2013 Directoire prêtres 82
83 La pauvreté de Jésus poursuit un but salvifique. Le Christ était riche, il s’est fait pauvre pour nous pour que nous devenions riches grâce à sa pauvreté (cf. 2Co 2Co 8,9).
L’Épître aux Philippiens montre le rapport entre le dépouillement de soi et l’esprit de service qui doit animer le ministère pastoral. Saint Paul dit en effet que Jésus n’a pas tenu « pour une proie son égalité avec Dieu mais, au contraire, il s’est dépouillé en prenant la condition d’esclave » (Ph 2,6-7). En vérité, le prêtre deviendra difficilement serviteur et ministre de ses frères s’il est excessivement préoccupé de son confort et de son bien-être.
Grâce à sa condition de pauvre, le Christ manifeste qu’il a tout reçu du Père depuis l’éternité, et qu’il Lui restitue tout, jusqu’à l’offrande totale de sa vie.
L’exemple du Christ doit porter le prêtre à se conformer à Lui, dans la liberté intérieure vis-à-vis des biens et des richesses du monde.[380] Le Seigneur nous enseigne que Dieu est le seul vrai bien et que gagner la vie éternelle est la seule vraie richesse : « Quel profit, en effet, peut avoir l’homme à gagner l’univers au détriment de son âme ? Car que donnera l’homme en échange de son âme ? » (Mc 8,36-37). Chaque prêtre est appelé à vivre la vertu de pauvreté qui consiste essentiellement à donner son coeur au Christ, qui est notre vrai trésor, et non pas aux choses matérielles.
Le prêtre, dont le Seigneur est la part d’héritage (cf. Nb 18,20),[381] sait que sa mission, tout comme celle de l’Église, se déroule au milieu du monde et que les biens créés sont nécessaires au développement personnel de l’homme. Il utilisera cependant ces biens avec le sens des responsabilités, la modération, la rectitude d’intention et le détachement qui sont propres à celui qui garde son trésor dans les cieux et qui sait que tout doit être utilisé pour l’édification du Royaume de Dieu (Lc 10,7 Mt 10,9-10 1Co 9,14 Ga 6,6).[382] Aussi s’abstiendra-t-il des activités lucratives qui ne sont pas conformes à son ministère.[383] En outre, le prêtre devra éviter d’offrir le flanc à la moindre insinuation qu’il pourrait concevoir son ministère comme une occasion pour en retirer des avantages, favoriser les siens ou rechercher des positions privilégiées. Au contraire il doit être au milieu des gens pour les servir sans limites en suivant l’exemple du Christ, le Bon Pasteur (cf. Jn 10,10), se souvenant que le don qu’il a reçu est gratuit, il sera disposé à donner gratuitement (Mt 10,8 Ac 8,18-25),[384] et à utiliser pour le bien de l’Église et pour les oeuvres de charité tout ce qu’il reçoit à l’occasion de l’exercice de son office, après avoir assuré sa subsistance et remplit tous les devoirs de son état.[385]
En fin de compte, bien qu’il ne vive pas la pauvreté en vertu d’une promesse publique, le prêtre est tenu de mener une vie simple et à s’abstenir de tout ce qui pourrait être vanité,[386] embrassant ainsi la pauvreté volontaire pour suivre le Christ de plus près.[387] Dans tous les domaines (habitation, moyens de transport, vacances, etc.), que le prêtre élimine toute recherche et tout luxe.[388] En ce sens, le prêtre doit combattre chaque jour pour ne pas tomber dans une spirale de consommation et la vie facile qui aujourd’hui dominent dans de nombreuses parties du monde. Un examen de conscience bien fait l’aidera à vérifier quel est son niveau de vie, sa disponibilité à s’occuper des fidèles et à remplir ses devoirs ; à se demander si les moyens qu’il utilise répondent à une authentique nécessité ou si au contraire il recherche la facilité en rejetant les sacrifices. La crédibilité et l’efficacité apostolique du prêtre se jouent en grande partie sur la cohérence qui existe entre ce qu’il dit et ce qu’il fait en particulier par rapport à la pauvreté.
Ami des pauvres, il leur réservera les soins les plus délicats de sa charité pastorale, vivant une option préférentielle pour toutes les formes anciennes ou nouvelles de pauvreté, si tragiquement présentes dans le monde. Il n’oubliera jamais que la première misère dont l’homme doit être libéré, c’est le péché, source première de tout mal.
84 Il existe une « relation essentielle [...] entre la Mère de Jésus et le sacerdoce des ministres du Fils ». Cette relation découle de celle qui existe entre la maternité divine de Marie et le sacerdoce du Christ.[389]
C’est dans cette relation que prend sa source la spiritualité mariale du prêtre. On ne peut dire de la spiritualité sacerdotale qu’elle est complète si elle ne prend pas en considération le testament du Christ crucifié qui voulut confier sa Mère au disciple bien-aimé et, à travers lui, à tous les prêtres appelés à continuer Son oeuvre de rédemption.
Comme Elle fut confiée à Jean aux pieds de la Croix, de même, Marie est confiée comme Mère à tout prêtre d’une façon spéciale (cf. Jn 19,26-27).
Les prêtres, qui sont au nombre des disciples bien-aimés de Jésus crucifié et ressuscité, doivent accueillir Marie comme Mère dans leur vie, en faisant d’Elle l’objet de leur attention et de leur prière continue. Marie toujours Vierge devient alors la Mère qui les conduit au Christ, qui leur fait aimer authentiquement l’Église, qui intercède pour eux et les guide vers le Royaume des cieux.
85 Tout prêtre sait que Marie, parce que Mère, est aussi la plus éminente formatrice de son sacerdoce, puisque c’est Elle qui sait former son coeur sacerdotal, le protéger des dangers, des fatigues, des découragements, et veiller avec une maternelle sollicitude pour qu’il croisse en sagesse, en âge et en grâce, devant Dieu et devant les hommes (cf. Lc 2,40).
Mais seuls sont des fils dévots ceux qui savent imiter les vertus de leur Mère. Le prêtre donc contemplera Marie, pour être un ministre humble, obéissant, chaste, et pour rendre témoignage de la charité dans un don total au Seigneur et à l’Église.[390]
86 Dans chaque célébration eucharistique nous entendons à nouveau « Voilà ton fils ! » dit par le Fils à sa Mère, de même, il dit aussi à chacun de nous : « Voici ta Mère » (Jn 19,26-27). Vivre l’Eucharistie implique également recevoir sans cesse ce don : « Par sa vie tout entière, Marie est une femme “eucharistique”. L’Église, regardant Marie comme son modèle, est appelée à l’imiter aussi dans son rapport avec ce Mystère très saint […] Marie est présente, avec l’Église et comme Mère de l’Église, en chacune de nos célébrations eucharistiques. Si Église et Eucharistie constituent un binôme inséparable, il faut en dire autant du binôme Marie et Eucharistie ».[391] De cette manière, la rencontre avec Jésus dans le Sacrifice de l’Autel comporte inévitablement la rencontre avec Marie, sa Mère. En effet, « en vertu de son identification et conformation sacramentelle à Jésus, Fils de Dieu et Fils de Marie, chaque prêtre peut et doit se sentir véritablement le fils bien-aimé de cette très noble et très humble Mère ».[392]
Chef-d’oeuvre du Sacrifice sacerdotal du Christ, la Vierge représente l’Église dans toute sa pureté, « sans tache ni ride », toute « sainte et immaculée » (Ep 5,27). La contemplation de la Sainte Vierge – à laquelle s’associe saint Joseph, maître de vie intérieure – met devant le prêtre l’idéal vers lequel tendre dans le ministère de sa communauté, afin qu’elle aussi devienne « l’Église glorieuse » (ibid.) grâce au don sacerdotal de sa propre vie.
Le prêtre a constamment besoin d’approfondir sa formation. Même si le jour de son ordination il a reçu le sceau permanent qui le configure in aeternum au Christ Tête et Pasteur, il est appelé à sans cesse progresser afin d’être plus efficace dans son ministère. En ce sens il est impératif que les prêtres comprennent que leur formation ne prend pas fin avec les années du séminaire. Bien au contraire, dès le jour de son ordination, le prêtre doit sentir la nécessité de se perfectionner sans cesse pour appartenir toujours davantage au Christ Jésus.
87 Comme l’a rappelé Benoît XVI « le thème de l’identité sacerdotale […] est déterminant pour l’exercice du sacerdoce ministériel à l’heure actuelle et à l’avenir ».[393] Ces paroles du Saint Père constituent le point de référence sur lequel se base la formation permanente du clergé qui veut l’aider à approfondir la signification de l’être prêtre. « La relation fondamentale du prêtre est celle qui l’unit à Jésus Christ Tête et Pasteur »[394] et en ce sens, la formation permanente devrait être un moyen pour développer cette relation “exclusive” qui nécessairement se répercute sur tout l’agir et tout l’être du prêtre. La formation permanente est une exigence qui naît et se développe à partir de la réception du sacrement de l’Ordre, par lequel le prêtre est non seulement “consacré” par le Père, “envoyé” par le Fils, mais aussi “animé” par le Saint-Esprit. Elle est destinée à assimiler toute la vie et l’activité du prêtre, progressivement et toujours plus profondément, dans la fidélité au don reçu : « Voilà pourquoi je te rappelle que tu dois réveiller en toi le don de Dieu que tu as reçu quand je t’ai imposé les mains » (2Tm 1,6).
Il s’agit d’une nécessité intrinsèque au don divin lui-même[395] qui doit être continuellement “vivifié” pour que le prêtre puisse répondre fidèlement à sa vocation. Le prêtre est en effet un homme situé dans une histoire : il a donc besoin de parfaire tous les aspects de son existence humaine et spirituelle pour pouvoir atteindre cette configuration au Christ, principe unificateur universel.
Des transformations considérables et rapides ainsi qu’un tissu social souvent sécularisé sont caractéristiques du monde contemporain : voilà des facteurs qui rendent indispensable le devoir pour le prêtre d’une préparation adéquate pour ne pas diluer sa propre identité et pour répondre aux nécessités de la nouvelle évangélisation. À ce grave devoir, répond en plus un droit des fidèles à des prêtres saints et bien formés.[396]
88 La vie spirituelle du prêtre et son ministère pastoral doivent être unis à un travail continu sur lui-même, – en correspondance avec l’oeuvre de sanctification de l’Esprit Saint –, qui lui permet d’approfondir et de faire une synthèse harmonieuse de sa formation spirituelle et humaine, intellectuelle et pastorale. Ce travail qui doit commencer dès le séminaire, doit être encouragé par les évêques à tous les niveaux : national, régional, et surtout diocésain.
Il est fort encourageant de considérer le nombre déjà élevé de diocèses et conférences épiscopales engagés dans des initiatives prometteuses pour réaliser une véritable formation permanente de leurs prêtres. Il faut souhaiter que tous les diocèses comprennent et répondent à cette nécessité. Cependant, là où ce serait momentanément impossible, on conseillera des accords entre diocèses ou la prise de contact avec les institutions ou des personnes plus particulièrement préparées à remplir une tâche si délicate.[397]
89 Pour le prêtre, la formation permanente est un moyen indispensable pour atteindre la finalité de sa vocation, à savoir le service de Dieu et de son Peuple.
En pratique, la formation permanente consiste à aider tous les prêtres à répondre généreusement à l’engagement que requièrent la dignité et la responsabilité que Dieu leur a confiées par le sacrement de l’Ordre, à conserver, défendre et développer leur identité et leur vocation spécifique, à se sanctifier et à sanctifier les autres dans l’exercice de leur ministère sacré.
Cela signifie que le prêtre doit éviter tout dualisme entre spiritualité et ministère, dualisme qui est source de tant de crises.
Il est clair que pour atteindre cette finalité surnaturelle, il faut rechercher et analyser les critères généraux qui doivent structurer la formation permanente des prêtres.
De tels critères ou principes d’organisation sont indispensables pour atteindre la finalité proposée ou autrement dit, doivent trouver en elle leur raison d’être.
90 La formation permanente est un droit-devoir du prêtre et la donner est un droit-devoir de l’Église. Ceci est donc fixé par la loi universelle.[398] En effet, puisqu’on reçoit dans l’Église la vocation au ministère sacré, c’est à l’Église seule que revient la formation spécifique à la responsabilité d’un tel ministère. La formation permanente par conséquent, comme elle est une activité liée à l’exercice du sacerdoce ministériel, appartient à la responsabilité du Pape et des évêques. L’Église a ainsi le droit et le devoir de continuer à former ses ministres, les aidant à progresser dans une réponse généreuse au don que Dieu leur a octroyé.
De son côté, le ministre reçoit aussi, comme une exigence du don qui accompagne l’ordination, le droit de recevoir l’aide nécessaire de l’Église pour réaliser saintement et efficacement son service.
91 L’activité de formation s’appuie sur une exigence dynamique, intrinsèque au charisme ministériel, qui est en lui-même permanent et irréversible. La formation ne peut donc jamais être considérée comme terminée, ni de la part de l’Église qui la donne, ni de la part du ministre qui la reçoit. Il est ainsi nécessaire qu’elle soit pensée et développée de telle manière que tous les prêtres puissent toujours la recevoir, tenant compte des possibilités et des caractéristiques d’âge, de condition de vie, et de charges pastorales.[399]
92 Cette formation doit embrasser et harmoniser toutes les dimensions de la formation sacerdotale : c’est-à-dire qu’elle doit tendre à aider le prêtre à développer une personnalité humaine mûrie dans un esprit de service aux autres, quelle que soit la charge qu’il a reçue ; à être intellectuellement formé tant dans les sciences théologiques en harmonie avec le Magistère de l’Église[400] que dans les sciences humaines dans la mesure où elles sont liées à son ministère, afin qu’il remplisse avec plus d’efficacité sa fonction de témoin de la foi ; à posséder une vie spirituelle solide, nourrie de l’intimité avec Jésus Christ et de l’amour pour l’Église ; à remplir son ministère pastoral avec zèle et dévouement.
En pratique une telle formation doit être complète : humaine, spirituelle, intellectuelle, pastorale, systématique et personnalisée.
93 La formation humaine est particulièrement importante car « sans une formation humaine adéquate, la formation sacerdotale tout entière serait privée de son fondement nécessaire » ;[401] elle constitue objectivement la plateforme sur laquelle il est possible de construire l’édifice de la formation intellectuelle, spirituelle et pastorale. Le prêtre ne doit pas oublier qu’il « est un homme choisi parmi les hommes […] pour être au service de l’homme en leur donnant la vie de Dieu ».[402] Par conséquent, comme un frère parmi ses frères, pour se sanctifier et pour réussir dans sa mission sacerdotale, il devra se présenter avec un bagage de vertus humaines qui le rend digne de l’estime d’autrui. Il faut rappeler que pour le prêtre « qui devra accompagner les autres le long du chemin de la vie et jusqu’aux portes de la mort, il est important qu’il ait lui-même mis en juste équilibre le coeur et l’intelligence, la raison et le sentiment, le corps et l’âme, et qu’il soit humainement “intègre” ».[403]
Avec le regard fixé sur le Christ, le prêtre devra particulièrement pratiquer la bonté du coeur, la patience, l’amabilité, la force d’âme, l’amour pour la justice, le sens de l’équilibre, la fidélité à la parole donnée, la cohérence avec les engagements librement assumés, etc.[404] La formation permanente dans ce domaine favorise la croissance dans les vertus humaines en aidant les pasteurs à vivre à chaque moment « l’unité de vie dans l’accomplissement de leur ministère »[405] et à unir la cordialité aux bonnes manières et à la capacité de se situer dans n’importe quel contexte.
Il existe un lien entre vie humaine et vie spirituelle qui dépend de l’unité de l’âme et du corps propre à la nature humaine : là où subsistent de graves carences humaines, la “structure” de la personnalité n’est jamais à l’abri “d’effondrements” imprévus.
Il est tout aussi important que le prêtre réfléchisse sur son comportement social, sur la correction et la bonne éducation – qui naissent également de la charité et de l’humilité – dans les diverses formes de relations humaines, sur la valeur de l’amitié, sur la distinction et la délicatesse de son comportement, etc.
Et enfin, dans la situation culturelle actuelle, cette formation doit être orientée également pour contribuer – en ayant recours, si besoin en était, aux sciences psychologiques[406] – à la maturation humaine. Bien qu’il soit difficile d’en préciser les contenus, celle-ci implique tout d’abord équilibre et harmonie dans l’intégration des tendances et des valeurs, stabilité psychologique et affective, prudence, objectivité dans les jugements, force dans la maîtrise de son caractère, sociabilité etc. On soutiendra de cette manière les prêtres, particulièrement les jeunes à progresser également en maturité humaine et affective. À cet égard, on les aidera avec délicatesse à vivre la chasteté avec modestie et pudeur, en les invitant à utiliser avec prudence la télévision et Internet.
La formation à l’utilisation d’Internet revêt une importance particulière ainsi que celle aux nouvelles technologies informatiques. La sobriété et la tempérance sont nécessaires pour éviter des obstacles à une vie d’intimité avec Dieu. Le monde de la toile offre de nombreuses potentialités pour l’évangélisation, mais si elles sont mal gérées elles peuvent causer de graves dommages aux âmes. Parfois, sous prétexte de gagner du temps ou de la nécessité d’être bien informé on risque d’alimenter une curiosité désordonnée qui constitue un obstacle au recueillement toujours nécessaire et propice à un engagement efficace.
En ce sens l’utilisation d’Internet constitue une opportunité précieuse pour annoncer l’évangile à de nombreuses personnes. Le prêtre devra évaluer avec prudence et pondération son usage de manière à ne pas y consacrer trop de temps au détriment, par exemple, de la prédication de la Parole de Dieu, la célébration des sacrements, la direction spirituelle etc., pour lesquels il est vraiment irremplaçable. Quoi qu’il en soit, en ayant recours à ces nouvelles technologies, il devra toujours faire preuve d’une charité particulière, du sens du surnaturel, de sobriété et de tempérance afin que tous se sentent attirés moins par la personne du prêtre que par celle de Jésus Christ, notre Seigneur.
94 Tenant compte de tout ce qui a déjà été exposé sur la vie spirituelle, on se limitera ici à présenter quelques moyens pratiques de formation.
Il serait avant tout nécessaire d’approfondir les aspects principaux de la vie sacerdotale en faisant référence en particulier à l’enseignement biblique, patristique théologique et hagiographique, dont le prêtre doit continuellement mettre à jour ses connaissances, non seulement grâce à la lecture de bons livres, mais aussi en participant à des sessions d’étude, des congrès, etc.[407]
Des sessions particulières pourraient être dédiées au soin porté à la célébration des sacrements, tout comme à l’étude de certaines questions de spiritualité, comme les vertus chrétiennes et humaines, la manière de prier, le rapport entre la vie spirituelle et le ministère liturgique et pastoral, etc.
Plus concrètement, il est souhaitable que le prêtre, éventuellement en même temps que ses exercices spirituels périodiques élabore, en accord avec son directeur spirituel, un projet concret de vie, dont les principaux éléments sont : 1. Méditation quotidienne de la Parole ou d’un mystère de la foi ; 2. Rencontre personnelle avec Jésus dans l’Eucharistie, en plus d’une pieuse célébration de la Messe et la confession fréquente ; 3. Dévotion mariale (chapelet, consécration ou dialogue intime avec Marie en demandant sa protection) ; 4. Temps consacré à la formation doctrinale et hagiographique ; 5. Repos nécessaire ; 6. Effort renouvelé pour mettre en pratique les indications de l’évêque et pour assurer une adhésion personnelle convaincue au magistère et à la discipline ecclésiastique ; 7. Attention portée à la communion et à l’amitié fraternelle sacerdotale. D’autres aspects, comme celui de la gestion de son temps et de ses biens personnels, du travail et de l’importance de travailler ensemble avec les autres seront également pris en compte.
95 Vu l’énorme influence que les courants de la philosophie et des sciences humaines exercent sur la culture moderne et sachant que les prêtres n’ont pas toujours reçu une formation adéquate dans ces disciplines, en raison notamment de la diversité de leur formation scolaire, il est nécessaire que ces rencontres traitent des thèmes les plus importants de la philosophie et des sciences humaines ou de thèmes qui plus généralement « ont un lien avec les sciences sacrées, particulièrement dans la mesure où ils peuvent être utiles dans l’exercice du ministère pastoral ».[408]
Ces matières constituent une aide importante pour traiter correctement les principales thématiques de la Sainte Écriture, de la théologie fondamentale, dogmatique et morale, de la liturgie, du droit canonique, de l’oecuménisme etc. Leur enseignement ne doit pas se limiter à susciter des interrogations ou des problèmes ni être purement théorique ou informatif, mais au contraire, il doit encourager à une formation authentique, c’est-à-dire à la prière, à la communion et à l’action pastorale. En outre, consacrer du temps – si possible, chaque jour – à l’étude de manuels ou d’essais philosophiques, théologiques ou encore de droit canonique contribuera à approfondir ce sentire cum Ecclesia ; le Catéchisme de l’Église Catholique et son Compendium s’avéreront un instrument de base utile en la matière.
On fera en sorte que, durant ces rencontres sacerdotales, les documents du Magistère soient approfondis communautairement sous la direction d’une personne qui fasse autorité, pour favoriser cette unité d’interprétation et de praxis dans la pastorale diocésaine si bénéfique à l’évangélisation.
Dans la formation intellectuelle, on doit accorder une importance particulière aux thèmes les plus importants pour le débat culturel et la pratique pastorale comme, par exemple, ceux qui concernent l’éthique sociale et la bioéthique.
On devra s’arrêter spécialement sur les problèmes posés par le progrès scientifique et qui influencent si profondément la mentalité et la vie de nos contemporains. Le prêtre doit veiller à rester adéquatement informé pour donner raison de son espérance (cf. 1P 3,15) en répondant aux questions de ses fidèles. Il est tenu de s’informer des progrès scientifiques en ayant soin de consulter des experts compétents et de doctrine sûre. Lorsqu’il présente la Parole de Dieu, le prêtre doit tenir compte de l’évolution, de la croissance et de la formation intellectuelle de ses interlocuteurs et savoir s’adapter à leur niveau. Il doit également tenir compte de l’origine et de la provenance des divers groupes.
Étudier, approfondir et diffuser la doctrine sociale de l’Église est de la plus haute importance. Dans le sillage du Magistère, la sollicitude de tous les prêtres pour les pauvres et, par leur intermédiaire, celle de tous les fidèles ne doit pas demeurer un pieux désir, mais se transformer en un engagement vital concret. « Plus que jamais, l’Église sait que son message social sera rendu crédible par le témoignage des oeuvres plus encore que par sa cohérence et sa logique interne ».[409]
La connaissance et l’utilisation prudente des moyens de communication sociale dans l’activité ministérielle est une exigence indispensable pour la formation intellectuelle des prêtres. Ces moyens, quand ils sont bien utilisés, constituent un instrument providentiel d’évangélisation, puisque non seulement ils peuvent atteindre un très grand nombre de fidèles et de personnes éloignées de l’Église, mais aussi toucher profondément leur mentalité et leur mode de vie.
À cet égard, il serait opportun que l’évêque ou la conférence épiscopale prépare des programmes et des instruments techniques conçus dans ce but. Le prêtre doit en même temps éviter tout protagonisme pour ne pas faire briller sa propre personne aux regards des hommes et des femmes de son temps mais bien celle du Seigneur Jésus.
96 Pour une formation pastorale adéquate, il est nécessaire d’organiser des rencontres ayant comme objectif principal de réfléchir sur le plan pastoral du diocèse. Il faudrait aussi y traiter toutes les questions touchant la vie et la pratique pastorale des prêtres comme la morale fondamentale, l’éthique dans la vie professionnelle et sociale, etc. L’organisation d’ateliers ou de séminaires sur la pastorale du sacrement de la confession ou sur des questions pratiques en matière de direction spirituelle, tant en général que dans des situations particulières, peut s’avérer particulièrement intéressante.[410] La formation pratique en matière de liturgie est tout aussi importante. Il convient d’accorder une attention spéciale à bien apprendre à célébrer la Sainte Messe. Comme cela a déjà été dit, l’ars celebrandi est une condition sine qua non pour une actuosa partecipatio des fidèles et pour l’adoration eucharistique en dehors de la messe.
Il existe d’autres thèmes particulièrement utiles : la catéchèse, la famille, les vocations sacerdotales et religieuses, la connaissance de la vie et de la spiritualité des saints, les jeunes, les personnes âgées, les malades, l’oecuménisme, ceux qui se sont “éloignés” de l’Église, les questions de bioéthique, etc.
Dans les circonstances actuelles, il est très important pour la pastorale d’organiser des cycles spéciaux d’assimilation et d’approfondissement du Catéchisme de l’Église Catholique qui, surtout pour les prêtres, constitue un précieux instrument de formation aussi bien pour la prédication que, de manière générale, pour l’évangélisation.
97 Pour que la formation permanente soit complète, elle doit être structurée de manière à ne pas être « quelque chose de ponctuel, mais plutôt un projet bien élaboré qui se déroule par étape selon des modalités précises ».[411] Ceci implique nécessairement la création d’une structure qui détermine avec opportunité les instruments, les délais et les contenus de sa réalisation concrète. Il est utile en ce sens, de revenir tout au long de la vie du prêtre sur certains thèmes comme : la connaissance intégrale des Écritures, des Pères de l’Église et des principaux Conciles ; les contenus de la foi dans son ensemble ; les principales questions de théologie morale et de la doctrine sociale de l’Église ; celles de la théologie oecuménique et des orientations fondamentales sur les grandes religions en lien avec les dialogues oecuménique, interreligieux et interculturel ; celles de la philosophie et du droit canonique.[412]
Cette organisation doit être conjuguée avec l’habitude de l’étude personnelle, puisque des sessions périodiques auraient une faible utilité si elles ne s’accompagnaient pas de l’assiduité à l’étude.[413]
98 Bien qu’elle soit donnée à tous, la formation permanente a comme objectif direct le service de chacun de ceux qui la reçoivent. Aussi, en plus des propositions de formation pour des groupes ou des communautés, tous les moyens doivent être mis en oeuvre pour personnaliser la formation de chacun.
Pour cette raison, il faut susciter, surtout chez les responsables, la conviction qu’ils doivent rejoindre chaque prêtre personnellement, en s’occupant de chacun d’entre eux sans se contenter de proposer indistinctement à tous les diverses initiatives de formation.
De son côté, tout prêtre doit se sentir encouragé, par la parole et par l’exemple de son évêque et de ses frères dans le sacerdoce, à assumer la responsabilité de sa propre formation, sachant qu’il est lui-même son premier formateur.[414]
99 L’itinéraire des rencontres sacerdotales sera homogène et progressif dans ses étapes.
Tout ce processus doit converger vers la configuration au Christ, afin que les vérités de la foi, la vie spirituelle et l’activité ministérielle contribuent à la maturation progressive de tout le presbyterium.
L’unité dans la formation est marquée par des étapes bien définies. Ceci exigera d’une part une attention spécifique à chaque tranche d’âge de prêtres, sans en oublier aucune, et d’autre part, un contrôle des étapes franchies sans oublier de concilier la formation communautaire avec la formation personnelle.
On doit comprendre que les rencontres de prêtres sont nécessaires à la croissance dans la communion parce qu’elles permettent une meilleure prise de conscience et une considération plus attentive des problèmes de chaque tranche d’âge.
Quant aux contenus de telles réunions, on peut faire référence aux thèmes éventuellement proposés par les conférences épiscopales nationales et régionales. Dans tous les cas, il est nécessaire que ces contenus soient établis dans le cadre d’un plan de formation précis du diocèse, si possible mis à jour chaque année.[415]
L’organisation et le déroulement de ces rencontres peuvent être prudemment confiés par l’évêque à des Facultés ou Instituts de théologie et pastorale, au Séminaire, à des organismes ou fédérations oeuvrant pour la formation sacerdotale,[416] ou à tout autre Centre ou Institut spécialisé, diocésain, régional ou national, selon les possibilités et les opportunités après avoir vérifié leur orthodoxie doctrinale, leur fidélité au magistère et à la discipline ecclésiastique, tout comme leur compétence scientifique et leur connaissance des situations pastorales réelles.
100 Il revient à l’évêque, qui pourra se faire aider de collaborateurs soigneusement choisis, de veiller à ce que, dans l’année qui suit l’ordination sacerdotale ou diaconale, une année “pastorale” soit organisée : pour faciliter le passage de la période indispensable du séminaire à l’exercice du ministère sacré, en procédant par étapes pour favoriser une maturation humaine et spécifiquement sacerdotale progressive et harmonieuse.[417]
Pendant cette année, il faudra éviter que les nouveaux ordonnés soient plongés dans des situations trop difficiles ou trop délicates. On devra par ailleurs éviter les postes où ils devraient agir loin de leurs confrères. Il faudra même, dans la mesure du possible, favoriser des formes adéquates de vie commune.
Cette période de formation pourrait se dérouler dans une résidence destinée à cet effet (maison du clergé) ou dans un lieu qui constitue un point de référence concret et serein pour les prêtres qui en sont à leurs premières expériences pastorales. Ceci facilitera les entretiens et discussions avec l’évêque et avec les confrères, la prière commune, en particulier la Liturgie des Heures, ainsi que l’exercice d’autres pratiques de piété fructueuses telles que l’adoration eucharistique, le chapelet, etc., l’échange d’expériences, l’encouragement réciproque, la naissance de bons et sains rapports d’amitié.
Il serait opportun que l’Évêque confie les nouveaux prêtres à des confrères à la vie exemplaire et au zèle pastoral certain. La première nomination, malgré des urgences pastorales souvent lourdes, devrait surtout répondre à l’exigence d’orienter correctement les jeunes prêtres. Le sacrifice d’une année porterait alors des fruits abondants pour l’avenir.
Il n’est pas inutile de souligner que cette année si importante et si délicate devra favoriser la pleine maturation de la connaissance entre le prêtre et son évêque qui, commencée au séminaire, doit devenir un véritable rapport de fils à père.
Quant à l’aspect intellectuel, cette année ne devra pas tant être une période d’apprentissage de nouvelles matières que d’assimilation profonde et d’intériorisation de tout ce qui a été étudié dans les cours institutionnels, pour favoriser la formation d’une mentalité capable de pondérer les événements à la lumière du dessein de Dieu.[418]
Dans un tel contexte, on pourra organiser opportunément des leçons et des séminaires sur la pratique de la confession, la liturgie et la catéchèse, la prédication, le droit canon, la spiritualité sacerdotale, laïque et religieuse, la doctrine sociale, la communication et les médias, la connaissance des sectes et des nouvelles formes de religiosité, etc.
En pratique, cette année pastorale doit être une année de synthèse. Tous les éléments doivent répondre au projet fondamental de maturation de la vie spirituelle.
La réussite de l’année pastorale est de toute manière toujours subordonnée à l’engagement personnel de l’intéressé, qui doit tendre tous les jours à la sainteté, dans la recherche continuelle des moyens de sanctification qui l’ont aidé depuis le séminaire. En outre, lorsqu’il existe des difficultés pratiques dans certains diocèses – carence de prêtres, un énorme travail pastoral etc. – pour organiser une année avec les caractéristiques susmentionnées, l’évêque doit étudier comment adapter à la situation concrète les diverses propositions de l’année pastorale en tenant compte que celle-ci est de grande importance pour la formation et la persévérance des jeunes prêtres dans le ministère.
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