Premières Catéchèses S. J-Paul II 1978-79 18479

18 avril 1979 L'OCTAVE PASCALE EST LE JOUR DE L'EGLISE

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1. Haec dies quam fecit dominus.

Les jours compris entre le dimanche de Pâques et le deuxième dimanche après Pâques ne forment en quelque sorte qu'un jour unique. La liturgie porte sur un événement, sur l’unique Mystère. Il est ressuscité, il n'est pas ici (
Mc 16,6). Il a accompli la Pâque. Il a révélé la signification du passage. Il a confirmé la vérité de ses paroles. Il a prononcé le dernier mot de son message : la Bonne Nouvelle, le message de l'Évangile. Dieu lui-même qui est Père, qui donne la vie, Dieu lui-même qui ne veut pas la mort (Cf. Ez 18,23 Ez 18,32) et a tout créé pour que tout subsiste (Sg 1,14), a manifesté jusqu'au bout, en lui et par lui, son Amour. Amour veut dire vie.

La résurrection est le témoignage définitif de la vie, c'est-à-dire de l'Amour.

« Mors et vita duello conflixere mirando. Dux vitae mortuus regnat vivus ! »

« La mort et la vie se sont affrontées en un prodigieux duel. Le Seigneur de la vie était mort ; mais maintenant, vivant, il triomphe (Séquence) Voici le jour que fit le Seigneur (Ps 118,24) : Excelsior cunctis, lucidior universis, in quo dominus resurrexit, in quo sibi novam plebem... Regenerationis spiritu conquisivit, in quo singulorum mentes gaudio et exsultatione perfudit (Le plus sublime, le plus lumineux, le jour où le Seigneur est ressuscité, où il s'est acquis un nouveau peuple... par l'esprit de régénération, où il a rempli de joie et d'allégresse l'esprit de tous) (Saint Augustin, Sermo 168, dans Pascha X, 1 : P.L. 39,2070).

Ce jour unique correspond, en quelque sorte, aux sept jours dont parle le livre de la Genèse et qui étaient les jours de la création (Cf. Gn Gn 1,2). Par conséquent, nous les fêtons tous en ce jour unique. En ces jours, pendant l'Octave, nous célébrons le mystère de la nouvelle création. Ce mystère s'exprime en la personne du Christ ressuscité. Il est lui-même ce mystère et il constitue pour nous son annonce, l'invitation à ce mystère, le levain. En vertu de cette invitation et de ce levain nous devenons tous en Jésus-Christ la « créature nouvelle ».

« Célébrons donc la fête, non pas avec du vieux levain, mais avec des azymes de pureté et de vérité » (1 â 5, 8).

Après sa résurrection, le Christ revient à l'endroit d'où il était parti pour la Passion et la mort. Il revient au cénacle ou se trouvaient les Apôtres. Les portes étaient fermées, il vint, s'arrêta au milieu d'eux et dit : Paix à vous. Et il ajoute : Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie... Recevez l'Esprit-Saint ; ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis ; ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus (Jn 20,19-23).

Comme elles sont riches de sens ces paroles prononcées par Jésus après sa résurrection ! Elles renferment le message du ressuscité. Quand il dit : Recevez l'Esprit-Saint, nous pensons au cénacle où Jésus a prononcé son discours d'adieu. Alors, il proférait des paroles chargées du mystère de son coeur : Il vaut mieux pour vous que je parte ; car si ne pars pas, le Paraclet ne viendra pas à vous. Mais si je pars je vous l'enverrai (Jn 16,7). Il s'est exprimé ainsi en pensant à l'Esprit-Saint.  Et voici que, maintenant, après avoir accompli son sacrifice, il part par la croix. Il vient à nouveau au cénacle pour leur apporter celui qu'il a promis. L'Évangile dit : Il souffla sur eux et leur dit : Recevez l'Esprit-Saint (Jn 20,22).

Il prononce la parole-clé de sa Pâque. Il leur apporte le don de la passion et le fruit de la résurrection. Par ce don, ils les forme à nouveau. Il leur donne le pouvoir d'éveiller les autres à la vie, même quand cette vie est morte en eux : Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis (Jn 20,23). Cinquante jours séparent la résurrection de la Pentecôte. Mais déjà ce jour unique fait par le Seigneur (Cf. Ps Ps 118,24) renferme le don essentiel et le fruit de la Pentecôte. Lorsque le Christ dit : Recevez l'Esprit-Saint, il annonce jusqu'à la fin son mystère pascal.

« Hoc autem est mysticum et secretissimum, quod nemo novit, nisi qui accipit, nec accipit nisi qui desiderat, nec desiderat, nisi quem ignis spiritus sancti medullitus inflammat, quem christus misit in terram » (C'est là une réalité, mystérieuse et cachée, que ne connaît que celui qui la reçoit, que ne reçoit que celui qui la désire, qui ne désire que celui dont le coeur brûle de l'Esprit-Saint envoyé par le Christ sur la terre (Saint Bonaventure, Itinerarium mentis in Deum, chap. 7, 4 : Opera omnia, éd. min Quarachi, 5, P. 213).

3. Le concile Vatican II a éclairé à nouveau le mystère pascal dans le pèlerinage terrestre du peuple de Dieu. Il en a tiré l'image complète de l'Église qui est fondée, sur ce mystère de salut et qui y puise sa sève vitale. Le Fils de Dieu, dans, la nature humaine qu'il s'est unie, a racheté l'homme en triomphant de la mort par sa mort et sa résurrection, et il l'a transformé en une créature nouvelle (Cf. Ga 6,15 2Co 5,17). En effet, en communiquant son esprit à ses frères, qu'il rassemblait de toutes les nations, il a fait d'eux, mystiquement, comme son corps. Dans ce corps, la vie du Christ se répand à travers les croyants que les sacrements, d'une manière mystérieuse et réelle, unissent au Christ souffrant et glorifié (Cons. Dogm. Lumen Gentium, LG 7). L'Église vit sans cesse dans le mystère du Fils qui s'est accompli par la venue de l'Esprit à la Pentecôte.


L'Octave de Pâques est le jour de l'Église !

En vivant ce jour, il nous faut accepter, avec lui, les paroles qui, pour la première fois, résonnèrent au cénacle où apparut le ressuscité : Comme le Père m'a envoyé, moi aussi, je vous envoie (Jn 20,21). Accepter le Christ ressuscité, c'est accepter la mission comme l'ont acceptée ceux qui étaient réunis au cénacle : les apôtres. Croire dans le Christ ressuscité, c'est prendre part à la mission de salut qu'il a accomplie par le mystère pascal. La foi est conviction de l'intelligence et du coeur. Cette conviction acquiert son sens plénier quand elle engendre la participation à cette mission que le Christ a acceptée du Père.

Croire, c'est accepter, à notre tour, cette mission que nous confie le Christ. Parmi les apôtres, Thomas était absent lorsque le Christ ressuscité vint au cénacle la première fois. Et Thomas qui déclarait à haute voix à ses frères : Si je ne vois pas... je ne croirai pas (Jn 20,25), s'est convaincu quand le Christ est venu la seconde fois. Alors, nous le savons, toutes ses réserves ont disparu et il a professé sa foi par ces mots : Mon Seigneur et mon Dieu (Jn 20,28). Avec l'expérience du mystère pascal, il a reconfirmé sa participation à la mission du Christ.

Comme si, après huit jours, arrivaient également jusqu'à lui ces paroles du Christ : Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je t'envoie (Cf. Jn Jn 20,21). Thomas devint un grand témoin du Christ.

4. Le concile Vatican II enseigne la doctrine sur la mission de tout le peuple de Dieu qui a été appelé à participer à la mission même du Christ (Cf. Const dogm. Lumen Gentium, LG 10 LG 12).

C'est la triple mission. Le Christ-prêtre, prophète et roi, a exprimé jusqu'à la fin sa mission dans le mystère pascal, dans la résurrection.

Dans cette grande communauté qu'est l'Église, le peuple de Dieu, chacun participe à cette mission par le sacrement du baptême. Chacun de nous est appelé à la foi en la résurrection comme Thomas : Porte ton doigt ici : voici mes mains, avance ta main et mets-la dans mon coté et ne sois pas incrédule mais croyant (Jn 20,21).

Chacun de nous a le devoir de déterminer le sens de sa propre vie par la foi. Cette vie a des formes différentes et c'est nous qui la déterminons. Et la foi fait en sorte que la vie de chacun de nous est pénétrée quelque part par cette mission que Jésus-Christ, notre Rédempteur, a acceptée du Père et partagée avec nous. La foi fait en sorte qu'une partie du mystère pascal pénètre la vie de chacun de nous. C'est une sorte de rayonnement. Il faut que nous retrouvions ce rayon pour le vivre chaque jour, en ce temps qui commence à nouveau au jour qu'a fait le Seigneur.






25 avril 1979 LA DIMENSION HUMAINE ET CHRETIENNE DE ROME

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Nous venons de fêter la naissance de Rome. Chaque famille a son histoire. Chaque nation a son histoire. Ceux qui ont Rome comme cité ou comme capitale y sont plus sensibles ; mais ils ne peuvent limiter Rome à leur propre histoire actuelle. Il faut ici remonter jusqu'à la naissance de Rome.

Cette naissance constitue aussi un certain commencement pour les peuples lointains qui ont un lien particulier avec la tradition culturelle de Rome. Moi-même et toute la nation polonaise, et avec nous beaucoup de nations d'Europe, nous nous sentons concernés.


Dieu est entré dans l'histoire

La naissance de Rome a une éloquence toute particulière pour nous qui croyons que l'histoire de l'homme sur la terre — l'histoire de toute l'humanité — a atteint une nouvelle dimension à travers le mystère de l'Incarnation. En devenant homme, Dieu est entré dans l'histoire de l'homme. C'est là, la vérité centrale de la voie chrétienne, c'est là le contenu fondamental de l'Évangile et de la mission de l'Église. En entrant dans l'histoire de l'homme, en devenant homme, Dieu a fait de cette histoire, dans toute son extension, l'histoire du salut. Ce qui s'est accompli à Nazareth, à Bethléem et à Jérusalem, c'est de l'histoire et, en même temps, un ferment de l'histoire. Et bien que l'histoire des hommes et des peuples se soit déroulée et continue de se dérouler sur ses propres voies, bien que l'histoire de Rome — alors à l'apogée de son antique splendeur — n'ait pour ainsi dire pas prêté attention à la naissance, à la vie, à la passion, à la mort et à la résurrection de Jésus de Nazareth, ces événements salvifiques sont néanmoins devenus un levain nouveau dans l'histoire de l'homme. Ils le sont devenus d'une façon toute particulière dans l'histoire de Rome. On peut dire qu'au temps de la naissance du Christ, au temps de sa mort et de sa résurrection, la Rome antique, alors capitale du monde, a connu une nouvelle naissance. Ce n'est pas par pur hasard que nous la trouvons insérée si profondément dans le Nouveau Testament. Saint Luc présente son évangile comme la marche de Jésus vers Jérusalem, théâtre du mystère pascal et, dans les Actes des Apôtres, il présente Rome comme le but des voyages apostoliques, cette Rome où se manifestera le mystère de l'Église.



L'antique Rome connaît un nouvel essor...

Nous connaissons la suite. Pierre de Galilée et Paul de Tarse sont venus à Rome et y ont aussi implanté l'Église. Ainsi le siège des successeurs de Pierre, des évêques de Rome, a commencé son existence dans la capitale du monde antique. C’est aux Romains que, dès avant sa venue, saint Pierre écrivit une lettre magistrale, c'est aux Romains qu'à la veille de son martyre, Ignace, évêque d'Antioche, adressa son testament spirituel. Ce qui était chrétien a enfoncé ses racines dans ce qui était romain, et, après avoir puisé dans l'humus romain, a commencé à germer avec une force nouvelle. Avec le christianisme, ce qui était romain a commencé à vivre une vie nouvelle, sans pour autant cesser d'être authentiquement indigène.



... et une nouvelle universalité

Le père M.-C. d'Arcy, jésuite, écrit justement : Il y a dans l’histoire une présence, qui fait qu'elle est beaucoup plus qu'une suite d'événements. Comme dans un palimpseste, le nouveau texte se superpose sur l'ancien ineffaçable, et en élargit indéfiniment la signification (The sense of history secular and sacred, Londres, 1959, p. 275).

Rome doit au christianisme une nouvelle universalité de son histoire, de sa culture, de son patrimoine. Cette universalité chrétienne (« catholique ») de Rome dure encore. Elle n'a pas seulement derrière elle deux mille années d'histoire, mais elle continue incessamment à se développer : elle s'étend à de nouveaux peuples, à de nouvelles terres. Aussi bien, de toutes les parties du monde, des hommes, viennent-ils volontiers à Rome pour s'y retrouver comme chez eux, dans ce centre toujours vivant d'universalité.

Pour moi, je n'oublierai jamais les années, les mois et les jours que j'ai passés ici pour la première fois. C'est surtout au forum romain que j'aimais souvent aller, cet antique forum qui est si bien conservé. Qu'il était éloquent pour moi, en marge du forum, le sanctuaire de San Maria Antiqua, construit sur un ancien édifice romain.



Par la force du témoignage

Le christianisme est entré dans l'histoire de Rome, non par la violence ou la force militaire, non à la suite d'une conquête ou d'une invasion ; il y est entré par la force du témoignage, payé avec le sang des martyrs, au cours de plus de trois siècles d'histoire. Il y est entré avec la force du levain évangélique, qui en révélant à l'homme sa vocation suprême et sa suprême dignité dans le Christ (cf. Lumen Gentium,
LG 40 Gaudium et Spes, GS 22), a commencé par agir au plus profond de l'esprit, pour pénétrer ensuite dans les institutions et pour imprégner toute la culture. Voilà pourquoi cette deuxième naissance de Rome est si authentique et possède en elle-même une telle force de vérité intérieure et d'irradiation spirituelle !

Romains de vieille souche, acceptez ce témoignage d'un homme venu ici, à Rome, pour devenir votre évêque, par la volonté du Christ, à la fin du second millénaire. Acceptez ce témoignage et insérez-le dans votre magnifique patrimoine, auquel nous participons tous, pour en devenir un jour l'artisan responsable. Aussi bien le patrimoine de cette histoire l’oblige-t-il profondément. C'est là une grande valeur pour la vie de l'homme, qu'il convient de rappeler chaque jour, et non pas seulement lors des fêtes !

Puisse ces valeur trouver toujours la place qui lui revient, dans votre conscience et dans votre conduite ! Et tâchons d'être dignes de l'histoire à laquelle les temples, les basiliques et, plus encore, le Colisée et les catacombes de la Rome antique rendent ici témoignage.

Quant à vous, Romains de longue date, accueillez ce témoignage d'un homme venu ici à Rome par la volonté du Christ pour devenir, à la fin du deuxième millénaire, votre évêque. Acceptez ce témoignage et insérez-le dans votre magnifique patrimoine auquel nous participons tous. L'homme part de l'histoire. Il est fils de l'histoire, pour en devenir ensuite l'artisan responsable. C'est pourquoi le patrimoine de cette histoire le marque si profondément. C'est un grand bien dans la vie de l'homme, et il est bon d'y penser non seulement lors des fêtes, mais aussi chaque jour ! Puisse ce bien trouver une place adéquate dans notre conscience et dans notre comportement ! Efforçons-nous d'être dignes de l'histoire dont rendent ici témoignage les temples, les basiliques et plus encore le Colisée et les catacombes de la Rome antique.

Pour célébrer l'anniversaire de la fondation de Rome, voilà, chers Romains, les voeux que vous adresse votre évêque que vous avez accueilli il y a six mois, avec une grande ouverture d'âme, comme successeur de Pierre et témoin de cette mission universelle que la divine Providence a inscrite dans le livre de l'histoire de la Ville Éternelle.

Le pape donne ensuite sa bénédiction.






2 mai 1979 MARIE EST UNE PRESENCE MATERNELLE

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1. Regina caeli laetare, alleluia

Quia quem meruisti port are, alleluia resurrexit, sicut dixit, alleeluia

Ora pro nobis Deum, alleluia.

Je désire consacrer tout particulièrement à la Mère du Christ ressuscité l'audience générale de ce jour. La période pascale nous permet de nous tourner vers elle et de lui adresser les paroles dé joie très pure par lesquelles l'Église la salue. Le mois de mai, commencé hier, nous incite à penser à elle, à parler d'elle de maniéré particulière. Mai est en effet le mois de Marie. Ainsi donc, la période de l'année liturgique et, de même, ce mois-ci nous appellent et nous invitent à ouvrir notre coeur tout grand à Marie.

2. Avec son antienne pascale, l'Église parlera la Mère, à celle qui a eu le bonheur de porter dans son sein, sur son coeur et plus tard entre ses bras le Fils de Dieu notre Sauveur. Elle le reçut pour la dernière fois entre les bras lorsqu'il fut déposé de la Croix-sur le Calvaire. Il fut, sous ses yeux, enveloppé du suaire et porté dans le sépulcre. Sous les yeux de sa Mère ! Et le troisième jour le tombeau fut trouvé vide, mais ce ne fut pas elle la première à le constater. Il y eut d'abord les « trois Marie » et, parmi elles, Marie Madeleine, la pécheresse convertie.

Peu après vinrent le constater, les Apôtres prévenus par les femmes. Et même si les Évangiles ne nous disent rien de la visite de la Mère du Christ au lieu de la Résurrection, nous pensons tous qu'elle devait, de quelque manière, s'y trouver présente la première. Elle devait, la toute première, participer au mystère de la Résurrection, car tel était le droit de la Mère.

Ce droit de la Mère, l'Église le respecte dans sa liturgie quand elle lui adresse cette particulière invitation à la joie de la Résurrection : Laetare ! Resurrexit sicut dixit ! Et cette même antienne y joint tout aussitôt une demande d'intercession : Ora pro nobis Deum ! La révélation de la puissance divine par la Résurrection est en même temps la révélation de la « toute-puissance d'intercession » (omnipotentia supplex) de Marie auprès de son Fils.

3. L'Église de tous les temps, à commencer par le Cénacle de la Pentecôte, entoure Marie d'une vénération particulière et elle s'adresse à elle avec une confiance infinie.

L'Église de notre temps a fait, par la voix du Concile Vatican II, une synthèse de tout ce qui s'est développé durant les générations. De chapitre huit de la Constitution dogmatique Lumen Gentium est en un certain sens une « magna charta » de la mariologie destinée à notre époque : Marie présente de manière particulière dans le mystère du Christ et dans le mystère de l'Église, Marie « Mère de l'Église », comme Paul VI commença à l'appeler (dans le Credo du Peuple de Dieu) pour lui consacrer par la suite un document à part ; le Marialis Cultus.

Cette présence de Marie dans le mystère de l'Église, et donc en même temps dans la vie quotidienne du Peuple de Dieu partout dans le monde, est surtout une présence maternelle. Marie donne, pour ainsi dire, à l'oeuvre salvifique de son Fils et à la mission de l'Église une forme caractéristique : la forme maternelle. Tout ce que le langage humain permet de dire sur « le génie » propre de la femme-mère — le génie du coeur — se rapporte entièrement à elle.

Marie est toujours l'accomplissement le plus plein du mystère salvifique — de l'Immaculée Conception à l’Assomption — et elle est continuellement l'annonce la plus efficace de ce mystère. Elle révèle le salut, elle rapproche la grâce même de ceux qui semblent les plus indifférents, les plus éloignés. Au monde qui, en même temps que le progrès, manifeste sa « corruption et son vieillissement » Marie ne cesse d'être l'origine d'un monde meilleur (origo mundi melioris), comme le disait Paul VI.

« A l'homme contemporain, a écrit notamment le regretté Pontife — la Bienheureuse Vierge Marie… offre une vision sereine et une parole rassurante : la victoire de l'espérance sur l'angoisse, de la communion sur la solitude, de la paix sur le trouble, de la joie et de la beauté sur l'ennui et la laideur... de la vie sur la mort » (Paul VI, Exhortation Apostolique « Pour l'organisation et le développement corrects du Culte de la Bienheureuse Vierge Marie », 57, AAS 66, 1974, 166).

4. Je désire rapprocher particulièrement d'elle, de Marie qui est la Mère du bel Amour, la jeunesse du monde entier et de toute l'Église. Elle porte en soi un signe indestructible de la jeunesse et de la beauté qui ne passent jamais. Je souhaite aux jeunes de se rapprocher d'elle. Je les prie. Qu'ils aient confiance en elle, qu'ils lui confient la vie qu'ils ont devant eux, qu'ils l'aiment d'un simple et chaleureux amour du coeur. Elle seule est capable de répondre à cet amour de la meilleure manière :

« Ipsam sequens non devias

Ipsam rogans non desesperas,

Ipsam cogitans non erras...

Ipsam propitia perveni... » (St Bernard Homelia II super Missus est, XVII : PL 183, 71).

Je confie à Marie Mère de la grâce divine, les vocations sacerdotales et religieuses. Que le nouveau printemps des vocations, leur nouvel accroissement dans l'Église deviennent une preuve particulière de sa présence maternelle dans le mystère du Christ, dans notre temps et dans le mystère de sa Sainte Église sur toute la terre. Marie seule est une incarnation vivante de cette oblation totale et complète à Dieu, au Christ, à son action salvifique qui doit trouver une expression adéquate dans toute vocation sacerdotale et religieuse. Marie est l'expression la plus pleine de la parfaite fidélité à l'Esprit Saint et à son action dans l'âme ; elle est l'expression de la fidélité qui signifie une persévérante coopération à la grâce de la vocation.

Dimanche prochain est une journée destinée à la prière dans toute l'Église pour les vocations sacerdotales et les vocations religieuses masculines et féminines. C'est le dimanche des vocations. Puisse-t-il par l'intercession de la Mère de la grâce divine, faire lever une moisson abondante.

5. A la Mère du Christ et de l'Église je consacre tout le monde, toutes les nations de la terre, tous les hommes, car elle est leur Mère à tous. Je lui consacre particulièrement ceux pour qui la vie est plus difficile, plus dure, ceux qui souffrent physiquement ou spirituellement, qui vivent dans la misère, qui subissent des injustices et des dommages.

Quant à moi, finissant cette méditation de mai je désire vénérer demain, de manière particulière la Vierge de Jasna Gôra (Clair-Mont) à Czestochowa et dans toute ma patrie. Je m'y rendais en pèlerinage chaque année le 3 mai, fête de la Reine de Pologne. Chaque année j'ai célébré une messe solennelle durant laquelle le cardinal Wyszynski, Primat de Pologne, renouvelait en présence de l’Episcopat et de la foule immense des pèlerins, l'acte de consécration de la Pologne à la « servitude, maternelle » de Notre-Dame. Cette année également, si Dieu le permet, je visiterai Jasna Gôra tes 4 et 5 juin prochains. Par contre demain je serai présent là-bas par le coeur et l'esprit pour répéter avec toute l'Église et avec vous tous qui, aujourd'hui êtes réunis sur cette splendide Place Saint-Pierre : « Regina caeli laetare, alleluia ! ».






9 mai 1979 LE BON PASTEUR - LE DON DE SOI

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Pendant les quarante jours qui s'écoulent entre la fête de la Résurrection et l'Ascension du Seigneur, l'Église vit le mystère pascal en le méditant dans sa liturgie où il se réfléchit — pourrait-on dire — comme dans un prisme. Dans cette contemplation liturgique, l'image du bon Pasteur tient une place spéciale. Le 4e dimanche de Pâques, nous relisons l'allégorie du bon Pasteur que saint Jean à racontée au dixième chapitre de son Évangile.



Il donne sa vie

Dès les premiers mots, on comprend le sens pascal de cette allégorie. Le Christ dit : Je suis le bon Pasteur. Le bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis (
Jn 10,11). Nous savons que ces paroles ont été confirmées à la Passion. Le Christ a offert sa vie sur la croix. Et il l'a fait par amour. Il a voulu par-dessus tout répondre à l'amour du Père, qui a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas nais ait la vie éternelle (Jn 3,16). En accomplissant ce commandement… reçu du Père (Jn 10,18) et en révélant son amour, le Christ a fait preuve d'une manière toute spéciale du même amour que le Père. Il l'affirme lorsqu'il dit : Si le Père m'aime, c'est que je donne ma vie pour la reprendre (Jn 10,17). Le sacrifice du calvaire est par-dessus tout un don de soi. Le don de la vie qui, tout en demeurant dans la puissance du Père, est rendu, sous une forme nouvelle, au Fils. Ainsi, la Résurrection est le don de la vie rendu au Fils en récompense pour son sacrifice. Le Christ est conscient de cela et il l'exprime aussi dans l'allégorie du bon Pasteur : On ne me l’ôte pas (la vie) ; je la donne de moi-même. J'ai pouvoir de la donner et pouvoir de la reprendre (Jn 10,18). Ces paroles se réfèrent à la Résurrection et expriment toute la profondeur du mystère pascal.

Jésus est le bon Pasteur parce qu'il donne sa vie au Père de cette façon : en la rendant dans le sacrifice, il l'offre pour les brebis.

Nous pénétrons ici dans le domaine d'une splendide et séduisante similitude déjà chère aux Prophètes de l'Ancien Testament. Voici les paroles d'Ezéchiel :

Ainsi parle le Seigneur Dieu : voici que je conduirai moi-même mes brebis et j'en aurai soin… Je conduirai moi-même mes brebis au pâturage et je les ferai reposer. (Ez 34 Ez 11,15 cf. Jr Jr 31,30).

En reprenant cette image, Jésus révèle un aspect de l'amour du bon Pasteur que l'Ancien Testament ne pressentait pas encore : offrir sa vie pour ses brebis.



Il n’est pas un mercenaire

Dans son enseignement, on le sait, Jésus se servait souvent de paraboles pour faire comprendre aux hommes habitués à penser par l'image, la vérité divine qu'il annonçait. L'image du pasteur et du bercail était familière à ses auditeurs, tout comme elle ne cesse d'être familière aux hommes contemporains. Même si la civilisation et la technique font d'immenses progrès, cette image est toujours actuelle. Les pasteurs mènent les brebis aux pâturages (comme dans les montagnes polonaises) et restent avec elles pendant l'été. Ils les accompagnent sur les différents lieux de pâturage. Ils veillent à ce qu'elles ne s'égarent pas et les protègent contre les animaux sauvages, comme le dit le récit évangélique ; le loup emporte et disperse les brebis (Cf. 10, 12).

Le bon Pasteur, selon les paroles du Christ, est précisément celui qui voyant venir le loup  ne s'enfuit pas, mais est prêt à exposer sa vie, à lutter contre le loup pour que les brebis ne s'égarent pas. S'il n'agissait pas ainsi, il ne serait pas digne d'être appelé bon Pasteur. Ce serait un mercenaire et non un Pasteur.

C'est le discours allégorique de Jésus. Le bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis (Jn 10,11) : c'est là la signification essentielle et, dans le contexte des événements de la semaine saintes cela veut dire que Jésus, en mourant, sur la croix, a donné sa vie pour chaque homme et pour tous les hommes.

Lui seul pouvait le faire ; lui seul pouvait porter le poids du monde entier, le poids d'un monde coupable, la charge du péché de l'homme, les dettes du passé, du présent et de l'avenir, les souffrances que nous aurions dû mais que nous n'avons pas pu payer, en son corps sur le bois de la croix (1P 2,24) par un esprit éternel en s'offrant lui-même sans tache à Dieu... pour rendre un culte au Dieu vivant (He 9,14).

Telle a été l'oeuvre du Christ qui donna sa vie pour tous : c'est pourquoi il est appelé le bon Pasteur (Card. J.-H. Newman, Parochial and plain sermons, 16, London 1899, p. 235).

Par son sacrifice pascal, tous sont devenus son troupeau parce qu'il a garanti à chacun cette vie divine et surnaturelle qui, depuis la chute de l'homme à cause du péché originel, était perdue. Lui seul pouvait la rendre à l'homme.



Bonnes brebis... et bons pasteurs

3. L'allégorie du bon Pasteur, et en elle l'image du bercail, sont d'une importance fondamentale pour comprendre ce qu'est l'Église et sa mission dans l'histoire de l'homme. L'Église doit non seulement être un bercail mais elle doit réaliser le mystère qui continue de s'accomplir entre le Christ et l'homme : le mystère du bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis. Lisons saint Augustin :

Celui qui te cherchera le premier, alors que tu le méprisais au lieu de le chercher, te méprisera-t-il, ô brebis, si tu le cherches ? Commence donc par le chercher, lui qui le premier te chercha et te ramena sur ses épaules. Fais que sa parole s'accomplisse : les brebis qui m'appartiennent écoutent ma voix et me suivent (Enarrationes in psalmos, Ps 69,6).

L'Église, peuple de Dieu, est en même temps une réalité historique et sociale, où ce mystère se renouvelle et s'accomplit sans cesse de façons diverses. Et plusieurs hommes ont une part active dans cette sollicitude pour le salut du monde, pour la sanctification du prochain qui est et ne cesse d'être la sollicitude du Christ crucifié et ressuscité. Telle est par exemple la sollicitude des parents à l'égard de leurs enfants, et la sollicitude de chaque chrétien, sans exception, à l'égard du prochain, des frères et des soeurs, que Dieu met sur son chemin. Cette sollicitude pastorale est d'une manière particulière la vocation des pasteurs : prêtres et évêques. Ils doivent en particulier fixer leur regard sur l'image du bon Pasteur, méditer les paroles du discours du Christ et mesurer sur elles leur propre vie.

Laissons une fois encore parler saint Augustin : Pourvu que les bons pasteurs ne manquent jamais ! Pauvres de nous s'ils venaient à manquer et si la miséricorde divine ne les faisait pas naître et s'établir : Il est évident que s'il y a de bonnes brebis, il y a aussi de bons pasteurs ; en effet, c'est des bonnes brebis que viennent les bons pasteurs (Sermones ad populum I, Sermo XLIV, XII 30).



Saint Stanislas

4. Fidèle au discours évangélique du bon Pasteur, l'Église célèbre chaque année, dans sa liturgie, la vie et la mort de saint Stanislas, l’évêque de Cracovie. Dans le calendrier liturgique de l'Église universelle, sa fête est fixée au 11 avril, date de sa mort en 1079 des mains du roi Boleslaw-le-Hardi ; en Pologne, la fête de ce saint patron est traditionnellement célébrée le 8 mai.

Cette année, après 900 ans, neuf siècles, nous pouvons redire, en suivant les textes liturgiques, qu'il a donné sa vie pour ses brebis (cf. Jn Jn 10,11) et même sa cette mort est loin de nous dans le temps, elle ne cesse d'avoir, l'éloquence d'un témoignage particulier.

Tout au long de l'histoire, les Polonais se sont unis spirituellement autour de saint Stanislas, surtout aux heures difficiles. Cette année, année du grand jubilé, en tant que premier pape polonais, et récemment encore successeur de saint Stanislas au siège épiscopal de Cracovie, je veux participer à la fête en l'honneur du saint patron de la Pologne.

Avec tous ceux qui célèbrent cette fête, nous voulons nous approcher à nouveau du Christ bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis, afin qu'il soit notre force dans les siècles à venir et pour les nouvelles générations.






16 mai 1979 COMME LE BON PASTEUR

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Je voudrais aujourd'hui vous parler encore du bon Pasteur. L'image du bon Pasteur, nous l'avons dit la semaine dernière, est profondément ancrée dans la liturgie du temps pascal, parce qu'elle a pénétré la conscience de l'Église et, en particulier, l'Église des premières générations chrétiennes. Les effigies du bon Pasteur des premiers temps du christianisme en font foi. Cette image est une synthèse extraordinaire du mystère du Christ. Et, en même temps, de sa mission qui ne cesse de s'accomplir; Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis (
Jn 10,11).

Pour nous qui participons régulièrement à l'Eucharistie, qui obtenons la rémission des péchés par le sacrement de la réconciliation, pour le salut des âmes, la dignité de la personne humaine, la droiture et la pureté des chemins terrestres de l'existence humaine, l'image du bon Pasteur est aussi éloquente qu'elle l'était pour les premiers chrétiens qui, dans les fresques des catacombes représentant le Christ bon Pasteur, exprimaient la même foi, le même amour et la même gratitude. Et ils l'exprimaient aux heures de la persécution, lorsque à cause de cette foi dans le Christ, ils étaient menacés de mort, lorsqu'ils étaient contraints de chercher des cimetières souterrains pour y prier et participer aux saints mystères. Les catacombes de Rome et des autres villes du vieil empire ne cessent d'être un éloquent témoignage du droit de l'homme de professer sa foi dans le Christ et de la professer publiquement. Elles ne cessent d'être également le témoignage de cette force spirituelle qui jaillit du bon Pasteur. Il s'est montré plus puissant que le vieil empire et le secret de cette force est dans la vérité et dans l'amour dont l'homme a toujours faim.

2. Je suis le bon Pasteur, dit Jésus, je connais mes brebis et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît et que Je connais le Père (Jn 10,14-15). Comme elle est merveilleuse cette connaissance ! Quelle connaissance ! Elle va jusqu'à l'éternelle Vérité et à l'Amour dont le nom est le Père ! C'est lui la source de cette connaissance particulière qui fait naître la confiance. La connaissance réciproque : Je connais... et elles connaissent.

Il ne s'agit pas d'une connaissance abstraite, d'une connaissance purement intellectuelle qui s'exprime par les mots : Je sais tout de toi. Une telle connaissance fait peur, elle pousse à se retirer en soi : Ne touche pas à mes secrets, laisse-moi en paix. Malheur à la connaissance... qui ne tourne point à aimer ! (Bossuet, De la connaissance de Dieu et de soi-même, OEuvres complètes, Bar-le-Duc 1870, Guérin, p. 86).

Le Christ dit au contraire : Je les connais et il parle de la connaissance libératrice qui éveille la confiance. Car, bien que l'homme protège l'accès à ses secrets, bien qu'il veuille les garder pour lui-même, il a grand besoin, il a faim et soif de quelqu'un devant qui il puisse s'ouvrir, à qui manifester et révéler son moi. L'homme est une personne et c'est à la nature de la personne qu'appartient également le besoin du secret, le besoin de se révéler. Ces deux besoins sont étroitement liés l'un à l'autre. L'un s'explique par l'autre. Et tous deux indiquent le besoin de quelqu'un devant qui l'homme puisse se révéler. Bien plus : l'homme a besoin de quelqu'un qui l'aide à pénétrer son propre mystère. Ce quelqu'un doit jouir d'une confiance absolue en se révélant lui-même, il doit se montrer digne de cette confiance. Il doit prouver et révéler qu'il est le Seigneur et en même, temps, le serviteur du mystère intérieur de l'homme.

C'est précisément ainsi que le Christ s'est révélé lui-même. Ses paroles : Je connais mes brebis et mes brebis... me connaissent sont confirmées par les paroles qui suivent : Je donne ma vie pour mes brebis;(Cf. Jn Jn 10,11-15)



C’est l’image intérieure du bon Pasteur

3. Dans l'histoire de l'Église et du christianisme, les hommes qui ont suivi le Christ-bon Pasteur n'ont pas manqué et il y en a aussi aujourd'hui. Plus d'une fois, la liturgie se réfère à cette allégorie pour nous présenter certains saints le jour de leur fête. Mercredi dernier, nous avons évoqué saint Stanislas, patron de la Pologne, dont nous célébrons cette année le IX° centenaire. En la fête de cet évêque-martyr, nous relisons l'Évangile du bon Pasteur.

Aujourd'hui, je veux évoquer un autre personnage puisque c'est cette année le 25e anniversaire de sa canonisation. Il s'agit de saint Jean Népomucène. A cette occasion et à la demande du cardinal Tomasek, archevêque de Prague, j'ai adressé un message à l’Eglise de Tchécoslovaquie.

En voici quelques extraits :

La grande personnalité de saint Jean Népomucène est un exemple et un don pour tous. L'histoire nous le présente d'abord tout dévoué à l'étude et la préparation au sacerdoce ; conscient qu'il aurait été, selon l'expression de saint Paul, transformé en un autre Christ, il incarne l'idéal du connaisseur des mystères de Dieu. Il tendait de toutes ses forces à la perfection des vertus. D'abord, les vertus du curé qui sanctifie ses fidèles par une vie exemplaire et l'amour des âmes ; puis les vertus du vicaire général qui accomplit scrupuleusement ses devoirs dans un esprit d'obéissance à l'Église.

C'est alors qu'il était vicaire général qu'il a subi le martyre pour avoir défendu les droits et la liberté légitime de l'Église devant le roi Wenceslas IV. Ce dernier assista personnellement à la torture puis le fit jeter dans la Moldau.

Dix ans après la mort de cet homme de Dieu, le bruit courait que le roi l'avait fait mourir parce qu'il avait refusé de violer le secret de la confession. C'est ainsi que le martyr de la liberté de l'Église a été également vénéré comme témoin du secret sacramentel. Et puisqu'il était prêtre, il est évident que les prêtres doivent les premiers boire à sa source, se revêtir de ses vertus et être d'excellents pasteurs. Le bon Pasteur connaît ses brebis, leurs exigences, leurs besoins. Il les aide à se laver du péché, à vaincre les obstacles et les difficultés qu'elles rencontrent. Contrairement au mercenaire, le Pasteur va à la recherche des brebis, il les aide à porter leur fardeau et sait les encourager. Il soigne leurs blessures par la grâce, surtout par le sacrement de la réconciliation. En effet, le Pape, l'évêque et le prêtre ne vivent pas pour eux-mêmes mais pour les fidèles, tout comme les parents vivent pour leurs enfants et tout comme le Christ a servi les Apôtres : Le Fils de l'Homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude (Mt 20,28).

4. Dans son allégorie du bon Pasteur, le Christ Seigneur prononce ces paroles : J'ai d'autres brebis encore qui ne sont pas de cet enclos. Celles-là aussi je dois les mener, elles écouteront ma voix et il y aura un seul troupeau, un seul pasteur (Jn 10,16).

On comprend facilement qu'en partant directement aux fils d'Israël, le Christ Jésus soulignait la nécessité de la diffusion de l'Évangile et de l'Église et par là, la nécessité d'étendre la sollicitude du bon Pasteur au-delà du peuple de l'ancienne Alliance. Nous savons que ce processus a commencé à se réaliser au temps des Apôtres. Il s'est réalisé par la suite et continue de se réaliser aujourd'hui. Nous sommes conscients de la portée universelle du mystère de la Rédemption et de la portée universelle de la mission de l'Église.

Donc, avant de terminer cette méditation sur le bon Pasteur, prions avec ferveur pour toutes les autres brebis que le Christ doit encore conduire à l'unité d'un seul bercail (Jn 10,16) : celles qui ne connaissent pas encore l'Évangile, ou celles qui, pour une raison quelconque, l'ont persécuté et le persécutent.

Que le Christ prenne sur ses épaules ceux qui ne sont pas capables de trouver le chemin.

Le bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis. Pour toutes ses brebis.







Premières Catéchèses S. J-Paul II 1978-79 18479