Catena Aurea 6114

vv. 14, 15

6114 Mc 1,14-15

S. Chrys. L'évangéliste saint Marc suit saint Matthieu pour l'ordre des faits. Ainsi après avoir dit que les anges le servaient, il ajoute: «Aussitôt l'emprisonnement de Jean, Jésus vint», etc. Après qu'il a été tenté, et après avoir été servi par les anges, Jésus vint en Galilée, nous apprenant par là à ne point résister aux violences des méchants. - Théophyl. Il veut aussi nous enseigner qu'il vaut mieux fuir les persécutions que de les attendre; mais que lorsqu'elles nous surprennent, il faut alors les supporter avec courage. - S. Chrys. Il se retira encore pour conserver une vie qu'il devait employer à instruire les hommes et à guérir leurs infirmités avant sa passion; afin qu'après avoir rempli sa mission toute entière il se rendît obéissant jusqu'à la mort.

Bède. Jean ayant été mis en prison, c'était pour le Seigneur le moment convenable de commencer sa prédication: «Il vint prêchant l'Évangile», etc. En effet, à la loi qui finit succède l'Évangile qui commence. - S. Jér. L'ombre disparaît, la vérité brille. Jean dans la prison, c'est la loi dans la Judée; Jésus en Galilée, c'est Paul prêchant aux nations l'Évangile du royaume. Car au royaume terrestre succède la pauvreté, et c'est à la pauvreté chrétienne qu'est accordé le royaume éternel. Quant aux honneurs de la terre, c'est une vile écume, une eau glacée, une fumée, ou un songe. - Bède. Il ne faut pas croire, du reste, que Jean ait été jeté en prison aussitôt la tentation des quarante jours, et le jeûne du Seigneur. Car pour tout lecteur attentif de l'Évangile de saint Jean, il est évident qu'avant l'emprisonnement de Jean-Baptiste, le Seigneur avait déjà enseigné pendant un assez long temps, et opéré un grand nombre de miracles. En effet nous lisons dans cet Évangéliste: «Ce fut le premier des miracles que fit Jésus» (Jn 2,11). Et ensuite: «Jean n'avait pas encore été mis en prison» (Jn 3,24). On rapporte que saint Jean ayant lu l'Évangile de Saint Matthieu, de saint Marc et de saint Luc, en approuva la teneur, et rendit témoignage à la vérité de leur récit, mais en faisant remarquer qu'ils n'avaient écrit que l'histoire des faits d'une seule année, celle où eut lieu la passion de Jésus, et qui suivit l'emprisonnement de Jean-Baptiste; il laissa donc de côté l'année dont les faits avaient été suffisamment racontés par les trois premiers Évangélistes, pour s'attacher à ce qui avait précédé l'emprisonnement du saint Précurseur. Après avoir dit que Jésus vint en Galilée prêcher l'Évangile du royaume, saint Marc ajoute: «Parce que le temps est accompli», etc. - S. Chrys. Et, en effet, c'est lorsque le temps fut accompli, c'est-à-dire quand vint la plénitude des temps, et que Dieu eut envoyé son Fils (Ga 4,4), qu'il convenait que le genre humain recueillit les derniers fruits de la divine miséricorde. Voilà pourquoi Jésus-Christ annonce que le royaume de Dieu est proche. Le royaume de Dieu est le même, quant à la substance, que le royaume des cieux: il n'en diffère que par une distinction purement rationnelle. On entend par ce royaume de Dieu, celui où Dieu règne souverainement. Or, ce royaume se réalisera pour nous dans la région des vivants (Ps 116,9), où les élus verront Dieu face à face, et posséderont les biens qui leur ont été promis. A moins que par cette région des vivants, on n'aime mieux entendre l'amour divin, ou la nouvelle assurance des biens surnaturels que les cieux désignent; car il est évident que le royaume de Dieu n'est limité ni par l'espace ni par le temps. - Théophyl. Ou bien le Seigneur déclare que le temps de la loi est accompli, comme s'il disait: Jusqu'ici la loi faisait son oeuvre; maintenant le royaume de Dieu va être rétabli; ce royaume qui est une vie conforme à l'Évangile; car rien ne ressemble plus au royaume des cieux. En effet, lorsque vous voyez un homme vivre dans ce corps mortel, conformément à l'Évangile, ne dites-vous pas qu'il possède en lui le royaume des cieux, qui ne consiste pas dans le boire et le manger, mais dans la justice, la paix et la joie du Saint-Esprit (Rm 14,17)?

Jésus-Christ ajoute: «Faites pénitence». - S. Jér. Celui qui veut jouir du bonheur éternel, c'est-à-dire du royaume de Dieu, fait pénitence. Celui, en effet, qui désire goûter le fruit de la noix, en brise l'enveloppe. La douceur du fruit dédommage de l'amertume de la racine; l'espoir du gain va jusqu'à rendre agréable les périls de la mer. L'espoir de la guérison adoucit la douleur que cause l'opération du médecin. Or, pour annoncer dignement les oracles du Christ, il faut avoir obtenu de la divine miséricorde la grâce du pardon, et voilà pourquoi après avoir dit: «Faites pénitence», il ajoute: «Croyez à l'Évangile, car si vous ne croyez pas, vous ne comprendrez pas (Is 7,15) ». «Faites donc pénitence, et croyez», c'est-à-dire renoncez aux oeuvres mortes. A quoi, en effet, servirait la foi, sans les bonnes oeuvres? Ce n'est pas cependant le mérite des bonnes oeuvres qui nous conduit à la foi, mais la foi commence, et les bonnes oeuvres viennent ensuite.


vv. 16-20

6116 Mc 1,16-20

La Glose. L'Évangéliste, après avoir rapporté la prédication de Jésus-Christ au peuple, nous fait connaître la vocation des Apôtres, dont il fit les ministres de la prédication évangélique: «Et comme il passait le long de la mer de Galilée, il vit Simon», etc. - Théophil. Pierre et André, au rapport de saint Jean (Jn 1,35-41), étaient disciples du Précurseur. Mais d'après le témoignage que Jean-Baptiste avait rendu à Jésus, ils s'attachèrent à lui. Affligés ensuite de l'emprisonnement de Jean-Baptiste, ils retournèrent à leur première profession: «Il les vit, dit l'Évangéliste, qui jetaient leurs filets dans la mer; car ils étaient pêcheurs». Nous voyons par là qu'ils gagnaient leur vie par un travail honnête, et non des produits d'une industrie coupable. De tels hommes méritaient d'être les premiers disciples de Jésus-Christ: «Et Jésus leur dit: Suivez-moi». C'est ici la seconde vocation des Apôtres, car nous voyons dans saint Jean, qu'ils avaient déjà été appelés une première fois. Jésus leur fait connaître la fin de leur vocation: «Je ferai de vous des pêcheurs d'hommes». - Rémi. En effet, c'est dans les filets de la sainte prédication qu'ils ont retiré les poissons, c'est-à-dire les hommes des profondeurs de la mer, c'est-à-dire de l'infidélité, pour les amener à la lumière de la foi. Pèche vraiment digne d'admiration; car à peine les poissons sont-ils hors de l'eau, qu'ils meurent, tandis que les hommes trouvent la vie dans les filets de la prédication où ils sont pris. - Bède. Or, ce sont des pêcheurs, des hommes illettrés que Jésus envoie pour prêcher l'Évangile, afin que la foi des croyants fût regardée comme un effet de la puissance divine, et non comme le fruit de l'éloquence et de la sagesse humaines.

«Et aussitôt, ayant laissé leurs filets, ils le suivirent». - Théophyl. Quand Dieu appelle, il ne faut pas différer, mais le suivre sans retard. Après ces premiers disciples, Jésus recueille dans ses filets Jacques et Jean, qui, tout pauvres qu'ils étaient, nourrissaient de leur travail la vieillesse de leur père: «De là s'étant un peu avancé, il vit Jacques et Jean, fils de Zébédée», etc. Or, ils quittèrent leur père parce qu'il eût été un obstacle à ce qu'ils suivissent Jésus-Christ. Et vous aussi, lorsque vos parents vous sont un empêchement, laissez-les, et allez fermement à Dieu. On peut conclure de là, que Zébédée ne crut pas à Jésus; mais la mère de ces deux apôtres crut en lui, et après la mort de Zébédée, elle suivit le Sauveur.

Bède. On pourrait demander ici comment Jésus appelle et tire de leurs barques ces pécheurs deux par deux, d'abord Pierre et André, et après s'être avancé quelque peu, deux autres, c'est-à-dire les fils de Zébédée; tandis que d'après saint Luc (Lc 5,7-11), Jacques et Jean furent appelés pour aider Pierre et André; que c'est à Pierre seul que Jésus adressa cette parole: «Ne craignez point, vous serez désormais un pécheur d'hommes»; et que tous ensemble cependant, ayant tiré leurs barques sur le rivage, ils le suivirent. Il faut donc comprendre que tout ce que rapporte saint Luc se passa lors de la première vocation des Apôtres, et qu'étant ensuite retournés à leurs filets et à leurs occupations ordinaires, Jésus les appela de nouveau, comme le raconte ici saint Marc. C'est alors que sans tirer leurs barques à terre, comme s'ils eussent eu l'intention d'y revenir, ils suivirent tout de bon le Seigneur qui les appelait, et leur commandait de marcher à sa suite.

S. Jér. Dans le sens mystique, ces quatre pêcheurs figurent un char à quatre chevaux qui nous enlève aux cieux, comme autrefois Elie (2S 4). Ce sont les quatre angles sur lesquels est bâtie la sainte Eglise. Dans ces quatre lettres hébraïques, nous reconnaissons les quatre lettres dont est composé le nom du Seigneur. L'exemple des Apôtres nous apprend qu'il faut répondre à la voix de Dieu qui nous appelle, oublier ce monde de vices qui nous entoure, quitter et la maison paternelle, et notre genre de vie primitive (Ps 45,11), (qui n'est que folie aux yeux de Dieu); et ces filets, ces toiles d'araignées dans lesquelles l'air nous tenait suspendus dans le vide comme des moucherons exposés à une chute certaine; détester enfin le genre de vie ou nous étions tristement embarqués. Adam, notre père selon la chair, est revêtu de la dépouille de bêtes mortes; mais pour nous qui avons dépouillé le vieil homme avec ses actes, et qui marchons sur les traces de l'homme nouveau, nous sommes revêtus des riches fourrures de Salomon, vêtement splendide dont l'Epouse se glorifie et qui rehausse sa beauté (Ct 1,4). Simon signifie obéissant ; André, viril ; Jacques, qui supplante: Jean signifie grâce. Les quatre vertus figurées par ces quatre noms, nous transforment en l'image de Dieu, l'obéissance pour l'écouter, le courage viril pour combattre, la ruine de nos ennemis pour persévérer, la grâce pour assurer notre salut. Ces quatre vertus se rapportent aux quatre vertus cardinales. En effet, la prudence nous rend l'obéissance facile; la justice nous fait agir avec énergie; la tempérance foule aux pieds le serpent infernal; la force nous fait mériter la grâce de Dieu. - Théophyl. On peut dire encore que celui qui représente l'action est appelé le premier, ensuite, celui qui figure la contemplation. Pierre signifie la vie active, Jean représente la vie contemplative. Pierre, en effet, fut remarquable par son ardente ferveur, par une sollicitude plus grande que celle de tous les autres; comme Jean fut le théologien par excellence.


vv. 21, 22

6121 Mc 1,21-22

S. Jér. Saint Marc a disposé dans sa pensée le plan des événements de l'Évangile, sans suivre l'ordre des faits, et en s'attachant seulement à celui des mystères. Voilà pourquoi, le jour du sabbat, il mentionne son premier miracle, opéré par Jésus: «Et ils entrèrent à Capharnaüm. - Théophyl. Ils venaient de Nazareth. Or, c'est au jour du sabbat où les scribes s'assemblaient, que Jésus entre dans la synagogue pour enseigner: «Et aussitôt, étant entré le jour du sabbat, dans la synagogue, il les instruisait». En effet, la loi ordonnait aux Juifs de solenniser le jour du sabbat, afin qu'ils pussent se réunir pour étudier la loi en commun. Or, Jésus-Christ les enseignait non en les flattant, à la manière des pharisiens, mais en les reprenant. «Et ils s'étonnaient de sa doctrine; car il les enseignait avec autorité, et non point comme les scribes». Il enseignait aussi avec autorité, en ce sens qu'il ramenait au bien les hommes égarés, et qu'il menaçait du supplice ceux qui refusaient de croire à sa parole. - Bède. Les scribes enseignaient au peuple ce qui est écrit dans Moïse et les prophètes; mais Jésus, en sa qualité de Dieu souverain et de Maître de Moïse lui-même, ou ajoutait à la loi les éclaircissements qu'il jugeait nécessaires, ou bien l'enseignait au peuple avec tel changement qu'il lui plaisait d'y introduire, comme nous le voyons dans saint Matthieu: «Il a été dit aux anciens, et moi je vous dis», etc. (Mt 5,21 Mt 5,27 Mt 5,33 Mt 5,38 Mt 5,43).


vv. 23-28

6123 Mc 1,23-28

Bède. C'est par l'envie du démon que la mort est entrée dans le monde (Sg 2,24); c'est donc contre cet auteur de la mort, que Jésus dut mettre d'abord en usage le remède du salut: «Il y avait dans leur synagogue un homme possédé de l'esprit impur». - S. Chrys. Le nom d'esprit s'applique à l'ange, à l'air, à l'âme et aussi à l'Esprit saint. Aussi dans la crainte que cette ressemblance de nom ne donnât lieu à l'erreur, l'Évangéliste ajoute la qualification d'impur: ce nom lui est donné à cause de son impiété et de son éloignement de Dieu et parce qu'il prend part à toutes les oeuvres immondes et perverses.

S. Aug. (Cité de Dieu, 9, 20). L'humilité du Dieu qui est apparu sous la forme de l'esclave, est si puissante contre l'orgueil des démons, qu'ils sont forcés de le reconnaître et de le confesser publiquement devant le Seigneur revêtu de l'infirmité de notre chair: «Et il s'écria: Qu'y a-t-il de commun entre vous et nous, Jésus de Nazareth ?» Il est évident par ces paroles qu'ils avaient la science sans avoir la charité, car ils redoutaient le châtiment qu'il venait leur infliger et n'aimaient pas en lui la justice qu'il apportait à la terre. - Bède. Car les démons, voyant Notre-Seigneur sur la terre, croyaient qu'il allait les juger immédiatement. - S. Chrys. Ou bien, voici le sens de ces paroles: En purifiant l'âme humaine, et en y faisant naître des pensées divines, vous ne nous laissez plus d'asile dans le coeur des hommes. - Théophyl. Car sortir de l'homme, c'était pour le démon une ruine certaine, parce qu'en effet, les démons étant essentiellement cruels, ils regardent comme une sorte de supplice de ne pas tourmenter les hommes.

Il ajoute: «Je sais que vous êtes le saint de Dieu». - S. Chrys. Comme s'il disait: Je considère attentivement votre avènement; car il n'avait pas une connaissance claire et certaine de la venue de Dieu en ce monde. Il l'appelle saint, non pas un saint comme beaucoup d'autres parce que chaque prophète aussi était saint, mais il le proclame saint d'une manière spéciale. L'article qui se trouve dans le grec indique qu'il est le saint par excellence, mais la crainte qu'il éprouve fait qu'il le reconnaît pour le souverain Maître de toutes choses. - S. Aug. (Cité de Dieu, 9) Il ne se fit connaître aux démons que dans la mesure qu'il voulut, et il ne le voulut que dans la mesure qui était nécessaire. Toutefois il ne se manifesta pas à eux comme aux anges qui jouissent de sa vue comme Verbe, et participent à son éternelle félicité, mais il devait se manifester aux démons pour les faire trembler, puisqu'il venait délivrer les hommes de l'empire tyrannique de ces esprits mauvais. Il s'est donc fait connaître aux démons non pas comme étant la vie éternelle (cf. 1Jn 5,20 Jn 17,3), mais par certains effets sensibles de sa toute-puissance qui ne pouvaient échapper aux regards de la nature angélique, plus pénétrants même dans les esprits mauvais que les yeux de la faiblesse humaine.

S. Chrys. Mais l'éternelle vérité ne voulait pas des témoignages des esprits impurs: «Et Jésus les menaça en leur disant», etc. Jésus nous donne ici un enseignement salutaire, c'est de ne jamais ajouter foi aux démons quand bien même ils nous annonceraient la vérité. «Et l'esprit le déchirant», etc. Comme cet homme venait de dire des paroles sages et sensées, dans la crainte qu'on s'imaginât qu'il parlait, non sous l'inspiration du démon, mais de son propre coeur, Jésus-Christ permit que cet infortuné fût déchiré par le démon afin qu'il fût manifeste que c'était lui aussi qui parlait par sa bouche. - Théophyl. Ce fut aussi pour que les témoins de ce prodige comprissent de quel affreux malheur était délivré cet homme, et qu'ils missent foi en Jésus par suite de ce miracle. - Bède. Il y a, ce semble, une sorte de contradiction entre ces paroles: «Et le déchirant», ou comme portent certains exemplaires, le courbant, et ces autres: «Il sortit sans lui avoir fait aucun mal», selon saint Luc. Mais cet Évangéliste dit aussi que «le démon ayant jeté violemment cet homme au milieu de l'assemblée sortit de son corps, sans lui avoir fait aucun mal» (Lc 4,35). Il faut donc comprendre que ces paroles de saint Marc: «Et le tourmentant, ou le déchirant», reviennent à celles-ci de saint Luc: «Et l'ayant jeté violemment au milieu de tout le peuple». Et alors ce que saint Luc ajoute: «Il ne lui fit aucun mal», signifie que cette agitation violente, cette secousse imprimée aux membres de cet homme n'épuisa pas ses forces et que le démon sortit sans lui couper ou lui arracher quelque membre, comme il arrive quelquefois en pareille circonstance. Or, les témoins de ce prodige admirent la nouveauté de la doctrine du divin Maître, et ce qu'ils voient les détermine à approfondir ce qu'ils entendent. «Et tous étaient dans l'étonnement», etc. Car le but des miracles était de faire croire d'une foi plus certaine à l'Évangile du royaume de Dieu. Voilà pourquoi les apôtres qui promettaient des joies célestes aux habitants de ce monde, faisaient éclater à leurs yeux ici-bas, des oeuvres célestes et toutes divines. Tout d'abord, d'après le témoignage de l'Évangéliste, Jésus-Christ enseignait les hommes avec autorité; et maintenant le peuple lui-même lui rend ce témoignage qu'il commande avec autorité aux esprits immondes, et qu'ils lui obéissent. «Et sa renommée se répandit», etc. - La Glose. Car ce que les hommes admirent le plus, ils s'empressent de le divulguer, parce que la bouche parle de l'abondance du coeur (Mt 12,34).

S. Jér. Capharnaüm dans le sens mystique signifie ville de la consolation, le mot sabbat signifie repos. Cet homme possédé de l'esprit immonde, c'est le genre humain en qui l'impureté a régné depuis Adam jusqu'à Moïse. Car les hommes ont péché sans la loi, et ils périront sans la loi (Rm 2,12). Cet esprit impur qui connaissait le saint de Dieu, reçoit l'ordre de se taire, parce qu'il est des hommes qui, connaissant Dieu, ne l'ont pas glorifié comme Dieu (Rm 1,21), mais ont mieux aimé servir et adorer la créature plutôt que le Créateur (Rm 1,25). L'esprit immonde déchirant cet homme sortit de son corps. A l'approche du salut, la tentation se fait sentir: Pharaon abandonné par le peuple d'Israël le poursuit à outrance (Ex 14), le démon méprisé cherche à produire du scandale.


vv. 29-31

6129 Mc 1,29-31

Bède. Il fallut d'abord refréner la langue du serpent pour qu'elle cessât de vomir ses poisons, et guérir ensuite de la fièvre de la concupiscence charnelle la femme qui fut séduite la première: «Et bientôt après, sortant de la synagogue, ils vinrent», etc. - Théophyl. Jésus se retira, selon sa coutume, le jour du sabbat, vers le soir, pour se rendre dans la demeure de ses disciples. Or, celle qui devait les servir était en proie à la fièvre: «La belle-mère de Simon Pierre était couchée, tourmentée par la fièvre». - S. Chrys. Les disciples qui espéraient recueillir quelque avantage de la présence du Sauveur, sans attendre le soir, le priaient de guérir la belle-mère de Pierre: «Aussitôt ils lui parlèrent à son sujet». - Bède. Saint Luc dit qu'ils lui adressèrent une prière en sa faveur (Lc 4,38). Car le Sauveur guérissait les maladies, tantôt sur la prière qu'on lui en faisait, tantôt de son propre mouvement, montrant par là qu'il prête l'oreille aux prières des fidèles qui demandent la guérison de leurs passions vicieuses; et qu'il leur donne de comprendre ce que jusque-là ils ne comprenaient nullement; ou qu'il accorde à une pieuse supplication le pardon des fautes méconnues, comme le demandait le Psalmiste: «Seigneur, purifiez-moi de mes fautes cachées» (Ps 19,13-14). Ici donc, c'est à la prière qu'il accorde la guérison: «Et s'approchant, il la fit lever, et lui ayant pris la main», etc. - Théophyl. Nous apprenons ici que celui qui se rend le serviteur des saints pour l'amour de Jésus-Christ peut espérer obtenir de Dieu sa guérison. - Bède. En distribuant surtout le jour du sabbat, les bienfaits de ses guérisons et de sa doctrine, il nous enseigne qu'il n'est pas soumis à la loi, mais qu'il est au-dessus de la loi; et qu'il a fait choix, non du sabbat judaïque, mais du véritable sabbat, et que le repos qui plaît au Seigneur, c'est de joindre le zèle pour le salut des âmes à l'abstention de toute oeuvre servile, c'est-à-dire de toute oeuvre coupable: «Et aussitôt la fièvre la quitta», etc. La santé que le Seigneur rend à cette femme lui revient pleine et entière, et avec un tel retour de force qu'elle peut servir sur-le-champ ceux qui lui avaient porté secours. S'il est vrai, comme nous l'avons dit, que cet homme délivré du démon figure l'âme délivrée des pensées mauvaises, cette femme délivrée de la fièvre, à la parole du Seigneur, nous représente sous une image très juste la chair guérie par les préceptes de la continence des brûlantes ardeurs de la concupiscence. - S. Jér. Car la fièvre signifie l'intempérance dont nous sommes guéris, nous qui ne sommes pas les enfants de la synagogue, mais de l'Eglise à l'aide d'une discipline salutaire, et par l'élévation de nos désirs, pleins d'un saint empressement à servir ensuite celui à qui nous devons notre guérison. - Théophyl. Cette fièvre représente celui qui s'irrite, et en vient, sous l'impulsion de sa colère, à des violences que rien n'arrête; mais si la raison retient son bras, il se lève et devient ainsi le serviteur de la raison.


vv. 32-34

6132
Mc 1,32-34
Théophyl. Comme la multitude s'imaginait qu'il n'était permis à personne de guérir des malades le jour du sabbat, elle attendait le coucher du soleil, pour amener à Jésus ceux dont elle sollicitait la guérison: «Le soir venu, après le coucher du soleil, on lui apportait tous ceux qui étaient malades», etc.; et il en guérit un grand nombre qui étaient affligés de diverses maladies. - S. Chrys. Quand l'Évangéliste dit un grand nombre, il faut entendre tous, selon l'usage de l'Ecriture. - Théophyl. Ou bien, il dit un grand nombre, parce qu'il s'en trouvait parmi ces malades quelques-uns qui ne croyaient pas, et qui ne furent pas guéris à cause de leur incrédulité. Il guérit donc un grand nombre de ceux qui lui furent présentés, c'est-à-dire ceux qui avaient la foi.

«Et il chassait grand nombre de démons». - S. Aug. (Quest. sur le Nouv. et l'Anc. Test., 66) Les démons savaient qu'il était le Christ promis dans la loi; et ils voyaient réunis en lui tous les signes qu'avaient prédits les prophètes; mais ils ignoraient le mystère de sa divinité aussi bien que les chefs des Juifs; car s'ils l'avaient connu, jamais ils n'eussent crucifié le Seigneur de la gloire (1Co 2,8). - Bède. Le démon l'avait regardé d'abord comme un homme, épuisé qu'il était par un jeune de quarante jours, sans pouvoir néanmoins, par ses tentations, s'assurer s'il était le Fils de Dieu; maintenant à la vue des prodiges de sa puissance, il comprit, où plutôt il soupçonna qu'il était le Fils de Dieu. Si donc il persuada les Juifs de le crucifier, ce n'est point qu'il pensât qu'il n'était pas le Fils de Dieu, mais parce qu'il ne prévit point que la mort de Jésus serait sa propre condamnation. - Théophyl. Il ne permettait point aux démons de parler, pour nous apprendre à ne pas les croire, même lorsqu'ils disent la vérité. Car lorsqu'ils rencontrent des esprits disposés à les croire, ils mêlent le mensonge à la vérité. - S. Chrys. Ce que nous lisons ici, ne contredit en rien ce que dit saint Luc (Lc 4,41), que les démons sortaient en criant: «Vous êtes le Christ, Fils de Dieu». Car il ajoute: Et Jésus, les menaçant, ne leur permettait pas de parler. Saint Marc, qui omet beaucoup de faits pour abréger son récit, ne reproduit ici que la fin des paroles que nous venons de citer.

Bède. Dans le sens mystique, le coucher du soleil signifie la passion et la mort de celui qui dit: «Tant que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde» (Jn 9,5). C'est après le coucher du soleil, que les malades et les démoniaques sont guéris en plus grand nombre qu'auparavant, parce que celui qui, aux jours de sa vie mortelle, a enseigné un petit nombre de juifs, a communiqué ensuite à toutes les nations de l'univers les dons de la foi et du salut. - S. Jér. Dans le sens moral, la porte signifie la pénitence qui, avec la foi, opère la guérison de nos diverses infirmités (2Co 7,10); car les vices qui frappent de langueur la cité du monde sont variés et nombreux.


vv. 35-39

6135 Mc 1,35-39

Théophyl. Après avoir opéré ces guérisons, le Sauveur se retira à l'écart: «Et se levant de grand matin, il sortit et s'en alla dans le désert». C'est ainsi qu'il nous enseigne à ne rien faire par ostentation, et à ne point divulguer les bonnes oeuvres que nous pouvons faire. «Et là, il priait». - S. Chrys. Ce n'est pas qu'il eût besoin de prier (lui qui recevait les supplications des hommes), mais il agissait ainsi dans notre intérêt, et daignait nous donner en sa personne l'exemple des vertus que nous devions pratiquer. - Théophyl. Il nous apprend aussi, par cette conduite, que nous devons rapporter à Dieu tout ce que nous faisons de bien, et lui dire: Tout don excellent vient d'en haut, et descend de vous, ô mon Dieu ! (Jc 1,17) «Et Simon le suivit et ceux qui étaient avec lui». - S. Chrys. Saint Luc dit que la foule s'approcha de Jésus et qu'elle lui adressa cette parole que saint Marc met dans la bouche des Apôtres: Et quand ils furent arrivés près de lui, voilà, lui dirent-ils, que tous sont à votre recherche» (Lc 4,42). Il n'y a ici aucune contradiction entre les deux Évangélistes. Jésus-Christ permit d'abord aux Apôtres, puis à cette multitude, comme haletante à ses pieds, de s'approcher de lui. Il les accueillait avec joie: toutefois, il voulait les congédier, afin que pendant la courte durée de sa vie mortelle, il pût faire participer tous les autres peuples à sa doctrine. «Et il dit: Allons dans les villages voisins et dans les villes d'alentour, afin que j'y prêche aussi». - Théophyl. Il se rend près de ceux qui ont un plus grand besoin de lui, parce que la lumière de sa doctrine ne devait pas être concentrée en un seul lieu, mais devait faire briller partout ses rayons. «Car, ajoute-t-il, je suis venu pour cela». - S. Chrys. Il manifeste ainsi tout à la fois le mystère de son anéantissement (cf. Ph 2,7-8) (c'est-à-dire de son incarnation), et le souverain domaine de sa divinité, en déclarant qu'il est venu spontanément dans le monde. D'après saint Luc, Notre-Seigneur dit : «C'est pour cela que j'ai été envoyé» (Lc 4,43), et il exprime ainsi le décret providentiel, et la volonté miséricordieuse du Père sur l'incarnation de son Fils.

«Et il prêchait dans leurs synagogues, et dans toute la Galilée. - S. Aug. (accord, des Evang., 2, 23). Dans cette prédication que d'après l'Évangéliste, Jésus fit en Galilée, il faut comprendre le sermon sur la montagne dont saint Matthieu fait mention et que saint Marc passe entièrement sous silence. Ce dernier Évangéliste ne dit rien qui ressemble à ce discours, si ce n'est quelques sentences sans liaison, qu'il sème dans son récit, parce que le Seigneur les a sans doute prononcées en d'autres circonstances.

Théophyl. A la doctrine, il joint les oeuvres; car peu après sa prédication, il chassa les démons, comme nous le voyons par ce qui suit: «Et il chassait les démons». C'est qu'en effet, si Jésus-Christ n'avait pas opéré de miracles, on n'aurait pas cru à sa parole. Et vous aussi, après avoir enseigné, agissez, afin que votre enseignement ne demeure pas stérile.

Bède. Si par le coucher du soleil on entend, dans le sens mystique, la mort du Sauveur, pourquoi ne pas voir sa résurrection dans le retour du matin? Après que sa lumière eut brillé sur le monde, il s'en alla dans le désert des nations idolâtres, et là il priait dans la personne de ses fidèles, parce qu'il excitait leurs coeurs par la grâce du Saint-Esprit à la vertu de prière.


vv. 40-45

6140 Mc 1,40-45

Bède. Après que la langue insidieuse des démons eût été réduite au silence, et que la femme qui avait été séduite la première fut guérie de sa fièvre, en troisième lieu, l'homme qui s'était perdu, en écoutant les paroles pernicieuses de son épouse, est guéri de la lèpre de son égarement, afin que l'ordre suivi par le Sauveur dans la réparation du genre humain, fût le même que l'ordre suivi dans la chute de nos premiers parents. «Et un lépreux vint à lui, le suppliant», etc. - S. Aug. (Harm. des Evang., 11, 19) Tout ce que dit ici saint Marc de la guérison de ce lépreux, nous autorise à croire que c'est le même dont saint Matthieu rapporte la guérison opérée par le Seigneur, lorsqu'il descendit de la montagne après son discours (Mt 8,2). - Bède. Et comme le Seigneur a déclaré qu'il n'était pas venu détruire la loi, mais l'accomplir (Mt 5,17), ce lépreux que la loi excluait du commerce des hommes, et qui espérait sa guérison de la puissance du Seigneur fit voir que la grâce qui avait la vertu de purifier les souillures d'un lépreux ne venait pas de la loi, mais lui était bien supérieure. Nous voyons éclater ici tout à la fois la vertu de la puissance du Seigneur, et la fermeté de la foi de cet homme: «Et il l'implorait à genoux en disant: Seigneur, si vous voulez, vous pouvez me guérir». Il se prosterna le visage contre terre (ce qui est une marque d'humilité et de confusion), pour apprendre à chacun de nous à rougir des fautes qui souillent notre âme. Mais la honte n'empêcha point l'aveu de sa misère. Il découvrit sa blessure et en implora le remède, et sa confession est pleine de religion et de foi: «Si vous voulez, dit-il, vous pouvez». Il fait dépendre la puissance du Seigneur de sa volonté. - Théophyl. Il ne dit pas: Si vous priez Dieu, mais: «Si vous voulez», comme un homme qui croit à la divinité du Sauveur. - Bède. Du reste, cet homme ne douta pas ni de la volonté du Seigneur ni de sa commisération, mais à la pensée de la lèpre dont il était couvert, il osait à peine en espérer la guérison.

«Or, Jésus, ému de compassion, étendit la main, et le touchant, lui dit: Je le veux; soyez guéri». - S. Jér. Il ne faut pas donner à ces paroles le sens que lui donnent la plupart des latins qui traduisent: «Je veux te guérir», mais il faut séparer les deux mots et lire: «Je le veux», puis à l'impératif: «Soyez guéri». - S. Chrys. (hom. 26 sur S. Matth., et hom. 21 de l'ouv. imp). Ce n'est point par sa seule parole qu'il guérit ce lépreux, mais il le touche de sa main, parce qu'il est écrit dans la loi de Moïse: «Celui qui aura touché un lépreux sera impur jusqu'au soir» (Lv 22,4-6). Il voulait montrer que cette souillure n'était qu'extérieure, et que la loi n'avait pas été portée pour lui, mais pour les simples mortels, et que pour lui, il est en réalité le Maître de la loi, et qu'il guérissait ce lépreux, non en serviteur, mais comme Maître de la loi; il convenait donc qu'il touchât ce lépreux, bien que cependant ce contact ne fût pas nécessaire pour opérer sa guérison. - Bède. Il le toucha aussi pour prouver qu'il ne pouvait contracter de souillures, lui qui venait en délivrer les autres. C'est d'ailleurs une chose vraiment admirable, que de voir le Sauveur guérir ce lépreux en se conformant à sa prière: «Si vous voulez, lui dit le lépreux, vous pouvez me guérir». «Je le veux, répond Jésus, vous voilà maître de ma volonté, soyez guéri». Voilà l'effet de ma commisération pour vous. - S. Chrys. En parlant ainsi, non seulement il ne détruit point, mais il confirme plutôt l'opinion qu'avait le lépreux de sa puissance. Il le guérit d'une seule parole; et il accomplit par cette oeuvre miraculeuse le voeu que le lépreux avait exprimé. «Dès qu'il eût parlé, la lèpre le quitta», etc. - Bède. Car il n'y a point d'intervalle entre l'oeuvre de Dieu et son commandement, parce que dans son commandement est renfermée son oeuvre: «Il a dit, et tout a été fait».

«Et Jésus le renvoya en lui disant d'un ton sévère: Gardez-vous de parler à personne de ce miracle». Jésus-Christ nous apprend ainsi à ne point rechercher l'estime des hommes, en retour de nos bonnes oeuvres: «Allez, montrez-vous au prince des prêtres». Or, il l'envoie au prince des prêtres pour faire constater sa guérison, et afin qu'il ne fût pas chassé hors du temple, mais qu'il lui fût permis de se joindre au peuple pour la prière publique. - Il l'envoie encore pour accomplir la loi et fermer la bouche à la malignité des Juifs. Il a opéré le miracle; il leur laisse le soin de le constater. - Bède. Il veut aussi faire comprendre au prêtre que cet homme devait sa guérison non à la vertu de la loi, mais à la grâce de Dieu qui est au-dessus de la loi.

«Et offrez pour votre guérison ce que Moïse a prescrit pour leur servir de témoignage». - Théophyl. Il leur commande d'offrir le présent qu'avaient l'habitude d'offrir ceux qui étaient purifiés, pour témoigner qu'il n'agissait pas contre la loi, mais qu'il la confirmait, puisqu'il en accomplissait les prescriptions.

Bède. Si l'on est surpris de voir le Seigneur approuver les sacrifices judaïques que l'Eglise rejette, il faut se rappeler qu'il n'avait point encore offert son holocauste dans sa passion. Or, les sacrifices figuratifs ne devaient cesser qu'après que le sacrifice qu'ils représentaient serait confirmé par le témoignage des Apôtres et la foi de tous les peuples.

Théophyl. Le lépreux publie le bienfait du Seigneur, malgré la défense qu'il lui en a faite: «Or, le lépreux s'en allant, commença à publier et à répandre la nouvelle de sa guérison. Il faut que celui qui a reçu un bienfait soit reconnaissant et rende grâce au bienfaiteur, bien que celui-ci n'ait point besoin de reconnaissance. - S. Grég. (Moral., 19, 10 ou 18 dans les anc. édit). (Mt 9,30) On demande ici avec raison pourquoi le miracle que le Seigneur avait opéré et qui par son ordre devait être tenu secret, ne put rester caché un seul instant. A cela, nous répondons que Jésus, qui avait opéré ce miracle, ordonna de le tenir secret, sans toutefois l'obtenir, pour apprendre à ses élus, dans les grandes choses qu'ils pourraient faire, à imiter son exemple en désirant rester cachés et en ne consentant à être mis en évidence qu'à regret, et pour l'édification des autres. On ne peut donc dire que le Sauveur voulut ici ce qu'il ne put obtenir, mais avec toute l'autorité de son caractère, il enseigne à ses membres quelles doivent être leurs intentions, et aussi ce qui doit arriver malgré leur volonté. - Bède. La guérison d'un seul homme amena au Seigneur une foule nombreuse: «En sorte qu'il ne pouvait paraître publiquement dans une ville, mais qu'il était obligé de se tenir dehors dans des lieux déserts. - S. Chrys. Car le lépreux publiait partout cette guérison merveilleuse, de sorte que tous accouraient pour voir celui qui l'avait opérée. C'est ce qui empêchait le Seigneur de prêcher l'Évangile dans les villes, et l'obligeait à demeurer dans les lieux déserts: «Et ils venaient en foule à lui de tous côtés».

S. Jér. Dans le sens mystique, notre lèpre, c'est le péché du premier homme, péché qui a commencé par envahir la tête, quand Adam a désiré les royaumes de ce monde. Car la racine de tous les maux, c'est la cupidité. Ainsi Giezi, pour avoir ouvert son coeur à l'avarice, est tout couvert de lèpre (2R 5,27) - Bède. Mais le Sauveur ayant étendu la main (c'est-à-dire le Verbe de Dieu s'étant incarné et s'étant mis en contact avec la nature humaine), l'a guérie de la lèpre de ses anciennes erreurs. - S. Jér. Or, cette lèpre qui est montrée au prêtre selon l'ordre de Melchisédech, est guérie moyennant l'offrande qui est faite, conformément aux paroles du divin Maître: «Donnez l'aumône et tout sera pur pour vous» (Lc 11). Quant à l'impossibilité où était Jésus d'entrer dans les villes, elle signifie qu'il ne s'est pas manifesté à tous, à ceux particulièrement qui recherchent les vaines louanges, les bruyantes acclamations des places publiques et la satisfaction de leur volonté propre, mais bien à ceux qui sortent dehors avec Pierre, qui aiment la solitude du désert, solitude que Jésus recherchait pour prier et pour nourrir le peuple; à ceux enfin qui sacrifient les vains plaisirs du monde et tout ce qu'ils possèdent, pour dire: «Le Seigneur est mon partage». Et la gloire du Seigneur se manifeste à ceux qui viennent de toutes parts (par les chemins unis comme par ceux qui sont plus difficiles), et que rien ne peut séparer de la charité de Jésus-Christ (Rm 8,35). - Bède. Après avoir opéré ce miracle dans la ville, le Seigneur se retira dans le désert pour montrer qu'il préfère la vie tranquille, éloignée des sollicitudes du siècle, et que c'est dans le désir d'en goûter les charmes qu'il consacre ses soins à la guérison des hommes.


Catena Aurea 6114