Catéchisme Eglise Cath. 1674

La religiosité populaire

1674 Hors de la Liturgie sacramentelle et des sacramentaux, la catéchèse doit tenir compte des formes de la piété des fidèles et de la religiosité populaire. Le sens religieux du peuple chrétien a , de tout temps, trouvé son expression dans des formes variées de piété qui entourent la vie sacramentelle de l’Église, tels que la vénération des reliques, les visites aux sanctuaires, les pèlerinages, les processions, le chemin de croix, les danses religieuses, le rosaire, les médailles, etc. (cf. Cc. Nicée II : DS 601 DS 603 Cc. Trente : DS 1822).


1675 Ces expressions prolongent la vie liturgique de l’Église, mais ne la remplacent pas : " Ils doivent être réglés en tenant compte des temps liturgiques et de façon à s’harmoniser avec la liturgie, à en découler d’une certaine manière et à y introduire le peuple, parce que la liturgie, de sa nature, leur est de loin supérieure " (SC 13).


1676 Un discernement pastoral est nécessaire pour soutenir et appuyer la religiosité populaire et, le cas échéant, pour purifier et rectifier le sens religieux qui sous-tend ces dévotions et pour les faire progresser dans la connaissance du Mystère au Christ (cf. Ct 54). Leur exercice est soumis au soin et au jugement des évêques et aux normes générales de l’Église (cf. Ct 54).

La religiosité populaire, pour l’essentiel, est un ensemble de valeurs qui, avec sagesse chrétienne, répond aux grandes interrogations de l’existence. Le bon sens populaire catholique est fait de capacité de synthèse pour l’existence. C’est ainsi qu’il fait aller ensemble, de façon créative, le divin et l’humain, le Christ et Marie, l’esprit et le corps, la communion et l’institution, la personne et la communauté, la foi et la patrie, l’intelligence et le sentiment. Cette sagesse est un humanisme chrétien qui affirme radicalement la dignité de tout être comme fils de Dieu, instaure une fraternité fondamentale, apprend à rencontrer la nature comme à comprendre le travail, et donne des raisons de vivre dans la joie et la bonne humeur, même aux milieu des duretés de l’existence. Cette sagesse est aussi pour le peuple un principe de discernement, un instinct évangélique qui lui fait percevoir spontanément quand l’Evangile est le premier servi dans l’Église, ou quand il est vidé de son contenu et asphyxié par d’autres intérêts (Document de Puebla ; cf. EN 48).


En bref

1677 On appelle sacramentaux les signes sacrés instituées par l’Église dont le but est de préparer les hommes à recevoir le fruit des sacrements et de sanctifier les différentes circonstances de la vie.


1678 Parmi les sacramentaux, les bénédictions occupent une place importante. Elles comportent à la fois la louange de Dieu pour ses oeuvres et ses dons, et l’intercession de l’Église afin que les hommes puissent faire usage des dons de Dieu selon l’esprit de l’Evangile.


1679 En plus de la Liturgie, la vie chrétienne se nourrit des formes variées de piété populaire, enracinées dans les différentes cultures. Tout en veillant à les éclairer par la lumière de la foi, l’Église favorise les formes de religiosité populaire qui expriment un instinct évangélique et une sagesse humaine et qui enrichissent la vie chrétienne.

Article 2

Les funérailles chrétiennes

1680 Tous les sacrements, et principalement ceux de l’initiation chrétienne, avaient pour but la dernière Pâque de l’enfant de Dieu, celle qui, par la mort, le fait entrer dans la Vie du Royaume. Alors s’accomplit ce qu’il confessait dans la foi et dans l’espérance : " J’attends la Résurrection des morts et la Vie du monde à venir " (Symbole de Nicée-Constantinople).

I. La dernière Pâque du Chrétien

1681 Le sens chrétien de la mort est révélé dans la lumière du Mystère pascal de la mort et de la résurrection du Christ, en qui repose notre unique espérance. Le chrétien qui meurt dans le Christ Jésus " quitte ce corps pour aller demeurer auprès du Seigneur " (2Co 5,8).


1682 Le jour de la mort inaugure pour le chrétien, au terme de sa vie sacramentelle, l’achèvement de sa nouvelle naissance commencée au Baptême, la " ressemblance " définitive à " l’image du Fils " conférée par l’Onction de l’Esprit Saint et la participation au Festin du Royaume qui était anticipée dans l’Eucharistie, même si d’ultimes purifications lui sont encore nécessaires pour revêtir la robe nuptiale.


1683 L’Église qui, comme Mère, a porté sacramentellement en son sein le chrétien durant son pèlerinage terrestre, l’accompagne au terme de son cheminement pour le remettre " entre les mains du Père ". Elle offre au Père, dans le Christ, l’enfant de sa grâce, et elle dépose en terre, dans l’espérance, le germe du corps qui ressuscitera dans la gloire (cf. 1Co 15,42-44). Cette offrande est pleinement célébrée par le Sacrifice eucharistique ; les bénédictions qui précèdent et qui suivent sont des sacramentaux.


II. La célébration des funérailles

1684 Les funérailles chrétiennes sont une célébration liturgique de l’Eglise. Par celle-ci, le ministère de l’Église a en vue dans ce cas aussi bien d’exprimer la communion efficace avec le défunt que d’y faire participer la communauté rassemblée pour les obsèques et de lui annoncer la vie éternelle.


1685 Les différents rites des funérailles expriment le caractère Pascal de la mort chrétienne et répondent aux situations et aux traditions de chaque région, même en ce qui concerne la couleur liturgique (cf. SC 81).


1686 L’Ordo exsequiarum (OEx) de la liturgie romaine propose trois types de célébration des funérailles, correspondant aux trois lieux de son déroulement (la maison, l’église, le cimetière), et selon l’importance qu’y attachent la famille, les coutumes locales, la culture et la piété populaire. Ce déroulement est d’ailleurs commun à toutes les traditions liturgiques et il comprend quatre moments principaux :


1687 L’accueil de la communauté. Une salutation de foi ouvre la célébration. Les proches du défunt sont accueillis par une parole de " consolation " (au sens du Nouveau Testament : la force de l’Esprit Saint dans l’espérance ; cf. 1Th 4,18). La communauté priante qui se rassemble attend aussi " les paroles de la vie éternelle ". La mort d’un membre de la communauté (ou le jour anniversaire, le septième ou le trentième jour) est un événement qui doit faire dépasser les perspectives de " ce monde-ci " et attirer les fidèles dans les véritables perspectives de la foi au Christ ressuscité.


1688 La Liturgie de la Parole, lors de funérailles, exige une préparation d’autant plus attentive que l’assemblée alors présente peut comprendre des fidèles peu assidus à la liturgie et des amis du défunt qui ne sont pas chrétiens. L’homélie, en particulier, doit " éviter le genre littéraire de l’éloge funèbre " (OEx 41) et illuminer le mystère de la mort chrétienne dans la lumière du Christ ressuscité.


1689 Le Sacrifice eucharistique. Lorsque la célébration a lieu dans l’église, l’Eucharistie est le coeur de la réalité Pascale de la mort chrétienne (cf. OEx 1). C’est alors que l’Église exprime sa communion efficace avec le défunt : offrant au Père, dans l’Esprit Saint, le sacrifice de la mort et de la résurrection du Christ, elle lui demande que son enfant soit purifié de ses péchés et de ses conséquences et qu’il soit admis à la plénitude Pascale de la table du Royaume (cf. OEx 57). C’est par l’Eucharistie ainsi célébrée que la communauté des fidèles, spécialement la famille du défunt, apprend à vivre en communion avec celui qui " s’est endormi dans le Seigneur ", en communiant au Corps du Christ dont il est membre vivant et en priant ensuite pour lui et avec lui.


1690 L’adieu (" à-Dieu ") au défunt est sa " recommandation à Dieu " par l’Église. C’est " le dernier adieu par lequel la communauté chrétienne salue un de ses membres avant que le corps de celui-ci ne soit porté à sa tombe " (OEx 10). La tradition byzantine l’exprime par le baiser d’adieu au défunt :

Par ce salut final " on chante pour son départ de cette vie et pour sa séparation, mais aussi parce qu’il y a une communion et une réunion. En effet, morts nous ne sommes nullement séparés les uns des autres, car tous nous parcourons le même chemin et nous nous retrouverons dans le même lieu. Nous ne serons jamais séparés, car nous vivons pour le Christ, et maintenant nous sommes unis au Christ, allant vers lui... nous serons tous ensemble dans le Christ " (Saint Syméon de Thessalonique, De ordine sepulturae, 367 : PG 155, 685B).






Troisième Partie

La vie dans le Christ


1691 " Chrétien, reconnais ta dignité. Puisque tu participes maintenant à la nature divine, ne dégénère pas en revenant à la déchéance de ta vie passée. Rappelle-toi à quel Chef tu appartiens et de quel Corps tu es membre. Souviens-toi que tu as été arraché au pouvoir des ténèbres pour être transféré dans la lumière et le Royaume de Dieu " (S. Léon le Grand, serm. 21, 2-3 : PL 54, 192A).


1692 Le Symbole de la foi a professé la grandeur des dons de Dieu à l’homme dans l’oeuvre de sa création, et plus encore par la rédemption et la sanctification. Ce que la foi confesse, les sacrements le communiquent : par " les sacrements qui les ont fait renaître ", les chrétiens sont devenus " enfants de Dieu " (Jn 1,12 1Jn 3,1), " participants de la nature divine " (2P 1,4). En reconnaissant dans la foi leur dignité nouvelle, les chrétiens sont appelés à mener désormais une " vie digne de l’Evangile du Christ " (Ph 1,27). Par les sacrements et la prière, ils reçoivent la grâce du Christ et les dons de son Esprit qui les en rendent capables.


1693 Le Christ Jésus a toujours fait ce qui plaisait au Père (cf. Jn 8,29). Il a toujours vécu en parfaite communion avec Lui. De même ses disciples sont-ils invités à vivre sous le regard du Père " qui voit dans le secret " (cf. Mt 6) pour devenir " parfaits comme le Père céleste est parfait " (Mt 5,47).


1694 Incorporés au Christ par le baptême (cf. Rm 6,5), les chrétiens sont " morts au péché et vivants à Dieu dans le Christ Jésus " (Rm 6,11), participant ainsi à la vie du Ressuscité (cf. Col 2,12). A la suite du Christ et en union avec lui (cf. Jn 15,5), les chrétiens peuvent " chercher à imiter Dieu comme des enfants bien-aimés et suivre la voie de l’amour " (Ep 5,1), en conformant leurs pensées, leurs paroles et leurs actions aux " sentiments qui sont dans le Christ Jésus " (Ph 2,5) et en suivant ses exemples (cf. Jn 13,12-16).


1695 " Justifiés par le Nom du Seigneur Jésus Christ et par l’Esprit de notre Dieu " (1Co 6,11), " sanctifiés et appelés à être saints " (1Co 1,2), les chrétiens sont devenus " le Temple de l’Esprit Saint " (cf. 1Co 6,19). Cet " Esprit du Fils " leur apprend à prier le Père (cf. Ga 4,6) et, étant devenu leur vie, les fait agir (cf. Ga 5,25) pour " porter les fruits de l’Esprit " (Ga 5,22) par la charité en oeuvre. Guérissant les blessures du péché, l’Esprit Saint nous " renouvelle intérieurement par une transformation spirituelle " (Ep 4,23), il nous éclaire et nous fortifie pour vivre en " enfant de lumière " (Ep 5,8) par " la bonté, la justice et la vérité " en toute chose (Ep 5,9).


1696 La voie du Christ " mène à la vie ", une voie contraire " mène à la perdition " (Mt 7,13 cf. Dt 30,15-20). La parabole évangélique des deux voies reste toujours présente dans la catéchèse de l’Église. Elle signifie l’importance des décisions morales pour notre salut. " Il y a deux voies, l’une de la vie, l’autre de la mort ; mais entre les deux, une grande différence " (Didaché 1, 1).


1697 Dans la catéchèse, il importe de révéler en toute clarté la joie et les exigences de la voie du Christ (cf. Ct 29). La catéchèse de la " vie nouvelle " (Rm 6,4) en Lui sera :

une catéchèse du Saint Esprit, Maître intérieur de la vie selon le Christ, doux hôte et ami qui inspire, conduit, rectifie et fortifie cette vie ;

une catéchèse de la grâce, car c’est par grâce que nous sommes sauvés, et c’est encore par la grâce que nos oeuvres peuvent porter du fruit pour la vie éternelle ;

une catéchèse des béatitudes, car la voie du Christ est résumée dans les béatitudes, seul chemin vers le bonheur éternel auquel le coeur de l’homme aspire ;

une catéchèse du péché et du pardon, car sans se reconnaître pécheur, l’homme ne peut connaître la vérité sur lui-même, condition de l’agir juste, et sans l’offre du pardon il ne pourrait supporter cette vérité ;

une catéchèse des vertus humaines qui fait saisir la beauté et l’attrait des droites dispositions pour le bien ;

une catéchèse des vertus chrétiennes de foi, d’espérance et de charité qui s’inspire magnanimement de l’exemple des saints ;

une catéchèse du double commandement de la charité déployé dans le Décalogue ;

une catéchèse ecclésiale, car c’est dans les multiples échanges des " biens spirituels " dans la " communion des saints " que la vie chrétienne peut croître, se déployer et se communiquer.


1698 La référence première et ultime de cette catéchèse sera toujours Jésus Christ lui-même qui est " le chemin, la vérité et la vie " (Jn 14,6). C’est en le regardant dans la foi que les fidèles du Christ peuvent espérer qu’il réalise lui-même en eux ses promesses, et qu’en l’aimant de l’amour dont il les a aimés, ils fassent les oeuvres qui correspondent à leur dignité :

Je vous prie de considérer que Jésus Christ notre Seigneur est votre véritable Chef, et que vous êtes un de ses membres. Il est à vous comme le chef est à ses membres ; tout ce qui est à lui est à vous, son esprit, son Coeur, son corps, son âme, et toutes ses facultés, et vous devez en faire usage comme de choses qui sont vôtres, pour servir, louer, aimer et glorifier Dieu. Vous êtes à Lui, comme les membres sont à leur chef. Aussi désire-t-il ardemment faire usage de tout ce qui est en vous, pour le service et la gloire de son Père, comme des choses qui sont à lui (S. Jean Eudes, Le coeur admirable de la Très Sacrée Mère de Dieu, 1, 5 : Oeuvres complètes v. 6 [Paris 1908] p. 113-114).

Ma vie, c’est le Christ (Ph 1,21).

Première section

La vocation de l’homme :

La vie dans l’esprit


1699 La vie dans l’Esprit Saint accomplit la vocation de l’homme (Chapitre premier). Elle est faite de charité divine et de solidarité humaine (Chapitre deuxième). Elle est gracieusement accordée comme un Salut (Chapitre troisième).

Chapitre premier

La dignité de la personne humaine


1700 La dignité de la personne humaine s’enracine dans sa création à l’image et à la ressemblance de Dieu (article 1) ; elle s’accomplit dans sa vocation à la béatitude divine (article 2). Il appartient à l’être humain de se porter librement à cet achèvement (article 3). Par ses actes délibérés (article 4), la personne humaine se conforme, ou non, au bien promis par Dieu et attesté par la conscience morale (article 5). Les êtres humains s’édifient eux-mêmes et grandissent de l’intérieur : ils font de toute leur vie sensible et spirituelle un matériau de leur croissance (article 6). Avec l’aide de la grâce ils grandissent dans la vertu (article 7), évitent le péché et s’ils l’ont commis, s’en remettent comme l’enfant prodigue (cf. Lc 15,11-31) à la miséricorde de notre Père des Cieux (article 8). Ils accèdent ainsi à la perfection de la charité.

Article 1

L’homme image de Dieu


1701 " Le Christ, dans la révélation du mystère du Père et de son Amour, manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation " (GS 22, § 1). C’est dans le Christ, " image du Dieu invisible " (Col 1,15 cf. 2Co 4,4), que l’homme a été créé à " l’image et à la ressemblance " du Créateur. C’est dans le Christ, rédempteur et sauveur, que l’image divine, altérée dans l’homme par le premier péché, a été restaurée dans sa beauté originelle et ennoblie de la grâce de Dieu (cf. GS 22).


1702 L’image divine est présente en chaque homme. Elle resplendit dans la communion des personnes, à la ressemblance de l’unité des personnes divines entre elles (cf. chapitre deuxième).


1703 Dotée d’une âme " spirituelle et immortelle " (GS 14), la personne humaine est " la seule créature sur la terre que Dieu a voulue pour elle-même " (GS 24, § 3). Dès sa conception, elle est destinée à la béatitude éternelle.


1704 La personne humaine participe à la lumière et à la force de l’Esprit divin. Par la raison, elle est capable de comprendre l’ordre des choses établi par le Créateur. Par sa volonté, elle est capable de se porter d’elle-même vers son bien véritable. Elle trouve sa perfection dans " la recherche et l’amour du vrai et du bien " (GS 15, § 2).


1705 En vertu de son âme et de ses puissances spirituelles d’intelligence et de volonté l’homme est doté de liberté " signe privilégié de l’image divine " (GS 17).


1706 Par sa raison, l’homme connaît la voix de Dieu qui le presse " d’accomplir le bien et d’éviter le mal " (GS 16). Chacun est tenu de suivre cette loi qui résonne dans la conscience et qui s’accomplit dans l’amour de Dieu et du prochain. L’exercice de la vie morale atteste la dignité de la personne.


1707 " Séduit par le Malin, dès le début de l’histoire, l’homme a abusé de sa liberté " (GS 13, § 1). Il a succombé à la tentation et commis le mal. Il conserve le désir du bien, mais sa nature porte la blessure du péché originel. Il est devenu enclin au mal et sujet à l’erreur :

C’est en lui-même que l’homme est divisé. Voici que toute la vie des hommes, individuelle et collective, se manifeste comme une lutte, combien dramatique, entre le bien et le mal, entre la lumière et les ténèbres (GS 13, § 2).


1708 Par sa passion, le Christ nous a délivrés de Satan et du péché. Il nous a mérité la vie nouvelle dans l’Esprit Saint. Sa grâce restaure ce que le péché avait détérioré en nous.


1709 Celui qui croit au Christ devient fils de Dieu. Cette adoption filiale le transforme en lui donnant de suivre l’exemple du Christ. Elle le rend capable d’agir droitement et de pratiquer le bien. Dans l’union avec son Sauveur, le disciple atteint la perfection de la charité, la sainteté. Mûrie dans la grâce, la vie morale s’épanouit en vie éternelle, dans la gloire du ciel.


En bref

1710 " Le Christ manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation " (GS 22, § 1).


1711 Dotée d’une âme spirituelle, d’intelligence et de volonté, la personne humaine est dès sa conception ordonnée à Dieu et destinée à la béatitude éternelle. Elle poursuit sa perfection dans " la recherche et l’amour du vrai et du bien " (GS 15, § 2).


1712 La liberté véritable est en l’homme le " signe privilégié de l’image divine " (GS 17).


1713 L’homme est tenu de suivre la loi morale qui le presse d’ "accomplir le bien et d’éviter le mal " (GS 16). Cette loi résonne dans sa conscience.


1714 L’homme blessé dans sa nature par le péché originel est sujet à l’erreur et enclin au mal dans l’exercice de sa liberté.


1715 Celui qui croit au Christ a la vie nouvelle dans l’Esprit Saint. La vie morale, grandie et mûrie dans la grâce, doit s’accomplir dans la gloire du ciel.

Article 2

Notre vocation a la beatitude


I. Les béatitudes

1716 Les béatitudes sont au coeur de la prédication de Jésus. Leur annonce reprend les promesses faites au peuple élu depuis Abraham. Elle les accomplit en les ordonnant non plus à la seule jouissance d’une terre, mais au Royaume des Cieux :

Bienheureux ceux qui ont une âme de pauvre, car le Royaume des cieux est à eux.

Bienheureux les doux, car ils possèderont la terre.

Bienheureux les affligés, car ils seront consolés.

Bienheureux les affamés et assoiffés de la justice, car ils seront rassasiés.

Bienheureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde.

Bienheureux les coeurs purs, car ils verront Dieu.

Bienheureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu.

Bienheureux les persécutés pour la justice, car le Royaume de Dieu est à eux.

Bienheureux êtes-vous quand on vous insultera, qu’on vous persécutera et qu’on dira faussement contre vous toute sorte d’infamie à cause de moi.

Soyez dans la joie et l’allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux



(@MT 5,3-10@).


1717 Les béatitudes dépeignent le visage de Jésus-Christ et en décrivent la charité ; elles expriment la vocation des fidèles associés à la gloire de sa Passion et de sa Résurrection ; elles éclairent les actions et les attitudes caractéristiques de la vie chrétienne ; elles sont les promesses paradoxales qui soutiennent l’espérance dans les tribulations ; elles annoncent les bénédictions et les récompenses déjà obscurément acquises aux disciples ; elles sont inaugurées dans la vie de la Vierge Marie et de tous les saints.


II. Le désir de bonheur

1718 Les béatitudes répondent au désir naturel de bonheur. Ce désir est d’origine divine : Dieu l’a mis dans le coeur de l’homme afin de l’attirer à Lui qui seul peut le combler :

Tous certainement nous voulons vivre heureux, et dans le genre humain il n’est personne qui ne donne son assentiment à cette proposition avant même qu’elle ne soit pleinement énoncée (S. Augustin, mor. eccl. 1, 3, 4 : PL 32, 1312).

Comment est-ce donc que je te cherche, Seigneur ? Puisqu’en te cherchant, mon Dieu, je cherche la vie heureuse, fais que je te cherche pour que vive mon âme, car mon corps vit de mon âme et mon âme vit de toi (S. Augustin, conf. 10, 29).

Dieu seul rassasie (S. Thomas d’A., symb. 1).


1719 Les béatitudes découvrent le but de l’existence humaine, la fin ultime des actes humains : Dieu nous appelle à sa propre béatitude. Cette vocation s’adresse à chacun personnellement, mais aussi à l’ensemble de l’Église, peuple nouveau de ceux qui ont accueilli la promesse et en vivent dans la foi.


III. La béatitude chrétienne

1720 Le Nouveau Testament utilise plusieurs expressions pour caractériser la béatitude à laquelle Dieu appelle l’homme : l’avènement du Royaume de Dieu (cf. Mt 4,17) ; la vision de Dieu : " Heureux les coeurs purs, car ils verront Dieu " (Mt 5,8 cf. 1Jn 3,2 1Co 13,12) ; l’entrée dans la joie du Seigneur (cf. Mt 25,21 Mt 25,23) ; l’entrée dans le Repos de Dieu (He 4,7-11) :

Là nous reposerons et nous verrons ; nous verrons et nous aimerons ; nous aimerons et nous louerons. Voilà ce qui sera à la fin sans fin. Et quelle autre fin avons-nous, sinon de parvenir au royaume qui n’aura pas de fin ? (S. Augustin, ).


1721 Car Dieu nous a mis au monde pour le connaître, le servir et l’aimer et ainsi parvenir en Paradis. La béatitude nous fait participer à la nature divine (1P 1,4) et à la Vie éternelle (cf. Jn 17,3). Avec elle, l’homme entre dans la gloire du Christ (cf. Rm 8,18) et dans la jouissance de la vie trinitaire.


1722 Une telle béatitude dépasse l’intelligence et les seules forces humaines. Elle résulte d’un don gratuit de Dieu. C’est pourquoi on la dit surnaturelle, ainsi que la grâce qui dispose l’homme à entrer dans la jouissance divine.

" Bienheureux les coeurs purs parce qu’ils verront Dieu ". Certes, selon sa grandeur et son inexprimable gloire, " nul ne verra Dieu et vivra ", car le Père est insaisissable ; mais selon son amour, sa bonté envers les hommes et sa toute-puissance, il va jusqu’à accorder à ceux qui l’aiment le privilège de voir Dieu ... " car ce qui est impossible aux hommes est possible à Dieu " (S. Irénée, haer. 4, 20, 5).


1723 La béatitude promise nous place devant les choix moraux décisifs. Elle nous invite à purifier notre coeur de ses instincts mauvais et à rechercher l’amour de Dieu par dessus tout. Elle nous enseigne que le vrai bonheur ne réside ni dans la richesse ou le bien-être, ni dans la gloire humaine ou le pouvoir, ni dans aucune oeuvre humaine, si utile soit-elle, comme les sciences, les techniques et les arts, ni dans aucune créature, mais en Dieu seul, source de tout bien et de tout amour :

La richesse est la grande divinité du jour ; c’est à elle que la multitude, toute la masse des hommes, rend un instinctif hommage. Ils mesurent le bonheur d’après la fortune, et d’après la fortune aussi ils mesurent l’honorabilité ... Tout cela vient de cette conviction qu’avec la richesse on peut tout. La richesse est donc une des idoles du jour et la notoriété en est une autre ... La notoriété, le fait d’être connu et de faire du bruit dans le monde (ce qu’on pourrait nommer une renommée de presse), en est venue à être considérée comme un bien en elle-même, un souverain bien, un objet, elle aussi, de véritable vénération (Newman, mix. 5, sur la sainteté).


1724 Le Décalogue, le Sermon sur la Montagne et la catéchèse apostolique nous décrivent les chemins qui conduisent au Royaume des cieux. Nous nous y engageons pas à pas, par des actes quotidiens, soutenus par la grâce de l’Esprit Saint. Fécondés par la Parole du Christ, lentement nous portons des fruits dans l’Église pour la gloire de Dieu (cf. la parabole du semeur : Mt 13,3-23).


En bref

1725 Les béatitudes reprennent et accomplissent les promesses de Dieu depuis Abraham en les ordonnant au Royaume des cieux. Elles répondent au désir de bonheur que Dieu a placé dans le coeur de l’homme.


1726 Les béatitudes nous enseignent la fin ultime à laquelle Dieu nous appelle : le Royaume, la vision de Dieu, la participation à la nature divine, la vie éternelle, la filiation, le repos en Dieu.


1727 La béatitude de la vie éternelle est un don gratuit de Dieu ; elle est surnaturelle comme la grâce qui y conduit.


1728 Les béatitudes nous placent devant des choix décisifs concernant les biens terrestres ; elles purifient notre coeur pour nous apprendre à aimer Dieu par dessus tout.


1729 La béatitude du Ciel détermine les critères de discernement dans l’usage des biens terrestres conformément à la Loi de Dieu.

Article 3

La liberté de l’homme


1730 Dieu a créé l’homme raisonnable en lui conférant la dignité d’une personne douée de l’initiative et de la maîtrise de ses actes. " Dieu a ‘laissé l’homme à son propre conseil’ (Si 15,14) pour qu’il puisse de lui-même chercher son Créateur et, en adhérant librement à Lui, parvenir à la pleine et bienheureuse perfection " (GS 17) :

L’homme est raisonnable, et par là semblable à Dieu, créé libre et maître de ses actes (S. Irénée, haer. 4, 4, 3).


I. Liberté et responsabilité

1731 La liberté est le pouvoir, enraciné dans la raison et la volonté, d’agir ou de ne pas agir, de faire ceci ou cela, de poser ainsi par soi-même des actions délibérées. Par le libre arbitre chacun dispose de soi. La liberté est en l’homme une force de croissance et de maturation dans la vérité et la bonté. La liberté atteint sa perfection quand elle est ordonnée à Dieu, notre béatitude.


1732 Tant qu’elle ne s’est pas fixée définitivement dans son bien ultime qu’est Dieu, la liberté implique la possibilité de choisir entre le bien et le mal, donc celle de grandir en perfection ou de défaillir et de pécher. Elle caractérise les actes proprement humains. Elle devient source de louange ou de blâme, de mérite ou de démérite.


1733 Plus on fait le bien, plus on devient libre. Il n’y a de liberté vraie qu’au service du bien et de la justice. Le choix de la désobéissance et du mal est un abus de la liberté et conduit à " l’esclavage du péché " (cf. Rm 6,17).


1734 La liberté rend l’homme responsable de ses actes dans la mesure où ils sont volontaires. Le progrès dans la vertu, la connaissance du bien et l’ascèse accroissent la maîtrise de la volonté sur ses actes.


1735 L’imputabilité et la responsabilité d’une action peuvent être diminuées voire supprimées par l’ignorance, l’inadvertance, la violence, la crainte, les habitudes, les affections immodérées et d’autres facteurs psychiques ou sociaux.


1736 Tout acte directement voulu est imputable à son auteur :

Ainsi le Seigneur demande à Adam après le péché dans le jardin : " Qu’as-tu fait là ? " (
Gn 3,13). De même à Caïn (cf. Gn 4,10). Ainsi encore le prophète Nathan au roi David après l’adultère avec la femme d’Urie et le meurtre de celui-ci (cf. 2S 12,7-15).

Une action peut être indirectement volontaire quant elle résulte d’une négligence à l’égard de ce qu’on aurait dû connaître ou faire, par exemple un accident provenant d’une ignorance du code de la route.


1737 Un effet peut être toléré sans être voulu par l’agent, par exemple l’épuisement d’une mère au chevet de son enfant malade. L’effet mauvais n’est pas imputable s’il n’a été voulu ni comme fin ni comme moyen de l’action, ainsi la mort reçue en portant secours à une personne en danger. Pour que l’effet mauvais soit imputable, il faut qu’il soit prévisible et que celui qui agit ait la possibilité de l’éviter, par exemple dans le cas d’un homicide commis par un conducteur en état d’ivresse.


1738 La liberté s’exerce dans les rapports entre les êtres humains. Chaque personne humaine, créée à l’image de Dieu, a le droit naturel d’être reconnue comme un être libre et responsable. Tous doivent à chacun ce devoir du respect. Le droit à l’exercice de la liberté est une exigence inséparable de la dignité de la personne humaine, notamment en matière morale et religieuse (cf. DH DH 2). Ce droit doit être civilement reconnu et protégé dans les limites du bien commun et de l’ordre public (cf. DH DH 7).


II. La liberté humaine dans l’économie du salut

1739 Liberté et péché. La liberté de l’homme est finie et faillible. De fait, l’homme a failli. Librement, il a péché. En refusant le projet d’amour de Dieu, il s’est trompé lui-même ; il est devenu esclave du péché. Cette aliénation première en a engendré une multitude d’autres. L’histoire de l’humanité, depuis ses origines, témoigne des malheurs et des oppressions nés du coeur de l’homme, par suite d’un mauvais usage de la liberté.


1740 Menaces pour la liberté. L’exercice de la liberté n’implique pas le droit de tout dire et de tout faire. Il est faux de prétendre que " l’homme, sujet de la liberté, se suffit à lui-même en ayant pour fin la satisfaction de son intérêt propre dans la jouissance des biens terrestres " (CDF, instr. " Libertatis conscientia " 13). Par ailleurs, les conditions d’ordre économique et social, politique et culturel requises pour un juste exercice de la liberté sont trop souvent méconnues et violées. Ces situations d’aveuglement et d’injustice grèvent la vie morale et placent aussi bien les forts que les faibles en tentation de pécher contre la charité. En s’écartant de la loi morale, l’homme porte atteinte à sa propre liberté, il s’enchaîne à lui-même, rompt la fraternité de ses semblables et se rebelle contre la vérité divine.


1741 Libération et salut. Par sa Croix glorieuse, le Christ a obtenu le salut de tous les hommes. Il les a rachetés du péché qui les détenait en esclavage. " C’est pour la liberté que le Christ nous a libérés " (Ga 5,1). En Lui, nous communions à " la vérité qui nous rend libres " (Jn 8,32). L’Esprit Saint nous a été donné et, comme l’enseigne l’Apôtre, " là où est l’Esprit, là est la liberté " (2Co 3,17). Dès maintenant, nous nous glorifions de la " liberté des enfants de Dieu " (Rm 8,21).


1742 Liberté et grâce. La grâce du Christ ne se pose nullement en concurrente de notre liberté, quand celle-ci correspond au sens de la vérité et du bien que Dieu a placé dans le coeur de l’homme. Au contraire, comme l’expérience chrétienne en témoigne notamment dans la prière, plus nous sommes dociles aux impulsions de la grâce, plus s’accroissent notre liberté intime et notre assurance dans les épreuves, comme devant les pressions et les contraintes du monde extérieur. Par le travail de la grâce, l’Esprit Saint nous éduque à la liberté spirituelle pour faire de nous de libres collaborateurs de son oeuvre dans l’Église et dans le monde :

Dieu qui es bon et tout-puissant, éloigne de nous ce qui nous arrête, afin que sans aucune entrave, ni d’esprit ni de corps, nous soyons libres pour accomplir ta volonté (MR, collecte du 32e dimanche).




Catéchisme Eglise Cath. 1674