Angelus Benoit XVI 20021

Dimanche 20 février 2011

20021 Chers frères et soeurs!

En ce septième dimanche du Temps ordinaire, les lectures bibliques nous parlent de la volonté de Dieu de faire participer les hommes à sa vie: «Soyez saints, car moi, le Seigneur, votre Dieu, je suis saint» — lit-on dans le livre du Lévitique (19, 1). Par ces paroles, et les préceptes qui en découlent, le Seigneur invitait le peuple choisi à être fidèle à l'alliance avec Lui en marchant sur ses voies et il fondait la législation sociale sur le commandement «tu aimeras ton prochain comme toi-même» (
Lv 19,18). Et si nous écoutons ensuite Jésus, en qui Dieu a assumé un corps mortel pour se faire proche de tout homme, et a révélé son amour infini pour nous, nous retrouvons ce même appel, cette même audace objective. En effet, le Seigneur dit: «Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait» (Mt 5,48). Mais qui pourrait devenir parfait? Notre perfection est de vivre avec humilité en tant qu'enfants de Dieu en accomplissant concrètement sa volonté. Saint Cyprien écrivait qu'«à la paternité de Dieu doit correspondre un comportement d'enfants de Dieu, afin que Dieu soit glorifié et loué pour la bonne conduite de l'homme» (De la jalousie et de l'envie, 15: CCL 3a, 83).

De quelle façon pouvons-nous imiter Jésus? Jésus lui-même dit: «Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d'être vraiment les fils de votre Père qui est dans les cieux» (Mt 5,44-45). Qui accueille le Seigneur dans sa vie, et l'aime de tout son coeur, est capable d'un nouveau commencement. Il réussit à accomplir la volonté de Dieu: réaliser une nouvelle forme d'existence animée par l'amour et destinée à l'éternité. L'apôtre Paul ajoute: «N'oubliez pas que vous êtes le temple de Dieu et que l'Esprit de Dieu habite en vous» (1Co 3,16). Si nous sommes vraiment conscients de cette réalité et que notre vie est profondément façonnée par elle, alors notre témoignage devient clair, éloquent et efficace. Un auteur médiéval a écrit: «Lorsque tout l'être humain s'est pour ainsi dire uni à l'amour de Dieu, alors la splendeur de son âme se reflète aussi dans son aspect extérieur », dans toute sa vie (Jean Climaque, L'échelle sainte, XXX: B). On lit dans le livre de l'Imitation de Jésus Christ: «L'amour est une grande chose; c'est un bien qui rend léger tout ce qu'il y a de pesant, et supporte tranquillement toute difficulté. L'amour aspire à monter haut, sans être retenu par rien de terrestre. Il naît de Dieu et c'est seulement en Dieu qu'il peut trouver son repos» (III, V, 3).

Chers amis, après-demain, le 22 février, nous célébrerons la fête de la Chaire de Saint-Pierre. A lui, le premier des apôtres, le Christ a confié la tâche de Maître et de Pasteur pour guider spirituellement le Peuple de Dieu, afin qu'il puisse s'élever jusqu'au Ciel. J'exhorte donc tous les pasteurs à adopter ce «nouveau style de vie» qui a été inauguré par le Seigneur Jésus et qui est devenu précisément celui des Apôtres» (Lettre d'indiction de l'Année sacerdotale). Invoquons la Vierge Marie, Mère de Dieu et de l'Eglise, afin qu'elle nous enseigne à nous aimer les uns les autres et à nous accueillir comme des frères, enfants du même Père céleste.

A l'issue de l'Angelus:

Je salue cordialement les pèlerins francophones et particulièrement les élèves de troisième du collège Charles-Péguy de Bobigny. Chers amis, les lectures de ce dimanche nous orientent vers la joie de la réconciliation. Le Seigneur nous invite à poser résolument des actes concrets de pardon: cet amour effectif du prochain est capable de changer l’ordre du monde en refusant sa fausse sagesse et les idoles qu’il nous propose. Que l’Esprit Saint qui habite en nous soit source de discernement, de force et de générosité pour témoigner de la vérité de l’Evangile dans notre vie quotidienne! Je souhaite à tous un bon séjour!

Je souhaite à tous un bon dimanche.



Place Saint-Pierre

Dimanche 27 février 2011

27021 Chers frères et soeurs!

L'une des paroles les plus touchantes de l'Ecriture Sainte résonne dans la liturgie d'aujourd'hui. L'Esprit Saint nous l'a donnée par la plume de celui qu'on appelle le «second Isaïe», qui, pour consoler Jérusalem abattue par les malheurs, s'exprime ainsi: «Est-ce qu'une femme peut oublier son petit enfant, ne pas chérir le fils de ses entrailles? Même si elle pouvait l'oublier, moi, je ne t'oublierai pas» (
Is 49,15). Cette invitation à la confiance dans l'indéfectible amour de Dieu est rapprochée de la page, tout aussi suggestive, de l'Evangile de Matthieu où Jésus exhorte ses disciples à avoir confiance dans la providence du Père céleste, qui nourrit les oiseaux du ciel, habille les lys des champs et connaît chacun de nos besoins (cf. 6, 24-34). Le Maître s'exprime ainsi: «Ne vous faites donc pas tant de souci; ne dites pas: “Qu'allons-nous manger?” ou bien: “Qu'allons-nous boire?” ou encore: “Avec quoi nous habiller?” Tout cela, les païens le recherchent. Mais votre Père céleste sait que vous en avez besoin».

Devant la situation de tant de personnes, proches et lointaines, qui vivent dans la misère, ce discours de Jésus pourrait paraître peu réaliste, voire évasif. En réalité, le Seigneur veut faire comprendre avec clarté que l'on ne peut pas servir deux maîtres: Dieu et la richesse. Celui qui croit en Dieu, Père plein d'amour pour ses enfants, met au premier plan la recherche de son royaume, de sa volonté. Et c'est justement le contraire du fatalisme ou d'un irénisme ingénu. La foi dans la Providence, en effet, ne dispense pas de la lutte difficile pour une vie digne, mais libère de l'anxiété pour les choses et de la peur du lendemain. Il est clair que cet enseignement de Jésus, tout en restant toujours vrai et valable pour tous, est mis en pratique de diverses façons selon les différentes vocations: un frère franciscain pourra le suivre de façon plus radicale, alors qu'un père de famille devra tenir compte de ses devoirs envers sa femme et ses enfants. Mais en tous cas, le chrétien se distingue par sa confiance absolue dans le Père céleste, comme Jésus. C'est précisément la relation avec Dieu le Père qui donne un sens à toute la vie du Christ, à ses paroles, à ses gestes de salut, jusqu'à sa passion, sa mort et sa résurrection. Jésus nous a montré ce que signifie vivre les pieds bien sur terre, attentifs aux situations concrètes du prochain, et en même temps, en gardant le coeur toujours au Ciel, plongé dans la miséricorde de Dieu.

Chers amis, à la lumière de la Parole de Dieu de ce dimanche, je vous invite à invoquer la Vierge Marie par le titre de Mère de la Providence divine. Confions-lui notre vie, la marche de l'Eglise, les événements de l'histoire. Invoquons en particulier son intercession afin que nous apprenions tous à vivre selon un style plus simple et plus sobre, dans notre activité quotidienne et dans le respect de la création, que Dieu a confiée à notre garde.

A l'issue de l'Angelus:

Alors que la solitude est une épreuve pour de nombreuses personnes, la liturgie nous rappelle aujourd’hui, chers pèlerins francophones, que Dieu ne nous oublie pas et que nous avons du prix à ses yeux. Puissions-nous acquérir un regard capable de discerner sa présence au coeur de notre vie! Car rechercher le Royaume de Dieu nous libère de la peur du lendemain et nous ouvre à la confiance et à l’espérance qui ne déçoit point. Je vous invite à être pour ceux qui vous entourent les témoins de l’amour de Dieu, plus tendre que celui d’une mère pour son enfant, et à prier pour que la justice et le dialogue l’emportent sur le profit et la violence. A tous, je souhaite un bon dimanche!



Place Saint-Pierre

Dimanche 6 mars 2011

60311 Chers frères et soeurs!

L'Evangile de ce dimanche présente la conclusion du «Discours sur la montagne» où le Seigneur Jésus, à travers la parabole des deux maisons construites l’une sur le roc et l’autre sur le sable, invite les disciples à écouter ses paroles et à les mettre en pratique (cf. Mt
Mt 7,24). De cette manière, Il place le disciple et son chemin de foi dans l'horizon de l'Alliance, constituée par la relation que Dieu noue avec l'homme, à travers le don de sa Parole, en entrant en communication avec nous. Le Concile Vatican II affirme: «Le Dieu invisible s'adresse aux hommes en son surabondant amour comme à des amis, il s'entretient avec eux pour les inviter et les admettre à partager sa propre vie» (Const. dogm. sur la Révélation divine Dei Verbum DV 2). «Dans cette perspective, chaque homme apparaît comme le destinataire de la Parole, interpellé et appelé à entrer dans ce dialogue d'amour par une réponse libre» (Exhort. ap. post-syn. Verbum Domini, n. 22). Jésus est la Parole vivante de Dieu. Quand il enseignait, la foule reconnaissait dans ses paroles la même autorité divine, sentait la proximité du Seigneur, son amour miséricordieux, et rendait gloire à Dieu. A chaque époque et en tout lieu, celui qui a la grâce de connaître Jésus, spécialement à travers la lecture du saint Evangile, en reste fasciné, reconnaissant que dans sa prédication, dans ses gestes, dans sa Personne, Il nous révèle le vrai visage de Dieu, et nous révèle en même temps à nous- mêmes, nous fait sentir la joie d'être enfants du Père qui est aux cieux, nous indiquant la base solide sur laquelle édifier notre vie.

Mais souvent, l'homme ne construit pas son agir, son existence sur cette identité et préfère les sables des idéologies, du pouvoir, du succès et de l'argent, pensant y trouver la stabilité et la réponse à l'irrépressible demande de bonheur et de plénitude qu'il porte dans son âme. Et nous, sur quoi voulons-nous construire notre vie? Qui peut vraiment répondre à l'inquiétude de notre coeur? Le Christ est le roc de notre vie! Il est la Parole éternelle et définitive qui ne fait craindre aucune sorte d'adversité, aucune difficulté, aucun désagrément (cf. Verbum Domini, n. 10). Puisse la Parole de Dieu imprégner toute notre vie, notre pensée et notre action, comme le proclame la première lecture de la Liturgie du jour traitée par le Livre du Deutéronome: «Ces paroles que je vous dis, mettez-les dans votre coeur et dans votre âme, attachez-les à votre main comme un signe, à votre front comme un bandeau» (11, 18). Chers frères, je vous exhorte à consacrer du temps, chaque jour, à la Parole de Dieu, à vous en nourrir, à la méditer continuellement. C'est aussi une aide précieuse pour se mettre à l'abri d'un activisme superficiel qui peut momentanément satisfaire l'orgueil mais qui, finalement, laisse vides et insatisfaits.

Invoquons l'aide de la Vierge Marie dont l'existence a été marquée par la fidélité à la Parole de Dieu. Nous la contemplons dans l'Annonciation, au pied de la Croix et, maintenant, comme celle qui prend part à la gloire du Christ ressuscité. Comme Elle, nous voulons renouveler notre «oui» et confier avec confiance notre chemin à Dieu.

APPEL


Je suis en permanence et avec une grande appréhension les tensions que l'on enregistre, ces jours-ci, dans plusieurs pays d'Afrique et d'Asie.

Je demande au Seigneur Jésus que le sacrifice bouleversant de la vie du ministre pakistanais Shahbaz Bhatti réveille dans les consciences le courage et l'engagement de respecter la liberté religieuse de tous les hommes et, de cette manière, d’encourager une égale dignité pour tous.

Ma pensée va vers la Libye, ou de récents affrontements ont provoque de nombreux morts et une crise humanitaire croissante. J'assure toutes les victimes et tous ceux qui se trouvent dans des situations angoissantes de ma prière et de ma proximité, et j’invoque assistance et secours pour les populations frappées.
* * *


Chers pèlerins francophones, le Christ nous invite aujourd’hui à bâtir notre maison sur le roc de la foi en Dieu et de sa Parole. La fidélité à ses commandements nous pousse à faire le bien et à abandonner les choix qui conduisent à la mort. Au jour de notre Baptême, nous avons commencé une aventure joyeuse et exaltante! Alors que nous allons entrer mercredi dans le Temps du Carême, je vous invite à approfondir le don de la grâce qui nous y a été fait. A la suite de Jésus, laissons-nous guider par l’Esprit sur le chemin de la vie! A tous, je souhaite un bon dimanche et un bon Carême!



BENOIT XVI

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Place Saint-Pierre

Dimanche 13 mars 2011

[Vidéo]

Chers frères et soeurs!


Nous voici au premier dimanche de carême, ce Temps liturgique de quarante jours qui constitue dans l'Eglise un itinéraire spirituel de préparation à Pâques. Il s'agit en substance de suivre Jésus qui se dirige résolument vers la Croix, sommet de sa mission de salut. Si nous nous demandons: pourquoi le Carême? pourquoi la Croix?, la réponse, en termes radicaux, est celle-ci: parce que le mal existe, ou plutôt le péché qui, selon les Ecritures, est la cause profonde de tout mal. Mais cette affirmation n'est pas tout à fait acquise, et ce mot même de «péché» n'est pas accepté par beaucoup, parce qu'il présuppose une vision religieuse du monde et de l'homme. En effet, c'est vrai: si on élimine Dieu de l'horizon du monde, on ne peut pas parler de péché. Comme quand le soleil se cache, les ombres disparaissent; l'ombre n'apparaît que s'il y a le soleil; ainsi l'éclipse de Dieu comporte nécessairement l'éclipse du péché. C'est pourquoi le sens du péché — qui est très différent du «sentiment de culpabilité» comme l'entend la psychologie — s'acquiert en retrouvant le sens de Dieu. C'est ce qu'exprime le psaume Miserere, attribué au roi David à l'occasion de son double péché d'adultère et d'homicide: «Contre toi — dit David en s'adressant à Dieu — toi seul, j'ai péché» (Ps 51,6).

Face au mal moral, l'attitude de Dieu est celle de s'opposer au péché et de sauver le pécheur. Dieu ne tolère pas le mal parce qu'il est Amour, Justice, Fidélité; c'est justement pour cela qu'il ne veut pas la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. Pour sauver l'humanité, Dieu intervient: nous le voyons dans toute l'histoire du peuple juif, à partir de la libération d'Egypte. Dieu est déterminé à libérer ses fils de l'esclavage pour les conduire à la liberté. Et l'esclavage le plus grave et le plus profond est justement celui du péché. C'est pourquoi Dieu a envoyé son Fils dans le monde: pour libérer les hommes de la domination de Satan, «origine et cause de tout péché». Il l'a envoyé dans notre chair mortelle pour qu'il devienne victime d'expiation, en mourant pour nous sur la croix. Le diable s'est opposé de toutes ses forces à ce plan de salut définitif et universel, comme le démontre en particulier l'Evangile des tentations de Jésus dans le désert, qui est proclamé chaque année le premier dimanche de Carême. En effet, entrer dans ce temps liturgique signifie chaque fois se mettre du côté du Christ contre le péché, affronter — comme personne ou comme Eglise — le combat spirituel contre l'esprit du Mal (Mercredi des Cendres, Oraison Collecte).

Invoquons donc l'aide maternelle de la Très Sainte Vierge Marie pour ce chemin de carême commencé depuis peu, pour qu'il soit riche de fruits de conversion. Je demande pour moi et mes collaborateurs de la Curie romaine, alors que nous commencerons ce soir la semaine des Exercices spirituels, un souvenir spécial dans la prière.

A l'issue de l'Angélus :

Chers frères et soeurs,

Les images du tragique tremblement de terre et du tsunami qui a suivi au Japon nous ont tous fortement impressionnés. Je désire renouveler ma proximité spirituelle aux chères populations de ce pays qui, avec dignité et courage, font face aux conséquences de ces catastrophes. Je prie pour les victimes et pour leurs proches, et pour tous ceux qui souffrent à cause de ces événements terribles. J'encourage tous ceux qui, avec une rapidité louable, s'engagent pour porter secours. Restons unis dans la prière. Le Seigneur est proche de nous!

Je salue cordialement les pèlerins francophones. Chers amis, l'évangile de ce dimanche éclaire notre condition terrestre. Il nous appelle à prendre conscience de notre fragilité pour accueillir la grâce qui nous libère du péché. La foi chrétienne implique le combat contre le Tentateur toujours à l'oeuvre. Reconnaissons humblement nos tentations et apprenons de Jésus comment y résister, par la prière, le jeûne et le partage. Sorti vainqueur de cette lutte, le Christ ouvre notre coeur à l'espérance. Il nous conduit à la victoire sur les séductions du Mal et à la liberté qui est obéissance à sa Parole. Que la Vierge Marie nous accompagne durant ce Carême! Bon dimanche à tous!



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Place Saint-Pierre

Dimanche 20 mars 2011



Chers frères et soeurs!

Je rends grâce au Seigneur qui m'a donné de vivre ces derniers jours les Exercices spirituels, et je suis également reconnaissant à ceux qui ont été proches de moi par la prière. Ce deuxième dimanche de carême est appelé dimanche de la Transfiguration, parce que l'Evangile raconte ce mystère de la vie du Christ. Après avoir annoncé sa passion à ses disciples, Jésus «prend avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et il les emmène à l'écart, sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant eux; son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière» (Mt 17,1-2). Pour les sens, la lumière du soleil est la plus intense que l'on connaisse dans la nature, mais pour l'esprit, les disciples virent, pendant un bref moment, une splendeur encore plus intense, celle de la gloire divine de Jésus, qui éclaire toute l'histoire du salut. Saint Maxime le Confesseur affirme que «les vêtements devenus blancs portaient le symbole des paroles de l'Ecriture Sainte, qui devenaient claires et transparentes et lumineuses» (Ambiguum 10: B).

L'Evangile dit qu'aux côtés de Jésus transfiguré, «apparurent Moïse et Elie, qui s'entretenaient avec lui» (Mt 17,3); Moïse et Elie, figures de la Loi et des prophètes. Ce fut alors que Pierre, en extase, s'exclama: «Seigneur, il est heureux que nous soyons ici! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Elie» (Mt 17,4). Mais saint Augustin commente en disant que nous avons une seule demeure: le Christ; lui, «est la Parole de Dieu, Parole de Dieu dans la Loi, Parole de Dieu dans les Prophètes» (Sermo De Verbis EV 78,3, PL 38, 491). En effet, le Père lui-même proclame: «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis tout mon amour; écoutez-le!» (Mt 17,5). La Transfiguration n'est pas un changement de Jésus, mais elle est la révélation de sa divinité, «l'intime compénétration de son être de Dieu, qui devient pure lumière. Dans son être un avec le Père, Jésus lui-même est Lumière née de la Lumière» (Jésus de Nazareth, 2007). En contemplant la divinité du Seigneur, Pierre, Jacques et Jean sont préparés à affronter le scandale de la Croix, comme on le chante dans un hymne ancien: «Tu t'es transfiguré sur la montagne, et, autant qu'ils en étaient capables, tes disciples ont contemplé ta Gloire, Christ Dieu afin que lorsqu'ils Te verraient crucifié, ils comprennent que ta passion était volontaire et qu'ils annoncent au monde que Tu es vraiment le rayonnement du Père» (Liturgie byzantine, Kontakion de la fête de la Transfiguration).

Chers amis, nous participons nous aussi à cette vision, et à ce don surnaturel, en faisant place à la prière et à l'écoute de la Parole de Dieu. En outre, spécialement en ce temps de carême, je vous exhorte, comme l'écrit le serviteur de Dieu Paul VI, à «répondre au précepte divin de la pénitence par quelque acte volontaire en dehors des renoncements imposés par le poids de la vie quotidienne» (Constitution apostolique Paenitemini, 17 février 1966, III, c: AAS 58 [1966]). Invoquons la Vierge Marie, afin qu'elle nous aide à écouter et à suivre toujours le Seigneur Jésus, jusqu'à la passion et la croix, pour participer aussi à sa gloire.
***


Chers pèlerins francophones, en ce dimanche, l'Evangile nous rapporte l'événement de la transfiguration de Jésus. Comme les disciples, quittons la rumeur du quotidien. Plongeons-nous dans la présence de Dieu Trinité qui donne sens à notre existence. Accueillons sa lumière! Elle nous éclaire pour discerner le bien et le mal. Elle nous invite à la conversion du coeur pour nous libérer de l'égoïsme et de l'orgueil. Et ainsi notre volonté de vivre selon la grâce reçue au Baptême s'affermira. Que la Vierge Marie nous apprenne à collaborer pleinement, comme elle, au mystère de la Rédemption! Je vous bénis de grand coeur ainsi que vos familles, particulièrement celles qui connaissent l'insécurité et la violence.



Dimanche 27 mars 2011



331 Chers frères et soeurs!

Ce 3ème dimanche de carême est caractérisé par le célèbre dialogue de Jésus avec la Samaritaine, raconté par l'évangéliste Jean. Cette femme se rendait chaque jour à un ancien puits remontant au patriarche Jacob pour y puiser de l'eau, et ce jour-là, elle y trouva Jésus, assis, «fatigué par la marche» (
Jn 4,6). Saint Augustin commente: «Ce n'est pas pour rien que Jésus se fatigue... La force du Christ t'a créé, la faiblesse du Christ t'a recréé... Par sa force il nous a créé, par sa faiblesse il est venu nous chercher...» (In Ioh. Ev. EV 15,2). La fatigue de Jésus, signe de son humanité véritable, peut être vue comme un prélude de la passion, par laquelle il a mené à son accomplissement l'oeuvre de notre rédemption. En particulier, dans la rencontre avec la Samaritaine au puits, apparaît le thème de la «soif» du Christ, qui culmine dans le cri sur la croix: «J'ai soif» (Jn 19,28). Cette soif, comme la fatigue, a certainement une base physique. Mais Jésus, comme le dit encore Augustin, «avait soif de la foi de cette femme» (In Ioh. Ev. EV 15,11), comme de la foi de nous tous. Dieu le Père l'a envoyé pour assouvir notre soif de vie éternelle, en nous donnant son amour, mais pour nous faire ce don, Jésus demande notre foi. La toute puissance de l'Amour respecte toujours la liberté de l'homme; elle frappe à son coeur et attend patiemment sa réponse.

Dans la rencontre avec la Samaritaine, on distingue le symbole de l'eau au premier plan, qui fait clairement allusion au sacrement du baptême, source d'une vie nouvelle pour la foi dans la Grâce de Dieu. Cet Evangile, en effet, — comme je l'ai rappelé dans la catéchèse du mercredi des Cendres —, fait partie de l'ancien itinéraire de préparation des catéchumènes à l'initiation chrétienne qui se déroulait pendant la grande veillée de la nuit de Pâques. «Qui boira de l'eau que je lui donnerai - dit Jésus — n'aura plus jamais soif. L'eau que je lui donnerai deviendra en lui source d'eau jaillissant en vie éternelle» (Jn 4,14). Cette eau représente l'Esprit Saint, le «don» par excellence que Jésus est venu apporter de la part de Dieu le Père. Qui renaît de l'eau et de l'Esprit Saint, c'est-à-dire dans le Baptême, entre dans une relation réelle avec Dieu, une relation filiale, et peut l'adorer «en esprit et en vérité» (Jn 4,23 Jn 4,24), comme le révèle encore Jésus à la Samaritaine. Grâce à la rencontre avec Jésus Christ et au don de l'Esprit Saint, la foi de l'homme atteint son accomplissement, comme réponse à la plénitude de la révélation de Dieu.

Chacun de nous peut s'identifier à la Samaritaine: Jésus nous attend, spécialement en ce temps de carême, pour parler à notre, à mon coeur. Arrêtons-nous un moment en silence, dans notre chambre, ou dans une église, ou dans un lieu isolé. Ecoutons sa voix qui nous dit: «Si tu savais le don de Dieu...». Que la Vierge Marie nous aide à ne pas manquer ce rendez-vous dont dépend notre bonheur véritable.


APPEL


Face aux nouvelles, toujours plus dramatiques, qui proviennent de la Libye, je suis de plus en plus inquiet pour la sécurité de la population civile et ma préoccupation grandit pour l’évolution de la situation, marquée actuellement par l'utilisation des armes.

En ces moments de grande tension, il est urgent de recourir à tous les moyens dont dispose l'action diplomatique et de soutenir aussi le plus petit signal d'ouverture et de volonté de réconciliation entre toutes les parties impliquées dans la recherche de solutions pacifiques et durables.

Dans cette perspective, alors que j'élève au Seigneur ma prière pour un retour à la paix en Libye et dans toute la région du nord de l’Afrique, j'adresse de tout coeur un appel aux organismes internationaux et à tous ceux qui ont des responsabilités politiques et militaires, pour la mise en route immédiate d'un dialogue qui suspende l'utilisation des armes.

Ma pensée va enfin aux autorités et aux citoyens du Moyen-Orient où des épisodes de violence ont eu lieu ces derniers jours, pour que là aussi, la voie du dialogue et de la réconciliation soit privilégiée dans la recherche d'une coexistence juste et fraternelle.

A l'issue de l'Angélus:

En ce dimanche, chers pèlerins francophones, Jésus se présente à nous comme un mendiant: «Donne-moi à boire!». Prenons le temps d'écouter son appel. Saurons-nous, comme la Samaritaine, Le reconnaître comme l'unique source de vie qui répond à la quête profonde de l'homme? Oui, seule l'eau qu'Il donne peut étancher notre soif de bien, de vérité, de beauté! Laissons de côté l'idolâtrie du bien-être matériel et de l'éphémère qui laisse le coeur inquiet et vide. Soyons attentifs et accueillants aux besoins des autres pour partager avec eux. Chers amis, en donnant plus de temps à la prière, puissions-nous être des adorateurs en esprit et en vérité et des témoins joyeux du Dieu vivant! Avec ma Bénédiction pour vous et pour vos familles!



Place Saint-Pierre

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Dimanche 3 avril 2011



Chers frères et soeurs!

L'itinéraire de carême que nous sommes en train de vivre est un temps de grâce particulier au cours duquel nous pouvons faire l'expérience du don de la bienveillance du Seigneur à notre égard. La liturgie de ce dimanche, appelé Laetare, nous invite à nous réjouir, à être joyeux, comme le proclame l'antienne d'entrée de la célébration eucharistique: «Réjouis-toi, Jérusalem, et vous tous qui m'aimez, rassemblez-vous. Exultez et réjouissez-vous, vous qui étiez dans la tristesse: rassasiez-vous de l'abondance de votre consolation» (cf. Is Is 66,10-11). Quelle est la raison profonde de cette joie? L'Evangile d'aujourd'hui dans lequel Jésus guérit un homme aveugle de naissance nous le dit. La question que le Seigneur Jésus adresse à celui qui a été aveugle constitue le sommet du récit: «Crois-tu au Fils de l'homme?» (Jn 9,35). Cet homme reconnaît le signe accompli par Jésus et passe de la lumière des yeux à la lumière de la foi: «Je crois, Seigneur!» (Jn 9,38). Il faut souligner comment une personne simple et sincère, accomplit, de façon progressive, un chemin de foi: dans un premier moment, il rencontre Jésus comme un «homme» parmi d'autres, puis il le considère comme un «prophète», et enfin, ses yeux s'ouvrent et il le proclame «Seigneur». En opposition avec la foi de l'aveugle guéri, il y a l'endurcissement du coeur des Pharisiens qui ne veulent pas accepter le miracle, parce qu'ils refusent d'accueillir Jésus comme le Messie. La foule, au contraire, s'arrête pour discuter sur l'événement et reste à distance et indifférente. Les parents de l'aveugle eux-mêmes sont vaincus par la peur du jugement des autres.

Et nous, quelle attitude assumons-nous devant Jésus? Nous aussi, à cause du péché d'Adam, nous sommes nés «aveugles», mais dans la source baptismale, nous avons été illuminés par la grâce du Christ. Le péché avait blessé l'humanité en la destinant à l'obscurité de la mort, mais dans le Christ, resplendit la nouveauté de la vie, et l’objectif auquel nous sommes appelés. En Lui, revigorés par l'Esprit Saint, nous recevons la force pour vaincre le mal et pour faire le bien. En effet, la vie chrétienne est une conformation continuelle au Christ, image de l'homme nouveau, pour arriver à la pleine communion avec Dieu. Le Seigneur Jésus est «la lumière du monde» (Jn 8,12), parce qu'en Lui «resplendit la connaissance de la gloire de Dieu» (2Co 4,6) qui continue à révéler dans la trame complexe de l'histoire quel est le sens de l'existence humaine. Dans le rite du baptême, la remise du cierge, allumé au grand cierge pascal, symbole du Christ ressuscité, est un signe qui aide à accueillir ce qui se produit dans le sacrement. Quand notre vie se laisse illuminer par le mystère du Christ, elle fait l'expérience de la joie d'être libérée de tout ce qui en menace la pleine réalisation. En ces jours, où nous nous préparons à Pâques, ravivons en nous le don reçu au baptême, cette flamme qui risque parfois d'être étouffée. Nourrissons-la de la prière et de la charité pour le prochain.

A la Vierge Marie, Mère de l'Eglise, confions ce chemin de carême, afin que nous puissions tous rencontrer le Christ, Sauveur du monde.

À l'issue de l'Angelus :

Chers frères et soeurs, c'était hier le sixième anniversaire de la mort de mon bien-aimé prédécesseur, le vénérable Jean-Paul II. En raison de sa prochaine béatification, je n'ai pas célébré la traditionnelle Messe d’intention, mais je l'ai rappelé avec affection dans ma prière, comme vous tous je pense. Alors qu’à travers le chemin du carême, nous nous préparons à la fête de Pâques, nous nous approchons avec joie du jour où nous pourrons vénérer comme bienheureux ce grand Souverain Pontife et grand Témoin du Christ, et nous confier encore plus à son intercession.

Je salue cordialement les pèlerins francophones et particulièrement les élèves et les familles du collège Saint-Jean de Passy. L’évangile de ce dimanche pose à chacun de nous la question essentielle de la foi : «Crois-tu au Fils de l’homme?» Puisse la réponse immédiate et joyeuse de l’aveugle-né devenir la nôtre: «Oui, je crois Seigneur!» En acceptant la lumière de vérité qui vient du Christ, en soumettant notre intelligence à la révélation qui la dépasse et la comble, nous ouvrons notre coeur à l’Esprit. Dans une sincère révision de vie, accueillons la grâce rénovatrice du sacrement de Pénitence qui purifie notre regard. Que la Vierge Marie, modèle de la foi de l’Eglise, intercède pour nous durant ce Carême! Bon pèlerinage à tous!



Place Saint-Pierre

Dimanche 10 avril 2011



333 Chers frères et soeurs,

Deux semaines seulement nous séparent de Pâques et les lectures bibliques de ce dimanche parlent toutes de la Résurrection. Pas encore de celle de Jésus, qui fera irruption comme une nouveauté absolue, mais de notre résurrection, celle à laquelle nous aspirons, et que justement le Christ nous a donnée, en ressuscitant des morts. En effet, la mort représente pour nous comme un mur qui nous empêche de voir au-delà; et pourtant notre coeur se tend au-delà de ce mur, et même si nous ne pouvons pas connaître ce qu'il cache, pourtant nous y pensons, nous l'imaginons, en exprimant notre désir d'éternité par des symboles.

Au peuple juif, en exil loin de la Terre d'Israël, le prophète Ezéchiel annonce que Dieu ouvrira les tombeaux des déportés et les fera revenir sur leur terre, pour qu'ils y reposent en paix (cf. Ez
Ez 37,12-14). Cette aspiration ancestrale de l'homme à être enterré avec ses ancêtres est une aspiration à une «patrie» qui l'accueille au terme des fatigues terrestres. Cette conception ne comporte pas encore l'idée d'une résurrection personnelle de la mort, qui apparaît seulement vers la fin de l'Ancien Testament, et qui n'était encore pas accueillie par tous les juifs au temps de Jésus. Du reste chez les chrétiens aussi, il n'est pas rare que la foi dans la résurrection et dans la vie éternelle s'accompagne de nombreux doutes, de beaucoup de confusion, parce qu'il s'agit toujours d'une réalité qui dépasse les limites de notre raison, et requiert un acte de foi. Dans l'Evangile d'aujourd'hui — la résurrection de Lazare — nous écoutons la voix de la foi dans la bouche de Marthe, soeur de Lazare. A Jésus qui lui dit: «Ton frère ressuscitera», elle répond: «Je sais qu'il ressuscitera au dernier jour, à la résurrection» (Jn 11,23-24). Mais Jésus répond: «Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s'il meurt, vivra» (Jn 11,25-26). Voilà la véritable nouveauté, qui surgit et franchit toutes les barrières! Le Christ abat le mur de la mort, en Lui habite toute la plénitude de Dieu, qui est la vie, la vie éternelle. C'est pourquoi la mort n'a pas eu de pouvoir sur lui: et la résurrection de Lazare est le signe de sa domination totale sur la mort physique, qui devant Dieu est comme un sommeil (cf. Jn Jn 11,11).

Mais il est une autre mort, qui a coûté au Christ la lutte la plus dure, et même le prix de la croix: c'est la mort spirituelle, le péché, qui menace de ruiner l'existence de chaque homme. Le Christ est mort pour vaincre cette mort, et sa résurrection n'est pas un retour à la vie précédente, mais l'ouverture d'une réalité nouvelle, une «terre nouvelle», finalement unie à nouveau au Ciel de Dieu. C'est pourquoi saint Paul écrit: «Si l'Esprit de Dieu, qui a ressuscité Jésus d'entre les morts, habite en vous, celui qui a ressuscité le Christ d'entre les morts, donnera la vie aussi à vos corps mortels, par son Esprit qui habite en vous» (Rm 8,11). Chers frères, adressons-nous à la Vierge Marie, qui participe déjà à cette résurrection, afin qu'elle nous aide à dire avec foi: «Oui, Seigneur, je crois que tu es le Christ, le Fils de Dieu» (Jn 11,27), à découvrir vraiment qu’Il est notre salut.

À l'issue de l'Angelus:

Chers pèlerins francophones, avec l’évangile de ce dernier dimanche de Carême nous voici face au mystère ultime de notre existence: «Je suis la résurrection et la vie… Le crois-tu?» La communion avec le Christ, aujourd’hui, nous prépare à franchir l’obstacle de la mort pour vivre éternellement en Lui. Ainsi se révèle le sens ultime de notre vie terrestre et sa dimension authentique et définitive: notre vocation est unique, à savoir divine. Confions-nous à la Vierge Marie pour nous plonger comme elle dans la mort et la résurrection de son Fils et avoir la vie éternelle! Je vous bénis de grand coeur ainsi que vos familles!

Chers frères et soeurs polonais! Aujourd’hui, tandis que vous célébrez l’anniversaire de la catastrophe aérienne à proximité de Smolensk, dans laquelle a perdu la vie le président de votre pays et d’autres personnalités qui se rendaient à la commémoration à Katyn, je m’unis à vous en cette prière particulière de votre nation. Que le Christ, notre vie et résurrection, les accueille dans sa gloire et vous réconforte dans cette douloureuse expérience. De tout coeur je bénis votre patrie et tous les Polonais.


XXVIe JOURNÉE MONDIALE DE LA JEUNESSE



Angelus Benoit XVI 20021