Discours 2005-2013 587

AUX ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU COSTA RICA EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM" Salle Clémentine Vendredi 8 février 2008

Chers frères dans l'épiscopat,

1. Je suis très heureux de vous recevoir au terme de votre visite ad limina et cela m'offre la possibilité de vous saluer tous ensemble et de vous soutenir dans l'espérance, tellement nécessaire pour le ministère qui vous a été confié et que vous exercez avec générosité. Je remercie pour ses paroles le Président de la Conférence épiscopale, Mgr José Francisco Ulloa Rojas, qui a bien voulu présenter les défis et les espoirs qui sont les vôtres dans votre activité pastorale et exprimer votre proximité et votre communion étroite avec l'Evêque de Rome, Siège "sur lequel réside depuis toujours le primat de la Chaire apostolique" (Saint Augustin , Ep Ep 43, 3, 7).

Cette rencontre est en quelque sorte nouvelle pour certains d'entre vous, qui ont rejoint depuis peu le collège épiscopal, pour d'autres ce sont les Eglises particulières qu'ils portent dans leur coeur qui sont nouvelles et, pour tous, c'est le visage du Successeur de Pierre qui est nouveau. C'est une nouveauté qui peut contribuer à donner une plus grande intensité aux intentions de cette visite, dont l'une des plus importantes est de renouveler, sur les tombes de saint Pierre et de saint Paul, votre foi en Jésus Christ, transmise par les Apôtres, et qu'il vous incombe de garder en tant que leurs successeurs. En même temps, cela doit contribuer à raviver votre "sollicitude pour toute l'Eglise" (cf. Lumen gentium LG 23), en contribuant ainsi à élargir le coeur de tous les croyants avec la perspective de l'universalité propre au message chrétien.

2. La tâche vous revient de chercher de nouveaux moyens d'annoncer le Christ dans une situation de transformations rapides et souvent profondes, en accentuant le caractère missionnaire de toute activité pastorale. En ce sens, la récente Conférence de l'épiscopat latino-américain et des Caraïbes, célébrée à Aparecida, a mis en évidence qu'accueillir et faire sien le message de l'Evangile est un devoir qui incombe à chacun et à chaque génération, dans les différentes circonstances et phases de la vie.

588 Le peuple du Costa Rica a, en outre, besoin de revitaliser constamment ses anciennes et profondes racines chrétiennes, sa vigoureuse religiosité populaire et sa profonde piété mariale, afin de récolter les fruits d'une vie digne des disciples de Jésus, alimentée par la prière et les sacrements, par la cohérence de l'existence quotidienne avec la foi professée et par l'engagement à participer activement à la mission d'"ouvrir le monde pour qu'y entre Dieu et qu'y entre ainsi la vérité, l'amour, le bien" (cf. Spe Salvi ).

3. Le Seigneur au Costa Rica a été prodigue avec sa vigne, où se trouve un bon nombre de prêtres qui sont les principaux collaborateurs de l'évêque dans son ministère pastoral. C'est pour cela qu'ils ont besoin, au-delà de directions et de critères clairs, d'une formation permanente et d'un soutien dans l'exercice de leur ministère, une proximité justement de "fils et d'amis" (Lumen gentium
LG 28), qui touche leur coeur, en les encourageant dans leurs efforts, en les aidant dans leurs difficultés et, si cela était nécessaire, en corrigeant et en imposant les remèdes à d'éventuelles situations qui assombrissent l'image du sacerdoce et de l'Eglise elle-même.

Ce grand patrimoine de toute l'Eglise particulière se conserve et s'enrichit en portant une grande attention aux séminaristes, dont l'idonéité demande un discernement rigoureux, et auxquels une formation abstraite et formelle ne suffit pas, parce qu'ils s'apprêtent à vivre eux-mêmes les paroles de l'Apôtre: "ce que nous avons vu et entendu, nous vous l'annonçons, afin que vous soyez en communion avec nous. Quant à notre communion, elle est avec le Père et avec son Fils Jésus Christ" (1Jn 1,3). Il s'agit en outre d'une perspective qui peut susciter chez les jeunes l'enthousiasme pour Jésus et pour sa mission salvifique, en faisant naître dans leur coeur le souhait de participer à elle comme prêtres et comme personnes consacrés.

4. Chers évêques, vous connaissez bien les risques d'une vie de foi faible et superficielle, lorsqu'elle se mesure avec les flatteries comme le prosélytisme des sectes et des groupes pseudo-religieux, avec les nombreuses promesses d'un bien-être facile et immédiat, mais qui débouchent sur les désillusions et les déceptions, ou avec la diffusion d'idéologies qui prétendent élever l'être humain, mais qui en réalité le banalisent. Dans une situation comme celle-ci, acquiert une valeur inestimable l'annonce de la "grande espérance de l'homme, qui résiste malgré toutes les désillusions, [et qui] peut être seulement Dieu - le Dieu qui nous a aimés et qui nous aime toujours "jusqu'au bout"" (Spe Salvi ).

Un témoignage vivant de cette espérance, qui élève l'âme et donne de la force dans les préoccupations de la vie humaine, revient particulièrement aux religieux, aux religieuses et aux personnes consacrées, qui pour leur vocation sont appelés avant tout à être signes du "mystère du Royaume de Dieu, qui agit déjà dans l'histoire" (Vita consecrata VC 1). Ils sont par conséquent un don précieux pour l'Eglise "comme un élément décisif pour sa mission, puisqu'elle "fait comprendre la nature intime de la vocation chrétienne"" (ibid., n. 3), et il faut remercier le Seigneur pour leur présence dans chaque Eglise particulière.

Il revient également aux fidèles laïcs de prendre part à cette mission suivant leur vocation spécifique, et il est beau de constater leur collaboration efficace au maintien et à la défense de la flamme de la foi, au moyen de la catéchèse et de la coopération avec les paroisses et les diverses organisations pastorales des diocèses. Ils méritent sans doute la gratitude, l'encouragement et l'attention constante de leurs pasteurs, pour recevoir toujours systématiquement une formation chrétienne solide, en tenant aussi compte du fait que ce sont eux qui sont appelés à porter les valeurs chrétiennes aux différents secteurs de la société, dans le monde du travail, de la société civile ou de la politique. En effet, l'ordre temporel est un de leurs devoirs (cf. Apostolicam actuositatem AA 7), il leur revient de "configurer de manière droite la vie sociale, en en respectant la légitime autonomie et en coopérant avec les autres citoyens, selon les compétences de chacun et sous leur propre responsabilité" (Deus caritas est ).

En ce qui concerne les catéchistes et les animateurs des communautés en particulier, il convient de rappeler l'exigence d'accompagner la transmission de la juste doctrine avec le témoignage personnel, avec l'engagement ferme de vivre selon les mandats du Seigneur et avec l'expérience vivante d'être des membres fidèles et actifs de l'Eglise. En effet, cet exemple de vie est nécessaire afin que leur enseignement ne se réduise pas à une pure transmission de connaissances théoriques sur les mystères de Dieu, mais conduise à adopter un style de vie chrétien. Cela était déjà décisif du temps de l'Eglise des premiers siècles, quand on examine à la fin si les catéchumènes "ont correctement vécu leur catéchuménat, s'ils ont honoré les veuves, s'ils ont visité les malades, s'ils ont accompli de bonnes oeuvres" (Traditio Apostolica, n. 20).

5. Nous sommes à juste titre préoccupés par la croissante détérioration de l'institution familiale, avec de graves répercussions autant sur le tissu social que sur la vie ecclésiale. A cet égard, il est nécessaire de promouvoir le bien de la famille et de défendre ses droits auprès des organismes concernés, et développer aussi une attention pastorale qui la guide et l'aide d'une manière directe dans ses difficultés. Par conséquent un catéchisme prématrimonial approprié est de première importance, tout comme une proximité quotidienne qui donne du courage à tous les foyers familiaux et fasse retentir en eux le salut de Jésus: "Aujourd'hui le salut est arrivé pour cette maison" (Lc 19,9). Il ne faut oublier ni les groupes de conjoints et de familles qui doivent s'entraider réciproquement à réaliser leur haute et indispensable vocation, ni les services spécifiques qui soulagent les situations douloureuses, créées par la séparation des couples, par la précarité économique ou par la violence domestique, dont sont surtout victimes les femmes.

6. Au terme de cette rencontre, je désire vous assurer de ma proximité particulière, ainsi que de mes prières au Seigneur pour votre ministère. Je vous prie de transmettre mon affection à vos fidèles, en particulier aux prêtres, aux communautés religieuses et aux personnes consacrées, ainsi qu'aux catéchistes et à tous ceux qui sont engagés dans la tâche passionnante d'apporter et de maintenir vivante la lumière du Christ dans cette terre bénie du Costa Rica.

Je demande à la Très Sainte Vierge Marie, que les Costaricains invoquent avec tant de dévotion sous le nom de Nuestra Señora de los Ángeles, de protéger ses enfants dans cette Nation bien-aimée, et de les amener avec tendresse à connaître et à aimer toujours plus son divin Fils. Je leur donne et je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique.


AUX PARTICIPANTS AU CONGRÈS INTERNATIONAL "FEMME ET HOMME, L’HUMANUM DANS SON INTÉGRALITÉ" Salle Clémentine Samedi 9 février 2008

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Chers frères et soeurs,

Je suis très heureux de vous accueillir et de vous saluer, vous qui participez au congrès international sur le thème: "Femme et homme, l'humanum dans son intégralité", organisé à l'occasion du XX anniversaire de la publication de la Lettre apostolique Mulieris dignitatem. Je salue le Cardinal Stanislaw Rylko, Président du Conseil pontifical pour les Laïcs, et je le remercie de s'être fait l'interprète des sentiments de tous. Je salue le secrétaire, Mgr Josef Clemens, les membres et les collaborateurs du dicastère. Je salue de manière particulière les femmes, qui sont ici en majorité, et qui ont enrichi les travaux du congrès de leur expérience et de leur compétence.

Le thème sur lequel vous réfléchissez est d'une grande actualité: depuis la deuxième moitié du XX siècle jusqu'à nos jours, le mouvement de valorisation de la femme dans les différentes instances de la vie sociale a suscité d'innombrables réflexions et débats, et a vu se multiplier les initiatives que l'Eglise catholique a suivies et souvent accompagnées avec un grand intérêt. La relation homme-femme dans leur spécificité respective, leur réciprocité et leur complémentarité, constitue sans aucun doute un point central de la "question anthropologique", particulièrement décisive dans la culture contemporaine et en définitive pour toute culture. De nombreuses interventions et documents pontificaux ont abordé la réalité naissante de la question de la femme. Je me limite à rappeler ceux de mon bien-aimé prédécesseur Jean-Paul II qui, en juin 1995, voulut écrire une Lettre aux femmes, et qui le 15 août 1988, il y a exactement vingt ans, publia la Lettre apostolique Mulieris dignitatem. Ce texte sur la vocation et la dignité de la femme, d'une grande richesse théologique, spirituelle et culturelle, a, à son tour, inspiré la Lettre aux évêques de l'Eglise catholique sur la collaboration de l'homme et de la femme dans l'Eglise et dans le monde, de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.

Dans Mulieris dignitatem, Jean-Paul II a voulu approfondir les vérités anthropologiques fondamentales de l'homme et de la femme, l'égale dignité et l'unité de tous deux, la diversité enracinée et profonde entre l'homme et la femme et leur vocation à la réciprocité et à la complémentarité, à la collaboration et à la communion (cf. n. 6). Cette unité-dualité de l'homme et de la femme se base sur le fondement de la dignité de toute personne, créée à l'image et à la ressemblance de Dieu, qui "les créa homme et femme" (
Gn 1,27), évitant aussi bien une uniformité indistincte et une égalité aplatie et appauvrie qu'une différence abyssale et conflictuelle (cf. Jean-Paul II, Lettre aux femmes, n. 8). Cette unité-dualité porte en elle, inscrite dans les corps et dans les âmes, la relation avec l'autre, l'amour pour l'autre, la communion interpersonnelle qui indique que "dans la création de l'homme a été inscrite aussi une certaine ressemblance de la communion divine" (n. 7). Par conséquent, lorsque l'homme et la femme prétendent être autonomes et entièrement autosuffisants, ils risquent de s'enfermer dans une autoréalisation qui considère comme une conquête de liberté le dépassement de tout lien naturel, social ou religieux, mais qui de fait les réduit à une solitude opprimante. Pour favoriser et soutenir la réelle promotion de la femme et de l'homme, on ne peut pas ne pas tenir compte de cette réalité.

Nous avons assurément besoin d'une recherche anthropologique renouvelée qui, sur la base de la grande tradition chrétienne, intègre les nouveaux progrès de la science et les données concernant les sensibilités culturelles d'aujourd'hui, contribuant ainsi à approfondir non seulement l'identité féminine mais aussi masculine qui est également souvent l'objet de réflexions partiales et idéologiques. Face à des courants culturels et politiques qui cherchent à éliminer ou au moins à voiler et confondre les différences sexuelles inscrites dans la nature humaine, les considérant une construction culturelle, il est nécessaire de rappeler le dessein de Dieu qui a créé l'être humain homme et femme, avec une unité et dans le même temps une différence originelle et complémentaire. La nature humaine et la dimension culturelle s'intègrent dans un processus ample et complexe qui constitue la formation de l'identité, où les deux dimensions, la dimension féminine et la dimension masculine, correspondent l'une à l'autre et se complètent.

En ouvrant les travaux de la V Conférence générale de l'épiscopat latino-américain et des Caraïbes, en mai dernier au Brésil, j'ai eu l'occasion de rappeler combien persiste encore une mentalité machiste, qui ignore la nouveauté du christianisme qui reconnaît et proclame l'égale dignité et responsabilité de la femme par rapport à l'homme. Il y a des lieux et des cultures où la femme est discriminée et sous-évaluée pour le seul fait d'être femme, où l'on a même recours à des arguments religieux et à des pressions familiales, sociales et culturelles pour soutenir la disparité des sexes, où sont perpétrés des actes de violence à l'égard de la femme, faisant d'elle un objet de mauvais traitements et d'exploitation dans la publicité et dans l'industrie de la consommation et du divertissement. Face à des phénomènes aussi graves et persistants, l'engagement des chrétiens apparaît encore plus urgent, afin qu'ils deviennent partout les promoteurs d'une culture qui reconnaisse à la femme, dans le droit et dans la réalité des faits, la dignité qui lui revient.

Dieu confie à la femme et à l'homme, selon leurs spécificités, une vocation et une mission particulière dans l'Eglise et dans le monde. Je pense ici à la famille, communauté d'amour ouverte à la vie, cellule fondamentale de la société. Dans la famille, la femme et l'homme, grâce au don de la maternité et de la paternité, jouent ensemble un rôle irremplaçable à l'égard de la vie. Dès le moment de leur conception, les enfants ont le droit de pouvoir compter sur le père et la mère qui prennent soin d'eux et les accompagnent dans leur croissance. L'Etat, quant à lui, doit soutenir, par des politiques sociales appropriées, tout ce qui promeut la stabilité et l'unité du mariage, la dignité et la responsabilité des conjoints, leur droit et leur devoir irremplaçable d'éducateurs de leurs enfants. Par ailleurs, il est nécessaire que la femme ait également la possibilité de collaborer à la construction de la société, en valorisant son "génie féminin" caractéristique.

Chers frères et soeurs, je vous remercie encore une fois de votre visite et, tout en souhaitant beaucoup de succès aux travaux du congrès, je vous assure de mon souvenir dans la prière, invoquant l'intercession maternelle de Marie, afin qu'elle aide les femmes de notre temps à réaliser leur vocation et leur mission dans la communauté ecclésiale et civile. Avec ces voeux, je vous donne à vous ici présents et à ceux qui vous sont chers, une Bénédiction apostolique spéciale.


AUX PARTICIPANTS À L’ASSEMBLÉE NATIONALE DE LA FÉDÉRATION ITALIENNE DES EXERCICES SPIRITUELS Salle Clémentine Samedi 9 février 2008





590 Monsieur le Cardinal,
vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
chers frères et soeurs!

Je suis heureux de vous rencontrer au terme de l'Assemblée nationale de la Fédération italienne des Exercices spirituels (FIES). Je salue son Président, le Cardinal Salvatore De Giorgi et je le remercie pour les paroles courtoises par lesquelles il s'est fait l'interprète de vos sentiments. Et je vous remercie pour votre prière et votre chant. Je salue les Evêques délégués de la Conférence épiscopale régionale, les membres de la Présidence et du Conseil national, les délégués régionaux et diocésains, les directeurs de Maisons des Exercices spirituels et le groupe d'animateurs d'Exercices pour les jeunes. Vous avez tiré le thème de votre Assemblée: "Pour une spiritualité chrétienne véritablement eucharistique", de mon invitation adressée à tous les Pasteurs de l'Eglise dans la conclusion de l'Exhortation apostolique post-synodale Sacramentum caritatis (cf. n. 94), thème qui fut le point central des diverses interventions et des groupes d'études. Un choix thématique de ce genre témoigne combien vous tient à coeur d'accueillir dans un esprit de foi, le Magistère du Pape, pour l'intégrer dans les propositions d'études et le traduire correctement dans les pratiques pastorales. Pour cette même raison, vous avez tenu compte dans vos travaux des deux Encycliques Deus caritas est et Spe salvi. Je vous remercie pour tout ce travail.

Le statut de la FIES affirme clairement qu'elle a pour finalité de "faire connaître et promouvoir par tous les moyens possibles et dans le respect des normes canoniques les Exercices spirituels, entendus comme une forte expérience de Dieu dans un climat d'écoute de la Parole de Dieu, en se référant à une conversion et un don toujours plus total au Christ et à l'Eglise" (art. 2). Dans ce but, "elle réunit de manière libre ceux qui, en Italie, s'occupent des Exercices spirituels dans le domaine de la pastorale des temps de l'Esprit" (ibid.). Votre Fédération entend donc développer toujours plus la spiritualité comme fondement et âme de toute la pastorale. Elle est née et a grandi en mettant à profit les exhortations sur la nécessité de la prière et sur le primat de la vie spirituelle, offertes avec insistance par mes vénérés Prédécesseurs, les serviteurs de Dieu Paul VI, Jean Paul I et Jean Paul II. En suivant leurs traces, j'ai voulu moi aussi, dans l'Encyclique Deus caritas est, "réaffirmer l'importance de la prière face à l'activisme et au sécularisme dominant de nombreux chrétiens engagés dans le travail caritatif" (n. 37), et dans l'Encyclique Spe salvi, j'ai placé la prière au premier plan entre "les lieux d'apprentissage et d'exercice de l'espérance" (nn. 32-34). L'insistance sur la nécessité de la prière est en effet toujours actuelle et urgente.

En Italie, pendant que se multiplient et se répandent providentiellement de nombreuses initiatives de spiritualité, surtout parmi les jeunes, le nombre de ceux qui participent à de vrais cours d'Exercices spirituels semble baisser, et cela se vérifierait également chez les prêtres et les membres des Instituts de Vie consacrée. Il vaut tout de même la peine de rappeler que les "Exercices" sont une expérience de l'esprit avec des caractéristiques propres et spécifiques, bien résumées dans une de vos définitions, qu'il me plaît de rappeler: "Une forte expérience de Dieu, suscitée par l'écoute de sa Parole, comprise et accueillie dans le vécu personnel, sous l'action de l'Esprit Saint, laquelle, dans un climat de silence, de prière et avec la médiation d'un guide spirituel, apporte une capacité de discernement visant à la purification du coeur, à la conversion de la vie, à la sequela du Christ, pour l'accomplissement de sa mission dans l'Eglise et dans le monde". Il est bon que ne manque pas, aux côtés d'autres formes de retraites spirituelles tout à fait louables, la participation aux Exercices spirituels, caractérisés par ce climat de silence complet et profond qui favorise la rencontre personnelle et communautaire avec Dieu et la contemplation du visage du Christ. On n'insistera jamais assez sur cette exigence, que mes Prédécesseurs et moi-même avons rappelée à plusieurs reprises.

A une époque où l'influence de la sécularisation est toujours plus forte et, d'autre part, où l'on ressent un besoin diffus de rencontrer Dieu, souhaitons que ne manque pas la possibilité d'offrir des espaces d'écoute intense de sa Parole dans le silence et la prière. Les maisons d'Exercices spirituels sont des lieux privilégiés pour de telles expériences spirituelles, et, dans ce but, elles doivent être soutenues matériellement et humainement par un personnel approprié. J'encourage les pasteurs des diverses communautés à faire en sorte que les maisons d'Exercices spirituels ne manquent pas de responsables et de collaborateurs bien formés, de guides, d'animateurs et d'animatrices disponibles et préparés, dotés des qualités doctrinales et spirituelles qui fassent d'eux de vrais maîtres d'esprit, des experts et des passionnés de la Parole de Dieu et des fidèles du Magistère de l'Eglise. Un bon cours d'Exercices spirituels contribue à renouveler chez celui qui y prend part la joie et le goût de la Liturgie, en particulier d'une belle célébration des Heures et surtout de l'Eucharistie; il aide à redécouvrir l'importance du sacrement de la pénitence, voie du chemin de la conversion et don de réconciliation, comme aussi la valeur et la signification de l'adoration eucharistique. Pendant les Exercices, il est également possible de retrouver avec profit le sens véritable et authentique du Rosaire et la pieuse pratique de la Via Crucis.

Chers frères et soeurs, je vous remercie pour le service précieux que vous rendez à l'Eglise et pour l'engagement que vous déployez afin qu'en Italie le "réseau" des Exercices spirituels soit toujours plus ramifié et qualifié. De mon côté, je vous assure de mon souvenir dans le Seigneur et, tandis que j'invoque l'intercession de la Très Sainte Vierge Marie, je vous donne à vous et à vos collaborateurs ma Bénédiction apostolique.

CONCLUSION DES EXERCICES SPIRITUELS DE LA CURIE ROMAINE Chapelle "Redemptoris Mater" Samedi 16 février 2008



Chers frères,

591 A la fin de ces journées d'Exercices spirituels, je voudrais vous remercier de tout coeur, Eminence, pour la direction spirituelle que vous nous avez offerte avec une très grande compétence théologique et avec une grande profondeur spirituelle. De la perspective visuelle qui était la mienne, j'ai eu constamment devant les yeux l'image de Jésus à genoux devant saint Pierre pour lui laver les pieds. Grâce à vos méditations, cette image m'a parlé. J'ai vu que c'est précisément ici, dans ce comportement, dans cet acte d'extrême humilité que se réalise le nouveau sacerdoce de Jésus. Il se réalise précisément dans l'acte de solidarité à notre égard, avec nos faiblesses, notre souffrance, nos épreuves, jusqu'à la mort. Ainsi, j'ai vu avec des yeux nouveaux le vêtement rouge de Jésus, qui nous parle de son sang. Monsieur le Cardinal, vous nous avez enseigné comment le sang de Jésus était, grâce à ses prières, "oxygéné" par l'Esprit Saint. Et il est ainsi devenu une force de résurrection et pour nous une source de vie.

Mais je ne pouvais pas manquer non plus de méditer sur la figure de saint Pierre, qui pose son doigt sur son front. C'est le moment où il prie le Seigneur de lui laver non seulement les pieds mais aussi la tête et les mains. Il me semble qu'il exprime - au-delà de ce moment - la difficulté de saint Pierre et de tous les disciples du Seigneur à comprendre la surprenante nouveauté du sacerdoce de Jésus, de ce sacerdoce qui est précisément abaissement, solidarité à notre égard, et qui nous offre ainsi l'accès au véritable sanctuaire, le corps ressuscité de Jésus.

Tout au long de son expérience de disciple et, me semble-t-il, jusqu'à sa propre crucifixion, saint Pierre a dû écouter toujours à nouveau Jésus, pour entrer plus profondément dans le mystère de son sacerdoce, du sacerdoce du Christ transmis aux apôtres et à leurs successeurs.

En ce sens, la figure de Pierre me semble être comme la figure de chacun de nous au cours de ces journées. Eminence, vous nous avez aidés à écouter la voix du Seigneur, à apprendre ainsi à nouveau ce qu'est son sacerdoce et le nôtre. Vous nous avez aidés à entrer dans la participation au sacerdoce du Christ et, ainsi, à recevoir aussi le nouveau coeur, le coeur de Jésus, comme centre du mystère de la nouvelle Alliance.

Merci de tout cela, Eminence. Vos paroles et vos méditations nous accompagneront en ce temps du Carême sur notre chemin vers la Pâque du Seigneur. En ce sens, je vous souhaite à tous, chers frères, un bon Carême, fécond d'un point de vue spirituel, afin que nous puissions réellement arriver à Pâques à une participation toujours plus profonde au sacerdoce de notre Seigneur.


AUX MEMBRES DU CONSEIL POUR LES RELATIONS ENTRE LA CONGRÉGATION POUR LES INSTITUTS DE VIE CONSACRÉE ET LES SOCIÉTÉS DE VIE APOSTOLIQUE ET LES UNIONS INTERNATIONALES 18 février 2008

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DES SUPÉRIEURES ET DES SUPÉRIEURS GENERAUX Salle du Consistoire Lundi 18 février 2008

Chers frères et soeurs,

Au terme de cette matinée de réflexion commune sur certains aspects particulièrement actuels et importants de la vie consacrée à notre époque, je voudrais tout d'abord rendre grâce au Seigneur qui nous a offert la possibilité de cette rencontre très fructueuse pour nous tous. Nous avons eu l'occasion d'analyser ensemble les potentialités et les attentes, les espérances et les difficultés que rencontrent aujourd'hui les Instituts de Vie consacrée. J'ai écouté avec beaucoup d'attention et d'intérêt vos témoignages, vos expériences, et j'ai pris note de vos questions. Nous ressentons tous combien, dans la société moderne mondialisée, il devient toujours plus difficile d'annoncer et de témoigner l'Evangile. Si cela vaut pour tous les baptisés, c'est d'autant plus vrai pour les personnes que Jésus appelle à sa suite de manière plus radicale à travers la consécration religieuse. Le processus de sécularisation qui progresse dans la culture contemporaine n'épargne pas même, en effet, les communautés religieuses.

Il ne faut toutefois pas se laisser emporter par le découragement car si aujourd'hui, comme cela a été opportunément rappelé, un grand nombre de nuages s'amoncèlent à l'horizon de la vie religieuse, les signaux d'un réveil providentiel sont en train d'apparaître, et ils sont même en croissance constante, ce qui suscite des motifs d'espérance réconfortante. L'Esprit Saint souffle puissamment partout dans l'Eglise, en suscitant un nouvel engagement de fidélité dans les Instituts historiques, ainsi que de nouvelles formes de consécration religieuse en correspondance avec les exigences des temps. Aujourd'hui, comme à toutes les époques, il ne manque pas d'âmes généreuses disposées à tout abandonner pour embrasser le Christ et son Evangile, en consacrant à son service leur existence au sein de communautés marquées par l'enthousiasme, la générosité et la joie. Ce qui caractérise ces nouvelles expériences de vie consacrée, c'est le désir commun, partagé avec une prompte adhésion, de pauvreté évangélique pratiquée de manière radicale, d'amour fidèle à l'Eglise, de généreux dévouement envers son prochain dans le besoin, avec une attention particulière pour les pauvretés spirituelles qui caractérisent fortement l'époque contemporaine.

A plusieurs reprises, j'ai voulu moi aussi réaffirmer, comme mes vénérés prédécesseurs, que les hommes d'aujourd'hui ressentent un fort appel religieux et spirituel, mais ne sont prêts à écouter et à suivre que ceux qui témoignent avec cohérence de leur adhésion au Christ. Et il est intéressant de noter que ce sont précisément les Instituts qui ont conservé ou choisi un style de vie, souvent très austère, et quoi qu'il en soit fidèle à l'Evangile vécu "sine glossa", qui sont riches de vocation. Je pense aux nombreuses communautés de fidèles et aux nouvelles expériences de vie consacrée que vous connaissez bien; je pense au travail missionnaire de nombreux groupes et mouvements ecclésiaux où naissent un grand nombre de vocations sacerdotales et religieuses; je pense aux jeunes filles et aux jeunes garçons qui abandonnent tout pour entrer dans des monastères et des couvents de clôture. Il est vrai - nous pouvons le dire avec joie - qu'aujourd'hui aussi le Seigneur continue à envoyer des ouvriers dans sa vigne et à enrichir son peuple de nombreuses et saintes vocations. Nous lui en rendons grâce et nous le prions pour qu'après l'enthousiasme des choix initiaux - beaucoup de jeunes entreprennent le chemin de la perfection évangélique et entrent dans de nouvelles formes de vie consacrée à la suite de conversions bouleversantes -, pour que, disais-je, après l'enthousiasme des choix initiaux suive l'engagement de la persévérance sur un chemin authentique de perfection ascétique et spirituelle, sur un chemin de sainteté véritable.

592 En ce qui concerne les Ordres et les Congrégations ayant une longue tradition dans l'Eglise, on ne peut pas manquer de noter, comme vous l'avez vous-mêmes souligné, qu'au cours des dernières décennies presque tous ont traversé - qu'ils soient masculins ou féminins - une crise difficile due au vieillissement de leurs membres, à une diminution plus ou moins accentuée des vocations et parfois aussi à une "lassitude" spirituelle et charismatique. Dans certains cas, cette crise est même devenue préoccupante. Toutefois, à côté de situations difficiles, qu'il est bon de regarder avec courage et vérité, il faut également enregistrer des signes de reprise positive, en particulier lorsque les communautés ont choisi de revenir aux origines pour vivre de manière plus harmonieuse l'esprit du Fondateur. Dans la quasi totalité des Chapitres généraux des Instituts religieux, le thème récurrent a précisément été la redécouverte du charisme fondateur, qu'il fallait incarner et mettre en oeuvre de manière renouvelée dans le temps présent. Redécouvrir l'esprit des origines, approfondir la connaissance du Fondateur ou de la Fondatrice, a aidé à imprimer aux Instituts un élan nouveau et prometteur dans le domaine ascétique, apostolique et missionnaire. Des oeuvres et des activités séculaires ont été ainsi revitalisées par une nouvelle sève; l'on assiste de nouvelles initiatives de mise en oeuvre authentique du charisme des fondateurs. C'est sur cette route qu'il faut continuer à avancer, en priant le Seigneur de porter pleinement à son accomplissement l'oeuvre qu'Il a entamée.

En entrant dans le troisième millénaire, mon vénéré prédécesseur, le Serviteur de Dieu Jean-Paul II, a invité toute la communauté ecclésiale à "repartir du Christ" (Lettre ap. Novo millennio ineunte
NM 29 sqq.). Oui! Les Instituts de Vie consacrée eux aussi, s'ils veulent conserver ou retrouver leur vitalité et leur efficacité apostolique, doivent continuellement "repartir du Christ". Il est le roc solide sur lequel vous devez construire vos communautés et chacun de vos projets de renouveau communautaire et apostolique. Chers frères et soeurs, merci de tout coeur pour le soin que vous mettez à accomplir votre service difficile de conduite de vos familles religieuses. Le Pape est à vos côtés, il vous encourage et assure chacune de vos communautés de son souvenir quotidien dans la prière. Pour conclure notre rencontre, je voudrais encore une fois saluer avec affection le Cardinal-Secrétaire d'Etat et le Cardinal Franc Rodé, ainsi que chacun de vous. Je vous demande en outre de transmettre mon salut à tous vos confrères et vos consoeurs, avec une pensée particulière pour les personnes âgées qui ont longuement servi vos Instituts, les malades qui contribuent à l'oeuvre de la rédemption à travers leurs souffrances, les jeunes qui sont l'espérance de vos diverses familles religieuses et de l'Eglise. Je vous confie tous à la protection maternelle de Marie, modèle le plus élevé de vie consacrée, tout en vous bénissant de tout coeur.



Discours 2005-2013 587