Discours 2005-2013 265

AUX PARTICIPANTS AU CONGRÈS INTERNATIONAL PROMU PAR L'ACADÉMIE PONTIFICALE POUR LA VIE Salle des Suisses du Palais pontifical de Castelgandolfo Samedi 16 septembre 2006



Vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Mesdames, messieurs!

J'adresse à tous mon salut cordial. La rencontre avec des savants et des experts tels que vous, qui vous consacrez à la recherche visant au traitement de maladies qui frappent gravement l'humanité, est pour moi un motif de réconfort particulier. Je suis reconnaissant aux organisateurs qui ont promu ce Congrès sur un thème qui a acquis ces dernières années une importance croissante. Le thème spécifique du Symposium est formulé de façon adaptée à travers une interrogation ouverte à l'espérance: "Les cellules souches: quel avenir pour la thérapie?". Je remercie le Président de l'Académie pontificale pour la Vie, Mgr Elio Sgreccia, pour les paroles aimables qu'il m'a adressées également au nom de la Fédération internationale des Associations des Médecins catholiques (FIAMC), association qui a coopéré à l'organisation du Congrès et qui est représentée ici par le Président sortant, le Prof. Gianluigi Gigli, et par le Président élu, le Prof. Simon de Castellvi.

Lorsque la science s'applique à soulager la souffrance et lorsque, sur ce chemin, elle découvre de nouvelles ressources, elle se révèle doublement riche en humanité: en vertu de l'effort de l'intelligence investie dans la recherche et en vertu du bénéfice espéré pour tous ceux qui sont frappés par la maladie. Les personnes qui fournissent les moyens financiers et qui encouragent les structures d'études nécessaires participent elles aussi au mérite de ce progrès sur la voie de la civilisation. Je voudrais répéter en cette circonstance ce que j'ai eu l'occasion d'affirmer au cours d'une récente audience: "Le progrès ne peut être authentique que s'il rend service à la personne humaine et si la personne humaine elle-même grandit, non seulement au niveau de son potentiel technique, mais aussi de sa capacité morale" (Entretien du Saint-Père avec des journalistes, 5 août 2006). A cet égard, la recherche sur les cellules souches somatiques mérite une approbation et un encouragement lorsqu'elle conjugue de façon heureuse à la fois le savoir scientifique, la technologie la plus avancée dans le domaine biologique et l'éthique qui postule le respect de l'être humain à tous les stades de son existence. Les perspectives ouvertes par ce nouveau chapitre de la recherche sont en elles-mêmes fascinantes, car elles laissent entrevoir la possibilité de soigner des maladies qui comportent la dégénérescence des tissus, avec les risques conséquents d'invalidité et de mort pour ceux qui en sont atteints.

Comment ne pas ressentir le devoir de louer tous ceux qui s'appliquent à cette recherche et tous ceux qui en soutiennent l'organisation et les coûts. Je voudrais en particulier exhorter les structures scientifiques dont l'inspiration et l'organisation sont liées à l'Eglise catholique à accroître ce style de recherche et à établir les contacts les plus étroits entre eux et avec tous ceux qui poursuivent de façon adéquate l'objectif de soulager la souffrance humaine. Qu'il me soit également permis de souligner, face aux accusations fréquentes et injustes d'insensibilité adressées à l'Eglise, le soutien constant que celle-ci a apporté, au cours de son histoire bimillénaire, à la recherche visant au traitement des maladies et au bien de l'humanité. Si elle a fait preuve de résistance - et elle le fait encore - celle-ci concernait et concerne les formes de recherche qui prévoient la suppression programmée d'êtres humains déjà existants, même s'ils ne sont pas encore nés. Dans ces cas, la recherche, quels que soient les résultats d'utilité thérapeutique, ne se place pas véritablement au service de l'humanité. Elle passe en effet par la suppression de vies humaines qui ont une égale dignité par rapport aux autres personnes humaines et aux chercheurs eux-mêmes. L'histoire elle-même a condamné par le passé et condamnera à l'avenir un tel type de science, non seulement parce qu'elle est privée de la lumière de Dieu, mais également parce qu'elle est privée d'humanité. Je voudrais répéter ici ce que j'écrivais il y a quelques temps: "Il existe un obstacle que nous ne pouvons pas éviter: personne ne peut disposer de la vie humaine. Il faut établir une limite infranchissable à ce que nous pouvons faire et expérimenter. L'homme n'est pas un objet dont nous pouvons disposer, mais chaque personne représente la présence de Dieu dans le monde" (Joseph Ratzinger, Dieu et le monde).

Face à la suppression directe de l'être humain, il ne peut y avoir ni compromis ni tergiversation; on ne peut concevoir qu'une société puisse combattre de façon efficace le crime, lorsqu'elle-même légalise le délit dans le domaine de la vie à naître. A l'occasion de récents Congrès de l'Académie pontificale pour la Vie, j'ai eu l'occasion de répéter l'enseignement de l'Eglise, adressé à tous les hommes de bonne volonté, en ce qui concerne la valeur humaine de l'enfant venant d'être conçu, même lorsqu'il est considéré avant son implantation dans l'utérus. Le fait que, au cours de ce Congrès, vous ayez exprimé l'engagement et l'espérance de poursuivre de nouveaux résultats thérapeutiques en utilisant les cellules du corps adulte sans avoir recours à la suppression d'êtres humains venant d'être conçus, et le fait que les résultats récompensent vos travaux, constituent une confirmation de la validité de l'invitation constante de l'Eglise au respect total de l'être humain dès sa conception. Le bien de l'homme doit être recherché non seulement dans les finalités universellement valables, mais également dans les méthodes utilisées pour les atteindre: la juste fin ne peut jamais justifier des moyens intrinsèquement illicites. Il ne s'agit pas seulement d'une question de critère adapté pour l'emploi des ressources économiques limitées, mais également, et surtout, de respect pour les droits fondamentaux de l'homme dans le domaine même de la recherche scientifique.
266 Je souhaite que Dieu, qui agit pour le bien de tous, accorde à votre effort, qu'Il soutient assurément, la joie de la découverte de la vérité, la sagesse dans la considération et dans le respect de chaque être humain, et le succès dans la recherche de remèdes efficaces à la souffrance humaine. En gage de ce voeu, je vous donne de tout coeur, ainsi qu'à vos collaborateurs, aux membres de vos familles, et aux patients qui bénéficieront des ressources de votre talent et du fruit de votre travail, une Bénédiction affectueuse, que j'accompagne de l'assurance d'un souvenir particulier dans la prière.


AU CARD. TARCISIO BERTONE, SECRÉTAIRE D'ETAT REÇU EN AUDIENCE AVEC LES MEMBRES DE LA FAMILLE Castelgandolfo Lundi 18 septembre 2006



Eminence,
Chers amis,

Je suis heureux de saluer ici une fois de plus publiquement, le nouveau Secrétaire d'Etat, ainsi que toute sa famille. Nous nous sommes connus lorsque Son Eminence était Consulteur de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Il m'a beaucoup aidé dans certains entretiens difficiles que nous avons eus en 1988.

Lorsque, par la suite, le cher Mgr Bovone est passé à la Congrégation pour les Causes des Saints, il fut nécessaire de chercher un nouveau Secrétaire pour la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Et je n'ai pas eu besoin de réfléchir longtemps, car les souvenirs de ce travail commun étaient si vivants que j'ai compris que le Seigneur m'avait déjà indiqué le successeur. De très belles années de collaboration à la Doctrine de la Foi ont suivi. Saint Eusèbe de Vercelli a toujours été présent, je ne sais pas si aujourd'hui également, sa présence continue à préserver la foi. Nous avons fait ce que nous avons pu. J'ai eu la possibilité de voir Vercelli et de connaître ce bel archidiocèse. A cette époque, en arrivant à la Congrégation, le Cardinal Bertone avait "perdu" la pourpre qu'il avait eue à Vercelli. Puis, en allant à Gênes, il a retrouvé la pourpre et a eu également l'occasion de voir les beautés de Gênes.

Ensuite est arrivé le moment pour certains Cardinaux de la Curie nés en 1927 de présenter leurs démissions. Ainsi, je me suis à nouveau rappelé des années de travail en commun, et le Seigneur m'a accordé la grâce du "oui" de Son Eminence.

Avec courage, nous commençons ensemble notre chemin. Je suis heureux de voir qu'il est soutenu par une famille forte. Mes meilleurs voeux à vous tous!


À S.E. M. MARTIN BOLLDORF AMBASSADEUR D'AUTRICHE PRÈS LE SAINT-SIÈGE Castelgandolfo Vendredi 18 september 2006

À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Excellence!
267 Monsieur l'Ambassadeur,

C'est avec joie que je vous accueille à l'occasion de la présentation des Lettres qui vous accréditent en tant qu'Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République d'Autriche près le Saint-Siège. Je suis extrêmement reconnaissant pour les paroles cordiales que vous m'avez adressées et pour les salutations que vous me transmettez de la part du Président, M. Heinz Fisher.

Je transmets pour ma part au chef de l'Etat, au gouvernement fédéral et au peuple autrichien mes meilleurs voeux, à travers lesquels j'exprime l'espérance et la certitude qu'au cours de votre mandat, les relations traditionnellement positives, aujourd'hui encore, entre l'Autriche et le Saint-Siège, pourront être poursuivies et renforcées.

En effet, les liens entre l'Autriche et le Saint-Siège sont anciens et fructueux. Cette union est plus qu'un fait historique. Elle est fondée avant tout sur le fait que la majorité de la population autrichienne appartient à l'Eglise catholique. Cela donne déjà lieu à des orientations, à des options et à des intérêts communs, en particulier en ce qui concerne l'être humain, sa liberté, sa dignité et son avenir, dans le temps et dans la société. L'Etat et l'Eglise sont tous deux préoccupés, à différents niveaux, par le bien-être des êtres humains. Cela est au bénéfice des personnes lorsque, dans la politique autrichienne - dans les petites et les grandes villes, dans les circonscriptions et les régions, au Parlement et en particulier dans le gouvernement - celles-ci se laissent guider par une "vision du monde" dans laquelle les valeurs transmises par la foi chrétienne sont déterminantes.

C'est pourquoi, ceux qui, comme dans la Révélation judéo-chrétienne, placent l'homme créé par Dieu au centre de la création et de l'histoire, orientent leur action sociale et politique vers le bien authentique des êtres humains, dont les intérêts et la dignité ne peuvent jamais être subordonnés aux paramètres de "ce qui est faisable", de l'utilité ou de la productivité. Toute politique humaine authentique découle toujours du fait que la plus grande richesse d'une nation est constituée par ses habitants.

L'Europe et, en particulier, la poursuite du développement du processus de l'Union européenne, représentent des "intérêts communs" que partagent le Saint-Siège et l'Autriche.

Sans doute comme nulle part ailleurs dans le monde, l'histoire et la culture de l'Europe ont été formées par le christianisme. Cela s'applique également à la région dans laquelle vivent 457 millions d'habitants, provenant de 25 pays membres de l'Union européenne, dont la majorité se déclare de foi chrétienne. L'espace régional et national, la patrie la plus proche et la plus éloignée, auquel, en règle générale, la majorité des personnes puise les éléments les plus importants de son identité culturelle, devient toujours plus une patrie commune européenne. La mobilité qui franchit les frontières et les moyens de communication sociale y contribuent de façon importante. En tant que berceau de l'histoire et de la culture du continent européen au cours des siècles, l'Eglise catholique accueille en grande partie avec satisfaction ce développement. Là où les hommes et les peuples se considèrent membres de la même famille, les possibilités de paix, de solidarité, d'échange et d'enrichissement réciproque augmentent.

La société moderne des frontières ouvertes se laisse définir toujours moins en termes de nationalité. Pour cette raison, ainsi que de leur profonde conscience historique, les Autrichiens, semblables à des parents de leurs voisins, se sentent à juste titre européens, citoyens et citoyennes de l'Europe unie qui prend toujours plus forme. L'Autriche est un pays qui voyage en Europe. Sa riche histoire d'ancien pays composé de plusieurs peuples l'a prédestinée à un engagement européen convaincu dans le cadre de directives politiques et institutionnelles et au-delà de celles-ci. Enfin, l'effort apporté au soin et à l'approfondissement des relations de bon voisinage et à la collaboration confiante de tous les membres pour la paix et le bien des peuples de la région du Danube est une constante de la politique extérieure autrichienne. Ces principes et ces expériences ont également inspiré la présidence autrichienne du Conseil de l'Union européenne dans la première moitié de l'année 2006, que l'on a voulu interpréter comme "service à l'Europe" et qui a été centrée sur la mission d'instaurer la confiance entre les Etats-membres de l'Union européenne.

Monsieur l'Ambassadeur, la voie de l'intégration européenne, le succès de l'édification d'une grande maison européenne, sous le toit de laquelle les peuples du continent forgent leur propre avenir dans la paix, le respect et l'échange réciproque, repose essentiellement sur la confiance que les citoyens placent dans un tel projet. Dans les débats sur le processus d'élargissement de l'Union européenne, d'une part, et sur la Constitution européenne, d'autre part, émergent de nouvelles questions d'importance fondamentale. En définitive, il s'agit toujours de la question de l'identité et des bases spirituelles sur lesquelles s'appuie la communauté des peuples et des Etats européens. Ni une union économique, plus ou moins valable, ni un règlement bureaucratique réglementant la coexistence ne pourront jamais satisfaire pleinement les attentes des personnes pour l'Europe. Les racines les plus profondes d'une "réciprocité" européenne solide et exempte de toute crise se trouvent plutôt dans les convictions et les valeurs communes de l'histoire et de la tradition chrétienne et humaniste du continent. Sans une authentique communauté de valeurs, il n'est pas possible d'édifier une communauté de droit fiable, ce qui est en revanche ce que les personnes attendent. Aujourd'hui, en Europe, l'Autriche est l'un des plus petits pays. Toutefois, elle peut offrir une importante contribution afin qu'en Europe, soient toujours et en toute circonstance respectés les droits et la dignité inviolable de l'homme, créé à l'image et à la ressemblance de Dieu, et le rôle de la famille en tant que cellule fondamentale de la société; une contribution afin que l'Europe, dans le nécessaire processus d'autodétermination, tourne son regard vers Dieu, Créateur de toute la vie, dans lequel se rencontrent la justice et l'amour.

Votre accréditation, Monsieur l'Ambassadeur, est également pour moi l'occasion de répéter une fois de plus avec satisfaction que dans votre cher pays subsiste une coopération féconde et bénéfique entre l'Etat et l'Eglise pour le bien de tous les habitants. Nous avons parlé des divers domaines de cette coopération lors de précédentes occasions. Je désire mentionner ici uniquement le développement des écoles supérieures en accord avec l'Eglise et souligner l'engagement de l'Etat, fondé sur le Concordat, pour l'enseignement de la religion catholique qui, en Autriche, fait partie des matières obligatoires. Face au nombre croissant d'étudiants qui n'appartiennent à aucune confession religieuse, l'Etat a le devoir de faire connaître également à ces enfants et à ces jeunes les bases de la pensée occidentale et de la "civilisation de l'amour" marquée par l'esprit chrétien.

Monsieur l'Ambassadeur, l'Autriche est célèbre pour sa grande ouverture à la mission universelle du Successeur de Pierre au service de la diffusion de l'Evangile de l'espérance et de la foi libératrice en Jésus Christ, Seigneur et Sauveur de l'humanité, qui désire apporter à tous les peuples réconciliation, justice et paix. Je vous dis également que le monde entier est reconnaissant pour l'aide que les catholiques autrichiens et d'innombrables personnes de bonne volonté offrent dans leur patrie pour les projets sociaux, humanitaires et missionnaires. Au cours de votre activité diplomatique, vous vous êtes déjà familiarisé avec la mission du Saint-Siège. J'ai l'assurance que votre nouvelle mission à Rome vous apportera joie et pleine satisfaction. A travers l'intercession de la Mère de Dieu de Marienzell, de saint Charles d'Autriche et de tous les patrons de votre pays, je vous donne de tout coeur, Monsieur l'Ambassadeur, ainsi qu'aux membres de l'Ambassade de la République d'Autriche près le Saint-Siège et à votre chère famille, ma Bénédiction apostolique.






AUX PARTICIPANTS AU CONGRÈS DES ÉVÊQUES NOMMÉS AU COURS DE L'ANNÉE Salle des Suisses, Castelgandolfo Jeudi 21 septembre 2006

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Chers frères dans l'épiscopat!

J'adresse mon salut cordial à chacun de vous. Je l'adresse en particulier à Monsieur le Cardinal Giovanni Battista Re, qui s'est fait l'interprète de vos sentiments, et je l'étends avec affection à ceux qui ont organisé et coordonné votre rencontre. Au cours de ces journées, vous avez écouté le témoignage de plusieurs chefs de dicastères de la Curie romaine et d'Evêques, qui vous ont aidés à réfléchir sur certains aspects du ministère épiscopal de grande importance pour notre temps. Aujourd'hui, c'est le Pape qui vous accueille avec joie et il est heureux de partager avec vous les sentiments et les attentes que vous vivez au cours de ces premiers mois de votre ministère épiscopal. Vous avez certainement déjà fait l'expérience de la façon dont Jésus, le Bon Pasteur, agit dans les âmes à travers sa grâce. "Ma grâce te suffit" (
2Co 12,9), s'entendit répondre l'Apôtre Paul lorsqu'il demanda au Seigneur de lui épargner les souffrances. Que cette même conscience nourrisse toujours votre foi, vous incite à rechercher des voies pour toucher le coeur de chacun avec ce sain optimisme que vous devez toujours faire rayonner autour de vous.

Dans l'Encyclique Deus caritas est, j'ai observé que les Evêques ont pour première responsabilité d'édifier l'Eglise comme famille de Dieu et comme lieu d'aide réciproque et de disponibilité (cf. n. 32). Pour pouvoir accomplir cette mission, vous avez reçu, avec la consécration épiscopale, trois charges particulières: le munus docendi, le munus sanctificandi et le munus regendi, qui, dans leur ensemble, constituent le munus pascendi. En particulier, la finalité du munus regendi est la croissance dans la communion ecclésiale, c'est-à-dire l'édification d'une communauté unie dans l'écoute de l'enseignement des apôtres, dans la fraction du pain, dans les prières et dans l'union fraternelle (cf. Ac Ac 2,42). Etroitement lié aux tâches d'enseigner et de sanctifier, celle de gouverner - le munus regendi - constitue pour l'Evêque un authentique acte d'amour envers Dieu et envers son prochain, qui s'exprime dans la charité pastorale. C'est ce qu'a indiqué avec autorité le Concile Vatican II dans la Constitution Lumen gentium, en proposant comme modèle aux Evêques le Christ, Bon Pasteur, venu non pour être servi, mais pour servir (cf. n. 27). Dans ce sillon, la Lettre apostolique post-synodale Pastores gregis invite l'Evêque à s'inspirer constamment de l'icône évangélique du lavement des pieds (cf. n. 42). Seul le Christ, qui est l'amour incarné de Dieu (cf. Deus caritas est ), peut nous indiquer avec autorité comment aimer et servir l'Eglise.

Chers frères, sur l'exemple du Christ, que chacun de vous, dans le soin quotidien du troupeau, se fasse "tout à tous" (cf. 1Co 9,22), en proposant la vérité de la foi, en célébrant les sacrements de notre sanctification et en témoignant de la charité du Seigneur. Accueillez avec une âme ouverte ceux qui frappent à votre porte: conseillez-les, réconfortez-les et soutenez-les sur le chemin de Dieu, en cherchant à conduire chacun à cette unité dans la foi et dans l'amour dont vous devez être dans vos diocèses, par la volonté du Seigneur, le principe visible et le fondement (cf. Lumen gentium LG 23). Faites preuve de cette sollicitude en premier lieu à l'égard des prêtres. Agissez toujours avec eux comme des pères et des grands frères qui savent écouter, accueillir, réconforter et, lorsque cela est nécessaire, aussi corriger; recherchez leur collaboration et soyez proches d'eux, en particulier dans les moments significatifs de leur ministère et de leur vie. Cherchez ensuite à faire preuve d'une même sollicitude à l'égard des jeunes qui se préparent à la vie sacerdotale et religieuse.

En vertu de la charge de gouverner (cf. Lumen gentium LG 27), l'Evêque est en outre appelé à juger et à organiser la vie du Peuple de Dieu confié à ses soins pastoraux à travers des lois, des orientations et des suggestions, selon ce qui est prévu par la discipline universelle de l'Eglise. Ce droit et devoir de l'Evêque est plus que jamais important, afin que la Communauté diocésaine soit unie en son sein et avance en profonde communion de foi, d'amour et de discipline avec l'Evêque de Rome et avec toute l'Eglise. Chers frères dans l'épiscopat, je vous exhorte donc à être des gardiens attentifs de cette communion ecclésiale et à la promouvoir et la défendre en veillant constamment sur le troupeau dont vous avez été constitués les Pasteurs. Il s'agit d'un acte d'amour qui demande discernement, courage apostolique et bonté patiente en cherchant à convaincre et à faire participer, afin que vos orientations soient accueillies de bon gré et exécutées avec conviction et promptitude. En obéissant docilement à l'Evêque, chaque fidèle contribue de manière responsable à l'édification de l'Eglise. Cela sera possible si, conscients de votre mission et de vos responsabilités, vous savez nourrir en chacun d'eux le sens d'appartenance à l'Eglise et la joie de la communion fraternelle, en faisant appel aux institutions prévues à cet effet par la discipline ecclésiale. Construire la communion ecclésiale doit constituer votre engagement quotidien.

La Lettre apostolique Pastores gregis et le Directoire pour le ministère pastoral des Evêques insistent en indiquant à chaque pasteur que son autorité objective doit être illustrée par sa vie, qui doit faire autorité. La sérénité dans les relations, la délicatesse dans le comportement et la simplicité de vie sont des qualités qui enrichissent sans aucun doute la personnalité humaine de l'Evêque. Dans la "Règle pastorale", saint Grégoire le Grand écrit que "le gouvernement des âmes est l'art des arts" (n. 1). Un art qui exige la croissance constante des vertus, parmi lesquelles je désire rappeler celle de la prudence, définie par saint Bernard comme mère de la force. La prudence vous rendra patients avec vous-mêmes et avec les autres, courageux et fermes dans les décisions, miséricordieux et justes, uniquement soucieux de votre salut et de celui de vos frères "avec crainte et tremblement" (Ph 2,12). Le don total de vous-mêmes, qu'exige le soin du troupeau du Seigneur, a besoin du soutien d'une intense vie spirituelle, nourrie par une prière personnelle et communautaire assidue. Un contact constant avec Dieu devra donc caractériser vos journées et accompagner chacune de vos activités. Vivre en union intime avec le Christ vous aidera à atteindre cet équilibre nécessaire entre le recueillement intérieur et l'effort nécessaire demandé par les multiples activités de la vie, en évitant de tomber dans un activisme exagéré. Le jour de votre consécration épiscopale, vous avez fait la promesse de prier sans jamais vous lasser pour votre peuple. Chers frères, restez toujours fidèles à cet engagement qui vous rendra capables d'exercer de manière irrépréhensible votre ministère pastoral. A travers la prière, les portes de votre coeur s'ouvrent au projet de Dieu, qui est un projet d'amour auquel Il vous a appelés en vous unissant plus intimement au Christ à travers la grâce de l'épiscopat. En le suivant, Lui le Pasteur et l'Evêque de vos âmes (1P 2,25), vous serez incités à tendre sans vous lasser vers la sainteté, qui est le but fondamental de l'existence de chaque chrétien.

Chers frères, en vous remerciant de votre visite appréciée, je désire vous assurer de mon souvenir quotidien au Seigneur pour votre service ecclésial, que je confie à la Vierge Mater Ecclesiae. J'invoque sa protection sur vous, sur vos diocèses et sur votre ministère. Avec ces sentiments, je vous donne, ainsi qu'à ceux qui vous sont chers, ma Bénédiction apostolique spéciale.


AUX PARTICIPANTS A L'ASSEMBLÉE PLÉNIERE DU CONSEIL PONTIFICAL POUR LES LAÏCS Salle des Suisses, Castelgandolfo Vendredi 22 septembre 2006



269 Messieurs les Cardinaux,
vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
chers frères et soeurs!

J'ai aujourd'hui la joie de vous rencontrer pour la première fois, chers membres et consulteurs du Conseil pontifical pour les Laïcs, réunis pour votre Assemblée plénière. Votre Conseil pontifical a la particularité de compter parmi ses membres et consulteurs, à côté des Cardinaux, des Evêques, des prêtres et des religieux, une majorité de fidèles laïcs, provenant de divers continents et pays, et des expériences apostoliques les plus diverses. Je vous salue tous avec affection et je vous remercie pour le service que vous prêtez à la Chaire de Pierre et à l'Eglise présente partout dans le monde. Mes salutations s'adressent en particulier au Président, Mgr Stanislaw Rylko, que je remercie de ses paroles cordiales et dévouées, au Secrétaire, Mgr Josef Clemens, ainsi qu'à tous ceux qui oeuvrent quotidiennement dans votre Dicastère.

Au cours des années de mon service au sein de la Curie romaine, j'avais déjà pu me rendre compte de l'importance croissante acquise par le Conseil pontifical pour les Laïcs dans l'Eglise; une importance que je constate plus encore depuis que le Seigneur m'a appelé à succéder au Serviteur de Dieu Jean-Paul II dans la conduite de tout le peuple chrétien, parce qu'il m'est donné de voir plus directement le travail que vous accomplissez. J'ai eu l'occasion, en effet, de présider deux rencontres d'une indubitable importance ecclésiale organisées par votre dicastère: la Journée mondiale de la Jeunesse, qui s'est tenue à Cologne au mois d'août de l'année dernière, et la Rencontre qui s'est déroulée Place Saint-Pierre, lors de la Veillée de Pentecôte de cette année, en présence de plus de cent Mouvements ecclésiaux et Communautés nouvelles. Je pense ensuite au premier Congrès latino-américain des Mouvements ecclésiaux et des Communautés nouvelles, que votre Conseil pontifical a organisé en collaboration avec le CELAM, à Bogota, du 9 au 12 mars 2006, en vue de la V Conférence générale de l'Episcopat latino-américain.

Après avoir examiné, lors de la précédente Assemblée plénière, la nature théologique et pastorale de la communauté paroissiale, vous affrontez à présent la question d'un point de vue pratique, en recherchant des éléments utiles pour favoriser un authentique renouveau paroissial. En effet, le thème de votre rencontre est: "La paroisse retrouvée. Parcours de renouveau". Effectivement, l'aspect théologique et pastoral et l'aspect pratique ne peuvent être dissociés, si l'on veut accéder au mystère de communion dont la paroisse est appelée à être toujours davantage le signe et l'instrument de mise en oeuvre. L'évangéliste Luc, dans les Actes des Apôtres, indique les critères essentiels pour une juste compréhension de la nature de la communauté chrétienne, et donc ensuite également de toute paroisse, lorsqu'il décrit la première communauté de Jérusalem, assidue à l'écoute de l'enseignement des Apôtres, à l'union fraternelle, à la "fraction du pain et aux prières", une communauté accueillante et solidaire au point de mettre tout en commun (cf. 2, 42; 4, 32-35).

La paroisse peut revivre cette expérience et croître dans l'entente et dans la cohésion fraternelle si elle prie sans cesse et si elle demeure à l'écoute de la Parole de Dieu, et surtout si elle participe avec foi à la célébration de l'Eucharistie présidée par le curé. Le bien-aimé Jean-Paul II écrivait à ce propos dans sa dernière Encyclique Ecclesia de Eucharistia: "La paroisse est une communauté de baptisés qui expriment et consolident leur identité surtout à travers la célébration du Sacrifice eucharistique" (n. 32). Le renouveau souhaité de la paroisse ne peut pas, par conséquent, naître uniquement d'initiatives pastorales, même si elles sont utiles et opportunes, ni encore moins de programmes élaborés de façon uniquement théorique. En s'inspirant du modèle apostolique, comme il apparaît dans les Actes des Apôtres, la paroisse "se retrouve" elle-même dans la rencontre avec le Christ, en particulier dans l'Eucharistie. Nourrie du pain eucharistique, elle croît dans la communion catholique, elle avance en pleine fidélité au Magistère et elle est toujours attentive à accueillir et à discerner les divers charismes que le Seigneur suscite dans le Peuple de Dieu. C'est de l'union constante avec le Christ que la paroisse tire sa vigueur pour s'engager ensuite sans trêve au service de ses frères, en particulier les plus pauvres, pour lesquels elle représente de fait la première référence.

Chers frères et soeurs, tout en vous exprimant ma très vive estime pour l'activité d'animation et de service que vous accomplissez, je souhaite de tout coeur que les travaux de l'Assemblée plénière contribuent à rendre les fidèles laïcs toujours plus conscients de leur mission dans l'Eglise, en particulier au sein de la communauté paroissiale, qui est une "famille" de familles chrétiennes. Je vous assure dans ce but de mon souvenir constant dans la prière et, tout en invoquant sur chacun de vous la protection maternelle de Marie, je vous donne volontiers à tous ma Bénédiction, ainsi qu'aux membres de vos familles et aux communautés auxquelles vous appartenez.


AUX ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU TCHAD EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM" Palais pontifical de Castelgandolfo Samedi 23 septembre 2006



Chers Frères dans l’Épiscopat,

270 En ces jours où vous accomplissez votre Visite ad limina, je suis heureux de vous accueillir, vous que le Seigneur a choisis pour guider le peuple de Dieu au Tchad. Votre pèlerinage à Rome vous conduit sur les pas des Apôtres Pierre et Paul, et vous permet de rencontrer le Successeur de Pierre et ses collaborateurs pour affermir votre communion avec l’Église universelle. Je souhaite que ces jours soient pour vous l’occasion de fortifier votre ardeur apostolique, afin que vos communautés en reçoivent un nouvel élan pour être une lumière qui éclaire et qui mène vers Celui qui apporte le salut. Je remercie votre Président, Mgr Jean-Claude Bouchard, Évêque de Pala, pour sa présentation des réalités ecclésiales dans votre pays. En rentrant dans vos diocèses, apportez aux prêtres, aux consacrés, aux catéchistes et à tous les fidèles, mon salut affectueux et l’assurance de ma proximité spirituelle ainsi que mes encouragements pour leur vie chrétienne!

Chers Frères dans l’Épiscopat, à l’image du Christ, Bon Pasteur, vous êtes envoyés pour être missionnaires de la Bonne Nouvelle. Continuez à remplir cette charge dans la confiance et avec courage! La sainteté de votre vie fera de vous des signes authentiques de l’amour de Dieu. Par la proclamation de l’Évangile, guidez vos communautés à la rencontre du Seigneur et aidez-les à témoigner de leur espérance, en contribuant à l’établissement d’une société plus juste, fondée sur la réconciliation et sur l’unité entre tous! La participation régulière des fidèles aux sacrements, notamment l’Eucharistie, leur donnera la force de se mettre à la suite du Christ; ils éprouveront alors le besoin de partager avec leurs frères la joie de leur rencontre avec le Seigneur. Dans le prolongement du premier Congrès eucharistique national que vos diocèses ont célébré à Moundou au début de cette année, tous auront à coeur d’approfondir leur connaissance de ce grand sacrement, afin de le faire fructifier dans leur vie. Par ailleurs, une solide formation religieuse, fondée sur de fortes convictions spirituelles, permettra aux fidèles de mener une existence conforme aux engagements de leur Baptême et de témoigner des valeurs chrétiennes dans la société.

Je voudrais saluer avec une affection particulière vos prêtres et les encourager dans leur mission difficile mais exaltante d’annoncer l’Évangile et de servir le peuple de Dieu. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner, «être prêtres, cela signifie devenir l’ami de Jésus Christ, et cela toujours davantage, avec toute notre existence» (Messe chrismale, 13 avril 2006). Dès leur formation, les prêtres seront donc incités à s’engager toujours plus intimement dans l’amitié que le Seigneur ne cesse de leur proposer. Pour assurer une telle formation dans les meilleures conditions, je vous invite à veiller attentivement sur vos séminaires, stimulant les formateurs dans leur tâche de discernement des vocations. L’amitié avec le Christ exige une recherche constante et joyeuse de communion de pensée, de volonté et d’action avec Lui, dans une obéissance humble et fidèle. Cette communion pourra se réaliser dans la mesure où le prêtre sera un authentique homme de prière. Chers Frères dans l’Épiscopat, prenez soin de la vie spirituelle de vos prêtres, les encourageant à demeurer fidèles à une règle de vie sacerdotale qui les aidera à conformer leur existence à l’appel reçu du Seigneur. Manifestez-leur votre proximité fraternelle dans leur ministère; au temps de l’épreuve et de l’incertitude, soyez celui qui réconforte et qui corrige si c’est nécessaire, les invitant à demeurer les yeux fixés sur Jésus.

Parmi les défis pastoraux à relever, se trouve l’urgence de proclamer la vérité intégrale sur le mariage et sur la famille. Il est en effet primordial de montrer que l’institution du mariage contribue au véritable développement des personnes et de la société, et permet d’assurer la dignité, l’égalité et la véritable liberté de l’homme et de la femme, ainsi que la croissance humaine et spirituelle des enfants. «Créés l’un et l’autre à la ressemblance de Dieu, l’homme et la femme, quoique différents, sont essentiellement égaux du point de vue de l’humanité» (Ecclesia in Africa ). Une sérieuse formation des jeunes favorisera un renouveau de la pastorale familiale et contribuera à lever les difficultés d’ordre social, culturel ou économique qui, pour de nombreux fidèles, sont des obstacles au mariage chrétien. Tout en préservant les valeurs essentielles de la famille africaine, puissent les jeunes de votre pays accueillir dans leur vie la beauté et la grandeur du mariage chrétien qui, dans son unicité, suppose un amour indissoluble et fidèle des époux.

L’action caritative, manifestation de l’amour du prochain, enraciné dans l’amour de Dieu, tient une grande place dans la pastorale de vos diocèses. «L’amour est le service que l’Église réalise pour aller constamment au-devant des souffrances et des besoins, même matériels, des hommes" (Deus caritas est ). Ma reconnaissance va à toutes les personnes, particulièrement aux religieuses, qui, dans vos diocèses, exercent une activité caritative au service du développement, de l’éducation et de la santé, ainsi que de l’accueil des réfugiés. En favorisant une authentique solidarité avec les personnes dans le besoin, sans aucune distinction d’origine, qu’elles n’oublient pas la spécificité ecclésiale de leurs activités et qu’elles renforcent leur conscience d’être des témoins crédibles du Christ auprès de leurs frères et de leurs soeurs.

La consolidation de la fraternité entre les différentes communautés qui composent la nation est un objectif qui exige l’engagement de tous, afin de mettre le pays à l’abri de confrontations qui ne pourraient qu’entraîner de nouvelles violences. La reconnaissance de la dignité de chacun, de l’identité de chaque groupe humain et religieux, et de sa liberté à pratiquer sa religion, fait partie des valeurs communes de paix et de justice qui doivent être promues par tous et dans lesquelles les responsables de la société civile ont un rôle important à jouer.

Je me réjouis de savoir que dans votre pays les relations entre chrétiens et musulmans sont généralement bonnes, grâce notamment à la recherche d’une meilleure connaissance mutuelle. Je vous encourage donc à poursuivre les collaborations dans un esprit de dialogue sincère et de respect réciproque, afin d’aider chacun à mener une vie conforme à la dignité reçue de Dieu, avec le souci d’une authentique solidarité et d’un développement harmonieux de la société.

Chers Frères dans l’Épiscopat, je confie votre pays à la protection maternelle de Notre-Dame, Reine de l’Afrique. Qu’elle intercède auprès de son Fils pour obtenir la paix et la justice sur ce continent si éprouvé. À vous tous, j’accorde de grand coeur la Bénédiction apostolique, ainsi qu’aux prêtres, aux religieux, aux religieuses, aux catéchistes et à tous les fidèles de vos diocèses.



Discours 2005-2013 265