Ars Procès informatif 1423

TEMOIN – ABBE FRANCOIS GAILLARD – 9 août 1864

(1423) Suite de la session 158 – 9 août 1864 à 3h de l’après-midi

1425 (1425) Juxta primum Interrogatorium, monitus testis de vi et natura juramenti, et gravitate perjurii, praesertim in causis Beatificationis et Canonizationis, respondit :



Je connais la nature et la force du serment que je viens de faire et la gravité du parjure dont je me rendrais coupable si je ne disais pas toute la vérité.



(1426) Juxta secundum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je m’appelle François Gaillard. Je suis né à Nattages, diocèse de Belley, le quatorze novembre mil huit cent sept. Mon père se nommait Joseph Gaillard, et ma mère Françoise Quinard. Je suis curé de la paroisse de Montagnat, diocèse de Belley.



Juxta tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Ayant le bonheur d’être prêtre, je dis régulièrement la Messe tous les jours.



Juxta quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je n’ai jamais été traduit en justice.



Juxta quintum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Je ne sache pas avoir encouru les censures ou les peines ecclésiastiques.



Juxta sextum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



Personne ne m’a instruit de ce que j’avais à dire dans cette cause. Je n’ai lu aucun des Articles du Postulateur. Je ne dirai que l’exacte vérité.



Juxta septimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit :



J’avais une grande estime et une grande vénération pour le Serviteur de Dieu. Je suis venu plusieurs fois le visiter. Depuis sa mort, je l’invoque avec confiance. Je désire sa béatification pour la plus grande gloire de Dieu.



Et quoniam praedictus testis accitus fuit ad explicanda quae spectant mirabilem D. Maissiat conversionem, omissis coeteris Interrogatoriis, statim interrogatus fuit super Interrogatorio vigesimo super quo ei lecto respondit :



En mil huit cent quarante (et) un, au commencement de juillet, je vins à Ars pour la première fois en compagnie de Mr Bernard, vicaire de Ceyzériat. Ce dernier se proposait de demander la guérison de ses scrupules. En arrivant, nous assistâmes au catéchisme du Serviteur de Dieu qui se faisait à la Providence. Ensuite, nous abordâmes Mr le Curé ; lui ayant fait part du sujet de notre voyage, il répondit à Mr Bernard : « Vous aurez vos scrupules jusqu’à votre mort, prenez patience et courage. » Ce qui s’est vérifié.



En sortant de la Providence, j’eus le bonheur d’accompagner le Serviteur de Dieu jusqu’à la porte de l’église et d’avoir avec lui un bon quart d’heure de conversation. Je lui dis : « Mr le Curé, une guérison miraculeuse a eu lieu ici, il y a quelques jours. » Il me répondit : « Nous avons tant de saints et de saintes dans notre église qu’il est impossible qu’ils ne fassent pas quelques miracles. » Je lui dis : « C’est une dame de Bourg qui a laissé ici ses béquilles ; mais à Bourg, (1427) on tourne en dérision cette guérison ; on dit que cette dame n’était malade que d’imagination. - Mon ami, me répondit-il, laissons dire les gens du monde. Hélas, ils sont trop aveugles. Il y a aujourd’hui des incrédules comme il y en avait au temps de Notre Seigneur. Dans la Judée, Jésus guérissait les malades, chassait les démons, ressuscitait les morts, et il y en a beaucoup qui ne croyaient pas. Il ferait aujourd’hui les mêmes miracles parmi nous qu’il y aurait encore des incrédules. Par exemple la semaine dernière, un homme de l’autre coté de l’eau a apporté sur ses épaules un enfant de douze ans, estropié des deux jambes, qui n’avait jamais marché. Cet homme a fait sa petite neuvaine avec son petit. Après cette neuvaine, il s’est en allé en trottant devant son père. Eh bien ! si ces gens l’avaient vu, ils auraient encore dit : « C’est son imagination qui lui a rendu ses jambes. » Le bon Dieu est aussi puissant ici qu’il l’était dans la Judée ; le diable a aussi son pouvoir ; il s’en sert pour aveugler le pauvre monde. » Il nous quitta en disant : « Aimons tous bien le bon Dieu. »



En entrant au village, on m’avait appris qu’il venait de s’opérer une conversion surprenante, celle de Mr Maissiat, professeur d’Arts à Lyon. Désirant faire sa connaissance, je me rendis à son logement chez la veuve Gaillard. Voici ce qu’il me raconta :



« Il y a huit jours que je quittai Lyon pour faire une excursion géologique d’un mois sur les montagnes du Beaujolais et du Mâconnais. Dans la voiture qui me conduisait à Villefranche, se trouva par hasard cet ami que j’ai l’honneur de vous présenter. Il se rendait à Ars et me fit des instances pour que je l’y accompagnasse : ‘Venez, me dit-il, vous verrez un curé qui fait des miracles. – Des miracles ? répondis-je en riant. Je ne crois pas aux miracles. - Eh bien ! venez, vous verrez et vous croirez. - Oh ! pour le coup, si vous réussissez à faire de moi un croyant, c’est pour le coup qu’il faudra crier au miracle. Tiens, le mot d’Ars me plaît. Ars est un joli mot pour un professeur d’Arts. J’ai du temps devant moi, je vous accompagne pour vous faire plaisir.’



Arrivés ici, mon ami me case dans cet appartement. De grand matin il me réveille et me dit : ‘Maissiat, voulez-vous me faire un plaisir ? – Lequel ? – C’est de venir avec moi à la Messe. – A la Messe ? Je n’y crois pas et je n’y ai pas été depuis ma première communion. – C’est égal, venez-y pour me faire plaisir. C’est là que vous pourrez voir et juger le Curé d’Ars. Je ne vous demande pas de prier, mais seulement de regarder ce curé. Je vous placerai de manière à le voir à votre aise. – Je tiens fort peu à tout cela ; mais je tiens cependant à ne pas vous désobliger. Je suis à vos ordres. Allons.’



(1428) Nous voilà dans l’église, mon vieil ami me fait asseoir dans le banc qui fait face à la sacristie. Bientôt la porte s’ouvre et le Curé d’Ars en sort pour aller dire la Messe. Nos yeux se rencontrent, son regard me pénètre jusqu’au fond du coeur ; je m’incline forcément, cachant ma tête dans mes mains, sentant un poids énorme sur mes épaules. Pendant la Messe, je reste immobile comme une statue. Après cette Messe, j’essayai de soulever ma tête appesantie ; je vis la foule se précipiter vers la sacristie, malgré moi je suivis ce mouvement. Mr le Curé fait sortir tout le monde, me prend par la main ; la porte se referme et je me trouve seul avec lui dans la sacristie. Je balbutiai quelques mots : ‘Mr le Curé, depuis le commencement de votre Messe, j’ai sur les épaules un poids qui m’écrase. – Mon ami, il faut vite vous en débarrasser. Tenez, mettez-vous là à genoux : vous me raconterez votre pauvre vie et Notre Seigneur se chargera de votre fardeau’. Alors mon trouble disparut un peu ; je me mis à raconter l’histoire de ma vie depuis ma première communion. Orphelin à quinze ans, je suivis en Egypte un de mes parents, officier supérieur, qui s’était chargé de moi ; là je me fis musulman. De retour en France, j’essayai du judaïsme, du protestantisme, du magnétisme. Je devins ensuite chaud partisan de l’abbé Châtel et du Père Enfantin. Quand je suis venu à Ars, j’étais encore partisan de Cabet. Pendant que je faisais ainsi l’histoire de ma vie, Mr le Curé pleurait et s’écriait par moment : ‘Que le bon Dieu est bon ! comme il vous a aimé !’ Et moi je n’avais pas encore le courage de pleurer, mais je sentais disparaître mon fardeau. Je terminai en disant : ‘Je vous ai raconté ma vie, mais je n’ai point fait ma confession. – Eh ! bien, mon ami, vous reviendrez demain. Allez devant l’autel de Ste Philomène, et vous lui direz de demander à Notre Seigneur votre conversion.’



Je quitte la sacristie tout bouleversé ; je vais me planter les bras croisés devant l’autel de Ste Philomène. Je sens les larmes qui me viennent ; pour ne pas montrer de la faiblesse, je sors de l’église. Le lendemain, je fus fidèle au rendez-vous et tous les jours de la semaine je me suis confessé. C’est demain matin que je dois recevoir mon pardon et ensuite la sainte Communion. Auriez-vous la bonté de dire la Messe pour moi, afin que je puisse faire tout ça comme il faut ?»



Mr Maissiat assista au Saint Sacrifice que j’offris à son intention à l’autel de Ste Philomène. Il y assista avec une grande piété et se tenant constamment à genoux. Je le vis ensuite aller au saint tribunal, assister à la Messe et communier de la main de Mr Vianney. Le bonheur, la joie se peignaient sur sa figure.



Il m’annonça qu’il voulait faire une neuvaine d’action de grâce à Ars et renoncer à son excursion scientifique. J’ai appris que Mr Maissiat avait travaillé à ramener des âmes à Dieu et qu’il était mort deux années après sa conversion, dans les (1429) plus beaux sentiments qu’inspire la piété chrétienne.



Qua responsione accepta, omissis coeteris Interrogatoriis, completum esse examen praedicti testis, qui aliunde ut circa quoddam factum Servi Dei deponeret inductus fuerat, Rmi Judices Delegati decreverunt, et per me Notarium Actuarium, de mandato Dominationum suarum Rmarum perlecta fuit eidem testi integra depositio ab ipso emissa, a principio usque ad finem, qua per ipsum bene audita et intellecta, illam in omnibus confirmavit.



Quibus peractis, injunctum fuit praedicto testi, ut se subscriberet, prout ille statim, accepto calamo se subscripsit ut immediate sequitur.



Ita pro veritate deposui.



Franciscus Gaillard



TEMOIN – ETIENNETTE DURIE – 12 août 1864

1443 (1443) Session 160 - 12 août 1864 à 8h du matin.



(1445) Juxta primum Interrogatorium, monitus testis de vi et natura juramenti et gravitate perjurii, praesertim in causis Beatificationis et Canonizationis, respondit:



Je comprends parfaitement le serment que je viens de faire, aussi je ne dirai que la vérité.



Juxta secundum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:



Je me nomme Etiennette Durié. Je suis née à Arfeuille, diocèse de Moulins, le huit septembre mil huit cent huit ou mil huit cent dix. Mon père se nommait Claude Durié et ma mère Antoinette Meunier. Je vis du travail de mes mains.



Juxta tertium Interrogatorium, testis interrogatus respondit:



Je me confesse tous les quinze jours et je communie tous les jours.



Juxta quartum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:



Je n’ai jamais été appelée devant aucun tribunal.



Juxta quintum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:



Je ne sache pas avoir encouru les peines, ou les censures ecclésiastiques.



(1446) Juxta sextum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:



Personne ne m’a instruite de vive voix ou par écrit de ce que j’avais à dire dans cette cause. Je n’ai lu aucun des Articles du Postulateur. Je ne dirai que l’exacte vérité.



Juxta septimum Interrogatorium, testis interrogatus respondit:



J’avais pour le Serviteur de Dieu une grande estime, une grande vénération. Je le regardais comme mon père; j’avais en lui la plus grande confiance. Depuis sa mort je l’invoque tous les jours et plusieurs fois par jour. Les grâces que je reçois, je crois les obtenir par son intercession. Je le regarde comme un grand saint que Dieu a donné à son Eglise. Je désire de tout mon coeur sa Béatification pour la plus grande gloire de Dieu et l’édification des fidèles.



Et quoniam praedictus testis accitus fuit ad explicanda quaedam facta quae spectant dona supernaturalia, omissis coeteris interrogatoriis, statim interrogatus fuit super Interrogatorio vigesimo, super quo ei lecto, respondit:



Ce fut en mil huit cent trente que j’eus le bonheur de faire la connaissance de Mr Vianney. Sans que je lui eusse fait aucune ouverture, il me dit: “Vous avez trois infirmités; vous guérirez de deux, et quant à la troisième, vous n’en serez pas entièrement délivrée.” Le Serviteur de Dieu voulait parler d’un cancer que j’avais, des crises qui me faisaient évanouir et de la faiblesse de ma vue. J’étais née aveugle et j’avais en partie recouvré la vue dans un pèlerinage au tombeau du père Gachon à Ambert, diocèse de Clermont. Les paroles de Mr Vianney me le firent regarder comme un saint et m’inspirèrent envers lui la plus entière confiance.



Le même jour, je fus délivrée de mes évanouissements et ils n’ont jamais plus reparu. Deux mois après je revins trouver Mr Vianney et je lui dis: “Mon Père, que pourrais-je faire pour vous récompenser de m’avoir guéri de mes évanouissements ? - Mais ce n’est pas moi qui vous ai guéri; c’est le bon Dieu. - Oui, mais c’est par vos prières. - C’est le bon Dieu qui l’a voulu. - Eh bien! soit, que voulez-vous que je fasse? - Je demanderai au bon Dieu que vous m’aidiez pour mes fondations, mes bonnes oeuvres et mes pauvres. - J’accepte, tout ce que vous voudrez. - Et si vous êtes bien humiliée? - Je l’accepte.” Au moment même, il me remit une lettre pour une dame, habitant une localité éloignée d’Ars. Quand je me présentai à elle, (1447) elle fit quelques difficultés parce qu’elle ne me connaissait pas. Je rougis un peu en lui disant: “Ecrivez à Mr le Curé.” Elle me remit cependant la somme de deux cents francs. Lorsqu’à mon retour je les présentai à Mr Vianney, il me dit: “Ah! ça va bien pour la première fois, ça continuera.” Depuis ce jour le Serviteur de Dieu m’a souvent donné de semblables commissions. Pour les exécuter, j’ai dû subir plusieurs fois de nombreuses humiliations, faire des courses considérables, mais le résultat a toujours été heureux. La dernière fois au mois de mars mil huit cent cinquante-neuf, je lui remis deux mille francs; le prix d’une fondation de mission. Il me dit: “Savez-vous combien vous m’avez apporté d’argent depuis que vous venez? - Non, mon Père. - Eh bien ! vous m’avez apporté quinze mille francs. » Dans cette somme n’étaient pas compris les honoraires de Messes.



Le huit mai mil huit cent quarante j’apportais une somme d’argent assez considérable. Mr Vianney était seul dans sa chambre. C’était une heure après midi. Mlle Catherine Lassagne m’ouvrit la porte extérieure qui est au nord. En montant les escaliers qui conduisent à sa chambre, je l’entends parler, comme s’il y avait quelqu’un avec lui. Je monte tout doucement; je me mets à écouter. J’entends quelqu’un qui lui disait d’une voix douce: “Que demandez-vous! - Ah! ma bonne mère, je demande la conversion des pécheurs, la guérison de mes malades et des affligés, et en particulier la guérison d’une personne qui souffre depuis vingt-huit ans et qui me demande la mort ou la guérison.” La voix répond : “Elle guérira, mais plus tard.” J’entrai subitement dans ce moment; la porte était légèrement entrouverte. Je crus qu’il était question de moi. Quelle fut ma surprise en voyant près de la cheminée de la chambre, une dame d’une taille ordinaire, revêtue d’une robe d’une blancheur éclatante, sur laquelle se trouvaient ça et là des roses d’or. Les souliers m’ont paru blancs comme la neige. Sur ses mains brillaient les plus riches diamants. Son front était environné d’une couronne d’étoiles, brillantes comme le soleil. J’en fus éblouie. Quand je pus reporter sur elle mes regards, je la vis sourire doucement: “Ma bonne mère, lui dis-je aussitôt, emmenez-moi donc au Ciel - Plus tard. - Ma mère, ce serait bien temps. - Vous serez toujours mon enfant et je serai votre mère.” En disant ces mots elle disparut. Je restais un moment comme hors de moi-même et tout étonnée de la faveur qui m’était accordée. Oh! faut-il donc être si ingrate, (1448) me dis-je à moi-même, et voir de si belles choses!!...Quand je fus revenue à moi-même, j’aperçus alors Mr le Curé, debout devant sa table, les mains jointes sur la poitrine, la figure illuminée et le regard immobile. Je craignis qu’il ne fût mort; je m’approchai et je le tirai par sa soutane. Il dit alors: “Mon Dieu, est-ce-vous? - Non, mon Père, c’est moi. - Où étiez-vous donc? Qu’avez-vous donc vu? - J’ai vu une dame. - Et moi aussi. - Quelle est donc cette dame? - Si vous le dites, reprit Mr Vianney d’un ton sévère, vous ne mettrez plus les pieds dans ma chambre. - Attendez que je vous dise ce que j’ai pensé: J’ai cru que c’était la Ste Vierge. - Vous ne vous êtes pas trompée: vous l’avez donc vue? - Oui, mon Père, je l’ai vue et je lui ai parlé. Mais maintenant vous allez me raconter dans quel état vous étiez pour que je vous crusse mort? - Oh! non, c’est que j’étais trop content de voir ma Mère. - Mon bon Père, c’est bien grâce à vous si je l’ai vue; consacrez moi donc à elle, quand vous la reverrez afin qu’elle me consacre à son divin Fils.” Le Serviteur de Dieu me le promit et il ajouta en même temps: “Vous guérirez. - Quand sera-ce? - Un peu plus tard. Ne m’en demandez pas si long. - Que la volonté de Dieu soit faite. » Quelques jours après, il me donna une image du St Coeur de Marie, au bas de laquelle se trouvent ces mots écrits de sa main: Moi, Etiennette Durié, je me consacre à la Ste Vierge, le huit mai mil huit cent quarante: Signé: J.M.B.Vianney. Je conserve précieusement cette image.



La même année, neuf jours avant l’Assomption, le Serviteur de Dieu m’engagea à faire une neuvaine en l’honneur du Saint Coeur de Marie pour demander ma guérison. Je lui répondis que je la ferais volontiers, mais que je ne demanderais que la sainte Volonté de Dieu. La veille de la fête il me dit: “Demandez donc au bon Dieu à être bien sage: Peut-être que demain vous guérirez. - Mon Père, vous le demanderez pour moi - Demain, reprit-il, c’est la fête de la Ste Vierge. Peut-être que vous guérirez.” Le cancer chancreux dont je souffrais depuis vingt-huit ans me causa de telles douleurs pendant toute la nuit que le lendemain matin je ne pouvais pas me lever; mais le désir que j’avais de faire la Ste Communion, me donna des forces. Je suis allée à l’église et j’ai communié à la Messe de Mr le Curé. Je croyais obtenir dans ce moment la grâce dont il m’avait parlé. Aussi pendant mon action de grâce je dis à (1449) Notre Seigneur: “Mon Dieu, je pensais bien obtenir une grâce aujourd’hui, comme mon bon Père me l’avait fait espérer.” Je n’ai point perdu confiance, j’ai continué à solliciter la grâce que j’attendais. Cependant je souffrais beaucoup. Malgré cela je suis restée à l’église. Pendant la grand-messe, au moment de l’élévation, mes souffrances ont cessé tout à coup; je me suis sentie guérie. Après la Messe je suis sortie; j’ai regardé la plaie; je n’ai plus vu qu’une petite cicatrice. Je suis allée trouver Mr le Curé: “Mon Père, ce que vous m’aviez dit hier est arrivé; je suis guérie. Les remèdes du bon Dieu sont bien meilleurs que ceux des médecins. - Dieu vous a accordé, reprit-il, deux grandes grâces dans votre vie; soyez-y bien fidèle, si vous n’y correspondiez pas, vous seriez bien vite en enfer. - Mon Père, avec le secours de la grâce et vos bonnes prières, j’espère que le bon Dieu ne m’abandonnera pas.”



A la fin de l’année mil huit cent cinquante-quatre, je tombai dans une cave. Une ankylose au genou droit se déclara à la suite de cette chute. Le bras droit resta comme paralysé, je ne pouvais m’en servir. L’ankylose était tellement développée que les médecins jugeaient l’amputation nécessaire. On voulait me garder à l’hospice. Huit mois s’étaient écoulés depuis l’accident. Je demandai la permission de sortir, promettant de revenir dans huit jours. Je me fis conduire à Ars où j’arrivai le six mai. Dès le soir, Mr le Curé que j’avais fait prévenir, vint me voir dans mon logement chez Marie Pommier. Il me dit que j’avais bien fait de ne pas permettre l’amputation. “La Ste Vierge, ajouta-t-il, vous a accordé une grâce; elle pourra bien en accorder une autre. - Oh! mon Père, priez donc pour moi ce soir ! - Je dirai la Messe demain pour vous.” Le lendemain toutes les personnes de la maison se rendirent à la Messe du Serviteur de Dieu. Pour moi, je restai seule étendue sur mon lit. A sept heures, au moment où Mr le Curé disait la Messe, j’essayais de remuer mon bras. Il a craqué alors, comme s’il avait cassé. Je l’ai tourné en tous sens. Je n’ai plus senti de douleur. Je me suis habillée de suite en me disant: « Puisque le bon Dieu a guéri mon bras, il pourra peut-être guérir mon genou. Allons donc, mon bon Maître, je me lève. » Je me suis levée aussitôt; mon genou a craqué, comme s’il s’était cassé.(1450) J’ai ressenti une si vive douleur que je me suis écriée: “Oh! mon Dieu! cependant je vous avais demandé ma guérison, vous me faites plus souffrir encore. Je voudrais bien marcher.” A l’instant les douleurs cessèrent. Je me mis à marcher; je vis que je n’avais plus de mal; j’allai de suite à l’église; je me mis à genoux, ce que je ne pouvais faire depuis huit mois. Je restai dans cette position depuis sept heures et demie jusque vers midi, uniquement occupée à louer et à bénir Dieu. Que j’étais donc heureuse. Quelle belle matinée! Immédiatement après le catéchisme, je me levai et j’allai à la sacristie. “Mon Père, dis-je au Serviteur de Dieu, vous avez vu hier mon genou, il faut que vous le voyiez aujourd’hui.” Dès qu’il l’eût vu, il s’écria en joignant les mains et en versant des larmes: “Oh! que le bon Dieu est bon! Il nous faut lui faire une neuvaine d’action de grâces.” Je lui offris l’honoraire d’une Messe pour le lendemain. “Elle est promise, me dit-il, mais un autre la dira. Faites une neuvaine de communion à mon intention. La grâce que vous venez de recevoir est si belle que vous pouvez en parler.”



J’ai un précieux souvenir du Serviteur de Dieu. Le seize juillet mil huit cent cinquante-deux il me fit don d’un magnifique Enfant Jésus qu’une personne lui avait apporté de Rome. Il me dit: “Je vous le donne parce qu’un jour, vous serez bien seule. Il sera avec vous et vous consolera. Il pourrait même vous servir à ramasser beaucoup d’argent; mais n’en faites pas commerce. Si vous en êtes digne, vous obtiendrez beaucoup de grâces.” Je promis au bon père de suivre fidèlement ses conseils et avec la grâce de Dieu, jusqu’à ce jour j’ai la douce confiance de ne pas y avoir manqué. Beaucoup de gens viennent dans ma chambre prier au pied de la statue en bois de mon magnifique Enfant Jésus que j’ai renfermé dans une niche. Il tient à sa main un riche chapelet monté en or que ce pieux père voulut bien me donner encore. Le Ciel accorde un grand nombre de grâces particulières aux visiteurs, des guérisons et des conversions. J’ai reçu des dons considérables pour orner mon appartement qui est transformé en petite chapelle: un autel en marbre de trois cents trente francs, de beaux candélabres de la même valeur, une robe de velours blanc, brodé en or de cent vingt francs et divers objets de goût. De nombreux ex-voto tapissent les (1451) murs. On s’adresse surtout au bon Dieu par l’intermédiaire du Curé d’Ars en priant devant cette statue de l’Enfant Jésus.



Je tiens de mon bon père la pieuse pratique de tout faire pour les âmes du purgatoire. Il m’a dit plusieurs fois: “Faites comme moi; donnez tout aux âmes du purgatoire; demandez par leur intercession toutes les grâces dont vous avez besoin.” Je dois déclarer ici que j’ai plus d’une fois éprouvé l’effet de leur puissante intercession. Aussi je m’applique d’une manière toute particulière à inspirer cette pratique aux diverses personnes qui viennent dans mon oratoire. Les honoraires de Messes qui me sont remis en l’honneur des âmes du purgatoire suffisent et au-delà pour les Messes que peuvent dire deux prêtres dans l’année.



Au mois d’avril mil huit cent cinquante-neuf, je dis au Serviteur de Dieu que j’allais en pèlerinage au tombeau de St François Régis à la Louvesc. Il me répondit: “Vous faites bien; c’est là où j’ai connu ma vocation.” Je lui promis de lui apporter de l’eau de la fontaine miraculeuse. “Je vous en serai reconnaissant.” A mon retour le dix-huit juillet je lui dis: “Je ne crois pas avoir fait une bonne retraite à la Louvesc, parce que je vous croyais malade. - Il est vrai que je ne suis pas malade maintenant, mais ma carrière est finie; c’est ma dernière année. Je vous l’ai dit d’autres fois pour vous contrarier, mais cette fois je vous le dis : c’est ma dernière année. N’en parlez pas. Il me faut bien ce temps pour me préparer. Si vous le disiez, je serais trop accablé. - Oh! vous êtes assez prêt. - Je ne suis qu’un grand pécheur; je pleure. - Que ferai-je donc moi-même? - Si j’ai le bonheur d’aller au Ciel, je demanderai au bon Dieu qu’il continue toujours à être votre guide. - Mon Père, demandez au bon Dieu de rester encore quelque temps parmi nous. - Non, je ne puis le demander; le bon Dieu ne le permettra pas. Je quitte bientôt le monde.” Il ajouta en versant des larmes: “Je ne sais si j’ai bien rempli les fonctions de mon ministère. - Si vous vous plaignez vous-même, que ferai-je donc moi-même en restant toujours dans le monde ? - Ce que vous faites, n’est pas si à craindre que mon ministère. - Mon Père, votre travail est (1452) bien plus grand que le mien. - Que je crains la mort, parce que je suis un grand pécheur! - La bonté de Dieu est bien plus grande ; je voudrais bien être aussi assurée que vous d’aller au Ciel.” A ce moment il me donna différents conseils qui me concernent et que je n’oublierai jamais. Il me désigna en particulier le directeur auquel je devrais m’adresser. “Mon Père, repris-je, quand donc allez-vous mourir? - Si ce n’est pas à la fin de ce mois, ce sera au commencement de l’autre. - Comment donc saurais-je le moment de votre mort, puisque vous ne voulez pas me le dire? - Quelqu’un vous le dira; vous serez à mon enterrement et vous passerez la dernière nuit auprès de mon lit de mort.” Je n’osais pas croire tout ce qu’il venait de me dire. En me donnant l’absolution il me dit: “Recevez la dernière absolution de votre Père spirituel. - Dites-moi le jour où vous devez mourir ? - Je ne veux pas vous le dire; vous resteriez là: çà vous donnerait trop d’ennui; mais vous le saurez.” Je partis d’Ars le vingt deux juillet pour faire une commission de sa part. Lorsque j’arrivai à Roanne, le Père Vadon me dit: “Je crois que Mr le Curé d’Ars est malade.” Me rappelant alors ce que le Serviteur de Dieu m’avait dit, je repartis de suite. J’arrivai à Ars le quatre août à cinq heures du soir. Mr Vianney était mort ce même jour à deux heures du matin.



Qua responsione accepta, omissis coeteris Interrogatoriis completum esse examen praedicti testis, qui aliunde ut circa quaedam facta Servi Dei deponeret inductus fuerat, Rmi Judices delegati decreverunt, et per me Notarium Actuarium, de mandato Dominationum suarum Rmarum perlecta fuit eidem testi integra depositio ab ipso emissa a principio usque ad finem, qua per ipsum bene audita et intellecta, illam in omnibus confirmavit.



(1453) Quibus peractis, injunctum fuit praedicto testi, ut se subscriberet, prout ille statim, accepto calamo se subscripsit ut immediate sequitur.



Ita pro veritate deposui

Testis scribere nesciens signum crucis fecit, ut sequitur



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TEMOIN – CLAUDINE CORCEVAY – 13 août 1864

1457 (1457) Session 161 - 13 août 1864 à 8h du matin



(1458) Juxta primum interrogatorium, monitus testis de vi et natura juramenti et gravitate perjurii, praesertim in causis Beatificationis et Canonisationis, respondit:



Je connais parfaitement la nature et la force du serment que je viens de faire et la gravité du parjure dont je me rendrais coupable si je ne disais pas toute la vérité.



Juxta secundum interrogatorium, testis interrogatus respondit:



Je m’appelle Claudine Corcevay, femme Raymond. Je suis née à Villefranche, diocèse de Lyon, le vingt neuf mai mil huit cent quinze. Mon père se nommait Jean Louis Corcevay et ma mère Marguerite Charles. Je suis dans une position aisée de fortune.



Juxta tertium interrogatorium, testis interrogatus respondit:



Je me confesse tous les huit jours et depuis une dizaine d’années, d’après le conseil du Serviteur de Dieu, je fais la communion tous les jours.



Juxta quartum interrogatorium, testis interrogatus respondit:



Je n’ai jamais été appelée en justice.



Juxta quintum interrogatorium, testis interrogatus respondit:



Je ne sache pas avoir encouru les peines ou les censures ecclésiastiques.



Juxta sextum interrogatorium, testis interrogatus respondit:



Personne ne m’a instruite de vive voix ou par écrit de ce que j’avais à dire dans cette cause. Je n’ai lu aucun des Articles du Postulateur. Je ne dirai que ce que je sais très bien, pour l’avoir vu ou l’avoir entendu.



Juxta septimum interrogatorium, testis interrogatus respondit:



J’avais pour le Serviteur de Dieu une grande vénération. Quand je paraissais devant lui j’étais vivement émue; je le regardais comme un saint de premier ordre. Depuis sa mort ma confiance envers lui a redoublé; je l’invoque tous les jours et je sollicite des grâces par son intercession. Aussi je désire sa Béatification de toute la force de mon âme. Mais en cela je ne me propose (1459) que la plus grande gloire de Dieu.



Et quoniam praedictus testis accitus fuit ad explicanda quaedam facta quae spectant dona super naturalia, omissis coeteris interrogatoriis, statim interrogatus fuit super interrogatorio vigesimo super quo ei lecto, respondit:



La première fois que j’arrivais à Ars, c’était au mois de mars mil huit cent quarante-trois. Je souffrais beaucoup d’une affection chronique au larynx et aux bronches; je ne pouvais dire aucune parole sans éprouver de vives douleurs, comme si on m’avait passé un fer rouge dans la bouche. J’étais abandonnée des médecins. Je me confessai par écrit au Serviteur de Dieu. La confession finie j’osais lui demander ma guérison. “Je demanderai pour vous d’abord la résignation, et quand vous serez bien résignée, vous guérirez.” Je me trouvais un peu soulagée à la suite de cette première visite.



Je revins au mois de mai de la même année. Le Serviteur de Dieu était gravement malade. Je fis les plus vives instances pour avoir le bonheur de me présenter à lui et de lui demander sa bénédiction. Cette faveur me fut accordée, et je fus à moitié guérie. Deux jours après Mr Vianney se trouva assez fort pour célébrer la sainte messe à trois heures du matin. Sa guérison fut regardée comme un miracle de Ste Philomène. J’eus le bonheur d’assister à sa messe. Pendant la journée il se rendit trois fois à l’église; je le consultais sur mon état. Il me dit: “Mon enfant, les remèdes de la terre vous sont inutiles; on vous en a déjà beaucoup trop administrés. Mais le bon Dieu veut vous guérir. Adressez-vous à Ste Philomène; déposez votre ardoise sur son autel; faites-lui violence; dites-lui que si elle ne veut pas vous rendre votre voix, qu’elle vous donne la sienne.” J’allais aussitôt me jeter aux pieds de Ste Philomène et dès que j’eus fait ma prière, je fus guérie. Il y avait deux ans que je ne parlais plus, six ans que je souffrais cruellement. En rentrant chez Mme Favier où j’étais logée, je lus à haute voix devant plusieurs personnes quelques pages sur la confiance en la Ste Vierge. J’étais vraiment guérie. Lorsque je revis Mr Vianney il me dit: « Mon enfant, n’oubliez pas l’action de grâces, et trouvez-vous ici pour la fête de Ste Philomène. » Je fus fidèle à sa recommandation. Pendant la messe, le jour de la fête de Ste Philomène, je chantais un cantique d’une voix forte et soutenue. Après l’office Mr Vianney me félicita de ce que Ste Philomène avait achevé ma guérison en me rendant la faculté de chanter aussi bien que celle de parler.



(1460) Deux années après, je lui disais que j’étais bien reconnaissante à Ste Philomène, et je lui demandais si elle me conserverait la parole. Il me répondit : “Oh! Mon enfant, usez-en pour la gloire de Dieu et le bien des âmes, et n’ayez pas peur.” Puis il ajouta pour ranimer ma confiance: “Il y a quelques jours, une bonne femme de la campagne avait amené ici une petite fille de sept ans, muette de naissance. Cette pauvre mère me faisait sa confession, quand tout à coup elle s’arrête: “Mon enfant, lui dis-je, continuez. - Ah! mon père, c’est impossible! Songez donc que je n’ai jamais entendu parler mon enfant! Et écoutez, écoutez!...Quelle grâce, mon père, Oh! quelle grâce!...” L’enfant avait en effet recouvré la voix, elle parlait très distinctement. Cette pauvre femme, ajouta Mr Vianney, était trop émue pour continuer sa confession. Elle ne savait que répéter en pleurant: “Quelle grâce, mon Dieu, quelle grâce!” Je crois devoir déclarer que depuis ma guérison, je n’ai jamais éprouvé aucune douleur au larynx, et cependant Dieu sait combien j’ai usé et j’use encore du don qui m’a été rendu.



En mil huit cent cinquante sept, je tombais dangereusement malade. J’avais une hépatite aiguë accompagnée d’hydropisie et d’inflammation des intestins. Le médecin, après avoir reconnu la maladie, avait déclaré qu’il n’y avait pas de guérison possible. On pria beaucoup pour moi. On fit le voyage d’Ars pour intéresser Mr Vianney en ma faveur. En montrant lui-même l’endroit où était le siège du mal, il dit: “Elle est bien malade. Oh! qu’il y a de mal là!.” Plusieurs fois il fit le même geste suivi des mêmes paroles; il ajouta: « Priez bien pour elle, et commençons ensemble une neuvaine à Ste Philomène. » A la fin de la neuvaine j’étais un peu mieux. Mon mari en profita pour aller lui-même auprès du Curé d’Ars lui demander ce qu’il pensait de mon état: “Hélas! mon ami, elle est bien malade!...Mais nous allons prier pour elle. Demain je dirai la messe à son intention à l’autel de Ste Philomène. Faites-y la sainte communion.” Après la messe mon mari le questionna à nouveau: “Mon bon ami, lui répondit-il, Dieu la guérira. J’espère que dans six semaines vous me l’amènerez.” Six semaines après, jour pour jour, mon mari me conduisait à Ars; mon docteur, dans la crainte de quelque accident, avait voulu m’accompagner. Lorsque je fus arrivée, le Serviteur de Dieu que j’avais fait prévenir, vint me voir; il me bénit et me dit avec un doux sourire: “Comme nous avons prié pour vous! Vous allez mieux; (1461) mais vous êtes encore bien faible. Allons, allons! vous serez bientôt guérie. Dieu est si bon!” Je restais quinze jours et j’étais parfaitement guérie.



Une de mes soeurs, atteinte d’aliénation mentale par suite d’un dépôt de lait, était très faible depuis trois mois. Les remèdes, les soins, les distractions lui avaient été inutilement prodigués. Sur ma recommandation ma mère la conduisit à Ars. « Ma bonne dame; lui dit Mr Vianney, faites une neuvaine à Ste Philomène; je prierai avec vous, et vous verrez que tout ira bien.” A la fin de la neuvaine il n’y avait plus chez ma soeur aucune trace de la maladie. Et depuis elle ne s’en est jamais ressentie.



Un de mes neveux était atteint depuis six ans au moins d’une Hydrocèle ou Sarcocèle du caractère le plus grave. Je l’amenais au Serviteur de Dieu. « Mon ami, lui dit le Curé en l’abordant, guérissons vite l’âme, vous irez ensuite à Lyon vous faire opérer. Ste Philomène bénira l’opération et tout ira pour le mieux: vous guérirez certainement.” Quand le jeune homme eut fini sa confession, il dit au Curé: “Mais, mon père, j’ai grande confiance en vous; vous pouvez bien me guérir. - Non, mon ami, il faut l’opération, Ste Philomène la bénira et tout ira bien.” Ce fut Mr Bariller, chirurgien de l’Hôtel-Dieu, qui fit l’opération. Quinze jours après, le malade, qui n’avait pas même pris la fièvre, vaquait à ses affaires avec la plus grande activité. Il jouit encore d’une santé parfaite.



Au mois de mai mil huit cent quarante trois, chez Mme Favier se trouvait aussi un ecclésiastique du diocèse de Moulins atteint d’une laryngie et d’une phtisie ; il ressemblait à un cadavre. Quand il demanda sa guérison au Serviteur de Dieu, celui-ci lui répondit: “N’y comptez pas, vous ne guérirez que pour le Ciel. » Malgré cette réponse ce prêtre voulut rester à Ars attendant la fin de ses souffrances. Pendant la maladie du Curé d’Ars, qui arriva dans ce moment, il se rendit très utile, multipliant ses soins, ses veilles, ses démarches et se trouvant toujours des premiers à la peine. Quand Mr Vianney eut été guéri, il lui dit: “Mon bon ami, vous avez été si charitable pendant ma maladie que le bon Dieu a changé ses desseins sur vous, vous guérirez. Vous élèverez une statue à Ste Philomène dans une des églises de votre ville. Ce sera votre action de grâces. Tout se passa comme le Curé d’Ars l’avait prédit.



(1462) Une femme de Chalons-sur-Saône, madame Dicone-Dubois (?), vers l’âge de neuf ans avait eu la hanche luxée et mal remise. Il s’y était formé un dépôt et pendant quelques années il y eut jusqu’à neuf abcès purulents. La malade était obligée de garder le lit; elle s’affaiblissait de jour en jour. Se voyant abandonnée des médecins elle résolut de se faire conduire à Ars. Ma première guérison lui avait inspiré toute confiance au Serviteur de Dieu. A la suite du premier voyage elle put marcher avec deux béquilles; au second voyage elle en quitta une; au troisième elle déposa l’autre sur l’autel de Ste Philomène et s’en retourna complètement guérie. Jusqu’à sa mort qui est arrivée à la suite d’un accident, elle a joui d’une santé brillante.



Dans un de mes voyages à Ars, je parlai au Serviteur de Dieu de mon mari, excellent homme d’ailleurs, mais qui avait la malheureuse habitude de passer trop longtemps au café.



“Il la perdra, mon enfant, me dit-il; mais il lui faut une maladie.” Quelques mois après, à la suite d’un chaud et froid, mon mari fut atteint d’une maladie à (la) moelle épinière du caractère le plus grave, avec des moments d’exaltation. J’écrivis à Ars. Le Serviteur de Dieu en recevant cette nouvelle s’écria: “Tant mieux, tant mieux. Sa femme a été exaucée.” La maladie devenant des plus alarmantes, je réclamais avec insistance les prières du saint Curé. Il me fit répondre qu’il fallait consulter les médecins. Nous nous rendîmes à Lyon, auprès du célèbre docteur Bonnet, qui me laissa peu d’espoir et me prescrivit des remèdes insignifiants. Avant de les appliquer, mon mari voulut encore consulter Mr Vianney ; il répondit qu’il fallait peu de remèdes et beaucoup de prières. Il ajouta: “Il guérira, vous me l’amènerez quand il aura fait ses pâques.” Nous suivîmes en tout ses conseils, et quand mon mari fut en sa présence à Ars, il lui dit devant plusieurs personnes: “Mon ami, le bon Dieu vous a fait beaucoup de grâces. Vous étiez moitié au monde. Le bon Dieu vous veut tout à lui, parfait chrétien, parfait chrétien. Vous guérirez aux trois quarts et demi et ce qui vous restera sera pour votre sanctification jusqu’à l’éternité. Faites votre neuvaine à Ste Philomène et vous lui laisserez le bâton dont vous vous servez encore.” La neuvaine fut faite; mais dès le quatrième ou cinquième jour, je pris moi-même le bâton et le portais à Ste Philomène. Mon mari n’en avait plus besoin. Le Serviteur de Dieu, nous ayant rencontrés, nous dit en souriant: “Vous vous êtes bien un peu pressés. Mais Ste Philomène (1463) fera le reste. » Depuis lors mon mari est un pieux et fervent chrétien, plein de reconnaissance et de confiance envers Mr Vianney.



Qua responsione accepta, omissis coeteris interrogatoriis, completum esse examen praedicti testis, qui aliunde ut circa quaedam facta Servi Dei deponeret inductus fuerat, Rmi Judices delegati decreverunt, et per me Notarium Actuarium, de mandato dominationum suarum Rmarum perlecta fuit eidem testi integra depositio ab ipso emisso a principio usque ad finem, qua per ipsum bene audita et intellecta, illam in omnibus confirmavit.



Quibus peractis, injunctum fuit praedicto testi, ut se subscriberet, prout ille statim, accepto calamo se subscripsit ut immediate sequitur.



Ita pro veritate deposui



Claudine Corcevay fme Raymond






Ars Procès informatif 1423