1996 Denzinger 368
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(Chap. 10) Or le propre du Fils de Dieu est que... dans les derniers temps le Verbe est devenu chair et a habité parmi nous (voir Jn 1,14), les deux natures s'étant unies sans aucune confusion dans le sein de la Vierge Marie, Mère de Dieu, de telle sorte que lui, qui était avant les temps le Fils de Dieu, est devenu Fils d'homme et est né dans le temps à la manière des hommes, ouvrant, en naissant, le sein de la mère, et, en vertu de la divinité, ne blessant pas la virginité de la mère.
(Chap. 11) Il est pleinement digne de la naissance de Dieu, le mystère selon lequel celui qui a fait qu'il soit conçu sans semence, ait préservé la naissance de toute altération, en préservant ce qu'il était du Père et en montrant ce qu'il a reçu de la mère. ...
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(Chap. 12) Le même en effet est Dieu et homme, non pas, comme le disent ceux qui ne croient pas, par l'introduction d'une quatrième personne, mais le Fils de Dieu lui-même est Dieu et homme, le même est puissance et faiblesse, humilité et majesté, qui rachète et qui a été vendu, attaché à la croix et accordant le Royaume des cieux, tel dans notre faiblesse qu'il a pu être mis à mort, tel dans sa puissance qu'il n'a pas pu être détruit par la mort.
(Chap. 13) Il a été enseveli parce qu'il a voulu naître comme homme, et parce qu'il était semblable au Père, il est ressuscité: ouffrant des blessures et sauvant les souffrants, l'un parmi les morts et vivificateur des mourants, descendant aux enfers et ne quittant pas le sein du Père. C'est pourquoi aussi cette âme qu'il a laissée du fait de la condition commune, il l'a reprise bientôt en vertu de sa force singulière et de la puissance admirable.
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Il est venu à notre connaissance que certains, dans leur simplicité, veulent parler de la grâce et du libre arbitre sans guère de précaution et d'une façon qui ne correspond pas à la règle de la foi catholique. C'est pourquoi, conformément à l'exhortation et à la volonté du Siège apostolique, il nous a paru juste et raisonnable de devoir produire et souscrire de nos mains, pour qu'ils soient observés par tous, ces quelques chapitres qui nous ont été transmis par le Siège apostolique et que les Pères anciens ont rassemblés des livres des saintes Ecritures, afin d'enseigner ceux qui pensent autrement qu'on le doit...
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Can. 1. Si quelqu'un dit que, par l'offense résultant de la prévarication d'Adam, l'homme n'a pas été tout entier, dans son corps et dans son âme, " changé dans un état pire ", et s'il croit que le corps seul a été assujetti à la corruption cependant que la liberté de l'âme demeurait intacte, trompé par l'erreur de Pélage, il contredit l'Ecriture qui dit : " l'âme qui a péché périra " Ez 18,20 et : " Ignorez-vous que si vous vous livrez à quelqu'un comme esclave, pour lui obéir, vous êtes esclave de celui à qui vous obéissez ? ". Rm 6,16 et : " On est esclave de celui par qui on s'est laissé vaincre " 2P 2,19.
372
Can. 2. Si quelqu'un affirme que la prévarication d'Adam n'a nui qu'à lui seul et non à sa descendance, ou s'il déclare que c'est seulement la mort corporelle, peine du péché, et non le péché, mort de l'âme, qui par un seul homme a passé dans tout le genre humain, il attribue une injustice à Dieu en contredisant l'Apôtre qui dit : " Par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et ainsi la mort a passé dans tous les hommes, tous ayant péché en lui " Rm 5,12.
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Can.3 Si quelqu'un dit que la grâce de Dieu peut être donnée à la demande de l'homme et que ce n'est pas la grâce elle-même qui nous fait demander, il contredit le prophète Isaïe ou l'Apôtre qui dit comme lui : " J'ai été trouvé par ceux qui ne me cherchaient pas, je me suis rendu visible pour ceux qui ne m'interrogeaient pas " Rm 10,20 ; voir Is 65,1.
374
Can.4. Si quelqu'un prétend que Dieu attend notre vouloir pour nous purifier du péché, et s'il n'admet pas que même notre volonté de purification est un effet de l'infusion et de l'opération du Saint-Esprit en nous, il résiste au Saint-Esprit lui-même qui dit par Salomon : " La volonté est préparée par le Seigneur " Pr 8,35 LXX et à l'Apôtre en sa prédication salutaire: " C'est
Dieu qui opère en nous le vouloir et le faire, selon son bon plaisir " (voir Ph 2,13 .
375
Can.5. Si quelqu'un dit que l'accroissement de la foi comme aussi son commencement, et l'attrait de la croyance par lequel nous croyons en celui qui justifie l'impie et qui nous fait parvenir à la régénération du saint baptême, ne sont pas en nous un don de la grâce, c'est-à-dire par une inspiration du Saint-Esprit qui redresse notre volonté en l'amenant de l'infidélité à la foi et de l'impiété à la piété, mais qu'il nous sont naturels, il s'avère l'adversaire des dogmes apostoliques, puisque saint Paul dit : " Nous avons confiance que celui qui a commencé en vous cette belle oeuvre la mènera à son terme jusqu'au jour du Christ Jésus " Ph 1,6 et ceci : " Il vous a été donné non seulement de croire au Christ, mais encore de souffrir pour lui "Ph 1,29 et : " c'est par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi, et cela ne vient pas de vous : c'est le don de Dieu " Ep 2,8. Ceux qui déclarent naturelle la foi par laquelle nous croyons en Dieu en viennent à considérer, d'une certaine manière, comme fidèles tous ceux qui sont étrangers à l'Eglise du Christ.
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Can.6. Si quelqu'un dit que la miséricorde nous est donnée par Dieu lorsque, sans la grâce, nous croyons, nous voulons, nous désirons, nous faisons des efforts, nous travaillons, nous prions, nous veillons, nous étudions, nous demandons, nous cherchons, nous frappons à la porte et qu'il ne confesse pas que notre foi, notre volonté et notre capacité d'accomplir ces actes comme il le faut se font en nous par l'infusion et l'inspiration du Saint- Esprit ; s'il subordonne l'aide de la grâce à l'humilité ou à l'obéissance de l'homme et s'il n'admet pas que c'est le don de la grâce elle-même qui nous permet d'être obéissants et humbles, il résiste à l'Apôtre qui dit : " Qu'as-tu que tu n'aies reçu ? " 1Co 4,7 et : " C'est par la grâce de Dieu que je suis ce que je suis " 1Co 15,10.
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Can.7. Si quelqu'un affirme qu'il peut par la seule force de la nature concevoir, comme il convient, une bonne pensée touchant le salut de la vie éternelle ou la choisir ou donner son assentiment à la prédication du salut de l'Evangile, sans l'illumination et l'inspiration du Saint-Esprit qui donne à tous son onction lorsqu'ils adhèrent et croient à la vérité, il est trompé par un esprit d'hérésie et ne comprend pas la parole que Dieu a dite dans l'Evangile: " Sans moi vous ne pouvez rien faire " Jn 15,5, ni ce mot de
l'Apôtre : " Ce n'est pas que nous soyons par nous-mêmes capables de concevoir quelque chose comme venant de nous, mais c'est de Dieu que vient toute notre capacité " 2Co 3,5
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Can. 8. Si quelqu'un prétend que certains peuvent arriver à la grâce du baptême par la miséricorde, d'autres par le libre arbitre, dont il est clair qu'il est vicié en tous ceux qui sont nés de la prévarication du premier homme, il démontre qu'il est étranger à la vraie foi. Il affirme en effet que ce libre arbitre n'a pas été affaibli en tous par le péché du premier homme, ou au moins il croit qu'il a été lésé seulement, de telle sorte que néanmoins certains hommes peuvent encore d'eux-mêmes, sans révélation divine, conquérir le mystère du salut éternel. Combien cette doctrine est contraire, le Seigneur le montre, qui atteste que ce ne sont pas certains mais personne qui peut venir à lui " si le Père ne l'a attiré " (Voir Jn 6,44), comme il dit aussi à Pierre : " Tu es bienheureux, Simon, fils de Jonas, parce que ce ne sont pas la chair et le sang qui te l'ont révélé mais mon Père qui est dans les cieux " Mt 16,17 l'Apôtre dit aussi : " Personne ne peut dire : 'Jésus est Seigneur', si ce n'est dans l'Esprit Saint ". 1Co 12,3
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Can. 9. "L'aide de Dieu. C'est par un don de Dieu que nous avons de bonnes pensées, et que nous préservons nos pas du mensonge et de l'injustice ; chaque fois en effet que nous faisons le bien, Dieu opère en nous et avec nous pour que nous opérions "
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Can. 10. L'aide de Dieu. Les régénérés et les saints doivent eux aussi toujours implorer l'aide de Dieu pour parvenir à la fin bonne ou pour pouvoir persévérer dans le bien.
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Can. 11. " Le caractère d'obligation des voeux. Personne ne consacrerait dignement à Dieu quoi que ce soit, s'il n'avait reçu de lui ce qu'il consacre " comme il est écrit : " Et ce que nous avons reçu de ta main, nous te le donnons " 1Ch 29,14.
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Can. 12." Comment Dieu nous aime. Dieu nous aime tels que nous serons par son don, non tels que nous sommes par notre mérite ".
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Can. 13. Le rétablissement du libre arbitre. Le libre arbitre blessé dans le premier homme ne peut être rétabli que par la grâce du baptême ; " ce qui a été perdu, celui-là seul peut le rendre qui a pu le donner. Aussi la Vérité elle- même dit : " Quand le Fils vous aura délivrés, alors vous serez vraiment libres " Jn 8,36.
384
Can. 14. " Nul misérable ne peut être affranchi de sa misère, si grande qu'elle soit, s'il n'est prévenu par la miséricorde de Dieu ", comme le dit le Psalmiste : " Que ta miséricorde vienne vite au-devant de moi, Seigneur " Ps 78,8 et encore : " Mon Dieu, sa miséricorde viendra au-devant de moi " Ps 58,11.
385
Can. 15." Par rapport à l'état dans lequel Dieu l'avait formé, Adam a été changé mais en pire, par son iniquité. Par rapport à l'état dans lequel l'iniquité l'a fait, le fidèle est changé, mais en mieux, par la grâce de Dieu. Le premier changement est dû au premier pécheur, le second " changement " selon le Psalmiste, " est dû à la droite du Très-Haut " (voir Ps 77,11 .
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Can. 16. " Nul ne doit se glorifier de ce qu'il possède comme s'il ne l'avait pas reçu d'un autre, ou croire l'avoir reçu simplement parce qu'une lettre est apparue de l'extérieur pour être lue, ou a résonné pour être entendue. Car comme le dit l'Apôtre : " Si la justice vient de la loi, alors le Christ est mort en vain " Ga 2,21 : " montant en haut il a emmené captive la captivité, il a donné ses dons aux hommes " (voir Ep 4,8 Ps 68,19. Tout ce qu'on possède, on le tient de là ; quiconque nie l'avoir reçu de là ne le possède pas vraiment ou se verra enlever ce qu'il possède " Mt 25,29.
387
Can. 17. " La force chrétienne. La force des païens est produite par la cupidité terrestre mais la force des chrétiens l'est par la grâce de Dieu " répandue dans nos coeurs ", non par la volonté du libre arbitre qui vient de nous, mais " par l'Esprit Saint qui nous a été donné " Rm 5,5.
388
Can. 18. " On ne peut prévenir la grâce par aucun mérite. Aux bonnes oeuvres, s'il en est, la récompense est due ; mais la grâce, qui n'est pas due, précède pour qu'elles soient ".
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Can. 19. " Nul ne peut être sauvé si Dieu ne fait pas miséricorde. Même si la nature humaine était demeurée dans l'intégrité dans laquelle elle a été créée, elle n'aurait pas pu la conserver elle-même sans le secours de son créateur ; si donc elle ne peut garder, sans la grâce de Dieu, le salut qu'elle a reçu, comment pourrait-elle, sans la grâce de Dieu, réparer ce qu'elle a perdu ? "
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Can. 20. " L'homme ne peut rien de bon sans Dieu. Dieu fait dans l'homme beaucoup de choses bonnes que l'homme ne fait pas ; mais l'homme ne fait aucune chose bonne que Dieu ne lui ait donné de faire "
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Can. 21. " Nature et grâce. De même qu'à ceux qui, voulant être justifiés par la Loi, tombèrent hors de la grâce, l'Apôtre dit avec raison : " Si la justice vient de la Loi, alors le Christ est mort en vain " Ga 2,21, de même on dit avec raison à ceux qui pensent que la grâce, que la foi au Christ recommande et reçoit, est la nature : si la justice vient de la nature, " alors le Christ est mort en vain ". La Loi en effet était déjà là et ne justifiait pas, et la nature aussi était là et ne justifiait pas. C'est pourquoi le Christ n'est pas mort en vain, afin que la Loi fût accomplie par celui qui a dit : " Je ne suis pas venu détruire la Loi, mais l'accomplir " Mt 5,17, et afin que la nature perdue par Adam fût réparée par celui qui a dit être venu " pour chercher et sauver ce qui était perdu " Lc 19,10.
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Can. 22. " Ce qui est propre à l'homme. Nul n'a en propre que le mensonge et le péché. Mais si quelqu'un possède un tant soi peu de vérité et de justice, il le tient de cette source divine vers laquelle, égarés dans le désert d'ici-bas, nous devons soupirer pour que, humectés en quelque sorte par elle de quelques gouttes, nous ne défaillions pas en chemin ".
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Can. 23. " La volonté de Dieu et de l'homme. C'est leur volonté que font les hommes, non celle de Dieu, lorsqu'ils font ce qui déplaît à Dieu ; mais lorsqu'ils font ce qu'ils veulent, pour servir la volonté divine, même si c'est en voulant qu'ils font ce qu'ils font, c'est cependant la volonté de celui qui prépare et ordonne ce qu'ils veulent "
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Can. 24. " Les sarments de la vigne. Les sarments sont dans la vigne sans rien donner à la vigne, mais en recevant d'elle ce qui les fait vivre : car la vigne est dans les sarments en sorte qu'elle leur fournit l'aliment nécessaire à leur vie et qu'elle ne reçoit rien d'eux. Et c'est pourquoi l'un et l'autre : avoir le Christ qui demeure en soi et demeurer dans le Christ, sont utiles aux disciples, non au Christ. Car lorsqu'un sarment a été coupé, un autre peut surgir de la racine vivante ; mais celui qui a été coupé ne peut pas vivre sans la racine " (voir Jn 15,5-8).
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Can. 25. " L'amour dont nous aimons Dieu. Aimer Dieu est entièrement un don de Dieu. Lui qui aime sans être aimé, a donné de l'aimer. Sans plaire nous avons été aimés afin qu'advienne en nous de quoi plaire. Car il a répandu dans nos coeurs la charité, l'Esprit Rm 5,5 du Père et du Fils, Esprit que nous aimons en même temps que le Père et le Fils ".
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Ainsi, selon les sentences de la sainte Ecriture alléguées plus haut et les définitions des anciens Pères, nous devons avec l'aide de Dieu, prêcher et croire que le péché du premier homme a tellement dévié et affaibli le libre arbitre que personne, depuis, ne peut aimer Dieu comme il faut ni croire ni faire le bien pour Dieu si la grâce de la miséricorde divine ne l'a prévenu. C'est pourquoi nous croyons qu'Abel le juste et Noé et Abraham et Isaac et Jacob et toute la multitude des saints d'autrefois, n'ont pas reçu cette admirable foi, dont saint Paul les loue dans sa prédication He 11,1 (et ss), par la bonté de la nature donnée primitivement à Adam, mais par la grâce de Dieu.
Cette grâce, nous savons et nous croyons que pour tous ceux qui désirent être baptisés, même après la venue du Seigneur, elle ne se trouve pas dans le libre arbitre, mais qu'elle est conférée par la libéralité du Christ, selon la parole, déjà souvent répétée, que saint Paul prêche : " Il vous a été donné non seulement de croire au Christ, mais encore de souffrir pour lui, Ph 1,29, et ceci : " Dieu qui a commencé en vous cette belle oeuvre la mènera à son terme jusqu'au jour de notre Seigneur " Ph 1,6, et ceci : " C'est par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi, et cela ne vient pas de vous ; c'est le don de Dieu " Ep 2,8, et ce que l'Apôtre dit de lui-même : " Il m'a été fait miséricorde, pour que je sois fidèle " 1Co 7,25 1Co 1 ; il ne dit pas : " parce que j'étais ", , mais " pour que je sois ". Et ce texte : " Qu'as-tu que tu n'aies reçu ? " 1Co 1, et celui-ci : " Tout don de valeur et tout cadeau parfait descend du Père des lumières " Jc 1,17, et ceci:
Personne n'a rien qui ne lui ait été donné d'en haut " Jn 3,27. Innombrables sont les témoignages des saintes Ecritures, qu'on pourrait citer pour prouver la grâce. Le souci de la brièveté les a fait omettre ; à vrai dire, beaucoup de textes ne seront pas utiles à qui un petit nombre ne suffit pas.
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Nous croyons aussi, selon la foi catholique, qu'après avoir reçu la grâce par le baptême tous les baptisés peuvent et doivent accomplir, avec l'aide et la coopération du Christ, tout ce qui concerne le salut de leur âme, s'ils veulent fidèlement y travailler. Non seulement nous ne croyons pas que certains hommes soient prédestinés au mal par la puissance divine, mais s'il était des gens qui veuillent croire une telle horreur, nous leur disons avec toute notre réprobation : anathème !
Nous confessons et nous croyons aussi pour notre salut que, dans toute bonne oeuvre, ce n'est pas nous qui commençons et qui sommes ensuite aidés par la miséricorde de Dieu, mais que c'est lui, sans aucun bon mérite préalable de notre part, qui d'abord nous inspire et la foi et l'amour, pour que nous recherchions fidèlement le sacrement du baptême et qu'après le baptême nous puissions accomplir avec son aide ce qui lui plaît. C'est pourquoi nous devons croire très nettement que la foi si admirable du larron appelé par le Seigneur à la patrie du paradis Lc 23,43, celle du centurion Corneille à qui l'ange du Seigneur fut envoyé Ac 10,3 et celle de Zachée qui mérita de recevoir le Seigneur en personne , ne fut pas un don de la nature, mais un don de la libéralité de la grâce divine.
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(Chap. 1)... Nous n'avons pas tardé à donner une réponse catholique à la requête que tu as composée avec un souci louable de la foi. Tu rapportes en effet que certains évêques des Gaules acquiescent certes au fait que tous les autres biens proviennent de la grâce de Dieu, mais qu'ils entendent que la foi par laquelle nous croyons au Christ relève de la nature et non pas de la grâce ; et - chose qu'il est impie de dire - elle serait restée pour les hommes depuis Adam au pouvoir du libre arbitre, et même maintenant, elle ne serait pas conférée à chacun par la libéralité de la miséricorde divine ; tu demandes que, pour écarter toute ambiguïté, nous confirmions par l'autorité du Siège apostolique cette profession de foi par laquelle, au contraire, vous définissez que la juste foi dans le Christ et le commencement de toute volonté bonne sont inspirés, selon la vérité catholique, aux sens de chacun par la grâce prévenante de Dieu.
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(Chap. 2). Et parce qu'il est avéré que de nombreux pères, et avant tous les autres l'évêque Augustin de bienheureuse mémoire, mais également nos prédécesseurs, évêques du Siège apostolique, en ont traité si amplement que désormais il ne devrait faire de doute pour personne que la foi elle-même aussi nous vient de la grâce, nous avons pensé pouvoir renoncer à une réponse développée ; d'autant que selon les propos de l'Apôtre que tu as cités et dan lesquels il dit : " J'ai obtenu la miséricorde d'être croyant " 1Co 7,25, et ailleurs : " Il vous a été donné, à propos du Christ, non seulement de croire, mais également de souffrir pour lui " Ph 1,29, il apparaît avec évidence que la foi par laquelle nous croyons en Christ, tout comme tous les biens, sont accordés à chaque homme en raison du don de la grâce d'en haut et non en raison du pouvoir de la nature humaine.
Et cela nous nous réjouissons de ce que ta Fraternité également, en tenant colloque avec certains prêtres des Gaules, l'ait pensé conformément à la foi catholique : à savoir au sujet de ces points pour lesquels ils ont défini d'un consentement unanime, ainsi que tu l'as rapporté, que la foi avec laquelle nous croyons en Christ est conférée par la grâce prévenante de la divinité ; ajoutant même que selon Dieu il n'y a absolument rien de bon que quelqu'un pourrait vouloir, ou commencer, ou faire, ou mener à son terme sans la grâce de Dieu, puisque notre Sauveur dit : " Sans moi vous ne pouvez rien faire " Jn 15,5. Car il est certain et catholique que pour tous les biens, dont le plus éminent est la foi, même lorsque nous ne voulons pas encore, la miséricorde de Dieu nous prévient pour que nous voulions, elle est en nous lorsque nous voulons, et même suit pour que nous demeurions dans la foi, comme le dit le prophète David : " Mon Dieu, sa miséricorde me devancera " Ps 59,11 ; et encore : " Ma miséricorde est avec lui " Ps 89,25 ; et ailleurs : " Sa miséricorde me suit " Ps 23,6. De même le bienheureux Paul dit aussi : " Qui lui a donné le premier, pour qu'il lui soit donné en retour ? Car tout est de lui, et par lui, et en lui " Rm 11,35 (et ss.).
400
C'est pourquoi nous nous étonnons beaucoup de ce que ceux qui pensent à l'opposé sont accablés jusqu'à aujourd'hui encore par les restes de l'ancienne erreur, en sorte qu'ils croient qu'on vient au Christ non pas par le bienfait de Dieu, mais par celui de la nature ; et ils disent que le bien de la nature elle- même qui, on le sait, a été corrompu par le péché d'Adam, est davantage l'auteur de notre foi que le Christ ; et ils ne comprennent pas qu'ils contredisent la parole du Seigneur qui dit: " Personne ne vient à moi, à moins que cela lui ait été donné par mon Père " Jn 6,44 ; mais qu'ils s'opposent également au bienheureux Paul qui s'écrie à l'adresse des Hébreux : " Courons vers le combat qui nous est proposé, en considérant celui qui est l'auteur et le consommateur de la foi, Jésus Christ, He 12,1 (et ss). Puisqu'il en est ainsi, nous ne pouvons pas trouver ce qu'ils veulent attribuer à la volonté humaine, sans la grâce de Dieu, pour la foi au Christ, puisque le Christ est l'auteur et le consommateur de la foi. - (Chap. 3) C'est pourquoi... nous approuvons votre profession de foi écrite plus haut comme s'accordant avec les règles catholiques des pères.
401
(L'empereur Justinien) a fait savoir que des controverses avaient surgi à propos des trois questions suivantes : (I) Si le Christ notre Dieu peut être dit " un de la Trinité ", c'est-à-dire une personne sainte des trois personnes de la sainte Trinité. (II) Si le Christ Dieu, impassible selon la divinité, a souffert dans la chair. (III) Si Marie, toujours vierge, doit être appelée proprement et véritablement Mère de notre Seigneur et Dieu le Christ...
(L'expression " un de la Trinité a souffert "). Que le Christ est vraiment un de la sainte Trinité, c'est-à-dire une sainte personne ou substance, que les Grecs appellent hypostase, des trois personnes de la sainte Trinité, nous les montrons clairement par ces témoignages (sont cités entre autres Gn 3,22 1Co 8,6 la profession de foi de Nicée Can.125-126 .
(Le Christ, " Dieu qui a souffert dans la chair "). Mais que Dieu a souffert dans la chair, nous voulons malgré tout le confirmer par ces témoignages Dt 28,66 Jn 14,6 Ml 3,8 Ac 3,15 Ac 20,28 1Co 2,8 Cyrille d'Alexandrie, anathème 12 Can.263 ; Léon 1er, Tome à Flavien Can.290- 295 ; entre autres).
(Le titre " Mère de Dieu "). Nous enseignons qu'il est juste que Marie, glorieuse, sainte et toujours vierge, soit appelée par les catholiques, en un sens propre et véritable, Mère de Dieu et Mère de Dieu le Verbe incarné en elle. Car, en un sens propre et véritable, c'est le même, incarné en ces derniers temps, qui a daigné naître de la sainte et glorieuse Vierge sa mère. C'est pourquoi, le Fils de Dieu s'étant, en un sens prorpe et véritable, incarné en elle et étant né d'elle, nous confessons qu'en un sens propre et véritable elle est la Mère de Dieu qui s'est incarné et qui est né d'elle. En un sens propre, pour qu'on ne croie pas que le Seigneur Jésus ait reçu le nom de Dieu comme un titre d'honneur ou de faveur, comme l'a pensé Nestorius en sa sottise. En un sens véritable, pour qu'on ne croie pas qu'il ait pris une chair imaginaire ou irréelle en quelque façon, comme l'a affirmé Eutychès en son impiété.
402
(Résumé de la christologie) Par là est donc montré clairement ce qu'attendait l'empereur, ce à quoi est attachée l'Eglise romaine et qu'elle tient en honneur, à savoir que le Christ notre Seigneur, comme nous l'avons souvent dit, est l'un de la sainte Trinité, qu'il doit être reconnu comme de deux natures, c'est-à- dire complet dans la divinité et dans l'humanité, la chair n'ayant pas existé auparavant pour s'unir ensuite au Verbe, mais recevant en Dieu Verbe lui-même le commencement qui la fait exister. Pour la raison en effet que la chair du Verbe a pris son commencement du corps de la mère, les propriétés et la vérité de chacune des natures, à savoir de la divinité et de l'humanité, étant sauves (voir 293 ), nous confessons de façon catholique Fils de Dieu notre Seigneur Jésus Christ, tout changement et toute confusion ultérieurs étant écartés. Car nous ne reconnaissons les natures en lui qu'en considérant et en confessant les différences de la divinité et de l'humanité. Mais par le fait que nous parlons de deux natures nous ne reconnaissons pas deux personnes dans le Christ, de telle façon que nous semblions opérer une division de l'union et qu'il y ait - loin de nous une telle pensée ! - une quaternité et non une trinité, comme le pense Nestorius dans sa folie ; et nous ne confondons pas non plus ces natures unies lorsque nous confessons l'unique personne du Christ, comme le pense Eutychès dans son impiété. Mais tout comme l'Eglise romaine a reçu et vénéré jusqu'ici le Tomus du pape Léon et toutes ses lettres, ainsi que les quatre conciles de Nicée, de Constantinople, le premier d'Ephèse et celui de Chalcédoine, nous les suivons, nous les embrassons et nous les observons.
A l'instigation de l'impératrice Théodora le pape Silvère fut déposé, et le 29 mars Vigile fut déclaré son successeur. Ce n'est qu'après que Silvère eut démissionné le 11 novembre que Vigile fut légitime.
403
1. Si quelqu'un dit ou pense que les âmes des hommes préexistent, en ce sens qu'elles étaient auparavant des esprits et de saintes puissances qui, lassées de la contemplation de Dieu, se seraient tournés vers un état inférieur ; que, pour ce motif, s'étant refroidies ( ) dans leur amour de Dieu et dès lors ayant été appelées âmes ( ), elles auraient été envoyées dans des corps pour leur châtiment, qu'il soit anathème.
404
2. Si quelqu'un dit ou tient que l'âme du Seigneur a d'abord existé et qu'elle a été unie au Dieu Verbe avant de s'incarner et de naître de la Vierge, qu'il soit anathème.
405
3. Si quelqu'un dit ou tient que le corps de notre Seigneur Jésus Christ a d'abord été formé dans le sein de la sainte Vierge et qu'ensuite Dieu le Verbe et l'âme, déjà existante, lui ont été unie, qu'il soit anathème.
406
4. Si quelqu'un dit ou tient que le Verbe de Dieu est devenu semblable à tous les ordres célestes, en devenant un chérubin pour les chérubins et un séraphin pour les séraphins, en devenant semblable à toute les puissances d'en haut, qu'il soit anathème.
407
5. Si quelqu'un dit ou tient que lors de la résurrection, les corps des humains ressusciteront en forme de sphère, et ne confesse pas que nous ressuscitons debout, qu'il soit anathème.
408
6. Si quelqu'un dit ou tient que le ciel, le soleil, la lune, les étoiles et les eaux qui sont au-dessus des cieux sont des forces animées et raisonnables (matérielles), qu'il soit anathème.
409
7. Si quelqu'un dit ou tient que le Christ Seigneur sera dans le siècle à venir crucifié pour les démons, comme pour les hommes, qu'il soit anathème.
410
8. Si quelqu'un dit ou tient que la puissance de Dieu est limitée, ou qu'il a créé autant qu'il pouvait étreindre et penser, ou que les créatures sont coéternelles à Dieu, qu'il soit anathème.
411
9. Si quelqu'un dit ou pense que le châtiment des démons et des impies est temporaire, et qu'il prendra fin après un certain temps, ou bien qu'il y aura restauration des démons et des impies, qu'il soit anathème.
Le pape qui s'était enfui à Chalcédoine pour échapper à l'empereur, s'oppose par ces lettres aux menées monophysites de l'empereur.
412
Que tous sachent par conséquent que nous prêchons, tenons et proclamons cette foi qui a été transmise par les apôtres et gardée inviolée par leurs successeurs, que le vénérable synode des 318 pères de Nicée a reçu avec la lumière du Saint-Esprit et à laquelle il a donné la forme d'un symbole, et qu'ont publiée ensuite les trois autres saints synodes, à savoir ceux de Constantinople... d'Ephèse... de Chalcédoine.
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C'est ainsi que notre Seigneur, contre la sauvagerie des erreurs de cette sorte, a équipé du haut du ciel le ministère pastoral qu'il a confié au bienheureux apôtre Pierre par une triple injonction en disant : " Pais mes agneaux " . Et c'est à juste titre que le soin de les paître a été confié à celui dont la profession de foi excellente a été louée par la bouche du Seigneur. ... dans la brièveté admirable d'une question et d'une réponse il a confessé qu'un seul et même (Christ) est Fils d'homme et Fils de Dieu : " Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ". Mt 16,16, exprimant par là le mystère de la très sainte Incarnation, puisque dans l'unité de la personne et en gardant la propriété des deux natures il était à la fois homme et Dieu, et qu'il demeurait ce qu'il a pris dans le temps de sa mère toujours vierge et ce qu'il est avant les siècles en étant né du Père.
Mais en s'unissant la chair, sans confusion, sans division, sans changement et substantiellement, Dieu Verbe, notre Emmanuel qui était attendu grâce à l'annonce de la Loi et des prophètes, est venu. " Le Verbe s'est donc fait chair et il a habité parmi nous, Jn 1,14, tout entier dans ce qui est sien, tout entier dans ce qui est nôtre, prenant du sein maternel une chair avec une âme rationnelle et intellectuelle...
Il a pris un commencement dans l'humanité pour faire de nous les cohéritiers de son éternité ; il a daigné partager le sort de notre nature pour nous faire participer à son immortalité ; il est devenu pauvre bien qu'il fût riche pour que nous soyons enrichis par sa pauvreté (voir 2Co 8,9) ; il a annulé le document accusateur de nos forfaits et a pardonné tout ce qui est nôtre (voir Col 2,13 s)..., faisant en sorte... que le " médiateur de Dieu et des hommes, l'homme Jésus Christ " 1Tm 2,5 libère de la malédiction dans laquelle le premier homme, terrestre, était tenu captif des liens de la mort, en étant le deuxième homme, céleste 1Co 15,47 qui écrase la mort par la mort.
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Le Fils de Dieu a souffert pour nous, a été crucifié dans la chair, est mort dans la chair et est ressuscité le troisième jour afin que, puisque la nature divine impassible demeurait et que la vérité de notre chair était maintenue, nous professions aussi bien les souffrances que les miracles de l'unique et même Seigneur, notre Dieu Jésus Christ, afin que en considérant la glorification de notre Tête, ce que le corps de toute l'Eglise a discerné en prémices d'entre les morts dans notre Tête, à savoir dans le Christ Dieu et Seigneur, il l'attende aussi en ceux qui sont ses membres pour la venue de la gloire future. Notre rédempteur lui-même par conséquent siège à la droite du Père, un seul et même sans confusion des deux natures, sans division de la personne, et demeurant, nous le croyons, de deux natures et en deux natures, et de là il viendra juger les vivants et les morts.
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Mais le Père est avec ce même Fils unique engendré et avec l'Esprit Saint un seul dans la divinité et d'une nature égale et sans distinction. La plénitude de cette foi, notre Seigneur l'a commandée aux apôtres après la résurrection en disant : " Allez, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père et du Fils et de l'Esprit Saint' Mt 28,19 Il dit "au nom", il n'a pas dit "aux noms", afin que en ceux en qui il y a une unique force, une unique puissance, une unique divinité, une unique éternité, une unique gloire unique toute- puissance, une unique béatitude, une unique opération et une unique nature, demeure aussi l'intégrité d'un unique nom. Car rien dans la divinité n'est différent, puisque seule la propriété manifeste des personnes est désignée par la distinction. Tout donc qu'est la Trinité demeure une divinité consubstantielle et sans différence.
1996 Denzinger 368