Discours 2003 - Lundi 16 juin 2003
Chers Frères dans l'épiscopat,
1. Je vous accueille avec une grande joie, vous qui avez la charge pastorale de l'église catholique au Burkina Faso et au Niger, au moment où vous accomplissez ce temps fort de votre ministère épiscopal qu'est la visite ad limina. Vous êtes venus vous recueillir sur le tombeau des Apôtres Pierre et Paul pour faire croître en vous l'élan apostolique qui les animait et qui les a conduits ici pour être les témoins de l'évangile du Christ jusqu’au don total de leur vie. Vous venez rencontrer le Successeur de Pierre et ses collaborateurs, pour trouver auprès d'eux le soutien nécessaire à votre mission pastorale.
Je remercie Monseigneur Philippe Ouédraogo, évêque de Ouahigouya et Président de votre Conférence épiscopale, pour les aimables paroles qu’il vient de m’adresser. Je salue particulièrement ceux d’entre vous qui ont reçu leur charge de l’épiscopat depuis la dernière visite ad limina. Mon affection rejoint également vos communautés diocésaines, dont je connais la générosité et le dynamisme évangélique. Je demande à l’Esprit Saint, répandu sur les Apôtres, de vous donner d’avancer au large et d’être votre appui dans le service du peuple qui vous a été confié, pour que l’église-Famille au Burkina Faso et au Niger devienne toujours davantage le ferment du monde nouveau que le Christ est venu instaurer pour toute l’humanité !
Portant le souci du développement durable et intégral des populations de vos pays, si chères à mon coeur, je n’oublie pas la lutte quotidienne qu’elles ont à mener pour survivre. Les conditions climatiques difficiles de la zone sahélienne et la désertification croissante de la région maintiennent les populations dans une pauvreté endémique qui engendre la précarité et le désespoir, leur donnant de plus le sentiment de se sentir mises à l’écart de la scène internationale. Je veux lancer solennellement un nouvel appel à la Communauté internationale, afin qu’elle manifeste concrètement et durablement son soutien aux populations éprouvées du Sahel, souhaitant que la solidarité, dans la justice et la charité, ne connaisse ni frontières ni limites et que la générosité permette de prévoir l’avenir avec plus de sérénité.
2. Malgré les difficultés liées à la précarité de la vie des populations locales, la vitalité missionnaire de vos églises diocésaines a pu s’exprimer de multiples manières. Je rends grâce avec vous pour les célébrations qui ont marqué le centenaire de l’évangélisation du Burkina Faso. En cette heureuse occasion, vous avez pu faire l’expérience de la présence de l’Esprit à l’oeuvre dans le coeur des croyants depuis les débuts de l’évangélisation. Je sais avec quel zèle vous avez associé les communautés locales, notamment par des synodes diocésains, à la préparation et à la célébration de ce temps fort ecclésial, qui coïncidait avec l’événement de portée universelle que fut le grand Jubilé de l’Incarnation. Les orientations pastorales du premier synode national du Burkina Faso ont aussi clairement convié les communautés chrétiennes à ne pas ménager leurs efforts pour édifier l’église-Famille de Dieu, appelée à cheminer vers la sainteté, afin de «permettre à l’annonce du Christ d’atteindre les personnes, de modeler les communautés, d’agir en profondeur par le témoignage des valeurs évangéliques sur la société et sur la culture» (Novo millennio ineunte NM 29). En rendant grâce avec vous pour le travail patient et audacieux des premiers missionnaires, aidés par de valeureux catéchistes, j’encourage les Pasteurs et les fidèles à s’en montrer les dignes successeurs, faisant naître et vivre des communautés chrétiennes toujours plus joyeuses et plus appelantes, signes de communion et de fraternité. Que partout où se trouvent les disciples du Christ soient rendus visibles les signes de l’amour de Dieu pour les hommes!
3. évangéliser est une mission essentielle de l’église. L’annonce de l’évangile ne peut se réaliser pleinement sans la contribution de tous les croyants, à tous les niveaux de l’église particulière. Vos rapports quinquennaux évoquent à plusieurs reprises votre souci pastoral de rendre les chrétiens, au nom de leur baptême, toujours plus acteurs dans l’oeuvre de l’évangélisation. En effet, «l’action évangélisatrice de la communauté chrétienne, d’abord sur son territoire et ensuite ailleurs comme participation à la mission universelle, est le signe le plus clair de la maturité de la foi» (Redemptoris missio RMi 49). Développer cette conscience missionnaire dans le coeur de chaque croyant demeure un vrai défi dont vous prenez bien la mesure.
Pour que l’église puisse incarner l’évangile dans les diverses cultures, en assumant ce qu’il y a de bon dans ces cultures et en les renouvelant de l’intérieur, j’ai rappelé, dans l’exhortation apostolique Ecclesia in Africa, que l’inculturation était une priorité et une urgence dans la vie des églises particulières, un cheminement vers une pleine évangélisation, afin que tout homme «puisse accueillir Jésus Christ dans l’intégralité de son être personnel, culturel, économique et politique, en vue de sa pleine et totale union à Dieu le Père, et d’une vie sainte sous l’action de l’Esprit Saint» (). La pastorale de l’inculturation que vous avez mise en oeuvre dans vos diocèses porte du fruit, en particulier dans la vie et le témoignage des communautés chrétiennes de base, ferments de vie chrétienne et signes concrets de la communion missionnaire que l’église-Famille est appelée à devenir.
Dans vos rapports quinquennaux, vous rendez grâce pour la vitalité et pour le témoignage de ces petites communautés locales. Vous mesurez cependant le long chemin qu’il reste à faire pour que l’évangile transforme de l’intérieur l’esprit et le coeur des croyants, afin qu’ils se reconnaissent comme frères et soeurs dans le Christ. Le retour à des pratiques anciennes qui ne sont pas encore purifiées par l’Esprit du Christ, les difficultés à se considérer membres d’une même famille sauvée par le sang du Christ, et les dangers d’une civilisation moderne dite de progrès qui fragilisent les liens dans les familles et entre les groupes humains: tout cela est pour vous une invitation à ne pas relâcher vos efforts pour que les disciples du Christ assimilent pleinement le message évangélique et conforment leur vie à ce message, sans pour autant renoncer aux valeurs africaines authentiques.
Les chrétiens ont besoin de trouver des forces neuves pour surmonter les obstacles à l’annonce de l’évangile et pour travailler efficacement à son inculturation: il est essentiel que leur foi soit toujours plus solidement fondée et éduquée. Vous avez une vive conscience que cette responsabilité vous incombe, portant ensemble ce souci à l’intérieur de la Conférence épiscopale, par un partage d’expériences et par un approfondissement théologique et pastoral. Il s’agit de permettre aux pasteurs et aux fidèles de se laisser saisir par le Christ, d’accepter de dépendre radicalement de lui, de vouloir vivre de sa vie et d’apprendre à faire sa volonté, pour cheminer à sa suite dans la sainteté véritable (cf. 1 Th 4,3). Je vous encourage donc à aider sans relâche les fidèles laïcs de vos diocèses à prendre une conscience toujours plus vive de leur rôle dans l’église et à honorer ainsi leur mission de baptisés et de confirmés. La pastorale sacramentelle, la liturgie, la formation biblique et théologique, mais aussi les diverses expressions artistiques et musicales, ainsi que les médias, doivent permettre aux chrétiens de découvrir les richesses de la foi chrétienne avec les moyens à leur portée et de s’enraciner dans le Christ pour prendre une part toujours plus active à la vie des communautés locales, sans pour autant les soustraire à l’exercice de leur vocation baptismale dans la vie sociale, économique et politique de la nation.
4. Dans l’exhortation apostolique Ecclesia in Africa, j’ai souligné qu’en tant «qu’église domestique», «construite sur les bases culturelles solides et les riches valeurs de la tradition familiale africaine, la famille chrétienne est appelée à être une cellule puissante de témoignage chrétien, dans la société marquée par des mutations rapides et profondes» (). Vos rapports quinquennaux évoquent le témoignage donné par de nombreuses familles, qui vivent de manière héroïque la fidélité au sacrement du mariage chrétien, dans le contexte d’une législation civile ou de coutumes traditionnelles peu favorables au mariage monogame. Alors que des menaces pèsent aujourd’hui sur la famille africaine et sur ses fondements, je vous exhorte à promouvoir la dignité du mariage chrétien, reflet de l’amour du Christ pour son église, en rappelant notamment que l’amour mutuel des époux est unique et indissoluble, que le mariage, grâce à sa stabilité, contribue à la pleine réalisation de leur vocation humaine et chrétienne, et qu’une telle famille est le lieu d’épanouissement des enfants et de transmission des valeurs. Les communautés chrétiennes, unies à leurs pasteurs, auront aussi à coeur d’accompagner les familles dans l’éducation des jeunes. De même, elles auront soin d’aider les fiancés dans leur cheminement vers le sacrement du mariage, puis plus tard dans leur vie conjugale et familiale, pour qu’ils puissent se mettre eux-mêmes au service de l’église et de la société.
5. Je vous charge de porter les salutations affectueuses du Pape aux prêtres de vos diocèses. Je connais les conditions difficiles dans lesquelles ils sont souvent appelés à exercer leur ministère. L’éloignement des paroisses, les infrastructures routières peu développées et le petit nombre d’ouvriers apostoliques rendent souvent difficiles le suivi et la formation des communautés chrétiennes. Je les remercie de leur générosité à servir le Christ et son église, et je sais à quel point vous veillez, avec les moyens dont vous disposez, à leur procurer tout ce qui est nécessaire à leur santé spirituelle et à leurs besoins matériels. En communion profonde avec leurs évêques, qu’ils mènent une vie toujours plus digne et plus sainte, conforme à leur vocation et au témoignage qu’ils ont à donner d’être des hommes de Dieu mis à part pour le service de l’évangile ! Disposés à se conformer au Christ Serviteur, ils pourront devenir des modèles pour le peuple qui leur est confié, en particulier pour les plus jeunes, qu’ils inviteront à suivre joyeusement et radicalement le Christ comme prêtres ou comme consacrés. Je rends grâce à cette occasion pour le développement de la vie religieuse dans vos pays, et je vous encourage à soutenir et à promouvoir ce développement, rappelant que, sans le signe concret de la vie consacrée, «la charité de l’ensemble de l’église risquerait de se refroidir, le paradoxe salvifique de l’évangile de s’émousser, le "sel" de la foi de se diluer dans un monde en voie de sécularisation» (Vita consecrata VC 105).
à l’image de vos prédécesseurs dans la foi, je vous encourage également à manifester avec toujours plus de générosité, comme vous le faites déjà, la solidarité de vos églises locales avec les pays voisins, qui manquent souvent de pasteurs, en leur destinant des prêtres et des laïcs missionnaires, rappelant que «tous les évêques, en qualité de membres du corps épiscopal qui succède au collège des Apôtres, ont été consacrés non seulement pour un diocèse déterminé, mais pour le salut du monde entier» (Concile Vatican II, Décret sur l’activité missionnaire de l’église Ad gentes AGD 38). Je souhaite que l’esprit de communion ainsi créé, par lequel chaque église porte la sollicitude de toutes les autres, donne un nouvel élan missionnaire à vos communautés diocésaines et les entretienne dans le désir audacieux de faire germer le Règne de Dieu.
6. La formation des candidats au sacerdoce est une grave responsabilité pour l'évêque. Certains parmi vous en ont fait une priorité pastorale. Il est essentiel de porter une attention particulière à l’organisation de cette formation et de veiller à choisir avec soin des formateurs idoines. Il est nécessaire aussi de sensibiliser et d’associer les communautés diocésaines à leur responsabilité dans la formation des futurs prêtres. «L’église, comme telle, est le sujet communautaire qui a la grâce et la responsabilité d’accompagner ceux que le Seigneur appelle à devenir ses ministres dans le sacerdoce» (Pastores dabo vobis PDV 65). De plus, une sérieuse formation spirituelle, intellectuelle et pastorale, indispensable à l'exercice du ministère presbytéral, devra être associée à une solide formation humaine et culturelle. Il sera particulièrement important d'insister sur la maturation affective des candidats, nécessaire à celui qui est appelé au célibat; cela consiste «à offrir, avec la grâce de l'Esprit et par la libre réponse de sa volonté propre, la totalité de son amour et de sa sollicitude à Jésus Christ et à l'église» (ibid., PDV PDV 44).
7. Dans vos pays, les communautés chrétiennes vivent au sein de sociétés marquées par la prédominance de l’Islam et des valeurs qui lui sont propres. Je me réjouis que, comme vous me l’avez dit, les relations des catholiques avec les croyants de l’Islam soient généralement empreintes de respect, d’estime et de convivialité. Chrétiens et musulmans sont en effet «appelés à promouvoir un dialogue exempt de tous les dangers qu’entraînent un irénisme de mauvais aloi ou un fondamentalisme militant, et à s’élever contre des politiques et des pratiques déloyales, ainsi que contre tout manque de réciprocité en matière de liberté religieuse» (Ecclesia in Africa ). Je vous encourage à cultiver ce dialogue, en vous dotant de structures et de moyens qui le garantissent, afin que soit bannie la peur de l’autre, qui naît souvent de la méconnaissance profonde des valeurs religieuses qui l’animent, sans jamais renoncer à rendre compte en toute clarté de l’espérance qui est en vous. Que, dans le patrimoine authentique de leurs traditions religieuses, chrétiens et musulmans puisent les forces nécessaires pour collaborer au développement solidaire de leur pays !
8. Chers Frères dans l’épiscopat, alors que vous allez retourner chez vous, je vous demande de porter aux prêtres, aux diacres, aux religieux, aux religieuses, aux catéchistes et aux laïcs de vos communautés le salut affectueux du Pape, qui recommande au Seigneur leur vie chrétienne et leur engagement apostolique. En effet, «la structure de la communauté apostolique repose sur les uns et les autres» (Constitutions apostoliques, III). Transmettez aussi à tous vos concitoyens mes souhaits cordiaux de paix et de prospérité. Face au scandale de la pauvreté et de l’injustice, je souhaite en particulier que l’église continue à jouer son rôle prophétique et à être la voix des sans-voix, afin que partout la dignité humaine soit reconnue à toute personne et que soient promues toutes les initiatives qui visent à développer et à ennoblir l’homme dans son existence spirituelle et matérielle (cf. Ecclesia in Africa ). Puisse l’Esprit de Pentecôte vous aider à grandir toujours plus dans l’espérance et guider l’église-Famille au Burkina Faso et au Niger vers «la vérité tout entière» (Jn 16,13), afin qu’elle maintienne vive la présence du Christ Sauveur au milieu de son peuple, à travers un ardent témoignage de vie évangélique ! Je confie à l'intercession de la Vierge Marie l'avenir de vos diocèses ainsi que celui des nations dans lesquelles vous vivez. Je lui demande particulièrement de vous aider dans votre ministère épiscopal. De grand coeur, je vous donne la Bénédiction apostolique, que j'étends à tous les fidèles de vos diocèses.
Illustres membres de la Présidence de la Bosnie et Herzégovine,
Vénérés frères dans l'épiscopat,
Eminentes Autorités,
Chers frères et soeurs!
1. C'est avec l'âme reconnaissante pour l'invitation qui m'a été faite que je reviens en Bosnie et Herzégovine et je rends grâce à Dieu de m'avoir permis de rencontrer à nouveau des populations qui sont depuis toujours si chères à mon coeur.
Je remercie Messieurs les Membres de la Présidence de Bosnie et Herzégovine des salutations cordiales qu'ils m'ont présentées et de tout ce qu'ils ont accompli, aux côtés des autres Autorités, pour rendre possible ma visite.
Je salue mon cher frère, Mgr Franjo Komarica, Evêque de Banja Luka, ainsi que les autres membres de cet épiscopat et tous les fidèles de l'Eglise catholique. Je salue également nos frères et soeurs de l'Eglise orthodoxe serbe et des autres communautés ecclésiales, ainsi que les fidèles de la religion juive et de l'islam.
2. Sachant que, grâce à la radio et la télévision, il m'est donné d'entrer dans vos maisons, je vous salue et vous embrasse tous, chers habitants des diverses régions de la Bosnie et Herzégovine. Je sais quelle longue épreuve vous avez traversée, le poids de souffrance qui accompagne quotidiennement votre vie, la tentation du découragement et de la résignation qui vous menace. Je prends place à vos côtés pour demander à la Communauté internationale, qui a déjà fait tant de choses, de continuer de vous soutenir pour vous permettre de parvenir rapidement à une situation de sécurité totale dans la justice et dans la concorde.
Soyez vous-mêmes les premiers artisans de votre avenir! La tenacité de votre caractère, les riches traditions humaines, culturelles et religieuses qui vous distinguent sont votre véritable richesse. Ne vous résignez pas! Certes, la reprise n'est pas chose facile.Elle exige des sacrifices et de la constance, elle exige l'art de semer et la patience d'attendre. Mais vous savez que la reprise est, quoi qu'il en soit, possible. Ayez confiance dans l'aide de Dieu et ayez également confiance dans l'esprit d'initiative de l'homme.
3. Pour que la société prenne un visage authentiquement humain et que tous puissent affronter l'avenir avec confiance, il est nécessaire de refaçonner l'homme de l'intérieur, en soignant les blessures et en opérant une authentique purification de la mémoire à travers le pardon réciproque. C'est au fond de notre coeur que se trouve la racine de tout bien et, malheureusement, de tout mal (cf. Mc 7,21-23). C'est là que doit avoir lieu le changement, grâce auquel il sera possible de renouveler le tissu social et d'instaurer des relations humaines ouvertes à la collaboration entre les forces vives du pays.
A ce propos, une lourde responsabilité revient à ceux qui, par la volonté des électeurs, exercent démocratiquement le gouvernement: qu'ils ne renoncent pas en raison des difficultés du moment à une oeuvre d'une telle importance, et qu'ils ne se laissent pas non plus manipuler par les intérêts partisans.
A cette entreprise commune, l'Eglise catholique entend apporter sa contribution à travers l'engagement concret de ses fils, en particulier à travers des initiatives dans les domaines de l'éducation, de l'assistance et de la promotion humaine qui lui sont propres, dans le libre exercice de sa mission spécifique.
4. Dans peu de temps, au cours de la célébration de la Messe, j'aurai la joie d'inscrire dans l'Album des bienheureux le jeune Ivan Merz, né précisément ici, à Banja Luka, exemple lumineux de vie chrétienne et d'engagement apostolique.
Qu'il veuille bien, par sa prière, soutenir le voeu du Pape pour la Bosnie et Herzégovine; puissent les problèmes existant trouver une heureuse solution, et puisse le pays voir accueillie positivement son aspiration à faire partie de l'Europe unie dans une atmosphère de prospérité, de liberté et de paix.
Avant de prendre congé, très chers frères et soeurs, je souhaite encore une fois vous dire à tous ma joie d'avoir pu partager avec vous cet intense moment de prière. Je remercie mes frères Evêques de Bosnie et Herzégovine et le Président de leur conférence, Mgr Franjo Komarica, Evêque de cette Eglise. Je remercie en même temps que lui les collaborateurs, ecclésiastiques et laïcs, qui, par un travail intense de plusieurs mois, ont organisé cette journée.
Je souhaite également renouveler mes vifs remerciements à la Présidence de Bosnie et Herzégovine et aux autres Autorités civiles et militaires. J'apprécie beaucoup ce qui a été fait, à tous les niveaux, afin que ma visite puisse avoir lieu.
J'adresse un dernier et cordial salut à toutes les populations de ce bien-aimé pays, sans distinction d'ethnie, de culture ou de religion. En recevant cet après-midi la visite de courtoisie des Présidents de la République serbe et de la Fédération de Bosnie et Herzégovine, puis des membres du Conseil interreligieux, j'aurais présents à l'esprit tous les habitants de ce pays.
J'invoque sur vous tous les abondantes Bénédictions du Très-Haut, auquel je demande de susciter dans le coeur de chacun des sentiments de pardon, de réconciliation, de fraternité. Telles sont les bases solides d'une société digne de l'homme et acceptée de Dieu.
Terre de Bosnie et Herzégovine, le Pape te porte dans son coeur et te souhaite des jours de prospérité et de paix!
Messieurs les Cardinaux,
Vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
très chers frères et soeurs!
1. Nous sommes aujourd'hui réunis en souvenir du serviteur de Dieu Paul VI, le jour de la fête de son protecteur céleste, saint Jean-Baptiste. Quarante ans se sont écoulés depuis son élection sur la chaire de Pierre, qui eut lieu le 21 juin 1963, et vingt-cinq ans depuis sa mort, qui se produisit à Castel Gandolfo en la solennité de la Transfiguration du Seigneur, le 6 août 1978.
Aujourd'hui, on inaugure et on bénit son buste en marbre, mis en place dans l'atrium de cette Salle qui porte son nom et qu'il désira comme chaire de la catéchèse du Pape. Je salue les cardinaux, les évêques, les prélats, les prêtres, les religieux, les religieuses et les laïcs ici réunis pour rendre hommage à la mémoire de mon vénéré prédécesseur.
Je salue et je remercie en particulier le sculpteur Floriano Bodini, qui a déjà consacré d'autres oeuvres à cet éminent serviteur de l'Eglise. Je salue et je remercie également ceux qui ont organisé et suivi la réalisation du projet, à commencer par le cher Mgr Pasquale Macchi, son Secrétaire dévoué et zélé. Mon salut s'étend ensuite aux proches du Pape Giovanni Battista Montini, parmi lesquels ses neveux et leurs familles respectives, ainsi qu'aux responsables de l'"Institut Paul VI" de Brescia digne d'éloges, qui cultive avec amour la mémoire de l'insigne fils de la terre de Brescia.
2. Le 29 juin 1978, lors de sa dernière célébration publique à l'occasion du XV anniversaire de son élection au Pontificat Suprême, il prononça un discours qui avait le ton solennel et pressant d'un testament. J'ai plaisir à en relire un passage significatif: "Jetons un regard d'ensemble - disait-il - sur ce qu'a été la période au cours de laquelle le Seigneur nous a confié son Eglise... Et bien que nous nous considérions comme le dernier et l'indigne Successeur de Pierre, nous nous sentons, en ce moment extrême, reconfortés et soutenus par la conscience d'avoir inlassablement répété devant l'Eglise et le monde: "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant!": nous aussi, comme Paul, nous pensons pouvoir dire: "J'ai mené le bon combat, j'ai terminé ma course, j'ai conservé la foi..."" (Insegnamenti di Paolo VI, XVI, 1978).
Prions le Seigneur afin qu'il accorde à son fidèle serviteur la récompense méritée. En outre, prions pour que nous aussi, comme lui, nous puissions oeuvrer inlassablement pour le Royaume de Dieu. Que Marie nous aide, Elle que Paul VI, au terme du Concile Vatican II, proclama "Mère de l'Eglise".
Avec ces sentiments, je vous bénis tous. Je remercie toutes les personnes présentes.
Chers frères évêques,
1. C'est avec joie que je vous accueille, évêques des provinces ecclésiastiques de Cuttack-Bhubaneswar, Patna et Ranchi. Vous êtes venus à Rome à l'occasion de votre visite ad limina: un moment privilégié dans votre vie de pasteurs, alors que vous vous approchez des tombes des Apôtres pour manifester et renforcer vos liens de communion avec le Successeur de Pierre. Je vous suis reconnaissant, Mgr Toppo, des paroles courtoises que vous m'avez adressées au nom de vos frères évêques. Votre présence ici aujourd'hui, me rapproche davantage encore de votre pays bien-aimé et du clergé, des religieux, des religieuses et des fidèles laïcs de vos diocèses. Au cours de mes rencontres avec les deux premiers groupes d'évêques de rite latin de votre pays, j'ai rappelé les succès et les défis que doivent affronter ceux qui proclament l'Evangile en Inde. En observant l'abondante moisson de grâce que vous avez continué à recueillir à la suite du grand Jubilé de l'An 2000, j'ai également noté les difficultés qui demeurent. Le Jubilé a offert à l'Eglise qui est en Inde, en communion avec l'Eglise universelle, une opportunité pour réfléchir sur le besoin de renouvellement de la vie chrétienne. Vous vous rappelez du passé avec gratitude; vous vivez le présent avec enthousiasme et vous envisagez l'avenir avec confiance (cf. Novo Millennio ineunte NM 1).
2. "Allez dans le monde entier, proclamez l'Evangile à toute la création" (Mc 16,15). Les paroles de congé que le Christ a adressées à ses disciples sont à la fois une invitation et un défi à aller prêcher la Bonne Nouvelle. Ainsi comprise, l'évangélisation est une tâche que tous les membres de l'Eglise partagent en vertu de leur Baptême. C'est pourquoi tous les baptisés doivent "porter témoignage du Christ sur toute la surface de la terre, et rendre raison, sur toute requête, de l'espérance qui est en eux d'une vie éternelle" (Lumen gentium LG 10). Il est donc déplorable qu'aujourd'hui encore, dans de nombreux lieux de l'Inde, existent des obstacles qui n'ont pas de raison d'être et qui empêchent toujours d'annoncer l'Evangile. Les citoyens d'une démocratie moderne ne devraient pas souffrir à cause de leurs convictions religieuses. Ils ne devraient pas non plus se sentir obligés de cacher leur foi pour pouvoir jouir des droits humains fondamentaux, tels que l'instruction et le travail.
Malgré ces difficultés, l'Eglise qui est en Inde prêche avec courage le message de salut de Jésus à la population du sous-continent. Chers évêques, je prie afin que vous continuiez à être des phares d'espérance et de courage, en inspirant le clergé, les religieux et les fidèles laïcs à prendre courage et à prêcher le Christ qui nous aime jusqu'à la mort, et à la mort sur la croix (cf. Ph Ph 2,8). Comme saint Paul nous le rappelle, la puissance extraordinaire de Dieu est également notre force, nous pouvons être "pressés de toute part, mais non pas écrasés; ne sachant qu'espérer, mais non désespérés; persécutés, mais non abandonnés; terrassés, mais non annihilés. Nous portons partout et toujours en notre corps les souffrances de mort de Jésus, pour que la vie de Jésus soit, elle aussi, manifestée dans notre corps" (2Co 4,7-10).
3. Les épreuves et les problèmes qui accompagnent une vie dans le Christ demandent à l'Eglise un engagement particulier en ce qui concerne le ministère de la "première évangélisation". Le contact initial avec le message salvifique du Christ de ceux qui n'ont pas encore entendu la Bonne Nouvelle exige de nous tous de transmettre la foi de manière intelligente et crédible. La mission d'éduquer les fidèles au respect et à la proclamation de l'Evangile revient aux parents, aux enseignants et aux catéchistes d'aujourd'hui. C'est pourquoi, une des tâches fondamentales de tout évêque est d'assurer la présence de laïcs formés de façon adaptée, préparés et prêts pour être des enseignants de la foi. Les catholiques doivent être encouragés à participer à l'apostolat fondamental de la parole qui "prend un caractère spécifique et une particulière efficacité du fait qu'elle s'accomplit dans les conditions communes du siècle" (Lumen gentium LG 35).
Jouer le rôle de catéchiste exige un rapport de confiance et de collaboration entre le clergé et les fidèles laïcs. Les évêques doivent donc constamment chercher à assurer que rien ne nuise à ce rapport. Ils doivent toujours reconnaître que "tous les fidèles ont le devoir et le droit de travailler à ce que le message divin du salut atteigne sans cesse davantage tous les hommes de tous les temps et de tout l'univers" (CIC 211). Dans le même temps, on ne doit jamais permettre à des points de vue personnels, fondés sur des affinités de caste ou de tribu, de voiler l'enseignement authentique de l'Eglise.
4. Le respect authentique et profond de la culture est intimement lié aux efforts de l'Eglise en faveur de l'évangélisation. La culture est l'espace vital "dans lequel la personne humaine se trouve face à face avec l'Evangile" (Ecclesia in Asia ). Toujours respectueuses des différentes cultures, l'Eglise cherche à interpeller les frères et soeurs des autres religions, dans le but de promouvoir "un rapport d'ouverture et de dialogue" (Novo Millennio ineunte NM 55). Considéré de ce point de vue, le dialogue interreligieux accroîtra non seulement la compréhension réciproque et le respect mutuel, mais il aidera également à développer une société en harmonie avec les droits et la dignité de tous.
L'Eglise qui est en Inde a sans cesse démontré son engagement à défendre le principe de la dignité inaliénable de la personne humaine à travers ses nombreuses institutions sociales, en offrant un amour sans condition aux chrétiens, ainsi qu'aux non-chrétiens. Ses écoles, les dispensaires, les hôpitaux et les instituts visant au développement intégral de la personne humaine offrent une assistance inestimable aux membres les plus pauvres de la société, quelle que soit leur religion. Malheureusement, certaines des tentatives honnêtes accomplies par l'Eglise pour développer un dialogue interreligieux au niveau le plus élémentaire, ont parfois été entravées par le manque de coopération de la part du gouvernement et par les problèmes créés par certains groupes fondamentalistes. L'Inde possède une longue tradition de respect des diversités religieuses. Je souhaite que, pour le bien de la nation, on ne permette pas le développement de tendances contraires (cf. Discours au nouvel Ambassadeur de l'Inde, 13 décembre 2002). En tant qu'évêques, votre devoir est d'assurer que le dialogue interreligieux se poursuivre. Toutefois, alors que vous vous engagez dans cet échange réciproque, vous ne devez jamais permettre qu'il soit conditionné par l'indifférence religieuse. Il est très important que l'appel du Christ à le suivre soit prêché et vécu avec conviction de la part de chaque chrétien.
5. Chers frères évêques, je suis certain que vous persévérerez dans vos efforts visant à garantir une solide formation théologique dans vos séminaires et une solide formation permanente pour vos prêtres, en repoussant ainsi la tentation de "réduire le christianisme à une sagesse purement humaine, en quelque sorte une science pour bien vivre" (Redemptoris missio RMi 11). Une préparation théologique adaptée exige une instruction qui, tout en respectant la part de vérité rencontrée dans les autres traditions religieuses, continue toutefois infailliblement à proclamer que Jésus est "le chemin, la vérité et la vie" (Jn 14,6 cf. Ecclesia in Asia ). Dans ce but, les instituts d'éducation catholiques doivent offrir une solide formation philosophique, nécessaire à l'étude de la théologie. La vérité transcende les limites de la pensée, qu'elle soit orientale ou occidentale, et unit toutes les cultures et les sociétés (cf. Fides et ratio FR 76-77). En tant que participants à la mission prophétique du Christ, nous avons la responsabilité solennelle de rapprocher toujours davantage cette vérité de nous-mêmes et des autres. Ce saint devoir revient en particulier à ceux à qui est confiée la formation des prêtres et des religieux. Les éducateurs et les professeurs sont obligés d'enseigner le message du Christ dans son ensemble comme l'unique voie, et non comme une voie parmi tant d'autres. En agissant ainsi, "les théologiens, en tant que serviteurs de la vérité divine, consacrent leurs études et leurs travaux à une compréhension toujours plus profonde de celle-ci, et ne peuvent jamais perdre de vue la signification de leur service dans l'Eglise" (cf. Redemptoris missio RMi 19).
6. En considérant les nombreuses responsabilités que requiert votre sollicitude pour le Peuple de Dieu, je suis vivement conscient des épreuves que vous affrontez alors que vous cherchez à développer une vie ecclésiale adaptée dans vos diocèses. Il est décourageant de constater que le travail de l'Eglise est souvent compromis par un tribalisme persistant dans certaines parties de l'Inde. Parfois, le tribalisme a été tellement fort que certains groupes se sont même refusés de recevoir des évêques et des prêtres qui n'appartenaient pas à leur clan, compromettant ainsi le fonctionnement correct des structures ecclésiastiques et obscurcissant la nature fondamentale de la communion de l'Eglise. Les différences tribales ou ethniques ne doivent jamais être utilisées comme un motif pour repousser celui qui apporte la Parole de Dieu. Tous les chrétiens ont la responsabilité d'effectuer un examen de conscience pour être certains d'aimer toujours et partout tous les fils de Dieu, y compris ceux qui sont différents: "A ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples: si vous avez de l'amour les uns pour les autres" (Jn 13,35).
Je rends grâce à Dieu pour les nombreux prêtres et religieux qui vivent dans votre pays une vie exemplaire de pauvreté, de charité et de sainteté. Face aux nombreuses difficultés, ils pourraient être tentés de perdre le zèle et la créativité indispensables pour un ministère efficace. Je prie vivement afin que le Seigneur continue à les affermir dans leur travail. Dans ce but, j'invite toute l'Eglise qui est en Inde à renouveler son engagement missionnaire (cf. Redemptoris missio RMi 2).
Les hommes et les femmes consacrés apportent une contribution particulièrement précieuse à vos Eglises locales. Je souhaite que vous continuiez tous à collaborer étroitement. Dans les circonstances actuelles, il existe un besoin toujours plus grand de bonnes relations réciproques. Certains conflits difficiles et douloureux concernant la gestion d'instituts et la possession de propriétés sont apparus dans votre région. Toutefois, ces questions ne sont pas insurmontables pour ceux qui vivent l'Evangile dans un esprit d'amour fraternel et de service. La planification pastorale et les accords clairs entre les évêques et les supérieurs religieux peuvent souvent offrir une solution à cette sorte de problèmes. Je suis certain que "les personnes consacrées ne manqueront pas d'offrir généreusement leur collaboration à l'Eglise particulière selon leurs forces et dans le respect de leur charisme, oeuvrant en pleine communion avec l'évêque dans le domaine de l'évangélisation, de la catéchèse, de la vie des paroisses. (Vita consecrata VC 49).
7. Chers frères, je forme des voeux fervents afin que votre pèlerinage à Rome constitue une opportunité pour réfléchir à nouveau sur la grâce de l'Esprit Saint que vous avez reçue par l'imposition des mains. L'un des signes caractéristiques du service apostolique à l'Eglise est la proclamation courageuse de l'Evangile (cf. Ac 2, 28, 30-31). Je vous exprime mon soutien dans la prière, ainsi qu'à ceux qui, en Inde, à travers leur témoignage, continuent à proclamer le Christ hier, aujourd'hui et à jamais (cf. He He 13,8). En priant afin que cette rencontre renforce votre foi dans le Christ, source de notre zèle missionnaire et apostolique, je vous confie, ainsi que tous ceux que vous servez, à l'intercession pleine d'amour de Marie, Reine du Rosaire, et je vous donne avec affection ma Bénédiction apostolique.
Discours 2003 - Lundi 16 juin 2003