Discours 2005-2013 20310

AUX ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU BURKINA FASO-NIGER EN VISITE « AD LIMINA APOSTOLORUM » Samedi 20 mars 2010

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Chers Frères dans l’Épiscopat,

C’est avec une grande joie que je vous accueille, vous qui avez reçu la charge pastorale de l’Église qui est au Burkina Faso et au Niger. Je salue particulièrement le Président de votre Conférence épiscopale, Mgr Séraphin Rouamba, Archevêque de Koupéla, et je le remercie de ses aimables paroles. à vos diocésains et à tous les habitants de vos pays, particulièrement aux malades et aux personnes qui sont dans l’épreuve, apportez les encouragements et les salutations affectueuses du Pape. La visite ad limina que vous accomplissez est un signe concret de communion entre vos Églises particulières et l’Église universelle, qui se manifeste de manière significative dans votre lien avec le Successeur de Pierre. Je souhaite que le renforcement de cette unité entre vous et au sein de l’Église, fortifie votre ministère et augmente la crédibilité du témoignage des disciples du Christ.

Après plus d’un siècle, l’évangélisation a déjà porté des fruits abondants, visibles à travers tant de signes de la vitalité de l’Église-famille de Dieu dans vos pays. Qu’un nouvel élan missionnaire anime vos communautés, afin que le message évangélique soit pleinement accueilli et fidèlement vécu ! La foi a toujours besoin de consolider ses racines pour ne pas revenir à des pratiques anciennes ou incompatibles avec la suite du Christ et pour résister aux appels d’un monde parfois hostile à l’idéal évangélique. Je salue les efforts entrepris depuis de nombreuses années pour une saine inculturation de la foi. Vous veillerez à ce qu’ils se poursuivent grâce au travail de personnes compétentes, dans le respect des normes et en référence aux structures appropriées. Par ailleurs, je vous encourage à continuer le bel effort missionnaire de solidarité que vous avez entrepris avec générosité à l’égard des Églises-soeurs de votre continent !

La récente Assemblée synodale pour l’Afrique a invité les communautés chrétiennes à faire face aux défis de la réconciliation, de la justice et de la paix. Je me réjouis de savoir que dans vos diocèses, l’Église continue, de diverses façons, la lutte contre les maux qui empêchent les populations de parvenir à un authentique développement. Ainsi, les graves inondations de septembre dernier ont-elles été l’occasion de promouvoir la solidarité envers tous et notamment envers les plus démunis. Cette solidarité enracinée dans l’amour de Dieu doit être un engagement permanent de la communauté ecclésiale : vos fidèles l’ont encore généreusement exprimée à l’égard des victimes du récent séisme d’Haïti, malgré les grandes nécessités qui sont les leurs. Je les en remercie vivement. Et je voudrais enfin saluer particulièrement ici l’oeuvre accomplie par la Fondation Jean-Paul II pour le Sahel qui, l’an dernier, a célébré à Ouagadougou son vingt-cinquième anniversaire.

Chers Frères dans l’Épiscopat, l’année sacerdotale contribue à mettre en valeur la grandeur du sacerdoce et à promouvoir un renouveau intérieur dans la vie des prêtres, afin que leur ministère soit toujours plus intense et fécond. Le prêtre est avant tout un homme de Dieu, qui cherche à répondre avec toujours plus de cohérence à sa vocation et à sa mission au service du peuple qui lui est confié et qu’il doit guider vers Dieu. Pour cela il est nécessaire de lui assurer une solide formation, non seulement au temps de la préparation à l’ordination, mais tout au long de son ministère. Il est en effet indispensable que le prêtre puisse prendre le temps d’approfondir sa vie sacerdotale afin d’éviter de tomber dans l’activisme. Que l’exemple de saint Jean-Marie Vianney suscite dans le coeur de vos prêtres, dont je salue l’engagement missionnaire courageux, une conscience renouvelée de leur donation totale au Christ et à l’Église, nourrie d’une fervente vie de prière et de l’amour passionné du Seigneur Jésus ! Puisse leur exemple susciter de nombreuses vocations sacerdotales !

Les catéchistes sont les collaborateurs indispensables des prêtres dans l’annonce de l’Évangile. Ils ont un rôle essentiel non seulement dans la première évangélisation et pour le catéchuménat mais aussi dans l’animation et le soutien de vos communautés, en lien avec les autres agents pastoraux. Par votre intermédiaire, je voudrais les saluer chaleureusement et les encourager dans leur tâche d’évangélisateurs de leurs frères. Vos diocèses font des efforts importants en vue de garantir leur formation humaine, intellectuelle, spirituelle et pastorale, leur permettant ainsi d’assurer leur service avec foi et compétence, je m’en réjouis et je vous encourage à aller de l’avant, tout en pourvoyant à leurs nécessités matérielles pour qu’ils puissent mener une vie digne.

Pour que les laïcs puissent trouver la place qui leur revient dans vos communautés et dans la société, il est nécessaire d’accroître les moyens de consolider leur foi. En développant les institutions de formation, vous leur donnerez la possibilité de prendre des responsabilités dans l’Église et dans la société, pour y être d’authentiques témoins de l’Évangile. Je vous invite à porter une attention particulière aux élites politiques et intellectuelles de vos pays, souvent affrontées à des idéologies opposées à une conception chrétienne de l’homme et de la société. Une foi assurée, fondée sur une relation personnelle avec le Christ, exprimée dans la pratique habituelle de la charité, et soutenue par une communauté vivante, est un appui dans le développement de la vie chrétienne. Donnez aussi aux jeunes, souvent pleins de générosité, le goût d’aller à la rencontre du Christ ! Le renforcement des aumôneries scolaires et universitaires les aidera à trouver en Lui la Lumière capable de les guider tout au long de leur vie et de leur donner le vrai sens de l’amour humain.

Le bon climat qui existe habituellement dans les relations interreligieuses permet d’approfondir les liens d’estime et d’amitié ainsi que la collaboration entre toutes les composantes de la société. L’enseignement aux jeunes générations des valeurs fondamentales de respect et de fraternité favorisera la compréhension mutuelle. Puissent les liens qui unissent notamment chrétiens et musulmans continuer à se renforcer afin de faire progresser la paix et la justice et de promouvoir le bien commun en rejetant toute tentation de violence ou d’intolérance !

Chers frères dans l’Épiscopat, au moment de conclure notre rencontre, je confie chacun de vos diocèses à la protection maternelle de la Vierge Marie. En ces temps marqués par l’incertitude, qu’elle vous donne la force de regarder l’avenir avec confiance ! Qu’elle soit pour les peuples du Burkina Faso et du Niger un signe d’espérance ! De grand coeur, je vous adresse une affectueuse Bénédiction Apostolique, ainsi qu’aux prêtres, aux religieux, aux religieuses, aux catéchistes et à tous les fidèles de vos diocèses.

AUX ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE SCANDINAVE

EN VISITE « AD LIMINA APOSTOLORUM » Jeudi 25 mars 2010


1086 Chers frères dans l'épiscopat,

Je vous souhaite la bienvenue à Rome, à l'occasion de votre visite ad limina Apostolorum, et je remercie Mgr Arborelius pour les paroles qu'il m'a adressées en votre nom. Vous exercez votre charge pastorale auprès des fidèles catholiques de l'extrême nord de l'Europe et vous êtes venus ici pour exprimer et renouveler les liens de communion entre le peuple de Dieu sur ces terres et le Successeur de Pierre au coeur de l'Eglise universelle. Votre troupeau est petit en nombre et dispersé dans une région très vaste. Beaucoup doivent parcourir de grandes distances pour trouver une communauté catholique au sein de laquelle ils peuvent pratiquer leur culte. Il est très important pour eux de réaliser que chaque fois qu'ils se réunissent autour de l'autel pour le sacrifice eucharistique, ils prennent part à un acte de l'Eglise universelle en communion avec tous leurs frères catholiques dans le monde. C'est cette communion qui est à la fois exercée et approfondie à travers les visites quinquennales des évêques au Siège apostolique.

Je suis heureux d'apprendre qu'un Congrès sur la famille est en programme à Jönköping au mois de mai cette année. L'un des messages les plus importants que les populations des pays nordiques doivent recevoir de vous est le rappel du caractère central de la famille pour la vie d'une société saine. Malheureusement, ces dernières années, on a assisté à l'affaiblissement de l'implication dans l'institution du mariage et de la conception chrétienne de la sexualité humaine, qui ont été pendant si longtemps à la base des relations personnelles et sociales dans la société européenne.

Les enfants ont le droit d'être conçus et portés dans le sein, d'être mis au monde et de grandir dans le cadre du mariage: c'est à travers la relation sûre et reconnue de leurs parents qu'ils peuvent découvrir leur identité et atteindre leur plein développement humain (cf. Donum vitae, 22 février 1987).

Dans les sociétés ayant une noble tradition de défense des droits de tous leurs membres, on pourrait s'attendre qu'à ce droit fondamental des enfants soit donnée la priorité sur tout prétendu droit des adultes à leur imposer des modèles alternatifs de vie de famille, et certainement sur tout prétendu droit à l'avortement. Etant donné que la famille est « la première et irremplaçable éducatrice à la paix » (Message pour la Journée mondiale de la paix 2008; cf. ORLF n. 50 du 11 décembre 2007), la promotrice la plus fiable de cohésion sociale et la meilleure école des vertus de bons citoyens, il est de l'intérêt de tous et en particulier des gouvernements, de défendre et de promouvoir une vie de famille stable.

Si la population catholique sur vos territoires ne constitue qu'un faible pourcentage de la population totale, elle est toutefois en augmentation, et dans le même temps, un nombre important d'autres personnes écoutent avec respect et attention ce que l'Eglise a à dire. Dans les pays nordiques, la religion possède un rôle important dans la formation de l'opinion publique et influence les décisions sur des questions relatives au bien commun. Je vous exhorte donc à continuer de transmettre aux populations dans vos pays respectifs l'enseignement de l'Eglise sur les questions sociales et éthiques, comme vous le faites à travers des initiatives comme votre lettre pastorale de 2005 « L'amour de la vie » et le prochain Congrès sur la famille. L'ouverture de l'Institut Newman à Uppsala représente un développement très important à cet égard, garantissant que l'enseignement catholique occupe la place qui lui revient dans le monde académique scandinave, et aidant également les nouvelles générations à développer une compréhension mûre et informée de leur foi.

Au sein de votre troupeau, le soin pastoral des familles et des jeunes doit être poursuivi avec vigueur, et avec une attention particulière pour les nombreuses personnes qui ont connu des difficultés à la suite de la récente crise financière. Il convient de faire preuve d'une sensibilité appropriée à l'égard des nombreux couples mariés dont l'un des conjoints uniquement est catholique. La part de la population catholique des pays nordiques constituée par les immigrants possède des besoins spécifiques, et il est important que votre activité pastorale à l'égard des familles s'adresse également à eux, en vue de faciliter leur intégration dans la société. Vos pays ont été particulièrement généreux à l'égard des réfugiés provenant du Moyen Orient, dont un grand nombre sont des chrétiens provenant des Eglises orientales. Pour votre part, en accueillant l'« étranger qui réside avec vous » (
Lv 19,34), assurez-vous d'aider les nouveaux membres de votre communauté à approfondir leurs connaissances et leur compréhension de la foi à travers des programmes de catéchèse appropriés. Dans le processus d'intégration au sein de leur pays d'accueil, ils devraient être encouragés à ne pas s'éloigner des éléments les plus précieux de leur culture, en particulier de leur foi.

En cette Année sacerdotale, je vous demande d'accorder une priorité particulière à l'encouragement et au soutien de vos prêtres, qui doivent souvent exercer leur ministère isolés les uns des autres et dans des circonstances difficiles, afin d'apporter les sacrements au peuple de Dieu. Comme vous le savez, j'ai proposé la figure de saint Jean Marie Vianney à tous les prêtres du monde comme source d'inspiration et d'intercession en cette année consacrée à explorer plus profondément la signification et le rôle indispensable du sacerdoce dans la vie de l'Eglise. Il s'est dépensé de façon inlassable afin d'être un instrument de la grâce purificatrice et sanctifiante de Dieu pour les personnes qu'il servait, et tous les prêtres sont appelés à en faire de même: il est de votre responsabilité, en tant que leurs évêques, de vous assurer qu'ils soient bien préparés pour cette sainte tâche. Assurez-vous également que les fidèles laïcs apprécient ce que leurs prêtres font pour eux, et qu'ils leur offrent l'encouragement et le soutien spirituel et moral dont ils ont besoin.

Je désire rendre hommage à l'immense contribution que les religieux et les religieuses ont apportée à la vie de l'Eglise dans vos pays pendant de nombreuses années. Les pays nordiques sont également bénis par la présence d'un nombre important de nouveaux mouvements ecclésiaux, qui apportent un dynamisme renouvelé à la mission de l'Eglise. Dans le cadre de cette riche variété de charismes, il existe de nombreuses façons dont les jeunes peuvent être attirés en vue de consacrer leur vie au service de l'Eglise à travers la vocation sacerdotale ou religieuse. Tandis que vous assumez votre responsabilité en vue de promouvoir ces vocations (cf. Christus Dominus, CD 15), assurez-vous de vous adresser aux populations d'origine, mais aussi aux immigrants. Du coeur de toute communauté catholique saine, le Seigneur appelle toujours les hommes et les femmes à le servir de cette façon. Le fait qu'un nombre toujours plus important d'entre vous, évêques des pays nordiques, provenez des pays dans lesquels vous servez, représente un signe clair que l'Esprit Saint est à l'oeuvre parmi les communautés catholiques dans ces pays. Je prie afin que cette inspiration continue de porter des fruits parmi vous et parmi ceux auxquels vous avez consacré votre vie.

Avec une grande confiance dans le pouvoir vivifiant de l'Evangile, consacrez vos énergies à promouvoir une nouvelle évangélisation parmi les populations de vos territoires. Une partie intégrante de cette tâche est l'attention constante à l'activité oecuménique, et je suis heureux de constater les nombreuses occasions où les chrétiens des pays nordiques se réunissent pour apporter un témoignage uni au monde.

Avec ces sentiments, je vous confie tous, ainsi que vos populations, à l'intercession des saints nordiques, en particulier sainte Brigitte, co-patronne de l'Europe, et je vous donne avec joie ma Bénédiction apostolique en signe de force et de paix dans le Seigneur.


RENCONTRE AVEC LES JEUNES DE ROME ET DU LATIUM EN PRÉPARATION À LA JOURNÉE MONDIALE DE LA JEUNESSE Place Saint-Pierre Jeudi 25 mars 2010

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Q. Saint-Père, le jeune de l'Evangile a demandé à Jésus: maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle? Moi, je ne sais même pas ce qu'est la vie éternelle. Je n'arrive pas à me l'imaginer, mais je suis sûre d'une chose: je ne veux pas gâcher ma vie, je veux la vivre jusqu'au bout et pas seule. J'ai peur que cela n'arrive pas, j'ai peur de ne penser qu'à moi-même, de me tromper sur tout, et de me retrouver sans un but à atteindre, vivant au jour le jour. Est-il possible de faire de ma vie quelque chose de beau et grand?

Chers jeunes, avant de répondre à la question, je voudrais vous remercier de tout coeur pour votre présence à tous, pour ce merveilleux témoignage de la foi, pour votre volonté de vivre en communion avec Jésus, pour votre enthousiasme à suivre Jésus et à bien vivre. Merci!

Et à présent la question. Vous avez dit que vous ne savez pas ce qu'est la vie éternelle et que vous ne pouvez pas vous l'imaginer. Aucun de nous n'est en mesure d'imaginer la vie éternelle, car elle est en dehors de notre expérience. Toutefois, nous pouvons commencer à comprendre ce qu'est la vie éternelle et je pense que, avec votre question, vous nous avez donné une description de l'essentiel de la vie éternelle, c'est-à-dire de la vraie vie: ne pas gâcher sa vie, la vivre en profondeur, ne pas vivre pour soi, ne pas vivre au jour le jour, mais vivre réellement la vie dans sa richesse et dans sa plénitude. Comment le faire? Telle est la grande question, avec laquelle le riche de l'Evangile est lui aussi venu au Seigneur (
Mc 10,17). A première vue, la réponse du Seigneur apparaît très sèche. Il dit en gros: observe les commandements (cf. Mc 10,19). Mais derrière cela, si nous réfléchissons bien, si nous écoutons bien le Seigneur, dans la totalité de l'Evangile, nous trouvons la grande sagesse de la Parole de Dieu, de Jésus. Les commandements, selon une autre Parole de Jésus, sont résumés dans cet unique commandement; aimer Dieu de tout son coeur, avec toute sa raison, toute son existence et aimer son prochain comme soi-même. Aimer Dieu suppose connaître Dieu, reconnaître Dieu. Tel est le premier pas que nous devons accomplir: chercher à connaître Dieu. Et ainsi, nous savons que notre vie n'existe pas par hasard, qu'elle n'est pas un hasard. Ma vie est voulue par Dieu depuis l'éternité. Je suis aimé, je suis nécessaire. Dieu a un projet pour moi dans la totalité de l'histoire; il a un projet propre pour moi. Ma vie est importante et même nécessaire. L'amour éternel m'a créé en profondeur et m'attend. Donc, voilà le premier point: connaître, chercher à connaître Dieu et comprendre ainsi que la vie est un don, qu'il est bon de vivre. Puis, l'essentiel est l'amour. Aimer ce Dieu qui m'a créé, qui a créé ce monde, qui gouverne au milieu de toutes les difficultés de l'homme et de l'histoire, et qui m'accompagne. Et aimer son prochain.

Les dix commandements que Jésus évoque dans sa réponse ne sont qu'une explication du commandement de l'amour. Ils sont pour ainsi dire des règles de l'amour, ils indiquent la voie de l'amour à travers ces points essentiels: la famille, comme fondement de la société; la vie, qu'il faut respecter comme don de Dieu; l'ordre de la sexualité, de la relation entre l'homme et la femme; l'ordre social et, enfin, la vérité. Ces éléments essentiels expliquent la voie de l'amour, expliquent comment aimer réellement et comment trouver la juste voie. Il y a donc une volonté fondamentale de Dieu pour nous tous, qui est identique pour nous tous. Mais son application est différente dans chaque vie, car Dieu a un projet précis pour chaque homme. Saint François de Sales a dit un jour: la perfection, c'est-à-dire être bon, vivre la foi et l'amour est essentiellement une seule chose, mais sous des formes très différentes. La sainteté d'un chartreux est très différente de celle d'un homme politique, d'un scientifique ou d'un agriculteur, etc. Et ainsi, pour chaque homme, Dieu a un projet et je dois trouver, dans mes conditions, ma façon de vivre cette volonté unique et commune de Dieu, dont les grandes règles sont indiquées dans ces explications de l'amour. Et donc, chercher également à accomplir ce qu'est l'essence de l'amour, c'est-à-dire ne pas prendre la vie pour moi, mais donner la vie; ne pas « avoir » la vie, mais faire de la vie un don, ne pas me chercher moi-même, mais donner aux autres. Tel est l'essentiel, et cela implique des renoncements, c'est-à-dire sortir de moi-même et ne pas me chercher moi-même. Précisément en ne me cherchant pas moi-même, mais en me consacrant à des choses grandes et vraies, je trouve la vraie vie. Ainsi, chacun trouvera, dans sa vie, les diverses possibilités: s'engager dans le volontariat, dans une communauté de prière, dans un mouvement, dans l'action de sa paroisse, dans sa profession. Trouver ma vocation et la vivre en chaque lieu est important et fondamental, que je sois un grand scientifique, ou un agriculteur. Tout est important aux yeux de Dieu: tout est beau si tout est vécu jusqu'au bout avec l'amour qui rachète véritablement le monde.

Enfin, je voudrais raconter une petite histoire à propos de sainte Joséphine Bakhita, cette petite sainte africaine qui, en Italie, a trouvé Dieu et le Christ, et qui me fait toujours une grande impression. Elle était soeur dans un couvent italien; un jour, l'évêque du lieu rend visite à ce monastère, et il voit cette petite soeur noire, dont il semble ne rien savoir, et dit: « Ma soeur, que faites-vous ici? ». Et Joséphine Bakhita répond: « La même chose que vous, Excellence ». L'évêque, visiblement irrité, dit: « Comment cela, ma soeur, vous faites la même chose que moi? ». « Oui – répond la soeur – nous voulons tous deux faire la volonté de Dieu, n'est-ce pas? ». Voilà quel est le point essentiel: connaître, avec l'aide de l'Eglise, de la Parole de Dieu et de nos amis, quelle est la volonté de Dieu, tant dans ses grandes lignes, communes pour tous, que dans l'aspect concret de ma vie personnelle. Ainsi, la vie devient sans doute un peu moins facile, mais belle et joyeuse. Prions le Seigneur afin qu'il nous aide toujours à trouver sa volonté, et à la suivre avec joie.

Q. L'Evangile nous a dit que Jésus regarda ce jeune et l'aima. Très Saint-Père, que signifie être regardés avec amour par Jésus; comment pouvons-nous vivre nous aussi cette expérience aujourd'hui? Mais est-il vraiment possible de vivre cette expérience également dans la vie d'aujourd'hui?

Je dirais naturellement que oui, car le Seigneur est toujours présent et regarde chacun de nous avec amour. Mais c'est nous qui devons trouver ce regard et le rencontrer. Comment faire? Je dirais que le premier point pour rencontrer Jésus, pour vivre l'expérience de son amour est de le connaître. Connaître Jésus implique différentes voies. Une première condition est de connaître la figure de Jésus comme elle nous apparaît dans les Evangiles, qui nous tracent un portrait très riche de la figure de Jésus, dans les grandes paraboles; pensons au fils prodigue, au samaritain, à Lazare etc. Dans toutes les paraboles, dans toutes ses paroles, dans le sermon de la montagne, nous trouvons réellement le visage de Jésus, le visage de Dieu jusqu'à la Croix où, par amour pour nous, il se donne totalement jusqu'à la mort et peut, à la fin, dire: « Entre tes mains Père, je remets ma vie, mon âme » (cf. Lc 23,46).

Il faut donc connaître, méditer Jésus avec ses amis, avec l'Eglise et connaître Jésus non seulement de façon scolaire, théorique, mais avec le coeur, c'est-à-dire parler à Jésus dans la prière. On ne peut pas connaître une personne de la même manière que l'on étudie les mathématiques. Pour les mathématiques, la raison est nécessaire et suffisante, mais pour connaître une personne, surtout la grande personne de Jésus, Dieu et homme, il faut également la raison, mais, dans le même temps, aussi le coeur. Ce n'est qu'en ouvrant son coeur à Lui, avec la connaissance de l'ensemble de ce qu'il a dit et de ce qu'il a fait, avec notre amour, avec notre cheminement vers lui, que nous pouvons peu à peu le connaître toujours mieux et ainsi faire aussi l'expérience d'être aimés. Il faut donc écouter la Parole de Jésus, l'écouter dans la communion de l'Eglise, dans sa grande expérience et répondre à travers notre prière, à travers notre dialogue personnel avec Jésus, où nous lui disons ce que nous ne réussissons pas à comprendre, nos besoins, nos questions. Dans un véritable dialogue, nous pouvons trouver toujours davantage cette voie de la connaissance, qui devient amour. Naturellement il ne faut pas seulement penser, pas seulement prier, mais agir est également une partie du chemin vers Jésus: faire de bonnes choses, s'engager pour son prochain. Il y a différentes voies; chacun connaît ses propres possibilités, dans la paroisse et dans la communauté dans laquelle il vit, pour s'engager également avec le Christ et pour les autres, pour la vitalité de l'Eglise, pour que la foi soit vraiment la puissance formatrice de notre milieu et, ainsi, de notre époque. J'énumérerai donc ces éléments: écouter, répondre, entrer dans la communauté croyante, communier avec le Christ dans les sacrements, où il se donne à nous, que ce soit dans l'Eucharistie, dans la confession etc., et, finalement, agir, accomplir les paroles de la foi de manière à ce qu'elles deviennent une force dans ma vie et que je sente aussi vraiment sur moi le regard de Jésus et que son amour m'aide, me transforme.

1088 Q. Jésus invita le jeune riche à tout quitter et à le suivre, mais il s'en alla plein de tristesse. Moi aussi, comme lui, j'ai du mal à le suivre, car j'ai peur de quitter ce qui m'appartient et l'Eglise exige parfois de moi des renoncements difficiles. Très Saint-Père, comment puis-je trouver la force pour effectuer des choix courageux, et qui peut m'aider?

Voilà, commençons par cette parole qui est dure pour nous: renoncements. Les renoncements sont possibles et, à la fin, ils deviennent également beaux s'ils sont une raison et si cette raison justifie ensuite également la difficulté du renoncement. Saint Paul a utilisé, dans ce contexte, l'image des olympiades et des athlètes engagés pour les olympiades (cf.
1Co 9,24-25). Il dit: pour arriver finalement à la médaille – à cette époque une couronne –, ils doivent suivre une discipline très dure, ils doivent renoncer à de nombreuses choses, ils doivent s'entraîner dans le sport qu'ils pratiquent et faire de grands sacrifices et renoncements, car ils ont une motivation, cela en vaut la peine. Même si, à la fin, il ne se trouvent peut-être pas parmi les vainqueurs, c'est cependant une belle chose de s'être donné un discipline et d'avoir été capables de faire ces choses avec une certaine perfection. Cette image de saint Paul, qui vaut pour les olympiades, pour tout le sport, vaut également pour toutes les autres choses de la vie. Une vie professionnelle réussie ne peut pas être atteinte sans renoncements, sans une préparation adaptée, qui exige toujours une discipline, qui exige que l'on doive renoncer à quelque chose; et ainsi de suite, également dans l'art et dans tous les aspects de la vie. Nous comprenons tous que pour atteindre un but, qu'il soit professionnel, sportif, artistique, culturel, nous devons renoncer, apprendre à aller de l'avant. Précisément aussi l'art de vivre, d'être soi-même, l'art d'être homme exige des renoncements, et les véritables renoncements, qui nous aident à trouver le chemin de la vie, l'art de la vie, nous sont indiqués dans la Parole de Dieu et nous aident à ne pas tomber – disons – dans l'abîme de la drogue, de l'alcool, de l'esclavage de la sexualité, de l'esclavage de l'argent, de la paresse. Toutes ces choses, dans un premier moment, apparaissent comme des actes de liberté. En réalité, ce ne sont pas des actes de liberté, mais le début d'un esclavage qui devient toujours plus insurmontable. Réussir à renoncer à la tentation du moment, aller de l'avant vers le bien crée la véritable liberté et rend la vie précieuse. En ce sens, nous devons voir, il me semble, que sans un « non » à certaines choses, le grand « oui » à la vie véritable ne grandit pas, comme nous pouvons le voir dans la figure des saints. Pensons à saint François, pensons aux saints de notre époque, Mère Teresa, don Gnocchi et tant d'autres, qui ont renoncé et qui ont vaincu et sont devenus non seulement libres eux-mêmes, mais également une richesse pour le monde et qui nous montrent comment on peut vivre. Ainsi, à la question « qui m'aide », je dirais que les grandes figures de l'histoire de l'Eglise nous aident, la Parole de Dieu nous aide, la communauté paroissiale, le mouvement, le volontariat, etc. nous aident. Et les amitiés d'hommes qui « vont de l'avant », qui ont déjà fait des progrès sur la route de la vie et qui peuvent me convaincre que marcher ainsi est la juste voie, nous aident. Prions le Seigneur, afin qu'il nous donne toujours des amis, des communautés qui nous aident à voir la voie du bien et à trouver ainsi la vie belle et joyeuse.

                                                        Avril 2010


VIA CRUCIS AU COLISÉE

PAROLES Palatin Vendredi Saint, 2 avril 2010

Chers frères et soeurs,

En prière, recueillis et émus, nous avons parcouru ce soir le chemin de croix. Avec Jésus nous sommes montés au Calvaire et nous avons médité sur sa souffrance, redécouvrant combien est profond l’amour qu’Il a eu et a pour nous. Mais en ce moment, nous ne voulons pas nous limiter à une compassion dictée uniquement par notre faible sentiment; nous voulons plus tôt nous sentir participants de la souffrance de Jésus ; nous voulons accompagner notre Maître en partageant dans notre vie sa Passion, dans la vie de l’Eglise, pour la vie du monde parce que nous savons que justement dans la Croix du Seigneur, dans l’amour sans limite qui se donne tout entier, se trouve la source de la grâce, de la libération, de la paix, du salut.

Les textes, les méditations et les prières de la Via Crucis nous ont aidés à regarder ce mystère de la Passion pour apprendre l’immense leçon d’amour que Dieu nous a donnée sur la Croix, afin que naisse en nous un désir renouvelé de conversion de notre coeur, en vivant chaque jour le même amour, l’unique force capable de changer le monde.

Ce soir nous avons contemplé Jésus dans son visage plein de douleur, moqué, outragé, défiguré par le péché de l’homme ; la nuit prochaine nous le contemplerons dans son visage plein de gloire, rayonnant et lumineux. Depuis que Jésus est descendu au tombeau, la tombe et la mort ne sont plus des lieux sans espérance, où l’histoire se termine sur un échec total, où l’homme touche les limites extrêmes de son impuissance. Le Vendredi-Saint est le jour de la plus grande espérance, celle mûrit sur la Croix, alors que Jésus meurt, alors qu’il pousse son dernier soupir, alors qu’il crie à grande voix : « Père, entre tes mains je remets mon esprit » (Lc 23,46). Remettant entre les mains du Père son existence ‘donnée’, Il sait que sa mort devient source de vie, comme la semence dans la terre doit se rompre afin que la plante puisse naître : « si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il donne beaucoup de fruit » (Jn 12,24). Jésus est le grain de blé qui tombe en terre, qui se déchire, se rompt, meurt ; et pour cela, peut porter du fruit. Depuis le jour où le Christ a été élevé, la Croix, qui apparaît comme un signe d’abandon, de solitude, de défaite, est devenue la promesse de la vie éternelle. Sur la Croix brille déjà la splendeur victorieuse de l’aube du jour de Pâque.

Dans le silence de cette nuit, dans le silence qui entoure le Samedi-Saint, touchés par l’amour sans limites de Dieu, vivons dans l’attente de l’aube du troisième jour, l’aube de la victoire de l’amour de Dieu, l’aube de la lumière qui permettra aux yeux du coeur de voir de nouvelle manière la vie, les difficultés, la souffrances. Nos insuccès, nos déceptions, nos amertumes, qui semblent indiquer la chute de tout, sont illuminés par l’espérance. L’acte d’amour de la Croix est confirmé par le Père et la lumière éclatante de la Résurrection entoure et transforme tout : de la trahison peut naître l’amitié, du reniement, le pardon ; de la haine, l’amour.

Donne-nous, Seigneur, de porter avec amour notre croix, nos croix quotidiennes, dans la certitude qu’elles sont illuminées par l’éclat de ta Pâque. Amen.



PROJECTION DU FILM SOUS LE CIEL DE ROME SUR PIE XII Salle des Suisses du Palais pontifical de Castel Gandolfo Vendredi 9 avril 2010

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Chers amis,

Je suis très heureux d'avoir assisté à l'avant-première du film Sous le ciel de Rome, une co-production internationale, qui présente le rôle fondamental du vénérable Pie XII pour sauver Rome et de nombreux persécutés, entre 1943 et 1944. Bien qu'étant un film pour le grand public, il s'agit d'une oeuvre qui, notamment à la lumière des études les plus récentes, reconstruit les épisodes dramatiques et la figure du « Pastor Angelicus ». Je remercie M. Paolo Garimberti, président de la Rai, pour les paroles courtoises qu'il m'a adressées. J'adresse également une pensée reconnaissante à M. Ettore Bernabei, aux différents producteurs et à tous ceux qui ont collaboré afin de réaliser l'oeuvre importante que nous venons de voir. Je salue avec affection Monsieur le cardinal, les prélats ainsi que toutes les personnes présentes.

Ces oeuvres – conçues pour le grand public, utilisant les moyens les plus modernes, et visant dans le même temps à illustrer des personnages ou des épisodes du siècle dernier – revêtent une valeur particulière, notamment pour les nouvelles générations. Pour ceux qui, à l'école, ont étudié certains événements, et qui en ont peut-être également entendu parler, des films comme celui-ci peuvent être utiles et stimulants et peuvent aider à connaître une période qui est finalement assez proche, mais que les événements frénétiques de l'histoire récente ainsi qu'une culture fragmentée peuvent faire oublier.

Pie XII a été le Souverain Pontife de notre jeunesse. A travers son riche enseignement, il a su parler aux hommes de son temps en indiquant le chemin de la Vérité et, à travers sa grande sagesse, il a su guider l'Eglise vers l'horizon du troisième millénaire. Je tiens toutefois à souligner en particulier que Pie XII a été le Pape qui, en tant que père de tous, à présidé à la charité à Rome et dans le monde, en particulier au cours de la difficile période de la Deuxième Guerre mondiale. Dans un discours du 23 juillet 1944, immédiatement après la libération de la ville de Rome, il remerciait les membres du Cercle de Saint-Pierre pour la collaboration apportée, en disant: « Vous nous aidez à satisfaire plus amplement notre désir de sécher tant de larmes, de soulager tant de douleurs » et indiquait pour chaque chrétien l'aspect central de l'exhortation de saint Paul aux Colossiens (3, 14-15): « Et puis, par-dessus tout, la charité, en laquelle se noue la perfection. Avec cela, que la paix du Christ règne dans vos coeurs: tel est bien le terme de l'appel qui vous a rassemblés en un même Corps » (Discours et messages radio de Sa Sainteté Pie XII, VI, p. 87-88).

Le primat de la charité, de l'amour, qui est le commandement du Seigneur Jésus: tel est le principe et la clé de lecture de toute l'oeuvre de l'Eglise, in primis de son Pasteur universel. La charité est la raison de toute action, de toute intervention. C'est la raison globale qui pousse la pensée et les gestes concrets, et je suis heureux que ce film fasse également ressortir ce principe unifiant. Je me permets de suggérer cette clé de lecture, à la lumière du témoignage authentique de ce grand maître de foi, d'espérance et de charité qu'a été le Pape Pie XII.

En renouvelant à tous l'expression de ma reconnaissance, je profite de cette occasion pour vous adresser mes meilleurs voeux de Pâques, tandis que je vous bénis de tout coeur, vous tous ici présents, ainsi que vos collaborateurs et vos proches.


Discours 2005-2013 20310