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37 Comme le Peuple de Dieu vit dans des communautés, surtout diocésaines et paroissiales, et s’y montre en quelque sorte visible, il appartient aussi à ces communautés de rendre témoignage au Christ devant les nations.
La grâce de la rénovation ne peut s’accroître dans les communautés que si chacune d’entre elles étend le champ d’application de la charité jusqu’aux extrémités de la terre et que si elle éprouve pour ceux qui sont loin une sollicitude semblable à celle qu’elle a pour ceux qui sont ses propres membres.
Ainsi la communauté tout entière prie, coopère et exerce son activité parmi les nations par l’intermédiaire de ses enfants que Dieu choisit pour une tâche si éminente.
Il sera donc très utile, pourvu qu’on ne néglige pas l’oeuvre missionnaire universelle, de maintenir des liens d’union avec les missionnaires issus de la communauté elle-même ou avec une paroisse ou un diocèse des missions, afin que la communion entre les communautés devienne visible et serve à l’édification mutuelle.
38 Tous les évêques, en qualité de membres du corps épiscopal qui succède au collège des apôtres, ont été consacrés non seulement pour un diocèse déterminé, mais pour le salut du monde entier. L’ordre du Christ d’annoncer l’Évangile à toute créature 5 les concerne en premier lieu et directement, en union avec Pierre et sous l’autorité de Pierre. De là naît cette communion et coopération entre Églises qui est si nécessaire aujourd’hui pour poursuivre l’oeuvre d’évangélisation. En vertu de cette communion, chacune des Églises porte la sollicitude de toutes les autres, les Églises se font connaître entre elles leurs besoins propres et échangent mutuellement leurs biens, puisque l’extension du Corps du Christ est la charge de tout le Collège des évêques 6.
En suscitant, en promouvant, en dirigeant l’oeuvre missionnaire dans son diocèse, avec lequel il ne fait qu’un, l’évêque rend présents et en quelque sorte visibles l’esprit et l’ardeur missionnaires du Peuple de Dieu, si bien que tout le diocèse devient missionnaire.
Il appartiendra à l’évêque d’éveiller dans son peuple, surtout parmi les infirmes et les affligés, des âmes qui offrent à Dieu, d’un coeur largement ouvert, des prières et des oeuvres de pénitence pour l’évangélisation du monde ; d’encourager volontiers les vocations de jeunes et de clercs pour les instituts missionnaires, acceptant avec reconnaissance que Dieu en choisisse quelques-uns qui seront intégrés dans l’activité missionnaire de l’Église ; d’exhorter et d’aider les congrégations diocésaines à assumer leur part propre dans les missions ; de promouvoir auprès de ses fidèles les oeuvres des instituts missionnaires, surtout les oeuvres pontificales missionnaires. C’est à ces oeuvres qu’il faut attribuer, à bon droit, la première place, puisqu’elles sont des moyens pour pénétrer les catholiques, dès leur enfance, d’un esprit vraiment universel et missionnaire ainsi que pour encourager la collecte efficace de fonds au profit de toutes les missions, selon les besoins de chacune 7. Mais comme de jour en jour croît le besoin d’ouvriers pour la vigne du Seigneur et que des prêtres diocésains désirent eux aussi jouer un rôle toujours plus grand dans l'évangélisation du monde, le saint Concile souhaite que les évêques, prenant en considération la très grave pénurie de prêtres qui empêche l’évangélisation de nombreuses régions, envoient, après leur avoir fait donner la préparation nécessaire, quelques-uns de leurs meilleurs prêtres, qui s’offrent pour l’oeuvre missionnaire, à des diocèses dont le clergé est insuffisant, et dans lesquels ces prêtres exerceront, au moins pour un temps, le ministère des missions dans un esprit de service8.
Pour que l’activité missionnaire des évêques puisse s’exercer plus efficacement pour le bien de l’Église tout entière, il convient que les conférences épiscopales règlent les affaires qui concernent une coordination bien organisée de leur propre région.
Dans leurs conférences, les évêques traiteront des prêtres du clergé diocésain à affecter à l’oeuvre d’évangélisation des nations ; des fonds déterminés, proportionnés à ses revenus propres, que chaque diocèse est tenu de verser chaque année pour l’oeuvre des missions 9 ; de la réglementation et de l’organisation des modes et moyens de venir directement en aide aux missions ; du soutien à apporter aux instituts missionnaires et aux séminaires du clergé diocésain pour les missions et, s’il en est besoin, à leur fondation ; des efforts pour créer des liens plus étroits entre des instituts de ce genre et les diocèses.
Il revient également aux conférences épiscopales d’établir et de promouvoir des oeuvres destinées à accueillir fraternellement et à faire profiter d’un soin pastoral approprié ceux qui, pour des raisons de travail ou d’étude, quittent les territoires de mission pour l’étranger. Par eux, en effet, les peuples lointains deviennent en quelque sorte proches, et les communautés, chrétiennes depuis longtemps, voient s’offrir une excellente occasion d’engager le dialogue avec les nations qui n’ont pas encore entendu l’Évangile et de leur montrer, dans le service d’amour et d’aide qui leur est propre, le vrai visage du Christ 10.
5 Cf. Mc 16, 15.
6 Cf. Conc. Vat. II, const. dogm. Lumen Gentium, n. 23-24, AAS57 (1965), p. 27-29. (Voir plus haut p. 102-104.)
7 Cf. Benoît XV, Maximum illud, 30 nov. 1919, AAS 11 (1919), p. 453-454 ; Pie XI, Rerum Ecclesiae, 28 févr. 1926, AAS 18 (1926), p. 71-73 ; Pie XII, Evangelii Praecones, 2 juin 1951, AAS 43 (1951), p. 525-526 ; Fidei donum, 15 janv. 1957, AAS 49 (1957), p. 241.
8 Pie XII, Fidei Donum, 15 janv. 1957, AAS 49 (1957), p. 245-246.
9 Cf. Conc. Vat. II, décret sur la charge pastorale des évêques, Christus Dominus, n. 6. (Voir plus haut p. 212-214.)
10 Cf. Pie XII, Fidei donum, 15 janv. 1957, AAS 49 (1957), p. 245.
39 Les prêtres * représentent le Christ et sont les coopérateurs de l’ordre épiscopal dans la triple fonction sacrée qui, par sa nature même, regarde la mission de l’Église 11. Ils doivent donc être profondément convaincus que leur vie a été aussi consacrée au service des missions. Comme par leur ministère propre — qui consiste principalement dans l’Eucharistie, qui donne à l’Église son achèvement - ils sont en communion avec le Christ Tête et amènent d’autres hommes à cette communion, ils ne peuvent pas ne pas percevoir combien grands sont encore les manques à la plénitude du Corps et combien grande, par conséquent, est la contribution à apporter pour le faire croître de jour en jour. Ils doivent donc ordonner leur sollicitude pastorale de façon à ce qu’elle soit utile à la diffusion de l’Évangile chez les non chrétiens.
Dans leur charge pastorale, les prêtres * stimuleront et maintiendront parmi les fidèles le zèle pour l’évangélisation du monde, en les instruisant, par la catéchèse et la prédication, de la charge qu’a l’Église d’annoncer le Christ aux nations ; en enseignant aux familles chrétiennes la nécessité et l’honneur de cultiver des vocations missionnaires parmi leurs propres fils et filles ; en développant chez les jeunes des écoles et des associations catholiques la ferveur missionnaire de telle sorte que de futurs messagers de l’Évangile sortent de ce milieu. Ils apprendront aux fidèles à prier pour les missions et ils ne rougiront pas de leur demander des aumônes pour les missions, en se faisant en quelque sorte des mendiants pour le Christ et le salut des âmes 12.
Les professeurs des séminaires et des universités enseigneront aux jeunes la véritable situation du monde et de l’Église, pour que la nécessité d’une évangélisation plus poussée des non-chrétiens soit clairement perçue et nourrisse leur zèle. Dans l’enseignement des disciplines dogmatiques, bibliques, morales et historiques, ils mettront en lumière les aspects missionnaires qui y sont contenus, pour que de cette manière la conscience missionnaire se forme chez les futurs prêtres.
11 Cf. Conc. Vat. II, const. dogm. Lumen Gentium, n. 28, AAS 57 (1965), p. 34. (Voir plus haut p. 112-116.)
12 Cf Pie XI, Rerum Ecclesiae, 28 févr. 1926, AAS 18 (1926), p. 72.
40 Les instituts religieux, de vie contemplative et active, ont eu jusqu’à nos jours et ont toujours la part la plus importante dans l’évangélisation du monde. Le saint Concile reconnaît volontiers leurs mérites et rend grâces à Dieu pour tant d’efforts dépensés pour la gloire de Dieu et le service des âmes, et il les exhorte à poursuivre inlassablement l’oeuvre commencée, puisqu’ils savent que la vertu de charité, qu’ils sont tenus de pratiquer de façon plus parfaite en raison de leur vocation, les pousse et les oblige à un esprit et à un travail vraiment catholiques 13.
Les instituts de vie contemplative, par leurs prières, leurs oeuvres de pénitence et leurs épreuves, ont une très grande importance dans la conversion des âmes, puisque c’est Dieu qui, à la suite des prières, envoie des ouvriers dans sa moisson 14, ouvre les coeurs des non-chrétiens pour qu’ils écoutent l’Évangile 15, et rend féconde dans leur coeur la parole du salut 16. Bien plus, ces instituts sont priés de fonder des maisons dans les territoires des missions - comme d’ailleurs un certain nombre d’entre eux l’ont déjà fait -, afin qu’en y menant leur vie d’une manière adaptée aux traditions authentiquement religieuses des peuples, ils rendent parmi les non-chrétiens un témoignage éclatant de la majesté et de la charité de Dieu ainsi que de l’union dans le Christ.
Les instituts de vie active, qu’ils poursuivent ou non une fin strictement missionnaire, doivent se demander sincèrement devant Dieu s’ils peuvent étendre leurs activités en vue de l’expansion du Règne de Dieu parmi les nations ; s’ils peuvent laisser à d’autres certains ministères, de façon à dépenser leurs forces pour les missions ; s’ils peuvent entreprendre une activité dans les missions, en adaptant, si c’est nécessaire, leurs constitutions, cependant selon l’esprit du fondateur ; si leurs membres participent selon leurs forces à l’activité missionnaire ; si leur manière de vivre est un témoignage de l’Évangile, adapté au caractère et à la situation du peuple.
Puisque, sous l’inspiration du Saint-Esprit, les instituts séculiers s’accroissent de jour en jour dans l’Église, leurs oeuvres, sous l’autorité de l’évêque, peuvent être fructueuses dans les missions de multiples manières, comme signe d’un dévouement total à l’évangélisation du monde.
13 Cf. Conc. Vat. II, const. dogm. Lumen Gentium, n. 44, AAS 57 (1965), p. 50. (Voir plus haut p. 138.)
14 Cf. Mt 9, 38.
15 Cf Ac 16, 14.
16 Cf 1 Co 3, 7.
41 Les laïcs coopèrent à l’oeuvre d’évangélisation de l’Église et participent, en qualité de témoins et en même temps d’instruments vivants, à sa mission salvifique l7, surtout si, appelés par Dieu, ils sont affectés par les évêques à cette oeuvre.
Dans les terres déjà chrétiennes, les laïcs coopèrent à l’oeuvre de l’évangélisation, en développant en eux-mêmes et chez les autres la connaissance et l’amour des missions, en suscitant des vocations dans leur propre famille, dans les associations catholiques et dans les écoles, en offrant des subsides de tout genre, pour que le don de la foi qu’ils ont reçu gratuitement puisse être transmis à d’autres comme don.
Dans les terres de mission, les laïcs, qu’ils soient étrangers ou autochtones, enseigneront dans les écoles, auront la gestion des affaires temporelles, collaboreront à l’activité paroissiale et diocésaine, mettront en place et développeront les différentes formes d’apostolat des laïcs, pour que les fidèles des jeunes Églises puissent jouer au plus vite leur propre rôle dans la vie de l’Église 18.
Enfin les laïcs apporteront volontiers leur coopération économico-sociale aux peuples en voie de développement ; cette coopération est d’autant plus louable qu’elle vise davantage à fonder des instituts qui atteignent les structures fondamentales de la vie sociale ou sont ordonnés à la formation de ceux qui ont la responsabilité des affaires publiques.
Sont dignes d’un éloge particulier les laïcs qui, dans les universités ou dans les instituts scientifiques, font progresser, par leurs recherches historiques ou scientifico-religieuses, la connaissance des peuples et des religions, aidant ainsi les messagers de l’Évangile et préparant le dialogue avec les non-chrétiens.
Avec les autres chrétiens, avec les non-chrétiens, spécialement avec les membres des associations internationales, ils collaboreront dans un esprit de fraternité, ayant toujours devant les yeux que « la construction de la cité terrestre doit être fondée sur le Seigneur et orientée vers lui19 ».
Pour s’acquitter de toutes ces tâches, les laïcs ont besoin d’une nécessaire préparation technique et spirituelle, qui doit leur être donnée dans des instituts destinés à cela, pour que leur vie soit un témoignage pour le Christ parmi les non-chrétiens, selon ces paroles de l’Apôtre : « Ne donnez scandale ni aux Juifs ni aux gentils, ni à l’Église de Dieu, comme moi-même je m’efforce de plaire à tous en tout, ne cherchant pas mon propre intérêt, mais celui du plus grand nombre, afin qu’ils soient sauvés » (1Co 10,32-33).
17 Cf. Conc. Vat. II, const. dogm. Lumen Gentium, n. 33, 35, AAS 57 (1965), p. 39, 40-41. (Voir plus haut p. 120-124.)
18 Cf. Pie XII, Evangelii Praecones, 2 juin 1951, AAS 43 (1951), p. 510-514 ; Jean XXIII, Princeps Pastorum, 28 nov. 1959, AAS 51 (1959), p. 851-852.
19 Cf. Conc. Vat. II, const. dogm. Lumen Gentium, n. 46, AAS 57 (1965), p. 52. (Voir plus haut p. 142.)
42 Les Pères du Concile en union avec le Pontife romain, ayant une très vive conscience du devoir d’étendre partout le Règne de Dieu, saluent très affectueusement tous les messagers de l’Évangile, surtout ceux qui pour le nom du Christ souffrent persécution, et ils s’associent à leurs souffrances 20.
Ils brûlent eux aussi du même amour que celui dont le Christ a brûlé pour les hommes. Conscients que c’est Dieu qui fait que son Règne advienne sur terre, ils se répandent en prières conjointement avec tous les fidèles du Christ, pour que, par l’intercession de la Vierge Marie, Reine des apôtres, les nations soient amenées, au plus tôt, à la connaissance de la vérité21, et que la gloire de Dieu qui resplendit sur le visage du Christ se mette à luire pour tous par le Saint-Esprit22.
20 Cf. Pie XII, Evangelii Praecones, 2 juin 1951, AAS 43 (1951), p. 527 ; Jean XXIII, Princeps Pastorum, 28 nov. 1959, AAS 51 (1959), p. 864.
21 Cf. 1 Tm 2, 4.
22 Cf. 2 Co 4, 6.
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