1996 Denzinger 1492
1495
Il est parvenu à notre connaissance que pour faire reculer ceux qui, bouillonnant de cupidité, sont animés d'un esprit inhumain à l'égard du genre humain, l'empereur des Romains Charles (V) a interdit par un édit public à tous ses sujets que qui que ce soit ait l'audace de réduire en esclavage les Indiens occidentaux ou ceux du Sud, ou de les priver de leurs biens.
Puisque Nous voulons que ces Indiens, même s'ils se trouvent en dehors du sein de l'Eglise, ne soient pas pour autant privés de leur liberté ou de la disposition de leurs biens, ou considérés comme devant l'être du moment que ce sont des hommes et par conséquent capables de croire et de parvenir au salut, qu'ils ne soient pas détruits par l'esclavage mais invités à la vie par des prédications et par l'exemple,
et puisque en outre Nous désirons contenir les entreprises si infâmes de ces impies et pourvoir à ce qu'ils ne soient pas moins enclins à embrasser la foi du Christ parce qu'ils auront été révoltés par les injustices et les torts qu'ils auront subis, Nous demandons... à ta prudence que tu... interdises avec une très grande sévérité. sous peine d'excommunication portée d'avance, à tous et à chacun, quel que soit son rang. d'oser réduire en esclavage les Indiens précités, de quelque façon que ce soit, ou de les dépouiller de leurs biens.
1497
S'agissant de leur (des Indiens) mariage, nous décrétons qu'il faut observer ceci : ceux qui avant la conversion avaient plusieurs femmes selon leurs coutumes et qui ne se souviennent pas quelle est celle qu'ils ont prise la première, lorsqu'ils se convertissent à la foi chrétienne prendront l'une d'entre elles - celle qu'ils voudront - et ils contracteront mariage avec elle par les paroles portant sur le présent comme il est de coutume ; mais ceux qui se souviennent quelle est celle qu'ils ont prise la première, garderont celle-ci en laissant les autres.
1ère période de Trente : 1ère - 8ème session - décembre 1545- 1547
Période de Bologne : 9ème et 10ème session : Mars 1547 (février 1548) - septembre 1549
2ème de Trente : 11 à 16ème session : mai 1551 - avril 1552
3ème de Trente : 17 à 25ème session : janvier 1562 - décembre 1563
1500
Ce saint concile oecuménique et général de Trente, réuni légitimement dans l'Esprit Saint, sous la présidence des trois légats du Siège apostolique, a considéré l'importance des choses à traiter, particulièrement celles qui sont comprises sous les titres de l'éradication des hérésies et de la réforme des moeurs, raisons principales de la réunion,
... a estimé qu'il fallait exprimer le Symbole de foi qu'utilise la sainte Eglise romaine comme étant le principe dans lequel se retrouvent nécessairement tous ceux qui professent la foi du Christ, et l'unique fondement contre lequel les portes de l'enfer ne prévaudront jamais Mt 16,18, en reprenant les mots avec lesquels il est dit dans toutes les églises.
(suit le symbole de Nicée-Constantinople 150 )
1501
Le saint concile oecuménique et général de Trente, légitimement réuni dans l'Esprit Saint, ... garde toujours devant les yeux le propos, en supprimant les erreurs, de conserver dans l'Eglise la pureté même de l'Evangile, lequel, promis auparavant par les prophètes dans les saintes Ecritures, a été promulgué d'abord par la bouche même de notre Seigneur Jésus Christ, Fils de Dieu qui ordonna ensuite qu'il soit prêché à toute créature paf ses apôtres comme source de toute vérité salutaire et de toute règle morale Mt 16,15.
Il voit clairement aussi que cette vérité et cette règles sont contenues dans les livres écrits et dans les tradition non écrites qui, reçues par les apôtres de la bouche du Christ lui-même ou transmises comme de main en main par les apôtres sous la dictée de l'Esprit Saint, sont parvenues jusqu'à nous.
C'est pourquoi, suivant l'exemple des pères orthodoxes, le même saint concile reçoit et vénère avec le même sentiment de piété et le même respect tous les livres tant de l'Ancien Testament que du Nouveau Testament, puisque Dieu est l'auteur unique de l'un et de l'autre, ainsi que les traditions elles-mêmes concernant aussi bien la foi que les moeurs, comme ou bien venant de la bouche du Christ ou dictées par l'Esprit Saint et conservées dans l'Eglise catholique par une succession continue.
Il a jugé bon de joindre à ce décret une liste des livres saints, afin qu'aucun doute ne s'élève pour quiconque sur les livres qui sont reçus par le concile. Ces livres sont mentionnés ci-dessous.
1502
De l'Ancien Testament cinq livres de Moïse, c'est-à-dire la Genèse, l'Exode, le Lévitique, les Nombres, le Deutéronome ; les livres de Josué, des Juges, de Ruth, les quatre livres des Rois, les deux livres des Paralipomènes, le premier livre d'Esdras et le second, dit Néhémie, Tobie, Judith, Esther, Job, le psautier de David comprenant cent cinquante psaumes, les Proverbes, l'Ecclésiaste, le Cantique des Cantiques, la Sagesse, l'Ecclésiastique, Isaïe, Jérémie avec Baruch, Ezéchiel, Daniel, les douze petits prophètes, c'est-à-dire Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie, Malachie, les deux livres des Maccabées, le premier et le second.
1503
Du nouveau Testament : les quatre évangiles, selon Matthieu, Marc, Luc et Jean ; les Actes des Apôtres écrits par l'évangéliste Luc ; les quatorze épîtres de l'apôtre Paul, aux Romains, deux aux Corinthiens, aux Galates, aux Ephésiens, aux Philippiens, aux Colossiens deux aux Thessaloniciens, deux à Timothée, à Tite, à Philémon, aux Hébreux, deux de l'apôtre Pierre, trois de l'apôtre Jean, une de l'apôtre Jacques, une de l'apôtre Jude et l'Apocalypse de l'apôtre Jean.
1504
Si quelqu'un ne reçoit pas ces livres pour sacrés et canoniques dans leur totalité, avec toutes leurs parties, tels qu'on a coutume de les lire dans l'Eglise catholique et qu'on les trouve dans la vieille édition de la Vulgate latine ; s'il méprise en connaissance de cause et de propos délibéré les traditions susdites : qu'il soit anathème.
1505
Que tous comprennent ainsi l'ordre et la voie que le concile suivra, après avoir posé les fondements de la confession de la foi, et particulièrement les témoignages et les appuis dont il usera pour confirmer les dogmes et restaurer les moeurs dans l'Eglise.
1506
De plus le même saint concile a considéré qu'il pourrait être d'une grande utilité pour l'Eglise de Dieu de savoir, parmi toutes les éditions latines des livres saints qui sont en circulation, celle que l'on doit tenir pour authentique : aussi statue-t-il et déclare-t-il que la vieille édition de la Vulgate, approuvée dans l'Eglise même par un long usage de tant de siècles, doit être tenue pour authentique dans les leçons publiques, les discussions, les prédications et les explications, et que personne n'ait l'audace ou la présomption de la rejeter sous quelque prétexte que ce soit (3825).
1507
En outre. pour contenir les esprits indociles. il décrète que personne, dans les choses de la foi ou des moeurs concernant l'édifice de la foi chrétienne, ne doit, en s'appuyant sur un seul jugement, oser interpréter l'Ecriture sainte en détournant celle-ci vers son sens personnel allant contre le sens qu'a tenu et que tient notre sainte Mère l'Eglise, elle à qui il revient de juger du sens et de l'interprétation véritables des saintes Ecritures, ou allant encore contre le consentement unanime des Pères, même si des interprétations de ce genre ne devaient jamais être publiées. ...
1508
Mais le saint concile veut aussi, comme il est juste, imposer une règle en ce domaine aux imprimeurs... aussi décrète-t-il et statue-t-il que désormais la sainte Ecriture, particulièrement cette édition ancienne de la Vulgate, soit imprimée le plus correctement possible ; qu'il ne soit permis à personne d'imprimer ou de faire imprimer tout livre traitant des choses sacrées sans nom d'auteur, ni de le vendre à l'avenir ou de le garder chez soi, si auparavant ces livres n'ont pas été examinés et approuvés par l'Ordinaire...
1510
Pour que notre foi catholique, " sans laquelle il est impossible de plaire à Dieu" He 11,6, une fois débarrassée des erreurs, demeure intègre et sans tache dans sa pureté, et pour que le peuple chrétien ne soit pas "emporté à tout vent de doctrine" Ep 4,14
- puisque l'antique serpent Ap 12,9 Ap 20,2, ennemi perpétuel du genre humain, parmi les nombreux maux qui troublent de nos jours l'Eglise de Dieu, a suscité au sujet du péché originel et de son remède non seulement de nouvelles, mais même d'anciennes querelles -, le saint concile oecuménique et général de Trente... veut entreprendre de ramener ceux qui errent et d'affermir ceux qui vacillent.
Aussi, suivant le témoignage des saintes Ecritures, des saints Pères et des conciles les plus approuvés, ainsi que le jugement et l'accord de l'Eglise elle- même, il statue, confesse et déclare ce qui suit au sujet du péché originel.
1511
1. Si quelqu'un ne confesse pas que le premier homme, Adam, après avoir transgressé le commandement de Dieu dans le paradis, a immédiatement perdu la sainteté et la justice dans lesquelles il avait été établi et a encouru, par l'offense que constituait cette prévarication, la colère et l'indignation de Dieu et, par la suite, la mort dont il avait été auparavant menacé par Dieu, et avec la mort la captivité sous le pouvoir de celui qui ensuite "a eu l'empire de la mort, c'est-à-dire le diable" He 2,14 ; et que par l'offense que constituait cette prévarication Adam tout entier, dans son corps et dans son âme a été changé en un état pire 371 : qu'il soit anathème.
1512
2. "Si quelqu'un affirme que la prévarication d'Adam n'a nui qu'à lui seul et non à sa descendance", et qu'il a perdu la sainteté et la justice reçues de Dieu pour lui seul et non aussi pour nous, ou que, souillé par le péché de désobéissance, "il n'a transmis que la mort" et les punitions "du corps à tout le genre humain, mais non pas le péché, qui est la mort de l'âme": qu'il soit
anathème, " puisqu'il est en contradiction avec l'Apôtre qui dit: "Par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et par le péché, la mort et ainsi la mort a passé dans tous les hommes, tous ayant péché en lui" Rm 5,12 372 .
1513
3. Si quelqu'un affirme que ce péché d'Adam - qui est un par son origine et. transmis par propagation héréditaire et non par imitation, est propre à chacun - , est enlevé par les forces de la nature humaine ou par un autre remède que le mérite de l'unique médiateur notre Seigneur Jésus Christ 1347 qui nous a réconciliés avec Dieu dans son sang Rm 5,9 s, "devenu pour nous justice, sanctification et Rédemption" 1Co 1,30 ou s'il nie que ce mérite de Jésus Christ soit appliqué aussi bien aux adultes qu'aux enfants par le sacrement conféré selon la forme et l'usage de l'Eglise : qu'il soit anathème.
Car "il n'est pas d'autre nom sous le ciel qui ait été donné aux hommes par lequel nous devons être sauvés" Ac 4,12. D'où cette parole : "Voici l'Agneau de Dieu, voici celui qui ôte les péchés du monde" Jn 1,19, et celle-ci " Vous tous qui avez été baptisés. vous avez revêtu le Christ" Ga 3,27
1514
4. "Si quelqu'un nie que les tout-petits, qui viennent de naître de leur mère, doivent être baptisés", même s'ils viennent de parents baptisés. "ou bien dit qu'ils sont certes baptisés pour la rémission des péchés, mais qu'ils ne portent rien du péché originel venant d'Adam qu'il est nécessaire d'expier par le bain de régénération" pour obtenir la vie éternelle, " d'où il suit que pour eux la forme du baptême pour la rémission des péchés n'a pas un sens vrai, mais faux : qu'il soit anathème.
Car on ne peut pas comprendre autrement ce que dit l'Apôtre : "Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché, la mort, et ainsi la mort a passé dans tous les hommes, tous ayant péché en lui" Rm 5,12 si ce n'est comme l'a toujours compris l'Eglise catholique répandue en tous lieux. C'est en effet à cause de cette règle de foi venant de la tradition des apôtres " que même les tout-petits, qui n ont pas encore pu commettre aucun péché par eux-mêmes, sont pourtant vraiment baptisés pour la rémission des péchés, afin que soit purifié en eux par la régénération ce qu'il ont contracté par la génération " 223 . En effet "nul, s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit Saint, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu" Jn 3,5.
1515
5. Si quelqu'un nie que, par la grâce de notre Seigneur Jésus Christ conférée au baptême, la culpabilité du péché originel soit remise, ou même s'il affirme que tout ce qui a vraiment et proprement caractère de péché n'est pas totalement enlevé, mais est seulement rasé ou non imputé : qu'il soit anathème.
En effet en ceux qui sont nés de nouveau rien n'est objet de la haine de Dieu, car "il n'y a pas de condamnation" Rm 8,1 pour ceux qui sont vraiment "ensevelis dans la mort avec le Christ par le baptême" Rm 6,4, " qui ne marchent pas selon la chair" Rm 8,1. mais qui dépouillant le vieil homme et revêtant l'homme nouveau, qui a été créé selon Dieu Ep 4,22-24 Col 3,9 s, sont devenus innocents, sans souillure, purs, irréprochables et fils aimés de Dieu, "héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ Rm 8,17, en sorte que rien ne fasse obstacle à leur entrée au ciel.
Que la concupiscence ou le foyer du péché demeure chez les baptisés, ce saint concile le confesse et le pense ; cette concupiscence étant laissée pour être combattue, elle ne peut nuire à ceux qui n'y consentent pas et y résistent courageusement par la grâce du Christ. Bien plus, "celui qui aura lutté selon les règles sera couronné" 2Tm 2,5. Cette concupiscence, que l'Apôtre appelle parfois "péché " Rm 6,12-15 Rm 7,7 Rm 7,14-20, le saint concile déclare que l'Eglise catholique n'a jamais compris qu'elle fût appelée péché parce qu'elle serait vraiment et proprement péché chez ceux qui sont nés de nouveau, mais parce qu'elle vient du péché et incline au péché. Si quelqu'un pense le contraire : qu'il soit anathème.
1516
6. Cependant ce même saint concile déclare qu'il n'est pas dans son intention de comprendre dans ce décret, où il est traité du péché originel, la bienheureuse et immaculée Vierge Marie, Mère de Dieu, mais que l'on doit observer les constitutions du pape Sixte IV, d'heureuse mémoire, sous la menace des peines qui y sont contenues et il les renouvelle 1400 ; 1425 ]s,.
1520
Ce n'est pas sans la perte de nombreuses âmes et un grave détriment pour l'unité de l'Eglise que s'est répandue en notre temps une doctrine erronée concernant la justification. Aussi, pour la louange et la gloire du Dieu tout- puissant, pour la paix de l'Eglise et le salut des âmes, le saint concile oecuménique et général de Trente... se propose d'exposer à tous les chrétiens la véritable et sainte doctrine de la justification qu'a enseignée le Christ Jésus, soleil de justice Ml 4,2, auteur de notre foi, qui la mène à sa perfection He 12,2 que les apôtres nous ont transmise et que l'Eglise catholique, sous l'inspiration de l'Esprit Saint, a toujours conservée, en interdisant sévèrement que personne n'ose à l'avenir croire, prêcher ou enseigner autrement que ce qui est statué et déclaré par le présent décret.
1521
En premier lieu. le saint concile déclare que. pour avoir une intelligence exacte et authentique de la doctrine de la justification, il faut que chacun reconnaisse et confesse que, tous les hommes ayant perdu l'innocence dans la prévarication d'Adam Rm 5,12 1Co 15,22 239 , "devenus impurs" Is 64,6 et (comme le dit l'Apôtre) "enfants de colère par nature" Ep 2,3 comme cela a été exposé dans le décret sur le péché originel, ils étaient à ce point "esclaves du péché" Rm 6,20 et sous le pouvoir du diable et de la mort, que non seulement les païens, par la force de la nature 1551 , mais aussi les juifs, par la lettre même de la Loi de Moïse, ne pouvaient se libérer ou se relever de cet état, même si le libre arbitre n'était aucunement éteint en eux 1555 , bien qu'affaibli et dévié en sa force 378 .
1522
D'où il arriva que le Père céleste, " Père des miséricordes et Dieu de toute consolation" 2Co 1,3, envoya aux hommes le Christ Jésus. son Fils 1551 , annoncé et promis aussi bien avant la Loi qu'au temps de la Loi à de nombreux saints Pères Gn 49,10 Gn 49,18, lorsque vint cette bienheureuse "plénitude des temps" Ep 1,10 Ga 4,4, afin que, d'une part, "il rachète les juifs sujets de la Loi" Ga 4,5 et que, de l'autre, "les païens qui ne poursuivaient pas de justice, atteignent la justice" Rm 9,30, et que tous reçoivent l'adoption filiale Ga 4,5. C'est lui que "Dieu a établi victime propitiatoire par son sang moyennant la foi " Rm 3,25 " pour nos péchés, non seulement pour les nôtres, mais aussi pour ceux du monde entier" 1Jn 2,2.
1523
Mais, bien que lui soit " mort pour tous " 2Co 5,15, tous cependant ne reçoivent pas le bienfait de sa mort. mais ceux-là seulement auxquels le mérite de sa Passion est communiqué. En effet, de même qu'en toute vérité les hommes ne naîtraient pas injustes s'ils ne naissaient de la descendance issue corporellement d'Adam, puisque, quand ils sont conçus, ils contractent une injustice personnelle par le fait qu'ils descendent corporellement de lui, de même ils ne seraient jamais justifiés s'ils ne renaissaient pas dans le Christ 1522 ; 1560 , puisque, grâce à cette renaissance, leur est accordé par le mérite de sa Passion la grâce par laquelle ils deviennent justes. Pour ce bienfait l'Apôtre nous exhorte à toujours "rendre grâce au Père qui nous a rendus dignes d'avoir part à l'héritage des saints dans la lumière et nous a arrachés à la puissance des ténèbres et transférés dans le Royaume de son Fils bien-aimé, en qui nous avons la Rédemption et la rémission des péchés" Col 1,12-14
1524
Ces mots esquissent une description de la justification de l'impie, comme étant un transfert de l'état dans lequel l'homme naît du premier Adam à l'état de grâce et d'adoption des fils de Dieu Rm 8,15, par le second Adam, Jésus Christ, notre Sauveur. Après la promulgation de l'Evangile, ce transfert ne peut se faire sans le bain de la régénération 1618 ou le désir de celui-ci, selon ce qui est écrit "Nul ne peut entrer dans le Royaume de Dieu s'il ne renaît pas de l'eau et de l'Esprit Saint" Jn 3,5.
1525
Le concile déclare, en outre, que la justification elle-même chez les adultes a son origine dans la grâce prévenante de Dieu par Jésus Christ 1553 , c'est-à-dire dans un appel de Dieu par lequel ils sont appelés sans aucun mérite en eux. De la sorte, ceux qui s'étaient détournés de Dieu par leurs péchés, poussés et aidés par la grâce, se disposent à se tourner vers la justification que Dieu leur accorde, en acquiesçant et coopérant librement à cette même grâce 1554-1555 . De cette manière, Dieu touchant le coeur de l'homme par l'illumination de l'Esprit Saint, d'une part l'homme lui-même n'est pas totalement sans rien faire, lui qui accueille cette inspiration qu'il lui est possible de rejeter, d'autre part, pourtant, sans la grâce de Dieu, il ne lui est pas possible, par sa propre volonté, d'aller vers la justice en présence de Dieu 1553 . Aussi, lorsqu'il est dit dans la sainte Ecriture " Tournez- vous vers moi et moi je me tournerai vers vous" Za 1,3], notre liberté nous est rappelée ; lorsque nous répondons "Tourne-nous vers toi, Seigneur, et nous nous convertirons" Lm 5,21, nous reconnaissons que la grâce de Dieu nous prévient.
1526
Les hommes sont disposés à la justice elle-même 1557- 1559 lorsque, poussés et aidés par la grâce divine, concevant en eux la foi qu'ils entendent prêcher Rm 10,17, ils vont librement vers Dieu, croyant qu'est vrai tout ce qui a été divinement révélé et promis 1562-1564 et, avant tout que Dieu justifie l'impie " par sa grâce, au moyen de la Rédemption qui est dans le Christ Jésus" Rm 3,24 ; lorsque, aussi, comprenant qu'ils sont pécheurs et passant de la crainte de la justice divine, qui les frappe fort utilement 1558 , à la considération de la miséricorde de Dieu, ils s'élèvent à l'espérance, confiants que Dieu, à cause du Christ, leur sera favorable, commencent à l'aimer comme source de toute justice, et, pour cette raison, se dressent contre les péchés, animés par une sorte de haine et de détestation 1559 , c'est-à-dire par cette pénitence que l'on doit faire avant le baptême Ac 2,38 ; lorsque, enfin, ils se proposent de recevoir le baptême, de commencer une vie nouvelle et d'observer les commandements divins.
1527
De cette disposition il est écrit : "Celui qui approche de Dieu doit croire qu'il est et qu'il récompense ceux qui le cherchent" He 11,6, et: "Aie confiance, mon fils, tes péchés te sont remis" Mt 9,2, et "La crainte du Seigneur chasse les péchés" Si 1,27, et: "Faites pénitence et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus Christ, pour la rémission de ses péchés, et vous recevrez le don de l'Esprit Saint " Ac 2,38, et "Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, leur apprenant à observer tout ce que je vous ai commandé Mt 28,19-20 et : "Préparez vos coeurs pour le Seigneur " 1S 7,3.
1528
Cette disposition ou préparation est suivie par la justification elle-même, qui n'est pas seulement rémission des péchés 1561 , mais à la fois sanctification et rénovation de l'homme intérieur par la réception volontaire de la grâce et des dons. Par là, d'injuste l'homme devient juste, d'ennemi ami, en sorte qu'il est "Héritier, en espérance, de la vie éternelle" Tt 3,7
1529
Les causes de cette justification sont celles-ci : cause finale, la gloire de Dieu et du Christ, et la vie éternelle ; cause efficiente : Dieu qui, dans sa miséricorde, lave et sanctifie gratuitement 1Co 6,11 par le sceau et l'onction 2Co 1,21-22 de l'Esprit Saint promis "qui est le gage de notre héritage" Ep 1,13-14 ; cause méritoire : le Fils unique bien-aimé de Dieu, notre Seigneur Jésus Christ qui, "alors que nous étions ennemis" Rm 5,10, "à cause du grand amour dont il nous a aimés" Ep 2,4, par sa très sainte Passion sur le bois de la croix nous a mérité la justification 1560 et a satisfait pour nous à Dieu son Père ; cause instrumentale, le sacrement du baptême, "sacrement de la foi" sans laquelle il n'y a jamais eu de justification pour personne.
Enfin l'unique cause formelle est la justice de Dieu, "non pas celle par laquelle il est juste lui-même, mais celle par laquelle elle nous fait justes " 1560-1561 , c'est-à-dire celle par laquelle, l'ayant reçue en don de lui, nous sommes "renouvelés par une transformation spirituelle de notre esprit" Ep 4,23 nous ne sommes pas seulement réputés justes, mais nous sommes dits et nous sommes vraiment justes 1Jn 3,1, recevant chacun en nous la justice, selon la mesure que l'Esprit Saint partage à chacun comme il le veut 1Co 12,11 et selon la disposition et la coopération propres à chacun.
1530
En effet, bien que personne ne puisse être juste que si les mérites de la Passion de notre Seigneur Jésus Christ lui sont communiqués, c'est cependant ce qui se fait dans la justification de l'impie, alors que, par le mérite de cette très sainte Passion, la charité de Dieu est répandue par l'Esprit Saint dans les coeurs Rm 5,5 de ceux qui sont justifiés et habite en eux 1561 . Aussi, avec la rémission des péchés, l'homme reçoit-il dans la justification même par Jésus Christ, en qui il est inséré, tous les dons suivants infus en même temps: la foi, l'espérance et la charité.
1531
Car la foi à laquelle ne se joignent ni l'espérance ni la charité n'unit pas parfaitement au Christ et ne rend pas membre vivant de son corps. Pour cette raison, l'on dit en toute vérité que la foi sans les oeuvres est morte et inutile Jc 2,17-20 1569 , et que dans le Christ Jésus ni la circoncision, ni l'incirconcision n'ont de valeur, mais la foi "qui opère par la charité" Ga 5,6 Ga 6,15.
C'est elle que, selon la tradition des apôtres, les catéchumènes demandent à l'Eglise avant le sacrement du baptême, quand ils demandent "la foi qui procure la vie éternelle " que, sans l'espérance et la charité, la foi ne peut procurer. Aussi entendent-ils immédiatement la parole du Christ : " Si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements " Mt 19,17 1568-1570 . C'est pourquoi lorsqu'ils reçoivent la justice véritable et chrétienne, cette première robe Lc 15,22 qui leur est donnée par le Christ à la place de celle que, par sa désobéissance, Adam a perdue pour lui et pour nous, il est ordonné aussitôt à ceux qui viennent de renaître de la conserver blanche et sans tache, pour l'apporter devant le tribunal de notre Seigneur Jésus Christ et avoir la vie éternelle.
1532
Lorsque l'Apôtre dit que l'homme est "justifié par la foi" 1559 et gratuitement Rm 3,22-24, il faut comprendre ces mots dans le sens où l'a toujours et unanimement tenu et exprimé l'Eglise catholique, à savoir que si nous sommes dits être justifiés par la foi, c'est parce que "la foi est le commencement du salut de l'homme", le fondement et la racine de toute justification, que sans elle "il est impossible de plaire à Dieu" He 11,6 et de parvenir à partager le sort de ses enfants 2P 1,4 ; et nous sommes dits être justifiés gratuitement parce que rien de ce qui précède la justification, que ce soit la foi ou les oeuvres, ne mérite cette grâce de la justification. En effet " Si c'est une grâce, elle ne vient pas des oeuvres ; autrement (comme le dit le même Apôtre) la grâce n'est plus la grâce " Rm 11,6.
1533
Bien qu'il soit indispensable de croire que les péchés ne sont et n'ont jamais été remis que gratuitement par miséricorde divine à cause du Christ, cependant personne ne doit, en se targuant de la confiance et de la certitude que ses péchés sont remis et en se reposant sur cela, dire que ses péchés sont ou ont été remis, alors que cette confiance vaine et éloignée de toute piété peut exister chez des hérétiques et des schismatiques, bien plus que de notre temps elle existe et est prêchée à grand bruit contre l'Eglise catholique 1562 .
1534
Mais il ne faut pas non plus affirmer que tous ceux qui ont été vraiment justifiés doivent être sans aucune hésitation convaincus en eux- mêmes qu'ils ont été justifiés, ni que personne n'est absous de ses péchés et justifié, sauf celui qui croit avec certitude qu'il a été absous et justifié, et que c'est par cette seule foi que se réalise l'absolution et la justification 1564 , comme si celui qui ne croit pas cela mettait en doute les promesses de Dieu et l'efficacité de la mort et de la Résurrection du Christ. En effet, de même qu'aucun homme pieux ne doit mettre en doute la miséricorde de Dieu, les mérites du Christ, la vertu et l'efficacité des sacrements, de même quiconque se considère lui-même, ainsi que sa propre faiblesse et ses mauvaises dispositions, peut être rempli d'effroi et de crainte au sujet de sa grâce 1563 , puisque personne ne peut savoir, d'une certitude de foi excluant toute erreur, qu'il a obtenu la grâce de Dieu.
1535
Ainsi donc, ceux qui ont été justifiés et sont devenus " amis de Dieu " et "membres de sa famille " Jn 15,15 Ep 2,19 marchant "de vertu en vertu" Ps 83,8 se renouvellent (comme dit l'Apôtre) de jour en jour 2Co 4,16, c'est-à- dire en mortifiant les membres de leur chair Col 3,5 et en les présentant comme des armes à la justice pour la sanctification Rm 6,13-19, par l'observation des commandements de Dieu et de l'Eglise ; ils croissent dans cette justice reçue par la grâce du Christ, la foi coopérant aux bonnes oeuvres Jc 2,22 et ils sont davantage justifiés (1574) ; 1582 , selon ce qui est écrit : "Celui qui est juste, sera encore justifié" Ap 22,11 et aussi : " Ne crains pas d'être justifié jusqu'à la mort" Si 18,22 et encore "Vous voyez que l'homme est justifié par les oeuvres et non par la foi seule" Jc 2,24 Cet accroissement de justice, la sainte Eglise le demande quand elle dit dans la prière : "Seigneur, augmente en nous la foi, l'espérance et la charité."
1536
Personne, si justifié soit-il, ne doit penser qu'il est libéré de l'observation des commandements 1570 . Personne ne doit user de cette expression téméraire et interdite sous peine d'anathèmes par les Pères, à savoir que pour l'homme justifié les commandements de Dieu sont impossibles à observer 1568 ; 1572 ; 397 . "Car Dieu ne commande pas de choses impossibles, mais en commandant il t'invite à faire ce que tu peux et à demander ce que tu ne peux pas ", et il t'aide pour que tu le puisses ; ses commandements ne sont pas pesants 1Jn 5,3, son joug est doux et son fardeau léger Mt 11,30 En effet, ceux qui sont enfants de Dieu aiment le Christ ; ceux qui l'aiment (comme il en témoigne lui-même) gardent ses paroles Jn 14,23 ce qui leur est toujours possible avec l'aide de Dieu.
1537
Bien qu'en cette vie mortelle, aussi saints et justes qu'ils soient, ils tombent parfois au moins dans les péchés légers et quotidiens, qu'on appelle aussi véniels 1573 , ils ne cessent pas pour autant d'être justes. En effet l'expression humble et authentique des justes est celle-ci : "Remets-nous nos dettes" Mt 6,12 229 ss. .
C'est pourquoi les justes eux-mêmes doivent se sentir d'autant plus obligés à marcher dans la voie de la justice que, désormais " libérés du péché, devenus serviteurs de Dieu " Rm 6,22, vivant "dans la tempérance, la justice et la piété " Tt 2,12, ils peuvent progresser par le Christ Jésus qui leur a ouvert l'accès à cette grâce Rm 5,2. Car ceux qu'il a justifiés une fois, "Dieu ne les abandonne pas, à moins qu'il ne soit d'abord abandonné par eux".
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C'est pourquoi personne ne doit se rassurer dans la foi seule 1559 ; 1569 ; 1570 , pensant que par la foi seule il a été constitué héritier et obtiendra l'héritage, même s'il ne souffre pas avec le Christ pour être glorifié avec lui Rm 8,17. Car le Christ lui-même (comme le dit l'Apôtre), "tout Fils de Dieu qu'il fût, a appris par ses souffrances à obéir, et, ayant tout accompli, est devenu cause de salut éternel pour tous ceux qui lui obéissent" He 5,8-9.
C'est pourquoi l'Apôtre lui-même avertit ceux qui ont été justifiés en ces termes : " Ne savez-vous pas que, dans les courses du stade, tous courent, mais un seul obtient le prix ? Courez de manière à le remporter. Pour moi, donc, c'est ainsi que je cours, non à l'aventure ; c'est ainsi que je combats, non comme en frappant dans le vide. Mais je châtie mon corps et je le réduis en esclavage, de peur qu'après avoir prêché aux autres je ne sois moi-même éliminé" 1Co 9,24 ss. Et Pierre, le prince des Apôtres "Appliquez-vous à rendre certaine votre vocation et votre élection par vos bonnes oeuvres ; en agissant ainsi vous ne pécherez jamais" 2P 1,10.
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Il est par là évident qu'ils s'opposent à la doctrine orthodoxe de la religion ceux qui disent que, dans toute bonne action, le juste pèche au moins véniellement 1575 ; 1481 ss. ou (ce qui est plus intolérable) mérite les peines éternelles ; de même aussi ceux qui déclarent que les justes pèchent dans toutes leurs actions, si, voulant secouer en eux l'indolence et s'encourager à courir dans le stade, ils considèrent, en même temps que la glorification mise en premier lieu, la récompense éternelle 1576 ; 1581 , alors qu'il est écrit : "J'ai disposé mon coeur à la pratique de tes prescriptions à cause de la récompense" Ps 119,112, et que l'Apôtre dit de Moïse qu'il "avait les yeux fixés sur la récompense He 11,26.
1996 Denzinger 1492