Pie XII 1949 - RADIOMESSAGE AU CONGRÈS EUCHARISTIQUE DE L'EQUATEUR
(20 juin 1949) 1
Le 10 juin 1949, les autorités du gouvernement de Prague annon-çaient la formation d'un Comité national d'Action Catholique ; vaste camouflage, ce comité était de fait un instrument dans les mains d'un gouvernement communiste pour saper l'autorité de l'Episcopat. Ce Comité pouvait jeter la confusion dans les esprits ; aussi le Saint-Office formula-t-il un décret condamnant très clairement cette initiative truquée :
Les adversaires de l'Eglise catholique en Tchécoslovaquie ont récemment insidieusement fondé ce qu'ils appellent faussement « l'Action Catholique » par laquelle ils tentent d'amener les catholiques de cette République à se séparer de l'Eglise catholique et de s'éloigner de la soumission qui est due aux pasteurs légitimes de l'Eglise.
Cette action est d'autant plus inique que ses promoteurs n'ont pas hésité à faire pression sur beaucoup de personnes par la force et le mensonge, afin de les amener à inscrire leurs noms sur la liste des membres ; bien plus, ils ont eu l'audace d'inscrire et de rendre publics comme faisant partie de ce mouvement, les noms de nombreux prêtres et laïcs qui n'y ont jamais adhéré et qui même lui ont manifesté leur hostilité.
C'est pour cette raison, que la Suprême Sacrée Congrégation du Saint-Office, dont la tâche est de sauvegarder l'intégrité de la foi et de la morale au nom et avec l'autorité du
Souverain Pontife, réprouve et condamne comme schisma-tique ce mouvement qu'on appelle frauduleusement « l'Action Catholique », et, en même temps, déclare schisma-tiques et apostats, tous les ecclésiastiques et laïcs qui y ont consciemment adhéré ou y adhéreront, ainsi que les auteurs et promoteurs de ce mouvement. Ils ont encouru et encourront ipso facto l'excommunication réservée speciali modo au Siège apostolique dont parle le Canon 2314 1 sans préjudice des autres sanctions du droit canonique dont ils seront frappés dans la suite, si (puisse Dieu l'écarteT) ils persévèrent comme contumaces dans la censure.
1 Le Canon 2314 proclame que tous les apostats qui renoncent à la loi catholique ainsi que les hérétiques et schismatiques encourent ipso facto l'excommunication.
DISCOURS A M. PIETRO TRONCOSO SANCHEZ Ambassadeur de la République dominicaine (20 juin 1949) 1
Un nouvel ambassadeur de la République dominicaine 2 ayant été nommé, le Saint-Père le salua en ces termes :
Le changement de direction en l'Ambassade Dominicaine 3 auprès de Nous qui, par disposition de Monsieur le Président de la République 4, passe des mains de votre illustre Prédécesseur en celles de Votre Excellence, Nous offre l'agréable occasion de rappeler une fois de plus les liens étroits que, dès les jours de sa découverte, unissent les fils et les filles de votre beau pays au centre de l'Eglise catholique.
Histoire, plusieurs fois séculaire, de christianisme et de fidélité, que semblent proclamer les vieux murs de votre insigne cathédrale commencée dès les débuts du xvie siècle, où se trouvent d'anciennes toiles de Murillo et de Velaz-quez, parmi lesquelles se détachent gravement les portraits authentiques de ces Rois Catholiques qui se proposèrent,
1 D'après le texte espagnol des A. A. S., XXXXI, 1949, p. 365.
2 Le nouvel Ambassadeur, le professeur Pietro Troncoso Sanchez, est né en 1904, à Saint-Domingue ; après des études de philosophie et de droit il fut avocat jusqu'en 1941, puis devint professeur de philosophie, ensuite Ministre plénipotentiaire en Argentine et Bolivie et Ambassadeur au Mexique ; il était au moment de sa nomination auprès du Saint-Siège Premier Président de la Cour suprême de Justice.
3 On lira le Discours à Son Exc. M. Robert Despradel, l'ambassadeur précédent, le 8 janvier 1948, dans Documents Pontificaux 1948, p. 20.
4 Le Président de la République est depuis 1942 le Général Raphael Leonidas Trujillo Molina. • v .
comme but principal de leurs entreprises, la propagation de la foi et l'extension du Règne du Christ sur la terre ; histoire jamais interrompue, qui pourrait servir aussi pour montrer l'efficacité éducatrice et sociale d'une doctrine qui fut capable de transformer la légendaire « Quisqueya » en l'Athènes du Nouveau Monde.
Les heureuses expressions dont Votre Excellence s'est servie pour reconnaître et raffermir cette union traditionnelle, non seulement en son propre nom mais aussi en celui de son Gouvernement et de son peuple, ont éveillé en Notre coeur autant de reconnaissance et de satisfaction que de légitime joie. Ce sont des sentiments qui renforceraient encore, si possible, Nos dispositions d'attention et de vigilance en faveur de tout ce qui peut promouvoir et accroître les relations entre ce Siège Apostolique et votre nation, en tous les champs de la vie religieuse, culturelle et sociale ; de tout ce qui pourrait favoriser le progrès et la sincère prospérité d'un pays aussi richement doté que le vôtre, de cette île privilégiée où il semble que la main de Dieu a voulu jeter à profusion ses charmes et ses dons tout au long de ses grandes et accessibles plages ; dans ses montagnes couronnées de nuages, sur lesquelles règne en silence le majestueux Yaque ; dans ses innombrables et fraîches vallées qui, réjouissant et fécondant tout, semblent s'être donné rendez-vous en votre merveilleuse « Vega Real », synthèse de prospérité, de grâce et de fraîcheur.
Dans les graves dangers qui projettent aujourd'hui leur ombre sinistre sur l'humanité, Votre Excellence — dont le regard aura certainement acquis une spéciale clairvoyance en ses longues incursions dans les champs.de la philosophie — peut discerner une énergique et urgente invitation à serrer chaque jour plus fortement les utiles contacts avec le centre de la foi et du magistère suprême de la vie chrétienne, afin que la société humaine, affaiblie par sa légèreté et ses erreurs, puisse profiter le plus possible de la vérité et des enseignements contenus dans l'Evangile de Jésus-Christ.
Une grande partie de l'humanité, qui n'a pas encore été éclairée par la vérité chrétienne, et aussi, par malheur, quelques secteurs de la Chrétienté, manifestent sur le terrain religieux et moral, de clairs symptômes d'une anémie pernicieuse, en partie commençante et en partie déjà assez avancée.
On ne voit pas la possibilité d'apporter un remède à ce mal sans une spirituelle transfusion de sang, de proportion plus qu'ordinaire. Mais, qui sera le sauveur, qui le donateur spirituel de sang, en faveur de cette humanité malade et, qui pourrait l'être sinon Celui dont une goutte de sang peut sauver tout le monde de n'importe quel mal, comme le grand penseur et Docteur Saint Thomas d'Aquih le fait chanter ces jours-ci à l'Eglise priante ?
L'univers catholique a les yeux fixés maintenant sur l'imminente Année Sainte. De tous les continents, des îles lointaines de l'Atlantique et du Pacifique Nous arrive le joyeux écho qui a suscité dans le monde entier la Bulle d'in-diction, publiée le jour de l'Ascension du Seigneur 1.
Nous espérons que Nos pieux fils des lointaines Antilles — prêtres et laïques, personnes de toute condition, de tout âge, de toute race et de tout milieu social — se mettront aussi en cette mémorable occasion, avec une conviction profonde, avec une ardente résolution et grande énergie au service de ces nobles idéaux desquels Nous attendons en cette année du grand retour et du grand pardon, une si riche moisson de grâces et de paix.
Dans cette consolante espérance Nous présentons à Votre Excellence, Monsieur l'Ambassadeur, la plus cordiale bienvenue, pendant que Nous vous prions de transmettre à Monsieur le Président de la République et aux membres du Gouvernement Nos meilleurs voeux, et de tout coeur Nous donnons à tous les chers fils de votre heureux pays, et d'une manière spéciale à Votre Excellence en cet heureux début de sa haute charge, Notre Bénédiction Apostolique.
lira le texte de la Bulle Iubilaeum Maximum du 26 mai 1949, p. 198.
(27 juin 1949) 1
En 1945, à San Francisco, lors de la Conférence des Nations-Unies, on décida de réunir une Conférence internationale en vue de l'établissement d'une nouvelle organisation mondiale de la santé. La Conférence reconnaissant l'importance vitale de la santé comme l'un des facteurs nécessaires à la réalisation des « conditions de stabilité et de prospérité n dans tous les pays du monde, considéra la santé comme étant l'une des activités rentrant dans le champ de coopération des Nations-Unies et de ses organismes 2.
Une Conférence internationale de la santé s'ouvrit à New-York le 19 juin 1946.
La première Assemblée mondiale de la Santé se tint à Genève du 24 juin au 24 juillet 1948.
Une deuxième Assemblée commençait ses travaux à Rome le 13 juin 1949. Ce sont les participants de celle-ci que le Pape reçut en audience.
Pie XII félicite les organisateurs de leurs travaux :
S'il est pénible, longtemps après la cessation des hostilités, de voir encore, du fait des malentendus, des préjugés, des conflits d'intérêts ou d'idéologies, rester en suspens la solution de graves problèmes et la liquidation des fâcheuses conséquences de la guerre, c'est pourtant un motif de joie et de confiance que de constater au moins sur un point — un point de majeure importance — le grand nombre des nations 3 en dépit de la tension persistante des rapports sur
1 D'après le texte français de l'OsserOafore Romano du 29 juin 1949.
2 Le siège de l'Organisation Mondiale de la Santé est au Palais des Nations à Genève. Le Directeur général en est le Docteur Brock Chisholm.
3 Plus de soixante pays participaient à cette Assemblée.
les terrains économique, social, politique, moral, s'unir néanmoins pour travailler en commun au progrès de la santé unverselle, poussées non seulement par une préoccupation très justifiée de défense réciproque mais dans un louable esprit d'aide mutuelle et de solidarité. Vous" accueillir à l'occasion de ce travail en commun est pour Nous une satisfaction profonde et Nous vous remercions d'avoir voulu Nous la procurer.
L'Assemblée de l'Organisation mondiale de la Santé dénonçait les anciennes méthodes érigeant des barrières pour isoler les contagieux et préconisait une action directe pour éliminer les foyers d'épidémie :
Souvent, trop souvent, hélas ! la peur est l'origine de bien des mesures de sagesse et en raison de cette origine, elles excèdent les limites tracées par la sagesse même. Dans le cas présent, la défense, en soi légitime, contre un danger imminent de contagion conduit, au cours de l'histoire, à l'adoption de lois rigoureuses, dont l'exécution, plus rigoureuses encore, jusqu'à la cruauté, ne peut s'expliquer que par l'affolement des populations. Pas n'est besoin de remonter jusqu'à la trop célèbre peste de Milan en 1630. Le souvenir — entre bien d'autres — n'est pas tellement lointain de cette lamentable odyssée, à l'automne 1884, des passagers du « Matteo Bruzzo », errant au large de l'océan repoussé de partout et même à coups de canon, parce que des cas de choléra signalés à son bord avaient semé la panique sur tout le littoral de l'Atlantique.
Sans aller jusque là, les mesures de quarantaines, autrefois terribles par leur longueur autant que par leur sévérité, n'assujettissaient-elles pas les pauvres passagers à une situation physique et morale déplorable, sans parler des dommages subis par l'économie publique ? Grâce à Dieu qui, en créant l'homme à son image, a mis en son coeur l'instinct naturel de bonté, une fois passé le premier mouvement de terreur irraisonnée, une fois recouvré le sang-froid, on cherchait à concilier, du mieux qu'il se pouvait, les devoirs de l'humanité avec ceux de la sécurité commune. Petit à petit, les progrès de la science, de l'hygiène, de la prophylaxie et de la thérapeutique, ont permis, sans préjudice de cette sécurité, d'atténuer et d'adoucir les traitements infligés aux voyageurs suspects de la moindre possibilité de contamination. On estimait à fort bon droit qu'il ne suffisait pas d'épargner à des innocents, à des frères, déjà suffisamment éprouvés par l'insalubrité ou la crise passagère de la santé dans leur pays, des peines dont on châtierait des coupables. Et l'on a compris le devoir de leur porter, au contraire, à eux les tout premiers, les secours qui les mettraient à l'abri du mal et les rendraient du même coup inoffensifs au reste du monde.
Grâce à la collaboration d'un grand nombre de pays et aussi des associations privées, on peut espérer faire bénéficier de plus larges couches de la population du globe du trésor de la santé :
Ce juste sentiment d'humanité a dicté l'initiative qui, graduellement, a pris des proportions si vastes, que l'on voit aujourd'hui presque toutes les Nations prendre part à votre Assemblée par l'envoi de leurs délégués ou de leurs observateurs, sans compter les représentants des organisations intergouvernementales reliées à l'Organisation mon-,:. . ; diale de la Santé. En combien de peuples, soit par suite de leur pauvreté, soit de leur impuissance, soit par le fait du • ' degré encore arriéré de leur civilisation, de leur science ou de leur technique, le niveau de l'hygiène et de la santé est de beaucoup inférieur à celui des autres pays. Les épidémies périodiquement récurrentes et les endémies permanentes les conduisent peu à peu vers la ruine ; et les statistiques, si récentes et imparfaites encore qu'elles soient, attestent les ravages qui menacent de disparition des tribus et des peuplades entières. Serait-il tolérable de voir nos frères souffrir de maladies et de tares physiques qui les mènent parfois à l'extinction, alors que dans le monde, tant d'autres sociétés sont parvenues à un tel degré de perfection sanitaire que la mortalité précoce 1 y diminue progressivement et que
1 L'allongement de la vie moyenne peut être constaté par les chiffres suivants:
7850
/900
1935
Grande-Bretagne
40
47
59
France
39
46
55
Hollande
36
49
65
En particulier, le taux de mortalité infantile a été considérablement abaissé
les fléaux jusqu'à présent les plus irréductibles reculent pied à pied ?
De nombreux efforts oni visé, à travers les siècles, à améliorer la santé des peuples ; très heureusement l'Organisation mondiale de la Santé vient apporter à cette oeuvre l'appui de sa puissance :
On ne saurait trop louer les initiatives privées ou particulières, qui ont dépensé ressources financières et inépuisable dévoûment à l'amélioration sanitaire des pays moins favorisés, surtout grâce aux oeuvres missionnaires ; mais elles ne sauraient suffire à elles seules, et l'Organisation mondiale de la Santé apporte à cette entreprise éminemment humanitaire et sociale, un concours plus universel plus concerté et, par conséquent, d'une efficacité plus sûre et plus rapide.
Tous les pays sont aujourd'hui intimement solidaires, en particulier en ce qui concerne la santé des peuples :
En obéissant à cette noble impulsion, vous servez aussi les intérêts de chacune de vos propres nations, de celles mêmes dont les services sanitaires sont les mieux outillés et équipés, où l'éducation hygiénique et physique de la population est le plus diligemment poussée, où la législation pourvoit le plus sagement à la sauvegarde, au maintien, au progrès de la santé publique.
C'est que ni la vigilance, ni les soins, ni les institutions, si parfaits qu'on les suppose en chaque pays, ne suppriment, si l'on n'y pourvoit, par une action générale et combinée, les risques sans cesse croissants occasionnés par la fréquence des relations internationales, des mouvements de populations, des déplacements et immigrations forcés ou volontaires.
Est-il moyen plus apte à y obvier que de travailler sans relâche et simultanément au relèvement de la santé dans toutes les régions, comme dans toutes les classes de l'Humanité ? C'est ce que vous faites, Messieurs, et c'est à quoi vous vous êtes tout particulièrement appliqués durant les jours du congrès qui vient de vous réunir.
dans tous les pays: il est de 38 pour 1000 enfants survivants en Hollande; de 59 %0 en Grande-Bretagne; de 66 %D en France; de 78 %0 en Belgique; de 139 %0 en Pologne; de 179 %0 en Roumanie.
Aujourd'hui, la définition même de la santé s'est notablement élargie ; elle est conçue comme le bien-être complet de l'homme :
Un point a tout spécialement retenu Notre attention à la lecture de vos programmes et de vos travaux : la signification tout à la fois plus étendue et plus profonde que vous donnez à l'expression « la Santé ». Elle n'est pas à vos yeux purement négative, comme si la santé, en général, consistait dans la simple exclusion de la maladie corporelle et des tares physiques, comme si la santé mentale, en particulier, ne disait rien de plus que l'absence de toute aliénation ou anomalie. Elle comporte positivement le bien-être spirituel et social de l'humanité et, à ce titre, elle est une des conditions de la paix universelle et de la sécurité commune.
Dès lors, les problèmes concernant la santé ne sont plus uniquement d'ordre biologique, mais ils débordent sur le plan spirituel :
Il s'ensuit que la question de la santé déborde le cadre de la biologie et de la médecine ; elle a nécessairement sa place dans la sphère de la morale et de la religion.
L'Eglise, loin de considérer la santé comme un objet d'ordre exclusivement biologique, a toujours souligné l'importance, pour la maintenir, des forces religieuses et morales, et elle l'a toujours comptée au nombre des conditions de la dignité et du bien total de l'humanité, de son bien corporel et spirituel, temporel et éternel.
L'Eglise a toujours professé que la santé du peuple était un élément primordial de l'ordre social et de l'ordre international :
La doctrine sociale de l'Eglise catholique ne laisse planer aucun doute sur le fait que la santé du corps et de l'esprit, là où règne aussi la santé des relations sociales, peut contribuer efficacement à établir une atmosphère des plus favorables à la paix intérieure et mutuelle des peuples. Or, tout ce qui peut servir utilement à la cause de la vraie paix est assuré de rencontrer 1 encouragement et l'appui de l'Eglise.
C'est dans ces sentiments que de tout coeur, Nous vous exprimons Nos félicitations et Nos voeux de résultats toujours plus satisfaisants, appelant sur vous et sur votre tâche les meilleures bénédictions divines.
(29 juin 1949) 1
Le 2 juillet 1949, la Basilique de la Visitation d'Annecy était solennellement consacrée par S. Em. le Cardinal Tedeschini, protecteur de l'Ordre de la Visitation. A cette occasion, le Pape écrivit la lettre suivante :
Dans la province de Savoie aux panoramas si charmants et divers, le diocèse d'Annecy et surtout le premier Monastère des Religieuses de la Visitation de Sainte-Marie sont remplis actuellement d'une joie inaccoutumée. En effet, ce qu'on souhaitait depuis longtemps va se réaliser : l'église de la Visitation dédiée à saint François de Sales et à sainte Jeanne-Françoise Frémyot de Chantai, fondateurs et législateurs de l'Ordre de la Visitation, commencée en 1922 dans un magnifique style romari, bénite huit ans plus tard, et achevée après l'horrible dernière guerre, sera bientôt solennellement consacrée.
La position dominante du site heureusement choisi pour ses constructions, d'où s'étend une vue admirable et dégagée sur les maisons de la ville qui se déploie à ses pieds, sur les rives enchanteresses du lac, sur un horizon de collines et de montagnes verdoyantes, attire déjà par elle-même le regard et invite le coeur de l'homme à louer Dieu et à chanter la gloire de sa création. Nous avons visité Nous-même autrefois ce saint temple ; Nous avons vu la majesté des murailles et les colonnes de marbre. Mais Nous savons que depuis lors, outre des autels ornés, on y a ajouté de nombreux embellissements de marbre et de bronze, des mosaïques et des vitraux. Aussi cette église apparaît-elle digne aujourd'hui des saints Fondateurs de l'Ordre de la Visitation, dont avec le plus religieux respect, on garde en cet endroit les corps dans des châsses d'argent. C'est donc avec une vive satisfaction que Nous avons appris, Notre cher Fils, vous qui, honoré de la pourpre romaine, jouissez à Rome et dans la Cité même du Vatican, d'une si haute autorité dans l'exercice de vos fonctions et qui êtes le Protecteur de l'Ordre de la Visitation, que vous alliez vous rendre bientôt en Savoie, pour présider aux cérémonies saintes de la consécration de l'église de la Visitation à Annecy. Grâce à une heureuse inspiration, cette solennité se célébrera le 2 juillet, en la fête de la Visitation de la Bienheureuse Vierge Marie à Sainte Elisabeth. Cette coïncidence nous procure le ferme espoir que les religieuses de la Visitation, fidèlement attachées aux exemples de leurs Fondateurs imiteront de plus en plus les vertus de la Vierge Marie et que tous les fidèles qui visiteront l'église d'Annecy, pénétrés de l'esprit de saint François de Sales et de sainte Jeanne de Chantai, auront la joie de voir, grâce à l'intercession de la Mère de Dieu leurs prières exaucées. Cependant, comme Nous désirons rendre ces fêtes plus fécondes pour le peuple chrétien, Nous vous accordons la faculté de bénir en Notre nom et en Notre autorité, à l'issue de la Messe pontificale, tous les fidèles présents, en leur offrant de gagner une indulgence plénière, aux conditions habituelles prescrites par l'Eglise.
Enfin comme gage des bénédictions célestes et en témoignage de Notre particulière affection, Nous vous accordons affectueusement dans le Seigneur, Notre cher Fils, ainsi qu'au zélé évêque d'Annecy, à son troupeau, et à tout l'Ordre des Religieuses de la Visitation Sainte-Marie la Bénédiction Apostolique.
Des circonstances extraordinaires ont, à plusieurs reprises, rendu nécessaires certaines dérogations aux prescriptions du Code de Droit Canonique. Cet état de choses ayant cessé, la Sacrée Congrégation du Concile, après avoir examiné la question avec les SS. Congrégations des Religieux et de la Propagande, et sur l'ordre spécial de Sa Sainteté le Pape Pie XII, confirme le décret n. 3165/41, du 1 août 1941 et déclare en même temps que, à l'exception de celles appelées « quinquennales » et accordées aux Ordinaires, toutes les facultés de réduire les charges de Messes, concédées soit à des Ordinaires quelconques, soit à des Supérieurs Religieux, soit à toute autre personne physique ou morale, par quelque Autorité que ce soit, de n'importe quelle manière, même de vive voix, et pour n'importe quel temps, doivent être considérées comme révoquées et de nulle valeur à partir de la fin de l'année 1949.
Désormais on devra donc recourir au Saint-Siège, dans chaque cas particulier, comme le prescrit le Code de Droit Canonique (cfr can. 1517 § 1 et 1551 § 1).
Aucune disposition antérieure contraire ne pouvant faire obstacle à l'effet du présent décret 2.
1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXXI, 1949, p. 374.
2 L'expérience de ces quarante dernières années a suffisamment prouvé qu'il peut arriver que, à la suite d'une dévaluation des monnaies, les revenus d'un capital versé pour assurer la célébration, chaque année, d'un certain nombre de Messes (« Messes fondées »), ne suffisent plus pour le nombre de Messes voulu par le fondateur. Il faut alors que la charge de ces Messes soit « réduite », c'est-à-dire que le nombre des Messes à célébrer soit diminué dans la mesure nécessaire. Si le fondateur a explicitement reconnu à l'Ordinaire le droit de procéder à une telle « réduction », il n'y a pas de difficulté (cfr. can. CIS 1517 §1 et CIS 1551 § 1). Sinon cette « réduction » est exclusivement réservée au Saint-Siège (can. CIS 1517 § 2), qui peut suppléer aux Messes omises, en puisant dans l'inépuisable « trésor de satisfactions et de mérites du Christ et des Saints ».
En raison des événements, le Saint-Siège a, ces derniers temps, assez souvent accordé des pouvoirs spéciaux, à ce sujet, aux Ordinaires des lieux, aux Supérieurs Religieux, et à d'autres personnes physiques ou morales. Parmi ces facultés, il faut particulièrement mentionner celles qui sont concédées aux Ordinaires sous le nom de « facultés quinquennales », parce qu'elles sont accordées pour une durée de cinq ans, à l'expiration de laquelle elles peuvent être renouvelées.
Le décret du i août 1941, auquel il est fait allusion ci-dessus, n'a pas paru dans les A. A. S., mais il a été directement communiqué aux Ordinaires des lieux et aux Supérieurs généraux des Ordres et des Congrégations religieuses. Ce décret rappelait les prescriptions du Droit et donnait diverses instructions au sujet des fondations et autres intentions de Messes. Il imposait à tous les Ordinaires des lieux et Ordinaires Religieux qui avaient reçu pour un temps indéterminé ou pour plus de cinq ans le pouvoir de « réduire » les charges de Messes, l'obligation de faire connaître ces pouvoirs au Saint-Siège, dans le délai d'un an, sous peine de se trouver dépossédés, par le fait même, des facultés ainsi reçues.
Le présent décret du 30 juin 1949 supprime maintenant toutes ces facultés, à l'exception seulement des facultés quinquennales accordées aux Ordinaires.
Un décret de la S. C. pour l'Eglise Orientale, daté également du 30 juin 1949, supprime de même, et sans prévoir d'exception pour des facultés quinquennales, tous les pouvoirs accordés, en cette matière, au clergé de rite oriental.
à l'occasion du centenaire de la mort du fondateur de cette Société (30 juin 1949) 1
En 1850 mourait Guillaume Joseph Chaminade qui, réfugié à Saragosse lors de la Révolution française, songea à créer des missionnaires, hommes et femmes, pour « multiplier les chrétiens ». Aujourd'hui cette Société a des rejetons dans les cinq parties du monde 2 ;
1 D'après le texte latin des A. A. S., XXXXI, 1949, p. 591.
2 La Société de Marie (Marianistes) a été fondée en 1817; elle a pour but l'éducation de la jeunesse et le ministère sacerdotal. Elle compte actuellement 2.400 religieux. Son siège est en Belgique: 48, Boulevard des Archers, Nivelles.
En ce centenaire de la mort de votre très pieux Fondateur, il convient pleinement que pour commémorer cet événement vous fassiez revivre et ranimiez l'esprit dont votre Père Législateur a voulu que soit imbue et façonnée la double société religieuse d'hommes et de femmes fondée par lui. Vous en connaissez certes les exigences : il demande non seulement que vous embrassiez généreusement la manière de vivre évangélique, non seulement que vous tendiez avec application et énergie à la vertu et à la sainteté, mais aussi que vous vous rendiez capables selon vos forces de répondre aux besoins actuels, en entreprenant hardiment toutes les formes d'apostolat qu'une nouvelle époque aura introduites. Dans cet ordre de choses, Guillaume Joseph Chaminade propose de splendides exemples à votre imitation. En effet, vers la fin du xviiie siècle, alors que toute la France était ébranlée par d'effrayants désordres et que, par l'exclusion de la religion, les fondements mêmes de l'Etat étaient démolis, il fut de cette troupe d'élite de prêtres qui ne s'épargnant ni travaux, ni ennuis et souvent même au péril de leur vie elle-même s'appliquèrent avec un zèle infatigable à répandre la lumière de la vérité de l'Evangile sur les âmes aveuglées par les erreurs, à relever par leurs exhortations et leurs travaux les esprits languissants et à redresser par la prédication de la loi chrétienne et les secours de la vie divine les moeurs corrompues. Combien de fois lui-même, menant une vie errante, vêtu en modeste travailleur ou transformé en vendeur ambulant, se rendait de quartier en quartier dans les maisons des fidèles pour administrer les sacrements aux mourants, affermir avec zèle les hésitants et les faibles, stimuler les négligents et les indécis à la fidélité à la foi catholique et à la conquête de la vertu, donner enfin à tous les consolations spirituelles dont ils avaient besoin. Et lorsque le calme revint dans la vie publique et que l'Eglise put enfin respirer à l'abri de tant d'embûches, cet intrépide soldat du Christ ne s'abandonna pas alors à un futile repos, mais avec encore plus d'ardeur lutta de toutes ses forces pour réparer les dommages et torts très nombreux causés à la vie chrétienne. Ce n'est pas sans une sorte d'inspiration divine qu'il fonda ces deux sociétés religieuses, l'une d'hommes, l'autre de femmes qu'il voulut consacrées d'une manière spéciale à la Vierge Mère de Dieu et auxquelles il assigna le rôle d'assurer la réalisation et la continuité des entreprises résolues par lui. Dieu sourit avec bienveillance aux désirs et aux travaux de son fidèle serviteur ; ce qui permet à l'Eglise aussi de se réjouir de sa lignée croissante et des fruits obtenus jusqu'ici. Continuez donc, cher Fils ; le temps présent n'a certes pas moins besoin de l'esprit de jeunesse du christianisme et des vertus chrétiennes que celui vécu par votre Fondateur. Continuez avec ardeur, et suivant les traces de votre Père Fondateur, faites en sorte d'unir dans un commun effort à une vie de contemplation et nourrie par la grâce céleste, une activité courageuse. Que la puissante Mère de Dieu et notre Mère très miséricordieuse que par votre règle même vous honorez d'une piété particulière protège et par son patronage fasse progresser vos entreprises, celles surtout qui concernent l'éducation chrétienne de la jeunesse et les saintes missions à l'étranger, celles aussi qui regardent l'instruction et la formation des classes populaires. Appliquez-vous y avec ce zèle infatigable avec lequel votre Fondateur a continué à tant travailler jusqu à une extrême vieillesse. Vous ne pourrez d'une meilleure manière commémorer sa vie et sa pieuse mort. Vous faisant ces souhaits et les offrant à Dieu dans la prière, en présage des grâces célestes et en témoignage de Notre paternelle Bienveillance, nous vous accordons de grand coeur tant à vous, cher fils, qu'aux membres des deux sociétés religieuses fondées par Guillaume Joseph Chaminade, la Bénédiction Apostolique dans le Seigneur.
(1 juillet 1949) 1
Un certain nombre de chrétiens ayant apporté leur coïlaboralion à des organisations ou à des partis d'inspiration communiste, le Saint-Siège a cru devoir mettre en garde solennellement ceux qui fournissaient une telle collaboration et même les frapper de peines ecclésiastiques. Voici le lexte de ce décret :
On a posé à cette Suprême Congrégation les questions suivantes :
1. Est-il permis de s'inscrire comme membre à un parti communiste ou de le favoriser en quelque manière ?
2. Est-il permis de publier, répandre ou de lire, revues, journaux ou feuilles volantes qui soutiennent la doctrine ou l'action des communistes, ou d'y écrire ?
3. Peut-on admettre aux Sacrements les fidèles qui, sciemment et librement, posent les actes envisagés dont parlent les numéros 1 et 2 ?
4. Les fidèles qui professent la doctrine matérialiste et antichrétienne des communistes et surtout ceux qui la défendent ou la propagent encourent-ils de plein droit, comme apostats de la foi catholique, l'excommunication spécialement réservée au Saint-Siège ?
Les EEmes et RRmes Pères, préposés à la sauvegarde de la foi et des moeurs, après avoir recueilli l'avis des RR. Consulteurs, ont, dans la séance plénière du. mardi 28 juin 1949, décrété qu'il fallait répondre :
1. Négativement, car le communisme est matérialiste et antichrétien : bien que les chefs communistes (les diri-
géants) déclarent parfois en paroles qu'ils n'attaquent pas la religion, ils se montrent, en fait, soit par leur doctrine, soit par leurs actes, hostiles à Dieu, à la vraie religion et à l'Eglise du Christ.
2. Négativement, car tous ces écrits sont condamnés de plein droit (cf. Can. 1399 du Code de Droit Canonique) l.
3. Négativement, conformément aux principes ordinaires sur le refus des Sacrements aux fidèles qui ne sont pas dans les dispositions voulues.
4. Affirmativement.
Et le jeudi suivant, 30 des mêmes mois et année, SS. Pie XII, Pape par la Providence divine, dans l'audience ordinaire accordée à S. Exc. Rme l'Assesseur du Saint-Office, a approuvé la décision des Eminentissimes Pères qui lui a été soumise, et ordonné qu'elle fût promulguée dans l'organe officiel des Actes du Siège apostolique.
Dans ce décret on affirme :
1° que le communisme est matérialiste et antichrétien ;
2° que les baptisés qui professent le communisme et qui le propagent sont apostats et par conséquent excommuniés ;
3° que les chrétiens qui apportent une aide quelconque aux organisations ou aux partis communistes sont à exclure de la pratique des sacrements, s'ils ne sont pas décidés à cesser cette collaboration ;
4° que les chrétiens qui écrivent dans la presse communiste ou qui la lisent, tombent dans la même catégorie que les précédents 2.
1 Le canon 1399 interdit de publier des écrits qui répandent l'hérésie et le schisme ou qui s'efforcent de renverser les fondements mêmes de la religion.
2 On lira les commentaires de ce décret dans :
— Lettre des Cardinaux français sur le Communisme, 8 septembre 1949;
— Lettre Pastorale collective de l'Episcopat de Belgique, 4 novembre 1949;
— Nouvelle Revue Théologique, septembre-octobre 1949, p. 864.
Pie XII 1949 - RADIOMESSAGE AU CONGRÈS EUCHARISTIQUE DE L'EQUATEUR