que de telles intentions s’exprimassent dans les textes authentiques promulgués officiellement par le Magistère. Et, pour ce qui concerne le Magistère de l’Église, ce qui vaut, ce sont les textes, et non les supposées intentions des rédacteurs. En d’autres termes,

« l’acte vraiment conciliaire, comme acte de l’Église, et qui mérite l’assistance de l’Esprit Saint, c’est le texte dans sa pleine formulation objective, approuvé par un acte définitif de l’Assemblée conciliaire et par le Souverain Pontife, quelque opinion particulière qu’aient pu avoir soutenu certains Pères conciliaires à son sujet ».[111]

De manière analogue à ce que nous avons dit plus haut au sujet de la Messe, les interprétations données par les modernistes ont impressionné le monde catholique et beaucoup ont pensé que c’était là l’interprétation à donner au concile. Mais non : le sens des textes est fourni par le Magistère de l’Église.

Semblablement, quand avaient surgi des interprétations erronées du décret du concile Vatican I sur la juridiction du pape et des Évêques, les Évêques allemands avaient écrit une lettre circulaire donnant l’interprétation correcte et avaient reçu du pape Pie IX une lettre d’ap­pro­bation de cette interprétation exacte.[112] Était donc correcte non pas une interprétation qu’aurait pu recevoir le texte, ni celle que voulait lui donner le Chancelier Bismarck, mais bien celle que lui donnait le Magistère.

De la même façon, le sens fidèle des textes du concile Vatican II est fourni par le Magistère de l’Église et non par les modernistes.

§ 4. Interventions officielles
du Saint-Siège à ce sujet

Aussitôt après le concile Vatican II, commencèrent à surgir des interprétations modernistes. Le Saint-Siège, par la Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi, réprouva immédiatement ces fausses interprétations et donna celle qui était juste, dans une lettre aux présidents des Conférences épiscopales, signée par celui qui en était alors le pro-préfet, le cardinal Ottaviani, et dont nous transcrivons les principaux passages :

« Comme le concile œcuménique Vatican II, récemment terminé de façon heureuse, a promulgué des documents très sages, tant en matière doctrinale, qu’en matière disciplinaire, pour la promotion efficace de la vie de l’Église, il incombe au peuple de Dieu tout entier le grave devoir de s’efforcer de tout son pouvoir de mettre à exécution tout ce qui, avec l’inspiration du Saint-Esprit, a été proposé ou décrété solennellement dans cette très grande assemblée des Évêques, présidée par le Souverain Pontife.

Quant à la hiérarchie, il lui revient le droit et le devoir de veiller sur, de diriger, et de promouvoir le mouvement de rénovation commencé par le concile, de telle sorte que les Documents et Décrets du concile reçoivent une droite interprétation et soient appliqués en conservant soigneusement leurs propres force et esprit. En effet, les Évêques doivent protéger cette doctrine, vu qu’ils jouissent de la charge d’enseigner avec autorité sous la direction de Pierre. Et c’est de façon louable que beaucoup de Pasteurs ont déjà entrepris d’expliquer comme il faut la doctrine du concile.

Il faut cependant se plaindre que des nouvelles regrettables nous sont parvenues de diverses régions concernant les abus qui se développent dans l’in­ter­prétation de la doctrine du concile, ainsi que des diva­gations et des opinions audacieuses qui surgissent de ci de là non sans perturber grandement les esprits de beaucoup de fidèles. Il faut louer les études et les efforts destinés à investiguer de manière plus approfondie la vérité, en distinguant à juste titre ce qui est à croire et ce qui est libre ; mais il résulte des documents examinés par la présente Sacrée Congrégation, que de nombreuses positions dépassent facilement les limites de la simple opinion ou de l’hypothèse, et semblent affecter dans une certaine mesure le dogme même et les fondements de la foi.

Il est utile de signaler quelques-unes de ces opinions et de ces erreurs, sous forme d’exemples, telles qu’elles sont connues d’après les rapports d’hommes savants et d’écrits publics.

1. Il s’agit en premier lieu de la sacrée Révélation elle-même : il y en a, en effet, qui recourent à l’Écriture sainte, en laissant délibérément de côté la Tradition ; mais ils réduisent l’étendue et la force de l’inspiration et de l’inerrance bibliques et ils n’ont pas une juste notion de la valeur des textes historiques.

2. En ce qui concerne la doctrine de la Foi, on dit que les formules dogmatiques sont à ce point soumises à l’évolution historique que leur sens objectif lui-même est sujet à changement.

3. Il arrive que l’on néglige et que l’on minimise à ce point le magistère ordinaire de l’Église, celui surtout du Pontife romain, qu’on le relègue presque dans le domaine des libres opinions.

4. Certains ne reconnaissent presque plus une vérité objective absolue, ferme et immuable ; ils soumettent toutes choses à un certain relativisme, en avançant comme raison que toute vérité suit nécessairement le rythme de l’évolution de la conscience et de l’histoire.

5. La personne adorable elle-même de Notre Seigneur Jésus-Christ est atteinte lorsque, en repensant la christologie, on use de notions sur la nature et sur la personne qui sont difficilement conciliables avec les définitions dogmatiques. Un certain humanisme christologique se répand qui réduit le Christ à la simple condition d’un homme qui, peu à peu, aurait acquis la conscience de sa divine filiation. Sa conception virginale, ses miracles, sa résurrection elle-même sont concédés en paroles, mais sont ramenés en réalité à l’ordre purement naturel.

6. De même, dans la manière de traiter la théologie des sacrements, certains éléments ou sont ignorés ou ne sont pas considérés suffisamment, surtout en ce qui concerne la Très Sainte Eucharistie. Au sujet de la présence réelle du Christ sous les espèces du pain et du vin, il en est qui dissertent en favorisant un symbolisme exagéré, comme si le pain et le vin n’étaient pas changés par la transsubstantiation au corps et au sang de Notre Seigneur Jésus-Christ, mais étaient simplement transférés à une certaine signification. Il en est aussi qui, au sujet de la messe, favorisent plus qu’il n’est juste l’idée du repas (agapes), au détriment de l’idée de sacrifice.

7. Certains aiment expliquer le sacrement de pénitence comme moyen de réconciliation avec l’Église, et ne soulignent pas assez la réconciliation avec Dieu offensé. Ils prétendent aussi que pour la célébration de ce sacrement n’est pas nécessaire la confession personnelle des péchés, tandis qu’ils s’appliquent à exprimer uniquement la fonction sociale de réconciliation avec l’Église.

8. Il n’en manque pas qui minimisent la doctrine du concile de Trente sur le péché originel ou qui la commentent de telle manière que la faute originelle d’Adam et la transmission de son péché sont, pour le moins, mises en veilleuse.

9. Non moindres sont les erreurs qui circulent dans le domaine de la théologie morale. Beaucoup, en effet, osent rejeter la raison objective de la moralité ; d’autres n’acceptent pas la loi naturelle et affirment la légitimité de ce qu’on appelle la morale de situation. Des opinions pernicieuses sont répandues sur la moralité et la responsabilité en matière sexuelle et de mariage.

10. À tout cela, il faut ajouter une note sur l’œcuménisme. Le Siège apostolique approuve assurément ceux qui, dans l’esprit du décret conciliaire sur l’œcuménisme, prennent des initiatives pour favoriser la charité avec les frères séparés et les attirer à l’unité de l’Église : mais il regrette qu’il ne manque pas de personnes qui, interprétant à leur manière le décret conciliaire, préconisent une action œcuménique qui offense la vérité sur l’unité de la foi et de l’Église, en favorisant un irénisme et un indifférentisme dangereux, [ce qui est] entièrement étranger à l’esprit du concile.

Ces erreurs et ces dangers, répandus les uns ici, les autres là, sont rassemblés sous forme de synthèse sommaire dans cette lettre aux Ordinaires des lieux afin que chacun, selon sa fonction et son office, s’efforce de les enrayer ou de les prévenir.

Ce sacré Dicastère prie instamment ces mêmes Ordinaires des lieux, rassemblés en conférences épiscopales, d’en traiter et d’en faire rapport au Saint-Siège d’une manière opportune en faisant connaître leurs avis avant la fête de Noël de cette année. […] Rome, le 24 juillet 1966. A. cardinal Ottaviani ».[113]

Cette lettre de la Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi est l’un des innombrables documents de l’Église postérieurs à Vatican II dans lesquels on déclare le véritable sens des décrets et dispositions conciliaires, contre les fausses interprétations qui étaient en train de naître.

Elle est signée par un cardinal au-dessus de tout soupçon, Ottaviani, pro-préfet de la Congrégation. Sa signature ici a évidemment une valeur beaucoup plus grande que celle, largement diffusée dans les milieux traditionalistes, concernant la messe de Paul VI, quand, selon les propos du même cardinal, on usa indûment de son nom (cf. plus haut p. 67).

§ 5. Points controversés :
le cas du « subsistit in » et l’œcuménisme

Les modernistes, c’est clair, continuèrent à donner leurs fausses interprétations aux textes du concile, par exemple, au célèbre passage de Lumen Gentium, n° 8, au sujet de l’Église catholique :

« C’est là l’unique Église du Christ, dont nous professons dans le symbole l’unité, la sainteté, la catholicité et l’apostolicité, cette Église que notre Sauveur, après sa résurrection, remit à Pierre pour qu’il en soit le pasteur (Jn 21, 17), qu’il lui confia, à lui et aux autres Apôtres, pour la répandre et la diriger (cf. Mt 28, 18, etc.) et dont il a fait pour toujours la “colonne et le fondement de la vérité” (1 Tm 3, 15). Cette Église comme société constituée et organisée en ce monde, c’est dans l’Église catholique qu’elle subsiste, gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques qui sont en communion avec lui, bien que des éléments nombreux de sanctification et de vérité se trouvent hors de sa sphère, éléments qui, appartenant proprement par le don de Dieu à l’Église du Christ, portent par eux-mêmes à l’unité catholique ».

Les modernistes essaient d’interpréter ce texte ainsi : « L’Église du Christ subsiste dans l’Église catholique ; mais elle peut aussi subsister dans une autre Église chrétienne ». À partir de là, on peut développer tout un faux œcuménisme, qui place sur le même plan les Églises protestantes et l’Église catholique. C’est ce que fit le théologien moderniste Leonardo Boff dans son livre Église : charisme et pouvoir, p. 138 :

« Si, d’un côté, l’Église catholique, apostolique et romaine est l’Église du Christ, de l’autre elle ne l’est pas. Elle est l’Église du Christ parce qu’elle apparaît au monde sous cette médiation concrète. Mais en même temps, elle ne l’est pas, parce qu’elle peut exister également dans d’autres Églises chrétiennes. Le concile Vatican II, dépassant une ambiguïté théologique des ecclésiologies antérieures qui tendaient à identifier purement et simplement l’Église du Christ avec l’Église catholique romaine, enseigne avec raison : “Cette Église (du Christ) constituée et organisée en ce monde comme société, c’est dans l’Église catholique qu’elle subsiste (subsistit in : elle prend sa forme concrète dans l’Église catholique)”. »

Cette interprétation fut condamnée par le Magistère de l’Église, dans un document de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi intitulé : Notification à propos du livre « Église : charisme et pouvoir » du P. Leonardo Boff, o.f.m. :

« De la fameuse expression du concile “Haec Ecclesia (à savoir : unica Christi Ecclesia)… subsistit in Ecclesia catholica”, il tire une thèse exactement contraire à la signification authentique du texte conciliaire, quand il affirme : “De fait, elle (à savoir l’unique Église du Christ) peut aussi subsister en d’autres Églises chrétiennes” (p. 131). Le concile avait, à l’inverse, choisi le mot “subsistit” précisément pour mettre en lumière qu’il existe une seule “subsistance” de la véritable Église, alors qu’en dehors de son ensemble visible existent seulement des “elementa Ecclesiae” qui — étant des éléments de la même Église — tendent et conduisent vers l’Église catholique ».[114]

Et la déclaration Dominus Iesus, du 6 août 2000, sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus-Christ et de l’Église, de la même Congrégation pour la Doctrine de la Foi, insiste à nouveau sur l’interprétation correcte à donner au “subsistit in” :

« Par l’expression subsistit in, le concile Vatican II a voulu proclamer deux affirmations doctrinales : d’une part, que malgré les divisions entre chrétiens, l’Église du Christ continue à exister en plénitude dans la seule Église catholique ; d’autre part, “que des éléments nombreux de sanctification et de vérité subsistent hors de ses structures”, c’est-à-dire dans les Églises et Communautés ecclésiales qui ne sont pas encore en pleine communion avec l’Église catholique. Mais il faut affirmer de ces dernières que leur “force dérive de la plénitude de grâce et de vérité qui a été confiée à l’Église catholique”. Il existe donc une unique Église du Christ, qui subsiste dans l’Église catholique, gouvernée par le successeur de Pierre et les Évêques en communion avec lui ».[115]

Lors de la présentation de cette Déclaration Dominus Iesus à la presse, le 5 septembre 2000, le cardinal Joseph Ratzinger, notre pape actuel, donna l’interprétation du Magistère concernant les réalités bonnes qui se trouvent dans les autres religions, réalités considérées par les Saints Pères comme une préparation évangélique. De cette manière, il donne aussi l’explication correcte du passage analogue du décret Unitatis Redintegratio (n° 3), sur l’œcuménisme, où, en parlant des Églises séparées, celui-ci dit que, malgré leurs déficiences,

« l’Esprit du Christ, en effet, ne refuse pas de se servir d’elles comme de moyens de salut, dont la force dérive de la plénitude de grâce et de vérité qui a été confiée à l’Église catholique ».

Texte que le cardinal commentait ainsi :

« Par conséquent, ce n’est pas tout ce qui se trouve dans les religions qui doit être considéré comme praeparatio evangelica, mais seulement “ce que l’Esprit opère” en elles. De cela découle une conséquence très importante : est chemin de salut le bien qui est présent dans les religions, comme œuvre de l’Esprit du Christ, mais non les religions en tant que telles. Ce point est du reste confirmé par la doctrine même de Vatican II à propos des semences de vérité et de bonté présentes dans les autres religions et cultures, [doctrine] exposée dans la Déclaration conciliaire Nostra aetate : “L’Église catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. Elle considère avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui, quoiqu’elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle-même tient et propose, cependant apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes” (NA 2). Tout ce qui de vrai et de bien existe dans les religions ne doit pas être perdu, mais bien reconnu et valorisé. Le bien, le vrai, où qu’ils se rencontrent, proviennent du Père et sont l’œuvre de l’Esprit. Les semences du Logos sont éparpillées de toutes parts. Mais on ne peut pas fermer les yeux sur les erreurs et les tromperies néanmoins présentes dans les religions. La constitution dogmatique de Vatican II, Lumen gentium elle-même affirme : “Bien souvent, malheureusement, les hommes, trompés par le démon, se sont égarés dans leurs raisonnements, ils ont délaissé le vrai Dieu pour des êtres de mensonge, servi la créature au lieu du Créateur” (LG 16) ».

D’ailleurs, le texte même de la Déclaration Dominus Iesus affirme :

« il serait clairement contraire à la foi catholique de considérer l’Église comme un chemin de salut parmi d’autres. Les autres religions seraient complémentaires à l’Église, lui seraient même substantiellement équivalentes, bien que convergeant avec elle vers le Royaume eschatologique de Dieu.

Certes, les différentes traditions religieuses contiennent et proposent des éléments de religiosité qui procèdent de Dieu […] De fait, certaines prières et certains rites des autres religions peuvent assumer un rôle de préparation évangélique, en tant qu’occasions ou enseignements encourageant le cœur des hommes à s’ouvrir à l’action divine. On ne peut cependant leur attribuer l’origine divine et l’efficacité salvifique ex opere operato qui sont propres aux sacrements chrétiens. Par ailleurs, on ne peut ignorer que d’autres rites naissent de superstitions ou d’erreurs semblables et constituent plutôt un obstacle au salut (cf. Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n° 55). Avec l’avènement de Jésus-Christ sauveur, Dieu a voulu que l’Église par lui fondée fût l’instrument du salut de toute l’humanité (cf. Act 17,30-31) (cf. Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n° 11). Cette vérité de foi n’enlève rien à la considération respectueuse et sincère de l’Église pour les religions du monde, mais en même temps, elle exclut radicalement la mentalité indifférentiste “imprégnée d’un relativisme religieux qui porte à considérer que ‘toutes les religions se valent’ ” (Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio, n. 36). S’il est vrai que les adeptes d’autres religions peuvent recevoir la grâce divine, il n’est pas moins certain qu’objectivement ils se trouvent dans une situation de grave indigence par rapport à ceux qui, dans l’Église, ont la plénitude des moyens de salut (cf. Pie XII, Encycl. Mystici corporis : DzSch 3821) ».[116]

Après que le théologien Jacques Dupuis, s.j., a lancé son livre Pour une théologie chrétienne du pluralisme religieux (1997), la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a émis une Notification datée du 24 janvier 2001, où elle rappelle, dans le préambule, la vraie doctrine du magistère à propos de la valeur et de la fonction salvifique des traditions religieuses :

« Selon la doctrine catholique, il faut tenir que : “ce que l’Esprit fait dans le cœur des hommes et dans l’histoire des peuples, dans les cultures et les religions, remplit une fonction de préparation évangélique (cf. Const. dogm. Lumen gentium, 16)”. Il est donc légitime de soutenir que l’Esprit Saint, pour sauver les non-chrétiens, utilise aussi les éléments de vérité et de bonté qui se trouvent dans les diverses religions, mais considérer comme voies de salut ces religions, prises comme telles, n’a aucun fondement dans la théologie catholique ; en effet, elles présentent des lacunes, des insuffisances et des erreurs sur les vérités fondamentales regardant Dieu, l’homme et le monde. »h

Dom Antônio de Castro Mayer, dans l’instruction pastorale où il commentait, à la lumière de la Tradition, les documents du concile, spécialement sur l’Église (Lumen gentium) et sur l’œcuménisme (Unitatis redintegratio) donnait exactement cette interprétation correcte du Magistère, différente de l’interprétation moderniste :

« La Tradition considère comme préparation à l’Évangile les restes de vérité et de bien qui survivent dans les religions païennes. L’Esprit Saint s’en sert pour réveiller dans les cœurs de ces peuples des désirs de possession intégrale de la vérité et du bien, que seule la Révélation procure. De même dans les religions appelées chrétiennes, et qui se sont constituées comme effet d’un abandon de la Maison paternelle. En elles aussi la miséricorde de Dieu maintient des richesses éparses — tels que les Sacrements, la succession apostolique, les Saintes Écritures — lesquelles appartiennent à la vraie Église de Dieu, et doivent servir de point de départ pour un retour au sein de la famille ».[117]

§ 6. La collégialité

Citons ici encore Dom Antônio de Castro Mayer, qui fut un des Pères du concile Vatican II, et donc témoin oculaire des événements :

« Un des problèmes qui agitèrent le plus les débats conciliaires fut la question de la “collégialité épiscopale”. La presse d’esprit moderniste s’employa à créer une pression de l’opinion publique dans le sens d’une modification par le concile de la structure de l’Église, de monarchique, construite comme elle l’est sur un seul, Pierre — uni, Petro —, en collégiale, c’est-à-dire, gouvernée de façon conjointe par le corps épiscopal, composé des Évêques du monde entier, qui auraient à Rome un sénat, qui serait son représentant, pour partager avec le pape le gouvernement ecclésiastique. Après beaucoup d’amendements, le schéma conciliaire sur l’Église fut bien modifié, de telle sorte qu’il se maintint dans la ligne tracée de façon dogmatique par le concile Vatican I. Ainsi, furent supprimées les expressions qui auraient pu indiquer une sujétion de saint Pierre au Collège des Apôtres. Par exemple, là où on parlait de pouvoir concédé à saint Pierre, comme premier des Apôtres et chef du Collège, on élimina les expressions “comme” et “chef du Collège”, de manière à dire simplement que le pouvoir fut concédé à saint Pierre, sans être soumis à aucune condition de la part du même Collège Apostolique, et, par conséquent, sans dépendance aucune relativement à ce Collège. Nous fournissons cet exemple pour montrer à quel point il y eut réellement des modifications dans le schéma, de manière à éloigner de celui-ci les traces de modernisme qui s’y trouvaient. Nonobstant, ces amendements ne parurent pas encore suffisants à l’“Autorité supérieure” (pour utiliser les termes du Secrétaire général du concile), laquelle, en l’occurrence était le pape — unique Autorité supérieure aux Pères conciliaires réunis là. Et le Saint-Père fit ajouter une note explicative qui donnait le sens de la doctrine du schéma relative au Collège épiscopal. Dans cette note, avec clarté, et même avec une certaine surabondance, on souligne le sens précis de “collégialité” épiscopale, [expression] qui ne peut pas être prise dans un sens strict, c’est-à-dire, celle d’un corps de nombreux égaux, [et on précise] que le Collège épiscopal au point de vue juridique n’a le pouvoir dans l’Église universelle en union avec le pape que quand il est convoqué par celui-ci, et en demeurant sous son entière dépendance. Dans sa rédaction finale, avec la note explicative qui dissipait tout doute, le schéma obtint une unanimité impressionnante : seulement cinq Pères Conciliaires votèrent contre lui dans la session conclusive. Nous étions donc devant un document de l’Église enseignante qui devait être respecté avec une acceptation pleine et cordiale par toute l’Église ».[118]

Il en résulte donc bien clairement la distinction entre l’interprétation moderniste de la collégialité et l’interprétation correcte de celle-ci donnée par le Magistère de l’Église enseignante.

§ 7. La liberté religieuse

La Déclaration conciliaire Dignitatis humanae sur la liberté religieuse fut l’un des textes les plus utilisés par les modernistes pour propager leurs idées. Beaucoup la comprirent comme une approbation de l’indifférentisme religieux, du laïcisme, du relativisme doctrinal et de la liberté morale de faire n’importe quoi, doctrines déjà condamnées par le Magistère antérieur.

La partie du texte qui soulève le plus de polémique est le numéro 2 de la Déclaration :

« Ce concile du Vatican déclare que la personne humaine a droit à la liberté religieuse. Cette liberté consiste en ce que tous les hommes doivent être soustraits à la contrainte de la part tant des individus que des groupes sociaux et de quelque pouvoir humain que ce soit, de telle sorte qu’en matière religieuse nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience ni empêché d’agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou associé à d’autres. Il déclare, en outre, que le droit à la liberté religieuse a son fondement dans la dignité même de la personne humaine telle que l’ont fait connaître la parole de Dieu et la raison elle-même.[119] Ce droit de la personne humaine à la liberté religieuse dans l’ordre juridique de la société doit être reconnu de telle manière qu’il constitue un droit civil.

En vertu de leur dignité, tous les hommes, parce qu’ils sont des personnes, c’est-à-dire doués de raison et de volonté libre, et, par suite, pourvus d’une responsabilité personnelle, sont pressés, par leur nature même, et tenus, par obligation morale, à chercher la vérité, celle tout d’abord qui concerne la religion. Ils sont tenus aussi à adhérer à la vérité dès qu’ils la connaissent et à régler toute leur vie selon les exigences de cette vérité. Or, à cette obligation, les hommes ne peuvent satisfaire, d’une manière conforme à leur propre nature, que s’ils jouissent, outre de la liberté psychologique, de l’immunité à l’égard de toute contrainte extérieure.

Ce n’est donc pas sur une disposition subjective de la personne, mais sur sa nature même, qu’est fondé le droit à la liberté religieuse. C’est pourquoi le droit à cette immunité persiste en ceux-là même qui ne satisfont pas à l’obligation de chercher la vérité et d’y adhérer ; son exercice ne peut être entravé, dès lors que demeure sauf un ordre public juste ».

Des théologiens traditionalistes[120] en diverses occasions ont démontré la non-contradiction entre le texte conciliaire de la déclaration Dignitatis humanae en sa formulation objective et la doctrine traditionnelle sur la matière. L’abbé Julio Meinvielle, parlant de la cohérence interne entre l’une et l’autre doctrines affirme :

« un changement et une modification de celle-ci sur un point aussi important et vital que le fait religieux, mettrait en question très sérieusement l’assistance de l’Esprit Saint au magistère de l’Église et aussi, par le fait même, la sainteté de l’Église elle-même ».[121]

Avant tout, il importe de comprendre les raisons et les circonstances de ce document, d’ailleurs expliquées par lui-même :

« il est des régimes, où, […] les pouvoirs publics eux-mêmes s’efforcent de détourner les citoyens de professer la religion et de rendre la vie des communautés religieuses difficile et précaire […] Dénonçant avec tristesse ces faits déplorables, le saint concile demande aux catholiques, mais prie aussi instamment tous les hommes, d’examiner avec le plus grand soin à quel point la liberté religieuse est nécessaire, surtout dans la condition présente de la famille humaine ».[122]

Durant l’époque où fut faite cette Déclaration conciliaire, approximativement deux tiers de la chrétienté et une grande partie du monde entier étaient sous l’esclavage de la dictature communiste athée : l’Union Soviétique et ses satellites, de la Chine à Cuba, du Vietnam à l’Ukraine, y compris plus particulièrement les pays totalement catholiques de Pologne, Lituanie et Slovaquie, tous réduits en esclavage par le régime communiste. Alors des millions de catholiques étaient empêchés de pratiquer leur religion, terrorisés et punis dans les pays de régime communiste. C’était cette situation et ces circonstances qu’avaient à l’esprit le pape et les évêques lorsqu’ils promulguèrent Dignitatis humanae et proclamèrent que l’être humain a le droit à la liberté religieuse au point de vue politique, c’est-à-dire l’immunité de coercition de la part de l’État dans la pratique religieuse.

En outre, le sens authentique et exact du texte conciliaire, que le pape et les Pères conciliaires promulguèrent, avait été donné dès le départ, dans le Rapport officiel sur la liberté religieuse, présenté par Mgr Émile De Smedt, évêque de Bruges, en Belgique, aux Pères conciliaires, avec le « nihil obstat » de la Commission théologique du concile, dans les termes suivants :

« l’expression “liberté religieuse” a un sens déterminé. Dans nos débats, une grande confusion s’instaurerait si des Pères allaient attribuer à cette expression un autre sens que celui qui lui est donné dans ce texte.

En défendant la liberté religieuse, on ne prétend pas qu’il appartient à l’homme d’envisager le problème religieux comme il lui plaît, sans admettre aucune obligation morale, et de décider à son gré s’il embrassera la religion ou non (indifférentisme religieux) ;

— On n’affirme pas que la conscience humaine est libre en ce sens qu’elle n’est soumise à aucune loi, c’est-à-dire dégagée de toute obligation envers Dieu (laïcisme) ;

— On ne dit pas que l’erreur doit avoir les mêmes droits que la vérité, comme s’il n’y avait aucune norme objective de vérité (relativisme doctrinal) ;

— On n’admet pas non plus que l’homme a, d’une certaine façon, comme un droit à se complaire tranquillement dans l’incertitude (pessimisme dilettante).

Si quelqu’un persistait à vouloir attribuer un de ces sens à l’expression “liberté religieuse”, il prêterait à notre texte un sens qui n’est ni dans les mots ni dans notre intention […] ».i

Pour éviter toutes les formes d’interprétations incorrectes, la déclaration s’efforça d’être bien claire dans le n° 1, qui doit être lu évidemment avant le n° 2, d’autant qu’il l’éclaire et lui donne sa véritable portée :

« tout d’abord, le concile professe que Dieu a lui-même fait connaître au genre humain la voie par laquelle, en le servant, les hommes peuvent obtenir le salut et parvenir à la béatitude. Cette unique vraie religion, nous croyons qu’elle subsiste dans l’Église catholique et apostolique à qui le Seigneur Jésus a confié le mandat de la faire connaître à tous les hommes, lorsqu’il dit aux apôtres : "Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit" Mt 28,19-20. Tous les hommes, d’autre part, sont tenus de chercher la vérité, surtout en ce qui concerne Dieu et son Église ; et, quand ils l’ont connue, de l’embrasser et de lui être fidèles.

 De même encore, le concile professe que ces devoirs concernent la conscience de l’homme et l’obligent, et que la vérité ne s’impose que par la force de la vérité elle-même qui pénètre l’esprit avec autant de douceur que de puissance. Or, puisque la liberté religieuse que revendique l’homme dans l’accomplissement de son devoir de rendre un culte à Dieu concerne son immunité de contrainte dans la société civile, elle ne porte aucun préjudice à la doctrine catholique traditionnelle sur le devoir moral de l’homme et des sociétés à l’égard de la vraie religion et de l’unique Église du Christ. En outre, en traitant de cette liberté religieuse, le saint concile entend développer la doctrine des Souverains Pontifes les plus récents sur les droits inviolables de la personne humaine et l’ordre juridique de la société ».[123]

Le concile, par conséquent, enseigne, au point de vue naturel, un droit à ne pas être, par l’État, forcé ni empêché d’agir, dans de justes limites, en matière religieuse. C’est-à-dire que le concile affirme que dans ce domaine de la conscience, il existe une absence de juridiction, une relative incompétence du pouvoir civil. Cette incompétence est véritable mais non absolue, puisque l’autorité civile peut et doit reconnaître la vraie religion et l’Église catholique. Elle découle de la transcendance de la sphère religieuse — les relations des personnes avec Dieu — par rapport à l’ordre terrestre et temporel, fin propre de l’État (cf. DH 3).

Mais le concile affirme seulement un droit négatif, sans concéder aucun droit affirmatif aux personnes relativement aux actes non conformes à la vérité et au bien dans le domaine religieux.

Il n’y a donc pas de réelle contradiction entre ce qu’enseignait le Bienheureux pape Pie IX et ce qu’enseigne Dignitatis humanae. En d’autres termes, Pie IX, dans l’encyclique Quanta cura et dans le Syllabus condamna la liberté religieuse dans la perspective libérale et maçonnique de la Révolution française, qui soutient l’indifférentisme de l’État, l’égalité de toutes les religions et la liberté morale de l’homme pour choisir toute religion qu’il voudrait. Dignitatis humanae défend la liberté politique, civile « elle a trait à l’immunité de coercition dans la société civile », mais non à la liberté morale.

Ainsi, les choses étant remises dans leur contexte, il n’y a pas de vraie contradiction, et il ne pourrait pas y en avoir, dans ces documents du même Magistère de l’Église, assisté par l’Esprit Saint de Dieu.

Même dans le n° 2, le document conciliaire soulignait que tous les hommes sont

« tenus, par obligation morale, à chercher la vérité, celle tout d’abord qui concerne la religion. Ils sont tenus aussi à adhérer à la vérité dès qu’ils la connaissent et à régler toute leur vie selon les exigences de cette vérité ».

Et, en affirmant, au n° 1, que les individus et les sociétés (États) ont l’obligation morale qu’enseigne la doctrine catholique traditionnelle relativement à la vraie religion et à l’unique Église du Christ, le concile a exclu l’agnosticisme et l’indifférentisme de l’État, que certains supposaient découler de ce document. Le concile affirme que l’État ne peut pas interférer dans l’aire de la conscience des personnes, ni en les forçant à agir contre leur conscience, ni en les empêchant d’agir selon leur conscience, du moins à l’intérieur de justes limites, lesquelles doivent être déterminées pour chaque situation sociale par la prudence politique, selon les exigences du bien commun, et ratifiées par l’autorité civile selon des « normes juridiques, conformes à l’ordre moral objectif ».[124]

Affirmer la limite de juridiction de l’État ne signifie pas lui dénier le devoir de reconnaître la vraie religion et l’Église catholique, de l’aider dans sa mission, de la protéger et de rendre un culte public à Dieu et au Christ-Roi.

Et quand le concile affirme qu’est laissée « intacte la doctrine catholique traditionnelle sur le devoir moral des hommes et des sociétés envers la vraie religion et l’unique Église du Christ »,[125] il est en train d’affirmer que continuent à être en vigueur les principes enseignés par les encycliques Mirari vos (Grégoire XVI), Quanta cura (Pie IX), Mortalium animos, Quas primas (Pie XI) et tout l’enseignement traditionnel sur le règne social du Christ-Roi.

Le concile défend donc la laïcité de l’État, entendue dans le sens de la distinction entre les sphères politique et religieuse,[126] laquelle « est une valeur acquise et reconnue par l’Église, appartenant au patrimoine de civilisation atteint » ;[127] mais non la laïcité conçue comme autonomie par rapport à la loi morale,[128] ni le laïcisme ou agnosticisme de l’État, qui serait une indifférence par rapport à la vraie religion.

Et le document conciliaire dit en outre, en excluant toute forme d’indifférentisme :

« Mais les fidèles du Christ, pour se former la conscience, doivent prendre en sérieuse considération la doctrine sainte et certaine de l’Église (cf. Pie XII, Radiomessage 23/03/1952 ; AAS, 1952, p. 270-278). De par la volonté du Christ, en effet, l’Église catholique est maîtresse de vérité ; sa fonction est d’exprimer et d’enseigner authentiquement la vérité qui est le Christ, en même temps que de déclarer et de confirmer, en vertu de son autorité, les principes de l’ordre moral découlant de la nature même de l’homme. En outre, les chrétiens doivent aller avec sagesse au- devant de ceux qui sont au-dehors, et s’efforcer “dans l’Esprit-Saint, avec une charité sans feinte, dans la parole de vérité” (2 Co 6,6-7) de répandre la lumière de vie en toute assurance et courage apostolique, jusqu’à l’effusion de leur sang ».[129]

Et le document conciliaire expose les racines qu’a cette doctrine dans la Divine Révélation.[130]

La Déclaration conciliaire fut promulguée (et c’est cela qui en fait un document du Magistère), avec les mots officiels que nous avons cités plus haut (cf. § 2. Valeur des documents du concile Vatican II). Suivaient les signatures des Pères conciliaires (parmi lesquelles on trouve celles de Dom Antônio de Castro Mayer et de Mgr Marcel Lefebvre).

Le Catéchisme de l’Église catholique, autre acte du Magistère, promulgué par le pape Jean‑Paul II, « en vertu de l’autorité apostolique » par la Constitution apostolique Fidei depositum, explique avec clarté dans quel sens l’Église veut enseigner la liberté :

« L’exercice de la liberté n’implique pas le droit de tout dire et de tout faire. Il est faux de prétendre que “l’homme, sujet de la liberté, se suffit à lui-même en ayant pour fin la satisfaction de son intérêt propre dans la jouissance des biens terrestres”.[131] […] En s’écartant de la loi morale, l’homme porte atteinte à sa propre liberté, il s’enchaîne à lui-même, rompt la fraternité de ses semblables et se rebelle contre la vérité divine ».[132]

« Le droit à l’exercice de la liberté est une exigence inséparable de la dignité de l’homme, notamment en matière religieuse et morale. Mais l’exercice de la liberté n’implique pas le droit supposé de tout dire ni de tout faire. “C’est pour la liberté que le Christ nous a libérés” (Ga 5,1) ».[133]

« “Tous les hommes sont tenus de chercher la vérité, surtout en ce qui concerne Dieu et son Église ; et quand ils l’ont connue, de l’embrasser et de lui être fidèles” (DH 1). Ce devoir découle de “la nature même des hommes” (DH 2). Il ne contredit pas un “respect sincère” pour les diverses religions qui “apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes” (NA 2), ni l’exigence de la charité qui presse les chrétiens “d’agir avec amour, prudence, patience, envers ceux qui se trouvent dans l’erreur ou dans l’ignorance de la foi” (DH 14). Le devoir de rendre à Dieu un culte authentique concerne l’homme individuellement et socialement. C’est là “la doctrine catholique traditionnelle sur le devoir moral des hommes et des sociétés à l’égard de la vraie religion et de l’unique Église du Christ [DH 1]”. En évangélisant sans cesse les hommes, l’Église travaille à ce qu’ils puissent “pénétrer d’esprit chrétien les mentalités et les moeurs, les lois et les structures de la communauté où ils vivent [AA 13]”. Le devoir social des chrétiens est de respecter et d’éveiller en chaque homme l’amour du vrai et du bien. Il leur demande de faire connaître le culte de l’unique vraie religion qui subsiste dans l’Église catholique et apostolique [cf. DH 1]. Les chrétiens sont appelés à être la lumière du monde [cf. AA 13]. L’Église manifeste ainsi la royauté du Christ sur toute la création et en particulier sur les sociétés humaines [cf. Léon XIII, Encycl. Immortale Dei ; Pie XI, Encycl. Quas primas, sur le Christ-Roi] ».[134]

« Le droit à la liberté religieuse n’est ni la permission morale d’adhérer à l’erreur (cf. Léon XIII, Encycl. Libertas præstantissimum), ni un droit supposé à l’erreur (cf. Pie XII, discours du 6 décembre 1953), mais un droit naturel de la personne humaine à la liberté civile, c’est-à-dire à l’immunité de contrainte extérieure, dans de justes limites, en matière religieuse, de la part du pouvoir politique. Ce droit naturel doit être reconnu dans l’ordre juridique de la société de telle manière qu’il constitue un droit civil (cf. DH 2) ».[135]

« Le droit à la liberté religieuse ne peut être de soi ni illimité (cf. Pie VI, bref Quod aliquantum), ni limité seulement par un “ordre public” conçu de manière positiviste ou naturaliste (cf. Pie IX, Encycl Quanta cura). Les “justes limites” qui lui sont inhérentes doivent être déterminées pour chaque situation sociale par la prudence politique, selon les exigences du bien commun, et ratifiées par l’autorité civile selon des “règles juridiques conformes à l’ordre moral objectif” (DH 7) ».[136]

« Toute institution s’inspire, même implicitement, d’une vision de l’homme et de sa destinée, d’où elle tire ses références de jugement, sa hiérarchie des valeurs, sa ligne de conduite. La plupart des sociétés ont référé leur institutions à une certaine prééminence de l’homme sur les choses. Seule la Religion divinement révélée a clairement reconnu en Dieu, Créateur et Rédempteur, l’origine et la destinée de l’homme. L’Église invite les pouvoirs politiques à référer leurs jugements et leurs décisions à cette inspiration de la Vérité sur Dieu et sur l’homme :

Les sociétés qui ignorent cette inspiration ou la refusent au nom de leur indépendance par rapport à Dieu, sont amenées à chercher en elles-mêmes ou à emprunter à une idéologie leurs références et leur fin, et, n’admettant pas que l’on défende un critère objectif du bien et du mal, se donnent sur l’homme et sur sa destinée un pouvoir totalitaire, déclaré ou sournois, comme le montre l’histoire (cf. CA 45 ; CA 46) ».[137]

« L’Église qui, en raison de sa charge et de sa compétence, ne se confond d’aucune manière avec la communauté politique, est à la fois le signe et la sauvegarde du caractère transcendant de la personne humaine. “L’Église respecte et promeut la liberté politique et la responsabilité des citoyens” (GS 76) ».[138]

« Il appartient à la mission de l’Église de “porter un jugement moral, même en des matières qui touchent le domaine politique, quand les droits fondamentaux de la personne ou le salut des âmes l’exigent, en utilisant tous les moyens, et ceux-là seulement, qui sont conformes à l’Évangile et en harmonie avec le bien de tous, selon la diversité des temps et des situations” (GS 76) ».[139]

« L’autorité publique est tenue de respecter les droits fondamentaux de la personne humaine et les conditions d’exercice de sa liberté ».[140]

« Le devoir des citoyens est de travailler avec les pouvoirs civils à l’édification de la société dans un esprit de vérité, de justice, de solidarité et de liberté ».[141]

« Le citoyen est obligé en conscience de ne pas suivre les prescriptions des autorités civiles quand ces préceptes sont contraires aux exigences de l’ordre moral. “Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes” (Act 5,29) ».[142]

« Toute société réfère ses jugements et sa conduite à une vision de l’homme et de sa destinée. Hors des lumières de l’Évangile sur Dieu et sur l’homme, les sociétés deviennent aisément totalitaires ».[143]

C’est dans ce sens catholique, donné par le Magistère, que nous acceptons la liberté religieuse.

Tout autre acception, moderniste, iréniste, indifférentiste, laïciste ou relativiste, de la liberté religieuse, différente de celle qu’a expliquée le Magistère ci-dessus, appartient à « l’herméneutique de la discontinuité et de la rupture » qui caractérise le mauvais « esprit du concile » stigmatisé par le pape Benoît XVI dans son discours à la Curie romaine du 22 décembre 2005.

Comme nous l’avons affirmé plus haut, ce n’était pas l’objectif spécifique de la présente Orientation pastorale d’analyser complètement tous les aspects de la liberté religieuse du concile, ni l’opportunité ou non de ce document, ni son application pratique, ni la question de savoir s’il ne peut pas être amélioré dans sa formulation, ou requérir plus de précisions de la part de la hiérarchie de l’Église. Nous avons voulu simplement démontrer la non-contradiction doctrinale entre ce document et les autres du Magistère, son autorité de document du Magistère suprême de l’Église, avec tout le respect qui lui est dû comme tel, l’impossibilité qu’il contienne des erreurs doctrinales, et ainsi mettre à l’abri l’indéfectibilité de l’Église et de sa doctrine, laquelle découle de l’assistance continue du divin Esprit Saint.

§ 8. Pour conclure

Il est clair qu’il demeure encore beaucoup à étudier dans le concile Vatican II. Il serait impossible d’épuiser le sujet dans la présente Orientation pastorale.

Dans notre déclaration au Saint-Siège du 18 janvier 2002, date de notre reconnaissance canonique et de l’établissement de notre Administration apostolique, sur ce sujet, nous écrivions :

« Nous reconnaissons le concile Vatican II comme l’un des conciles œcuméniques de l’Église catholique, l’acceptant à la lumière de la Sainte Tradition. Nous nous engageons à approfondir toutes les questions demeurées encore ouvertes, prenant en considération le canon 212 du Code de droit canonique ».

Ce canon reconnaît le droit et même parfois le devoir d’exprimer son opinion, y compris de manière publique, dans l’Église. La citation de ce canon signifie que nous ne nous engageons à aucun silence complice devant les erreurs.

Pour cette raison, désirant être fidèles au Magistère de l’Église, avec la grâce de Dieu, nous continuerons à combattre les erreurs que la Sainte Église a toujours condamnées et combattues.

§ 9. Annexe récapitulative :
Deux lettres magistérielles

Nous ajoutons dans cette édition francaise deux lettres officielles du cardinal Ratzinger, notre pape d’aujourd’hui, alors préfet de la Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi, adressées à Mgr Marcel Lefebvre les 23 décembre 1982 et 20 juillet 1983. Ces documents récapitulaient d’avance notre propos :

La lettre du 23 décembre 1982

« Excellence,

Après un assez long délai de consultations, de réflexion et de prière, je suis maintenant en mesure de vous présenter des propositions concrètes en vue de la régularisation de votre propre situation et de celle des membres de la Fraternité Saint-Pie X. Je précise immédiatement que ces propositions ont été approuvées par le Souverain Pontife et que c’est sur son ordre que je vous les communique.

1) Le Saint-Père nommera au plus tôt un Visiteur Apostolique pour la Fraternité Saint-Pie X si vous acceptez de signer une déclaration sous la forme suivante :

1. Ego Marcellus Lefebvre, declaro me religioso animi obsequio adhaerere doctrinae Concilii Vaticani II integrae, videlicet doctrinae “quatenus intelligitur sub sanctae Traditionis lumine et quatenus ad constans Ecclesiae ipsius magisterium refertur” (cf. Joannes Paulus II, Allocutio ad Sacrum Collegium, 5 nov. 1979, AAS LXXI (1979/15) p. 1452). Hoc religiosum obsequium rationem habet illius qualificationis theologicae singulorum documentorum, quae ab ipso Concilio statuta est (Notificatio data in 123a Congr. Generali, 16 nov. 1964).

2. Ego, Marcellus Lefebvre, agnosco Missale Romanum a Summo Pontifice Paulo VI pro Ecclesia universali instauratum a legitima summa auctoritate Sanctae Sedis, cui ius legislationis liturgicae in Ecclesia competit, promulgatum proindeque in se legitimum et catholicum esse. Qua de causa nec negavi nec negabo missas fideliter secundum novum ordinem celebratas validas esse itemque eas haereticas seu blasphemas esse nullo modo insinuare velim nec eas a catholicis vitandas esse affirmare intendo.

Ces deux paragraphes ont été mûrement étudiés de la part du Siège Apostolique, et il ne peut être envisagé de les modifier. Par contre, on admettra que vous ajoutiez, à titre personnel, un complément dont le contenu pourrait être le suivant :

In conscientia obligatum me sentio addere, applicationem concretam renovationis liturgicae graves ponere quaestiones, quae supremae etiam auctoritatis sollicitam curam provocare debent. Quare novam revisionem librorum liturgicorum pro futuro ab hac ipsa auctoritate desidero.

Vous pouvez éventuellement modifier ce dernier passage, sous réserve naturellement que votre formulation soit acceptée par le Saint-Père.

2) Si vous déclarez votre disponibilité à souscrire la déclaration ci-dessus, il sera possible de fixer la date de l’audience que le Saint-Père vous accordera, et qui pourrait marquer le début de la Visite Apostolique.

3) La suspens a divinis dont vous avez été frappé ne dépend pas des problèmes concernant l’acceptation du deuxième concile du Vatican et de la réforme liturgique (c’est-à-dire des deux points touchés dans la déclaration prévue), mais du fait que vous avez procédé à des ordinations malgré la prohibition du Saint-Siège. Cette suspens sera donc levée dès lors que vous aurez déclaré votre intentionn de ne plus faire d’ordinations sans l’autorisation du Saint-Siège. Logiquement du reste, la question devrait se résoudre à l’issue de la Visite Apostolique.

4) La situation des prêtres que vous avez ordonnés depuis juin 1976 sera réglée cas par cas s’ils acceptent de signer personnellement une déclaration ayant le même contenu que la vôtre.

Je dois ajouter enfin que, pour ce qui concerne l’autorisation de célébrer la Sainte Messe selon l’Ordo Missae antérieur à celui de Paul VI, le Saint-Père a décidé que la question serait résolue pour l’Église universelle et donc indépendamment de votre propre cas.

[Exhortation, souhaits et formule finale de salutation].[144]

La lettre du 20 juillet 1983

« Excellence,

Le Saint-Père a soigneusement médité devant Dieu votre lettre du 5 avril dernier, à la lumière de sa responsabilité de Pasteur Suprême de l’Église. Il m’a ensuite chargé de répondre en son nom. C’est de ce devoir que je m’acquitte dans la présente lettre.

I. — Vous ne serez pas surpris d’apprendre que le Souverain Pontife a été déçu et attristé du brusque refus que vous opposez à son offre généreuse de vous ouvrir le chemin de la réconciliation.

En effet, vous accusez à nouveau les Livres liturgiques de l’Église, avec une sévérité qui surprend après les entretiens que nous avons eus. Comment pouvez-vous qualifier les textes du nouveau missel de “messe oecuménique” ? Vous savez bien que ce missel contient le vénérable Canon Romain ; que les autres Prières eucharistiques parlent d’une manière très nette du Sacrifice ; que la plus grande partie des textes provient des traditions liturgiques anciennes.

Pour ne citer qu’un exemple, vous savez qu’après l’oblation du pain et du vin, ce nouveau missel nous fait dire comme le précédent: “sic fiat sacrificium nostrum in conspectu tuo hodie… Orate, fratres, ut meum ac vestrum sacrificium…”.

Vous savez également que pour l’interprétation du missel, l’essentiel n’est pas ce que disent les auteurs privés, mais seulement les documents officiels du Saint-Siège. Les affirmations du P. Boyer [sic pour Bouyer, peut-être] et de Mgr Bugnini auxquelles vous faites allusion ne sont que des opinions privées.

Par contre, j’attire votre attention sur la définition authentique de l’intention et de la signification du missel proposée dans le prooemium de l’Institutio Generalis, spécialement à l’article 2, ainsi que sur les raisons et les idées déterminantes de la réforme, exposées aux articles 6 à 9. Selon ces textes officiels, on n’a jamais voulu une réduction des éléments catholiques de la Messe, mais au contraire une présence plus riche de la tradition des Pères. En cela, on suit fidèlement la norme de saint Pie V, selon les possibilités d’une connaissance accrue des traditions liturgiques.

Avec le consentement du Saint-Père, je puis vous dire encore une fois que toute critique des livres liturgiques n’est pas a priori exclue, que même l’expression du désir d’une nouvelle révision est possible, à la manière dont le mouvement liturgique antérieur au concile a pu souhaiter et préparer la réforme. Mais ceci à condition que la critique n’empêche pas et ne détruise pas l’obéissance, et qu’elle ne mette pas en discussion la légitimité de la liturgie de l’Église.

Je vous demande donc avec insistance et au nom du Saint-Père d’examiner à nouveau vos affirmations en toute humilité devant le Seigneur et compte tenu de votre responsabilité d’Évêque, et de réviser celles qui sont inconciliables avec l’obéissance due au Successeur de saint Pierre.

Il n’est pas admissible que vous parliez d’“une messe équivoque, ambiguë, dont la doctrine catholique a été estompée”, ni que vous déclariez votre intention de “détourner les prêtres et les fidèles de l’usage de ce nouvel Ordo Missae.”

Vous apporteriez une véritable contribution à la pureté de la foi dans Église si vous vous limitiez à rappeler aux prêtres et aux fidèles qu’on doit renoncer à l’arbitraire, qu’il faut s’en tenir avec soin aux livres liturgiques de Église, qu’il faut interpréter et réaliser la liturgie selon la tradition de la foi catholique et en accord avec les intentions des Papes. En fait, pour l’instant, vous n’encouragez malheureusement que la désobéissance.

II. — Après les entretiens qui se sont déroulés entre nous, je pensais personnellement qu’il n’y avait plus d’obstacles à propos du point I, c’est-à-dire l’acceptation du deuxième concile du Vatican interprété à la lumière de la Tradition catholique et compte tenu des déclarations mêmes du concile sur les degrés d’obligation de ses textes. Aussi le Saint-Père est-il étonné que même votre acceptation du concile interprété selon la Tradition demeure ambiguë, puisque vous affirmez immédiatement que la Tradition n’est pas compatible avec la Déclaration sur la Liberté religieuse. 

Au troisième paragraphe de vos suggestions, vous parlez d’“affirmations ou expressions du concile qui sont contraires au Magistère de l’Église”. Ce disant, vous enlevez toute portée à votre acceptation antécédente ; et, en énumérant trois textes conciliaires incompatibles selon vous avec le Magistère, en y ajoutant même un “etc.”, vous rendez votre position encore plus radicale.

Ici comme à propos des questions liturgiques, il faut noter que — en fonction des divers degrés d’autorité des textes conciliaires — la critique de certaines de leurs expressions, faites selon les règles générales d’adhésion au Magistère, n’est pas exclue. Vous pouvez de même exprimer le désir d’une déclaration ou d’un développement explicatif sur tel ou tel point.

Mais vous ne pouvez pas affirmer l’incompatibilité des textes conciliaires — qui sont des textes magistériels — avec le Magistère et la Tradition. Il vous est possible de dire que personnellement, vous ne voyez pas cette compatibilité, et donc de demander au Siège Apostolique des explications. Mais si, au contraire, vous affirmez l’impossibilité de telles explications, vous vous opposez profondément à cette structure fondamentale de la foi catholique, à cette obéissance et humilité de la foi ecclésiastique dont vous vous réclamez à la fin de votre lettre, lorsque vous évoquez la foi qui vous a été enseignée au cours de votre enfance et dans la Ville Éternelle.

Sur ce point vaut du reste une remarque déjà faite précédemment à propos de la liturgie : les auteurs privés, même s’ils furent experts au concile (comme le P. Congar et le P. Murray que vous citez) ne sont pas l’autorité chargée de l’inter­pré­tation. Seule est authentique et autoritative l’interprétation donnée par le Magistère, qui est ainsi l’interprète de ses propres textes : car les textes conciliaires ne sont pas les écrits de tel ou de tel expert ou de quiconque a pu contribuer à leur genèse, ils sont des documents du Magistère.

III. — Avant de conclure, je dois encore ajouter ceci : le Saint-Père ne méconnaît ni votre foi, ni votre piété. Il sait que, dans la Fraternité Saint-Pie X, vous insistez pour que soit reconnue la légitimité qui est la Sienne, et que vous vous êtes séparé de membres de la Fraternité qui refusaient de vous suivre dans cette attitude. Il sait aussi que vous vous refusez à ce qui serait vraiment le commencement d’un schisme, à savoir la consécration d’un Évêque, et reconnaît que sur ce point décisif, vous vous maintenez dans l’obéissance au Successeur de saint Pierre. En tout cela se trouve le motif de la généreuse patience avec laquelle le Souverain Pontife recherche toujours la voie de la réconciliation. Mais votre lettre du 5 avril montre aussi que vous posez à votre obéissance des réserves, qui touchent la substance même de cette obéissance et ouvrent la porte à une séparation.

Encore une fois, au nom du Pape Jean‑Paul II, je vous prie avec cordialité, mais aussi avec insistance, de réfléchir devant le Seigneur à tout ce que je viens de vous écrire. Il n’est pas exigé de vous que vous renonciez à la totalité de vos critiques du concile et de la réforme liturgique. Mais en vertu de sa responsabilité dans l’Église, le Souverain Pontife doit insister pour que vous réalisiez cette obéissance concrète et indispensable dont le contenu est formulé dans ma lettre du 23 décembre 1982. Si l’une ou l’autre expression vous cause des difficultés insurmontables, vous pouvez proposer ces difficultés : les mots en eux-mêmes ne constituent pas des absolus ; mais leur contenu est indispensable.

Le Saint-Père m’a expressément chargé de vous assurer de sa prière à votre intention. Je vous assure également de la mienne, et vous prie d’agréer, Excellence, l’expression de mes sentiments de respectueux dévouement en Notre-Seigneur. »[145]


Conclusion Générale

Le Catéchisme nous enseigne que doit exister parmi « les chrétiens un véritable esprit filial à l’égard de l’Église ».[146]

C’est là le chemin des saints, comme le prouvent les textes suivants du Padre Pio et de saint Pierre-Julien Eymard :

« Très Saint-Père, je sais que votre cœur souffre beaucoup en ces jours à propos du destin de l’Église, mais de manière spéciale par le manque d’obéissance envers le Magistère, que Votre Sainteté exerce avec l’assistance du Saint-Esprit au nom de Dieu. Je vous offre ma prière et ma souffrance comme une petite mais sincère contribution du dernier de vos fils, afin que le Seigneur, avec Sa grâce, vous console et que vous puissiez poursuivre dans le chemin droit et fatigant de la défense de la Vérité éternelle, invariable, malgré les mutations des temps ».[147]

« […] Loin de l’Église, ces pauvres voyageurs divaguent sans guide en plein désert. Qui sont-ils ces marins sur un navire sans gouvernail et sans pilote ? Malheur à eux ! Fils infortunés, abandonnés sur la voie publique, sans mère pour leur donner à manger et les aimer […]. Quand Jésus-Christ nous donna la Sainte Église pour mère et maîtresse dans la foi, il nous donna la plus grande grâce qu’il pouvait nous donner. Il n’y a donc pas, par conséquent, de plus grande charité pour le prochain que de lui montrer la vraie Église. Mais quelle est cette Église de Jésus-Christ ? Où est-elle ? Comment la découvrir ? Comment la connaître ? L’Église de Jésus-Christ est l’Église Romaine, qui est personnifiée dans le pape, successeur de Pierre, Vicaire de Jésus-Christ sur la terre […]. “Où est Pierre, dit saint Ambroise, “là aussi est l’Église” […]. Le pape est Jésus-Christ qui enseigne, Jésus-Christ qui sanctifie, Jésus-Christ qui gouverne son Église. Sans le pape, par conséquent, il n’est pas d’Église ; hors du pape, il y a seulement le schisme et la stérilité ; contre le pape, c’est l’hérésie, le scandale […], le crime qui appelle sur lui-même toutes les vengeances divines, toutes les infortunes réservées aux sacrilèges. L’Église, c’est encore l’Évêque, le représentant du pape,j pouvoir et grâce, dit saint Paul, “pour gouverner l’Église de Dieu” (Ac 20,28). L’Église est le prêtre, qui représente l’Évêque dans la paroisse […]. Mais comment saurai-je si un Évêque, si un prêtre sont, véritablement, les représentants du Souverain Pontife et les dépositaires de l’autorité catholique ? Simplement en interrogeant l’Évêque : Avez-vous été nommé par le pape ? Êtes-vous uni au pape ? Travaillez-vous avec le pape ? Si la réponse est affirmative, alors il sera pour moi le pape en train d’enseigner, de sanctifier, de gouverner l’Église — ce sera l’Église même. En demandant au curé : Avez-vous été nommé par l’Évêque ? Travaillez-vous avec lui ? — Oui. Alors, il est le pasteur légitime, qui a la foi de l’Église et la grâce de Jésus-Christ […] ».[148]

Comme l’affirmait Dom Antônio :

« Comme fidèles catholiques, dans nos relations avec le pape nous devons nous conduire avec un vif esprit de foi. Et voir dans le pape toujours le Vicaire du Christ sur la terre, dont les propos, dans l’exercice de sa charge, doivent être pris comme les paroles du Seigneur lui-même. Pour cette raison, au pape nous devons respect, vénération et docile obéissance, évitant tout esprit de critique destructive. Il est nécessaire que notre conduite reflète la conviction de notre foi, laquelle nous désigne dans le pape le Vicaire de Jésus-Christ lui-même ».[149]

« Nous vous recommandons vivement l’humilité, la mortification, l’esprit de pénitence. Ne vous fiez pas à vos propres jugements. Notre Seigneur nous a donné l’intelligence pour connaître la vérité qu’il a voulu nous révéler ; mais Lui-même nous a fait comprendre qu’il s’agissait de mystères qui dépassent la capacité de notre entendement. Pour cette raison, si nous voulons éviter les déviations de l’erreur, nous devons docilement suivre les enseignements des Pasteurs qu’Il nous a donnés pour nous maintenir dans l’intégrité de sa parole et dans la pureté de ses préceptes. Rappelez-vous toujours des normes que Saint Ignace de Loyola donne pour sentire cum Ecclesia, valables spécialement pour les temps difficiles de rationalisme dans lesquels nous vivons : “Ayant mis de côté tout jugement propre, nous devons maintenir notre esprit prêt et disposé à obéir en toutes choses à la véritable Épouse du Christ Notre Seigneur, laquelle est notre Sainte Mère l’Église hiérarchique” (Livre des exercices spirituels, Règles pour sentir avec l’Église, 1ère règle). Et pour mieux exprimer le contenu de cette première règle, il dit dans la 10ème : “Pour arriver toujours à la vérité, en toutes choses, nous devons croire que le blanc que je vois est noir, si l’Église hiérarchique le définit ainsi ; croyant que entre le Christ Notre Seigneur et l’Église, son Épouse, il y a le même Esprit qui nous gouverne et nous régit, pour le salut de nos âmes ; car c’est par le même Esprit et Seigneur, qui nous a donné les dix commandements, qu’est régie et gouvernée notre Sainte Mère l’Église”. Dans l’attitude recommandée par le Saint, il y a un acte de foi plus encore qu’un acte d’humilité. L’Église est un mystère de Dieu que seuls les petits qui se confient à elle dans le plus absolu abandon, peuvent savourer (cf. Mt 11, 25). Et c’est ainsi, mes très chers fils, qu’il nous est nécessaire de vivre, pour donner gloire à Dieu dans ce monde et jouir de lui éternellement dans l’autre ».[150]

Estimés prêtres et fidèles de notre Administration apostolique,

J’ai essayé de rendre bien claire dans la présente Orientation pastorale la position doctrinale catholique sur le Magistère de l’Église, sur la Sainte Messe et le concile Vatican II, position adoptée par moi, comme Évêque de la Sainte Église, et par notre Administration apostolique personnelle Saint-Jean-Marie-Vianney, à moi confiée par le Saint-Père le pape. Nous ne nous réglons ni par la diplomatie, ni par le désir de plaire à qui que ce soit, ou de recevoir des applaudissements, mais bien par le Magistère de l’Église et par la théologie catholique, par la vérité et avec la conscience sincère devant Dieu, notre Juge suprême et Père miséricordieux. Nous visons uniquement la gloire de Dieu, la défense de la Sainte Église, le bien et le salut des âmes. De cette manière, nous essayons d’être fidèles à la vocation et au charisme qui nous ont été indiqués par le Saint-Père lors de la création de notre Administration apostolique : fidélité à la Tradition liturgique, doctrinale et disciplinaire de la Sainte Église, en pleine communion avec sa hiérarchie : cum Petro et sub Petro.

Que Notre-Dame, Mère de l’Église, Vierge fidèle, nous protège et nous garde tous dans son Cœur Immaculé, auquel nous nous consacrons entièrement.

Campos dos Goytacazes, le 6 janvier 2007, Épiphanie du Seigneur,

† Fernando Arêas Rifan,

Évêque titulaire de Cedamusa,

Administrateur apostolique

de l’Administration apostolique personnelle
Saint-Jean-Marie-Vianney.

 

 

 

 

 

 

 

 

P.S. Cette Orientation Pastorale sur le Magistère vivant de l’Église a été présentée et lue par Son Exc. Dom Fernando Arêas Rifan aux prêtres de l’Administration apostolique personnelle Saint-Jean-Marie-Vianney, durant la semaine annuelle d’études théologiques, du 8 au 12 janvier 2007, et fut accueillie et applaudie par tous ceux-ci. Comme signe d’approbation et d’adhésion, les prêtres présents écrivirent à Son Exc. l’Évêque Administrateur apostolique la lettre suivante, que nous présentons en annexe :


Campos dos Goytacazes, le 12 janvier 2007,

A Son Exc. Rév.me Dom Fernando Arêas Rifan

Notre Évêque Administrateur apostolique

Exc. Rév.me,

À l’occasion de la présentation de la dernière Orientation pastorale de Votre Exc. sur « Le Magistère vivant de l’Église », en janvier 2007, lors de notre semaine d’études, nous, les prêtres de l’Administration apostolique personnelle Saint-Jean-Marie-Vianney, nous manifestons notre adhésion et respect à tout ce qui en elle est enseigné et exposé par Votre Excellence. En tant que vous êtes successeur des Apôtres, nous voyons en vos paroles la voix de Dieu et de l’Église et la règle sûre que nous devons suivre pour notre agir.

Nous prenons et acceptons les positions exposées là de manière particulière sur le Magistère, la Messe et le concile Vatican II comme la position de l’Administration apostolique, que nous nous efforcerons d’expliquer à nos fidèles avec clarté et sens pastoral.

Nous manifestons, pour finir, notre volonté de continuer, au côté de Votre Exc., la lutte pour la restauration, pour le bien des âmes, pour la liturgie, la doctrine et la discipline traditionnelle, mais toujours sous la conduite de l’autorité, dans la vérité et la charité.

Demandant humblement votre bénédiction paternelle, nous signons.

 [N.d.T. suivent les signatures de 27 prêtres de l’Administration, que nous ne reproduisons pas dans la présente traduction française].


Table des Matières

PRÉFACE À L’ÉDITION FRANÇAISE... 3

Partie Introductive.......................... 9

I. Objectif de cette orientation pastorale 9

II. Introduction - Comparaisons........... 11

Première Partie : Principes sur le magistère vivant........ 13

III. L’institution du Magistère vivant.... 13

IV. Qu’est-ce qu’un Magistère vivant ?. 16

V. Magistère continu, sans interruption............. 17

VI. Garantie de l’assistance divine contre l’erreur 19

VII. Assentiment au Magistère, même non infaillible................... 21

VIII. Le Guide oriente dans les diverses circonstances............ 24

IX. Le danger d’un « magistère » parallèle................... 26

Deuxième partie : Conséquences, Applications........................ 29

Première conséquence : Application de ces principes théologiques à la question de la messe................... 29

§ 1. L’unité de culte, la variété des rites et le pouvoir de l’Église 29

§ 2. La réforme liturgique postérieure au concile Vatican II............. 34

§ 3. La conservation aujourd’hui de la messe dans sa forme traditionnelle......... 37

§ 4. Critères et limites à observer 41

§ 5. Un très grave avertissement.......... 52

§ 6. Pour en revenir à la question de la légitimité de la Nouvelle Messe.. 59

§ 7. Des théologiens traditionnels approuvés confirment ce point 64

§ 8. L’opinion finale des cardinaux Ottaviani et Antonelli............. 67

§ 9. Attitude et exemple de Dom Antônio de Castro Mayer.. 68

Deuxième conséquence : Application de ces principes théologiques au concile Vatican II 72

§ 1. La grande et grave crise post-conciliaire............. 72

§ 2. Valeur des documents du concile Vatican II............. 74

§ 3. L’interprétation des textes du concile Vatican II : l’interprétation moderniste et l’interprétation authentique par le magistère............. 77

§ 4. Interventions officielles du Saint-Siège à ce sujet..... 82

§ 5. Points controversés : le cas du « subsistit in » et l’œcuménisme........ 86

§ 6. La collégialité............. 93

§ 7. La liberté religieuse............. 94

§ 8. Pour conclure........... 108

§ 9. Annexe récapitulative : Deux lettres magistérielles...... 109

La lettre du 23 décembre 1982 109

La lettre du 20 juillet 1983 112

Conclusion Générale 117

Table des Matières. 123

 

 



[1] La présente « Orientation pastorale » est une suite et un complément de mon « Instruction pastorale sur le pape et le Magistère de l’Église », accompagnée d’un catéchisme sur le même sujet, datée du 24/04/2005, pour l’inauguration du pontificat du pape Benoît XVI.

* [N. d. T. Benoît XVI, Lettre apostolique Summorum Pontificum en forme de Motu proprio sur l’usage de la Liturgie romaine antérieure à la réforme de 1970, 7 juillet 2007 ; trad. franç. : Paris, Téqui, juillet 2007, 29 p. N.B. Les ajouts entre crochets dans la présente version française sont tous dus au traducteur. Les notes propres au traducteur sont introduites par « N.d.T. », et sont appelées par des lettres a, b, c, tandis que les notes de bas de page de l’auteur suivent un ordre numérique. Enfin, nous gardons l’appellation portugaise « Dom » pour les Évêques brésiliens].

** [N.d.T. Benoît XVI, Lettre aux évêques accompagnant le Motu proprio Summorum Pontificum, 7 juillet 2007 ; trad. franç. : éd. Téqui, cit., p. 22].

[2] Cf. Code de droit canonique (CDC), canons (can.) 368 et 371 § 2.

a [N.d.T. En français, on dirait peut-être : « Médecin, guéris-toi toi-même ».]

[3] Paul VI, Allocution au Séminaire lombard, du 7 décembre 1968 [extraits en trad. franç. : DC, 1969, 12].

[4] Paul VI, Homélie du 29 juin 1972 [orig. ital. : L’Osservatore Romano (OR), 30 juin-1er juillet 1972 ; trad. franç. : La Documentation catholique (DC), 1972, 657-659].

[5] Cf. Ez 33, 1-9.

[6] Pie XII, Encyclique Humani generis, 12 août 1950, n° 18 [orig. lat. : AAS, 1950, p. 561-578 ; trad. franç. : DC, 1950, 1153-1167].

[7] Lettre du Saint-Office à l’Archevêque de Boston, 8 août 1949, Denzinger-Schönmetzer (= DzSch) 3866.

[8] « Ego vero Evangelio non crederem, nisi me catholicae Ecclesiae commoveret auctoritas » — Contra epistulam Manichaei quam vocant fundamenti, 5,6 : PL 42,176 – cf. Catéchisme de l’Église catholique (CEC), n° 119.

[9] Cf. Léon XIII, Encyclique Satis cognitum, 29 juin 1896, n° 13 [orig. lat. : Acta Sanctae Sedis 28 (1895-1896), p. 708-739 ; trad. franç. : Enseignements pontificaux (EP), L’Église, Solesmes, n° 537-617, ici 559].

[10] Cf. Pie XII, Allocution Nel contemplare du 12 octobre 1952, à l’Union des hommes de l’Action catholique italienne ; [orig. ital. : AAS, 1952, p. 830-835 ; trad. franç. : DC, 1952, 1345-1350].

[11] CEC 85, citant le concile Œcuménique Vatican II, Constitution dogmatique Dei Verbum, 10, et résumé dans CEC 100.

[12] Dei Verbum, 10.

[13] Saint Thomas d’Aquin, Summa Theologica, II-II, q. 10, a. 12.

[14] Dom Antônio de Castro Mayer, Lettre pastorale sur la préservation de la foi et des bonnes mœurs, 2 février 1967, paragraphe « Le Magistère non infaillible ».

[15] Léon XIII, Encyclique Satis cognitum, 29 juin 1896, n° 20. [orig. lat. + trad. franç. : Actes de Léon XIII, t. V, p. 25 ; trad. franç. : EP, L’Église, n° 571].

[16] H. Pérennès, art. « Tradition et Magistère », § III, 3, 1, in Dictionnaire apologétique de la foi catholique (DAFC) IV (1922), col. 1786-1787. [N.d.T. : l’orig. portug. cite d’après l’abbé Bernard Lucien, L’infaillibilité du magistère ordinaire universel, p. 5 ; nous citons directement d’après le DAFC].

[17] Auguste-Alexis Goupil, s.j., La Règle de la Foi, t. I, Laval, Goupil, 1953, 3e éd., p. 20.

[18] Joaquín Salaverri, s.j., Sacrae Theologiae Summa…, t. I : Theologia fundamentalis, Tractatus III : De Ecclesia Christi, liber II : De Ecclesiae Magisterio eiusque fontibus, Madrid, Edica, BAC 61, 1962, p. 656 [Notre trad. franç.].

[19] Missel Romain, Préface des Apôtres.

[20] CEC 2034.

[21] CEC 2035.

[22] Pie XII, Encyclique Humani generis, 12 août 1950, n. ° 18.  

[23] Saint Thomas dAquin, Quodl. IX, q. 8, a. 1.

[24] Saint Robert Bellarmin, Controversiarum de conciliis Liber tertius qui est deDe Ecclesia militante, Liber III, cap. XIV : Ecclesiam non posse errare, in Opera omnia, éd. J. Fèvre, Paris, Vivès, 1870, t. II, p. 351.

[25] Dom Antônio de Castro Mayer, Monitor Campista, 26/1/1986.

[26] Pie VI, Constitution Auctorem fidei, 28 août 1794, Denz-Sch 2601.

[27] CEC 2033.

[28] R.P. M. Teixeira-Leite Penido, Le Mystère de lÉglise, VII : Le pouvoir du magistère, p. 294 [N.d.T. : traduit à partir du portugais cité par lauteur].

[29] Dom Antônio de Castro Mayer, Lettre pastorale sur la préservation de la foi et des bonnes mœurs, V.

[30] Pie XII, Encyclique Humani generis, 12 août 1950, n° 20 [orig. lat. : Acta Apostolicae Sedis (AAS), 1950, p. 568 = DzSch 3885].

[31] Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Instruction Donum veritatis, sur la vocation ecclésiale du théologien, 24 mai 1990, n° 24 [orig. lat. : AAS, 1990, p. 1550-1570 ; trad. franç. : DC, 1990, p. 693-701].

b [N.d.T. S. Grégoire le Grand, Morales sur Job, livre XXVIII, chap. VIII. L’original portugais use d’une traduction qui rend un son très légèrement différent, mais substantiellement identique. Nous citons d’après Les Morales de S. Grégoire pape sur le livre de Job…, Lyon, H. Baritel, t. IV (1692), p. 113 ; nous y remplaçons le vieux « intermettant » par notre moderne « interrompant »].

[32] Une situation analogue s’est présentée quand, selon nos informations, un pape postérieur demanda qu’on évitât l’expression utilisée par saint Pie X de « Vierge Prêtre », pour ne pas causer d’ambiguïtés : ce ne serait pas du sens catholique authentique de contester ce pape en citant saint Pie X.

[33] Pie XII, Allocution aux cardinaux et évêques, 31 mai 1954 [orig. lat. : AAS, 1954, 313-3317 ; trad. franç. : DC, 1954, 705-710 ; EP, L’Église, n° 1369 et 1372].

[34] CEC 820.

[35] CEC, n°  1208.

[36] Cf. CEC, n°  1206.

[37] concile de Trente, session XXI, chap. 2 (Denz.-Sch. DzSch 1728).

[38] Pie XII, Encyclique Mediator Dei, 20 novembre 1947, n° 44 & 45 [N.d.T. : Orig. lat. : AAS, 1947, p. 541-542 ; tTrad. franç. : Documents Pontificaux de S.S. Pie XII, 1947, p. 371-372. Pour la présente édition française, on renvoie en outre à la suite du même texte, Section V : « C’est pourquoi au seul Souverain Pontife appartient le droit de reconnaître et établir tout u­sage concernant le culte divin, d’introduire et approuver de nouveaux rites, de modifier ceux mê­mes qu’il aurait jugés devoir être changés ». Cf. aussi l’allocution de Pie XII aux congressistes d’Assise, du 22 septembre 1956 : « On trouve dans la liturgie des éléments immuables, un contenu sacré qui transcende le temps, mais aussi des éléments variables, transitoires, parfois même défectueux. » ; orig. franç. : AAS, 1956, 711-725 ; DC, 1956, 1290-1293].

[39] CIC 83, can. 841 : « Les sacrements étant les mêmes pour lÉglise tout entière et faisant partie du dépôt divin, il revient à la seule autorité suprême de lÉglise dapprouver ou de déterminer ce qui est requis pour leur validité ; ; et il appartient à cette même autorité suprême ou à toute autre autorité compétente, selon le can. 838, § 3 et 4, de fixer ce qui a trait à la licéité de leur célébration, de leur administration et de leur réception, ainsi quau rite à observer dans leur célébration ».

[40] [N.d.T. : Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, 11 juin 1999, Réponse Prot. 947/99/L, à Mgr Gaetano Bonicelli, archevêque de Sienne ; ; traduite par nos soins.] Dom Antônio de Castro Mayer était opposé à largument pour continuer la messe traditionnelle tiré de limmutabilité supposée de la Bulle Quo primum tempore de s. Pie V. Il utilisait la même argumentation que celle dont se servit la Congrégation pour le Culte divin dans la réponse citée ci-dessus.

[41] CardinalCardinal Joseph Ratzinger, Ma vie. Souvenirs, 1927-1977, Paris, Fayard, 1998, p. 135.

[42] Parlant à propos de la liturgie comme fruit dun développement, le card. Joseph Ratzinger écrit : « Ce qui sest passé après le concileconcile signifie tout autre chose : à la place de la liturgie fruit dun développement continu, on a mis une liturgie fabriquée. On est sorti du processus vivant de croissance et de devenir pour entrer dans la fabrication ». Et sexprimant à propos des abus consécutifs, il se plaint en ces termes : « on a une liturgie dégénérée en “show”, où lon essaie de rendre la religion intéressante à laide de bêtises à la mode … avec des succès momentanés dans le groupe des fabricants litrugiquesliturgiques » (Introduction au livre de Mgr Klaus Gamber, La Réforme liturgique en question, trad. franç., Le Barroux, éditions Sainte-Madeleine, 1992, p. 8 et 6).

[43] Sur le « Consilium », il écrit : « Je ne suis pas enthousiaste des travaux. La manière dont la Commission a été changée me déplaît : elle réunit des personnes qui vont encore plus loin dans le sens des nouveautés, et qui, pour beaucoup dentre elles, sont incompétentes ». Et encore : « Jai limpression que lon a beaucoup concédé, surtout en matière de sacrements, à la mentalité protestante… [Le Père Annibale Bugnini] a introduit dans le travail qui lui était imparti des gens habiles et de tendances théologiques progressistes » (Nicola Giampietro, O.F.M. Cap., Il Card. Ferdinando Antonelli e gli sviluppi della riforma liturgica dal 1948 al 1970, Studia Anselmiana, Roma, p. 228 et 264 [trad. franç. : Le cardinal Ferdinando Antonelli et les développements de la réforme liturgique de 1948 à 1970, Versailles, APOC – Le Forum, 2004, p. 306 & 362-363]).

[44] « On ne peut cependant pas ignorer que la réforme (liturgique) a donné origine à de nombreux abus et a conduit dans une certaine mesure à la disparition du respect dû au sacré. Ce fait doit être malheureusement reconnu et excuse un bon nombre des personnes qui se sont écartées de notre Église ou de leur ancienne communauté paroissiale […] » (cardinal Édouard Gagnon, Integrismo e conservatismo, interview « Offerten Zitung – Römisches, nov.-déc. 1993, p. 35).

c [N.d.T. Orig. lat. : AAS, 1980, 113-148 ; trad. franç. : DC, 1980, 301-312].

[45] Interviews à lagence I.Media du 22 juin 2006 et au journal La Croix, Idu 25 juin 2006 (cf. aussi larticle Déviations dans la liturgie de Mgr Fernando Rifan, dans Folha da Manhã du 12 juillet 2006).

[46] Ibidem.

[47] « On ne peut pas considérer que le rite dit de saint Pie V soit éteint et lau­to­rité du Saint-Père a exprimé son accueil bienveillant envers les fidèles qui, tout en reconnaissant la légitimité du rite romain renouvelé selon les indications du concileconcile Vatican II, restent attachés au rite précédent et y trouvent une nourriture spirituelle solide dans leur chemnchemin de sanctification. […] Lan­cien rite romain conserve donc dans lÉglise son droit de citoyenneté au sein de la multiformité des rites catholiques tant latins quorientaux […]. » (Cardinalcar­dinal Darío Castrillón Hoyos, préfet de la Congrégation du Clergé, dans lhomélie prononcée lors de la messe célébrée dans le rite de saint Pie V, dans la Basilique de Sainte-Marie Majeure, à Rome, le 24 mai 2003, en action de grâces pour le 25e anniversaire du pontificat du pape Jean‑Paul II, en présence de cinq cardinaux et de milliers de prêtres et de fidèles. Cette messe commença avec la lecture dun message du Papepape, qui remerciait tous les présents et sunissait à eux).

[48] « Le Saint-Père a lui-même il y a quelque temps, attiré notre attention sur la beauté et la profondeur du missel de saint Pie V […] la liturgie de 1962 est un rite autorisé de lÉglise catholique et une source précieuse de compréhen­sion liturgique pour tous les autres rites […]. Cette liturgie appartient à lÉgli­se tout entière comme le riche véhicule de lesprit qui doit rayonner aussi dans la célébration de la troisième édition typique du missel romain ac­tuel… » (Cardinalcardinal Francis George, Archevêque de Chicago, États-Unis, dans sa préface à Liturgie et sacré, Actes du Colloque 2002 du CIEL, Centre In­ternational dÉtudes Liturgiques [Versailles, CIEL – A.P.O.C., 2003, p. 3-4].

[49] « Bien quil y ait de nombreux motifs qui peuvent avoir poussé un grnadgrand nombre de fidèles à trouver refuge dans la liturgie traditionnelle, le plus important dentre eux est que là ils ont trouvé préservée la dignité du sacré » (Cardinalcardinal Joseph Ratzinger, notre Papepape actuel, conférence aux évêques du Chili, Santiago, 13 juillet 1988).

[50] « Dans le Missel Romain dit de Saint Pie V, […] on trouve de très belles prières par lesquelles le prêtre exprime les plus profonds sentiments d'humilité et de réveréncerévérence en présence des saints mystères : celles-ci révélentrévèlent la substance même de toute Liturgie. » (Pape Jean‑Paul II, Message du 21 septembre 2001 à lAssemblée plénière de la Congrégation pour le Culte divin et la discipline des sacrements, réunie sur le thème « Approfondire la vie liturgique au sein du peuple de Dieu », § 3 ; [absent des AAS, de la DC, et de l’ORLF ; orig. ital. : Notitiae, n° 423 (oct. 2001), p. 401-404]).

[51] « Le rite antique de la Messe sert précisément à beaucoup de personnes pour maintenir vif ce sens du mystère : […] Le rite sacré, avec le sens du mystère, nous aide à pénétrer avec nos sens dans lenceinte du mystère de Dieu. La noblesse dun rite qui a accompagné lÉglise pendant tant dannées vaut bien la peine quun groupe choisi de fidèles maintienne lappréciation de ce rite, et lÉglise, par la voix du Souverain Pontife, la compris ainsi quand elle demande quil y ait des portes ouvertes pour [sa] célébration » (Cardinalcardinal Darío Castrillón, préfet de la Congrégation pour le Clergé, homélie durant la messe de saint Pie V célébrée par lui à Chartres, le 4 juin 2001).

[52] Jean‑Paul II, Encyclique Ecclesia de Eucharistia, 17 avril 2003, déjà citée : « Il ny a pas de doute que la réforme liturgique du concile a produit de grands bénéfices […] Malheureusement, à côté de ces lumières, les ombres ne manquent pas. […] dans tel ou tel contexte ecclésial, des abus qui contribuent à obscurcir la foi droite et la doctrine catholique concernant cet admirable Sacrement. Parfois se fait jour une compréhension très réductrice du Mystère eucharistique. Privé de sa valeur sacrificielle, il est vécu comme sil nallait pas au-delà du sens et de la valeur dune rencontre conviviale et fraternelle. […] LEucharistie est un don trop grand pour pouvoir supporter des ambiguïtés et des réductions » (n° 10) « Il faut malheureusement déplorer que, surtout à partir des années de la réforme liturgique post-conciliaire, en raison dun sens mal compris de la créativité et de ladaptation, les abus nont pas manqué, et ils ont été des motifs de souffrance pour beaucoup […] » (n° 52) ; ; « Le mystère eucharistique – sacrifice, présence, banquet – nadmet ni réduction ni manipulation » (n° 61).

[53] « Mais tous les pasteurs et les autres fidèles doivent aussi avoir une conscience nouvelle non seulement de la légitimité mais aussi de la richesse que représente pour lÉglise la diversité des charismes et des traditions de spiritualité et dapostolat. Cette diversité constitue aussi la beauté de lunité dans la variété : telle est la symphonie que, sous laction de lEsprit-SaintEsprit Saint, lÉglise terrestre fait monter vers le ciel. […] À tous ces fidèles catholiques qui se sentent attachés à certaines formes liturgiques et disciplinaires antérieures de la tradition latine, je désire aussi manifester ma volonté — à laquelle je demande que sassocient les évêques et tous ceux qui ont un ministère pastoral dans lÉglise — de leur faciliter la communion ecclésiale grâce à des mesures nécessaires pour garantir le respect de leurs aspirations. […] [En outre,] on devra partout respecter les dispositions intérieures de tous ceux qui se sentent liés à la tradition liturgique latine, et cela par une application large et généreuse des directives données en leur temps par le Siège apostolique pour lusage du missel romain selon lédition typique de 1962 » (Pape Jean‑Paul II, Lettre apostolique Motu proprio Ecclesia Dei adflicta, 2 juillet 1988 [orig. lat. : AAS, 1988, 1495-1498 ; trad. franç. : DC, 1988, 788-789]).

[54] Par exemple, laffirmation fausse selon laquelle six théologiens protestants auraient participé à lélaboration des nouveaux textes liturgiques, compromettant ainsi la pureté de la doctrine catholique traditionnelle. La Salle de presse du Saint-Siège a répondu officiellement, le 25 février 1976, que, comme certains membres de communautés protestantes avaient exprimé en 1965 le désir daccompagner les travaux de la Commission pontificale pour lapplicatioinapplication de la Constitution sur la liturgie (le Consilium, composé de 2 présidents, 58 membres, 121 consulteurs et 73 conseillers, tous catholiques, bien sûr), en août 1966, six théologiens de différentes dénominations protestantes furent admis comme simples observateurs (tout comme le Bienheureux Papepape Pie IX avait convierconvié, en 1868, tous les chrétiens schismatiques et protestants à assister au concile Vatican I), mais que ces observateurs protestants ne participèrent pas à lélaboration des textes du nouveau Missel. Il ne serait pas honnête, par conséquent, de continuer à user dun tel argument, qui ne correspond pas à la vérité.

[55] Sur les difficultés rencontrées par la réforme liturgique, le Papepape Jean‑Paul II affirmait : « […] certains ont reçu les nouveaux livres avec quelque indifférence […] ; ; dautres, malheureusement, se sont repliés de manière unilatérale et exclusive sur les formes liturgiques précédentes, perçues par certains comme seule garantie de sécurité dans la foi ; ; dautres enfin ont promu des innovations fantaisistes, prenant leurs distances par rapport aux normes établies par lautorité du Siège apostolique ou des évêques, perturbant lunité de lÉglise et la piété des fidèles, heurtant même parfois les données de la foi. » (Jean‑Paul II, Lettre apostolique Vicesimus quintus, à l’occasion du 25e anniversaire de Sacrosanctum Concilium,Lettre apostolique Vicesimus quintus, 4 décembre 1988, n° 11 [orig. lat. : AAS, 1989, p. 897-918 ; trad. franç. vaticane : DC, 1989, p. 518-523, ici trad. franç. : DC, 1989, p. 521]).

[56] Saint Thomas dAquin, De Decem praeceptis…, 6 (cf. CEC 1759).

[57] « En ce temps fort de votre ministère épiscopal que représente la visite ad limina, cest pour moi une grande joie de vous accueillir, vous qui avez la responsabilité pastorale de lÉglise, dans la Région “Est 1” du Brésil, à laquelle appartiennent les diocèses de lÉtat de Rio de Janeiro, et “lUnion Saint-Jean-Marie-Vianney”, que jai voulu instituterinstituer à Campos comme Administration apostolique personnelle » (Discours du Saint-Père le Papepape Jean‑Paul II aux évêques de la Région Est 1, en visite ad limina, le 5 septembre 2002 [trad. franç. : L’ORLFOsservatore Romano en langue française, 2002, n° 38, p. 4, § 1]).

d [N.d.T. Jean‑Paul II, Lettre pontificale autographe Ecclesiae unitas, 25 décembre 2001, à lévêque Mgr Licinio Rangel et à lUnion « Saint Jean-Marie Vianney » ; orig. lat. : AAS, 2002, 267-268 ; trad. franç. : DC, 2002, 354-355].

[58] Jean‑Paul II, Lettre apostolique Vicesimus quintus, 4 décembre 1988 [trad. franç. : DC, 1989, 522].

[59] « Pour terminer, Nous voulons donner force de loi à tout ce que Nous avons exposé plus haut sur le nouveau Missel romain. […] Nous ordonnons que les prescriptions de cette Constitution entrent en vigueur le 30 novembre prochain de cette année, premier dimanche de lAvent. Nous voulons que ce que Nous avons établi et prescrit soit tenu pour ferme et efficace maintenant et à lavenir, nonobstant, si cest nécessaire, les Constitutions et Ordonnances apostoliques données par nos Prédécesseurs et toutes les autres prescriptions même dignes de mention spéciale et pouvant déroger à la loi. » (Paul VI, constitution Constitution apostolique Missale Romanum, du 3 avril 1969, par laquelle est promulgué le Missel Romain, restauré selon le décret du concileconcile œcuménique Vatican II, pour perpétuelle mémoire [orig. lat. : AAS, 1969, p. 221-222 ; ; trad. franç. : DC, 1969, p. 517]).

[60] Conformément à ce que nous dirons sur le concileconcile Vatican II (citation du Père Julio Meinvielle, cf. note 103111), lacte qui procède vraiment du magistère, et qui mérite lassistance du Saint-Esprit, cest le texte dans sa pleine formulation objective, promulgué par le Papepape, sans égard pour lopinion particulière quont pu soutenir Mgr Annibale Bugnini ou les membres du Consilium. Des cas similaires sétaient déjà produits dans lhistoire, où le rédacteur dune encyclique papale émit une opinion interprétative dune encyclique en discordance avec le texte formulé objectivement et promulgué par le Papepape, le seul à être évidemment valide comme acte du magistère, quelle que fût lidée du rédacteur.

[61] « Les sacrements étant les mêmes pour lÉglise tout entière et faisant partie du dépôt divin, il revient à la seule autorité suprême de lÉglise dapprouver ou de déterminer ce qui est requis pour leur validité ; ; et il appartient à cette même autorité suprême ou à toute autre autorité compétente, selon le can. 838, § 3 et 4, de fixer ce qui a trait à la licéité de leur célébration, de leur administration et de leur réception, ainsi quau rite à observer dans leur célébration ».

[62] Michael Davies, 31 mai 1997, Introduction à la 2e édition de son livre I am with you always [Je suis avec vous pour toujours], Longprairie (Minnesota), The Neumann Press, p. 15-16. Michael Davies (1936-2004) fut le président international dUna Voce, mouvement pour la défense de la Messe Traditionnelle, existant dans plus de 40 pays, président effectif de 1995 à 2003, et président honoraire de 2003 à 2004. Il est lauteur de dizaines de livres en défense de la Tradition, surtout de la liturgie traditionnelle.

[63] Préfacé par Mgr Marcel Lefebvre. [Abbé Didier Bonneterre, Le mouvement liturgique, Broût-Vernet, Fideliter, 1980, p. 12].

[64] Le Dr Arnaldo Vidigal Xavier da Silveira, dans lintroduction de son livre La Nouvelle Messe de Paul VI : quen penser ?, Introduction, Chiré-en-Montreuil – Vouillé, DPF, p. 6)Considérations sur l“Ordo Missae” de Paul VI, pour répondre à léventuelle objection quon ne peut pas mettre en doute lorthodoxie dun tel acte papal, insinue la supposition dun pape hérétique ou schismatique et de la perte du pontificat, objet de la moitié de son livre. Réellement, pour beaucoup, le sédévacantisme finit par être une tentative erronée de refuge, due à limpasse théologique sans issue qui consiste à soutenir lhétérodoxie de la nouvelle Messe.

[65] Nous pourrions comme exemple, citer simplement le Père Guérard des Lauriers, connu comme lauteur principal du Bref examen critique, présenté à Paul VI par les cardinaux Ottaviani et Bacci. Il proclama formellement vacant le Saint-Siège et se fit sacrer évêque schismatique.

[66] Lun deux, quelques années avant de mourir, me dit textuellement : « Pour moi, lÉglise catholique, comme institution, a disparu ».

[67] Quand jai tenté, par charité, de convaincre certains dentre eux, ils me répondirent : « Cette messe est un théâtre ; ; et lÉglise qui soutient cette messe est un théârethéâtre aussi, elle est fausse ». Ensuite, ils maffirmèrent quils ne croyaient plus dans lEucharistie ni en aucun sacrement. Ils avaient perdu la foi. Ils tombèrent dans lhérésie et dans le schisme.

[68] Je viens de recevoir de lun dentre nos anciens amis « traditionalistes » un livre intitulé : « Rome : siège de lAntéchrist — une nouvelle fausse Église catholique » ! Dans la dédicace, il ne reconnaît pas mon épiscopat. Dans le livre, il attaque Monsieur G. Montini, Monsieur K. Wojtyla et Monsieur J. Ratzinger (sic) !

[69] Pie XII, Encyclique Mystici corporis, 29 juin 1943, n° 40 [orig. lat. : AAS, 1943, 211. Cf. EP, LÉglise, n° 1041 (comme le texte portugais, nous remplaçons « lumineux » par « visibles »)].

[70] Sermo ad Caesariensis Ecclesiae plebem.

[71] Jean‑Paul II, Encyclique Ecclesia de Eucharistia, 17 avril 2003, n° 35 [trad. franç. : DC, 2003, 380].5.

[72] Ignace dAntioche, s., Epist. ad Smyrnenses viii, 1 ; [trad. franç. : Les Écrits (Les) des Pères Apostoliques. Texte intégral, Introd. Bertrand Dominique, s.j., Paris, Cerf, 1990, 548 p. (Foi Vviante, 244), p. 207-208]. Voir aussi tout le n° 1369 du CEC.

[73] Voir plus loin, au § 7 de lappendice I de la présente Orientation pastorale, la citation des théologiens approuvés, parmi lesquels le Père John P. M. van der Ploeg, O.P.

[74] Michael Davies, Introduction à la 1e édition de son livre I am with you always [reproduite dans la 2e éd.], Longprairie (Minnesota), The Neumann Press, p. 13.

[75] Cette acceptation de la nouvelle liturgie de la Messe pendant presque 40 ans de la part de toute lÉglise enseignante (le Papepape et tous les évêques en communion avec lui) est aussi un argument en faveur de sa légitimité. Il existe un parallèle : Saint Alphonse de Liguori affirme que, si un Papepape avait été élu de manière illégitime ou par fraude, il suffit que par la suite il soit accepté par toute lÉglise pour se retrouver véritable pontife (Verità della fede, in Opere…, vol. VIII, p. 720, n. 9).

[76] « La loi de la prière établit la loi de la foi »… « La loi de la foi doit établir la loi de la prière » (Pie XII, encyclique Encyclique Mediator Dei, 20 novembre 1947, n° 43).

[77] « Un exemple de cela fut une messe véritablement abominable, célébrée le 6 avril 2003, dans la paroisse de N.-D. du Carmel, à Belo Horizonte. Elle sinsère dans la crise ecclésiale appelée “autodémolition de lÉglise”, parmi les obscurités de la Réforme réforme liturgique, comme dont le Papepape [Jean‑Paul II] sense  plaint dans sa dernière encyclique, “des abus qui contribuent à obscurcir la foi droite et la doctrine catholique”.   Dans cette Messe, la lecture de lÉvangile tout de suite a créé la stupéfaction : “Proclamation de la Bonne Nouvelle selon la narration de la communauté de Jean, 12, 20-27 !” Cela révèle lhérésie moderniste, déjà condamnée par le Magistère de lÉglise, hérésie qui nie lhistoricité des Évangiles, les attribuant non aux EvangélistesÉvangélistes, mais à la foi des premières communautés chrétiennes. Le Credo contient des phrases étranges : “Je crois en la Vie, je crois en lHistoire, en la citoyenneté qui rejette la routine, le rêve est de construire le bien-être avec la paix, je crois en lÉglise, peuple uni dans la solidarité sans exclusions. Salut pour tous, dans un climat de fête”. A À la consécration, on changea la formule, les paroles de Jésus, rendant cette messe   non seulement illicite, mais invalide : “Prenez et mangez, vous tous, ce pain du partage je le suis en mon corps, avec vous et donné pour vous, pour tous je serai lamour du Père” ; ; “Prenez et buvesbuvez, ceci est le calice de la bénédiction, en mon sang de la nouvelle et éternelle alliance, répandu pour vous et pour tous. Sentez-vous enveloppé dans la compassion”. Créativité ?! Que de sacrilèges on commet en ton nom » (Article de Mgr Fernando Rifan, dans le Journal Feuille du Matin Folha da Manhã [Feuille du Matin], du 11 juin 2003).

[78] Cf. Pie VI, Constitution apostolique Auctorem fidei, du 28 août 1794, condamnant les erreurs du Synode janséniste de Pistoie : « La prescription du synode, […], où, après avoir affirmé quil faut distinguer dans chaque article ce qui concerne la foi et lessence de la religion de ce qui est propre à la discipline”, il ajoute que “même dans celle-ci (la discipline), il faut distinguer ce qui est nécessaire ou utile pour retenir les fidèles dans lesprit, de ce qui est inutile ou trop lourd à porter pour la liberté des fils du Nouveau Testament, et plus encore de ce qui est périlleux et nuisible, comme conduisant à la superstition et au matérialisme”. Pour autant quen raison des termes généraux utilisés, elle inclut et soumet à lexamen prescrit même la discipline établie et approuvée par lÉglise, comme si lÉglise, qui est régie par lEsprit de Dieu, pouvait constituer une discipline non seulement inutile et trop lourde à porter pour la liberté chrétienne, mais encore dangereuse, nuisible, et conduisant à la superstition et au matérialisme : fausse, téméraire, scandaleuse, pernicieuse, offensive des oreilles pies, injurieuse à lÉglise et à lEsprit de Dieu qui la conduit, pour le moins erronée. » (DzSch 2678 ;  [trad. franç : EP, LÉglise, vol. I, 1959, n° 122, p. 84]).

[79] « Ce serait sans aucun doute une chose coupable et tout à fait contraire au respect avec lequel on doit recevoir les lois de l’egliselÉglise, que de réprouver, par un dérèglement insensé dopinions la discipline établie par elle, et qui renferme ladministration des choses saintes, la règle des mœurs, et les droits de lÉglise et de ses ministres ; ; ou bien de signaler cette discipline comme opposée aux principes certains du droit naturel, ou de la présenter comme défectueuse, imparfaite et soumise à lautorité civile » (Grégoire XVI, Encyclique Mirari vos, du 15 août 1832, n° 9 [EP, L’Église, t. I, n° 163]).

[80] « Assurément notre pieuse Mère [lÉglise] brille dun éclat sans tache dans les sacrements où elle engendre ses fils et les nourrit ; ; dans la foi quelle garde toujours à labri de toute atteinte ; ; dans les lois très saintes quelle impose à tous et les conseils évangéliques quà tous elle propose ; ; enfin dans les grâces célestes et les charismes surnaturels par lesquels elle engendre avec une inlassable fécondité des troupes innombrables de martyrs, de confesseurs et de vierges. Ce nest cependant pas à elle quil faut reprocher les faiblesses et les blessures de certains de ses membres, au nom desquels elle-même demande à Dieu tous les jours : “Pardonnez-nous nos offenses”, et au salut spirituel desquels elle se consacre sans relâche, avec toute la force de son amour maternel. » (Pie XII, Encyclique Mystici corporis, 29 juin 1943, n° 65 [trad. franç. : EP, L’Église, n° 1066]).

[81] Un rite ou une cérémonie, en eux-mêmes, peuvent être ambigus, cest-à-dire avoir diverses significations. Une génuflexion, par exemple, peut signifier la moquerie, comme dans le couronnement dépines de Jésus, ou un acte de vraie adoration. Ainsi, un seul Confiteor à la place de deux, pourrait signifier la confusion entre le sacerdoce ministériel et celui des fidèles ou une pure simplification du rite, accompagnée de lexplication du magistère sur la doctrine du sacerdoce ministériel distinct du sacerdoce commun. De même, une seule génuflexion au lieu de deux dans la consécration de la messe pourrait signifier linterprétation protestante ou linterprétation catholique de la consécration. Le Catéchisme de lÉglise catholique enseigne que la transsubstantiation se réalise par « la force des paroles du prêtre, par laction du Christ et par le pouvoir de lEsprit Saint », rejetant linterprétation protestante pour laquelle ce serait par la foi des fidèles, comme lont dit certains qui cherchaient à forcer cette interprétation du Nouvel Ordo (cf. CEC 1353). De même aussi, dans la messe de saint Pie V, le signe de croix tracé sur lhostie consacrée pourrait signifier une bénédiction, ce qui induirait à la négation de la présence réelle, ou un signe plus solennel dindication. Mais linstance qui donne le sens des rites est le Magistère de lÉglise et non les hérétiques ou limagination des personnes.

[82] Par exemple lencyclique Ecclesia de Eucharistia (17/4/2003), où le Saint-Père le Papepape Jean‑Paul II, outre quil met en valeur les dogmes de la présence réelle et du sacercocesacerdoce ministtérielministériel distinct du sacerdoce deesdes fidèles, parle 48 fois du caractère sacrificiel de la Sainte Messe. Le CEC (de 1997) enseigne avec clarté le caractère sacrificiel de la Messe (n° 1330, 1365-1367), soulignant son aspect propitiatoire (n° 1367). Quon aille voir aussi la toute dernière précision doctrinale concernant la traduction du « pro multis », faite par la Congrégation pour le Culte divin le 17 octobre 2006 [Lettre circulaire aux évêques, Prot. N. 467/05/L ; original en 6 langues : Notitiae, n° 481-482 (sept.-oct. 2006), p. 441-458]. Cf. aussi laffirmation du cardinal Ottaviani, où il se montre satisfait des précisions doctrinales, postérieures à sa lettre, fournies par le Papepape Paul VI (citée plus loin, p. 49 67).

[83] Ainsi, après toutes les explications et précisions donnéeesdonnées par le Magistère, on ne peut pas dire que la Messe du rite romain actuel soit exactement la même quen 1969. Outre ladhésion requise aux actes du Magistère, léclaircissement, en en précisant le sens catholique, a constitué un progrès bénéfique, lequel requiert honnêtement en contrepartie, une manière de laborder différente de celle quon avait relativement au Nouvel Ordo de 1969.

[84] Cf. Joaquín Salaverri, s.j., Sacrae Theologiae Summa, t. I : Theologia fundamentalis, Tract. III : De Ecclesia Christi, L. 2, c. 5, a. 2, Thèse XXI (BAC 061), Madrid, 51962, p. 775-784, n° 865-870.

[85] J. M. Hervé (chanoine) (recteur du grand séminaire de Saint-Brieuc), Manuale theologiæ dogmaticæ, vol. I : De Revelatione Christiana, De Ecclesia Christi, De fontibus Revelationis, Paris, Berche & Pagis, 161935, p. 515.

[86] Joseph Haegy, c.s.sp., Manuel de liturgie…, t. I, p. 2 [N.d.T. Ce livre a connu de nombreuses rééditions et adaptations par les PP. Léon Le Vavasseur et Louis Stercky. Nous navons pas sur trouver léd. à laquelle se réfère lauteur, et avons donc dû retraduire du portugais vers le français].

[87] Wernz & Vidal, Ius canonicum, t. II, p. 410 ; ; voir aussi t. I, p. 278. [N.d.T. : Notre trad. franç. à partir de la trad. portugaise de lauteur.]

[88] Tanquerey Adolphe, p.s.s. (1854-1932), Synopsis theologiae dogmaticae ad mentem s. Thomae Aquinatis hodiernis moribus accommodata, t. I : Synopsis theologiae dogmaticae fundamentalis : De religione revelata in genere ; ; de Crhristo Dei legato ; ; de vera Christi Ecclesia ; ; de   Constitutione Ecclesiae catholicae ; ; de fontibus revelationis, 24e éd. J. B. Bord, Parisiis - Romae – Tornaci, Desclée, 241937, 3 vol.n° 932, p. 625. [N.d.T. : nous traduisons directement sur lorig. lat.].

[89] Hermann, Institutiones Theologiae Dogmaticae, Romae, 4e éd., Della Pace, 1908, t. I, p. 258.

[90] John P. M. van der Ploeg, O.P., docteur et maître en théologie, docteur en Écriture Sainte, professeur émérite de lUniversité de Nimègue, membre de lAcadémie royale des Sciences des Pays-Bas, dans sa préface [p. 8-9] au livre I am with you always [Je suis avec vous pour toujours] de Michael Davies, écrivain traditionnel, président dUna Voce international.

[91] Orig. franç. de cette lLettre du Cardinalcardinal Ottaviani à Dom Marie-Gérard Lafond, o.s.b., [du 17 février 1970, pour le remercier de lenvoi de la Note doctrinale sur le Nouvel Ordo Missae publiée par les Chevaliers de Notre-Dame ; cf. La Croix, 23 mars 1970 « Confirmation » ; DC, 1970, 343, se référant à DC, 1970, 215-216].

[92] Cruzado Español, 25 mai 1970.

[93] Cité dans Nicola Giampietro, O.F.M. Cap., Il Card. Ferdinando Antonelli e gli sviluppi della riforma liturgica dal 1948 al 1970, Studia Anselmiana, Roma, p. 258 [trad. franç. : Le cardinal Ferdinando Antonelli et les développements de la réforme liturgique de 1948 à 1970, Versailles, APOC – Le Forum, 2004, p. 353].

[94] Mgr Antônio de Castro Mayer, Lettre du 12 septembre 1969 (lettre que Dom Antônio ne voulut jamais publier durant son épiscopat).

[95] Mgr Antônio de Castro Mayer, Lettre du 25 janvier 1974 (lettre que Dom Antônio ne voulut jamais publier durant son épiscopat).

[96] Jai conversé récemment avec le Dr. Arnaldo Vidigal Xavier da Silveira, qui partagea avec Dom Antônio toute cette affaire et fut lauteur du livre sur la Messe de Paul VI supervisé par Dom Antônio, et il ma assuré que « Dom Antônio ne fut jamais de lopinion que lon ne peut pas assister à la nouvelle Messe ».

[97] Le pape Paul VI parlait de « fumée de Satan » pénétrant dans le Temple de Dieu (Homélie du 29 juin 1972 [déjà citée]) et S.S. le pape Jean‑Paul II se plaignait en ces termes : « des idées contredisant la vérité révélée et enseignée depuis toujours ont été répandues à pleines mains ; de véritables hérésies ont été propagées dans le domaine dogmatique et moral, créant des doutes, des confusions, des rébellions […] même la liturgie a été manipulée » (Discours au 1er congrès national sur les missions populaires, 6 février 1981 [DC, 1981, 346]).

e [N.d.T. : Le texte de Paul VI cité par lauteur correspond au résumé paraphrasé fourni par la DC, 1972, p. 658, reproduit ici].

[98] LOsservatore Romano, éd. anglaise, 24/12/1984 (cf. aussi Joseph, Card. Ratzinger, Vittorio Messori, Entretien sur la foi, trad. franç. : Paris, Fayard, 1985, p. 30 [N.d.T. cest cette version française, substantiellement identique à linterview de départ, que nous reproduisons ici]).

[99] Joseph, Card. Ratzinger, Vittorio Messori, Entretien sur la foi, trad. franç. : Paris, Fayard, 1985, p. 31.

[100] Id., ibidem.

[101] « Cest lanti-esprit selon lequel lhistoire de lÉglise devrait commencer à partir de Vatican II, considéré comme une espèce de point zéro »… « combien danciennes hérésies ont réapparu en ces années, présentées comme des nouveautés » (Joseph, Card. Ratzinger, Vittorio Messori, Entretien sur la foi, trad. franç. : Paris, Fayard, 1985, p. 36-37).

[102] Jean XXIII, Bulle Humanae salutis, de convocation du concile Vatican II, 25 décembre 1961 [orig. lat. : AAS, 1962, 5-13 ; trad. franç. : DC, 1962, 97-104] : « […] après avoir entendu lavis des cardinaux de la sainte Église romaine, par lautorité de Notre Seigneur Jésus-Christ, des saints apôtres Pierre et Paul et la Nôtre, Nous annonçons, décrétons et convoquons pour lannée prochaine 1962 le IIe concile œcuménique et universel du Vatican, qui sera célébré solennellement dans la basilique patriarcale du Vatican… » [N.d.T. Nous rétablissons quelques mots manquant dans le texte portugais].

[103] Paul VI, 12 janvier 1966, Allocution à laudience générale ; orig. ital. : L’Osservatore Romano, 13 janvier 1966 ; trad. franç. : DC, 1966, col. 418-420.

f Cf. plus haut la section VII de la 1ère partie de cette Orientation pastorale, avec l’importante citation du P. Dr. M. Teixeiria-Leite Penido, O Mistério da Igreja, VII, O poder do Magistério, p. 294.

g [N.d.T. Lauteur fait ajouter dans la présente traduction française le texte suivant de s. François de Sales : « Vous avez ouï dire, Théotime, quès conciles généraux, il se fait des grandes disputes et recherches de la vérité, par discours, raisons et arguments de théologie, mais, la chose étant débattue, les Pères, cest-à-dire les évêques et spécialement le Pape, qui est le chef des évêques, concluent, résolvent et déterminent, et la détermination étant prononcée, chacun sy arrête et acquiesce pleinement, non point en considération des raisons alléguées en la dispute et recherche précédente, mais en vertu de lautorité du Saint-Esprit, qui, présidant invisiblement ès conciles, a jugé, déterminé et conclu par la bouche de ses serviteurs quil a établis pasteurs du christianisme. Lenquête donc et la dispute se fait au parvis des prêtres, entre les docteurs, mais la résolution et lac­quies­cement se fait au sanctuaire, où le Saint-Esprit qui anime le corps de lÉglise parle par les bouches des chefs dicelle, selon que notre Seigneur la promis » (Traité de lamour de Dieu, l. II, chap. XIV, p. 106).

[104] Dom Antônio de Castro Mayer, Instruction pastorale sur lÉglise, chap. VI. Ne sont donc pas dans le droit chemin ceux qui traitent le concile Vatican II comme un conciliabule, une réunion dhérétiques ou comme un concile schismatique (D. M. L. dans Mysterium fidei, Denoyelle, n° 33, oct.-déc. 1976).

[105] « Dun côté, il existe une interprétation que je voudrais appeler herméneutique de la discontinuité et de la rupture” […] Lherméneutique de la discontinuité risque de finir par une rupture entre Église préconciliaire et Église post-conciliaire. Celle-ci affirme que les textes du concile comme tels ne seraient pas encore la véritable expression de lesprit du concile. […] À lherméneutique de la discontinuité soppose lherméneutique de la réforme […] “Il est nécessaire que cette doctrine certaine et immuable, qui doit être fidèlement respectée, soit approfondie et présentée dune façon qui corresponde aux exigences de notre temps. En effet, il faut faire une distinction entre le dépôt de la foi, cest-à-dire les vérités contenues dans notre vénérée doctrine, et la façon dont celles-ci sont énoncées, en leur conservant toutefois le même sens et la même portée” (Jean XXIII) » (Benoît XVI, Discours à la Curie romaine, 22 décembre 2005 [orig. ital. : AAS, 2006, 40-53 ; trad. franç. : DC, 2006, 56-63]).

[106] Jean‑Paul II, Discours à la réunion plénière du Sacré-Collège, le 5 novembre 1979 [N.d.T. : orig. lat. : AAS, 1979, 1447-1457 ; trad. franç. : DC, 1979, 1003].

[107] Joseph, Card. Ratzinger, Vittorio Messori, Entretien sur la foi, trad. franç. : Paris, Fayard, 1985, p. 29 [les passages entre crochets ont été ajoutés par le cardinal lui-même à la relecture].

[108] Dom Antônio de Castro Mayer, Lettre pastorale sur les documents conciliaires concernant la Sainte Liturgie et les instruments de communication sociale, p. 7.

[109] Dom Antônio de Castro Mayer, Lettre pastorale, cf. « Pour un christianisme authentique », p. 277.

[110] Jean XXIII, Bulle Humanae salutis, 25 décembre 1961, déjà citée [trad. franç. : DC, 1962, 98].

[111] Abbé Julio Meinvielle, De Lamennais à Maritain, appendice II : La déclaration conciliaire sur la liberté religieuse et la doctrine traditionnelle, Buenos Aires, éd. Theoria, 1967.

[112] Évêques d’Allemagne, Déclaration collective [janv.-fév. 1875] et Pie IX, Lettre apostolique Mirabilis illa constantia, 4 mars 1875, DzSch 3112-3117.

[113] Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Lettre circulaire Cum Oecumenicum ; orig. lat. : AAS, 1966, p. 659-661. [N.d.T. Trad. franç. : DC, 1966, 843-848. Nous reproduisons la trad. de la DC, mais avec quelques modifications, surtout au début, visant à une plus grande correction ou à une plus grande littéralité ; en outre, nous ajoutons quelques mots qui, par suite dinterpolation, ont sauté à lintérieur même du texte portugais].

[114] S. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Notification à propos du livre « Église : charisme et pouvoir » du P. Leonardo Boff, o.f.m. [orig. ital. : AAS, 1985, 756-762 ; trad. franç. : DC, 1985, 485].

[115] Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Déclaration Dominus Iesus, 6 août 2000, n° 16 et 17 [orig. lat. : AAS, 2000, 742-765 ; trad. franç. : DC, 2000, 812-822].

[116] Déclaration Dominus Iesus, cit., n° 21 et 22.

h [N.d.T. : Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Notification du 24 janvier 2001, n° 8 ; version franç. officielle du Vatican : DC, 2001, p. 273 ; texte italien : AAS, 2002, 141-145].

[117] Dom Antônio de Castro Mayer, Instruction pastorale sur lÉglise, 2 mars 1965, p. 25.

[118] Dom Antônio de Castro Mayer, Instruction pastorale sur lÉglise, du 2 mars 1965, p. 51-52.

[119] Cf. Jean XXIII, Encycl. Pacem in terris, 11 avril 1963 : AAS 55 (1963), 260-261 ; Pie XII, Radio-message, 24 décembre 1942 : AAS 35 (1943), 19 ; Pie XI, Encycl. Mit brennender Sorge, 14 mars 1937 : AAS 29 (1937), 160 ; Léon XIII, Encyc. Libertas praestantissimum, 20 juin 1888 : Acta Leonis XIII, 8 (1888), 237-238 [Note officielle du texte conciliaire].

[120] Par exemple : Dom Basile Valuet, o.s.b., La liberté religieuse et la Tradition catholique, œuvre en 6 volumes, Abbaye Sainte-Madeleine, Le Barroux, 1998 ; P. Louis-Marie de Blignières et P. Dominique-Marie de Saint-Laumer, Nos recherches sur la liberté religieuse et Le droit à la liberté religieuse et la liberté de conscience, Sedes Sapientiae, 1988 ; Abbé Bernard Lucien, entre autres : Vatican II et lherméneutique de la continuité, Sedes Sapientiae [2006] — Labbé Bernard Lucien est un prêtre de larchidiocèse de Vaduz, en Liechtenstein, professeur de philosophie et théologie en diverses maisons de formation sacerdotale traditionalistes ; labbé Julio Meinvielle, écrivain, philosophe et théologien argentin, très considéré dans les milieux traditionalistes.

[121] Abbé Julio Meinvielle, La déclaration conciliaire sur la liberté religieuse et la doctrine traditionnelle, appendice II du livre De Lamennais à Maritain, Buenos Aires, Ediciones Theoria, 1967.

[122] concile Œcuménique Vatican II, 7 décembre 1965, Déclaration Dignitatis humanae, 15.

i [N.d.T. 1er rapport oral de Mgr Émile de Smedt, Congrégation générale 70e, 19 nov. 1963 : Acta Synodalia, II/v, p. 491-492 ; trad. franç. : DC, 1964, 71-81].

[123] Dignitatis humanae, 1.

[124] Dignitatis humanae, 7. Cf. CEC 2109.

[125] Dignitatis humanae, 1.

[126] Cf. concile Œcuménique Vatican II, 7 décembre 1965, Constitution pastorale Gaudium et spes, 76.

[127] Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Note doctrinale sur certaines questions relatives à la participation et au comportement des catholiques dans la vie politique, 24 novembre 2002, § 6 [orig. ital. : AAS, 2004, 359-370 ; trad. franç. : DC, 2003, 130-136].

[128] Cf. Compendium de la doctrine sociale de lÉglise, n° 571.

[129] Dignitatis humanae, 14.

[130] Dignitatis humanae, 9-12.

[131] S. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, 22 mars 1986, Instruction Libertatis conscientia, sur la liberté chrétienne et la libération, § 13 [orig. lat. : AAS, 1987, p. 554-599 ; trad. franç. : DC, 1986, 393-411].

[132] CEC 1740.

[133] CEC 1747-1748.

[134] CEC 2104-2105.

[135] CEC 2108.

[136] CEC 2109.

[137] CEC 2244.

[138] CEC 2245.

[139] CEC 2246.

[140] CEC 2254.

[141] CEC 2255.

[142] CEC 2256.

[143] CEC 2257.

[144] Texte dans le livre de l’Abbé Denis Marchal, Mgr Lefèbvre, vingt ans de combat pour le sacerdoce et la foi, 1967-1987, Paris, NEL, 1988, 157 p., ici p. 128-130. [N.d.T. Nous avons corrigé les erreurs de chiffres commises par le texte de l’abbé Marchal. Nous proposons la traduction suivante des trois alinéas en latin : « 1. Moi, Marcel Lefebvre, je déclare que j’adhère par une soumission religieuse de l’esprit à l’intégralité de la doctrine du concile Vatican II, à savoir de la doctrine “dans la mesure où elle est comprise à la lumière de la sainte Tradition, et où elle est référée au magistère constant de l’Église elle-même (cf. Jean‑Paul II, Allocution au Sacré-Collège, 5 nov. 1979, AAS LXXI (1979/15), p. 1452). Cette soumission religieuse tient compte de la qualification théologique de chacun des documents établie par le Concile lui-même (Notification donnée lors de la 123e Congrégation générale, le 16 nov. 1964). 2. Moi, Marcel Lefebvre, je reconnais que le Missel Romain établi par le Souverain Pontife Paul VI pour l’Église universelle, a été promulgué de par la légitime souveraine autorité du Saint-Siège, auquel revient le droit de légiférer en matière liturgique dans l’Église, et est de ce fait en lui-même légitime et catholique. Pour cette raison, je n’ai pas nié et je ne nierai pas que les messes célébrées fidèlement selon le nouvel Ordo sont valides et je ne voudrais en aucune façon insinuer qu’elles sont hérétiques ou blasphématoires, et je n’ai pas l’intention d’affirmer qu’elles doivent être évitées par les catholiques. [3] Je me sens obligé en conscience d’ajouter que l’application concrète de la réforme liturgique pose de graves questions, lesquelles doivent provoquer une diligente sollicitude de la part de l’autorité suprême. C’est pourquoi je désire que cette même autorité procède dans le futur à une nouvelle révision des livres liturgiques ».

[145] Lettre du Cardinal Ratzinger, Préfet de la Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi, à Mgr Marcel Lefebvre, datée du 20 juillet 1983 ; orig. franç. : Fideliter, 45 (mai-juin 1985), p. 6-20 (avec abondants commentaires de la Fraternité Saint-Pie X).

[146] CEC 2040.

[147] Saint Pio de Pietrelcina, Lettre au pape Paul VI, le 6 septembre 1968, qui offrait sa vie pour le pape. Le saint Padre Pio mourut le 23 septembre 1968.

j [N.d.T. Ici, le saint est légèrement inexact, et grâce au magistère ultérieur, on sait que les Évêques diocésains sont, dans leur diocèse, représentants non pas simplement du pape, mais du Christ même.]

[148] Saint Pierre-Julien Eymard, La Divine Eucharistie, vol. 5, partie III : De la dévotion à la sainte Église, p. 103-105. [N.d.T. Nayant pas loriginal français, nous retraduisons à partir du portugais].

[149] Dom Antônio de Castro Mayer, Veritas, avril-mai 1980.

[150] Dom Antônio de Castro Mayer, Instruction pastorale sur lÉglise, 2 mars 1965, p. 57 et 58.